Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 15 janvier 2019, n° 17/04320

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www.flpavocats.com · 14 décembre 2021

La protection des photographies de presse Droit de la propriété intellectuelle Synthèse : Les tribunaux dénient souvent aux photojournalistes l'existence de choix libres et créatifs, les privant ce faisant de la protection du droit d'auteur. Pressé de rendre compte d'évènements d'actualité, le photojournaliste ne pourrait que restituer ce qu'il voit, sans apport personnel. Les scènes et l'instant saisi lui seraient totalement étrangers. Au demeurant, les performances techniques des appareils numériques réduisent à peu de chose les choix qu'il peut opérer lors de la prise de vue. S'il …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 1re ch. civ. b, 15 janv. 2019, n° 17/04320
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 17/04320
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

N° RG 17/04320 – N° Portalis DBVX-V-B7B-LCMV Décisions :

— Tribunal de Grande Instance de Marseille

Au fond du 07 février 2013

RG : 10/09094

1re chambre civile

— Cour d’Appel d’AIX EN PROVENCE

du 19 novembre 2015

RG : 13/06221

2e chambre

— Cour de Cassation Civ.1

du 11 mai 2017

[…]

Arrêt n°563 FS-D

SAS Y ET CIE

C/

X

SA LA PROVENCE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

1re chambre civile B

ARRET DU 15 Janvier 2019

statuant sur renvoi après cassation

APPELANTE :

La SAS Y ET CIE, prise en la personne de son représentant légal en exercice

[…]

[…]

Représentée par la SELARL AVOC ART, avocats au barreau de LYON

Assistée de la SELARL PIERRAT, avocats au barreau de PARIS

INTIMÉS :

M. D X

né le […] à […]

[…]

[…]

Représenté par la SELARL LAFFLY & ASSOCIES – LEXAVOUE LYON, avocats au barreau de LYON

Assisté de Me H AUBRESPY, avocat au barreau de MARSEILLE

La société LA PROVENCE, SA, prise en la personne de son Président Directeur Général en exercice, domicilié audit siège

[…]

[…]

Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON

Assistée de L’AARPI Bruno LOMBARD – Éric SEMELAIGNE – Béatrice DUPUY, avocats au barreau de MARSEILLE

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 06 Septembre 2018

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 20 Novembre 2018

Date de mise à disposition : 15 Janvier 2019

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— Françoise CARRIER, président

— F G, conseiller

— Florence PAPIN, conseiller

assistés pendant les débats de Myriam MEUNIER, greffier

A l’audience, F G a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Françoise CARRIER, président, et par Myriam MEUNIER, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DE L’AFFAIRE

M. D X a exercé un emploi de reporter photographe, en charge de la rubrique sportive auprès du journal «La Provence».

Dans le cadre de son travail, il a réalisé de nombreux clichés photographiques en relation avec l’Olympique de Marseille.

Entre 2006 et 2007, la société La Provence a cédé à titre onéreux à la société Y et Compagnie, éditeur, des lots de photographies provenant de son fond d’archive, dont un certain nombre réalisées par M. X.

La société Y et Compagnie les a utilisées pour illustrer divers ouvrages à savoir :

— le dictionnaire officiel de l’Olympique de Marseille 2006, 2009 et 2010,

— l’histoire de l’Olympique de Marseille 2007, 2008, 2009 et 2010,

— l’Agenda de l’Olympique de Marseille 2010

— et le livre géant de l’Olympique de Marseille 110 ans d’émotions de 2009

M. X a quitté la société La Provence le 31 mai 2008.

Par acte du 25 juin 2010, il a assigné en contrefaçon de droit d’auteur devant le tribunal de grande instance de Marseille la société Y, laquelle par acte du 9 mars 2011 a appelé en cause la société La Provence.

Par jugement du 7 février 2013 le tribunal de grande instance de Marseille a :

*dit qu’en reproduisant, sans son autorisation, 484 photographies dont M. X est l’auteur dans le Dictionnaire officiel de l’Olympique de Marseille 2006, 2009 et 2010, l’Histoire de l’Olympique de Marseille 2007, 2008, 2009 et 2010, l’Agenda de l’Olympique de Marseille 2010 et le livre géant de l’Olympique de Marseille 110 ans d’émotions de 2009, la société Y a porté atteinte aux droits patrimoniaux et moraux de M. X ;

*condamné la société Y à payer à M. X la somme de 33 880 € 00 [soit 70€ par photographie] à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à son droit patrimonial ;

*condamné La Provence à garantir la société Y [pour 48 clichés] à hauteur de 3 360 € ;

*condamné la société Y à payer à M. X la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à son droit moral ;

*débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

*prononcé l’exécution provisoire à concurrence de 75% des condamnations ;

*condamné la société Y à payer à M. X la somme de 1 500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

*condamné la société Y au paiement des dépens.

La société Y & Cie a interjeté appel devant la cour d’appel d’Aix en Provence les 22-25 mars 2013.

Elle a demandé à la cour d’infirmer le jugement et subsidiairement de condamner la société La Provence à la relever et garantir.

Elle a soutenu :

— que le contrat de travail précisait que les droits d’exploitation de M. X ont été dévolus à son employeur La Provence qui pouvait en disposer à sa convenance, ceux-ci étant inclus dans les salaires et sommes complémentaires à titre de droits d’auteur,

— que M. X ne prouvait ni être l’auteur des photographies ni que celles-ci étaient éligibles au droit d’auteur,

— que la quasi-totalité des clichés provenait des archives de La Provence et ne mentionnait pas de nom de photographe,

— qu’elle avait acquis de bonne foi de La Provence les droits de reproduction des images,

— subsidiairement qu’il y avait absence de préjudice, les 70 € retenus par le tribunal étant excessifs et ne correspondant pas aux usages pour la reproduction de photographies de sport,

— que M. X ne peut revendiquer que les 20 € appliqués par La Provence, soit pour les 147 photographies un total de 2 940 € (dont 2 680 € à la charge de celle-ci).

M. D X a demandé à la cour de confirmer le jugement, sauf sur le montant des dommages et intérêts pour préjudice moral.

Il a soutenu :

— que l’acquisition de ses photographies par la société Y auprès de La Provence était irrégulière car faite sans son accord ;

— que ses photographies étaient originales : placement physique, angle de la prise de vue, éclairage, intention, sentiment personnel d’une action, d’une expression, d’un mouvement, choix opérés de figer un instant plutôt qu’un autre, post-production par modification des cadrage et couleurs, composition, compte-rendu de son appréciation des faits ; cette originalité est attestée par la profession ;

— que des photographies avaient été prises dans les coulisses et vestiaires du stade, et à bord du navire Phocéa de H I ;

— qu’il avait repris pour 139 photographies les circonstances de leur prise et le travail effectué pour les réaliser de manière originale.

La société La Provence avait demandé à la cour d’ infirmer le jugement, et de débouter M. X de l’ensemble de ses demandes dirigées à l’encontre de la société Y, à titre subsidiaire de confirmer le jugement en ce qu’il avait décidé qu’elle ne devait sa garantie à la société Y que pour 48 photographies revendiquées par M. X.

Elle a soutenu que la cession à la société Y des photographies s’était faite pour 20 € par photographies et seulement pour 48 clichés de M. X.

Par arrêt du 19 novembre 2015, la cour d’appel d’Aix en Provence a :

— infirmé le jugement du 7 février 2013, et débouté M. D X de toutes ses demandes contre la société Y & Cie,

— condamné le premier à verser à la seconde une indemnité de 2 000 € au titre des frais irrépétibles,

— débouté La Provence de sa demande au titre des frais irrépétibles,

— rejeté toutes autres demandes,

— condamné M. D X aux entiers dépens de première instance et d’appel, avec application de l’article 699 du code de procédure civile.

La cour a jugé :

— que les photographies reproduites sur papier et celles au format jpg. étaient les seules à considérer, à l’exclusion de celles simplement listées, et qu’il y avait lieu de retenir les 3 pièces communiquées numéros 31, 32 et 53 soit 133 + 140 = 273 clichés,

— que le droit d’auteur n’existait que si les photographies étaient une oeuvre de l’esprit c’est-à-dire originale et qu’elles portaient l’empreinte de la personnalité de l’intéressé,

— que 3 documents émanant de La Provence concernaient la situation juridique de M. X par rapport à ses photographies,

— que le courrier du 1er juin 1983 par lequel la première, engageant le second en qualité de, précise : 'En contrepartie de [votre] rémunération (…), nous aurons le droit de diffuser, de reproduire par n’importe quel moyen que ce soit et de céder à des tiers, les photographies et les documents obtenus par vous, aussi souvent que nous l’estimerons utile et vous ne pourrez réclamer, de ce chef, aucune rémunération supplémentaire',

— que la convention du 25 mai 2000 stipulant que «sera prélevée [par La Provence], sur les redevances encaissées par [elle] au titre de l’utilisation des clichés photographiques réalisés par [M. X], une somme égale à 0,46% de leur montant hors taxe, [laquelle sera inscrite] au crédit du compte commun (…) des reporters-photographes du service photo de La Provence»,

— que la lettre écrite par La Provence le 22 juin 2009 à M. X exposant que l’éditeur d’un ouvrage pour les 110 ans de l’O.M. 'souhaiterait utiliser certaines [photographies] (…) ; son choix s’est notamment porté sur 48 des photos que vous avez réalisées (…) durant votre collaboration au journal. (…) nous vous demandons de bien vouloir nous autoriser expressément à utiliser ces 48 photographies aux fins de réalisation dudit ouvrage et ce, moyennant une rémunération fixée à 22 € par photographie, soit 1 056 € au total',

— que le premier document excluait toute rémunération au titre du droit d’auteur,

— que les deux autres ne précisaient pas que les sommes versées (le deuxième), ou proposées mais sans réponse de M. X (le troisième), constituaient de tels droits,

— que les photographies litigieuses représentent des joueurs du club de football l’OM, soit en portrait collectif soit en portrait individuel, tantôt de manière statique et tantôt en action; elles ont été prises pour leur quasi-totalité dans des lieux publics même si par sa profession de photographe M. X avait accès à des lieux réservés à d’autres membres de cette profession. Ces photographies démontrent de véritables qualités techniques et esthétiques, puisqu’un grand nombre concerne des footballeurs en action rapide. Cependant elles captent ces personnes et leurs mouvements en utilisant notamment la technique de la prise en rafale qui permet une action très rapide du déclencheur, et où l’appareil photographique fonctionne sans véritable choix du photographe. Le processus de mise en scène et d’éclairage n’existe pas puisque l’attitude et le comportement des personnes photographiées ainsi que les lumières naturelles et artificielles ne sont pas décidés par M. X lui-même ; les cadrages et choix d’un angle de vue, vu la rapidité des actions de jeu en football, sont en partie le fruit du hasard et ne démontrent pas une recherche qui porte l’empreinte de la personnalité et de la sensibilité de l’intéressé, lequel photographie des footballeurs et des scènes de jeu de football c’est-à-dire des sujets ordinaires sans faire de recherches personnelles. Enfin les quelques modifications opérées après coup sur les photographies ont amélioré ces dernières mais sans leur apporter une originalité ou l’empreinte de la personnalité de M. X,

— que c’est à tort que le tribunal a retenu que les photographies litigieuses étaient de nature à être protégées par le droit d’auteur.

M. D X a formé un pourvoi en cassation à l’encontre de cet arrêt.

M. X a d’abord fait grief à l’arrêt de la cour d’Aix en Provence, d’avoir écarté les photographies simplement listées en s’abstenant d’examiner certaines pièces qu’il avait produites.

La Cour de cassation a rejeté ce moyen en ce qu’il tendait à remettre en discussion les constatations et appréciations souveraines de la cour d’appel.

M. X a ensuite fait grief à la cour, pour écarter l’originalité des photographies de ne pas avoir procédé à un examen distinct des photographies entre elles et sans apprécier leur originalité respective en les regroupant au besoin, en fonction de leurs caractéristiques communes.

Sur ce moyen la Cour a jugé qu’en se déterminant sans procéder à un examen distinct des photographies entre elles et sans apprécier leur originalité respective, en les regroupant, au besoin, en fonction de leurs caractéristiques communes, la cour d’appel n’avait pas donné de base légale à sa décision.

Par arrêt du 11 mai 2017, la Cour de cassation a donc cassé l’arrêt sauf en ce qu’il rejette les demandes de M. X relatives aux photographies simplement listées dans les pièces produites, et a remis sur les autres points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et pour être fait droit, les a renvoyé devant la cour d’appel de Lyon.

La société Y et Cie a saisi la cour d’appel Lyon par déclaration du 12 juin 2017.

Elle demande à la cour :

— de déclarer la société Y & CIE recevable et bien fondée en son appel vu l’arrêt rendu par la Cour de Cassation le 11 mai 2017,

— de circonscrire les photographies revendiquées par M. X à celles identifiées et décrites dans ses conclusions,

Vu l’article 455 du code de procédure civile ;

— d’infirmer le jugement du 7 février 2013 en ce qu’il a omis de caractériser l’originalité de chacune des photographies revendiquées par M. X ;

— d’infirmer le jugement du 7 février 2013 en ce qu’il n’a pas identifié au sein des ouvrages mis en cause les illustrations considérées comme contre-faisantes ;

— d’infirmer le jugement du 7 février 2013 en ce qu’il a considéré que M. X justifiait de sa qualité d’auteur sur des images dont la source et l’intégrité n’étaient pas établies ;

— d’infirmer le jugement du 7 février 2013 en ce qu’il a considéré, sans motivation, que M. X justifiait de sa qualité d’auteur de 494 photographies ;

— d’infirmer le jugement du 7 février 2013 en ce qu’il a considéré, sans motivation et sans précision, que 484 photographies sont originales, et donc éligibles à la protection par le droit d’auteur ;

— de constater que le jugement du 7 février 2013 a omis de statuer sur la demande d’irrecevabilité formée à titre subsidiaire;

— d’infirmer le jugement du 7 février 2013 en ce qu’il a alloué à M. X des indemnités au titre de l’atteinte à ses droits patrimoniaux et moraux, ainsi qu’à une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— d’infirmer le jugement du 7 février 2013 en ce qu’il a, sans motivation, limité la garantie de la société La Provence à 48 images,

en conséquence,

statuant à nouveau,

Vu l’article 1315 du code civil dans son ancienne rédaction ;

Vu l’article 1316-1 du code civil dans son ancienne rédaction ;

Vu l’article 202 du code de procédure civile ;

— de constater que M. X ne produit aucun support photographique original permettant de démontrer qu’il aurait pris les 133 images visées en pages 20 à 30 de ses conclusions ;

— de débouter M. D X de son appel incident visant à évaluer à la somme de 30 000 euros le montant du préjudice moral qu’il soutient avoir subi ;

— de constater que les pièces adverses 22, 25 et 26 ne respectent pas les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile ;

en conséquence,

— de déclarer M. D X irrecevable, et mal fondé en l’ensemble de ses demandes ;

Vu l’article 1315 du code civil dans son ancienne rédaction ;

Vu l’article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle,

Vu l’article 16 du code civil ;

— de constater que M. D X ne définit pas les caractéristiques susceptibles de rendre éligibles à la protection par le droit d’auteur les 133 images visées en pages 20 à 30 de ses conclusions ;

— de constater que les 133 images visées en pages 20 à 30 des conclusions de M. X ne reflètent pas l’empreinte de sa personnalité, faute d’originalité ;

— de constater que 133 images visées en pages 20 à 30 de ses conclusions sont le résultat d’un travail de commande technique, et non d’oeuvres de l’esprit singulières dont l’esthétique résulterait de l’intervention délibérée du photographe ;

en conséquence,

— de déclarer M. D X irrecevable, et mal fondé en l’ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire,

Vu l’article 16 du code civil,

Vu l’article L.132-6 du Code de la Propriété Intellectuelle,

Vu l’article 31 du Code des usages en matière d’illustration photographique,

Vu l’article L.122-4 du Code de la Propriété Intellectuelle,

— de constater que M. D X n’identifie pas avec précision dans ses écritures les reproductions qu’il estime litigieuses ;

— de constater que M. X ne démontre pas que les photographies référencées photos n° 6, 9, 12, 13, 21, 39, 50, 51, 60, 64, 66, 77, 78, 79, 80, 81, 83, 95, 96, 110, 111, 112, 113, 123, 125, 127, 136 et 138 sont reproduites au sein des ouvrages litigieux ;

en conséquence,

— de le débouter

à titre subsidiaire,

Vu l’article 2224 du code civil,

— de constater que M. X a cédé à La Provence par contrat de travail du 1er juin 1983 et par convention renouvelée du 25 mai 2000 les droits d’exploitation portant sur l’ensemble des photographies qu’il avait réalisées dans le cadre de son contrat de travail le liant à La Provence ;

— de constater que M. X est irrecevable car prescrit à solliciter la nullité des clauses contenues dans ces contrats ;

— de constater que la société Y & Cie a acquis de La Provence les droits de reproduction de 497 images publiées au sein des ouvrages litigieux par factures en date des 20 mars 2007 et 18 janvier 2010 ;

— de constater que les factures des 20 mars 2007 et 18 janvier 2010 visent les ouvrages litigieux sans

limitation de tirage ;

— de constater que la société Y & Cie s’est régulièrement acquittée des droits de reproduction des images publiées au sein des ouvrages édités par elle auprès des ayants-droits des photographes : la FEP, l’OM et La Provence ;

— de constater que la société Y & Cie n’a pas manqué aux dispositions de l’article L.122-4 du code de la propriété intellectuelle ;

En conséquence,

— de débouter M. X de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

à titre infiniment subsidiaire ;

Vu l’article 1315 du code civil dans son ancienne rédaction ;

— de constater que seules 142 images reproduites dans les ouvrages L’Histoire de l’Olympique de Marseille, Le Dictionnaire Officiel de l’OM, l’agenda 2010 et le Livre géant de l’OM sont identiques à celles visées en pages 20 à 30 des conclusions de M. X ;

— de constater que sur ces 142 images, les droits d’exploitation de 129 d’entre elles ont été cédés par La Provence à la société Y & Cie par factures en date des 20 mars 2007 et 18 janvier 2010 ;

— de constater que M. X n’apporte pas la preuve du préjudice commercial qu’il invoque ;

— d’infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a considéré que chaque image reproduite donnerait lieu au payement d’une redevance de 70 € ;

En conséquence,

— de ramener les condamnations prononcées par le tribunal à de plus justes proportions, lesquelles ne sauraient excéder la somme de 20 € par image ;

Vu l’article L.132-8 du code de la Propriété Intellectuelle ;

Vu l’article 1626 du code civil

— de condamner la société La Provence à garantir la société Y & Cie de toutes condamnations prononcées à son encontre au titre de l’exploitation des images dont les droits de reproduction ont été acquittés par factures des 20 mars 2007 et 18 janvier 2010 ;

en tout état de cause,

— de condamner M. X, à défaut La Provence, à verser à la société Y & Cie la somme de 20 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle soutient :

— que les pièces adverses 31, 32 et 53, telles que communiquées devant la cour d’Appel d’Aix-en-Provence, et retenues par elle ne totalisent pas véritablement 273 clichés, puisque la pièce 53 se contente de reproduire en grand format les pièces 31 et 32,

— qu’il n’y a donc pas véritablement 273 images différentes mais 138 qui étaient revendiquées par M.

X,

— que l’appréciation des revendications de M. X doit être limitée aux photographies visées au sein des écritures de M. X en pièce 14,

— que l’originalité d’une photographie doit être établie et motivée image par image, et non par une interprétation globale et générique,

— que quand bien même les images révèlent un savoir-faire technique, elles ne laissaient pas entrevoir la personnalité de M. X,

— que la technique de la prise de vue en rafale démontre l’absence d’implication du photographe, lequel intervient alors dans un processus automatisé,

— que la cour d’appel d’Aix avait effectué une appréciation pertinente des faits de l’espèce, la Cour de cassation ayant uniquement cassé l’arrêt d’appel du fait de la méthode rédactionnelle appliquée par la cour,

— qu’un photographe peut accéder au statut d’auteur lorsque, au-delà d’un travail de technicien exécutant, ses clichés parviennent à refléter l’empreinte de sa personnalité, soit un «ensemble de comportements, des aptitudes, des motivations etc… dont l’unité et la permanence constituent l’individualité, la singularité de chacun»,

— qu’être le témoin d’un événement ne suffit pas à accorder à un photographe la qualité d’auteur,

— que l’exclusivité d’accès à un lieu (en l’espèce à des vestiaires ou à certains lieux) était donnée au journal La Provence, et non à M. X à titre personnel et privé,

— qu’il ne peut donc invoquer le bénéfice de conditions d’accès favorisées par et au profit exclusif de son employeur,

— que l’originalité d’une photographie peut être décelée uniquement dans son résultat palpable (et non du fait des conditions dans lesquelles elle a été prise) ni d’intentions spéculatives et non étayées,

— que les photographies de groupe se contentent de représenter l’équipe dans une composition classique de photographie de classe,

— que les portraits revendiqués ne portent l’empreinte d’aucune personnalité particulière et sont extrêmement classiques, certains ont un résultat proche de ceux obtenus par photomaton, ou dans le cadre de portraits d’école,

— que pour les scènes de match, si le photographe exerce effectivement un choix lorsqu’il 'zoome’ sur un sujet et qu’il décide de déclencher son appareil photographique, la photographie prise au cours d’un match à l’insu des protagonistes n’est que le fruit du hasard qui trouve son origine dans les phases animées du jeu, dont tant la mise en oeuvre que le résultat échappe à la volonté du photographe qui ne fait qu’intercepter un instant fugace : ainsi les mimiques des joueurs pris en gros plan ne révèlent pas la personnalité du photographe mais d’avantage celle du joueur qui manifeste sa joie, sa surprise, son désappointement ou sa colère,

— que M. X reconnaît dans ses écritures d’appel avoir travaillé 'en rafale',

— que d’autres jurisprudences ont rejeté l’originalité de photographies de scènes de matchs de football (CA Nancy 2 décembre 2013 – Jurisprudence 10), (TGI Paris 22 mai 2015 – Jurisprudence 11) (TGI Paris, 24 novembre 2016 – Pièce JP 12),

— que les photographies de match revendiquées par M. X ne font apparaître aucune recherche esthétique, que l’angle de la prise de vue était imposé compte tenu des emplacements dans lesquels les journalistes sont cantonnés,

— que le photographe n’a pas le choix de la lumière, celui-ci n’ayant aucune prise sur les éclairages naturels ou les éclairages du stade, n’a pas le choix de l’instant dès lors que les photographies sont prises en rafales avec des appareils dotés de technologies propres permettant de capter des sujets en mouvements, n’a pas de prise sur l’attitude des joueurs, ceux-ci étant libres de leurs expressions, sans que le photographe ne puisse les diriger dans leurs attitudes ou émotions,

— que ces photographies ne portent l’empreinte d’aucune personnalité autre que celle des joueurs,

— que les attestations produites par M. X vantent les compétences techniques et salariales de M. X et non ses compétences artistiques,

— que les pièces adverses 22, 25 et 26 qui ne sont pas manuscrites et ne sont pas signées, doivent être écartées,

— que le jugement dont appel a confondu les images revendiquées par M. X et les reproductions litigieuses,

— que toutes les images visées par la pièce adverse 14 (ancienne pièce 53) ne sont pas reproduites au sein des ouvrages litigieux,

— que tous ouvrages confondus, les reproductions litigieuses concernent :

—  101 images (et non les 138 visées par la pièce 14 (anciennement 53) produites par M. X) ;

—  142 reproductions dans les ouvrages, lesquelles proviennent pour la quasi-totalité de La Provence,

— qu’il appartient à M. X d’identifier précisément sur les réimpressions les photographies qu’il estime reproduites, et qui sont contestées dans le cadre de la présente procédure,

— que la quasi-totalité des images litigieuses a été communiquée par le journal La Provence, au sein duquel M. X était salarié, et ont réalisées pendant le temps de travail de M. X, dans le cadre de ses fonctions, et avec les moyens matériels du journal,

— que les contrats conclus par M. X précisaient que La Provence était titulaire des droits d’exploitation des clichés en question,

— que M. X percevait alors, en complément de ses salaires, des rémunérations à titre de droits d’auteur,

— que le tribunal n’a pas consacré une ligne du jugement dont appel à l’examen de la demande d’irrecevabilité formée par la société Y & Cie,

— que le contrat de travail du 1er juin 1983 précise que M. X ne peut, sans l’accord de La Provence, révéler à quiconque ni utiliser, reproduire ou faire reproduire pour son compte ou pour le compte d’un tiers, les informations et les documents photographiques obtenus à l’occasion de ses fonctions,

— que le salaire perçu par lui durant des années inclut :

«le droit de diffuser, de reproduire par n’importe quel moyen que ce soit et de céder à des tiers, les

photographies et les documents obtenus par vous, aussi souvent que nous l’estimerons utile et vous ne pourrez réclamer, de ce chef, aucune rémunération supplémentaire.»

— que la quasi-totalité des photographies revendiquées par M. X appartient au fonds de La Provence, laquelle semble en avoir acquis la propriété matérielle et intellectuelle en vertu du contrat précité,

— que la clause de cession figurant dans le contrat de travail semble avoir des effets qui perdurent au-delà de son terme, puisqu’il est spécifié que la propriété des clichés est cédée à l’entreprise 'même après l’expiration de l’engagement',

— que M. X ne peut soutenir que les dispositions contractuelles seraient nulles dès lors que l’action en nullité contractuelle est soumise à une prescription de cinq années à compter de la signature des contrats en cause,

— que l’atteinte au droit moral ne peut être constituée qu’envers les auteurs d’oeuvres de l’esprit protégées par le code de la propriété intellectuelle,

— qu’il est dans l’incapacité de produire la moindre publication qui mentionnerait son nom aux côtés de la reproduction des photographies litigieuses,

— qu’aucune faute n’a été commise par la société Y & Cie, celle-ci ayant régulièrement acquis les droits de reproduction des images en cause en toute bonne foi,

— que le tribunal a appliqué un tarif de 70 € par cliché en cause ce qui est manifestement excessif et ne correspond pas aux tarifs en usage pour la reproduction de photographies de sport, les tarifs étant de l’ordre de 20 € par cliché,

— qu’elle justifie de la provenance des images par la communication des crédits photographiques réalisés en toute transparence avec La Provence,

— que le simple examen des factures en cause démontre que La Provence a autorisé la reproduction de 497 images figurant dans les ouvrages en cause,

— les décomptes sont donc :

— Venant de l’OM et donc à la charge de Y & Cie :

—  13 images litigieuses reproduites dans les ouvrages, lesquelles ne sont pas protégeables par le droit d’auteur ;

— Venant de La Provence :

—  129 images reproduites dans les ouvrages, sachant qu’elles ne sont selon Y & Cie, pas protégeables par le droit d’auteur car prises par un technicien salarié du journal.

M. X demande à la cour :

Vu le jugement entrepris, des pièces produites,

Vu les dispositions du code de la propriété intellectuelle et notamment les articles L 111'un, L 121'1, L 121'1, L 122'1, L 122'4, L 122'7, L 131'3 alinéas 1 et alinéa 4 et L 131'4,

— de débouter la société Y et Cie de l’intégralité de ses demandes fins et conclusions,

— de réformer le jugement en ce qu’il a fixé à 10 000 € le montant des dommages-intérêts pour l’atteinte portée au droit moral de M. X,

— de faire droit à l’appel incident de M. X et condamner la société Y & Cie au paiement de la somme de 30 000 € en réparation de l’atteinte portée au droit moral de M. X,

— de confirmer le jugement entrepris pour le surplus,

— de condamner la société Y & cie au paiement de la somme de 20 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance distraits au profit de Maître Laffly, avocat, sur son affirmation de droit.

Il soutient :

— que pour chaque ouvrage le nombre de reproductions a été précisé par le tribunal par ces termes «dans le dictionnaire officiel de l’Olympique de Marseille de 2006 (80 reproductions) 2009 (80 reproductions) et 2010 (25 reproductions) dans l’histoire de l’Olympique de Marseille 2007 (63 reproductions) 2008 (64 reproductions) 2009 (63 reproductions) et 2010 (60 reproductions) dans l’agenda 2010 (12 reproductions) puis 47 reproductions à l’occasion de l’édition de l’ouvrage sur l’Olympique de Marseille «110 ans d’émotion»,

— qu’il produit la photographie qui lui a valu de recevoir le prix K et qui représente Carlos Mozer défenseur de l’Olympique de Marseille dégageant un ballon de la tête devant un défenseur de l’équipe de Saint-Etienne et montant à une telle hauteur que ses crampons déchirent le maillot de ce dernier(pièce 9 Bordereau renvoi de cassation),

— qu’il a fait des commentaires sur les 139 photos communiquées en première instance sous le numéro 53 et communiquées devant la cour par Y et Cie et par lui (pièce 14 du bordereau renvoi de cassation),

— que pour chacun des 139 clichés, il indique, bien évidemment les moyens techniques utilisés, mais cette précision n’est présentée que comme un des moyens d’arriver au résultat émotionnel voulu par celui-ci,

— que pour l’ensemble des photographies litigieuses il importe de souligner que l’originalité d’une photographie réside notamment dans l’intention de l’auteur et non seulement dans le simple résultat,

— que l’originalité des clichés se ressent dans les choix opérés de figer un instant plutôt qu’un autre, permettant de faire ressortir les éléments et émotions qui lui ont semblé décisifs ou qui correspondaient à la personnalité des sujets,

— qu’elles sont le compte rendu fidèle de son appréciation des faits,

— qu’il produit des attestations de spécialistes qui confirment l’originalité de ses photos,

— que si La Provence a estimé nécessaire d’obtenir l’autorisation des photographes pour pouvoir céder leurs photos, c’est qu’elle estimait bien que celle-ci étaient protégés par les dispositions du code de la propriété intellectuelle ce qui contredit l’intégralité de l’argumentation de la société Y et Cie que pourtant à titre principal elle soutient.

La société La Provence demande à la cour :

— d’infirmer le jugement et débouter M. X de ses prétentions dirigées contre la société Y et Cie,

— à titre subsidiaire, de confirmer le jugement en ce qu’il a décidé que la société La Provence ne devait sa garantie que pour 48 photos, revendiquées par M. X,

— d’infirmer le jugement en ce qu’il a chiffré le montant des sommes dues à M. X à la somme de 70 € par cliché, et dire et juger que M. X ne peut prétendre à des dommages intérêts qu’à concurrence de 20 €,

— de confirmer le jugement rendu au titre des sommes dues au titre du droit moral,

— de condamner la société Y à lui verser la somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient :

— qu’elle s’associe aux moyens développés par la société Y,

— qu’il ne peut être considéré que le contrat de travail antérieur à la loi Hadopi vaut cession par M. X de ses droits d’auteur par l’effet du contrat de travail,

— que c’est pour cette raison qu’elle a fait signé à ses photographes et à M. X en particulier une convention spéciale et distincte le 25 mai 2000,

— que cette convention vaut cession des droits,

— que le jugement sera réformé en ce qu’il a dit que M. X pouvait revendiquer des droits d’auteurs alors qu’ils les avaient cédés,

— que M. X ne peut plus revendiquer un droit patrimonial,

— qu’elle n’a cédé que 48 photos de M. X, ainsi que cela résulte des factures produites, et non pas 130 comme l’affirme sans preuve et faussement la société Y,

— que la société Y a pu se procurer autrement les autres photographies notamment via la banque d’échange de la «PQR» ou par les autres employeurs de M. X qui travaillait comme pigiste pour d’autres organes de presse,

— qu’elle ne peut être redevable que de la somme de 960 €.

MOTIFS

Sur la demande de M. X au titre de la violation de son droit patrimonial

Il n’est pas contesté que la photographie soit une oeuvre au sens de l’article L 112-2 2° du code la propriété intellectuelle.

—  photographies à prendre en compte :

La demande de M. X ne peut être admise que si celui-ci :

— démontre être l’auteur des photographies litigieuses publiées dans les ouvrages de la société Y,

— justifie que ses photographies présentent un caractère d’originalité, qui peut résulter du choix de la composition de l’image, du cadrage et de l’éclairage conférant à ces photographies un aspect esthétique propre et original reflétant l’empreinte de la personnalité de son auteur.

—  paternité des photographies litigieuses :

Seules les photographies reproduites sur papier et produites aux débats par M. X en pièce 14 (138 photographies citées dans les conclusions) peuvent être prises en considération.

M. X est en mesure de produire les négatifs des photographies qu’il invoque.

Il produit également des attestations, en particulier celle de M. Z et celle de M. A, journalistes à la rédaction du Provençal , qui indiquent que M. X est bien l’auteur des photographies qu’il revendique.

La société Y admet à titre subsidiaire que ses ouvrages comportent 133 photographies identiques à celles produites par M. X dans sa pièce 14.

En conséquence, il sera retenu que l’ensemble des photographies produites en pièce 14 par M. X, sont l’oeuvre de ce dernier.

Les photographies 17, 33, 59, 115 et 132 sont bien présentes dans les pièces produites quoique non décrites dans les conclusions de M. X.

- originalité :

M. X photographe professionnel et journaliste a été récompensé par plusieurs prix en particulier par le 1er prix de la fondation J K, reçu des mains de la ministre de la Culture pour une photographie prise le soir d’un match de l’OM, ce qui démontre que la profession reconnaît l’originalité de ce genre de photographies prises pendant une action de jeu.

Les attestations produites, notamment celle de M. B, de M. C, journalistes au Provençal, indiquent que M. X était spécialement choisi en raison de sa capacité à faire des photographies «originales», «grâce à sa personnalité», et que ses qualités faisaient que ses «photos sortaient incontestablement du lot commun et se reconnaissaient au premier coup d’oeil», que la «qualité et l’originalité de ses images faisaient l’unanimité au sein de la rédaction».

C’est par des motifs exacts et pertinents, adoptés par la cour, que le premier juge a retenu le caractère original de ces photographies (à l’exclusion des photographies de présentation de l’équipe avant match qui ont pû être prises à l’identique par de nombreux autres photographes présents).

En effet, toutes les autres photographies sont manifestement le résultat d’un choix personnel et original de M. X, qui a su percevoir mieux qu’un autre la portée singulière d’une situation justifiant à l’instant précis le déclenchement de son appareil photographique.

Ainsi dans chacune des photographies, notamment pendant les scènes de match, M. X a su montrer au travers de ses clichés, le détermination des joueurs, leurs qualités humaines, leurs qualités physiques, les sentiments révélés par la pratique de la compétition, l’exaltation procurée par une victoire, la déception ressentie en cas de défaite, la souffrance physique et mentale, le sentiment du joueur qui comprend qu’il va marquer (Doc 93 Gallas marquant un but).

Ces photos reflètent la philosophie personnelle de M. X sur le sport.

M. X a également procédé à des clichés de joueurs seuls ou en groupes, posant parfois souriant, apaisés et détendus, ou bien avec une attitude particulière, qui témoignent de la vision de M. X selon laquelle les joueurs sont aussi des personnes sensibles, accessibles, ou pleines d’humour ( Chris Walde Dia 26) ou montrant les autres facettes de leur personnalité (Dia 64 Cantona, visage illuminé, quasi mystique expo de peinture, DIA 61 : 4 joueurs ensemble – pouce levé – une main chacun sur le

même ballon,). Certains de ces portraits sont à l’évidence réalisés avec un arrière plan choisi par M. X.

Enfin, il est incontestable que certaines photographies ont été travaillées en amont, sur les instructions du photographe qui a manifestement choisi l’arrière plan pour un donner un effet ou pour fournir une information particulière, par exemple en mettant en valeur les couleurs de l’équipe.

Au vu de ces éléments il convient de retenir le caractère d’originalité à l’ensemble des photographies produites en pièce 14 par M. X à l’exception des photographies n°39, 59, 85, 84, 86.

—  absence de cession des droits patrimoniaux :

La société Y soutient que M. X a cédé ses droits patrimoniaux éventuels sur toutes les photographies qu’il a prises dans le cadre de son travail salarié en application des clauses de son contrat de travail conclu aux termes d’un courrier du 1er juin 1983 avec la société La Provence et en application de la convention du 25 mai 2000.

La Provence soutient le même point de vue mais n’invoque que la convention du 20 mai 2000, indiquant qu’il ne peut être considéré que le contrat de travail antérieur à la loi Hadopi vaut cession par M. X de ses droits d’auteur par l’effet du contrat de travail.

M. X soutient que ces deux actes sont irréguliers en la forme ainsi qu’au regard des dispositions du code de la propriété intellectuelle, que la convention du 25 mai 2000 n’a pas été valablement reconduite et que la demande d’autorisation que son ex-employeur lui a adressée le 22 juin 2009 démontre l’absence de toute cession de ses droits d’auteurs.

Un photographe, lié à l’éditeur d’un journal par un contrat de travail, cède nécessairement le droit d’exploiter et de reproduire ses photos «dans le cadre de l’activité normale de l’entreprise», en l’espèce dans le cadre des titres de presse de la société La Provence, ce que M. X ne conteste pas.

En ce qui concerne la cession à des tiers, il convient de constater que l’exemplaire de la lettre d’embauche de M. X datée du 1er juin 1983 ne comporte pas la signature de M. X ce dont il résulte qu 'il ne peut être établi que la clause de cession des droits à des tiers sans rémunération et de surcroît rédigée en termes généraux, a été approuvée par M. X.

L’employeur lui-même admet que ce contrat de travail ne peut valoir cession de droits d’auteur à des tiers au regard des dispositions du code la propriété intellectuelle.

En ce qui concerne la «convention expresse» du 25 mai 2000 comportant la signature de M. X, elle prévoit en son article 3 que la convention est conclue pour une durée expérimentale d’un an et qu’elle «sera reconductible d’année en année par accord des parties».

M. X ayant quitté l’entreprise le 31 mai 2008, la convention aurait dû faire l’objet à cette occasion, d’un renouvellement exprès ne serait-ce que pour permettre de régler la question de la rémunération.

En tout état de cause, cette convention ne comporte pas d’autorisation expresse de céder un droit de reproduction ou d’édition des photographies à des tiers sans autorisation, mais seulement le droit de diffuser ces photos sur le serveur de la Banque Photographique de la PQR en vue de les céder ou de les faire reproduire.

En conséquence, en l’absence de contrat de cession strictement et clairement délimité quant à l’étendue, la destination, le lieu et la durée de chacun des droits cédés, et en l’absence de participation

proportionnelle aux recettes au profit de l’auteur, la société La Provence n’avait pas acquis valablement le droit de céder à la société Y et Cie les photographies de M. X, sans l’autorisation de ce dernier, autorisation qu’elle avait estimé, initialement, devoir sollicité.

—  indemnisation du préjudice :

Seules les photographies figurant en pièce 14 (numérotées de 1 à 138) et qui sont reproduites dans les éditions de la société Y sont susceptibles de donner lieu à une indemnisation au titre de la violation du droit patrimonial .

Or, M. X ne fournit pas à la cour de tableau indiquant dans quels ouvrages et à quelles pages sont reproduites les photographies reproduites dans sa pièce 14.

Il communique aux débats les ouvrages de la société Y comprenant des dizaines de marque-page, mais qui ne comportent pas de renvois aux photographies de sa pièce 14.

Il est donc impossible, en examinant une photographie de la pièce 14 de la retrouver dans les ouvrages produits, et inversement, en feuilletant les ouvrages de vérifier si l’illustration est identique à une photographie de la pièce 14, sauf à réaliser en lieu et place de M. X, un travail que M. X lui-même n’a pas jugé utile.

La société Y et compagnie a quant à elle réalisé un tableau très utile reprenant toutes les photographies en indiquant pour 28 d’entre elles : «image ne figurant pas dans les ouvrages en cause. M. X ne répond pas à cet argument dans ses écritures».

En conséquence, il sera retenu que M. X ne démontre pas de fait de contrefaçon pour ces 28 photographies lesquelles seront donc écartées.

En conséquence, il sera retenu : 138 – (5 + 28) = 105 photographies.

En l’absence de toute démonstration, il sera retenu une unique publication pour chacune de ces photographies.

sur le montant de l’indemnisation :

La société Y justifie avoir négocié en 2009 un tarif de 20 € HT avec la société La Provence pour les photographies de M. X.

M. X produit lui-même le tarif du musée national du sport qui fixe le tarif à :

—  20 € pour un tirage inférieur à 7 500 exemplaires,

—  40 € pour un tirage supérieur à 7 500 exemplaires pour des photographies de 1/8e de page,

—  50 € pour une photographie en 1/4 de page pour un tirage supérieur à 7 500 exemplaires

—  70 € pour une photographie en 1/4 de page pour un tirage supérieur à 7 500 exemplaires.

En l’espèce, M. X n’indique pas la taille des photographies contrefaites ni ne précise le tirage.

Au vu des ouvrages produits qui comportent des photographies de tout format (de très petit format à pleine page), il sera retenu un prix moyen de 50 € qui correspond au prix d’une photographie en 1/4 de page pour un tirage supérieur à 7 500 exemplaires, soit une somme de : 105 X 50 € TTC = 5 250 € TTC.

Sur la demande en garantie contre la société La Provence

Il n’est pas contesté que La société La Provence a cédé à la société Y et compagnie des photographies de M. X, se présentant ainsi aux yeux de cette société comme étant titulaire des droits patrimoniaux.

Ces photographies ne comportaient aucune mention relative à leur auteur ce qui permet de retenir la bonne foi de la société Y.

Il convient donc de faire droit au principe de l’action en garantie fondée sur la faute contractuelle de la société La Provence à son égard.

Toutefois, cette action trouve sa limite dans les photographies réellement cédées.

Or la société Y et Compagnie ne produit que des factures globales pour des «photos» sans autre précision ne comportant pas de bordereau identifiant les auteurs des photographies.

D’autre part, c’est à juste titre que la société La Provence indique que la société Y et Cie a pu se procurer les autres photographies par d’autres canaux.

En conséquence, il ne peut être retenu que les 48 photographies que la société La Provence reconnaît avoir cédées selon son bordereau émanant de ses archives et correspondant à la demande d’autorisation qu’elle avait adressée en son temps à M. X.

Ainsi il sera fait droit à la demande à hauteur de : 48 X 50 € = 2 400 € TTC.

Sur l’atteinte au droit moral

Les photographies ont été publiées sans indication du nom de M. X, ce qui constitue une atteinte au droit de paternité de M. X.

En conséquence, il sera alloué à M. X une somme de 20 € par photographie soit une somme de 105 X 20 € = 2 100 €.

La société Y sera relevée et garantie à hauteur de 48 X 20 € = 960 € à ce titre.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Il convient de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens

La société La Provence partie perdante et qui est à l’origine du litige, doit être condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

— Confirme le jugement en ce qu’il a :

*dit qu’en reproduisant, sans son autorisation, des photographies dont M. X est l’auteur dans le Dictionnaire officiel de l’Olympique de Marseille 2006, 2009 et 2010, l’Histoire de l’Olympique de Marseille 2007, 2008, 2009 et 2010, l’Agenda de l’Olympique de Marseille 2010 et le livre géant de

l’Olympique de Marseille 110 ans d’émotions de 2009, la société Y a porté atteinte aux droits patrimoniaux et moraux de M. X ;

*dit que la société La Provence devait garantir la société Y pour 48 clichés ;

Le reformant pour le surplus et statuant de nouveau,

— Dit que la contrefaçon porte sur les photographies reproduites en pièce 14 du dossier de M. X numérotée de 1 à 138, à l’exception des photographies n°38, 59, 85, 84, 86 (non originales) et des 28 photographies citées par la société La Provence (n°6, 9, 12, 13, 21, 39, 50, 51, 60, 64, 66, 77, 78, 79, 80, 81, 83, 95, 96, 110, 111, 112, 113, 123, 125, 127, 136 et 138) dont la reproduction n’est pas justifiée,

— Condamne la société Y et Cie à payer à M. X la somme de 5 250 € [soit 50 € par photographie] à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à son droit patrimonial outre la somme de 2 100 € à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à son droit moral,

— Condamne la société La Provence à relever et garantir la société Y et Cie à hauteur de la somme de 3 360 €,

- Condamne la société Y & cie à payer à M. X la somme de 5 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile , et condamne la société La Provence a relever et garantir la société Y & cie de cette condamnation ,

— Condamne la société La Provence à payer à la société Y & cie la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamne la société La Provence aux entiers dépens de première instance, d’appel devant la cour d’appel d’Aix en Provence et devant la présente cour, distraits au profit de Maître Laffly, avocat, sur son affirmation de droit.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile b, 15 janvier 2019, n° 17/04320