Cour d'appel de Lyon, 3e chambre a, 25 mai 2022, n° 19/02101

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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Gouache Avocats · 28 décembre 2022

La Cour d'appel de Lyon affirme la liberté d'association des franchisés, en jugeant que l'association créée par un ancien franchisé n'est pas en elle-même constitutive d'une faute à l'égard de la tête de réseau. Dans un arrêt du 25 mai 2022, la Cour d'appel de Lyon a répondu à la question de savoir si la création, par un ancien franchisé, d'une association de franchisés du réseau dont il faisait partie, constituait une tentative de déstabilisation du réseau. A la suite de la liquidation judiciaire de sa société, l'ancien franchisé d'une enseigne de grande distribution alimentaire a pris …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 3e ch. a, 25 mai 2022, n° 19/02101
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 19/02101
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce de Saint-Étienne, 29 janvier 2019, N° 2017j610
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Lire la décision sur le site de la juridiction

Texte intégral

N° RG 19/02101

N° Portalis DBVX-V-B7D-MISK

Décision du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE

Au fond

du 30 janvier 2019

RG : 2017j610

[X]

SELARL MJ SYNERGIE

C/

S.A.S. DISTRIBUTION CASINO FRANCE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 25 Mai 2022

APPELANTS :

M. [I] [X]

né le 06 Août 1971 à [Localité 11] (60)

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représenté par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 1983 et ayant pour avocat plaidant, Me Anne-Cécile BENOIT de la SCP BOURGEON MERESSE GUILLIN BELLET & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

SELARL MJ SYNERGIE prise en la personne de Me [S] [R], ès qualités de mandataire de la SARL CORIDIS

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 1983 et ayant pour avocat plaidant, Me Anne-Cécile BENOIT de la SCP BOURGEON MERESSE GUILLIN BELLET & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

S.A.S. DISTRIBUTION CASINO FRANCE

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547 et ayant pour avocat plaidant, Me Sébastien SEMOUN de la SELARL LEXCASE SOCIETE D’AVOCATS, avocat au barreau de LYON

******

Date de clôture de l’instruction : 19 Novembre 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 30 Mars 2022

Date de mise à disposition : 25 Mai 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président

— Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

— Marie CHATELAIN, vice-présidente placée

assistées pendant les débats de Séverine POLANO, greffier

A l’audience, Catherine CLERC a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Catherine CLERC, conseiller faisant fonction de président, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [I] [X] exploite différents fonds de commerce, tels que la société Nels Distrib rattachée à l’enseigne Groupe Carrefour, ouvert en 2005, puis les sociétés Liz et Nels & Co en 2008, rattachées à l’enseigne Colruyt.

Au cours de l’année 2010, souhaitant ouvrir un supermarché à [Localité 7] et l’exploiter dans le cadre d’une franchise, M. [X] s’est rapproché de la société Distribution Casino France et a constitué la SARL Coridis pour exploiter ce commerce ; durant les travaux d’aménagement de celui-ci, il a été salarié avec son épouse du Groupe Casino de janvier 2012 à fin 2013 et il a signé avec la société Distribution Casino France un contrat de franchise le 27 septembre 2011'avec effet au 20 novembre 2013, date d’ouverture du magasin au public.

A la suite de difficultés financières rencontrées par la société Coridis liées à une insuffisance de chiffre d’affaires du supermarché, un protocole transactionnel a été signé entre la société Coridis et la société Distribution Casino France.

En exécution de ce protocole, un nouveau contrat de franchise a été signé pour une durée de 7 ans le 11 janvier 2016 et un budget d’enseigne complémentaire a été versé le 10 février 2016 par la société Distribution Casino France.

Malgré les modifications réalisées, le chiffre d’affaires de la société Coridis n’a pas progressé et, par mise en demeure du 6 février 2017, M. [T], le nouveau directeur de la franchise, lui a réclamé paiement d’une somme de 838'980,16€ sous peine de dénonciation du contrat de franchise.

Par jugement du 8 mars 2017, le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse a placé la société Coridis en redressement judiciaire et Me [F] a été désigné administrateur judiciaire et la SELARL MJ Synergie a été chargée des fonctions de mandataire judiciaire.

Le 10 mai 2017, la société Distribution Casino France a déclaré au passif du redressement judiciaire de la société Coridis une créance de 2'301'538,44€ soit 1'901'538,44'€ à titre chirographaire et 400'000'€ à titre privilégié.

Par jugement du 7 mars 2018, le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse a arrêté le plan de cession de la société Corodis au profit de la société Distribution Casino France sur la base de l’offre de cession présentée par cette dernière selon laquelle, notamment, elle reprenait l’ensemble des salariés, assurait la continuité de d’exploitation du magasin en franchise et location gérance, abandonnait «'intégralement les créances qu’elle détient sur la société Coridis telles que déclarées par courrier recommandé en date du 10 mai 2017'», renonçait à réclamer à la société Coridis le solde du budget d’enseigne exigible à la rupture du contrat de franchise estimé à la somme de 415'468'€.

Par jugement du 8 mars 2018, la société Coridis a été placée en liquidation judiciaire, Me [R], étant désigné liquidateur judiciaire (le liquidateur judiciaire).

M. [X] ayant envoyé plusieurs courriels à des franchisés de la société Distribution Casino France aux fins qu’ils rejoignent l’association de franchisés qu’il voulait constituer, cette dernière l’a mis en demeure par courrier recommandé du 5 juin 2018 de cesser ses «'propos dénigrant à l’égard de l’enseigne'» et ses «'tentatives de déstabilisation et de désorganisation du réseau.'»

Par jugement du 30 janvier 2019, le tribunal de commerce de Saint-Étienne statuant sur l’assignation délivrée le 16 juin 2017 par l’administrateur judiciaire et M. [X] à l’encontre de la société Distribution Casino France, a :

constaté la validité du protocole signé entre les parties en novembre 2015 qui n’a jamais été contesté et qu’il est donc applicable,

dit irrecevables les demandes formées par la société Coridis, Me [R], ès qualités de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la société Coridis, et M. [X] à l’encontre de la société Distribution Casino France,

fixé la créance de la société Distribution Casino France au passif de la liquidation judiciaire de la société Coridis pour la somme de 2'301'538,44€,

condamné Me [R], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Coridis et M. [X] à payer chacun à la société Distribution Casino France la somme de 10'000€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

dit que M. [X] est coupable de dénigrement et de tentative de déstabilisation du réseau Casino Supermarché et de la société Distribution Casino France,

ordonné à M. [X] de cesser toute communication dénigrante à l’égard de la société Distribution Casino France et de réseau Casino Supermarché et ce, sous astreinte de 1'000€ par infraction constatée à compter de la signification du jugement,

ordonné à M. [X], sous astreinte de 1'000€ par jour de retard à compter de la signification du jugement, de communiquer à l’ensemble des destinataires de ses emails circulaires, un courrier d’information rectificatif dont les termes seront les suivants :

«'Chère Madame, Cher Monsieur,

Vous avez récemment été destinataire de la part de Monsieur [I] [X], dirigeant de la société Coridis, ancien franchisé Casino Supermarché, de mails/courriers remettant en cause l’enseigne Casino Supermarché,

A la demande, de la société Distribution Casino France, qui a saisi le tribunal de commerce de Saint-Étienne pour des actes de dénigrement et des tentatives de déstabilisation de son réseau Casino Supermarché constitués par les termes employés dans les mails/courriers précités, le tribunal de commerce de Saint-Étienne a ordonné à l’encontre de Monsieur [I] [X] des mesures de cessation de ces actes de dénigrement et de tentatives de déstabilisation ainsi que la diffusion du présent message sous la forme du présent courrier, aux personnes destinataires des dits courriers.'»

condamné M. [X] à payer à la société Distribution Casino France la somme de 50 000€ en réparation du préjudice subi par celle-ci dont l’image vis-à-vis de l’ensemble de ses franchisés à l’enseigne Casino Supermarché a été atteinte du fait des agissements de ce dernier,

condamné Me [R], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Coridis, et M. [X] à payer chacun à la société Distribution Casino France la somme de 5'000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

dit que les dépens sont à la charge de Me [R], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Coridis et de M. [X],

dit ne pas y avoir lieu à exécution provisoire du jugement,

débouté la société Distribution Casino France du surplus de ses demandes.

M. [X] et le liquidateur judiciaire ont seuls interjeté appel par acte du 21 mars 2019.

En cours d’instance d’appel sont intervenues deux décisions':

— une ordonnance le juge-commissaire rendue le 28 mars 2019, sur contestation du mandataire judiciaire du 17 mai 2018, non suivie de réponse dans les 30 jours, a rejeté la créance de 2'301'538,44'€ déclarée par la société Distribution Casino France en relevant que celle-ci s’était engagée, dans son offre de reprise, à abandonner intégralement les créances qu’elle détenait sur la société Coridis telles que déclarées le 10 mai 2017.

— un jugement du 16 septembre 2020 du tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse clôturant la procédure de liquidation judiciaire de la société Coridis pour insuffisance d’actif et désignant la SELARL MJ Synergie, prise en la personne de Me [R], en qualité de mandataire avec mission de poursuivre les instances en cours.

Par conclusions n°2 du 29 octobre 2020, fondées sur les articles 1134, 1135 et 1149 du code civil,L.330-3 et R.330-1 du code de commerce, ainsi que sur les principes généraux de la franchise et le code de déontologie européen de la franchise, M. [X], «'la société Coridis'» et le liquidateur judiciaire de la société Coridis demandent à la cour de :

déclarer le liquidateur judiciaire et M. [X] recevables en leur appel

infirmer le jugement du 30 janvier 2019 en ce que :

il a constaté la validité du protocole signé entre les parties en novembre 2015 (janvier 2016), qu’il n’a jamais été contesté et qu’il est donc applicable,

dit irrecevables leurs demandes à l’encontre de la société Distribution Casino France,

statuant à nouveau :

déclarer recevables les demandes du liquidateur judiciaire et de M. [X],

prononcer la résolution du protocole transactionnel signé entre les parties le 11 janvier 2016 et juger qu’en tout état de cause il ne peut être opposé au liquidateur judiciaire ni à M. [X] dès lors qu’il n’a pas été exécuté,

infirmer le jugement du 30 janvier 2019 en ce qu’il a :

fixé la créance de la société Distribution Casino France au passif de la liquidation judiciaire de la société Coridis à la somme de 2'301'538,44€,

condamné Me [R] ès qualités et M. [X] à payer chacun à la société Distribution Casino France la somme de 10'000€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

dit que M. [X] est coupable de dénigrement et de tentative de déstabilisation du réseau Casino Supermarché et de la société Distribution Casino France,

ordonné à M. [X] de cesser toute communication dénigrante à l’égard de la société Distribution Casino France et du réseau Casino Supermarché sous astreinte de 1'000€ par infraction constatée à compter de la signification du jugement,

ordonné à M. [X] de communiquer à l’ensemble des destinataires de ses courriels circulaires un courrier d’information rectificatif sous astreinte de 1'000€ par jour de retard,

condamné M. [X] à payer à la société Distribution Casino France la somme de 50'000€ en réparation du préjudice subi pour atteinte à son image de marque,

condamné Me [R] ès qualités et M. [X] à payer chacun à la société Distribution Casino France la somme de 5'000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné Me [R] ès qualités et M. [X] aux dépens,

confirmer le jugement du 30 janvier 2019 en ce qu’il a débouté la société Distribution Casino France du surplus de ses demandes,

statuant à nouveau :

déclarer que la société Distribution Casino France a commis des fautes engageant sa responsabilité :

en s’abstenant de réaliser et de communiquer à M. [X] et à la société Coridis l’état général et surtout local du marché des produits Casino et leurs perspectives de développement sur la zone de chalandise de [Localité 7] en violation de l’article L.330-3 et R.330-1 du code de commerce,

en validant sans réserve le compte d’exploitation prévisionnel reprenant des chiffres d’affaires surévalués de plus de 33 % à 50 %,

en maintenant des conditions d’exploitation inadaptées au contexte dans lequel la société Coridis exploitait la franchise Casino, sans l’adapter au contexte réel pour permettre une exploitation rentable de la franchise,

en ne respectant pas les obligations de conseil et d’assistance auxquelles elle était tenue en qualité de franchiseur, surtout en présence des importantes difficultés rencontrées par Coridis qu’elle connaissait parfaitement,

en adoptant des comportements contradictoires qui ont accru la déstabilisation de la société Coridis,

en n’apportant pas à la société Coridis l’avantage concurrentiel que le savoir-faire du contrat de franchise devait lui apporter,

condamner en conséquence la société Distribution Casino France à indemniser le liquidateur judiciaire des préjudices subis par la société Coridis, soit,

à titre principal, la condamner à payer au liquidateur judiciaire :

— une somme égale au montant du passif de la société Coridis hors créances de Distribution Casino France, soit la somme de 663.'10,25€,

— la somme de 490'000€ au titre de la perte de chance,

à titre subsidiaire, la condamner à payer au liquidateur judiciaire :

— la somme de 1.654.122'€ au titre des pertes subies,

en tout état de cause, condamner la société Distribution Casino France à indemniser M. [X] :

— de la perte de son apport, soit la somme de 220'000€,

— de son préjudice moral, soit la somme de 100'000€,

condamner la société Distribution Casino France à garantir M. [X] des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui sa qualité de caution des sociétés Coridis et CNG Immo,

déclarer la demande reconventionnelle de la société Distribution Casino France de fixation au passif de la société Coridis de sa créance pour un montant de 2'301' 538,44€ TTC irrecevable et subsidiairement qu’elle est infondée,

déclarer les demandes reconventionnelles de la société Distribution Casino France de dommages et intérêts pour procédure abusive, dénigrement et tentatives de déstabilisation du réseau Casino Supermarché infondées,

débouter la société Distribution Casino France de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

condamner la société Distribution Casino France au paiement de la somme de 20'000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de première et seconde instance.

Par conclusions du 6 novembre 2020, fondées sur les articles 1134 ancien, 1147 ancien et 1382 ancien du code civil, sur l’article 122 du code de procédure civile, ainsi que sur les articles R.330-1, L.330-3, L.622-20 et L.641-4 du code de commerce, la société Distribution Casino France demande à la cour de':

confirmer le jugement déféré en ce qu’il a fait droit à ses demandes, sauf en ce qui concerne les quantums qui devront être réformés et rejeter les demandes de la société Coridis, Me [R] ès qualités et M. [X], et en tout état de cause :

1) sur l’irrecevabilité des demandes de la société Coridis, de Me [R] ès qualités et de M. [X] :

constater qu’elle et la société Coridis, M. et Mme [X] ont conclu en novembre 2015 (pièce n°7, pièce adverse n°16) un protocole transactionnel au terme duquel :

«'Le franchisé (défini au terme du protocole comme étant l’ensemble des signataires) renonce à tous droits, actions ou indemnités de quelque nature que ce soit, qui résulteraient du contrat de franchise objet du présent et plus généralement de sa relation avec Casino concernant le point de vente situé à [Adresse 10], en ce compris la période précontractuelle. »

« La présente transaction règle définitivement le litige intervenu entre les parties et ce conformément aux dispositions entre les parties 2 044 et suivants du code civil et notamment de l’article 2 052 dudit code aux termes duquel la transaction entre les parties a autorité de la chose jugée en dernier ressort. »

constater qu’en première instance les appelants ne contestaient pas la validité dudit protocole reconnaissant même expressément qu’il comportait des concessions réciproques (pièce n°26, page 10), ce qui constitue un aveu judiciaire au sens de l’article 1356 ancien du code civil, désormais 1382-3 du code civil,

dire que ce protocole, dont la validité n’a jamais été contestée jusqu’en cause d’appel, est pleinement applicable en tant qu’acte juridique,

en conséquence :

dire que la société Coridis et Maître [R] ès qualités et M. [X] sont irrecevables à invoquer dans le cadre de la présente instance toutes prétentions relatives :

— d’une part, à un prétendu manquement de sa part quant à son obligation d’information précontractuelle à l’occasion de la signature du contrat de franchise en date du 27 septembre 2011,

— d’autre part à invoquer quelques manquements que ce soit à l’une quelconque de ses obligations tirées du contrat de franchise en date du 27 septembre 2011 et au demeurant qu’elle conteste, et plus généralement relatifs à leurs relations commerciales relatifs au point de vente exploité par la société Coridis et ce conformément aux termes du protocole transactionnel,

en tout état de cause :

déclarer irrecevable les appelants en l’ensemble de leurs demandes concernant tous droits, actions ou indemnités de quelque nature que ce soit, qui résulteraient du contrat de franchise du 26 septembre 2011 et plus généralement de sa relation avec elle concernant le point de vente situé à [Adresse 8], en ce compris la période précontractuelle jusqu’au 11 janvier 2016, date de la signature du second contrat de franchise,

2) à titre subsidiaire, si la cour estimait les demandes recevables en tout ou partie :

sur le rejet des prétentions de la société Coridis, de Me [R] ès qualités et de M. [X] :

déclarer irrecevable, M. [X] en ses demandes indemnitaires pour défaut de qualité à agir s’agissant des demandes au titre au titre des apports en capital social, perte de salaire, et en compte courant,

sur l’absence de faute de nature délictuelle :

constater que M. [X], sous couvert de la société Nels Distrib, puis de la société Nels & Co dispose d’une compétence aguerrie non seulement en matière de grande distribution alimentaire mais également en matière de franchise (pièce n°3.1 et suivantes),

constater que M. [X], futur dirigeant et associé de la société Coridis a exploité sous couvert de la société Nels & Co un supermarché de distribution alimentaire à l’enseigne Colruyt de 2008 à a fin de l’année 2010 situé à moins de 13 km et 15 mn du futur supermarché à l’enseigne Casino (pièce n°4.1 et suivantes et 5),

constater que la société Coridis verse elle-même au débat (pièce adverse n°1) une étude de potentiel datant de mars 2011,

constater que la société Coridis et M. [X], eux-mêmes reconnaissent, ce qui constitue un aveu judiciaire au sens de l’article 1356 du code civil, être à l’origine de l’implantation d’un supermarché à l’enseigne Casino sur le site de [Localité 7] ,

constater qu’elle a fourni à la société Coridis un document d’information précontractuelle le 24 juin 2011, strictement conforme aux dispositions de l’article L.330-3 et R.330-1 du code de commerce (pièce n°6.1),

constater en effet que ce document d’information précontractuelle contient un état général du marché et un état local du marché strictement conforme aux articles précités (pièce n°6.1),

constater que la loi ne met ainsi pas à sa charge l’obligation de fournir une étude de marché,

constater en tout état de cause, qu’il n’est pas contestable et ne peut être contesté que la société Coridis et M. [X], qui exploitait déjà un point de vente à l’enseigne Colruyt, pendant près de 2 ans à moins de 15 minutes du site de [Localité 7], disposait d’une parfaite connaissance tant du secteur que du marché local,

constater qu’elle n’a jamais « validé sans réserve » le prévisionnel d’activité qu’a fait réaliser la société Coridis, sous sa seule responsabilité, par le cabinet KPMG,

en conséquence :

dire qu’elle n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité civile délictuelle,

sur l’absence de faute de nature contractuelle :

constater qu’elle a strictement respecté ses obligations contractuelles,

constater d’ailleurs que la société Coridis, Me [R] ès qualités et M. [X] ne visent aucune disposition précise du contrat de franchise qu’elle aurait violé,

constater qu’elle a parfaitement rempli son obligation d’assistance et de conseil,

constater, en effet, qu’elle justifie, par les pièces versées au débat, avoir systématiquement répondu, dans la mesure de ses capacités, aux sollicitations de la société Coridis (pièces n°12.1 et suivantes, pièces n°13.1 et suivantes et pièces n°14.1 et suivantes),

constater, en particulier, qu’elle a permis en favorisant l’agrandissement du point de vente, et à l’occasion de la signature du second contrat de franchise en date du 11 janvier 2016, à la société Coridis non seulement d’augmenter son chiffre d’affaires mais également de bénéficier d’un nouveau budget d’enseigne,

constater qu’elle n’a nullement été défaillante dans la mise à disposition de son savoir-faire,

constater d’ailleurs, que la société Coridis, sous la plume de son dirigeant, M. [X], dans un courrier en date du 27 octobre 2016 (pièce n°14.10), dont était copie son conseil, indiquait d’ailleurs lui-même que :

« Comme tu le sais la situation du magasin est difficile, mais elle s’améliore. Cela ne se traduit pas encore dans la trésorerie mais le chiffre d’affaires a progressé depuis l’agrandissement de 450 m2 du point de vente en mars 2016. Cela nous confirme que la décision prise ensemble était bonne »,

en conséquence :

dire qu’elle n’a commis aucune faute de nature contractuelle,

débouter la société Coridis et Maître [R] ès qualités de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

3) sur le bien fondé de ses demandes reconventionnelles :

sur le bien-fondé de la demande pour procédure abusive :

constater le caractère manifestement abusif de la procédure initiée par la société Coridis, Me [R] ès qualités et M. [X],

en conséquence :

condamner chacun des appelants à lui payer une somme de 25'000€ à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

sur le bien-fondé de la demande pour dénigrement et tentative de désorganisation du réseau :

constater que, depuis son email du 14 mai 2018 (pièce n°21) adressé à l’ensemble des franchisés Casino Supermarché, M. [X], se présentant comme «'un franchisé'» du réseau Casino Supermarché qu’il n’est plus, et prétendant agir dans le but de « d’apporter notre contribution au développement de la branche franchise supermarché » ou encore « d’amélioration et de solutions pérennes pour la franchise », dénigre et tente de déstabiliser le réseau Casino Supermarché et poursuit manifestement, en réalité, un but tout autre que celui affiché,

constater que, dans son email en date du 11 juin 2018 (pièce n°25), adressé à l’ensemble des franchisés Casino Supermarché, M. [X] rend « public » ses critiques à son égard,

dire que M. [X] se rend ainsi coupable de dénigrement et de tentative de déstabilisation du réseau Casino Supermarché et de la société Casino,

en conséquence :

ordonner à M. [X] de cesser toute communication dénigrante à son égard et du réseau Casino Supermarché et ce sous astreinte de 10'000€ par jour de retard à compter de la signification de la décision et infraction constatée,

ordonner à M. [X], sous astreinte de 10'000€ par jour de retard à compter de la signification de la décision la communication à l’ensemble des destinataires de ses emails circulaires d’un courrier d’information rectificatif dont les termes seront les suivants :

« Chère Madame, Cher Monsieur,

Vous avez récemment été destinataire de la part de M. [X], dirigeant de la société Coridis, ancien franchisé casino Supermarché, de mails/courriers remettant en cause l’enseigne Casino Supermarché,

A la demande, de la société Distribution Casino France qui a saisi le tribunal de commerce de Saint-Étienne pour des actes de dénigrement et des tentatives de déstabilisation de son réseau Casino Supermarché constitués par les termes employés dans les mails/courriers précités, le tribunal de commerce de Saint-Étienne, confirmé par la Cour d’appel de Lyon ont ordonné à l’encontre de M. [X] des mesures de cessation de ces actes de dénigrement et de tentative de déstabilisation ainsi que la diffusion du présent message sous la forme du présent courrier, aux personnes destinataires des dits courriers.'»

condamner M. [X] à lui payer une somme de 150'000€ en réparation du préjudice subi,

4) en tout état de cause :

débouter la société Coridis, Me [R] ès qualités et M. [X] de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions

condamner la société Coridis, Me [R] ès qualités et M. [X], chacun, au paiement d’une somme de 40'000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

MOTIFS

A titre liminaire, il est rappelé que la cour n’est pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendent inopérantes et doit statuer sur les seules demandes mentionnées au dispositif des dernières conclusions des parties.

Quand bien même le protocole d’accord signé par les parties n’est pas daté, celles -ci le disent régularisé soit en novembre 2015 (l’intimée) soit le 11 janvier 2016 (les appelants, voire également la société Distribution Casino France) de sorte que le litige est soumis en tout état de cause au droit ancien des contrats.

Il est par ailleurs relevé que la société Coridis n’est pas partie à l’instance d’appel, n’étant pas appelante'; il en résulte qu’aucune demande ne peut être formée en son nom ni soutenue à son encontre.

Le jugement déféré est d’ores et déjà infirmé comme sollicité par les appelants en ce qu’il a fixé la créance de la société Distribution Casino France au passif de la liquidation judiciaire de la société Coridis pour la somme de 2'301'538,44€, cette infirmation s’induisant de l’ordonnance le juge-commissaire rendue le 28 mars 2019 qui a rejeté cette créance de 2'301'538,44'€ en relevant que la société Distribution Casino France s’était engagée, dans son offre de reprise, à abandonner intégralement les créances qu’elle détenait sur la société Coridis telles que déclarées le 10 mai 2017.

Sur la recevabilité des demandes de Me [R] ès qualités, et M. [X]

Les appelants soutiennent l’inopposabilité du protocole d’accord et corrélativement la recevabilité de leurs demandes, au triple motif que les concessions faites par les parties dans ce protocole ne sont pas réciproques, signalant que la société Coridis et M. [X] et son épouse l’ont signé «'sous l’emprise d’une violence économique irrésistible'», que l’objet de la transaction ne portait pas sur la période précontractuelle, le différend sur le contrat de franchise du 27 septembre 2011 et du 11 janvier 2016 n’étant pas encore né, et enfin que cette transaction n’a pas été exécutée, le second contrat de franchise n’ayant pas été signé avant le 1er avril 2015 mais le 11 janvier 2016, l’abandon de la somme de 300'000€ par la société Distribution Casino France prévu à l’article 1 n’ayant pas eu lieu et le plan de remboursement de 700'000€ prévu à l’article 2 n’a pas été réalisé, faute de chiffre d’affaires suffisant.

L’intimée réplique que les prétentions adverses sont irrecevables en tant que se heurtant à l’autorité de la chose jugée attachée au protocole d’accord régularisé par les parties en novembre 2015'et dénonce comme mal fondés les moyens opposés par les appelants pour dénier l’application dudit protocole.

Ce qui doit être admis.

Il est liminairement admis qu’est sans incidence le fait que le protocole d’accord en cause ne soit pas daté, ayant bien été signé par la société Distribution Casino France, la société Coridis, M. [X] et son épouse.

Pour autant, l’examen des pièces communiquées permet de retenir qu’il a été régularisé par celles-ci entre novembre 2015 et le même jour que la signature du second contrat de franchise le 11 janvier 2016, comme en atteste d’une part, la référence dans le corps de celui-ci à «'la situation d’encours arrêtée provisoirement au 19 novembre 2015 figurant en annexe'»et les courriels des 13 et 28 novembre 2015 de M. [X] indiquant respectivement que son conseil avait «'validé le protocole'» et que ce dernier «'était signé'» et qu’il allait le faire parvenir en recommandé, et d’autre part la mise en demeure de la société Distribution Casino France du 6 février 2017 faisant référence au protocole d’accord signé le 11 janvier 2016.

Il résulte des dispositions des articles 2044, 2048, 2049 et 2052 du code civil que la transaction qui a, entre les parties, l’autorité de la chose jugée en dernier ressort et qui ne peut être attaquée pour cause d’erreur de droit, ni pour cause de lésion, est un contrat qui doit être rédigé par écrit par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître, que les transactions se renferment dans leur objet, à savoir que la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s’entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu, que les transactions ne règlent que les différends qui s’y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l’on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé.

S’agissant de l’existence de concessions réciproques

Devant les premiers juges, la société Coridis (alors partie à l’instance), Me [R] ès qualités et M. [X] n’ont pas discuté l’existence de ces concessions réciproques se limitant à conclure en page 10 de ses écritures que «'les concessions réciproques prévues n’ont pas été faites'».

Ces conclusions valent aveu judiciaire de l’existence des concessions réciproques prévues au protocole d’accord, existence que les appelants ne sont donc plus fondés à dénier à ce jour.

De plus fort, le protocole litigieux énonce clairement dans le point 2 de son préambule «'consécutivement à plusieurs réunions d’échanges entre Casino et le Franchisé et compte tenu des plans d’actions proposés par ce dernier, les parties se sont rapprochées et après avoir longuement discuté et négocié, ont finalement décidé de faire des concessions réciproques, afin de conclure le présent protocole d’accord transactionnel destiné à mettre un terme définitif et sans réserve à l’ensemble des difficultés les opposant'» puis a détaillé dans son article 1, «'les concessions de Casino'» et dans son article 2 «'les concessions du franchisé'» (comprendre de la société Corodis, de M. [X] et son épouse).

La société Distribution Casino France acceptait à ce titre de remettre en place des délais de paiement comme prévus au contrat de franchise initial, d’abandonner partiellement sa créance à hauteur de 300'000€ sous réserve de la parfaite exécution du protocole, s’engageait à verser un nouveau budget consécutif à l’agrandissement du magasin de [Localité 7] dans la limite de 600'000€ sous trois réserves (agrandissement effectif du magasin, signature d’un nouveau contrat de franchise avant le 1er avril 2015 et paiement par Cofidis du solde du budget d’enseigne restant à courir au titre du contrat de franchise, précision étant donnée que ce solde pouvait être réglé par compensation avec le nouveau budget).

Le franchisé quant à lui, se reconnaissait débiteur de 1'388'493,25€ au 19 novembre 2015, attestait ne pas être en situation de cessation des paiements, s’engageait à payer 700'000€ à Casino selon un échéancier défini au protocole, et renonçait «'à tous droits, actions ou indemnités de quelque nature que ce soit qui résulterait du contrat de franchise objet du présent, et plus généralement de sa relation avec Casino concernant le point de vente situé à [Localité 9], (suit l’adresse complète) en ce compris la période précontractuelle'».

Ainsi, chacune des signataires du protocole s’est vu attribuer l’exécution d’obligations réciproques, M. [X] ayant au surplus accepté ces concessions ainsi qu’en atteste son courriel du 13 novembre 2015 disant le protocole validé par son conseil et son impatience à voir mettre en 'uvre «'l’échelonnement'».

Le premier grief soutenu à l’encontre de ce protocole n’est donc pas fondé.

S’agissant de la période précontractuelle

La renonciation par la société Coridis et M. [X] «'à tous droits, actions ou indemnités de quelque nature que ce soit qui résulterait du contrat de franchise objet du présent, et plus généralement de sa relation avec Casino concernant le point de vente situé à [Localité 9], (suit l’adresse complète) en ce compris la période précontractuelle'» est dépourvue d’équivoque quant à sa portée.

En effet, cette renonciation s’entend non seulement des actions ou demande d’indemnisation attachées au contrat de franchise mais également de toute action ou demande indemnitaire («'plus généralement'») pouvant naître de la relation de la société Coridis et M. [X] avec le franchiseur Casino au sujet du supermarché de [Localité 7], y compris la période précontractuelle, c’est-à-dire celle précédant la signature des contrats de franchise.

Cette rédaction ouverte et générale conduit nécessairement à admettre qu’à l’époque la société Coridis et M. [X], ont convenu d’englober dans cette renonciation (qui constitue l’une de leurs concessions et non pas la transaction en tant que telle) les litiges nés (non-paiement des factures de Casino malgré un échéancier de paiement dans le cadre du contrat de franchise «'objet du présent'») mais également à naître, ce dernier point étant la suite nécessaire de ce qui a été exprimé sans aucune restriction («'et plus généralement de sa relation avec Casino concernant le point de vente de [Localité 7] en ce compris la période précontractuelle'»), ce qui conduit à retenir cette renonciation également à l’égard des contestations nées après la signature de ce protocole.

Le second grief des appelants à l’encontre de ce protocole pour soutenir la recevabilité des manquements précontractuels et contractuels reprochés à la société Distribution Casino France n’est donc pas fondé.

S’agissant de l’exécution du protocole

Les appelants ne peuvent pas utilement se prévaloir du fait que le nouveau contrat de franchise a été signé le 11 janvier 2016 pour dire non réalisé l’engagement prévu au protocole de signer ce nouveau contrat avant le 1er avril «'2015'»'; cette dernière date est indiscutablement affectée d’une erreur matérielle, la date exacte devant s’entendre du 1er avril 2016 en considération du fait que la signature de ce nouveau contrat de franchise a été précédé d’un document précontractuel du 5 décembre 2015.

Ensuite, la société Distribution Casino France a exécuté le 10 février 2016 son engagement de verser le budget d’enseigne complémentaire de 600'000€'; il se déduit de ce versement que l’agrandissement du magasin de [Localité 7] a été réalisé, de même que le paiement par la société Coridis du solde du budget d’enseigne restant à courir au titre du contrat de franchise ayant pris effet au 20 novembre 2013, ces points, avec la signature du nouveau contrat de franchise, constituant des conditions suspensives à la libération de ce budget complémentaire.

En ce qui concerne le remboursement de la somme de 700'000€ par la société Coridis, il résulte de ses échanges de courriels avec la société Distribution Casino France, qu’elle ne s’est pas acquittée régulièrement de ce paiement mais que les parties avaient convenu d’un report du moratoire'; de fait, de remboursement n’a pas abouti du fait de l’ouverture du redressement judiciaire de la société Coridis.

Dans ces conditions, il ne peut être jugé que le protocole d’accord a été délibérément inexécuté s’agissant de cette condition.

La transaction, qui ne met fin au litige que sous réserve de son exécution, ne peut être opposée par l’un des contractants que s’il en a lui-même respecté les

conditions et que, dans le cas contraire, l’autre partie peut demander au juge d’en prononcer la résolution.

Tel est bien le cas de la société Distribution Casino France qui s’est acquittée de ses obligations et qui est recevable à opposer l’exception de transaction aux appelants pour dire irrecevables leurs demandes, sans que les appelants soient autorisés à demander à la cour de prononcer la résolution du protocole.

En définitive, il résulte de ces constatations et considérations que le protocole d’accord litigieux est valide et a pleine autorité de la chose jugée en dernier ressort entre ses signataires, la demande de résolution dudit protocole d’accord soutenue par les appelants n’ayant pas lieu d’être accueillie pour défaut d’exécution.

Le jugement déféré est donc confirmé par motifs ajoutés comme ayant dit irrecevables les prétentions de la société Coridis, alors dans la cause de son liquidateur judiciaire et de M. [X].

Sur les demandes reconventionnelles de la société Distribution Casino France

Les appelants critiquent le jugement déféré qui a accueilli la demande reconventionnelle de cette société fondée sur le dénigrement et les tentatives de déstabilisation dont M. [X] se serait rendu coupable envers celle-ci en envoyant des courriels à plusieurs franchisés Casino pour les inviter /inciter à rejoindre l’association de franchisés qu’il projetait de créer, en faisant valoir que':

— la liberté d’association, liberté fondamentale, s’applique également en matière de franchise

— la volonté de M. [X] de créer une association de franchisés ne s’analyse pas en une tentative de déstabilisation du réseau Casino et ses courriels adressés à certains franchisés Casino ne contiennent pas de propos dénigrants à l’encontre du réseau Casino.

Ce qui doit être retenu, nonobstant l’analyse contraire de la société Distribution Casino France.

En effet, l’examen des divers courriels adressés par M. [X] à plusieurs franchisés Casino les 14, 28 mai et 11 juin 2018, conduit à observer que celui-ci, portant son ressenti personnel quant à la situation des supermarchés sous franchise Casino, à savoir que «'les conditions économiques de la plupart de nos entreprises se sont nettement détériorées'» a proposé «'dans un but d’échange, d’amélioration et de solutions pérennes pour la franchise'» une réflexion sur 8 pistes de travail qu’il avait élaborées.

Or chacune de ces pistes dont dénuées de critiques ou propos dénigrants à l’encontre de Casino, M. [X] se limitant à poser objectivement des problématiques et les questions s’y rapportant (par exemple': «'les marges services magasin': décalage important entre les marges réelles et les marges théoriques, cohérence des marges servies réelles par rapport à nos indices prix, justifications des augmentations continues et importantes des PCE qui génèrent un différentiel de PVC de plus en plus important avec nos concurrents'» ou encore': «'la politique commerciale': mailings': les bons produits, au bons moments et aux bons prix'; qu’attend-t-on d’un mailing''; comparatif concurrentiel''; opacité des coûts de la carte de fidélité, qui doit payer'''»).

N’est pas davantage constitutif d’un dénigrement ou d’une tentative de déstabilisation du réseau Casino le fait pour l’intéressé d’écrire qu’il comptait sur les franchisés et anciens franchisés pour apporter leurs «'éléments de réflexion et enrichir le contenu'» et qu’annoncer qu’il allait constituer «'une association dans le but d’apporter notre contribution au développement de la branche franchise supermarché'».

L’est encore moins le fait pour M. [X] de faire le point auprès des franchisés ayant adhéré à son association et d’autres franchisés sur le sort de son association, et d’expliquer que l’adhésion pouvait être anonyme après avoir été avisé que certains de ceux-ci souhaitaient en faire partie «'mais ont peur des représailles de Casino'», ou encore d’informer ses interlocuteurs franchisés de ses échanges avec le directeur exploitation franchise, M. [B], qui lui faisait reproche, alors qu’il n’était plus franchisé, «'de solliciter sans discernement et en recourant à des propos dénigrants'» à l’égard de l’enseigne Casino, «'les franchisés du réseau en leur proposant de rejoindre une association qui serait en cours de constitution'», lui reprochant ainsi «'des tentatives de déstabilisation et de désorganisation'» du réseau dont il ne faisait plus partie alors qu’il faisait «'croire le contraire aux destinataires de ses emails'», non sans énoncer «'nous ne sommes pas dupe du but réel de vos démarches consistant à alimenter, avec l’aide de votre conseil, artificiellement le contentieux qui nous oppose actuellement devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne, contentieux dont vous avez en réalité bien conscient qu’il est sans issu pour vous'» (sic).

En réalité, la constitution d’une association, même par un ancien franchisé, destinée à superviser les difficultés rencontrées au sein de la franchise afin d’y apporter des solutions et réponses n’est pas en tant que telle de nature à caractériser une atteinte à l’image de la société Distribution Casino France, dont le nom n’est pas cité, ni une tentative de déstabilisation, les appelants rappelant à bon droit que la création ou la participation à une association participe d’une liberté fondamentale, et quand bien même l’initiative de M'. [X] de rallier les franchisés dans une association s’inscrit dans un contexte conflictuel personnel avec la société Distribution Casino France.

Enfin, il n’est pas établi que M. [X] a poursuivi l’envoi de courriels aux franchisés et anciens franchisés Casino au-delà du 11 juin 2018.

L’ensemble de ces constatations et considérations conduit à infirmer le jugement déféré en ces dispositions ordonnant à M. [X] de cesser ses communications dénigrantes et à faire communication aux destinataires de ses emails d’un courrier d’information rectificatif, le tout sous astreinte, et à payer à la société Distribution Casino France des dommages et intérêts de 50'000€ en réparation de l’atteinte à son image du fait de ses agissements.

La réclamation de dommages et intérêts pour procédure abusive de la société Distribution Casino France n’a pas lieu d’être accueillie, dès lors qu’elle succombe pour partie dans ses prétentions et que d’une part, l’appréciation ou la présentation inexacte qu’une partie fait de ses droits ne constitue pas en soi une faute caractérisant un’abus’du droit d’agir’en justice et que d’autre part l’intimée ne démontre pas en avoir subi un préjudice spécifique.

L’infirmation du jugement s’impose également sur ce point.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les parties succombant partiellement dans ses prétentions, il convient de leur laisser la charge de leurs frais et dépens personnels de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, et par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré, sauf en ses dispositions relatives à la validité et l’applicabilité du protocole d’accord et l’irrecevabilité des demandes de la SARL Coridis, de Me [R] ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL Coridis et de M. [I] [X] à l’encontre de la SAS Distribution Casino France,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et ajoutant,

Rejette la demande de la SAS Distribution Casino France en fixation au passif de la SARL Coridis de sa créance déclarée le 10 mai 2017 pour un montant de 2'301'538,44€,

Dit que M. [I] [X] n’a pas commis des actes de dénigrement et de tentative de déstabilisation du réseau Casino Supermarché et de la SAS Distribution Casino France,

Déboute la SAS Distribution Casino France de ses demandes reconventionnelles aux fins de condamnation sous astreinte et de paiement formées à l’encontre de M. [I] [X] sur le fondement du dénigrement et de la tentative de déstabilisation du réseau Casino Supermarché et d’elle-même,

Déboute la SAS Distribution Casino France de sa demande reconventionnelle en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Déboute chacune des parties de ses demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile, tant en première instance qu’en appel,

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens personnels de première instance et d’appel.

Le Greffier, Le Président,

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Cour d'appel de Lyon, 3e chambre a, 25 mai 2022, n° 19/02101