Cour d'appel d'Amiens, 15 octobre 2013, n° 12/03280

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Sur la décision

Référence :
CA Amiens, 15 oct. 2013, n° 12/03280
Juridiction : Cour d'appel d'Amiens
Numéro(s) : 12/03280

Sur les parties

Texte intégral

ARRET

E

C/

K

A

XXX

COUR D’APPEL D’AMIENS

1ERE CHAMBRE SECTION 2

ARRÊT DU CINQ NOVEMBRE DEUX MILLE TREIZE

Numéro d’inscription de l’affaire au répertoire général de la cour : 12/03280

Décision déférée à la cour : JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D’AMIENS DU VINGT NEUF MAI DEUX MILLE DOUZE

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur D E

de nationalité Française

XXX

XXX

Représenté et plaidant par Me Grégoire FRISON, avocat au barreau d’AMIENS

APPELANT

ET

Monsieur J K

de nationalité Française

XXX

XXX

Madame X A

de nationalité Française

XXX

XXX

Représentés et plaidant par Me Gérard FIRMIN, avocat au barreau d’AMIENS

INTIMES

DÉBATS :

A l’audience publique du 18 juin 2013, l’affaire est venue devant M. Lionel RINUY, président de chambre entendu en son rapport, et Mme Valérie DUBAELE, conseiller, magistrats rapporteurs siégeant sans opposition des avocats en vertu de l’article 786 du Code de procédure civile.

Le président a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 15 octobre 2013.

La Cour était assistée lors des débats de Mme Pélagie CAMBIEN, greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Les magistrats rapporteurs en ont rendu compte à la Cour composée de M. Lionel RINUY, président, et , conseillers, qui en ont délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE DE L’ARRÊT :

Les parties ont été informées par RPVA de la prorogation du délibéré au 22 octobre, au 29 octobre puis au 05 novembre 2013 pour prononcé de l’arrêt par sa mise à disposition au greffe.

Le 05 novembre 2013, l’arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. Lionel RINUY, président de chambre, et Mme Monia LAMARI, greffier.

*

* *

DECISION :

Par acte d’huissier du 16 novembre 2011, Monsieur J K et Madame X A, exposant qu’ils sont propriétaires et occupants d’un immeuble situé XXX, à XXX, ont fait assigner Monsieur D E, en qualité de propriétaire d’une parcelle voisine, devant le tribunal de grande instance d’Amiens afin sous le bénéfice de l’exécution provisoire de le voir déclaré responsable des désordres constatés sur leur propriété et trouvant leurs origines dans une plantation de peupliers non entretenue et de voir constater que ces désordres constituent des troubles anormaux de voisinage et justifient à son encontre l’application des dispositions des articles 1382 et 1384 du code civil, de dire qu’à compter du jugement à intervenir et sous astreinte de 200 € par jour de retard Monsieur D E sera tenu de remédier aux divers désordres constatés et de le condamner à payer à chacun d’eux la somme de 15.000 € pour trouble de jouissance, d’obtenir également la désignation d’un expert, aux frais avancés de Monsieur D E, chargé d’évaluer le coût des travaux d’élagage des racines et la remise en état de la terrasse et du muret de la maison d’habitation et de donner un avis sur les troubles de jouissance subis par eux du fait de la cime des arbres entraînant humidité et impossibilité d’utiliser un appareil de télévision.

Monsieur D E, bien que régulièrement assigné, n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter devant le premier juge.

Aux termes du jugement réputé contradictoire rendu le 29 mai 2012, le tribunal de grande instance d’Amiens a condamné Monsieur D E à couper les branches et les racines des peupliers qui dépassent sur l’héritage des consorts K-A, assorti cette condamnation d’une astreinte provisoire de 150 € par jour de retard à compter du 40e jour suivant la signification du jugement, débouté les consorts K-A de leurs autres demandes, condamné Monsieur D E à leur payer la somme de 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par déclaration enregistrée le 20 juillet 2012, Monsieur D E a interjeté appel général de cette décision.

Pour l’exposé des moyens des parties, qui seront examinés dans les motifs de l’arrêt, il est renvoyé aux conclusions transmises sur RPVA le 27 mars 2013 par Monsieur D E et à celles déposées le 15 octobre 2012 par Monsieur J K et Madame X A.

Monsieur D E demande à la Cour, vu les dispositions de l’article 122 du code de procédure civile, des articles 1382, 1384, 544, 671 à 673 du code civil et 9 du code de procédure civile, à titre liminaire, de constater que Monsieur J K n’a aucun intérêt à intervenir dans la présente procédure, dire que l’assignation à lui délivrée n’est pas recevable en l’état et annuler tous les actes subséquents, dont le jugement du tribunal de grande instance d’Amiens, à titre principal, d’infirmer la décision rendue par le tribunal de grande instance d’Amiens dans tous les chefs qui lui font grief et par conséquent dire irrecevables et mal fondées les demandes, fins et prétentions de Monsieur J K et Madame X A et les condamner solidairement à une somme de 3.000 € en vertu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Monsieur J K et Madame X A demandent à la Cour de déclarer Monsieur D E irrecevable et mal fondé dans son appel, de l’en débouter et de les recevoir en leur appel incident, de confirmer le jugement entrepris à l’exception du paragraphe relatif à leur demande de 30.000 € de dommages et intérêts pour trouble de jouissance, cette somme correspondant à un préjudice préexistant à la présente instance, l’expertise visant plus particulièrement les dommages immobiliers qualifiés de reprise des désordres, de porter en outre à 4.000 € la somme allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner l’appelant aux entiers dépens de première instance et d’appel.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 10 avril 2013 et l’affaire a été renvoyée à l’audience du 18 juin 2013.

SUR CE

Monsieur D E fait valoir in limine litis le défaut d’intérêt et de qualité à agir de Monsieur J K au vu de l’acte de propriété de la parcelle cadastrée AD 37, à savoir un acte notarié de liquidation de régime matrimonial, daté du 28 juin 1984, préalablement au divorce de M. R A et de Mme X Pecquet, attribuant la propriété de la parcelle à cette dernière seule, et conclut que vu l’article 122 du code de procédure civile la Cour ne pourra que constater le défaut d’intérêt et de qualité à agir de celui-ci et par conséquent ne pas recevoir

l’assignation du 16 novembre 2011 et les actes subséquents, soutient qu’alors que Monsieur J K et Madame X A fondaient leur demande sur les articles 1382 et 1383 du code civil, le juge y a substitué le fondement juridique des articles 544 et suivants du même code, puis les articles 671 à 673 du code civil, que l’article 673 dispose que 'Celui sur la propriété duquel avancent les branches des arbres, arbustes et arbrisseaux du voisin peut contraindre celui ci à les couper. Les fruits tombés naturellement de ces branches lui appartiennent. Si ce sont les racines, ronces ou brindilles qui avancent sur son héritage, il a le droit de les couper lui même à la limite de la ligne séparative. Le droit de couper les racines, ronces et brindilles ou de faire couper les branches des arbres, arbustes ou arbrisseaux est imprescriptible', que le juge ne pouvait le condamner à couper les racines des peupliers qui dépassent sur l’héritage voisin, dans la mesure où cela n’est ni permis par l’article 673 du code civil ni sollicité par les requérants dans leur assignation, qu’en tout état de cause, le juge ne pouvait fonder son jugement sur les dispositions de cet article 673 du code civil, dans la mesure où la demande des consorts AC-A était indéterminée sur ce point, que l’article 5 du code de procédure civile rappelle que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé et qu’il ne ressort pas clairement de l’assignation qu’ils souhaitaient l’élagage des peupliers surplombant leur héritage ainsi que la coupe des racines du côté de sa propriété, qu’ils souhaitaient voir chiffrer le coût de cet élagage des racines par un expert, ce qui démontre bien que la demande d’astreinte n’avait pour objet la coupe des racines, que conformément aux dispositions des articles 4 et 5 du code de procédure civile, il appartenait au juge de débouter les requérants de leur demande de condamnation sous astreinte, indéterminée, que leur demande est d’autant plus imprécise que la désignation cadastrale de sa parcelle n’est même pas indiquée, que l’article 9 du code de procédure civile rappelle qu’il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, que les photographies produites en 1re instance ne démontrent pas que les branches des arbres ou les racines proviennent de sa parcelle, qu’elles ne lui ont jamais été adressées et n’établissent aucunement l’existence de désordres, s’agissant de photographies, que la demande des consorts AC-A est irrecevable, portant exclusivement sur sa personne alors qu’ils produisent eux-mêmes les courriers qu’ils ont adressés à Monsieur J E et Madame Y G et sont conscients qu’il n’est pas propriétaire de la parcelle voisine de leur fonds, qu’ils soutiennent tout à la fois qu’il ne contesterait pas être 'l’auteur de la plantation, et donc le propriétaire des arbres incriminés’ et qu’il se comporte à l’égard des tiers comme propriétaire apparent, que ces affirmations ne sont pas sérieuses, qu’ils connaissent l’existence de l’usufruitière et savent donc parfaitement qu’il n’est pas propriétaire, que Madame Y E a précisément indiqué qu’il n’est que le cultivateur de la parcelle, qu’il produit une attestation de Maître V W, qui démontre qu’il n’est que nu-propriétaire indivis de la parcelle ZH n° 45, que la demande dirigée à son encontre est donc irrecevable, qu’il n’appartient pas au défendeur à une action de suppléer la carence du demandeur dans l’administration de la preuve et de régulariser la procédure, qu’il incombait aux consorts AC-A de mettre en cause l’ensemble des parties concernées et dont ils connaissaient parfaitement l’existence, qu’il n’est que nu-propriétaire en indivision avec un de ses frères, Monsieur J E, d’une parcelle non constructible agricole, qui est entourée de peupliers, que c’est sa mère qui est usufruitière et donc légalement propriétaire du bien, qu’une jurisprudence constante considère que 'pour lui permettre d’assurer la protection et l’exercice de son droit, l’usufruitier dispose des actions en justice qui appartiennent à un propriétaire telles les actions possessoires et l’action en responsabilité pour trouble de jouissance', que si le nu-propriétaire peut également intervenir à l’instance pour assurer aux côtés de l’usufruitier la protection des droits réels et personnels exercés sur l’immeuble, ce n’est pas à lui qu’appartient en priorité cette action, que, de la même façon, l’action dirigée contre un bien, et visant un trouble de jouissance causé par celui ci, ne peut être intentée que contre l’usufruitier, le nu-propriétaire pouvant seulement intervenir s’il le souhaite, qu’en tout état de cause, l’assignation n’a pas été délivrée à son adresse, qu’à titre subsidiaire, il convient de souligner que le juge de première instance ne pouvait pas le condamner sur le fondement des dispositions de l’article 673 du code civil, qu’en tout état de cause les arbres ne sont pas sa propriété, qu’ils ont été plantés il y a plus de trente ans à 3,50 mètres de la limite de propriété et que le jugement devra donc être infirmé sur ce point, que les demandes des appelants incidents ne pourront prospérer, qu’ils ne produisent aucune pièce nouvelle en appel permettant de justifier de leur prétendu préjudice, qu’en tout état de cause le préjudice de jouissance allégué consistant en un manque d’ensoleillement, un trouble dans la réception des émissions de télévision, la chute des feuilles sur la toiture et l’obligation de nettoyer les gouttières, ne peut être imputé à un défaut d’élagage des arbres de la propriété voisine, que le manque d’ensoleillement provient tout simplement de la hauteur de la bordée d’arbres sur la propriété voisine et qu’un élagage n’y changerait rien, que le trouble dans la réception des émissions de télévision n’est absolument pas justifié et ne pourrait de la même façon pas être résolu par un quelconque élagage, que s’agissant de la chute des feuilles sur la toiture et du nettoyage des gouttières, là encore, un élagage n’aurait pas empêché ce phénomène naturel et il n’est pas démontré qu’il s’agisse d’un trouble de voisinage, qu’en effet, la jurisprudence considère que ne constitue pas un trouble anormal de voisinage au sens de l’article 671 du code civil la présence d’un grand bouleau, planté à une distance de moins de deux mètres en limite de propriété et obligeant à un nettoyage des chéneaux et gouttières plusieurs fois par an en raison des feuilles et brindilles inondant le toit voisin, étant acquis que cet arbre avait largement dépassé la hauteur de deux mètres depuis plus de trente ans et qu’un tel nettoyage fait partie de l’entretien courant régulier en zone rurale (Riom, 3 juillet 2008), qu’il conviendra de confirmer le jugement sur la demande d’expertise et qu’il n’appartient pas au juge de pallier la carence des consorts AC-A dans l’administration de la preuve, qu’en ne coupant pas, comme le leur permettent les dispositions de l’article 673 du code civil, les racines des arbres qui auraient pu dégrader leur terrasse ou leur muret, ils ont eux- mêmes contribué à la création de leur prétendu préjudice, qu’il n’est en outre pas démontré que ce sont les racines qui sont à l’origine de ces désordres, qu’enfin les peupliers sont implantés à une distance plus grande que la distance imposée par le code civil, et qu’en conséquence aucun trouble n’est caractérisé.

Monsieur J K et Madame X A font valoir que le premier juge a écarté à tort leur demande de préjudice (sic) alors que celui-ci était incontestable et important, qu’ils sont propriétaires d’un immeuble sis à XXX, cadastré section XXX lieu dit 'rue d’Oisemont', qu’une haie de peupliers de grande hauteur est implantée à proximité immédiate de leur propriété, à une distance indéterminée de la ligne séparative, qu’il est démontré que les racines de la plantation ont sérieusement endommagé leur terrasse et un muret et que les branches recouvrent partiellement la toiture, ce qui entraîne, outre les dommages immobiliers, des troubles de jouissance croissants, que la voie judiciaire est devenue inévitable du fait de la mauvaise foi de l’appelant, qu’ils ont fondé leur action sur les articles 1382 et 1384 du code civil alors que les troubles du voisinage relèvent des dispositions de l’article 544 du code civil et que le présent litige relève des dispositions des articles 671 à 673 du code civil, qu’il est bien évident que les dispositions de l’article 673 sont applicables dans la mesure où il est établi que les racines et les branches avancent sur leur propriété, que les conclusions de l’appelant qui sans contester être l’auteur de la plantation se contente de justifier qu’il est nu-propriétaire avec Monsieur J E démontrent sa désinvolture, qu’il se comporte comme propriétaire apparent, l’usage et l’état de santé de l’usufruitière ne lui permettant guère d’assumer la gestion de sa propriété, qu’outre l’évaluation des dommages immobiliers qui justifie à elle seule la désignation d’un expert, les troubles au quotidien sont établis (manque d’ensoleillement, trouble dans la réception des émissions de télévision, chute de feuilles sur la toiture et obligation de nettoyer les gouttières) et justifient leur demande d’une provision de 30.000 € à valoir sur leur préjudice définitif.

Sur l’intérêt à intervenir dans la procédure de Monsieur J K

Il ressort de l’acte de partage amiable reçu le 19 juin 1984 par Maître Gérard Gricourt, notaire à Gamaches, et enregistré le 20 juin 1985, que la maison d’habitation située à Visme au Val et acquise par le couple Pecquet-A a été attribuée lors de leur divorce à Madame X A.

Toutefois, l’action entreprise par Monsieur J K et Madame X A ayant été fondée, ainsi que le relève Monsieur D E lui-même, sur les articles 1382 et 1383 du code civil, l’intérêt à agir de Monsieur J K nonobstant le fait qu’il n’a pas la qualité de propriétaire de l’immeuble en cause n’est pas sérieusement mise en cause par l’appelant, dès lors que n’est pas contestée sa qualité d’occupant qui justifie suffisamment la possibilité d’agir en responsabilité délictuelle.

En outre, l’occupant d’un immeuble est également recevable, quel que soit son titre d’occupation à agir en réparation d’un trouble anormal de voisinage.

En conséquence, il y a lieu de débouter Monsieur D E de ses demandes tendant à voir déclarer irrecevable l’assignation délivrée de ce chef et annuler les actes subséquents.

Sur l’irrecevabilité soulevée par Monsieur D E de la demande dirigée à son encontre alors qu’il n’est qu’un des nus-propriétaires

Monsieur D E fait valoir qu’il n’est que l’un des deux nus-propriétaires de l’immeuble en cause dont sa mère est usufruitière et demande à la Cour de déclarer en conséquence irrecevable l’action de Monsieur J K et Madame X A à son encontre.

Toutefois, si les arguments développés par les intimés sur l’âge de la nue-propriétaire ne sont pas pertinents, l’action dirigée contre un nu-propriétaire n’est pas irrecevable, cette circonstance déterminant seulement les limites de l’opposabilité de la décision.

En conséquence, il y a lieu de rejeter également son exception d’irrecevabilité de ce chef.

Sur le fond

Aux termes de l’article 12 du code de procédure civile, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

Il ne saurait, en conséquence, être fait grief au premier juge d’avoir, aux termes du jugement réputé contradictoire entrepris, rappelé que les troubles anormaux de voisinage relevaient des dispositions de l’article 544 du code civil alors que les demandeurs invoquaient les dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil et se plaignaient de désordres dont ils lui demandaient de constater qu’ils constituaient des troubles anormaux de voisinage.

Toutefois, le premier juge ayant ensuite considéré qu’il y avait lieu de statuer non sur ce fondement mais en application de l’article 673 du code civil qui fonde celui sur la propriété duquel avancent les branches des arbres, arbustes et arbrisseaux du voisin à contraindre celui-ci à les couper et donne également le droit au propriétaire de couper lui-même à la limite de la ligne séparative les racines, ronces et brindilles qui avancent sur son héritage, il ne pouvait faire droit, sous réserve de son bien fondé, qu’à la demande de Madame X A, seule propriétaire, et non à celle de Monsieur J K dont la qualité d’occupant ne justifie pas une action fondée sur l’article 673 du code civil.

Or, il ressort en l’espèce des pièces produites par les intimés que les seuls éléments invoqués pour justifier la demande sont des photographies non circonstanciées, un devis de la SARL J M relatif à des travaux de réfection d’une terrasse et d’un muret de terrasse, une copie de lettre à Monsieur J E datée du 29 août 2011, une lettre de Madame T E du 6 septembre 2011 indiquant que les peupliers ont été élagués deux fois, sont plantés à 3 mètres et que son fils D E cultive à cet endroit.

Il ne ressort donc pas de ces éléments, même si Monsieur D E fait une mauvaise lecture de l’article 673 du code civil en prétendant que le droit donné au propriétaire de couper lui-même à la limite de la ligne séparative les racines, ronces et brindilles l’obligerait à y procéder lui-même et exclurait donc la possibilité pour le juge d’y contraindre le voisin, preuve suffisante que les branches et racines des arbres plantés sur le fonds dont est nu-propriétaire Monsieur D E avancent sur la propriété de Madame X A et a fortiori qu’elles génèrent un préjudice sur son fonds.

Il n’est pas d’avantage démontré par ces pièces un trouble anormal de voisinage dont puissent demander réparation les intimés.

Il convient également de rappeler qu’une mesure d’expertise ne saurait être ordonnée pour suppléer la carence des parties dans l’administration de la preuve qui lui incombe.

En conséquence, il y a lieu d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné Monsieur D E à couper les branches et les racines des peupliers qui dépassent sur l’héritage des consorts K-A et assorti cette condamnation d’une astreinte provisoire de 150 € par jour de retard à compter du 40e jour suivant la signification du jugement, et, statuant à nouveau, au vu des pièces produites, de débouter Madame X A de ses demandes sur le fondement de l’article 673 du code civil et de débouter Monsieur J K et Madame X A de leurs demandes en réparation du trouble anormal de voisinage qu’ils invoquent et en organisation d’une mesure d’expertise.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il les a déboutés de leur demande d’indemnisation d’un préjudice de jouissance.

Sur les dépens et les frais hors dépens

Monsieur J K et Madame X A, échouant dans leurs demandes au principal, supporteront les dépens de première instance, le jugement étant infirmé de ce chef, et d’appel.

Le jugement sera donc également infirmé en ce qu’il a condamné Monsieur D E à leur payer la somme de 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’est pas inéquitable de laisser aux parties la charge de leurs frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant après débats publics, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

Déboute Monsieur D E de ses demandes tendant à voir déclarer irrecevable l’assignation délivrée de ce chef et annuler les actes subséquents,

Rejette son exception d’irrecevabilité tenant à ce que la demande est dirigée à son encontre alors qu’il n’est qu’un des nus-propriétaires,

Infirme le jugement rendu le 29 mai 2012 par le tribunal de grande instance d’Amiens en ce qu’il a condamné Monsieur D E à couper les branches et les racines des peupliers qui dépassent sur l’héritage des consorts K-A, assorti cette condamnation d’une astreinte provisoire de 150 € par jour de retard à compter du 40e jour suivant la signification du jugement et condamné Monsieur D E à payer aux consorts K-A la somme de 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

Le confirme en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute Madame X A de ses demandes sur le fondement de l’article 673 du code civil,

Déboute Monsieur J K et Madame X A de leurs demandes en réparation d’un trouble anormal de voisinage et en organisation d’une mesure d’expertise,

Condamne Monsieur J K et Madame X A aux dépens de première instance et d’appel,

Déboute les parties de leurs demandes respectives sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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