Cour d'appel d'Angers, Troisième chambre, 25 juillet 2017, n° 15/00202

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Chronologie de l’affaire

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Grandmaire Justine · Lettre des Réseaux · 17 décembre 2021

CA Angers, 25 juillet 2017, n°15/00202 Lorsque les conditions cumulatives posées par l'article L.7321-2 du Code du travail sont remplies, l'affilié se voit reconnaître le statut de gérant de succursale et peut ainsi bénéficier de l'application des dispositions du Code du travail. Ce qu'il faut retenir : Lorsque les conditions cumulatives posées par l'article L.7321-2 du Code du travail sont remplies, l'affilié se voit reconnaître le statut de gérant de succursale et peut ainsi bénéficier de l'application des dispositions du Code du travail. Pour approfondir : La société Y. et la société …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Angers, troisième ch., 25 juill. 2017, n° 15/00202
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 15/00202
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Le Mans, 25 décembre 2014, N° F13/00443
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

d’ANGERS

Chambre Sociale

ARRÊT N° 17/

clm/

Numéro d’inscription au répertoire général :

15/00202.

Jugement Au fond, origine Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire du MANS, décision attaquée en date du 26 Décembre 2014, enregistrée sous

le n° F 13/00443

ARRÊT DU 25 Juillet 2017

APPELANTE :

SAS EPHIGEA

XXX

XXX

représenté par Maître Rémi BALMANN, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

Madame Y X

La Chalucie

XXX

assistée de Maître Charlotte BELLET, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Mai 2017 à 14 H 00, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame F G H, Président chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame, F G-H président

Madame Isabelle CHARPENTIER, conseiller

Monsieur Jean de ROMANS, conseiller

Greffier : Madame E, greffier.

ARRÊT : prononcé le 25 Juillet 2017, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame F G-H, président, et par Madame E, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 13 décembre 2007, Mme Y A épouse X a établi un 'dossier de candidature Phildar’ en vue d’intégrer le réseau Phildar en qualité de franchisée par l’ouverture d’un magasin exploité à cette enseigne au sein du centre commercial Leclerc devant ouvrir à Vouvray-sur-Loir (Sarthe) en juillet 2008. Sa candidature a été acceptée.

Le 21 décembre 2007, elle et son époux, M. B X, ont constitué la société 2MSL (SARL) ayant pour objet 'la vente de prêt à porter et prêt à tricoter, produits textiles et laines, tout commerce de détail non alimentaire' dont la gérante était Mme Y X.

Etait annexé à ces statuts l’état des actes accomplis pour le compte de la société en formation qui visait, outre l’avance des frais de constitution de ladite société, «le compromis d’acquisition du droit au bail d’une loge de la galerie marchande du centre Leclerc Bercé et Loir, pour un montant de 30 000 € ».

La société 2MSL a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Tours le 7 février 2008.

Le 13 mai 2008, la société Phildar, aux droits de laquelle se trouve désormais la société EPHIGEA, et la société 2MSL ont conclu un contrat de franchise-commission et, le 18 juillet 2008, Mme Y X a débuté l’exploitation du magasin ouvert à l’enseigne Phildar au sein de la galerie marchande du centre commercial Leclerc situé à Vouvray-sur-Loir.

Suite à la création, courant 2009, d’un nouveau concept sous l’enseigne 'Grain de Malice', par acte des 19 janvier et 2 février 2010, la société Phildar et la société 2MSL ont conclu un nouveau contrat de franchise-commission. L’exploitation du magasin à l’enseigne 'Grain de Malice', ayant pour activité la vente de vêtements, a débuté le 25 février 2010.

Par lettre postée le 2 juillet 2013, Mme Y X a saisi le conseil de prud’hommes du Mans afin de se voir reconnaître le statut de gérante de succursale prévu par l’article L. 7321-2 du code du travail.

Par lettre du 22 janvier 2014, la société EPHIGEA a notifié à la société 2MSL, 'à l’intention de Mme Y X', la rupture du contrat de commission-affiliation conclu entre elles les 19 janvier et 2 février 2010 et ce, à effet du 31 août 2014.

Toujours sous la gérance de Mme Y X, la société 2MSL a, dans les mêmes locaux, poursuivi l’exploitation d’un fonds de commerce de vente de vêtements à l’enseigne 'Emma et John'.

La société 2MSL a été placée en redressement judiciaire par jugement du 28 juillet 2015 puis en liquidation judiciaire par décision du 8 septembre 2015.

Entre temps, par jugement du 26 décembre 2014 rendu en formation de départage, auquel il est renvoyé pour un ample exposé, le conseil de prud’hommes du Mans a, sous le bénéfice de l’exécution provisoire prévue par l’article 515 du code de procédure civile ordonnée à concurrence de la moitié des sommes allouées :

— dit que Mme Y X remplissait les conditions posées par les articles L. 7321-1, L. 7321-2 et L. 7321-3 du code du travail ;

En conséquence,

— s’est déclaré compétent et a dit que Mme Y X devait bénéficier des dispositions du code du travail relatives, notamment, à la durée du travail ainsi que des dispositions de la convention collective de l’habillement et articles de textile ;

— dit que Mme Y X relevait de la catégorie «cadre catégorie B» et fixé la rémunération de référence à la somme brute mensuelle de 2 219 € ;

— dit que la rupture des relations contractuelles s’analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

— condamné en conséquence la société EPHIGEA à payer à Mme Y X les sommes suivantes :

¤ 41 044 € de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

¤ 84 840 € de rappel de salaire du chef de la période du 1er mars 2010 au 31 août 2014,

¤ 4 438 € d’indemnité compensatrice de préavis,

¤ 1 775,20 € d’indemnité conventionnelle de licenciement,

¤ 13 314 € de dommages et intérêts pour licenciement injustifié ;

— dit que ces sommes porteraient intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par le défendeur de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation, soit à compter du 9 juillet 2013, pour les créances de nature salariale et à compter du prononcé du jugement pour les créances de nature indemnitaire ;

— condamné la société EPHIGEA à payer à Mme Y X la somme de 2 500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— rejeté les plus amples demandes de Mme Y X ;

— débouté la société EPHIGEA de toutes ses demandes reconventionnelles (à savoir, demande de remboursement de l’avance de trésorerie de 15 000 € accordée le 3 mars 2011 et de l’aide de 5 980 € accordée le 25 février 2010, et demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile) ;

— condamné la société EPHIGEA aux entiers dépens en ce compris le droit de timbre de 35 €.

Par lettre recommandée postée le 19 janvier 2015, la société EPHIGEA a régulièrement relevé appel général de cette décision dont elle avait reçu notification le 29 décembre 2014.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Vu les conclusions et observations orales des parties à l’audience des débats du 16 mai 2017 auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés;

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 16 mai 2017, régulièrement communiquées et reprises oralement à l’audience aux termes desquelles la société EPHIGEA demande à la cour :

à titre principal,

— d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de débouter Mme Y X de l’ensemble de ses prétentions en considérant qu’en sa qualité de gérante de la société 2MSL, elle a toujours eu la qualité de commerçante ;

à titre subsidiaire,

— si le statut de gérante de succursale et le bénéfice des dispositions des articles L. 7321-1 et L. 7321-2 étaient reconnus à Mme Y X, d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il lui a attribué la qualification de cadre de la catégorie B et, corrélativement, a pris pour salaire de base la somme de 2 219 bruts et de juger qu’elle ne saurait prétendre un statut différent et supérieur à celui de responsable de magasin succursale qui relève de la catégorie C des agents de maîtrise, avec un salaire brut mensuel de base d’un montant de 1 660 € ;

— de constater par ailleurs que Mme Y X a perçu, du 1er mars 2010 au 31 août 2014, non pas la somme de 31 160 € bruts à titre de rémunération, mais celle de 40 590 € ; en conséquence, de ramener à 44 250 € le montant de rappel de salaire qui pourrait lui être dû ;

— de la débouter de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires et de ses demandes d’indemnité compensatrice de préavis, d’indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

— subsidiairement, de ramener de 13 314 € à 9 960 € le montant des dommages et intérêts qui pourraient lui être alloués pour licenciement injustifié, de 4 438 € à 3 320 € le montant de l’indemnité compensatrice de préavis et de 1 775,20 € à 1 328 € le montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement ;

— en tout état de cause, de condamner Mme Y X à lui payer la somme de 6 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 27 avril 2017, régulièrement communiquées et reprises oralement à l’audience aux termes desquelles Mme Y X demande à la cour :

— d’infirmer le jugement entrepris seulement s’agissant du montant des sommes allouées à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires et de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

— de le confirmer en toutes ses autres dispositions ;

statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

— de condamner la société EPHIGEA à lui payer la somme de 41 849 € de rappel de salaire pour heures supplémentaires et celle de 105 256 € de dommages et intérêts pour licenciement injustifié et ce, avec intérêts au taux légal ;

— d’ordonner la capitalisation des intérêts ;

— de condamner la société EPHIGEA à lui remettre un certificat de travail et l’attestation Pôle Emploi ;

— de la condamner à lui payer la somme de 8 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1 ° ) Sur la demande de reconnaissance de la qualité de gérant succursale :

Les dispositions du jugement relatives à la compétence du conseil de prud’hommes pour connaître du litige opposant Mme Y X à la société EPHIGEA n’étant pas discutées et la cour n’était saisie d’aucune demande ni d’aucun moyen sur ce point, la décision entreprise sera confirmée de ce chef.

****

Aux termes de l’article L. 7321-2 du code du travail, 'Est gérant de succursale', notamment 'toute personne :

2°) Dont la profession consiste essentiellement :

a) Soit à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise ;

'.

L’application de cette disposition suppose la réunion cumulative des quatre critères suivants :

— l’existence d’une activité essentielle de vente de marchandises ou de denrées,

— la fourniture exclusive ou quasi-exclusive de ces marchandises ou denrées par une seule entreprise commerciale,

— l’exercice de l’activité dans un local fourni ou agréé par cette entreprise,

— l’exercice de l’activité aux conditions et prix imposés par la dite entreprise.

En application de l’article L. 7321-1 du code du travail, lorsque les quatre conditions prévues par ce texte sont cumulativement remplies, sans qu’il y ait lieu à établir l’existence d’un lien de subordination, la personne concernée, professionnel juridiquement indépendant mais qui évolue sous l’empire d’une personne ne lui laissant pas suffisamment la maîtrise de l’activité économique exercée, bénéficie des dispositions du code du travail dans la mesure de ce qui est prévu au titre concernant les gérants de succursales.

Il s’agit d’une application du droit du travail et non d’une requalification du contrat en contrat de travail.

Au cas d’espèce, la société EPHIGEA reconnaît expressément que les trois premières conditions sont remplies en ce que l’activité exercée par Mme Y X via la société 2MSL consistait bien dans la vente de vêtements et produits textiles exclusivement fournis par elle-même et en ce qu’elle a bien agréé le local commercial au sein duquel s’exerçait l’activité.

Comme l’ont exactement retenu les premiers juges par des motifs que la cour adopte, il résulte en effet des éléments du dossier et des explications concordantes des parties que, via la société 2MSL qui, aux termes de l’article 8.4.1 du contrat de franchise-commission conclu les 19 janvier et 2 février 2010, était tenue par une clause d’approvisionnement exclusif auprès de la société Phildar devenue la société EPHIGEA, Mme Y X n’exerçait pas d’autre activité que la vente de marchandises, en l’occurrence, la vente de produits, essentiellement textiles, de la marque 'Grain de Malice’ au sein d’une loge de galerie marchande qui a été agréée par le franchiseur et qui, conformément aux dispositions de l’article 8.2.2 du contrat de franchise-commission, a été aménagée selon les plans établis par les services spécialisés de ce dernier et garni du mobilier fourni par le franchiseur ou l’un de ses fournisseurs agréés mais payé par la franchisée.

Arguant de ce qu’il est de l’essence même du contrat de franchise que le franchiseur s’assure de la réitération de son savoir-faire dans le respect de l’image de marque du réseau, la société EPHIGEA reconnaît également qu’elle contrôlait les conditions d’exploitation du magasin. Ainsi ne méconnaît-elle pas que, pour l’exploitation de son magasin, conformément au 'Manuel opérationnel Grain de Malice’et d’ailleurs de l’article 8.4.1 du contrat de franchise-commission, Mme Y X devait utiliser exclusivement les méthodes, formulaires, documents qu’elle lui remettait ou qu’elle avait agréés, devait veiller en permanence à ce que les produits soient rangés et présentés en respectant les règles de marchandisage définies par elle, devait diffuser en permanence la musique propre à l’enseigne 'Grain de Malice'.

Comme l’ont relevé les premiers juges, par les très nombreuses pièces qu’elle verse aux débats (pièces n° 9 à 112, 114 et 115 : les catalogue GDM 'Le GDMAG', les notes d’informations appelées 'GD Minute ! L’information minute aux magasins Grain de Malice' [exemples : pièces n° 12 et 13, 56, 58], les comptes rendus de réunions téléphoniques régionales analysant semaine par semaine l’évolution de l’activité des boutiques du ressort et des chiffres d’affaires réalisés [exemples : pièces n° 16 à 24], les nombreux courriels, les attestations de salariées )

, Mme Y X établit que la société EPHIGEA déterminait et

supervisait par le menu les conditions d’exploitation de son fonds tels que l’agencement du magasin, la présentation des articles dans les vitrines ou dans le magasin (exemples : pièce n° 44 : détermination des articles à mettre 'en podium’ : 'trois robes au lieu des jeans et t-shirts initialement préconisés' – pièce n° 59: articles à présenter sur la table basics blanche et indication précise des vêtements à mettre sur un mannequin, instruction étant donnée de 'bien faire dépasser les manches de la chemise du tee-shirt')

, le mode

de pliage des vêtements, la détermination du format du mailing pour des bons privilèges fidélité, la détermination des supports utilisés pour l’émission de bons de fidélité, la mise en place d’opérations commerciales obligatoires avec indication des nombreuses instructions précises à respecter, l’ordre d’arrêter une offre promotionnelle (exemple : 'offre anniversaire + 50 points') jugée non satisfaisante, la définition minutieuse du processus à respecter pour l’organisation des soldes (pièce n° 18), les actions à mener en considération d’une baisse de fréquentation et de chiffre d’affaires, la détermination semaine par semaine, voire jour par jour des tâches à réaliser (exemple pièce n° 21 réunion téléphonique régionale concernant les semaines 23 et 24 de l’année 2013 et définissant jour par jour du 14 au 26 juin 2013 les tâches à effectuer : exemples : 'le 17 juin

: début d’implantation des soldes en

magasin

, le 18 juin : 'envois des sms et emails ventes privées aux VIP', pièce n° 46 : courriel), les

explications précises à fournir aux 'clientes cartées qui poseraient des questions sur l’absence d’invitation' aux ventes privées (pièce n° 22), l’organisation de distribution de flyers établis par la société EPHIGEA et envoyés aux franchisés pour qu’ils les impriment, les découpent et les distribuent à des dates précises (pièce n° 64).

En application de l’article 7.5 du contrat de franchise-commission, sur demande du service commercial du franchiseur, le franchisé était tenu de faire parvenir certains articles à un autre magasin du réseau dans les 48 heures au plus tard.

Les pièces produites établissent encore que :

— la société EPHIGEA contrôle les chiffres d’affaires réalisés semaine par semaine et les commente en classant les magasins au plan régional et en donnant des directives pour améliorer les performances ;

— les responsables régionaux adressent des courriels destinés aux salariés, par exemple en l’absence de la responsable de magasin pour responsabiliser les vendeuses (responsables adjointes et conseillères de vente) (pièce n° 70) ou encore pour organiser la prise de connaissance par les vendeurs 'du book commercial', le contrôle de cette prise de connaissance étant assuré par un QCM (questionnaire à choix multiples) que doit leur faire passer la responsable de magasin et qui doit être transmis au responsable régional avant une date déterminée.

Par contre, la société EPHIGEA soutient qu’en sa qualité de gérante de la société 2MSL, Mme Y X avait toute liberté de pratiquer les prix qu’elle souhaitait et de modifier les prix conseillés.

A l’appui de cette position, elle produit les pièces suivantes :

— pièce n° 38 (numérotée 9 en première instance) : document informatique révélant cinq modifications de prix effectuées par Mme Y X en 2013 et 2014 pour un écart de 1 centime d’euro à chaque fois ;

— des procès verbaux de constat d’huissiers dressés le 27 janvier 2014 (pièce n° 44 – numérotée 19 en première instance) ainsi que les 10, 12 et 13 mars 2015 (pièces n° 39, 41 et 42) au sein de magasins 'Grain de Malice’ à Saint-C D de Vie (Vendée), Maiche (25), Pontivy (56) et Heyrieux (38) ;

— une sommation interpellative délivrée le 13 mars 2015 (pièce n° 40) à la gérante de la société ELOKA exploitant un fonds de commerce à l’enseigne 'Grain de Malice’ à Pontivy;

— le 'guide utilisateur’ édité par la société PHILDAR relativement aux procédures à respecter pour l’utilisation de la caisse ;

—  8 listings informatiques reproduisant les opérations de caisse enregistrées à des périodes données au sein de huit magasins 'Grain de Malice’ situés à Belley (01), Limoges (87), Vernon (27), Thionville (57), Amberieu en Bugey (01), Saintes (17), Rennes (35) et Albi (81) révélant des encaissements de montants soit supérieurs, soit inférieurs aux prix conseillés par la société EPHIGEA (pièces n° 46 à 53) ;

— une pièce n° 45 établie par la société EPHIGEA intitulée 'Explications du ticket'.

Aux termes de l’article 7-4-2 du contrat de franchise-commission conclu entre les parties les 19 janvier et 2 février 2010, comme tout franchisé, Mme Y X avait l’obligation d’utiliser le 'terminal point de vente Grain de Malice' dit TPV, intégrant un programme informatique de gestion spécifique à la franchise Grain de Malice et constituant un 'outil d’information et de gestion des stocks, des ventes et du magasin en général, qui permet au franchisé d’avoir toute connaissance des stocks présents en magasin et d’assurer une gestion optimale de ses produits'.

Comme l’ont exactement rappelé les premiers juges au regard des pièces produites et comme la société EPHIGEA l’explique dans sa note intitulée 'Explications du ticket', c’est elle qui, au fil du temps, paramètre le terminal de caisse implanté dans chaque magasin franchisé et dans chaque succursale. Les encaissements opérés dans chaque magasin sont d’ailleurs versés directement sur son compte.

C’est donc la société EPHIGEA qui, dans chaque TPV, paramètre d’office, au jour le jour, produit par produit, le prix de vente conseillé d’origine ou le prix de vente conseillé modifié par ses soins pour tenir compte, par exemple, d’une opération commerciale ou promotionnelle.

Le franchisé découvre ces modifications dans son terminal et en est, en général, informé par un courriel. Par les pièces qu’elle verse aux débats, Mme Y X établit qu’il arrivait que la société EPHIGEA n’ait pas effectué le paramétrage du changement de prix en temps utile de sorte que l’application du nouveau prix imposait une manipulation manuelle sur la caisse.

La note 'Explications du ticket' produite par l’appelante confirme cette nécessité dans laquelle pouvait se trouver la vendeuse de 'forcer la caisse' pour appliquer le nouveau prix conseillé par elle. La société EPHIGEA y explique en effet :

'Colonne PVMC (prix de vente conseillé (prix d’origine ou prix réduit tenant compte d’une opération commerciale – soldes jours malice).

Le PVMC est paramétré d’office sur la caisse. Tout changement de prix nécessite une manipulation positive sur la caisse, à la hausse, comme à la baisse.

L’affilié peut ne pas avoir pris le temps de modifier l’étiquetage prix du produit. Dans ce cas, il est obligé de vendre le produit au prix visible par la cliente, et doit forcer la caisse pour passer l’article à un autre prix que le PVMC.

L'* signifie que la caisse a été forcée (NB : elle n’est pas toujours visible sur les relevés).

'.

Si dans ses 'Explications du ticket', le franchiseur impute cette nécessité de forçage à un défaut de diligence du franchisé, les pièces produites démontrent qu’elle était parfois imputable à son propre retard de paramétrage ou au délai manifestement insuffisant laissé au franchisé pour réagir et réétiqueter les produits entre l’avis donné de changement de prix et le paramétrage du nouveau prix dans le PVMC.

A titre d’exemples, les pièces suivantes illustrent, notamment, que les prix initiaux, les prix modifiés, les délais et les durées de modification étaient bien décidés par la société EPHIGEA qui imposait des opérations commerciales conformément aux diffusions faites via le catalogue GDM et que des produits pouvaient arriver en magasin étiquetés à un prix inférieur à celui paramétré dans le PVMC :

— pièce n° 108 de l’intimée : courriel adressé le 24 octobre 2013 à 15 h 48 par l’assistante de direction commerciale et développement à une liste de franchisés et responsables de succursales, ayant pour objet : 'Jours Malice – Rétroplanning et liste des produits décotés',comportant en pièce jointe, d’une part, un calendrier des tâches à accomplir jour par jour du 24 au 30 octobre 2013 pour les 'Jours Malice', d’autre part, un listing de 329 articles avec mention, pour chacun, du prix de vente initial et de la décote décidée par la société EPHIGEA variant de 20 % à 50 % ;

— pièce n° 41 de l’intimée courriel général adressé le 28 juin 2013 à 9 h 04 par l’assistante de direction commerciale et développement ainsi libellé : 'Vous avez pu voir dans le CDMag d’Hier que des références ont été ajoutées aux produits soldés de façon à vous permettre de réaliser un chiffre de folie ce week-end !

'

suivi d’une liste de 16 articles décotés dès le jour même de 20 % ou 50 %, et de l’indication que, dès le lendemain, un article devait être vendu au prix de '2 pour 20 €' ;

— pièce n° 42 : le 16 juillet 2013 à 13 h 59, invitation à démarrer à 14 h l’étiquetage des produits soldés en 'prix ronds’ ; dans le GDMinute du 16 juillet 2013, information du démarrage de l’opération 'Derniers jours’ dès le lendemain avec l’indication de prix modifiés pour divers produits ;

— pièce n° 58 : dans le GDMinute du 27 août 2013, information de la mise en place de l’opération '- 50 % sur le 2e article' sur le t-shirts Jazz et Jade, ordre de mettre cette opération en place dès la réception du GDMinute avec description dans les termes suivants de la marche à suivre pour le passage en caisse : 'Caisse winstore : vous utiliserez l’opération marketing automatique 100 835. Cette opération ne sera active qu’à compter de demain. En attendant merci de faire une remise manuelle sur l’article le moins cher des deux. Caisse optistore : vous utiliserez le code caisse 13 (remise en % à la ligne)

' ;

indication dans ce même GDMinute que le prix du t-shirt 'Journal’ étiqueté à 19,99 € doit être réétiqueté au prix de 14,99 € ;

— pièce n° 44 de l’intimée : le 23 juillet 2013, Mme Y X adresse un courriel aux services centraux du franchiseur pour expliquer que, le jour même, elle a effectué une réduction de 5 € sur un pantalon modèle Julien arrivé étiqueté au prix de 34,99 € et qui passait en caisse au prix de 39,99 € ; elle demandait que cette remise ne lui soit pas facturée et que l’exact prix lui soit confirmé ; par courriel du lendemain, le franchiseur lui a indiqué que le bon prix de vente était celui de 39,99 € passant en caisse de sorte qu’il convenait de réétiqueter ces modèles.

Les deux salariées de Mme Y X ont attesté de ces modifications de prix déterminées par la société EPHIGEA du jour au lendemain ou le jour même et des erreurs et de la nécessité d’adresser un courriel à cette dernière pour expliquer tout écart de prix ou toute erreur, notamment dans l’hypothèse où un changement de prix notifié dans la journée n’aurait pas été lu avant la vente d’un des articles concernés et ce, afin que le franchiseur ne facture pas le franchisé de la différence.

En effet, si le contrat de franchise-commission conclu entre les parties et le 'Guide de la franchise en commission' (pièce n° 37 de l’appelante) énoncent le principe selon lequel les prix de vente conseillés paramétrés en caisse et diffusés par le franchiseur sont seulement indicatifs pour le franchisé, ils disposent aussi que :

— sur le chiffre d’affaires réalisé par le franchisé au cours d’une année civile, le franchiseur prélève une part qui varie de 61 % à 63 % en fonction de la tranche de chiffre d’affaires réalisé et il reverse au franchisé une commission qui varie entre 39 % (sur la tranche de CA la plus baisse) et 37 % (sur la tranche de CA la plus élevée) ;

— le franchiseur n’accepte de participer financièrement à une baisse de prix qu’à la condition qu’elle n’excède pas 10 % du prix conseillé ; ainsi, si le prix conseillé est de 100

et que le prix pratiqué est de 90, le franchisé sera prélevé sur 90 ; mais si le prix conseillé est de 100 et que le prix pratiqué est de 80, le franchisé sera également prélevé sur 90;

— en tout état de cause, le franchisé assume la charge des remises qu’il pourrait décider de consentir à certaines clientes pour des raisons commerciales ou personnelles en dehors des opérations commerciales définies par le franchiseur ; (cf pièce n° 113 : Mme Y X établit que, le 2 mai 2013, elle a adressé un courriel aux services centraux du franchiseur pour expliquer que, le jour même, elle avait consenti une remise de 10 % sur un pantalon d’une valeur de 23,95 € affecté d’une tache résistante au détachant et demander que cette remise ne lui soit pas facturée ; mention du numéro du ticket de caisse est donnée).

La société EPHIGEA informait la clientèle des prix initiaux et réductions décidés par elle par voie de mailing, de sms, de flyers, d’affichages dans les magasins.

Comme l’ont exactement décidé les premiers juges, il résulte de ces éléments que Mme Y X ne disposait en réalité d’aucun pouvoir effectif pour déterminer une politique autonome et personnelle de prix, qu’il s’agisse des montants de prix, des périodes promotionnelles et de leur durée.

Les pièces produites par la société EPHIGEA ne permettent pas de faire la preuve de la liberté de pratique de prix qu’elle allègue.

Tout d’abord, il résulte seulement des constats d’huissiers, de la sommation interpellative et des déclarations de commerçants franchisés alors recueillies d’une part que, sur les articles, sont fixées de grandes étiquettes dont la partie basse comportant le prix est détachable, d’autre part, qu’une manipulation manuelle ou forçage permet de modifier le prix conseillé paramétré dans la caisse. Il en ressort seulement que le prix est modifiable par la réalisation d’une opération matérielle humaine sur l’étiquette ou sur la caisse mais ces pièces n’établissent nullement la réalité d’une liberté effective de fixation des prix, de politique de prix, de rythme des opérations promotionnelles par le franchisé en considération de l’économie générale du contrat de franchise-commission.

Aucun des quatre franchisés auprès desquels un constat d’huissier a été opéré n’a d’ailleurs, au-delà de cette possibilité matérielle de modification du prix conseillé, indiqué qu’il était effectivement libre de sa politique de prix et qu’il pratiquait d’autres prix que ceux déterminés par la société EPHIGEA.

S’agissant des cinq modifications d’un montant unitaire d’un centime d’euro pratiquées par Mme Y X (prix passés de 14,99 € à 15 €, de 24,99 € à 25 € et de 39,99 € à 40 €), celle-ci établit qu’elle a suivi le processus préconisé par les services centraux de la société EPHIGEA consistant, avec l’accord de la clientèle, à augmenter le prix affiché de 0,01 € pour déclencher automatiquement certaines remises (pièce n° 124 – courriel).

Les 8 listings informatiques reproduisant les opérations de caisse enregistrées à des périodes données au sein de huit magasins 'Grain de Malice’ et qui révèlent quelques opérations d’encaissements à des montants plus élevés ou plus bas que le prix conseillé ne font pas preuve de l’effectivité de la liberté de pratique de prix alléguée.

En effet, ces listings ne sont pas accompagnés de témoignages des franchisés concernés qui viendraient corroborer l’affirmation du franchiseur selon laquelle ces modifications, en caisse, des prix à la hausse ou à la baisse auraient correspondu à leur décision d’appliquer un tarif différent du prix conseillé.

Comme la cour l’a précédemment mis en évidence en considération des nombreuses pièces produites par Mme Y X, il s’avère que les franchisés étaient parfois contraints de forcer la caisse pour :

— soit enregistrer un prix plus bas que celui paramétré car, par exemple, la société EPHIGEA avait lancé une opération promotionnelle en magasin avant d’avoir eu le temps de reprogrammer les prix des articles concernés ou parce que le prix paramétré était plus élevé que celui étiqueté sur l’article livré (cf note 'Explications du ticket’ produite par l’appelante, pièce n° 132 de l’intimée : courriel de la centrale du 21 août 2014 à 16h26 informant de ce que tel modèle de robe était étiqueté à 44,99 € alors qu’il passait en caisse à 49,99 € et demandant un réétiquetage des produits en stock ainsi que la vérification des arrivages ultérieurs

, pièce n° 131 : même type de courriel du 28 juillet 2014 pour une robe étiquetée au prix de 99,99 €

et passant en caisse à 129,99 €

);

— soit enregistrer un prix plus élevé que celui paramétré car le franchisé n’avait pas disposé d’un temps suffisant pour modifier l’étiquetage à la baisse de sorte qu’il était contraint de vendre au prix visible pour le client sur l’étiquette.

Il résulte des ces développements que, comme l’ont exactement retenu les premiers juges, Mme Y X ne disposait pas de la liberté de fixer les prix de vente des marchandises fournies par la société EPHIGEA mais exerçait sa profession aux prix imposés par cette dernière.

Les quatre conditions posées par l’article L. 7321-2 du code du travail étant remplies en l’espèce, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a dit que Mme Y X était en droit de revendiquer le statut de gérante de succursale et le bénéfice des dispositions du code du travail dans la mesure de ce qui est prévu au titre II du livre 3 de la septième partie de ce code, sans qu’il soit nécessaire de rechercher l’existence d’un lien de subordination.

) Sur la demande de rappel de rémunération :

Mme Y X sollicite un rappel de rémunération du 1er mars 2010, date d’effet du contrat de franchise-commission 'Grain de Malice', au 31 août 2014, date de rupture de ce contrat.

Elle soutient que, bénéficiant de l’application des dispositions de l’article L. 7321-2 du code du travail, elle est en droit de revendiquer le bénéfice des dispositions du code du travail et de celles de la convention collective de l’habillement et des articles textiles, notamment de la rémunération minimum conventionnelle prévue pour l’emploi de cadre de catégorie B ainsi défini : 'Responsable de magasin/responsable de rayon : en plus d’assurer de manière permanente la gestion courante du magasin ou du rayon (A 1), assure la bonne marche commerciale du rayon ou du magasin, suit l’état des stocks et procède au réapprovisionnement et à l’achat de nouveaux articles.

' et qui correspond à l’emploi qu’elle occupait.

En considération de son ancienneté, elle établit sa demande de rappel de salaire sur la base d’un salaire minimum conventionnel brut mensuel de 2 050 € pour 2010 et 2011, de 2 210 € pour 2012 et de 2 219 € pour 2013 et 2014. Elle parvient à un montant total de 116 000 € dont elle déduit la somme brute de 31 160 € correspondant à la rémunération qu’elle estime avoir prélevée en qualité de gérante indépendante entre 2010 et 2014.

Pour s’opposer au montant de rappel de rémunération sollicité, la société EPHIGEA fait quant à elle valoir que :

— Mme Y X ne peut pas, à la fois, revendiquer le bénéfice des dispositions de l’article L. 7321-2 du code du travail au motif qu’elle aurait exercé son activité aux conditions et prix fixés par le franchiseur et prétendre au statut de cadre ;

— elle ne peut pas 'se dire au-dessus d’agent de maîtrise de catégorie B' auquel elle-même rattache ses responsables de magasin embauchés dans ses succursales et ne peut prétendre qu’à la rémunération brute mensuelle de 1 660 € perçue par une responsable de magasin ayant son ancienneté ;

— selon la jurisprudence de la Cour de cassation, si le mandataire gérant remplissant les conditions de l’article L. 781- 1 2° du code du travail devenu l’article L. 7321-2 du même code, peut se prévaloir de la convention collective applicable à la relation de travail, il ne peut pas, en l’absence de lien de subordination, être assimilé à un cadre salarié et prétendre à la rémunération conventionnelle correspondante ;

— Mme Y X ne peut donc prétendre qu’à un rappel de rémunération de 89 640 € (1 660€ x 54 mois)

dont à déduire la rémunération globale de 40 590 € qu’elle a prélevée au cours de la période en

cause, soit un solde dû de 44 250 €.

****

Si le mandataire gérant remplissant les conditions prévues par l’article L. 7321-2 du code du travail peut se prévaloir de la convention collective applicable à la relation de travail, il ne peut, en l’absence de lien de subordination, être assimilé à un cadre salarié et ne peut en conséquence prétendre à la qualification conventionnelle correspondante.

En l’absence de lien de subordination revendiqué par Mme Y X entre elle et la société EPHIGEA, elle ne peut pas être assimilée à un cadre salarié et donc prétendre au bénéfice de la qualification conventionnelle correspondante, en l’occurrence à la qualification d’agent de maîtrise de catégorie B prévue par le II ('Classification des emplois du personnel d’encadrement) de l’Accord du 12 octobre 2006 relatif aux classifications dans la convention collective de l’habillement et des articles textiles et à un rappel de rémunération correspondant.

La société EPHIGEA justifie de ce qu’au mois d’août 2013, elle versait à une responsable de magasin confirmée recrutée en septembre 2008, donc ayant la même ancienneté que Mme Y X, une rémunération mensuelle brute de base d’un montant de 1 660 € pour 151,67 heures de travail mensuel.

Conformément à la proposition de la société EPHIGEA, il convient de calculer le rappel de rémunération de l’intimée sur la base de cette rémunération brute mensuelle en en déduisant, conformément à l’accord de principe des parties sur ce point, les sommes prélevées par la gérante pour sa rémunération au cours de la même période.

Pour 54 mois, de mars 2010 à août 2014, le montant de la rémunération aurait été de 89 640 € (1 660 € x 54 mois)

.

Il ressort des pièces comptables produites (exercice du 1er juillet au 30 juin de chaque année) que la rémunération nette de Mme Y X a été de zéro euro au titre de l’exercice 2009/2010, de 4 000 € au titre de l’exercice 2010/2011, de 8 000 € pour chacun des exercices 2011/2012 et 2012/2013 et de 11 000 € au titre de l’exercice 2013/2014, soit un montant brut total de 38 130 €.

Par voie d’infirmation du jugement déféré quant au montant alloué, la société EPHIGEA sera en conséquence condamnée à payer à Mme Y X la somme de 58 640 € à titre de rappel de rémunération pour la période du 1er mars 2010 au 31 août 2014.

3 ° ) Sur la demande en paiement d’heures supplémentaires:

- sur l’application à Mme Y X des dispositions du Livre Ier de la troisième partie du code du travail relatives à la durée du travail, au repos et aux congés et de celles de la quatrième partie relatives à la santé et à la sécurité au travail :

Aux termes de l’article L. 7321-3 du code du travail, 'Le chef d’entreprise qui fournit les marchandises […] n’est responsable de l’application aux gérants salariés de succursales des dispositions du Livre Ier de la troisième partie relatives à la durée du travail, au repos et aux congés et de celles de la quatrième partie relatives à la santé et à la sécurité au travail que s’il a fixé les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail de l’établissement ou si celles-ci ont été soumises à son accord.

'.

La société EPHIGEA conteste avoir fixé les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail au sein de l’établissement exploité par Mme Y X ou que celles-ci aient été soumises à son accord.

Cette dernière soutient qu’au contraire, les pièces versées aux débats font la preuve de ce que tel était bien le cas.

****

Pas plus que la santé, les conditions de travail ne sont définies par des dispositions légales.

Le rapport Fraisse-Cazalis sur la loi du 23 décembre 1982 qui a réalisé l’unification de l’approche hygiène et sécurité et celle de l’amélioration des conditions de travail définit comme caractérisant les conditions de travail 'toutes les caractéristiques de la situation dans lesquelles un travailleur exerce l’activité que son contrat l’oblige à effectuer et, par exemple, les horaires de travail, les cadences de travail, le bruit, la lumière, la chaleur, l’hygrométrie au poste de travail, les outils et les matières à utiliser, les ordres, signaux, informations et règles dans le travail, l’espace de travail, la posture à adopter, le fonctionnement et les incidents des machines etc…'. Il s’agit en somme de tout ce qui est l’acte de travail et l’environnement dans lequel il doit être effectué.

La circulaire du 25 mars 1993 DRT n° 93-15 qui précise les compétences du CHSCT, dont la mission porte précisément sur le contrôle des conditions de travail, de santé et de sécurité dans l’entreprise, indique que ce comité doit être associé à la recherche de solutions concernant 'l’organisation matérielle du travail (charge de travail, rythme, pénibilité des tâches, élargissement et enrichissement des tâches), l’environnement physique du travail (température, éclairage, aération, bruit, poussières, vibrations), l’aménagement des postes de travail et leur adaptation à l’homme en vue notamment de réduire le travail monotone et sous cadence, l’aménagement des lieux de travail et leurs annexes, la durée et les horaires de travail, l’aménagement du temps de travail (travail de nuit, travail posté)'.

Comme la cour l’a déjà fait ressortir aux termes des développements consacrés à la question de la reconnaissance de la qualité de gérant de succursale, il ressort des nombreuses pièces versées aux débats notamment que :

— aux termes du contrat de franchise-commission dont le caractère intuitu personae est expressément souligné, Mme Y X avait l’obligation de diriger personnellement le magasin et de le maintenir ouvert conformément aux créneaux horaires pratiqués par les commerces similaires soit, en l’occurrence, s’agissant d’un magasin tenu au respect des horaires de la galerie marchande du centre commercial, de 9 h 30 à 19 h 30 du lundi au samedi ; elle avait l’obligation de diffuser de manière permanente la musique propre à l’enseigne Grain de Malice telle que mise au point par le prestataire choisi par la société EPHIGEA et elle devait conclure à cet effet 'toute convention avec ledit prestataire' ;

— le franchiseur imposait l’agencement du magasin et la présentation des articles dans le moindre détail ;

— aux termes de ce contrat, le franchiseur lui imposait également de disposer en permanence du personnel suffisant, adapté à l’exploitation de son magasin, qu’elle devait recruter, dont elle devait assurer la formation et superviser 'le bon comportement' afin que ce personnel mette en valeur les produits vendus, notamment en portant des modèles de la collection et par un bon relationnel avec le client ;

— pour autant, outre l’injonction de port de modèles de la collection, le franchiseur intervenait directement dans la direction du personnel puisque les courriels versés aux débats établissent notamment :

¤ qu’en l’absence de la gérante, il s’adressait directement aux vendeuses du magasin, par exemple, dès l’ouverture du magasin, par courriel, pour les responsabiliser et les inviter à 'relever le défi du jour' par la réalisation d’un chiffre d’affaires digne de leur 'combativité et de leur investissement' ;

¤ qu’il adressait au franchisé des QCM à faire passer aux vendeuses et à lui retransmettre une fois effectués afin qu’il puisse vérifier leur bon niveau d’assimilation du 'book commercial’ (cf pièce n° 123 de l’intimée : courriel du 30 juillet 2013 annonçant l’arrivée du 'book commercial’ en version papier et sur internet le 2 août et demandant aux franchisés et responsables de succursales d’en assurer la prise de connaissance par toutes les équipes pour le 2 septembre avec retour demandé pour cette date au plus tard de tous les QCM

) ;

— la société EPHIGEA adressait quasi quotidiennement et à très bref délais de mise en oeuvre, à Mme Y X comme aux autres franchisés et aux responsables de succursales, par courriels et par le biais des notes d’informations appelées 'GD Minute' des instructions très précises sur l’organisation des soldes ou de telle ou telle opération commerciale qu’elle avait décidée, avec indication jour par jour des tâches à accomplir, sur les présentations à mettre en place au sein de la boutique à tel délai très court en général, avec des contre-ordres par rapport aux précédentes instructions, sur les présentations à enlever et les supports de présentation à jeter, sur les réétiquetages de marchandises à opérer en urgence en raison de la modification du prix conseillé, sur des opérations publicitaires à réaliser (exemple : distribution de flyers à effectuer à l’extérieur, lesdits flyers étant expédiés par courriel à charge pour le franchisé de les éditer et les découper avant de pouvoir les distribuer), sur des transferts de marchandises à opérer en faveur d’autres magasins 'Grain de Malice’ ;

— la conférence téléphonique régionale hebdomadaire était également l’occasion de transmettre des instructions précises mais aussi d’analyser par le menu le niveau de fréquentation des magasins, dont celui de l’intimée, le niveau de chiffre d’affaires réalisé, l’évolution de ces données au fil du temps, de classer les magasins de la zone concernée et de donner des directives d’actions à mettre en oeuvre pour améliorer les résultats ;

— ces conférences téléphoniques étaient annoncées à bref délai (exemple, pièce n° 134 de l’intimée : courriel envoyé par le responsable régional le lundi 25 novembre 2013 à 21h26 demandant aux responsables de magasins et franchisés de se rendre disponibles le lendemain pour une réunion téléphonique fixée à 11 h 30)

 ;

— le franchiseur faisait vérifier le respect de ses directives par des visites de 'RDS’ et de clientes dites 'fantômes’ ;

— il imposait les dates et la durée des opérations commerciales à mettre en oeuvre ; il lançait lui-même certaines opérations commerciales au moyen de sms et de courriels adressés aux clientes, la franchisée étant informée au mieux 24 h ou 48 h à l’avance du lancement d’une opération et de ses conditions d’application (cf à titre d’exemple pièce n° 135 de l’intimée : courriel général du franchiseur en date du vendredi 6 décembre 2013 à 17 h 33 annonçant le lancement, à compter du lundi suivant, d’une opération 'cartes cadeaux GDM' du 9 au 24 décembre 2013) ; il exigeait des transferts de marchandises vers d’autres magasins à brefs délais 'dans le but de maximiser le chiffre d’affaires régional

' (cf pièce n° 137 de l’intimée : courriel du 12 mars 2014 à 17 h 12) .

Les comptes rendus de réunions téléphoniques et les courriels versés aux débats traduisent clairement que la direction de la société EPHIGEA avait parfaitement conscience d’interférer étroitement dans l’organisation du travail des franchisés, notamment de Mme Y X, et de leurs salariés et de générer d’importantes charges de travail régulières, voire des surcharges de travail, de dernière heure.

A titre d’exemples :

— pièce n° 16 : dans le cadre d’une conférence téléphonique du 22 mai 2012, la responsable régionale demandait à toutes les équipes, de mettre la priorité sur les clientes du mercredi au samedi, soulignant qu’elle constatait que, bien souvent, les ventes étaient arrêtées par les vendeuses et non par les clientes. Elle ajoutait le commentaire suivant : 'Car elles [les vendeuses] pensent aux colis qu’elles ont à finir de traiter, aux bustes qu’il faut faire etc… n’oublions pas notre métier premier même si parfois la surcharge de travail nous paraît insurmontable … c’est bien notre CA qui compte avant tout ! Revoyez vos organisations (heures et lieux) de colis mais il y a souvent de bon pm et donc de bonnes ventes à faire le matin alors que parfois le début d’apm c’est le creux ! etc

' ;

— pièce n° 107 : courriel général d’instructions adressé aux magasins dans le cadre de l’opération 'Jours Malice' : 'Nous sommes conscients que nous vous donnons du travail supplémentaire mais sommes aussi persuadés que cela va booster notre business

'.

Par courriel du 28 octobre 2013 (pièce n° 111), Mme Y X faisait observer à la société EPHIGEA que le fait de leur demander, à la dernière minute, d’installer la table principale des 'Jours Malice’ le matin même du premier jour de cette opération et non la veille générerait nécessairement des heures supplémentaires. Elle soulignait qu’il lui était, dans le même temps, imparti d’opérer à bref délai des transferts de marchandises et qu’en cette semaine de promotion, son temps de travail excédait 'allègrement' les 55 heures.

Comme l’ont exactement retenu les premiers juges, il ressort de ces éléments non discutés dans leur matérialité, qu’au-delà de la dépendance économique dans laquelle elle maintenait Mme Y X, la société EPHIGEA déterminait directement les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail de son établissement en termes d’organisation matérielle du travail, d’aménagement du temps de travail (tâches à effectuer et périodes et délais pour les réaliser avec vérification de leur respect, organisation du temps, donc charge et rythme de travail), d’aménagement des locaux et de l’environnement, de management des salariés (termes employés dans les messages adressés directement à ces derniers, contrôle direct de leur formation).

Mme Y X est en conséquence bien en droit de prétendre au bénéfice des dispositions du Livre Ier de la troisième partie du code du travail relatives à la durée du travail, au repos et aux congés et de celles de la quatrième partie relatives à la santé et à la sécurité au travail et donc à réclamer le paiement d’un rappel de salaire pour heures supplémentaires.

- sur le rappel de rémunération pour heures supplémentaires :

S’il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties et que l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, en cas de litige relatif à l’existence et au nombre d’heures de travail accomplies il appartient toutefois au salarié d’étayer sa demande en paiement d’heures supplémentaires par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

Contrairement à ce que soutient la société EPHIGEA, ces dispositions sont applicables en l’espèce dès lors que Mme Y X peut prétendre au bénéfice des dispositions du code du travail relatives à la durée du travail.

Mme Y X soutient qu’elle accomplissait au moins 50 heures de travail par semaine, soit 11 heures supplémentaires hebdomadaires, en considération d’un salaire minimum conventionnel rémunérant 39 heures de travail hebdomadaire.

La société EPHIGEA estime que sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires n’est pas étayée et que l’intimée ne rapporte pas la preuve de ce qu’elle n’aurait pas été en mesure d’organiser son temps avec ses vendeuses, notamment, de faire assurer par ces dernières l’ouverture et la fermeture du magasin.

Elle estime en tout cas que, sur la base d’un salaire brut mensuel de 1 660 €, le rappel de salaire pour heures supplémentaires ne peut pas excéder 44 250 € pour la période de 54 mois en cause.

****

La demande de rappel de rémunération pour heures supplémentaires formée par Mme Y X est étayée tout d’abord par les témoignages concordants de ses deux salariées qui indiquent que, quoique bénéficiant d’un jour de repos hebdomadaire, l’intimée accomplissait au moins 50 heures de travail hebdomadaire rendues nécessaires non seulement par la gestion courante du magasin, tant au plan commercial qu’administratif, mais aussi par le travail important et de dernière heure imposé par les fréquentes opérations commerciales obligatoires et les changements de prix nécessitant des réétiquetages décidés par la société EPHIGEA.

Elle est également étayée par les dispositions contractuelles qui lui imposaient d’être présente quasiment pendant toute l’amplitude horaire d’ouverture du magasin, soit de 9 h 30 à 19 h 30 mais aussi par les très nombreuses pièces précédemment analysées (courriels des services centraux de la société EPHIGEA, courriels de Mme Y X, le catalogue GDM 'Le GDMAG', les notes d’informations appelées 'GD Minute ! L’information minute aux magasins Grain de Malice', les comptes rendus des réunions téléphoniques régionales hebdomadaires)

desquels il ressort que :

— Mme Y X recevait du franchiseur, si ce n’est systématiquement quotidiennement, en tout cas plusieurs fois par semaine, des instructions de dernière heure très précises et contraignantes lui imposant de réaliser, parfois avant l’ouverture du magasin, tout en veillant aux bonnes conditions d’accueil des clients et de tenue du magasin, des tâches telles que la mise en place d’articles et / ou de supports de présentations et l’habillage de mannequins selon des données très précises dont le respect était vérifié par le passage d’émissaires de la société EPHIGEA, le réétiquetage de très nombreux articles en fonction des changements de prix décidés par le franchiseur, l’édition et le découpage de supports publicitaires en vue de leur distribution à très bref délais, la préparation d’articles qu’elle devait expédier à d’autres exploitants de magasins à l’enseigne 'Grain de Malice’ afin d’assurer leur réassort ;

— l’organisation du travail était également fortement perturbée par les rythmes très incertains des livraisons, par l’ampleur de chaque livraison liée à la réduction du nombre de livraisons décidée par le franchiseur et par les retards de livraisons imposant l’accomplissement d’heures supplémentaires pour respecter les consignes de date de mise en place des articles en rayon (cf par exemple pièce n° 55 : échanges de courriels entre Mme Y X et le service central de la société EPHIGEA au sujet d’une livraison de 360 pièces) ;

— la direction de la société EPHIGEA était parfaitement consciente de l’importance de la charge courante de travail et de la surcharge de travail régulièrement générée par ses nombreuses instructions de dernière heure à traiter en urgence (à titre d’exemples : les pièces n° 16 et 107 ci-dessus citées mais aussi pièce n° 55, le courriel adressé par le service central de la société EPHIGEA au service chargé des livraisons le 20 août 2013 pour souligner qu’au sein du magasin de Mme Y X, 'la mise en place du GDMag était fortement retardée' du fait du délai mis à la livrer des 360 articles attendus).

La société EPHIGEA ne produit aucun élément pour tenter de justifier des horaires effectivement accomplis par Mme Y X.

La demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires est formée au titre de la période écoulée du 1er mars 2010 au 31 août 2014 ce qui représente 44 semaines en 2010, 49 semaines pour chacune des années 2011 à 2013 et 35 semaines en 2014, soit au total 235 semaines.

Il ressort des courriels versés aux débats que Mme Y X prenait des congés et, si le magasin était certes ouvert certains jours fériés, elle admet avoir pu, sur la période en cause, bénéficier de 47 jours fériés non travaillés.

La cour dispose des éléments nécessaires pour retenir que, jours fériés inclus, l’intimée a bénéficié de trois semaines de congés pour la part considérée de chacune des années 2010 et 2014 et de quatre semaines de congés pour chacune des années 2011 à 2013, de sorte que le rappel de salaire pour heures supplémentaires doit être effectué sur 217 semaines à raison de 15 heures supplémentaires par semaine travaillée (de 35 heures hebdomadaires rémunérées à 50 heures de travail effectif).

En considération d’un taux horaire de 10,94 € brut (pour une rémunération mensuelle de 1 660 €), la créance de rappel de rémunération pour heures supplémentaires de Mme Y X s’établit à la somme de 43 927,31 €. La cour ne pouvant pas statuer au-delà de la demande, par voie d’infirmation du jugement déféré quant au montant alloué, la société EPHIGEA sera condamnée à lui payer la somme de 41 849 €.

) Sur la rupture de la relation contractuelle entre les parties et ses conséquences pécuniaires :

Le 22 janvier 2014, la société EPHIGEA a adressé à Mme Y X le courrier ainsi libellé pour mettre fin à la relation contractuelle :

'Madame,

En date du 2 février 2010, un contrat de commission-affiliation sous enseigne Grain de Malice a été signé avec votre société 2MSL et la société PHILDAR, aujourd’hui dénommée EPHIGEA.

Le contrat a été conclu pour une durée de 5 ans, le contrat devant toutefois se terminer le dernier jour de la saison précédent immédiatement le 5e anniversaire.

Conformément à l’article 3 du contrat, le contrat ne pourra pas se renouveler par tacite reconduction.

Par la présente, nous vous confirmons donc que le contrat de commission affiliation qui nous lie prendra fin le 31/08/2014.

A cette date, il vous sera demandé de déposer l’enseigne Grain de Malice et de restituer les marchandises et le terminal de paiement.

'.

Mme Y X soutient que ce courrier s’analyse en une lettre de licenciement et que, celle-ci n’étant pas motivée, la rupture de la relation contractuelle doit produire les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La société EPHIGEA conteste cette analyse arguant de ce que le courrier emportant de sa part la décision de ne pas renouveler un contrat de franchise ne pouvait pas être motivé de sorte qu’il ne peut pas lui être fait utilement grief du défaut de motivation de cette décision.

Elle ajoute qu’à supposer qu’ 'on puisse et doive après coup dater et justifier la rupture d’un contrat de travail qui n’a jamais existé, la cour pourrait juger que la saisine du conseil de prud’hommes par Mme Y X s’analyse soit en une prise d’acte, soit en une démission avec toutes conséquences de droit'.

****

Comme l’oppose à juste titre Mme Y X, sa saisine du conseil de prud’hommes intervenue le 2 juillet 2013 ne peut s’analyser ni en une démission, laquelle doit être expresse et dépourvue d’équivoque, ni en une prise d’acte de la rupture du contrat de travail, laquelle doit au demeurant être adressée directement à l’employeur, dans la mesure où elle ne contient de sa part, ni directement, ni par l’intermédiaire de son conseil, la moindre expression de sa volonté de rompre la relation contractuelle et où, de fait, celle-ci s’est poursuivie jusqu’au 31 août 2014, l’intimée ayant continué à assurer l’exploitation du fonds de commerce jusqu’à cette date.

Par application des dispositions de l’article L. 7321-2 du code du travail à l’activité de Mme Y X, la lettre que la société EPHIGEA lui a adressée le 22 janvier 2014 pour lui signifier la fin de la relation contractuelle à effet au 31 août suivant, s’analyse bien en une lettre de licenciement.

Ce courrier étant, en violation des dispositions de l’article L. 1235-6 du code du travail, dépourvu de tout motif de rupture invoqué par la société EPHIGEA, les premiers juges ont, à juste titre, considéré que la rupture devait produire les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Mme Y X a dès lors droit au paiement d’une indemnité compensatrice de préavis, et d’une indemnité conventionnelle de licenciement, non contestées en leur principe et dont le montant doit être fixé en considération d’une rémunération brute mensuelle de 1 660 €.

Par voie d’infirmation du jugement déféré quant aux montants alloués, il convient de condamner la société EPHIGEA à payer à Mme Y X de ces chefs les sommes respectives de 3 320 € et 1 328 €.

Elle a également droit à des dommages et intérêts pour licenciement injustifié dont la société EPHIGEA ne conteste pas qu’ils doivent être fixés en application de l’article L. 1235-3 du code du travail selon lequel le montant de l’indemnité ne peut pas être inférieur aux rémunérations des six derniers mois.

En considération des éléments de la cause et faute cependant de démonstration d’un préjudice plus ample indemnisable à ce titre, la cour dispose des éléments nécessaires pour porter à la somme de 20 000 € le montant des dommages et intérêts que la société EPHIGEA sera condamnée à payer à Mme Y X pour rupture emportant les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

) Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives au cours des intérêts moratoires.

Les conditions de l’article 1154 ancien du code civil qui, en application de l’article 9 de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, sont applicables à la présente instance en ce qu’elle a été engagée avant le 1er octobre 2016, date d’entrée en vigueur de ladite ordonnance, étant remplies, il convient de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts formée par la salariée dans les conditions de ce texte.

) Sur la remise des documents de fin de contrat :

Il convient d’ordonner à la société EPHIGEA de remettre à Mme Y X un certificat de travail et l’attestation Pôle emploi mentionnant notamment un emploi de gérante de succursale.

) Sur les demandes reconventionnelles initiales de la société EPHIGEA :

Il convient de constater qu’en cause d’appel, la société EPHIGEA ne critique pas les dispositions du jugement qui l’ont déboutée de ses demandes reconventionnelles en remboursement des avance de trésorerie et 'aide financière’ consenties à Mme Y X.

La cour n’étant saisie d’aucune demande ni d’aucun moyen de ces chefs, le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, en matière sociale, par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;

Infirme le jugement entrepris s’agissant du montant des sommes allouées à Mme Y X à titre de rappel de rémunération du chef de la période du 1er mars 2010 au 31 août 2014, de rappel de rémunération pour heures supplémentaires, d’indemnité compensatrice de préavis, d’indemnité de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, et en ce qu’il a dit que Mme Y X relevait de la catégorie 'cadre catégorie B’ et a fixé la rémunération de référence à la somme brute mensuelle de 2 219 € ;

Le confirme en toutes ses autres dispositions ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute Mme Y X de sa demande tendant à se voir reconnaître le statut de cadre de la catégorie B de la convention collective de l’habillement et articles de textile et de sa demande en fixation d’un salaire brut mensuel conventionnel de référence de 2 219 € ;

Condamne la société EPHIGEA à payer à Mme Y X les sommes suivantes :

—  58 640 € de rappel de rémunération pour la période du 1er mars 2010 au 31 août 2014,

—  41 849 € de rappel de rémunération pour heures supplémentaires,

—  3 320 € d’indemnité compensatrice de préavis,

—  1 328 € d’indemnité de licenciement,

—  20 000 € de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1154 ancien du code civil ;

Ordonne à la société EPHIGEA de remettre à Mme Y X un certificat de travail et l’attestation Pôle emploi mentionnant, notamment, un emploi de gérante de succursale ;

Condamne la société EPHIGEA à payer à Mme Y X la somme de 3 000 € au titre de ses frais irrépétibles d’appel et la déboute elle-même de ce chef de prétention ;

Condamne la société EPHIGEA aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

V. E F G-H

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Cour d'appel d'Angers, Troisième chambre, 25 juillet 2017, n° 15/00202