Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 7 avril 2022, n° 18/07221

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Chronologie de l’affaire

Commentaires2

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Gouache Avocats · 9 décembre 2022

En l'absence de négociation des CGV ou de services rendus au fournisseur, il n'y a pas d'obligation de conclure une convention unique. Une officine de pharmacie de Saint Etienne entretenait depuis 1987 des relations commerciales avec son fournisseur de produits pharmaceutiques et parapharmaceutiques. A la suite de plusieurs impayés de l'officine, le fournisseur l'a assignée en paiement. Le Tribunal de commerce de Saint Etienne ayant rendu une décision favorable au fournisseur, l'officine a interjeté appel. L'officine dénonçait l'opposabilité des CGV présentes au verso des factures du …

 

Anne-cécile Martin · L'ESSENTIEL Droit de la distribution et de la concurrence · 1er juin 2022
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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 3e ch. a, 7 avr. 2022, n° 18/07221
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 18/07221
Décision précédente : Tribunal de commerce de Saint-Étienne, 12 septembre 2018, N° 2014j00986
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 18/07221

N° Portalis DBVX-V-B7C-L7EV


Décision du Tribunal de Commerce de Saint etienne


Au fond

du 13 septembre 2018


RG : 2014j00986


X


Y


SNC SNC X Y


C/


SAS […]


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 07 Avril 2022

APPELANTS :

M. C X

né le […] à SAINT-ETIENNE

[…]

[…]


Représenté par Me John CURIOZ, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

M. E Y

né le […] à SAINT-ETIENNE

[…]

[…]


Représenté par Me John CURIOZ, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE SNC X Y

[…]

[…]


Représenté par Me John CURIOZ, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMEE :

Société […]

[…]

[…]


Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES – LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938 et ayant pour avocat plaidant, Me Maryline OLIVIE, avocat au barreau de PARIS

* * * * * *


Date de clôture de l’instruction : 24 Mai 2019


Date des plaidoiries tenues en audience publique : 10 Février 2022


Date de mise à disposition : 07 Avril 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :


- Anne-Marie ESPARBÈS, président


- G H, conseiller


- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

assistées pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier


A l’audience, G H a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.


Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,


Signé par G H, pour le président empêché, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE


La SNC X Y, dont les gérants sont M. C X et M. E Y, exploite une officine de pharmacie ; elle entretient depuis 1987 des relations commerciales avec la
SAS Alliance Healthcare Repartition (la société AHR), spécialisée dans le commerce de gros de produits pharmaceutiques et para-pharmaceutiques.


A la suite de plusieurs impayés de la société X Y, la société ARH a été autorisée par ordonnance du 31 octobre 2014 à faire inscrire un nantissement judiciaire provisoire sur le fonds de commerce de celle-ci pour une somme de 54 488€ TTC.


Par courriers recommandés avec AR des 18 juillet 2014 (reçu le 21 juillet suivant) et 12 août 2014 (reçu le 13 août suivant) restés infructueux, la société AHR a mis en demeure la société X Y de lui régler la somme de 54 860,40€, annonçant qu’à défaut de paiement, elle ferait application des dispositions de l’article 13 de ses conditions générales de vente prévoyant en substance et notamment l’arrêt des livraisons futures.


Par acte extrajudiciaire du 28 novembre 2014, la société AHR a fait assigner la société X Y et MM. X et Y en paiement devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne.


Par jugement avant dire droit du 2 février 2017, ce tribunal a ordonné une mesure d’expertise, dont la société AHR a interjeté appel après y avoir été autorisée par ordonnance de référé du 27 mars 2017 rendue par la juridiction du premier président.


Par arrêt du 21 septembre 2017, la cour a infirmé ce jugement et a renvoyé l’affaire devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne pour qu’il soit statué sur le fond.


Par jugement du 13 septembre 2018, le tribunal de commerce précité a :

• dit que les conditions générales de vente sont opposables à la société X Y et à MM. X et Y, dit la créance de la société AHR certaine, liquide et exigible,• rejeté la demande subsidiaire d’expertise judiciaire,• débouté la société X Y, MM. X et Y de toutes leurs demandes,•

• condamné solidairement la société X Y, MM. X et Y, en leur qualité de gérants associés, à payer à la société AHR :

• la somme de 54 488,09€ TTC outre les intérêts de retard d’un montant équivalent à celui appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points de pourcentage à compter du 18 juillet 2014 et jusqu’au parfait paiement,

• la somme de 5 448€ au titre de la clause forfaitaire contractuelle majorée au taux légal à compter de l’acte introductif d’instance, la somme de 640€ d’indemnité forfaitaire de recouvrement,• ordonné la capitalisation annuelle des intérêts,•

• dit que tous les paiements effectués par la société X Y, MM. X et Y s’imputeront par priorité sur les intérêts dus,

• condamné solidairement la société X Y, MM. X et Y à payer à la société AHR la somme de 2 500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

• dit que les dépens de première instance et d’appel, en ce compris le coût de la sommation de payer sont à la charge solidaire de la société X Y et de MM. X et Y, débouté la société AHR de sa demande d’exécution provisoire.•


MM. X, Y et la société X Y ont interjeté appel par acte du 15 octobre 2018.


Par conclusions du 2 janvier 2019, fondées sur les articles 1104 et suivants du code civil, MM. X et Y ainsi que la société X Y demandent à la cour d’infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, de :

juger que les conditions générales de vente ne leur sont pas opposables,•

juger que la société AHR ne justifie pas du montant de sa créance,•

juger que la société AHR est redevable des remises non réglées,•

juger que la société AHR a commis une faute en s’abstenant de déduire les remises,•

• condamner la société AHR à payer à la société X Y 58 186,24€ à titre provisionnel outre intérêts à compter du mois de décembre 2011 au titre des remises non réglées,

• condamner la société AHR à payer à la société X Y la somme de 3 163,50€ en remboursement de la pénalité indue figurant sur la facture complémentaire de mars 2012,

• le cas échéant, si la cour devait estimer que la société AHR justifie d’une créance, fixer le montant de celle-ci et ordonner la compensation avec la créance de la société X Y,

• si la cour devait estimer que les conditions générales de vente sont applicables, réduire les montants réclamés à 1 € compte tenu de l’absence de préjudice de la société AHR et du caractère disproportionné des pénalités,

à titre subsidiaire, après avoir statué sur l’opposabilité des conditions générales de vente et la question des remises,

• nommer tel expert qu’il plaira à la cour en reformulant sa mission conformément à l’arrêt rendu par la cour d’appel de Lyon le 21 septembre 2017 et dire que sa mission consistera notamment à :

• fixer le montant des prestations effectuées par la société AHR et non réglées par la société X Y depuis le mois de février 2013,

• fixer le montant des remises non réglées par la société AHR à la société X Y depuis 2009,

• vérifier le montant des pénalités imputées par la société AHR et réglées à tort par la société X Y depuis 2009,

en toute hypothèse,

ordonner la mainlevée du nantissement judiciaire provisoire inscrit par la société AHR,• condamner la société AHR à leur payer :• 5 000€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive vexatoire et frustratoire,• 12 000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,• les entiers dépens de toutes les instances.•


Par conclusions du 27 mars 2019, fondées sur les articles 9, 143, 146 du code de procédure civile,1103, 1104, 1231-1, 1231-5, 1343-1 et 1343-2 du code civil, la société AHR demande que la cour, après avoir déclaré l’appel formé recevable en la forme, le déclare mal fondé et :

confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,• déboute les appelants de l’ensemble de leurs demandes principales et subsidiaires,• y ajoutant,•

• condamne solidairement les appelants à lui payer la somme de 6 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d’appel, ces derniers étant distraits au profit de Me Romain Laffly, Lexavoué Lyon, sur son affirmation de droit.


L’affaire a été initialement fixée à plaider à l’audience du 25 juin 2020 qui n’a pu se tenir en raison de la pandémie liée à la Covid19. A défaut d’accord de tous les conseils pour un prononcé d’arrêt faisant suite à une procédure sans audience, les débats ont été à nouveau fixés à l’audience du 10 février 2022.

MOTIFS


A titre liminaire, il est rappelé que la cour n’est pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendent inopérantes.


L’assignation ayant été délivrée avant le 1er octobre 2016, le litige est soumis au droit ancien des contrats.


Sauf indication contraire, les articles visés dans l’arrêt sont issus du code de commerce.


Sur les conditions générales de vente de la société AHR


Aux termes de leurs développements, les appelants soutiennent en substance que la société AHR n’a jamais mis en place la convention écrite prévue par l’article L.441-7 dans laquelle auraient dû figurer ses conditions générales de vente, et qu’en l’absence de convention cadre entre les deux sociétés, il n’existe pas de contractualisation formalisée concernant les taux de remise.


Ils dénoncent ainsi l’opposabilité à leur égard des conditions générales de vente indiquées par la société AHR au verso de ses factures, en faisant valoir que les factures communiquées par celle-ci ne correspondent pas aux documents qui leur ont été remis dans le cadre de la relation commerciale, à savoir les fiches CATMAN, les factures complémentaires, les relevés décadaires et les relevés de factures, soulignant produire les originaux de ces pièces sur lesquels ne figure aucune condition générale ; disant inopérant l’argument adverse concernant la relation commerciale suivie, ils ajoutent que la formule type « le client reconnaît avoir pris connaissance des conditions générales » ne figure pas non plus sur les documents précités (fiches CATMAM etc…) et que quand bien même cette formule y serait mentionnée, elle ne fait pas preuve que le client a eu connaissance de ces conditions générales de vente, leur opposabilité au client supposant qu’elles aient été connues ou transmises préalablement à la relation contractuelle afin d’être acceptées par ce dernier.


Ils soulignent encore que :


- la société AHR est consciente de l’inopposabilité de ses conditions générales de vente dans la mesure où elle exclut elle-même leur application, que ce soit en saisissant le tribunal de commerce de Saint-Étienne alors qu’elle devait saisir le tribunal du ressort de son siège social situé à Gennevilliers, ou encore, en poursuivant ses livraisons malgré plusieurs impayés alors que selon l’article 13 de ces conditions générales de vente, elle se réservait le droit de ne pas effectuer les livraisons futures en cas de non-paiement d’une seule facture (') après qu’une demande ait été adressée au client par lettre recommandées avec avis de réception,


- le verso des factures est illisible « à l’exception des titres où il est indiqué : conditions générales de vente (extrait), de sorte que ces dispositions ne peuvent être entrées dans le champ contractuel ».


Ils concluent plus généralement que la convention écrite visée à l’article L.441-7 précité mentionnant les conditions de l’opération de vente des produits ou des prestations de services telles qu’elles résultent de la négociation commerciale qui doit, conformément à l’article L.441-6, préciser notamment les conditions de vente et les réductions de prix, ne peut pas, en l’absence de tout contrat écrit, correspondre à des conditions générales de vente acceptées tacitement.


La société AHR réplique que ses conditions générales de vente sont parfaitement opposables à la société X Y qui les a tacitement, mais de manière non équivoque, acceptées, pour en avoir reçu un exemplaire lors de chaque livraison pluri-quotidienne, et ce dans le cadre de relations commerciales suivies pendant plusieurs dizaines d’années.
Elle insiste sur le fait que ces conditions générales de vente ont été rappelées à la société X Y à l’occasion des lettres comminatoires qu’elle lui a adressées les 18 juillet et 12 août 2014 concernant l’application de l’article 13 desdites conditions à défaut de régularisation des impayés.


Elle soutient par ailleurs que les dispositions de l’article L.441-6 sont respectées par les conditions générales de vente figurant au verso de ses factures en ce qu’elles font référence aux catégories visées par ce texte et encore que la convention visée par l’article L. 441-7 ne s’entend pas obligatoirement d’un contrat au sens d’un instrumentum signé, les conventions générales de vente ayant la valeur d’un contrat reflétant la commune intention des parties, notamment sur les modalités de facturation, de paiement et de livraison.


A titre liminaire, il doit être rappelé que dans leur version applicable au moment des faits,

• l’article L.441-6 -I énonçait notamment : "Tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur est tenu de communiquer ses conditions générales de vente à tout acheteur de produits ou tout demandeur de prestations de services qui en fait la demande pour une activité professionnelle. Celles-ci constituent le socle de la négociation commerciale. Elles comprennent :


-les conditions de vente,


-le barème des prix unitaires,


-les réductions de prix,


-les conditions de règlement " (…)

• l’article L.441-7 édictait quant à lui : "I.-Une convention écrite conclue entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services indique les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l’issue de la négociation commerciale établie soit dans un document unique, soit dans un ensemble formé par un contrat-cadre annuel et des contrats d’application, elle fixe :

1° Les conditions de l’opération de vente des produits ou des prestations de services telles qu’elles résultent de la négociation commerciale dans le respect de l’article L.441-6,

2° Les conditions dans lesquelles le distributeur ou le prestataire de services s’oblige à rendre au fournisseur, à l’occasion de la revente de ses produits ou services aux consommateurs ou en vue de leur revente aux professionnels, tout service propre à favoriser leur commercialisation ne relevant pas des obligations d’achat et de vente, en précisant l’objet, la date prévue, les modalités d’exécution, la rémunération des obligations ainsi que les produits ou services auxquels elles se rapportent,

3° Les autres obligations destinées à favoriser la relation commerciale entre le fournisseur et le distributeur ou le prestataire de services, en précisant pour chacune l’objet, la date prévue et les modalités d’exécution.


Les obligations relevant des 1° et 3° concourent à la détermination du prix convenu."


Il y a également lieu de rappeler que selon l’avis n° 10-07 de la Commission d’Examen des Pratiques Commerciales (CEPC) du 1er avril 2010 : « L’article L.441-7 n’oblige à consigner par écrit des accords que pour autant qu’ils existent. Il ne se substitue pas à la volonté des parties et n’impose pas, par exemple, de convenir de services de coopération commerciale ou autres là où les parties ne souhaitent pas y recourir.
Selon cet article, la convention indique les obligations auxquelles se sont engagées les parties en vue de fixer le prix à l’issue de la négociation commerciale. Ceci implique d’une part, une certaine permanence de la relation commerciale dont les flux puissent être canalisés dans des engagements annuels et, d’autre part, qu’il soit d’usage de négocier dans ce type de relation.


En conséquence, lorsque la relation commerciale se borne à la conclusion de contrats instantanés sur le fondement des conditions générales ou catégorielles du vendeur, il n’est point requis d’établir une convention unique conforme à l’article L 441-7. La convention conclue entre les parties est constituée par les conditions générales de vente ou les conditions catégorielles écrites du fournisseur incluant, le cas échéant, un barème de réductions de prix. Cette situation correspond, le plus souvent, à la vente ponctuelle aux professionnels de produits proposés en libre-service ou en ligne.


A l’inverse, lorsque l’économie de la relation commerciale appelle des contrats de longue durée tels que certains contrats de distribution (contrats de concession exclusive, par exemple) ou certains contrats de sous-traitance industrielle), il paraît artificiel d’en réduire la durée à un an.


En revanche, chaque fois que des conditions dérogeant aux conditions générales de vente seront conclues, ce qui implique une négociation, ou chaque fois qu’il sera convenu de services de coopération commerciale ou d’autres obligations (au sens de l’article L 441-7-1, 3°), la convention unique s’imposera. »


Chaque commande passée par la société X Y auprès de la société AHR constitue un contrat unique dont la facture, selon les articles 3 et 4 des conditions générales de vente, obligatoirement jointe au colis, atteste de la commande et vaut bon de livraison.


Dès lors, la rédaction d’une convention unique au sens de l’article L.441-7 ne s’impose pas contrairement aux allégations de la société X Y, les relations entre les parties étant régies par les conditions générales de vente ; elle ne s’imposait pas non plus en l’absence de conclusion entre les parties de conditions dérogeant aux conditions générales de vente, les appelants étant à cet égard mal fondés à subodorer que les conditions commerciales régissant le mode de calcul des remises « auraient été modifiées » en avril 2012 puis « certainement » en janvier 2013 à la suite de la signature par la société AHR de contrats de partenariat avec une SAS Madeleine, non partie au présent litige, sans aucune offre de preuve autre que les suppositions formulées par Mme Z, ancienne salariée de la société AHR.


Il est par ailleurs vérifié que les conditions générales de vente de la société AHR respectent les exigences de l’article L.441-6 qu’il s’agisse de leur communication au client :


- elles sont reproduites au dos de la facture,


- sur la première page de celle-ci figure de manière très apparente (immédiatement sous le mot facture, dans un encart de couleur avec le texte en police blanche) une clause énonçant « le client reconnaît avoir pris connaissance des Conditions Générales de Vente qui figurent au verso dont notamment, la clause de réserve de propriété »,

ou des informations à donner sur la relation commerciale : les conditions de vente y sont détaillées, au même titre que les réductions de prix et les modalités de règlement ; s’agissant du barème des prix unitaires, il est énoncé à l’article 10 desdites conditions que notamment « les marchandises sont fournies au prix en vigueur au moment de la livraison, et pour certaines d’elles au prix déterminé par les dispositions législatives et / ou réglementaires qui leur sont applicables » ; cette formulation contrainte du fait de la spécificité des produits commercialisés dont les tarifs ne sont pas nécessairement fixés par le fournisseur n’encourt aucune critique, dès lors que le prix unitaire des produits vendus figurait bien sur chacune des factures.
Les appelants ne peuvent pas utilement soutenir ne pas avoir reçu les factures produites par la partie adverse en affirmant n’avoir été destinataires que des fiches CATMAM, des factures complémentaires et des relevés décadaires ; en effet, alors que depuis 1987 la société X Y a commandé régulièrement des produits à la société AHR, elle n’a jamais protesté contre la non-remise alléguée de ces factures et n’établit pas en tout état de cause, l’avoir fait en l’absence de communication toute pièce idoine ; cette allégation est d’autant moins crédible que la société X Y ne pouvait pas ne pas dénoncer le fait qu’elle n’aurait pas été en possession des factures à chaque livraison, celles-ci lui étant nécessaires pour formaliser d’éventuels retours de marchandises (volet détachable en cas de réclamation).


Ils sont tout aussi mal fondés à conclure, pour soutenir leur inopposabilité à leur égard, que les conditions générales de vente ne figurent pas sur les fiches CATMAM, les factures complémentaires et les relevés décadaires, ces documents n’ayant pas valeur de contrat contrairement à la facture qui « atteste de la commande passée par le client à la société » conformément aux termes de l’article 3 des conditions générales de vente.


Ils ne sont pas non plus fondés à soutenir que la société AHR aurait elle-même admis l’inopposabilité de ces conditions litigieuses en s’émancipant de la clause d’attribution de compétence définie par celles-ci lors de la saisine du tribunal de commerce de Saint-Étienne , ou encore, en ne mettant pas fin aux livraisons dès le non-paiement d’une facture ; en effet, l’article 1 des conditions générales de vente précise « le fait que la société ne se prévale pas à un moment donné de l’une quelconque des présentes conditions générales de vente, ne peut être interprété comme valant renonciation à se prévaloir ultérieurement de l’une quelconque de ces conditions » ; ensuite, la société AHR n’avait pas obligation de mettre fin aux livraisons dès la première facture impayée, l’article 13 précisant bien qu’elle se réservait le droit de le faire.


Sans plus ample discussion, considérant que les sociétés X Y et AHR ont entretenu des relations commerciales depuis 1987 sans régulariser un contrat d’approvisionnement exclusif, la société X Y conservant toute liberté de se fournir en produits pharmaceutiques et para-pharmaceutiques auprès d’autres fournisseurs comme rappelé à l’article 1er des conditions générales de vente: « le client pouvant, à chaque instant, choisir son fournisseur, le fait de passer commande emporte l’adhésion entière et sans réserve du client à ces conditions générales de vente(')», que la société X Y a réglé les factures de la société AHR depuis 1987 jusqu’en 2011, date des premiers incidents de paiement, que les doubles de factures communiqués par la société AHR (à défaut de communication par les appelants de leurs exemplaires) comportent tous au verso les conditions générales de vente en termes lisibles qui n’ont jamais été contestées par la société X Y et ses gérants, que la clause selon laquelle le client a pris connaissance de celles-ci figure clairement sur la première page de la facture, il y a lieu de dire ces conditions générales de vente opposables aux appelants, ceux-ci les ayant ainsi acceptées tacitement, de manière non équivoque dans le cadre de relations d’affaires anciennes avec la société AHR.


Le jugement déféré est en conséquence confirmé en ce sens.


Sur les demandes en paiement des remises commerciales


Les appelants expliquent ne pas avoir réglé certaines livraisons et être « parfaitement fondés à invoquer l’exception d’inexécution » au motif que la société AHR a minoré ou n’a pas réglé les remises sans avoir informé la société X Y que « faute de règlement, il n’y aurait plus de remise conformément à quelque condition générale ».


Ils établissent leurs calculs de remises commerciales sur la base d’un taux de « l’ordre de 3 % du chiffre d’affaires », visant également une moyenne de 2,32 % pour 2012 et celle de 1,80 % pour 2013 ; il est ainsi réclamé pour les années 2009, 2012 et 2013 et les 6 premiers mois de 2014 un total de 58 186,24€ ainsi qu’une somme de 3 163,50€ correspondant à des frais de dossiers comptabilisés sur la facture complémentaire de mars 2012 (une facture complémentaire étant celle qui fait apparaître les remises du mois précédent), sur la foi d’une attestation et analyse d’une ancienne employée de la société AHR, Mme Z.


Selon l’article 12-2 « réduction de prix » des conditions générales de vente, « les remises, ristournes et avantages commerciaux et financiers assimilés de toute nature ne sont dus au client que sous la condition expresse que la Société ait été effectivement créditée aux échéances convenues, de l’intégralité de toutes les sommes dues par le client. Ils ne sont jamais dus en cas de paiement comptant de chaque livraison, ni en cas de paiement journalier, ni en cas de paiement par chèque sur relevé de factures décadaire. Ces modes de paiement s’appliquent systématiquement et exclusivement aux clients ne pouvant s’acquitter de toute somme échue et impayée. »


Il se déduit notamment de ces dispositions, que la société AHR n’est pas tenue de dénoncer ou notifier à la société X Y le non-paiement des remises commerciales consécutivement à des impayés de factures ; les appelants sont donc mal fondés à lui faire grief de « n’avoir jamais écrit à sa cliente pour l’informer que faute de règlement, il n’y aurait plus de remise ».


Il résulte des communications des parties que les factures des 20, 30 novembre 2011 et 10 décembre 2011 sont revenues impayées les 11, 23 janvier 2012 et le 1er février 2012 ; la société AHR, faisant application de l’article 12-2 précité, a interrompu le versement des remises commerciales en février et mars 2012 (suppression figurant sur les factures complémentaires de mars et avril 2012) pour ne le reprendre qu’à compter d’avril 2012 (mention sur la facture complémentaire de mai 2012) après régularisation des impayés.


De nouveaux incidents de paiement sont intervenus à partir d’avril 2013 et ont justifié l’arrêt de versement des remises commerciales à compter de cette date, ainsi qu’en atteste leur absence sur les factures complémentaires et relevés de factures depuis mai 2013 ; si des régularisations sont intervenues entre octobre 2013 et septembre 2014, la société X Y restait débitrice d’un solde de factures impayé de 54 488,09€ au 14 octobre 2014 ; en outre, ces régularisations partielles par chèque n’ouvraient pas droit à remises commerciales.


Les appelants sont en conséquence mal fondés à réclamer paiement des remises commerciales dites impayées au titre de ces différentes périodes en se prévalant d’une exception d’inexécution.


Ils ne font pas au surplus la démonstration que la société X Y n’a pas été intégralement remplie de ses droits à remises commerciales sur les périodes non concernées par les factures impayées.


Ainsi, l’analyse produite à cette fin telle qu’établie par Mme Z, indépendamment de son caractère non contradictoire qui n’interdit pas sa production en tant que simple pièce soumise à discussion des parties, n’est pas significative dans la mesure où il y est fait application de taux de remises moyens (alors que le taux de remise ne constitue pas un droit acquis et ne peut pas être forfaitisé dès lors que sa fixation dépend de plusieurs paramètres sur lesquels le répartiteur n’a pas la main), de simulations mensuelles y compris sur les périodes n’ouvrant pas droit à ces remises du fait des impayés de factures.


De même, l’attestation de M. A, se disant « ancien commercial répartition » et déclarant avoir constaté que « le montant des remises de la pharmacie X Y ne correspondaient pas ou étaient absents ; le montant des remises a été calculé au détriment de la pharmacie X Y » est insuffisante à asseoir la réclamation des appelants, s’agissant d’un témoignage non circonstancié ni documenté.


Sont par ailleurs inopérantes les références et comparaisons des remises commerciales versées par la société AHR à une autre officine, la pharmacie Dauvilliers, le montant des remises commerciales ne pouvant être uniformisé et dépendant étroitement de l’activité commerciale propre à chacune des officines.


La preuve de la reconnaissance du bien fondé de ces remises commerciales complémentaires ne peut pas être non plus trouvée dans le courriel du directeur d’établissement de la société AHR répondant le 2 octobre 2013 à celui de M. Y (qui l’avisait le 2 octobre 2013 avoir calculé que pour l’année 2012 il manquait 16 200€ de remises commerciales) ; en effet, ce directeur sollicitait seulement confirmation par retour de mail du montant de la dette de la société AHR et communiquait les coordonnées du directeur régional des ventes en charge des affaires commerciales, signifiant ainsi implicitement que l’affaire allait suivre son cours auprès de qui de droit, sans plus ample reconnaissance du principe et du montant de la dette alléguée.


Cette absence d’acquiescement à la réclamation de remises complémentaires est d’autant plus établie qu’en réponse au courrier du conseil de la société X Y du 5 août 2014 lui signifiant un arriéré de remises de deux ans pour « un montant supérieur à 32 000€ », après avoir admis être débitrice à son égard d’une « créance », la société AHR a mis en demeure cette société les 5 et 12 août 2014 d’avoir à régulariser ses impayés.


Les appelants ne sont pas davantage accueillis dans leur prétention relative aux remises commerciales dites non-versées au titre de l’année 2009, chiffrées à 6 719,97€ ; en effet, à considérer cette prétention non atteinte par la prescription, son bien fondé n’est aucunement établi en l’état des pièces versées au débat, les annotations manuscrites de taux de remise différents portées en marge des fiches CATMAM de septembre à décembre 2009 inclus n’étant pas argumentées ni documentées.


L’ensemble de ces constatations et considérations conduit à confirmer le jugement déféré qui a débouté la société X Y et ses deux gérants de leur demande en paiement de remises commerciales ; il est également confirmé sur le rejet de leur demande d’expertise, une mesure d’instruction n’ayant pas vocation à pallier la carence probatoire d’une partie, les appelants signifiant clairement au travers de cette demande d’expertise chercher notamment la preuve des remises dites non réglées depuis 2009.


Sur la créance de la société AHR


Les appelants critiquent à bon droit le bien fondé de la somme de 3 163,50€ figurant sur la facture du 31 mars 2012 sous l’intitulé « frais de dossier» dans la mesure où la société AHR ne s’explique pas sur la nature de cette dépense, les conditions générales de vente n’en prévoyant pas non plus l’existence.


La créance de la société AHR fixée à 54 488,09€ en principal doit être en conséquence diminuée de la somme de 3 163,50€, la société AHR ne devant pas être condamnée à rembourser cette somme aux appelants, ceux -ci n’établissant pas l’avoir effectivement réglée dès lors qu’ils restaient redevables de celle de 54 488,09€.


Selon l’alinéa 8 de l’article L.441-6 .I : « Les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d’application et le taux d’intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d’intérêt légal, ce taux est égal au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. (…) Les pénalités de retard sont exigibles sans qu’un rappel soit nécessaire. Tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l’égard du créancier, d’une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret. Lorsque les frais de recouvrement exposés sont supérieurs au montant de cette indemnité forfaitaire, le créancier peut demander une indemnisation complémentaire, sur justification(…) .»


Il en résulte que les intérêts de retard tels que prévus à l’article 13 alinéa 3 de ces conditions générales de vente ne s’analysent pas en une clause pénale, n’étant que la retranscription fidèle de ces dispositions légales supplétives.


L’indemnité conventionnelle de 10 % (soit 5 132,45€) qualifiée de clause pénale telle que prévue à l’article 13 alinéa 4 de ces conditions générales, n’a pas lieu d’être réduite à 1€ comme sollicité par les appelants (prétention à laquelle les premiers juges n’ont pas répondu dans leurs motifs) qui ne démontrent pas qu’elle serait manifestement excessive, étant rappelé que la créance de la société AHR est ancienne et qu’aucun paiement n’est intervenu depuis le dernier arrêté de compte du 14 octobre 2014.


En conséquence de ces considérations, le jugement dont appel est infirmé sur le montant des sommes mises à la charge des appelants, ceux-ci devant être condamnés in solidum à verser à la société AHR la somme de 51 324,59€ TTC (soit 54 488,09 – 3 163,50) en principal avec les intérêts de retard d’un montant équivalent à celui appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points, celle de 5 132,45€ au titre de l’indemnité conventionnelle avec intérêts au taux légal à compter du 21 juillet 2014 (date de réception de la mise en demeure recommandée du 18 juillet 2014) et celle de 640€ d’indemnité forfaitaire de recouvrement, cette dernière étant due conformément à l’article L.441-6.I alinéa 12.


Le jugement déféré est confirmé pour le surplus s’agissant de la capitalisation des intérêts prévue à l’article 1154 du code civil et de l’imputation des paiements par priorité sur les intérêts dus.


Sur la demande de mainlevée du nantissement judiciaire provisoire


Cette prétention sur laquelle la cour relève que les premiers juges ont omis de statuer dans les motifs de leur décision tout en déboutant au dispositif la société B Y et MM. B et Y de toutes leurs demandes, ne peut être accueillie ; en effet, la mainlevée de ce nantissement ne se justifie pas dès lors que la demande en paiement de la société AHR n’est pas rejetée.


Sur les dommages et intérêts pour procédure abusive, les dépens et les frais irrépétibles


Les appelants qui succombent sont déboutés de leur réclamation de dommages et intérêts pour procédure abusive (étant relevé que les premiers juges n’ont pas statué sur cette prétention dans les motifs de leur décision, s’étant limités dans le dispositif à débouter globalement la société X Y de leurs demandes).


Ils sont condamnés in solidum aux dépens d’appel et à conserver la charge de l’intégralité de leurs frais irrépétibles, et doivent verser à la société AHR une indemnité de procédure complémentaire pour la cause d’appel, les condamnations aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile prononcées en première instance étant confirmées, sauf à dire qu’elles sont prononcées in solidum.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré, sauf en ses dispositions relatives au montant de la créance de la SAS Alliance Healthcare Répartition, et à dire que les condamnations aux frais irrépétibles et aux dépens sont prononcées in solidum,

Statuant à nouveau sur le seul chef infirmé et ajoutant, Déduisant les frais de dossier fixés à 3 163,50€ de la créance de la SAS Alliance Healthcare Répartition,

Condamne in solidum la SNC X Y, M. C X et M. E Y à payer à la SAS Alliance Healthcare Répartition :

• la somme de 51 324,59 € TTC outre les intérêts de retard d’un montant équivalent à celui appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points de pourcentage à compter du 21 juillet 2014 et jusqu’au parfait paiement,

• la somme de 5 132,45 € au titre de la clause forfaitaire contractuelle majorée au taux légal à compter de l’acte introductif d’instance, la somme de 640€ d’indemnité forfaitaire de recouvrement,•

Déboute la SNC X Y, M. C X et M. E Y :

de leur demande de réduction à 1€ des pénalités,•

• de leur demande de mainlevée du nantissement judiciaire provisoire inscrit par la SAS Alliance Healthcare Répartition sur le fonds de commerce de la SNC X Y, de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,• de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,•

Condamne in solidum la SNC X Y, M. C X et M. E Y à verser à la SAS Alliance Healthcare Répartition une indemnité de procédure d’appel de 4 000€,

Condamne in solidum la SNC X Y, M. C X et M. E Y aux dépens d’appel avec recouvrement conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, Pour le Président empêché,
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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 7 avril 2022, n° 18/07221