Tribunal Judiciaire de Paris, 1er février 2021, n° 17/07381

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Sur la décision

Référence :
TJ Paris, 1er févr. 2021, n° 17/07381
Numéro(s) : 17/07381

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL

JUDICIAIRE

DE PARIS 1

9ème chambre 1ère section

N° RG 17/07381 – N ° P o r t a l i s 352J-W-B7B-CKRU2

N° MINUTE : 1 JUGEMENT rendu le 01 Février 2021

Assignations du : 15 et 20 Février 2017 12 et 15 Mars 2017

DEMANDEUR

Monsieur Z X […]

représenté par Maître Anne BERNARD-DUSSAULX, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0806

DÉFENDERESSES

BANQUE CIC NORD OUEST […]

représentée par Maître Didier SALLIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C0924

La Société NATWEST MARKETS PLC anciennement dénomée THE ROYAL BANK OF SCOTLAND PLC […]

Expéditions exécutoires délivrées le:

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Décision du 01 Février 2021 9ème chambre 1ère section

N° RG 17/07381 – N° Portalis 352J-W-B7B-CKRU2

représentée par Maître Clément DUPOIRIER du PARTNERSHIPS HERBERT SMITH FREEHILLS PARIS LLP, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #J0025

Société WORLDPAY AP LTD The Walbrook building […]

représentée par Maître A B du LLP ALLEN & OVERY LLP, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #J0022

Société SEROPH HOLDING BV Claudius Prinsenlaan […]

représentée par Maître Harold HERMAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #T03

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Jacques LE VAILLANT, Vice-président Patrick NAVARRI, Vice-président Marie-Albanie TERRIER, Vice-présidente

assisté de Sonia BOUCETTA, Faisant fonction de greffier, lors des débats et de la mise à disposition au greffe.

DÉBATS

A l’audience du 07 Décembre 2020 tenue en audience publique devant Marie-Albanie TERRIER, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux conseils des parties que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 01 Février 2021.

JUGEMENT

Rendu publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoire En premier ressort

******************

EXPOSE DU LITIGE
M. Z X a été démarché par la société Finanperf-Bank of Market, en vue d’investir des fonds sur leurs plateformes de “trading” en ligne. Cette société proposait des investissements en ligne sur le marché des changes Forex (foreign exchange), ainsi que des opérations de trading sur les options binaires.

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N° RG 17/07381 – N° Portalis 352J-W-B7B-CKRU2

Z X a investi la somme de 200 000 euros sur cette plate- formes en ligne, en procédant à des virements au cours de l’année 2014 de son compte ouvert dans les livres de le CIC NORD OUEST sur des comptes bancaires détenus par la société Worldpay AP, prestataire de services de paiement en ligne, auprès de The Royal Bank of Scotland PLC. Les fonds étaient ensuite mis à la disposition de la plate-forme de paiement en ligne Allcharge, détenue par la société Algocharge, devenue par la suite la société Seroph Holding BV.

Z X s’est rapidement trouvé dans l’impossibilité de retirer les fonds investis et leurs produits, tandis que ses interlocuteurs, après l’avoir informé de la perte de l’intégralité de ses placements, disparaissaient tout comme le site internet de la société de courtage.

Après avoir mis en demeure la société Worldpay AP, la société Seroph Holding BV, ainsi que les Banques émettrices et bénéficiaires des virements litigieux, de procéder au remboursement des fonds perdus, Z X a assigné devant le tribunal de grande instance de Paris, par exploits distincts en date des 15 et 20 février 2017, 13 et 15 mars 2017, les sociétés CIC NORD OUEST, The Royal Bank of Scotland PLC, Worldpay AP Ltd et Seroph Holding BV aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, leur condamnation in solidum au paiement de la somme de 200 000 euros, investie sur la plate-forme de trading litigieuse, et de la somme de 10 000 euros en indemnisation de son préjudice moral, outre la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le 24 novembre 2017, la société Seroph Holding BV a régularisé des conclusions d’incident devant le juge de la mise en état, aux fins de sursis à statuer soutenant que les faits dont se plaint le demandeur sont consécutifs à des agissements faisant l’objet d’une information judiciaire en cours et dans le cadre de laquelle cette société a été mise en examen le 20 mai 2016.

Par ordonnance du 19 mars 2018, le juge de la mise en état a rejeté la demande de sursis formée par la société Seroph Holding BV.

Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 3 janvier 2019, M. X demande au tribunal, sur le fondement de la directive 2005/60/CE du 26 octobre 2005, des articles 1240 et 1231-1 du code civil, et des articles L 561-5 et L 561-6 du code des marchés financiers de :

DIRE ET JUGER que les sociétés CIC NORD OUEST, Natwest Markets PLC, Worldpay AP Ltd et Seroph Holding BV ont commis une faute à l’origine des préjudices subis par M. Z X consécutivement à la perte des fonds investis sur la plateforme de trading en ligne litigieuse ; En conséquence,

- CONDAMNER in solidum les sociétés CIC NORD OUEST, Natwest Markets PLC, Worldpay AP et Seroph Holding BV à lui payer la somme de 200 000 Euros en réparation de son préjudice financier ;

- CONDAMNER in solidum les sociétés CIC NORD OUEST, Natwest Markets PLC, Worldpay AP et Seroph Holding BV à lui payer la somme de 10 000 Euros en réparation de son préjudice moral ;

- REJETER la demande reconventionnelle de la société La CIC NORD

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OUEST,

- ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir ;

- CONDAMNER tous succombant à lui payer la somme de 5 000 Euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNER tout succombant aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Anne BERNARD-DUSSAULX, Avocat au Barreau de Paris.

La société Seroph Holding BV a constitué avocat mais n’a pas conclu au fond.

Le CIC NORD OUEST conclut, selon ses écritures notifiées le 21 juin 2019 au débouté de l’intégralité des demandes de M. X et à sa condamnation au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec distraction au profit de son Me Didier SALLIN.

Aux termes de ses dernières écritures, notifiées le 17 mai 2019, la Worldpay AP demande au tribunal, de :

“DIRE ET JUGER, à titre principal, que Worldpay AP n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité, en conséquence, DÉBOUTER M. Z X et NatWest Markets PLC de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions à son encontre. Subsidiairement, DIRE ET JUGER que M. Z X ne démontre aucun lien de causalité entre une faute qu’aurait commise Worldpay AP et le préjudice qu’il prétend avoir subi. En conséquence, DÉBOUTER M. Z X et NatWest Markets PLC de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions à l’encontre de Worldpay AP. EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, DIRE ET JUGER que Worldpay AP n’est tenue par aucune obligation contractuelle ou légale de relever et garantir NatWest Markets PLC de toute condamnation pouvant intervenir à son encontre dans cette procédure. DIRE ET JUGER que l’appel en garantie formé par NatWest Markets PLC à l’encontre de Worldpay AP est privé de fondement. En conséquence, DEBOUTER M. Z X et NatWest Markets PLC de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions formées à l’égard de Worldpay AP METTRE Worldpay AP hors de cause. CONDAMNER M. Z X, subsidiairement NatWestMarkets PLC, à verser à Worldpay AP la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, CONDAMNER M. Z X , subsidiairement NatWest Markets PLC., aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maîtres A B et C D en application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.”

La société NatWest Markets PLC (anciennement dénommée The Royal Bank of Scotland PLC), par écritures régulièrement notifiées le 21 juin 2019, demande quant à elle au tribunal de:

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A titre principal

- JUGER qu’elle n’a commis aucun manquement à son obligation de vigilance et plus généralement n’a commis aucune faute ; En conséquence,

- REJETER l’ensemble des demandes, fins et prétentions de M. X à son encontre; A titre subsidiaire

- JUGER que l’imprudence fautive de M. X est la cause exclusive de son dommage ; En conséquence,

- REJETER l’ensemble des demandes, fins et prétentions de M. X à son encontre;

A titre plus subsidiaire :

- DIRE et JUGER que le montant maximum qui pourra être alloué à M. X relativement aux virements qui ont transité sur le compte n°00200791559 ouvert dans les livres de The Royal Bank of Scotland est de 199.000 euros ;

- REJETER la demande de condamnation de NatWest Markets plc à verser à M. X 10.000 euros en réparation du préjudice moral ; En tout état de cause,

- DIRE et JUGER que Worldpay AP sera tenue de la garantir de toute condamnation pouvant intervenir à son encontre ;

- CONDAMNER M. X, subsidiairement Worldpay AP, au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

- ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;

- CONDAMNER M. X, subsidiairement Worldpay AP aux entiers dépens.”

L’ordonnance de clôture est intervenue le 14 octobre 2019.

Après renvoi, l’affaire a été appelée à l’audience du 7 décembre 2020, et la décision mise en délibéré au 1 février 2021.er

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il sera relevé que M. X ne conteste pas être l’auteur des ordres de virements depuis le compte ouvert à son nom au CIC NORD OUEST vers les comptes ouverts dans les livres de la société The Royal Bank of Scotland PLC par la société Worldpay AP, qui était liée depuis le 19 février 2009, ainsi que le démontre le contrat versé à la procédure intitulé “Processing Agreement Contract”, par une convention portant fourniture de solutions de paiement et de réception de fonds avec la société de droit israélien Charge It, à laquelle a succédé la société de droit néerlandais Seroph Holding BV.

En vertu de cette convention, la société Worldpay AP mettait à la disposition de la société Seroph Holding BV les fonds perçus par elle de l’investisseur français sur son compte ouvert dans les livres de la Royal Bank of Scotland.

Cette convention entre la société Worldpay AP et la société Seroph Holding BV a été dénoncée par Worldpay AP en juillet 2014.

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Il est enfin établi que le bénéficiaire final de ces opérations de paiement est une société de courtage en ligne, Finanperf-Bank of Market figurant sur la liste noire établie par l’Autorité des marchés financiers, depuis le mois de février 2014 (pièce 8 communiquée par Natwest Markets PLC).

Dans ce contexte, Z X estime, pour l’essentiel, que le CIC NORD OUEST, la Royal Bank of Scotland PLC, la société Worldpay AP ainsi que la société Seroph Holding BV ont manqué à l’obligation de vigilance qui repose sur elles dans le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux, en application de la directive 2005/60/CE du 26 octobre 2005 et des articles L 561-5 et L.561-6 du Code monétaire et financier, ces dispositions les contraignant à identifier le bénéficiaire effectif d’une transaction ainsi que de pratiquer un examen attentif des opérations effectuées en veillant à ce qu’elles soient cohérentes avec la connaissance actualisée qu’elles ont de leur client. Il soulève également un manquement de ces sociétés à leur devoir de vigilance, lequel leur imposerait de déceler les anomalies tant matérielles qu’intellectuelles qui affectent le fonctionnement d’un compte bancaire ouvert dans leurs livres.

Sur le manquement à l’obligation de vigilance fondée sur le dispositif législatif de lutte contre le blanchiment de capitaux
M. X reproche à l’ensemble des sociétés défenderesses, en leur qualité d’établissement bancaire ou de sociétés prestataires de service de paiement, un manquement à l’obligation de vigilance qui pèse sur elles dans le cadre de la lutte contre le blanchiment de capitaux en application de la directive 2005/60/CE du 26 octobre 2005 et des articles L 561-5 et L 561-6 du code de commerce, en ne se renseignant pas sur la destination des fonds ainsi que sur l’objet de l’opération et l’identité de la personne qui en bénéficiera de façon effective.

En application des articles L. 561-1 et L. 561-6 alinéa 2 du code monétaire et financier il appartient aux banques d’exercer sur la relation d’affaires une vigilance constante ainsi qu’un examen attentif des opérations effectuées en veillant à ce qu’elles soient cohérentes avec la connaissance actualisée qu’elles ont de leur client. Par ailleurs, l’article L. 561-10-2-II du code monétaire et financier précise que lorsqu’une opération apparaît particulièrement complexe ou d’un montant inhabituellement élevé ou ne paraît pas avoir de justification économique ou d’objet licite, la banque doit se renseigner auprès du client sur l’origine des fonds et la destination des sommes ainsi que sur l’objet de l’opération et l’identité de la personne qui en bénéficie.

Les déclarations qu’effectue une banque à la suite de ses contrôles à la Cellule de renseignement financier nationale sont confidentielles. Leur existence et leur contenu ne peuvent être portés à la connaissance du propriétaire des sommes inscrites dans ses livres ou à l’auteur des opérations de mouvements de capitaux dont la banque sait ou soupçonne qu’elles proviennent d’une infraction visée à l’article L. 561- 15 du code monétaire et financier ou qu’elles participent au financement du terrorisme. La divulgation de cette information à l’une de ces personnes est constitutive d’un délit aux termes des articles L. 561-1 alinéa 3, L. 561-19 et L. 574-1 du code monétaire et financier.

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Il en résulte que la réglementation instituant des obligations relatives à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme a pour seule finalité la détection de sommes et d’opérations en provenance de ces infractions mais que l’obligation spécifique de vigilance qu’elle édicte n’est pas destinée à protéger les intérêts particuliers du détenteur du compte bancaire concerné par les opérations suspectes.

M. X n’est donc pas fondé à rechercher la responsabilité des sociétés défenderesses pour manquement à leur obligation de vigilance prévue par les articles L. 561-1 et suivants du code monétaire et financier, ou par la directive européenne 2005/60/CE transposée par ces dispositions du code monétaire et financier.

Sur la responsabilité de la société Seroph Holding BV

Le demandeur estime, en particulier pour cette société, qu’elle a commis une faute en fournissant à la société de trading litigieuse des services de paiement, sans être habilitée à réaliser de telles opérations en France. Il lui reproche, par ailleurs, d’avoir fourni un service de paiement à cette société de courtage non régulée alors qu’elle ne pouvait ignorer ses activités et pratiques en France. Il souligne, à cet égard, que la société Seroph Holding BV est entendue en qualité de témoin assisté pour les infractions de complicité d’escroquerie en bande organisée, de blanchiment d’escroquerie en bande organisée, d’exercice illégal de l’activité de prestataire de service de paiement et de complicité d’exercice illégal de prestataire de service d’investissement. Elle serait, en outre, mise en examen pour exercice illégal de l’activité de prestataire de service de paiement et complicité d’exercice illégal de l’activité de prestataire de service d’investissement.

En l’absence de relation contractuelle entre la société Seroph Holding BV et le demandeur, la responsabilité de cette société ne peut être recherchée que sur le fondement général de la responsabilité délictuelle, édictée à l’article 1382 du code civil, dans sa rédaction applicable aux faits de l’espèce.

À cet égard, aux termes de l’article 4 du règlement du parlement européen et du conseil du 11 juillet 2007 dit Rome II, il est spécifié à titre de règle générale que : « 1. Sauf dispositions contraires du présent règlement, la loi applicable à une obligation non contractuelle résultant d’un fait dommageable est celle du pays où le dommage survient, quel que soit le pays où le fait générateur du dommage se produit et quels que soient le ou les pays dans lesquels des conséquences indirectes de ce fait surviennent. »

Il importe donc peu que la société Seroph Holding BV soit une société de droit néerlandais, et que sa faute soit recherchée à l’occasion de la mise en oeuvre de relations contractuelles à l’égard de la société Finanperf-Bank of Market dont tout est ignoré dans la présente procédure, puisque le lieu de survenance du dommage doit être considéré comme étant celui du versement des fonds qui ne donnera lieu à aucune restitution. Or, dans le cas présent, les investissements litigieux ont été réalisés au moyen d’un compte ouvert dans les livres de la société The royal bank of Scotland PLC détenu en France pour

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présenter le numéro IBAN “FR76…” (Pièce 2 du demandeur). Le lieu de remise des fonds est incontestablement situé en France, de sorte que la loi française est parfaitement applicable au litige.

L’article L. 521-2 du code monétaire et financier interdit à toute personne autre que celles mentionnées à l’article L. 521-1 de ce code de fournir des services de paiement au sens du II de l’article L. 314-1 à titre de profession habituelle.

Par ailleurs, les conditions pour pouvoir être un établissement de crédit sont strictement encadrées par les dispositions du code monétaire et financier, qui imposent notamment à l’article L. 522-6 d’obtenir un agrément délivré par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

À cet égard, la société Seroph Holding indiquait elle-même devant le juge de la mise en état intervenir sur le marché des prestations de service de paiement sur internet sous la dénomination commerciale Algocharge, et reconnaissait avoir passé des contrats avec diverses plateformes de trading en ligne sur le marché Forex et des options binaires. Elle précisait que les faits qui ont conduit à sa mise en examen, ses relations d’affaires et ses liens contractuels avec les sociétés de trading Aston Invest Ltd, Bforex Ltd, […], étaient strictement identiques à la situation qui a conduit M. X à agir à son encontre au civil.

Ainsi, en dénonçant la similitude parfaite des faits rendant, selon elle, nécessaire un sursis dans l’attente de l’issue de la procédure d’instruction pour laquelle elle était mise en examen, elle reconnaissait nécessairement avoir fournis des solutions de paiements par virements bancaires au profit de la société Finanperf-Bank of Market.

En revanche, la société Seroph Holding BV ne rapporte pas la preuve qu’elle aurait été habilitée à réaliser, à partir du territoire français, de telles opérations de paiement.

Au-delà, le prestataire d’un service de paiement est tenu d’une obligation générale de prudence et de vigilance tout au long de sa relation contractuelle avec ses clients.

Or, au cas particulier, il est acquis que la société Finanperf-Bank of Market n’a pas été autorisée par l’Autorité des marchés financiers à proposer du trading d’options binaires, tandis qu’une campagne de mise en garde contre ces prestations financières à haut risque était réalisée par l’AMF pour sensibiliser non seulement les investisseurs mais également les prestataires de services bancaires ou de paiements. Ainsi la société Bank of Market était précisément identifiée par l’AMF dès février 2014, soit à l’époque des virements litigieux, comme étant

“non autorisé à proposer des opérations de trading d’options binaires”. Elle ne disposait pas elle-même de l’agrément pour proposer sur le territoire français des prestations d’investissements financiers.

La société Seroph Holding BV aurait dû, par conséquent, s’assurer de l’objet de ces paiements, alors que les fonds étaient reversés pour le compte d’autrui par l’intermédiaire d’un compte bancaire laissé à sa

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disposition en France et avaient pour origine un ordre de paiement également émis en France.

Ces manquements au devoir de vigilance ont rendu possible les virements de fonds au profit de la société Finanperf-Bank of Market annonçant réaliser des opérations de trading, sans pour autant y être autorisée. Ils sont donc intervenus directement dans la réalisation du préjudice du demandeur. Ces fautes sont donc de nature à engager la responsabilité délictuelle de la société Seroph Holding BV à l’égard de M. Z X.

Sur la responsabilité de la société Worldpay AP

Le demandeur se prévaut, à l’encontre de la société Worldpay AP, d’un manquement en mettant à la disposition de la société Seroph Holding BV les comptes bancaires ouverts en France qu’elle détenait dans les livres de la banque Royal Bank of Scotland PLC, alors qu’elle ne pouvait ignorer que la société Seroph Holding BV ne disposait pas de l’agrément de l’Autorité de contrôle prudentiel et de régulation, et n’était donc pas habilitée à fournir des prestations de service de paiement en France. Il prétend que l’intervention de la société Worldpay AP dans les opérations d’investissement que lui proposaient la société de trading en ligne l’a convaincu du sérieux de ces prestations. Il lui reproche ainsi d’avoir donné sa caution morale à l’escroquerie dont il aurait été victime. Il relève que pour d’autres victimes d’escroquerie identique à celle qui a subi, la société Worldpay AP a reconnu sa responsabilité et les a remboursées de leurs pertes financières.

La société Worldpay AP soutient, quant à elle, avoir signé au Royaume-Uni avec Seroph Holding BV, société de droit néerlandais, une convention de prestation de service de paiement, sans avoir à s’assurer de l’agrément en France de cette société pour proposer des opérations financières ; elle estime que les dispositions du code monétaire et financier ne lui sont pas applicables, pas davantage que la directive en application de la directive 2005/60/CE du 26 octobre 2005 qui devait faire l’objet d’une transposition en droit anglais. Elle précise qu’en aucun cas la société Seroph Holding n’a fourni des services de paiement en France ou à des consommateurs français. Au demeurant, elle indique être totalement étrangère à la société Finanperf-Bank of Market de trading en ligne à l’origine de la perte des fonds de M. X, dont elle estime que l’absence totale de prudence dans sa recherche d’investissement sans s’assurer préalablement de la fiabilité de ses interlocuteurs est exclusivement à l’origine de son préjudice. Elle dément avoir jamais entrepris de rembourser, ou d’indemniser aucun investisseur ayant transféré des fonds vers des sites de courtage. Elle aurait seulement, en de rares occasions, donné suite aux instructions de son ancien client, Seroph Holding BV, consistant à annuler certaines opérations de paiement.

Ainsi que cela a été développé à l’égard de la responsabilité de la société Seroph Holding BV, la loi française trouve bien application en l’espèce, et ce quelque soit la nationalité des sociétés en cause, en application de l’article 4 du règlement du parlement européen et du conseil du 11 juillet 2007 dit Rome II, puisque les versements de fonds

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à l’origine du litige ont été réalisés par l’intermédiaire d’un compte bancaire ouvert en France.

Il résulte des pièces versées aux débats que Worldpay AP est une société de droit anglais qui exerce l’activité de prestataire de services de paiement. Elle indique avoir obtenu auprès de la Financial Conduct Authority l’autorisation d’exercer ces activités dans les pays de l’espace économique européen. Elle a pour clients, non seulement des sites marchands qui commercialisent des produits dans divers pays, mais également des fournisseurs de solutions de paiement qui ont recours à son réseau de 250 comptes bancaires à l’échelle internationale. C’est dans ce cadre, qu’elle s’est engagée avec la société Charge It Ltd, devenue Seroph Holding BV, fournisseur de solutions de paiement, suivant une convention intitulée « Processing Agreement Contract », le 19 février 2009.

La société Worldpay AP reconnaît expressément, dans ses écritures, que la société Charge It Ltd, à laquelle Seroph Holding BV a succédé, s’est engagée dans la convention en cause en qualité de fournisseur de solutions de paiement. Du reste, elle confirme elle-même, connaître la société Seroph Holding BV comme exerçant la même activité que la société Charge It Ltd.

En application de ce contrat, la société Worldpay AP a mis à la disposition de la société Seroph Holding BV des comptes ouverts en France dans les livres de la Royal Bank of Scotland, ainsi que le démontrent les divers ordres de virement versés à la procédure, réalisés sur un compte bancaire ouvert au nom de la société Worldpay AP et dont le numéro commence par les lettres “FR”. La société Worldpay AP devait dès lors s’assurer que son cocontractant était habilité à réaliser, à partir du territoire français, de telles opérations de paiement. D’ailleurs, la convention liant la société Worldpay AP et la société Seroph Holding BV mettait à la charge de cette dernière l’obligation de justifier des agréments ou autorisations requis pour son activité. Ainsi, l’article 5 du contrat du 19 février 2009 précisait-il à cet égard que chaque partie « exécutera ses obligations résultant du présent contrat conformément au droit applicable, à toutes les lois, à tous les textes législatifs et à l’ensemble des autres règles, réglementations, instructions, codes de pratique et lignes directrices juridiquement contraignants applicables à tout moment dans la juridiction dans laquelle cette partie exerce ses activités et dans toutes les juridictions vers ou à partir desquelles des paiements doivent être effectués », « fera tout son possible pour transmettre et apporter à l’autre partie les informations et la coopération, et concéder à l’autre partie les licences éventuellement nécessaires uniquement pour permettre la prestation des services de paiement en vertu du présent contrat » et « obtiendra et conservera toutes les autorisations et licences gouvernementales et réglementaires et accomplira toutes les formalités nécessaires à ses activités commerciales et à son utilisation ou sa fourniture des Services de Paiement ou à leur réalisation (le cas échéant) et se conformera à toutes les lois, réglementations et conventions du marché applicables à ces activités commerciales et à l’utilisation des Services de Paiement OU à leur réalisation ».

Aussi, il doit être retenu que la société Worldpay AP a manqué à son obligation générale de diligence, en ne s’assurant pas que la société

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Seroph Holding disposait bien de l’agrément de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

Elle a donc commis un manquement à son obligation de vigilance.

Cela étant, le défaut d’agrément en France du prestataire de service de paiement, acquéreur des services de paiement offerts par la société Worldpay AP, n’a pas de rapport direct avec la dissipation des fonds réalisées par la société de trading Finanperf-Bank of Market, tiers à la société Worldpay AP, laquelle pouvait parfaitement ignorer la nature de ses activités.

Par suite, le lien de causalité entre le manquement réalisé par la société Worldpay AP et le préjudice du demandeur fait défaut pour retenir la responsabilité délictuelle de celle-ci.

Au-delà, aucun élément ne démontre que la société de trading Finanperf-Bank of Market se soit prévalue d’un partenariat quelconque avec la société Worldpay AP pour convaincre M. X d’investir auprès d’elle ou qu’il y ait eu le moindre échange entre la société Worldpay AP et celui-ci. D’ailleurs, il ne saurait se déduire des faits que le demandeur ait eu une connaissance approfondie et spécifique des activités de la société Worldpay AP de nature à penser que cette société intervenait dans les opérations de spéculation qui lui étaient proposées.

Enfin, il ne saurait être déduit des échanges de messages électroniques versés aux débats, au demeurant non traduits de la langue anglaise, et dont l’absence de contexte ne permet pas d’apprécier s’il s’agit de remboursements émanant de la société Worldpay AP ou d’ordres de paiement réalisés à la demande de Seroph Holding BV, une reconnaissance de responsabilité de la société Worldpay dans des situations identiques à celle de M. X.

La responsabilité de la société Worldpay ne pourra donc pas davantage être retenue en l’espèce sur un fondement quasi-délictuel.

Sur la responsabilité de la société The Royal Bank of Scotland

Le demandeur reproche à la société The Royal Bank of Scotland un manquement à son obligation de vigilance en ne vérifiant pas l’activité et le partenariat conclu par sa cliente Worldpay avec la société Seroph Holding. Il estime qu’elle aurait dû s’assurer que Seroph Holding ne propose pas de service de paiement sans autorisation à la société Finanperf-Bank of Market. La multitude des mouvements entre les comptes Seroph Holding et Worldpay auraient dû l’amener à procéder à des vérifications.

Il relève, à cet égard, que consciente de sa responsabilité et de son implication dans ces montages frauduleux, la banque a restitué à un certain nombre de victimes les fonds qu’elles avaient investis sur ces plateformes de courtage en ligne dont elle hébergeait les comptes jusqu’au mois de juillet 2014.

La Natwest Markets PLC, anciennement dénommée The Royal Bank of Scotland PLC, fait principalement valoir qu’elle n’était tenue d’aucune obligation de vigilance à l’égard de M. X, la vigilance

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Décision du 01 Février 2021 9ème chambre 1ère section

N° RG 17/07381 – N° Portalis 352J-W-B7B-CKRU2

du banquier étant fonction de l’identité et de l’activité de son client et alors que les sociétés de courtage en cause n’ont jamais été ses clientes. Le seul prestataire de paiement agréé, en relation contractuelle avec la Royal Bank of Scotland PLC était la société Worldpay pour laquelle aucun manquement au devoir ou à l’obligation de vigilance ne saurait lui être reprochée. Elle dément avoir restitué à d’autres victimes de cette escroquerie le montant des fonds transités sur ses comptes. En tout état de cause, elle estime que l’imprudence de M. X, qui a investi une somme substantielle auprès de prestataires qu’il ne connaissait pas, sans effectuer la moindre vérification et sur la foi de promesses de rendements irréalistes est la cause exclusive de son dommage.

Il appartient au banquier qui entre en relation avec un client de procéder à certaines vérifications, en raison des risques que son activité pourrait faire courir aux tiers, et s’agissant d’un établissement de paiement, il lui appartient de s’assurer qu’il est agréé en cette qualité. En revanche, un établissement bancaire ne peut pas intervenir dans les affaires de ses clients, et par suite rechercher la raison des opérations effectuées par ses clients, ou la destination des fonds.

Au cas particulier, il est établi par le certificat délivré par la Financial conduct Authority et la Prudential regulation Authority que la société Worldpay AP était agréée pour l’activité de prestations de service de paiement, mais qu’elle bénéficie également d’un « passeport out » « in the European Economic area », dont le territoire français. La société The Royal Bank of Scotland avait pour seul client la société Worldpay AP, laquelle mettait à disposition les comptes ouverts dans ses livres à la société Seroph Holding BV.

Dans ces conditions, il n’appartenait pas à la société The Royal Bank of Scotland de s’enquérir auprès de la société Worldpay AP de l’identité des bénéficiaires effectifs des virements litigieux, ni même des raisons de leur réalisation.

Il ne saurait, dans ces conditions, lui être reproché, ainsi que le fait le demandeur, d’avoir manqué à son obligation de vigilance au regard des activités réalisées par la société Finanperf-Bank of Market qui lui était totalement étrangère.

Au surplus, les échanges de courriers électroniques produits par le demandeur aux débats entre la société Worldpay AP et le conseil d’une victime d’une escroquerie similaire, auxquels la société The Royal Bank of Scotland PLC ne participe pas, ne sauraient constituer une reconnaissance de responsabilité de cette société.

Il convient de mettre la société NatWest Marckets PLC, anciennement dénommée The Royal Bank of Scotland PLC, hors de cause et rejeter les demandes émises par M. X à son encontre.

Enfin l’appel en garantie de NatWest Marckets PLC à l’encontre de la socité Woldpay est par conséquent sans objet en raison du rejet des demandes de M. X.

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Sur la responsabilité de le CIC NORD OUEST
M. Z X reproche au CIC NORD OUEST d’avoir manqué à son devoir de vigilance en ayant déféré à ses ordres de virements de 199 999 euros vers le compte de la société Worldpay ouvert dans les livres de la Royal Bank of Scotland, alors que de tels virements étaient indiscutablement anormaux au regard du fonctionnement habituel de son compte bancaire. Il lui reproche de n’avoir jamais pris contact avec lui pour s’assurer de l’objet de ces virements.

Le CIC NORD OUEST estime ne pas avoir commis de faute ayant soit régulièrement rempli l’obligation résultant du mandat de payer constitué par les 15 ordres de virements émanant de son client, soit parce que ces virements étaient directement réalisés par M. X lui-même sans intervention de la banque. Elle rappelle que si elle a été destinataire d’un mail émanant de Finanperf transféré par son client, celui-ci confirmait l’ordre de paiement en indiquant “merci d’effectuer les 2 virements. Tout est OK.”. Elle rappelle que ces virements n’étaient pas au profit de la société Bank of Market mais au profit de la société Worldpay. tandis que rien dans ces opérations ne pouvait faire apparaitre la dénomination de Bank of Market. Ces opérations ne présentaient aucun caractère complexe qui auraient justifier une vigilance particulière. Au demeurant, elle était tenue d’une obligation générale de non-immixtion dans les affaires de son client. Le montant de l’opération ne saurait à lui seul permettre de caractériser une anomalie apparente tandis que l’ordre de paiement émanait du bon client et n’était pas un faux ordre, et qu’il n’avait aucun caractère frauduleux. Enfin, elle soutient qu’il n’y a aucun lien de causalité entre le virement litigieux et le préjudice subi par M. X.

Sur ce, il n’est pas discuté que M. X est l’auteur des ordres de paiement litigieux, lesquels sont par conséquent parfaitement authentiques.

Par ailleurs, la lecture des relevés du compte courant de M. X à l’époque des faits permet de relever que des mouvements plus de 10.000 euros apparaissaient régulièrement que ce soit au débit ou au crédit de ce compte. Le caractère extraordinaire des ordres de virements réalisés n’est donc démontré au cas particulier.

Enfin, si le CIC NORD OUEST a été destinataire, par l’intermédiaire de son client, d’un message électronique émanant de la Société Finanperf (pièce 17 et 18 du CIC NORD OUEST), ce message ne fait à aucun moment allusion à la dénomination Bank of Market, spécifiquement identifiée par l’AMF et qui aurait pu alerter la banque sur la finalité frauduleuse de l’opération d’investissement qui était proposée à son client, tandis que M. X prend la peine de préciser à l’agent du CIC NORD OUEST de bien vouloir effectuer les deux virements sur le compte dont le relevé d’identité bancaire est joint.

Il s’ensuit qu’aucune anomalie apparente manifestant le caractère frauduleux de l’ordre de paiement n’a ainsi pu alerter la banque et mettre à sa charge une obligation de vigilance.

Il ne peut non plus reprocher à l’établissement teneur de compte de ne pas avoir interrogé son client sur l’objet de ces virements, alors que le

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banquier ne doit pas s’immiscer dans les affaires de son client. Il n’appartient pas à un établissement bancaire, en effet, de se renseigner auprès de son client sur l’identité du bénéficiaire effectif de ce virement et de lui conseiller de renoncer à l’investissement qu’il souhaitait faire au titre de son obligation générale de vigilance. A cet égard, le banquier n’est pas tenu, sauf convention dont le principe n’est pas évoqué, d’un devoir de conseil ou de mise en garde, sur des produits auxquels il est étranger.

Dans ces conditions, le demandeur n’établit pas la faute de le CIC NORD OUEST en ayant déféré à ces ordres de virement, qui étant simple mandataire de son client, n’a pas à contrôler l’usage de fonds dont il avait la libre disposition.

Sur le préjudice de M. X
M. X sollicite le remboursement intégral des sommes investies par l’intermédiaire du compte ouvert auprès de la Royal Bank of Scotland PLC, soit la somme de 200.000 €. Il indique connaître aujourd’hui de grandes difficultés pour subvenir aux besoins de sa famille. Enfin, il se prévaut de la souffrance du sentiment d’avoir été victime d’une escroquerie pour solliciter la somme de 10.000 € au titre de son préjudice moral.

Les manquements retenus à l’encontre de la société Seroph Holding BV sont de nature à avoir fait perdre à M. X la chance de contracter réellement avec une société de trading en ligne. Cette perte de chance ne saurait toutefois permettre au demandeur d’être indemnisé du montant exact des sommes investies alors qu’en contractant réellement avec de telles sociétés, proposant des investissements sur le marché très volatile des changes Forex (foreign exchange), non régulé, ainsi que sur des opérations de trading sur les options binaires, générant un gain connu à l’avance ou la perte totale de la somme investie, il s’exposait fortement à une perte au moins partielle de ses fonds.

Au delà, l’absence de prudence de M. X est également intervenue dans la réalisation de ce dommage, puisqu’à l’époque des faits tant l’Autorité des marchés financiers que la presse de grand public avertissaient des risques d’arnaques inhérents à de telles propositions de services d’opérations financières.

Dans ces conditions, il sera accordé à M. X une indemnité d’un montant de 80.000 € en réparation de son préjudice.

Enfin, le sentiment d’avoir été trompé et d’être la victime d’une escroquerie justifie l’allocation d’une indemnité financière d’un montant de 3.000 €.

Sur les demandes accessoires

Les dépens exposés par M. X seront laissés à la charge de la société Seroph Holding BV qui succombe, avec distraction au profit du conseil du demandeur.

Cette société sera par ailleurs condamnée à payer au demandeur une somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

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L’équité commande, en revanche, de débouter les sociétés CIC NORD OUEST, Natwest Markets PLC et Worldpay AP des demandes qu’elles formulent sur ce fondement.

Ayant formé leur demande de condamnation aux dépens à l’encontre de M. X dont une partie des demandes est déclarée bien fondée, les sociétés CIC NORD OUEST, Natwest Markets PLC et Worldpay AP seront déboutées de leur demande formée à ce titre et conserveront la charge des dépens qu’elles ont exposés.

L’exécution provisoire compatible avec la nature du litige et l’ancienneté des faits sera ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant par jugement contradictoire, rendu en premier ressort, par mise à disposition au greffe

DÉBOUTE M. Z X de ses actions formées contre la CIC NORD OUEST, la société Natwest Markets PLC (anciennement dénommée The Royal Bank of Scotland PLC) et la société Worldpay AP ;

CONDAMNE la société Seroph Holding BV à payer à M. Z X les sommes de :

- quatre-vingt mille euros (80.000 €) en réparation de son préjudice financier,

- trois mille euros (3.000 €) en réparation de son préjudice moral,

- trois mille euros (3.000 €) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

LE DÉBOUTE du surplus de ses demandes indemnitaires ;

DÉBOUTE la société Natwest Markets PLC de son appel en garantie formé à l’encontre de la société Worldpay AP ;

CONDAMNE la société Seroph Holding BV aux entiers dépens exposés par M. X, dont distraction au profit de Maître Anne BERNARD-DUSSAULX, Avocat au Barreau de Paris;

DÉBOUTE le CIC NORD OUEST, Natwest Markets PLC et Worldpay AP de leurs demandes plus amples, notamment celles formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens ;

DIT que les sociétés CIC NORD OUEST, Natwest Markets PLC et Worldpay AP conserveront la charge des dépens qu’elles ont exposés ;

ORDONNE l’exécution provisoire de la présente décision.

Fait et jugé à Paris le 01 Février 2021

Le Greffier Le Président

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Tribunal Judiciaire de Paris, 1er février 2021, n° 17/07381