Tribunal de grande instance de Paris, 2e chambre 1re section, 20 décembre 2017, n° 16/15655

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 2e ch. 1re sect., 20 déc. 2017, n° 16/15655
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 16/15655

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

2e chambre

1re section

N° RG : 16/15655

N° MINUTE :

Assignation du :

30 Septembre 2016

JUGEMENT

rendu le 20 Décembre 2017

DEMANDERESSE

S.A.R.L. EMBASSY SERVICE

[…]

[…]

représentée par Maître Maher NEMER de la SELARL BOSSU & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R0295

DÉFENDEURS

Maître Maxime Y

[…]

[…]

représenté par Me Barthélemy LACAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0435

Maître Guillaume X

[…]

[…]

représenté par Me Barthélemy LACAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0435

S.A.S AURIS PSI

[…]

[…]

représentée par Me Anne ROMERO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0704

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles L.311-10 du Code de l’Organisation Judiciaire et 801 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Mme Z A, première vice-présidente adjointe, statuant en juge unique.

assistée de Juliette JARRY, greffière lors des débats et de D E-F, greffière lors de la mise à disposition.

DÉBATS

A l’audience du 27 Novembre 2017, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu le 20 décembre 2017.

JUGEMENT

Rendu publiquement par mise à disposition au greffe

Contradictoire

en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 2 avril 2013, la société Auris P.S.I a signé 3 mandats sans exclusivité avec l’agence immobilière Embassy Service portant chacun sur la vente d’un appartement au sein de l’immeuble sis 29, […] de Serbie dans le 16e arrondissement de Paris, moyennant une commission totale de 590 000 euros.

Ces mandats, conclus pour trois mois tacitement prorogés pour une durée maximale de douze mois supplémentaires sauf dénonciation, sont venus à expiration le 2 juillet 2014 et n’ont pas été renouvelés.

Courant 2015, l’agence immobilière fit visiter les trois appartements à Mme B C, pour le compte de la princesse Hayfa Bint Muhanna.

Le 10 novembre 2015, la société Auris P.S.I consentit une promesse de cession de ces trois biens immobiliers à la princesse Hayfa Bint Muhanna, reçue en l’étude de Maîtres Y et X, notaires à Paris.

La vente a été régularisée par acte notarié le 9 mai 2016, hors la présence de l’agence immobilière.

Par acte d’huissier du 30 septembre 2016, la société Embassy Service a assigné la société Auris P.S.I ainsi que les notaires rédacteurs, Mes Y et X afin de les voir condamner au paiement de dommages et intérêts.

Il y a lieu, pour un exposé détaillé des moyens des parties, de se reporter à leurs dernières écritures régulièrement notifiées en application de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Vu les dernières conclusions récapitulatives de la sarl Embassy Service notifiées par voie électronique le 27 septembre 2017,

Vu les dernières conclusions récapitulatives de la sas Auris P.S.I notifiées par voie électronique le 1er septembre 2017,

Vu les dernières conclusions récapitulatives de Me Y et Me X notifiées par voie électronique le 6 mars 2017,

Sur la responsabilité contractuelle de la sas Auris P.S.I

La société Embassy Service qui fait valoir sur le fondement des articles 1194 et 1231-1 du code civil que la société Auris P.S.I a engagé sa responsabilité contractuelle à son égard en refusant de lui verser le montant de la commission, sollicite sa condamnation au paiement de la somme de 590 000 euros.

Elle expose :

— qu’elle a fait visiter l’appartement à la princesse Hayfa Bint Muhanna,

— que cette dernière a formulé en suivant une offre d’achat au prix de 10 600 000 euros,

— que la société Auris P.S.I et les notaires rédacteurs de l’acte de vente ont fait appel à l’agence immobilière, en sollicitant notamment la transmission de documents, preuve qu’elle était associée à la vente,

— que ni les notaires ni la société Auris P.S.I ne l’ont avisée de la date de la signature du compromis de vente ni de l’acte authentique de vente alors même qu’ils avaient connaissance de la clause relative au paiement de la commission du contrat de mandat.

— que la société Auris P.S.I a ainsi manqué à ses obligation de sincérité et de loyauté à son cocontractant.

Elle ajoute que la société Auris a continué à solliciter les services de l’agence immobilière postérieurement à l’expiration du contrat de mandat, en lui demandant notamment de transmettre des documents au notaire rédacteur de l’acte de vente. En conséquence, la mission de vendre a été laissée entre les mains de l’agence immobilière.

La société Auris P.S.I conclut au débouté de cette demande et réplique que :

— la responsabilité contractuelle nécessite un contrat en cours de validité,

— un agent immobilier qui ne détient pas de mandat valable au moment où il effectue la présentation de l’acquéreur ne peut réclamer une commission,

— en l’espèce, le fondement de l’action est nul car les articles visés sont abrogés depuis l’ordonnance du 10 février 2016, en vigueur au 1er octobre 2016 soit avant l’assignation,

— les mandats ont pris fin le 2 juillet 2014, or la promesse de vente a été conclue avec l’acquéreur le 10 novembre 2015, soit bien après l’expiration du contrat de mandat,

— il appartenait à l’agence immobilière en sa qualité de professionnel de l’immobilier de veiller à renouveler les mandats dont elle entendait tirer rémunération.

Me X et Me Vintier concluent au rejet de cette demande et font valoir que le droit à commission est subordonné par la loi du 2 janvier 1970 à des conditions strictes parmi lesquelles un mandat écrit, régulier et en cours de validité. En l’espèce, le demandeur n’a pas de mandat en cours de validité, les conditions de son droit à rémunération ne sont pas remplies.

Sur ce,

Il convient en premier lieu de rappeler que

l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, ne concerne que les actes conclus après son entrée en vigueur le 1er octobre 2016, de sorte que les articles visés en demande ne trouvent pas ici à s’appliquer sans que pour autant, ainsi que le soutient la société Auris P.S.I sans en tirer de conséquences, cette erreur ne constitue une “cause de nullité du fondement de l’action”. Les articles visés en demande correspondent aux articles 1134 et 1147 anciens du code civil.

Cependant, ainsi que le soutiennent à juste titre les défendeurs, le droit à commission de l’agent immobilier est régi par la loi 70-9 du 2 janvier 1970 et par son décret d’application n°72-678 du 20 juillet 1972.

Plus précisément, il résulte de l’article 6 de la loi et de l’article 72 du décret, que seul un mandat écrit complet et régulier donné à l’agent immobilier peut légalement justifier sa prétention à la perception d’une rémunération.

En l’absence de production d’un mandat régulier en cours de validité et alors qu’un simple bon de visite ne peut suppléer cette carence, il convient en conséquence de débouter la société Embassy Services de sa demande de condamnation de la société Auris au paiement de la somme de 590 000 euros au titre de la commission qu’elle revendique dans le cadre de la vente litigieuse.

Sur la responsabilité délictuelle de l’étude notariale et de la société Auris

La société Embassy Service fait valoir que Me X et Me Y, et à titre subsidiaire la société Auris P.S.I, ont engagé leur responsabilité délictuelle à son égard, sur le fondement de l’article 1240 du code civil, en recevant le compromis de vente et l’acte authentique de vente sans s’assurer de la participation de l’agence immobilière, et sollicite leur condamnation au paiement de 590 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Elle allègue que :

— La société Auris a commis une faute en ne s’assurant pas de la prise en compte de la participation de l’agence immobilière au sein des actes de vente,

— elle a activement participé à la vente du bien et les notaires avaient connaissance de son existence pour lui avoir déjà demandé de leur fournir des documents et ne se sont pour autant pas assurés de sa présence à la signature de l’acte de vente,

— Le fait pour le vendeur et les notaires, d’évincer délibérément l’agence immobilière pour économiser le paiement de la commission est une manœuvre constitutive d’une faute délictuelle, qui a privé l’agence de l’opportunité de réclamer sa commission,

— Les tiers au contrat échappent à son effet obligatoire mais ne doivent pas en entraver l’exécution, au visa de l’article 1165 du code civil, or en écartant l’agence immobilière de la signature de l’acte de vente les notaires ont entravé l’exécution du contrat de mandat,

— Les notaires ont ainsi violé leur devoir d’information et de conseil qui impose de faire respecter les droits des parties.

Me Y et Me X font valoir qu’ils n’ont commis aucune faute susceptible d’engager leur responsabilité délictuelle. Le demandeur, qui est un simple créancier chirographaire, n’avait pas à intervenir à l’acte de vente et il n’appartenait pas aux notaires de veiller au règlement de la commission.

La société Auris P.S.I conclut au débouté de cette demande et réplique que :

— la responsabilité civile délictuelle fonde l’obligation de réparer un dommage en cas de faute, d’imprudence ou négligence et suppose la démonstration d’une faute d’un préjudice et d’un lien de causalité,

— le fondement de l’action est nul car les articles visés sont abrogés depuis l’ordonnance du 10 février 2016, en vigueur au 1er octobre 2016, soit avant l’assignation,

— la société Embassy Services ne rapporte pas la preuve d’une faute qui lui serait imputable alors qu’elle était déliée de tout engagement contractuel à son égard.

Sur ce,

L’absence de convocation de la société Embassy Services par les notaires ne saurait être jugée fautive à l’égard de ces derniers qui n’étaient nullement tenus de veiller à sa participation à l’acte de vente faute de détention par la société Embassy Services d’un quelconque droit sur l’immeuble ou sur le prix de vente,

La société Embassy Services est en conséquence déboutée de sa demande à leur encontre.

Sa demande formulée à titre subsidiaire à l’encontre de la société Auris P.S.I est de même rejetée, l’absence de mandat valable qui prive l’agent immobilier de son droit à commission ne lui ouvrant pas droit à la réparation du préjudice en résultant nonobstant sa participation effective à la vente.

A titre subsidiaire, sur l’enrichissement sans cause de la société Auris P.S.I

La sarl Embassy Service fait subsidiairement valoir que la société Auris P.S.I a bénéficié d’un enrichissement sans cause, au visa de l’article 1371 du code civil et des nouveaux articles 1300 et 1303 du même code, et sollicite la condamnation de la Société Auris P.S.I au paiement de 590 000 euros, car elle a vendu ses biens sans faire les démarches elle-même et sans payer de commission.

La société Auris P.S.I conclut au débouté de cette demande.

Sur ce,

En raison du caractère subsidiaire de l’action fondée sur l’enrichissement sans cause, la demande de ce chef est rejetée.

Sur les autres demandes

Sur la demande de dommages et intérêts

La sarl Embassy Service sollicite la condamnation de la Société Auris P.S.I au paiement de 100 000 euros au titre de sa résistance abusive.

Compte tenu de la solution apportée au litige, sa demande est rejetée.

Sur les frais irrépétibles

La société Auris P.S.I sollicite la condamnation de la sarl Embassy Service au paiement de 10 000 au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Compte tenu des termes du litige, l’équité commande de laisser aux parties la charge de leur frais irrépétibles.

Sur les dépens

Il résulte des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens. A la demande de Me X, de Me Y et de la société Auris P.S.I, il sera en outre fait application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Sur l’exécution provisoire

La solution apportée au litige ne justifie pas le prononcé de l’exécution provisoire

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal statuant publiquement par jugement contradictoire, en premier ressort par mise à disposition au greffe,

Déboute la société Embassy Services de ses demandes,

Rejette toutes demandes relatives au frais d’instance non compris dans les dépens,

Condamne la société Embassy Services aux dépens dont distraction au profit de Me Anne Romero et de Me Barthélémy Lacan, avocats, pour ceux dont ils auraient fait avance sans recevoir provision,

Dit n’y a voir lieu à exécution provisoire.

Fait et jugé à Paris le 20 Décembre 2017

La Greffière La Présidente

D E-F Z A

1:

Expéditions exécutoires délivrées le :

Copies certifiées conformes délivrées le :

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