Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 7 février 2020, n° 18/04732

  • Salariée·
  • Licenciement·
  • Heures supplémentaires·
  • Employeur·
  • Travail·
  • Voyage·
  • Faute grave·
  • Forfait jours·
  • Convention de forfait·
  • Congé

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-3, 7 févr. 2020, n° 18/04732
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 18/04732
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Marseille, 27 février 2018, N° 15/03393
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 07 FEVRIER 2020

N° 2020/ 50

RG 18/04732

N° Portalis DBVB-V-B7C-BCEAL

B X

C/

SASU COMPAGNIE DU PONANT

Copie exécutoire délivrée le :

à :

-Me Delphine VERRIER, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Séverine ARTIERES, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARSEILLE en date du 28 Février 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 15/03393.

APPELANTE

Madame B X, née le […] à […], demeurant […]

représentée par Me Delphine VERRIER, avocat au barreau de MARSEILLE et Me G-Marie COSTE FLORET, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

SASU COMPAGNIE DU PONANT, demeurant […]

représentée par Me Séverine ARTIERES, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Claire ROUYER, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 03 Décembre 2019 en audience publique. Conformément à l’article 785 du code de procédure civile, Madame Dominique DUBOIS, Président de chambre a fait un rapport

oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Erika BROCHE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Février 2020.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Février 2020,

Signé par Madame Dominique DUBOIS, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Madame B X a été embauchée par la COMPAGNIE DU PONANT le 9 novembre 2005 par contrat à durée déterminée, puis en contrat à durée indéterminée le 5 mai 2006 en qualité de «Directeur de Production», statut cadre, Groupe G.

Le 1er janvier 2013, Madame X a fait l’objet d’une promotion professionnelle et était nommée au poste de « Directrice Exécutive Productions Expéditions et Nouveau Programmes ».

Par avenant au contrat de travail du 23 juillet 2015, Madame X a bénéficié d’une augmentation de salaire individuelle, avec effet rétroactif au 1er janvier 2015.

Madame X exerçait alors ses fonctions sous l’autorité et selon les directives exclusives de Monsieur G-H Y, Président CEO et représentant légal de la COMPAGNIE DU PONANT, et de C A, Directrice Produit.

La COMPAGNIE DU PONANT appliquerait, au plus favorable pour le salarié, deux conventions collectives : la convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigations du 14 septembre 2010 et la convention collective du personnel des agences de voyages et de tourisme du 12 mars 1993.

C’est dans ces conditions que, selon la salariée, le 16 septembre 2015, en l’absence de tout formalisme et de toute procédure, Monsieur Y aurait demandé à voir Madame X dans la salle de réunion.

A cette occasion, ce dernier lui aurait brutalement annoncé son licenciement pour faute grave.

Lors de cet entretien, il aurait reproché à Madame X d’avoir commis des manquements graves dans l’accomplissement de ses missions, sans toutefois ne jamais les détailler expressément.

Il lui aurait alors indiqué « ma décision est prise, j’ai décidé de me séparer de vous, il faudrait un miracle pour que je change d’avis ».

Madame X a ensuite dû se rendre au bureau de Madame D Z, Responsable des Ressources Humaines.

Madame Z lui aurait alors exposé le déroulement de la procédure de licenciement pour faute grave dont elle faisait l’objet, et également indiqué que sa convocation à entretien préalable lui serait adressée le jour même par LR/AR.

Madame X s’est vue adresser une lettre de convocation à un entretien préalable en vue d’une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu’à un licenciement pour faute grave, par Monsieur E F, Directeur Général Adjoint Finance et Administration.

L’entretien préalable s’est déroulé le 24 septembre 2015 à 14h00 dans les locaux du siège social de la COMPAGNIE DU PONANT, en présence de Madame Z et de Madame A.

Lors de l’entretien, Mesdames Z et A auraient confirmé sans détour à Madame X que celle-ci ne ferait désormais plus partie des effectifs de la COMPAGNIE DU PONANT.

Par courrier LR/AR du 2 octobre 2015, Madame X a interpellé Monsieur Y, non présent lors de l’entretien, sur le caractère fallacieux des faits qui lui ont été reprochés lors de l’entretien et a indiqué son étonnement quant à l’annonce de son licenciement pour faute grave.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 octobre 2015, la COMPAGNIE DU PONANT a notifié à Madame X son licenciement pour faute grave.

Cette lettre était motivée comme suit :

« Nous faisons suite à l’entretien préalable qui s’est tenu le 24 septembre 2015, en présence de Madame C A, votre Manager Direct.

En dépit des explications fournies au cours de cet entretien, nous avons pris la décision de procéder à votre licenciement pour faute grave, pour les motifs ci-après rappelés.

Vous exercez, au sein de notre Société, les fonctions de Directrice de Production depuis le 9 novembre 2005. Par avenant en date du 1er janvier 2013, vous avez été promue au poste de Directrice Executive Productions Expéditions et Nouveaux Programmes.

Outre des carences managériales pour lesquelles nous vous avions déjà alerté à plusieurs reprises conduisant certains collaborateurs à éprouver des difficultés à travailler avec vous, nous avons constaté récemment des manquements graves dans l’accomplissement de votre travail.

En effet, au terme des croisières estivales en Arctique, nous avons été informés qu’en dépit des consignes données, vous n’avez pas veillé au bon approvisionnement de nos navires de croisière en parkas pour nos clients alors que ces derniers l’attendent de notre part.

Ainsi, compte tenu de l’urgence et afin de préserver l’image de marque et la qualité du service fourni par notre Société, le Service Achat a dû effectuer une commande sans votre validation de 1 000 parkas.

Aussi afin d’éviter toute rupture de stock, le Service achat de la Société a dû procéder en catastrophe à l’approvisionnement du bateau Boréal en utilisant des parkas à bord du Soléal.

Ainsi, alors que la définition du modèle et la répartition des quantités par taille aurait dû être finalisée, par vos soins, au cours du mois de mars 2015, vous n’avez validée cette dernière de 450 unités que le 20 mai 2015, ce qui était à la fois insuffisant en nombre et tardif vu les détails de livraison.

En complément, le Commandant du Boréal, a dû acheter en urgence le 05 août 2015, au cours d’une escale et à un prix bien supérieur à celui pratiqué par notre fournisseur, 80 parkas supplémentaires pour compléter son équipement.

Ainsi, la Société a dû engager des coûts supplémentaires de l’ordre de 25 000 euros, en particulier pour faire face au surcroît du transport express aérien ».

De plus, nous avons enregistré des retours négatifs de la part des passagers mettant en évidence les carences d’organisation en la matière. Pour rappel, nous évoluons dans le secteur du Yachting de luxe et commercialisons des croisières de prestige au cours desquelles les clients attendent un service de qualité, sans faille.

Au-delà des manquements commis, nous ne pouvons que déplorer que vous n’ayez pas suffisamment alerté votre Manager des risques encourus pour l’approvisionnement de nos navires.

Au cours de l’entretien, vous avez estimé sur ce dossier, n’assumer qu’une part de responsabilité, qui pour vous est partagée.

Début septembre 2015, nous avons également constaté que vous ne respectiez pas les règles et procédures internes concernant les repérages et la croisière annuelle pouvant être effectués par les collaborateurs de notre Société.

En effet, malgré la note interne de la croisière annuelle du 13 janvier 2015 précisant notamment, le fait que les réservations sont soumises à une validation en amont de la Direction et des Ressources Humaines, vous n’avez pas fait le nécessaire et avez attendu quelques jours avant votre départ pour procéder à la réservation de votre croisière personnelle, rendant ainsi impossible la validation dans les conditions prévues de votre part.

De même, alors que les conditions tarifaires de ces voyages sont clairement détaillées, vous avez décidé unilatéralement d’imputer sur le budget repérage de votre département EXPE/PROD vos frais aériens engagés au titre de cette croisière.

Aussi, vous avez détourné l’objet même de ce budget, prétextant faussement que vous effectuez un repérage professionnel, ce qui vous a permis de bénéficier d’une gratuité sur l’ensemble de votre voyage.

Or, ni votre hiérarchie, ni même le service des ressources humaines n’étaient informés de l’organisation de ce repérage qui n’était en réalité qu’un faux prétexte à un voyage d’ordre personnel. Pour preuve, vous aviez effectué une demande de congés payés du 17/08/2015 au 02/09/2015.

Au cours de l’entretien, vous avez reconnu avoir commis une faute sur ce point et avez reconnu avoir omis de solliciter l’autorisation de votre hiérarchie pour ce repérage.

Enfin, il nous a été reporté à plusieurs reprises que vous véhiculiez une image négative de la société tant à l’égard des collaborateurs que nos partenaires externes.

Compte tenu de vos fonctions de Directrice Exécutive Productions Expéditions et Nouveaux Programmes, de votre obligation de loyauté qui implique, vu vos fonctions, une attitude exemplaire, nous ne pouvons accepter une telle attitude qui constitue de graves manquements à vos obligations professionnelles.

Dans ces circonstances, il nous est impossible de vous maintenir dans la société et nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave ».

Par courrier recommandé avec accusé réception du 23 décembre 2015, Madame B X a saisi le Conseil de prud’hommes de Marseille et sollicite avec exécution provisoire à intervenir les sommes ci-après :

Au Principal,

- 119 258,25 €, en rappel d’heures supplémentaires, faisant passer de 5 994,93 € à 9 089,94

€ son

salaire moyen mensuel suivant ses déclarations,

—  11 925,90

€, de congé payé incident,

—  54 539,60

€ d’indemnité pour travail dissimulé,

—  27 269,80 € d’indemnité compensatrice de préavis,

—  2 727,00 € de congé payé correspondant,

—  63 175,08

€ d’indemnité conventionnelle de licenciement, selon la Convention Collective du

Personnel Sédentaire des Compagnies de Navigation, ou la somme alternative de 22 724,85

€ en cas

d’application de la Convention Collective Nationale du Personnel des Agences de Voyage et de Tourisme,

—  163 518,94 € en dommages intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

A titre subsidiaire,

—  17 984,79

€ d’indemnité compensatrice de préavis,

—  1 798,48

€ de congé payé correspondant,

—  41 664,76 € d’indemnité conventionnelle de licenciement CCPSCN ou alternativement 14 987,32 € en cas d’application de la Convention Collective Nationale du Personnel des Agences de Voyage et de Tourisme,

—  109 079,29 € en dommages intérêts pour rupture dans des conditions abusive et vexatoires,

En toutes hypothèses,

- 931,00 € en remboursement d’un solde de frais professionnels,

—  5 000,00 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Elle sollicite également sous astreinte de 50,00 € par jour de retard et par document à compter de la

notification du jugement, la délivrance des Bulletins de Paie et Certificat de Travail conformes à la décision à intervenir.

L’affaire a été entendue par le bureau de jugement le 20 décembre 2017, et, par jugement du 28 février 2018, le Conseil de prud’hommes de MARSEILLE a rendu la décision suivante :

« De la Convention de Forfait en Jours de Travail, et des heures supplémentaires,

- considère à partir du constat de la mise en place par l’employeur d’un cadre général permettant d’assurer à la fois sur une base déclarative à la charge de la salariée sensibilisée par les circulaires du Service des Relations Humaines, relatives au droit et à la prise effective des jours de congé, ainsi que d’un système de contrôle pratiqué à l’occasion de l’entretien individuel mais exclusivement affecté à la charge annuelle de travail, que la validité de la Convention Annuelle de Forfait en Jours de Travail, conclue avec Madame B X en l’état de son autonomie d’organisation ne permettant pas son intégration à l’horaire collectif, doit être retenue et maintenue,

- usant de sa faculté d’appréciation issue des dispositions de l’article 12 du code de procédure civile sans toutefois méconnaître l’interdiction jurisprudentielle de faire peser sur le seul salarié la preuve du bien-fondé de sa réclamation, après avoir examiné toutes les pièces qui lui ont été soumises de part et d’autre,

- relève que les heures supplémentaires ne se présument pas,

- observe que le tableau excel dans lequel Madame B X aligne sans apporter le moindre commencement d’explication, un solde hebdomadaire de 15 à 27 heures supplémentaires de 2013 à 2015, et un résultat totalisant 119 258,25 €, non détaillé d’heures majorées ainsi que 11 925,90 €, de congé payé incident, ne saurait constituer « les éléments fournis par le salarié à l’appui de sa demande »,

- confirme après avoir analysé les arguments non corroborés produits par Madame B X, et contredits selon les éléments opposés par la COMPAGNIE DU PONANT dans le contexte du déroulement du contrat de travail, qu’ils ne permettent pas d’établir formellement l’existence d’heures supplémentaires, et n’ont pas davantage vocation à justifier de la réalité d’un état persistant de difficulté et de surcharge au regard des missions exécutées, impliquant le nécessaire accomplissement d’heures supplémentaires, ainsi qu’une parfaite connaissance de la situation par l’employeur, et le caractère inévitablement implicite de son acceptation touchant leur réalisation,

- écarte les demandes formulées par Madame B X en heures supplémentaires, indemnité pour travail dissimulé et rejet de la Convention de Forfait Annuel en Jours de Travail, qui ne peuvent prospérer.

Du licenciement pour faute grave de Madame B X,

- exerçant le pouvoir d’appréciation qu’il tient des articles 12 du code de procédure civile, et L 1235-1 du code du travail, après avoir examiné les pièces qui lui ont été soumises et considéré dans son ensemble, l’incidence de l’attitude de Madame B X qui se défend d’avoir agi dans une démarche délibérément malveillante,

- estime que la SAS COMPAGNIE DU PONANT a pu faire une mauvaise évaluation dans la gradation des griefs adressés à une salariée d’ancienneté significative, mais que malgré le caractère disciplinaire attaché à la faute grave portant sur l’impossibilité de maintien, même pendant la durée du préavis, dont les éléments ne seront pas retenus en l’espèce, le licenciement de Madame B X ne peut être déclaré de facto dépourvu de cause réelle et sérieuse, dans la mesure où, par son contexte, le comportement de l’intéressée avait en la circonstance, vocation à nuire aux intérêts de l’entreprise qui l’employait, ce qui constitue dans le cadre d’une faute simple qui doit être sanctionnée, un motif à la fois réel et sérieux de nature à justifier la rupture intervenue dans son contrat de travail, suivant les exigences de l’article L 1232-1 du code du travail et permettre d’assurer le service de toutes les indemnités correspondantes auxquelles la demanderesse peut normalement encore prétendre,

- rappelle que le principe de la Convention de Forfait Annuel en Jours de Travail a été sauvegardé en l’espèce,

- fait droit avec application des dispositions de l’article R 1454-28 du code du travail, pour un salaire mensuel moyen fixé à 5 993,94 €, et intérêt au taux légal à compter de la demande en justice, au paiement de

-17 984,79 € d’indemnité compensatrice de préavis,

- 1 798,48 € de congé payé incident,

- souligne la référence à l’application aux rapports des Parties de la Convention Collective Nationale du Personnel des Agences de Voyage et de Tourisme conforme à l’activité principale de l’employeur,

- ajoute que les seuls éléments du débat ne font pas de la défenderesse, une Compagnie de Navigation à part entière, relevant pour son personnel à terre, de la Convention Collective du Personnel Sédentaire des Compagnies de Navigation dont Madame B X sollicite opportunément le bénéfice dans le domaine spécifique de l’indemnité de licenciement, que lui conteste explicitement la Partie défenderesse à la barre sans avoir écarté cette option dans ses conclusions,

- remarque au-delà des affirmations, qu’à défaut des éléments qu’il lui appartient d’établir et seraient de nature à consacrer le droit pour Madame B X de se voir appliquer ponctuellement les effets de la Convention Collective du Personnel Sédentaire des Compagnies de Navigation, qu’il y a lieu de retenir la Convention Collective Nationale du Personnel des Agences de Voyage et de Tourisme évoquée contractuellement, et justifie du versement sous les mêmes conditions d’exécution provisoire de droit que précédemment, et intérêt au taux légal à compter de la demande en justice, au titre de l’indemnité de licenciement, de la somme de 14 987,32 €,

- ordonne la délivrance à l’intéressée des Documents Sociaux conformes à la décision et à la nouvelle durée d’emploi.

Du solde non réglé des frais professionnels,

- condamne aux termes des pouvoirs inclus à l’article 12 du code de procédure civile, de la jurisprudence établie, et des dispositions des articles L 1221-1 du code du travail, la SAS COMPAGNIE DU PONANT au paiement avec intérêt au taux légal à compter de la date de la demande en justice, de la somme de 931,00 € pour solde de frais professionnels

- alloue à Madame B X en vertu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, une somme de 1 500,00 € à la charge de la SAS COMPAGNIE DU PONANT qui succombe partiellement, et doit être déboutée de sa demande reconventionnelle du même chef.

- déboute Madame B X de ses demandes autres, ou plus amples.

- ne retient aucun motif d’urgence justifiant d’assortir la décision de l’exécution provisoire en application des dispositions de l’article 515 du code de procédure civile, lorsqu’elle ne s’impose pas de droit.

- met les éventuels dépens à la charge de la SAS COMPAGNIE DU PONANT.

- précise qu’à l’issue des débats, les Parties ont été informées que le prononcé public du présent jugement aura lieu le 28 février 2018, à 9 heures, dans les conditions définies à l’article 450 du code de procédure civile, par mise à disposition au secrétariat greffe de la juridiction».

Madame X a régulièrement interjeté appel du dit jugement le 15 mars 2018,

Dans ses dernières écritures en date du 13 juin 2018 , auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, elle demande à la cour de :

Sur l’exécution du contrat de travail :

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT à verser à Madame X la somme de 931 € au titre du remboursement de ses notes de frais professionnels,

— dire et juger que la convention de forfait jours à laquelle était soumise Madame X est nulle,

En conséquence,

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT à verser à Madame X la somme de 119.258,25 € bruts au titre de rappel d’heures supplémentaires,

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT à verser à Madame X la somme de 11.925,90 € bruts au titre des congés payés afférents au rappel d’heures supplémentaires,

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT à verser à Madame X la somme de 54.539,60 € à titre d’indemnité de travail dissimulé,

Sur la rupture du contrat de travail :

A titre principal,

— constater que la COMPAGNIE DU PONANT ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l’existence d’une faute grave à l’appui du licenciement de Madame X,

— constater que l’ensemble des griefs reprochés à Madame X aux termes de la lettre de licenciement sont infondés,

En conséquence,

— dire et juger le licenciement de Madame X est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT à verser à Madame X, au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents :

— à titre principal, sur la base d’une moyenne de salaire de 9.089,94 €, incluant les heures supplémentaires, la somme de 27.269,80 €, outre les congés payés y afférent, soit la somme de 2.727 €,

— à titre subsidiaire, sur la base d’une moyenne de salaire de 5.994,93 €, ne comprenant pas les heures supplémentaires, la somme de 17.984,79 €, outre les congés payés y afférent, soit la somme de 1.798,48€,

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT à verser à Madame X, au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement :

— à titre principal, sur la base d’une moyenne de salaire de 9.089,94 €, incluant les heures supplémentaires, la somme de 63.175,08 € ;

— à titre subsidiaire, sur la base d’une moyenne de salaire de 5.994,93 €, ne comprenant pas les heures supplémentaires, la somme de 41.664,76 € ;

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT verser à Madame X des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à hauteur de 18 mois de salaire, soit :

— à titre principal, sur la base d’une moyenne de salaire de 9.089,94 €, incluant les heures supplémentaires, la somme de 163.618,94 € ;

— à titre subsidiaire, sur la base d’une moyenne de salaire de 5.994,93 €, ne comprenant pas les heures supplémentaires, la somme de 107.908,74 €,

A titre subsidiaire :

— constater que les griefs allégués ne pouvaient justifier un licenciement pour faute grave,

— dire et juger que le licenciement de Madame X est un licenciement pour cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT à verser à Madame X, au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents :

— à titre principal, sur la base d’une moyenne de salaire de 9.089,94 €, incluant les heures supplémentaires, la somme de 27.269,80 €, outre les congés payés y afférent, soit la somme de 2.727 €,

— à titre subsidiaire, sur la base d’une moyenne de salaire de 5.994,93 €, ne comprenant pas les heures supplémentaires, la somme de 17.984,79 €, outre les congés payés y afférent, soit la somme de 1.798,48 €,

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT verser à Madame X, au titre de l’indemnité de licenciement :

— à titre principal, sur la base d’une moyenne de salaire de 9.089,94 €, incluant les heures supplémentaires, la somme de 63.175,08 €,

— à titre subsidiaire, sur la base d’une moyenne de salaire de 5.994,93 €, ne comprenant pas les heures supplémentaires, la somme de 41.664,76 €,

En tout état de cause :

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT à verser à Madame X des

dommages-intérêts pour rupture du contrat de travail dans des conditions abusives et vexatoires et préjudice moral à hauteur de 12 mois de salaire, soit :

— à titre principal, sur la base d’une moyenne de salaire de 9.089,94 €, incluant les heures supplémentaires, la somme de 109.079,29 €,

— à titre subsidiaire, sur la base d’une moyenne de salaire de 5.994,93 €, ne comprenant pas les heures supplémentaires, la somme de 71.939,16 €,

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT remettre à Madame X le dernier bulletin de salaire et le certificat de travail conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document,

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT payer à Madame X la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

— condamner la COMPAGNIE DU PONANT aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Dans ses dernières conclusions en date du 11 septembre 2018, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens la SASU COMPAGNIE DU PONANT demande à la cour de :

A titre principal

— dire et juger que le licenciement de Madame B X repose sur une faute grave ;

— dire et juger que la convention de forfait était parfaitement valide ;

— dire et juger que la société n’a pas manqué à ses obligations contractuelles ;

En conséquence,

— infirmer le jugement rendu en ce qu’il a considéré que le licenciement de Madame B X ne reposait pas sur une faute grave et ORDONNER le remboursement des sommes allouées ;

— débouter Madame B X de l’intégralité de ses demandes ;

A titre subsidiaire

— constater le montant manifestement excessif des demandes de Madame B X;

En conséquence,

— débouter Madame B X de sa demande tendant à la condamnation au versement de la somme de 63.175,08 € à titre d’indemnité de licenciement et ALLOUER tout au plus la somme de 41.671,78 € nets à ce titre

— débouter Madame B X de sa demande tendant à la condamnation au versement de la somme de 27.269,80 € à titre compensatrice de préavis outre la somme de 2.726,98 € à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférent et ALLOUER tout au plus la somme de 17.987,82 € bruts à ce titre outre la somme de 1.798,782 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférente

— débouter Madame B X de sa demande tendant à la condamnation au versement de la somme de 163.618,94 € à titre d’indemnité de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et ALLOUER tout au plus la somme de 59.959,40 € bruts à ce titre ;

— débouter Madame B X de sa demande tendant à la condamnation au versement de la somme de 109.079,29 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et MINIMISER fortement la somme allouée ;

En tout etat de cause

— débouter Madame B X de sa demande relative au versement de la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du CPC ;

— condamner Madame B X à verser à la Société la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du CPC.

- Sur le remboursement des frais professionnels de Madame X

Madame X soutient qu’elle a dû exposer des frais au cours d’un voyage professionnel du 15 août au 19 août 2015 qui ne lui ont pas été remboursés par l’employeur.

Le conseil de prud’hommes a fait droit à sa demande, l’employeur ne contestant pas son bien fondé

L’employeur conclut qu’il ne conteste pas le bien-fondé de la demande mais conteste la légitimité du voyage de repérage que la salariée a décidé d’effectuer unilatéralement.

- Sur la nullité du forfait jours

La salariée sollicite la nullité de la convention de forfait jours de 216 jours par an à laquelle elle était soumise au vu de ses bulletins de paie car son contrat de travail ne faisait pas mention du temps de travail mais précisait seulement qu’il serait appliqué à la salariée l’article 3.2 de l’accord du 5 décembre 2001 sans préciser la nature du forfait, le nombre de jours travaillés, la rémunération forfaitaire correspondante ce qui fait qu’elle n’a pas donné son accord écrit quant à l’application d’un forfait jours.

De plus ce forfait jours n’a fait l’objet d’aucun contrôle de l’employeur.

Le mécanisme de suivi prévu par l’accord collectif n’est pas conforme aux dispositions de l’article L 3121-4- du code du travail car il ne prévoir pas d’entretien annuel individuel sur la charge de travail du salarié, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale ainsi que sur la rémunération du salarié.

Par ailleurs, l’employeur ne justifie pas que ce mécanisme ait été mis en oeuvre.

Et le plafonds prévu par cet accord est de 215 jours et non 216.

L’employeur ne prouve pas qu’il aurait été vigilant quant au suivi des forfaits jours et la prise des jours de repos.

La société COMPAGNIE DU PONANT prétend que la convention de forfait jours est valide.

La salariée était un cadre autonome et elle a signé son contrat de travail qui prévoit ce forfait et mentionne l’accord d’entreprise.

Un mécanisme de suivi était prévu par cet accord d’entreprise et la direction des RH a été vigilante sur le suivi du forfait jours et la prise des jours de repos.

La différence entre 216 jours et 215 s’explique par la journée de solidarité.

- Sur les heures supplémentaires

La salariée soutient qu’elle a effectué de nombreuses heures supplémentaires et produit un décompte et des mails.

L’employeur était informé de l’accomplissement de ces heures.

La salariée était aussi d’astreinte six mois par an durant les périodes des croisières expédition polaires.

Elle a alerté son employeur sur le dépassement de ces heures qui ont nui à sa santé.

La société COMPAGNIE DU PONANT expose que la salariée se fonde sur un tableau excel qu’elle a établi et sur des mails qui ne prouvent pas son amplitude horaire.

De plus, la salariée ne démontre pas que ces heures auraient été accomplies à la demande de l’employeur.

Au contraire, l’employeur lui a demandé de lâcher prise.

Madame X a été remplacée par un salarié qui arrive parfaitement à assurer ses fonctions et sa vie personnelle.

En outre la salariée ne prouve pas qu’elle a été en situation d’astreinte.

- Sur le travail dissimulé

La salariée qui soutient que l’employeur ne pouvait ignorer l’absence de validité du forfait jours ni l’importance des horaires effectués s’est rendu coupable de travail dissimulé et qu’elle a droit à l’indemnité forfaitaire de six mois de salaire.

La société COMPAGNIE DU PONANT prétend que le caractère intentionnel de la dissimulation n’est pas établi du seul fait de la privation d’effet de la convention de forfait et de l’inexécution de ses obligations de contrôle du temps de travail en découlant pour l’employeur.

- Sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse

La salariée expose qu’elle a été licenciée verbalement le 16 septembre 2015 par M. Y, ce qui a été confirmé lors de l’entretien préalable du 24 septembre 2015.

Le licenciement est donc de ce fait sans cause réelle et sérieuse.

La salariée soutient ensuite que les motifs du licenciement sont imprécis.

Elle évoque, dans la lettre, les écrits suivants : ' il nous a été rapporté à plusieurs reprises que vous véhiculiez une image négative de la société …'

Or l’employeur ne cite aucun fait précis et ne produit aucun élément probant.

L’employeur fait également référence à des carences managériales … conduisant certains collaborateurs à éprouver des difficultés à travailler avec elle mais sans donner de précision ni citer le nom des collaborateurs en question.

Alors qu’au contraire la salariée avait d’excellents rapports avec ses collègues qui l’ont soutenu après son licenciement.

La salariée n’a fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire en 10 ans de collaboration.

La salariée, sur le grief relatif à l’approvisionnement des navires de croisière en parkas, expose que l’employeur a eu connaissance de ce fait dès février 2015 et qu’il est donc prescrit.

Par ailleurs, ce fait ne relève pas de sa seule responsabilité et est imputable à de mauvaises informations communiquées par le navire et à un manque de suivi du service Achats.

La salariée, sur le grief relatif aux repérages et aux congés de Madame X, expose qu’elle a effectivement posé des congés pour la période du 17 août au 3 septembre 2015 mais a indiqué qu’elle devait partir en repérage sur les premiers jours de la croisière afin de finaliser sur site trois dossiers pour des départs prévus fin août.

Elle n’a eu confirmation de l’organisation de la mission de repérage que lors de la prise de ses congés et n’a pu confirmer au vu de l’urgence que ses premières dates de congés payés se transformeraient en déplacement professionnel.

Elle a effectivement accompli cette mission de repérage qui est l’une de ses fonctions essentielles.

Elle n’a donc nullement commis de graves détournements du budget du département Expédition à des fins personnelles.

L’employeur soutient que la salariée ne démontre pas son licenciement verbal.

La lettre de licenciement vise des faits précis et objectifs.

Ces faits sont établis.

L’attitude négative de la salariée est attestée par un mail d’un client.

Les carences managériales de la salariée résultent du fait que certains collaborateurs ne souhaitaient plus travailler avec elle.

Le grief relatif à l’approvisionnement des navires en parkas résulte du retard de validation de la commande par la salariée du nouveau modèle de parkas qui a contraint le service Achats à procéder à un approvisionnement en urgence d’un navire en utilisant des parkas d’un autre navire et en autorisant le commandant de bord à acheter des parkas sur place, occasionnant des frais supplémentaires de 25.000 €.

En outre, des clients se sont plaints.

Le grief relatif au repérage résulte du fait que la salariée a souhaité bénéficier de la possibilité de partir en croisière annuelle à compter du 20 août 2015 mais a formulé sa demande tardivement , ne rendant pas possible la validation hiérarchique de son départ et a décidé unilatéralement d’associer un repérage pour lui permettre de bénéficier d’une prise en charge de ses vols internationaux dans le cadre du budget alloué au service production et expédition.

Elle a ainsi détourné l’objet du budget alloué à son service et ce, sans validation préalable de la direction, en toute connaissance de cause, sans respecter les procédures.

Ce repérage n’avait pas été planifié ni validé.

Ce n’est qu’à son retour que la salariée a indiqué avoir effectué ce repérage et avoir imputé les frais afférents sur le budget du département.

- Sur la convention collective applicable

La salariée soutient que les dispositions les plus favorables des conventions collectives du personnel des agences de voyage et de tourisme du 12 mars 1993 et du personnel sédentaire des entreprises de navigation du 14 septembre 2010 doivent lui être appliquées, ce qu’a reconnu l’employeur dans ses écritures.

En l’espèce, c’est la convention collective du personnel sédentaire des entreprises de navigation du 14 septembre 2010 qui doit s’appliquer pour le calcul de son indemnité conventionnelle de licenciement et la convention collective du personnel des agences de voyage et de tourisme du 12 mars 1993 pour l’indemnité de préavis.

L’employeur soutient que la convention collective applicable est la CCN qui prévoit une indemnité calculée sur 6;95 mois de salaire et que la salariée a droit non à 63.175,08 € mais à 41.664,76 €.

Pour le préavis, la salariée aurait droit à la somme de 17.987,82 € et non à 27.269,8 €.

- Sur le préjudice

Madame X expose que son préjudice est important puisqu’elle n’a pas retrouvé d’emploi, qu’elle perçoit l’allocation de solidarité spécifique et qu’elle est âgée de 52 ans.

Elle a à sa charge un parent handicapé.

La société prétend que les sommes réclamées sont excessives et que la salariée ne justifie pas de son préjudice. Elle n’aurait tout au plus droit qu’à une indemnité de licenciement représentant 10 mois de salaire.

- Sur la requalification subsidiairement du licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse

La salariée soutient subsidiairement que son licenciement doit être requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse car les griefs, s’ils sont avérés ne sont pas constitutifs d’une faute grave.

Elle n’a pas eu de mise à pied.

- Sur les dommages et intérêts pour préjudice moral

Madame X expose qu’elle a subi un préjudice moral important car elle a été licenciée oralement et a été très choquée par cette rupture brutale qui a gravement nui à son honneur.

L’employeur prétend que la salariée ne justifie pas d’un préjudice distinct.

Vu l’article 455 du code de procédure civile ;

Vu l’ordonnance de clôture du 15 novembre 2019 ayant fixé l’audience de plaidoirie au 3 décembre

2019 ;

SUR CE

- Sur le remboursement des frais professionnels de Madame X

Madame X a dû exposer des frais au cours d’un voyage professionnel du 15 août au 19 août 2015 qui ne lui ont pas été remboursés par l’employeur ainsi qu’elle en justifie.

L’employeur ne conteste pas que ces frais professionnels ont été exposés ni leur montant.

Il ne conteste pas non plus le fait que cette mission de repérage ait été effectuée par la salariée mais seulement le fait qu’elle n’ait pas respectée la procédure applicable au sein de l’entreprise avant de se déplacer.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a fait droit à la demande de la salariée.

- Sur la nullité du forfait jours

En application des articles L3121-39 et L3121-40 du code du travail, la conclusion d’une convention individuelle de forfait doit être prévue par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. Elle requiert l’accord du salarié et suppose l’établissement d’un écrit. Le seul renvoi général fait dans le contrat de travail à l’accord d’entreprise ne peut constituer l’écrit requis (Cass. Soc. 31 janvier 2012, n°10-17593).

En l’espèce, dans le contrat de travail que la salariée appelante a souscrit le 5 mai 2006, il était stipulé à l’article 2.3 :

'Les modalités d’application de l’aménagement et la réduction du tempos de travail sont définies par l’accord du 5 décembre 2001.

Il sera appliqué à Mademoiselle B X l’article 3.2.2 de cet accord en qualité de cadre autonome ainsi qu’au regard de ses responsabilités.'

Cet accord n’était par ailleurs pas joint au contrat de travail.

Il en résulte que, dans le contrat de travail, aucune modalité n’était définie quant au décompte annuel du temps de travail, et aucune mention n’était même faite d’une convention de forfait en jours, ni sur la rémunération forfaitaire correspondante.

Dès lors que la salariée appelante a été amenée à souscrire son contrat de travail en méconnaissance des dispositions de l’accord d’entreprise qui devaient éclairer son consentement quant au décompte de son temps de travail en jours, est nulle la convention de forfait que son employeur lui a appliquée, même si elle n’a pas protesté à la lecture des bulletins de salaire sur lesquels elle était mentionnée.

- Sur les demandes liées à des dépassements de la durée légale du travail et le travail dissimulé

En application de l’article L.3171-4 du code du travail, dès lors que le litige vient à porter sur l’existence ou le nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

En l’espèce, si au soutien de ses prétentions, la salariée appelante fait découler avec pertinence de la nullité de la convention de forfait qui lui a été appliquée, comme il est dit ci-dessus, que la relation

de travail était soumise aux durées légales, la salariée doit étayer sa demande.

D’une part, la salariée appelante produit des courriels envoyés à des heures tardives à l’employeur mais qui ne permettent pas de savoir avec précision les horaires qu’elle effectuait, ainsi que des courriers dans lesquels elle se plaint d’accomplir un grand nombre d’heures mais qui ne permettent pas plus de savoir quels horaires elle réalisait ;

D’autre part, la salariée appelante présente sous forme de tableau un décompte d’heures hebdomadairement accomplies. Le tableau , qui ne comporte ni le nombre d’heures accomplies par jour ni l’heure de début et de fin du travail, ne fait cependant pas apparaître de manière détaillée les horaires de travail auxquels elle prétend s’être soumise.

Ces seuls éléments, en l’absence de précision sur les horaires et les jours de travail, ne mettent pas l’ employeur en mesure de répondre.

Enfin, la salariée prétend qu’elle était d’astreinte 6 mois par an (soirs, nuits, week-ends et jours fériés) durant les périodes des croisières expédition polaire mais une astreinte n’est pas assimilable à l’accomplissement d’heures supplémentaires et en tout état de cause, les éléments produits sont insuffisants à démontrer cette période d’astreinte de six mois par an.

Il s’ensuit que faute pour la salariée appelante d’étayer ses prétentions, elle doit être déboutée de sa demande en paiement d’un arriéré de rémunération pour heures supplémentaires et pour dissimulation partielle de son emploi.

- Sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse

La salariée expose qu’elle a été licenciée verbalement le 16 septembre 2015 par M. Y, ce qui aurait été confirmé lors de l’entretien préalable du 24 septembre 2015 mais , en dehors de ses propres allégations, cet élément n’est en rien démontré.

Madame X a été licenciée pour faute grave.

La faute grave est celle d’une importance telle qu’elle empêche le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant le préavis.

La preuve de la faute grave incombe à l’employeur.

La lettre de licenciement fixe les limites du litige.

En l’espèce, dans la lettre de licenciement reproduite ci-avant, l’employeur reproche à Madame X les griefs suivants :

'Enfin, il nous a été reporté à plusieurs reprises que vous véhiculiez une image négative de la société tant à l’égard des collaborateurs que nos partenaires externes.

Compte tenu de vos fonctions de Directrice Exécutive Productions Expéditions et Nouveaux Programmes, de votre obligation de loyauté qui implique, vu vos fonctions, une attitude exemplaire, nous ne pouvons accepter une telle attitude qui constitue de graves manquements à vos obligations professionnelles. '

Ce grief est imprécis et l’employeur, pour en justifier, ne produit qu’une seule pièce, à savoir un courriel d’un client ayant effectué une croisière du 20 au 31 août 2015 en Alaska qui liste les points positifs et les points négatifs sans qu’à aucun moment le nom de la salariée soit cité. A aucun moment, ce client ne fait état de ce que l’accompagnateur PONANT était nul mais indique seulement

que l’accompagnement était nul à l’aéroport d’Anchorage, et le client précise même que l’animation était parfaite, les excursions superbes, le personnel formidable, le commandant et l’équipage super pro et sympa.

Ce grief n’est donc pas établi.

Il lui reproche encore : 'Outre des carences managériales pour lesquelles nous vous avions déjà alerté à plusieurs reprises conduisant certains collaborateurs à éprouver des difficultés à travailler avec vous' ;

En l’espèce, aucun exemple de ces carences managériales qui sont contestées par la salariée, n’est donné dans la lettre.

L’employeur se prévaut de l’entretien professionnel de la salariée en date du 23 mai 2014 dans lequel il notait qu’il était 'important de travailler à titre personnel sur l’attitude envers les autres, la prise de parole, le côté parfois impulsif qui crée des climats tendus en interne ' mais aucun exemple concret n’est donné sur les collaborateurs ayant des difficultés à travailler avec elle et dans cet entretien, la salariée fait état de son surmenage, l’employeur reconnaissant qu’il s’agit d’une période difficile suite au départ de son adjointe non remplacée.

L’employeur produit également un point entretien annuel avec la salariée adressé le 4 août 2015 de Madame A sur l’attitude négative de la salariée vis à vis de ses collaborateurs mais en réponse Madame Z sollicite la communication de tous les mails en lien avec l’attitude de la salariée et son comportement car elle souhaite les conserver 'si nous devons monter un dossier, j’ai besoin de ces informations et de nous prémunir de tout risque potentiel en cas de litige'.

Force est de constater qu’aucun mail n’est produit ni aucune attestation de collaborateur.

Ce grief n’est donc pas établi.

L’employeur se prévaut ensuite du fait suivant :

'En effet, au terme des croisières estivales en Arctique, nous avons été informés qu’en dépit des consignes données, vous n’avez pas veillé au bon approvisionnement de nos navires de croisière en parkas pour nos clients alors que ces derniers l’attendent de notre part.

Ainsi, compte tenu de l’urgence et afin de préserver l’image de marque et la qualité du service fourni par notre Société, le Service Achat a dû effectuer une commande sans votre validation de 1 000 parkas.

Aussi afin d’éviter toute rupture de stock, le Service achat de la Société a dû procéder en catastrophe à l’approvisionnement du bateau Boréal en utilisant des parkas à bord du Soléal.

Ainsi, alors que la définition du modèle et la répartition des quantités par taille aurait dû être finalisée, par vos soins, au cours du mois de mars 2015, vous n’avez validée cette dernière de 450 unités que le 20 mai 2015, ce qui était à la fois insuffisant en nombre et tardif vu les détails de livraison.

En complément, le Commandant du Boréal, a dû acheter en urgence le 05 août 2015, au cours d’une escale et à un prix bien supérieur à celui pratiqué par notre fournisseur, 80 parkas supplémentaires pour compléter son équipement.

Ainsi, la Société a dû engager des coûts supplémentaires de l’ordre de 25 000 euros, en particulier pour faire face au surcroît du transport express aérien ».

La salariée, sur le grief relatif à l’approvisionnement des navires de croisière en parkas, expose que l’employeur a eu connaissance de ce fait dès février 2015 et qu’il est donc prescrit.

Il résulte des quelques pièces versées au dossier par l’employeur que ce dernier avait connaissance du problème depuis fin mai 2015 au plus tard puisque déjà en février 2015, conscient du fait que la fabrication du nouveau modèle de parkas ne serait sans doute pas prêt à temps , il a commandé en urgence 1000 parkas et que le directeur des achats écrit que la commande principale a été passée trop tard (fin mai) malgré le message d’alerte attaché précisant une commande en mars.

Ce fait est donc prescrit puisque le directeur des achats n’en ignorait rien depuis mai 2015 et que ce fait a été reproché à la salariée dans la lettre de licenciement du 5 octobre 2015.

Ensuite, l’employeur fait reproche à la salariée des faits suivants :

'Début septembre 2015, nous avons également constaté que vous ne respectiez pas les règles et procédures internes concernant les repérages et la croisière annuelle pouvant être effectués par les collaborateurs de notre Société.

En effet, malgré la note interne de la croisière annuelle du 13 janvier 2015 précisant notamment, le fait que les réservations sont soumises à une validation en amont de la Direction et des Ressources Humaines, vous n’avez pas fait le nécessaire et avez attendu quelques jours avant votre départ pour procéder à la réservation de votre croisière personnelle, rendant ainsi impossible la validation dans les conditions prévues de votre part.

De même, alors que les conditions tarifaires de ces voyages sont clairement détaillées, vous avez décidé unilatéralement d’imputer sur le budget repérage de votre département EXPE/PROD vos frais aériens engagés au titre de cette croisière.

Aussi, vous avez détourné l’objet même de ce budget, prétextant faussement que vous effectuez un repérage professionnel, ce qui vous a permis de bénéficier d’une gratuité sur l’ensemble de votre voyage.

Or, ni votre hiérarchie, ni même le service des ressources humaines n’étaient informés de l’organisation de ce repérage qui n’était en réalité qu’un faux prétexte à un voyage d’ordre personnel. Pour preuve, vous aviez effectué une demande de congés payés du 17/08/2015 au 02/09/2015.

Au cours de l’entretien, vous avez reconnu avoir commis une faute sur ce point et avez reconnu avoir omis de solliciter l’autorisation de votre hiérarchie pour ce repérage. '

En l’espèce, il résulte des pièces produites au dossier qu’il existe, en application de la note interne du 22 avril 2013 et du 13 janvier 2015, une procédure pour l’ensemble du personnel qui doit être respectée scrupuleusement ainsi qu’indiqué dans la note, s’agissant des missions et frais de déplacement ainsi que de la croisière annuelle.

Tous les voyages ou déplacements doivent être approuvés au préalable par le N +1 du voyageur via le formulaire de Fiche de Mission et seul les commerciaux terrain en sont exemptés.

De même, la réservation des transports et hébergements est réalisée en parallèle de la fiche de mission par le collaborateur concerné auprès de l’agence de voyage avec laquelle la Compagnie du Ponant a contractualisé, l’agence de voyage ayant pour consigne de faire valider par email les réservations par un des membres du Directoire.

Or il est établi que Madame X a souhaité bénéficier de la possibilité de partir en croisière

annuelle à compter du 20 août 2015.

A ce titre, elle devait effectuer une demande de bénéfice d’une croisière, soumise au manager, puis transmise à la DRH et à la Direction de la société.

La salariée a effectué sa demande tardivement, ne rendant pas possible matériellement sa validation hiérarchique.

Mais surtout, en parallèle de son départ en croisière, la salariée a décidé, unilatéralement et sans obtenir la validation de sa hiérarchie, d’associer un repérage à sa croisière lui permettant de bénéficier d’une prise en charge de ses vols internationaux dans le cadre du budget alloué au Service Production et Expédition, alors que pour la croisière annuelle, ses frais de déplacement n’étaient pris en charge qu’à hauteur de 500 € ou sur les vols affrétés par PONANT de 50% sur le prix public HT.

L’employeur démontre par les pièces qu’il verse aux débats que ce repérage n’était ni planifié ni validé, contrairement aux allégations de la salariée.

Par contre la salariée a insisté le 12 août 2015 pour voir imputer les billets à son budget PROD au motif que les vols demandés n’étaient pas en lien avec sa croisière annuelle mais en relation avec un repérage fait juste avant de rejoindre le navire, en indiquant 'Etienne, sois rassuré, je connais les procédures et suis habilitée à donner des instructions d’imputation sur les budgets qui concernent mon service', ce qui est inexact.

La salariée tente de se prévaloir du fait qu’elle n’a pu obtenir de confirmation de son employeur du fait qu’elle n’avait pas pu programmer de repérage et que Madame A était en congés payés. Or le 6 août 2015, cette dernière était présente et Madame X ne démontre nullement la moindre tentative de sa part d’informer son employeur de la nécessité de faire ce repérage ni de le faire valider.

Il en résulte que la salariée, qui occupe le poste de Directrice Exécutive Productions Expéditions, fonction importante dans la société, et qui se doit donc d’être exemplaire, a sciemment méconnu les procédures internes de la société dans le but de faire prendre en charge ses frais de déplacement lors de sa croisière annuelle en effectuant un repérage qui n’avait pas été demandé et approuve par sa hiérarchie.

Le repérage a néanmoins été réalisé et la compagnie du Ponant ne conteste pas son utilité.

Il s’en suit que cet unique manquement, alors que la salariée avait 10 ans d’ancienneté et n’avait jamais été avertie, constitue, comme l’a justement apprécié le premier juge, une cause réelle et sérieuse de licenciement mais non une faute grave.

Il y a donc lieu de confirmer sur ce point le jugement déféré.

- Sur les demandes indemnitaires de la salariée

Les parties s’accordent, en l’absence d’heures supplémentaires sur le montant de l’indemnité de préavis d’un montant de 17.984,79 € outre congés payés afférents de 1798,48 €.

Sur l’indemnité conventionnelle de licenciement, la salariée revendique l’application de la convention collective nationale du Personnel sédentaire des entreprises de navigation du 14 septembre 2010, plutôt que celle de la convention collective des agences de voyage et de tourisme, la première prévoyant en son article 3.5.3.1 que 'sauf en cas de faute grave ou lourde, tout salarié licencié ayant plus de 1 an d’ancienneté a droit à une indemnité de licenciement calculée en fonction de son ancienneté.'

Et l’article 3.5.3.1.1 une indemnité conventionnelle de licenciement correspondant à 6,95 mois de salaires pour une ancienneté de 10 ans.

La salariée produit aux débats une information du personnel et un mail de l’employeur selon lesquels l’employeur prend le meilleur pour le salarié de chaque convention selon le sujet.

L’employeur, dans ses écritures, expose que 'la CCN applicable comme démontré est la CCN prévoit l’octroi d’une indemnité calculée comme suit : 6,95 mois de salaire’ et chiffre l’indemnité conventionnelle de licenciement à la somme de 41.664,76 €.

Or la salariée chiffre sa demande à celle de 41.664,76 €.

Il y a donc lieu de faire droit à la demande de la salariée qui ne fait pas l’objet de contestation.

Sur le préjudice moral, la salariée a été licenciée pour cause réelle et sérieuse et ne démontre pas le caractère vexatoire de cette mesure ni l’existence d’un préjudice né de la non exécution du préavis.

Elle sera déboutée de sa demande sur ce point.

- Sur les autres demandes

Toutes les parties succombant partiellement conserveront à leur charge leurs propres frais et dépens et il ne sera pas fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, en matière prud’homale,

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté Madame X de sa demande au titre des heures supplémentaires et du travail dissimulé , du préjudice moral, dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, condamné la société COMPAGNIE DU PONANT à payer à Madame X la somme de 17.984,79 € au titre du préavis et celle de 1798,48 € au titre des congés payés afférents, celle de 931 € au titre du solde des frais professionnels, la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et mis les dépens de première instance à la charge de la société COMPAGNIE DU PONANT.

L’infirme pour le surplus.

Statuant à nouveau, y ajoutant,

Condamne la société COMPAGNIE DU PONANT à payer à Madame X la somme de 41.664,76 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement.

Dit que les sommes allouées porteront intérêt au taux légal à compter de la demande, avec capitalisation.

Ordonne la délivrance des documents de fin de contrat conformes à la décision , dans le mois de la notification de la présente décision et sans astreinte.

Déboute les parties de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres frais et dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 7 février 2020, n° 18/04732