Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 20 avril 2021, n° 17/02145

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Metz, ch. soc.-sect. 1, 20 avr. 2021, n° 17/02145
Juridiction : Cour d'appel de Metz
Numéro(s) : 17/02145
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Metz, 28 juin 2017, N° 16/01207
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Arrêt n° 21/00347

20 avril 2021

---------------------

N° RG 17/02145 -

N° Portalis DBVS-V-B7B-EQWS

-------------------------

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de METZ

29 juin 2017

[…]

-------------------------

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

Vingt avril deux mille vingt et un

APPELANTE :

SAS SPIE CITYNETWORKS venant aux droits de la S.A.S. THEPAULT RESEAUX prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Représentée par Me Delphine BUCHSER, avocat au barreau de METZ

INTIMÉ :

M. H X

[…]

[…]

Représenté par Me Florent KAHN, avocat au barreau de METZ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 février 2021, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre, chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

Madame Laëtitia WELTER, Conseillère

Greffier, lors des débats : M. Laurent LASNE

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Anne-Marie WOLF, Présidente de Chambre, et par Mme Catherine MALHERBE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. H X a été embauché par la SAS THEPAULT, selon contrat à durée indéterminée, à compter du 22 mai 2000, en qualité de monteur chauffeur, avec reprise d’ancienneté au 01 décembre 1992.

La convention collective applicable à la relation de travail est la convention collective nationale des travaux publics.

M. X percevait un salaire mensuel brut de 2.285,57 €, outre diverses primes de paniers, d’astreinte et de trajets en tant que chef d’équipe.

Selon convention de transfert du 17 décembre 2010, Monsieur X était muté à la SAS Thepault Réseaux, aux droits de laquelle vient la SAS SPIE Citynetworks depuis le 1er janvier 2020.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 26 mars 2012, M. X a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 05 avril 2012.

Par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 16 avril 2012, M. X a été licencié pour faute grave au motif d’un manquement aux règles de sécurité lors d’une fouille.

Par acte introductif enregistré au greffe le 10 avril 2013, M. X a saisi le Conseil de prud’hommes de Metz aux fins de dire et juger que son licenciement intervenu le 16 avril 2012 est dépourvu de toutes causes réelles et sérieuses, condamner la SAS Thepault Réseaux à lui payer les sommes suivantes :

* 69.120 € nets à titre de dommages et intérêts pour rupture sans cause réelle et sérieuse,

* 5.700 € bruts au titre de l’indemnité de préavis,

* 570 € bruts au titre des congés payés y afférents,

* 14.880 € bruts au titre de l’indemnité de licenciement,

— Constater la réalisation d’heures supplémentaires non réglées,

— Ordonner à la SAS Thepault Réseaux la production des rapports journaliers établis par M. X d’avril 2008 à décembre 2010, sous astreinte de 100 € par jour de retard dans un délai de 15 jours à compter de la décision à intervenir,

— Condamner la SAS Thepault Réseaux à payer à M. X les sommes suivantes:

* 13 202.76 € bruts au titre des heures supplémentaires entre le 01 avril 2008 et le 16 avril 2012,

* 1 302.27 € bruts au titre des congés payés afférents,

* 24 375.10 € bruts au titre des astreintes non rémunérées,

— Condamner la SAS Thepault Réseaux à la délivrance, sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter d’un délai de 5 jours courant à partir de la notification de la décision à intervenir, des documents suivants : le solde de tout compte, l’attestation destinée à pôle emploi, le certificat de travail, le bulletin de paie,

— Condamner la SAS Thepault Réseaux à payer à M. X une somme de 2 000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre tous les frais et dépens,

— Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

La SAS Thepault Réseaux demandait au conseil de débouter M. X de ses demandes, le condamner à verser la somme de 7.363, 65 € à la société au titre de l’indemnité de trajet et le condamner à verser à la société Thepault Réseaux la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile outre les entiers frais et dépens.

Par jugement mixte du 29 juin 2017, le Conseil de prud’hommes de Metz, section industrie, a statué ainsi qu’il suit :

— Dit et juge que le licenciement de M. H X est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— Dit que la demande de production des rapports journaliers d’avril 2008 à décembre 2010, par la SAS Thepault Réseaux est sans objet,

— Condamne la SAS Thepault Réseaux prise en la personne de son représentant légal, à payer à M. X les sommes suivantes :

* 9 707 € bruts titre des heures supplémentaires pour la période du 01 avril 2008 au 16 avril 2012 ;

* 970,70 € bruts au titre des congés payés afférents,

* 5 700 € bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

* 570 € bruts au titre des congés payés afférents,

* 14 880 € nets au titre de l’indemnité légale de licenciement,

* 69 120 € nets au titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— Ordonne à la SAS Thepault Réseaux d’établir et faire parvenir à M. X à compter d’un délai de 30 jours à partir de la notification de la décision à intervenir, les documents rectifiés et conformes au présent jugement : le solde de tout compte, l’attestation destinée à pôle emploi, le bulletin de paie,

— Déboute M. X de sa demande au titre du certificat de travail ;

— Dit qu’il n’y a pas lieu à astreinte,

— Déboute M. X du surplus de ses demandes au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents,

— Déboute la SAS Thepault Réseaux de sa demande reconventionnelle au titre de la compensation des sommes accordées à M. X avec l’indemnité de trajet et de sa demande au titre de la prescription triennale sur les astreintes,

— Réserve les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens au titre de l’article 696 du code de procédure civile,

— Dit qu’il y a lieu de faire application de l’exécution provisoire sur la totalité du présent jugement,

— Ordonne la réouverture des débats en ce qui concerne la demande au titre des astreintes,

— Ordonne au demandeur et au défendeur de respecter les délais de communication mis à leur charge,

— Renvoie l’affaire à l’audience du bureau de jugement du 5 octobre 2017.

Par déclaration formée par voie électronique le 24 juillet 2017 et enregistrée au greffe le 24 juillet 2017 sous le N° RG 2145/17, la SAS Thepault Réseaux a régulièrement interjeté appel du jugement qui lui a été notifié le 04 juillet 2017 au vu de l’émargement de l’accusé de réception postal.

Par conclusions du 13 octobre 2017, la SAS Thepault Réseaux demande à la Cour de :

— Infirmer la décision du Conseil de Prud’hommes de METZ du 29 juin 2017 en ce qu’il a : dit et jugé que le licenciement de M. X était dépourvu de cause réelle et sérieuse, condamné la SAS Thepault Réseaux à payer à M. X les sommes suivantes : 9 707 € bruts au titre des heures supplémentaires pour la période du 1er avril 2008 au 16 avril 2012, 970 € bruts au titre des congés payés afférents, 5 700 € bruts au titre des indemnités de préavis, 570 € bruts au titre des congés payés afférents, 14 880 € nets au titre de la limite légale de licenciement, 69 120 € nets au titre des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause et sérieuse, ordonné à la SAS Thepault Réseaux d’établir et de faire parvenir à M. X à compter d’an délai de 30 jours à partir de la notification de la décision à intervenir, les documents rectifiés et conformes au jugement : le solde de tout compte, l’attestation destinée à Pôle emploi, le bulletin de paye,

— Statuant à nouveau, dire et juger que licenciement de M. X est fondé sur une faute grave,

— Débouter M. X de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause et sérieuse, d’indemnités de préavis, d’indemnités compensatrice de congés payés sur préavis et d’indemnités de licenciement, et de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires et congés payés afférents,

— Dire qu’il n’y a pas lieu de modifier le solde de tout compte, l’attestation destinée à Pôle Emploi, le dernier bulletin de paye et le certificat de travail de M. X,

— En tout état de cause, condamner M. X au versement d’une somme de 2 000€ au titre de

l’article 700 du Code de procédure civile,

— Condamner M. X aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions datées du 14 décembre 2017, notifiées par voie électronique le 18 décembre 2017, M. X demande à la Cour de :

— Confirmer le jugement sauf en ce qu’il a condamné la Société à régler 9.707 € brut d’heures supplémentaires et 970,70 de congés payés,

— Condamner la SAS Thepault Réseaux à payer à M. X les sommes suivantes:

* 13.202,76 € bruts au titre des heures supplémentaires entre le 1er avril 2008 et le 16 avril 2012, et 1.320,27 € bruts au titre des congés payés y afférant,

— Écarter des débats la pièce adverse n°10 car contraire au droit au respect de la vie privée de M. X,

— Condamner la SAS Thepault Réseaux à payer à M. X une somme de 3.000,00€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile pour les frais d’appel non compris dans les dépens,

— Condamner la SAS Thepault Réseaux à régler les frais et dépens, et notamment à payer à M. X le droit de plaidoirie et les frais de constat d’huissier pour un montant de 360,09 €.

Par jugement du 22 novembre 2018, le Conseil de Prud’hommes de Metz, section industrie, a statué ainsi qu’il suit :

— Condamne la société SAS Thepault Réseaux à payer à M. X la somme de 3 075, 00 € bruts au titre de la compensation d’astreinte, de 2 000,00 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens,

— Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 10 avril 2013, en application de l’article 1153 du Code Civil,

— Déboute la société de sa demande au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

— Rejette toutes demandes plus amples ou contraires,

— Rappelle que le présent jugement est soumis à l’exécution provisoire de droit suivant les dispositions de l’article R 1454-28 du Code du Travail.

Par déclaration au RPVA du 21 décembre 2018 enregistrée sous le N° RG 3320/18, la SAS Thepault Réseaux a également interjeté appel de ce jugement,

Par dernières conclusions déposées au RPVA le 18 juin 2019, la SAS Thépault Réseaux demande l’infirmation de ce second jugement et que M. X soit débouté de ses demandes et condamné, outre aux dépens, à lui payer une somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions entrées au RPVA le 4 avril 2019, M. X demande lui aussi l’infirmation de ce jugement sauf sur l’article 700 du code de procédure civile, et la condamnation de la SAS Thépault Réseaux, outre aux dépens de l’instance, à lui payer au titre des astreintes la somme de 32 850 euros à titre principal, 19 655,62 euros à titre subsidiaire, 8 850 euros à titre encore subsidiaire ou 4 050 euros à titre infiniment subsidiaire.

Par ordonnance d’irrecevabilité, clôture et fixation du 04 juin 2018, le conseiller chargé de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions en réplique sur appel incident que la société Thépault Réseaux a notifiées à M. H X le 5 mars 2018 dans la procédure RG 17/02145.

Les conclusions retenues pour ce dossier sont donc les premières qui ont été déposées le 13 octobre 2017, avec les pièces qu’elles visent numérotées de 1 à 49, lesquelles étaient recevables.

Par ordonnance d’incident de mise en état du 14 janvier 2020, le conseiller chargé de la mise en état a joint les procédures N°RG 18/3320 et N°RG 17/2145 sous le N° RG 17/2145, à raison du lien les unissant, le deuxième jugement ayant statué sur un point qui avait été réservé par le premier, tout en précisant que les deux procédures restaient distinctes s’agissant des conclusions.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 mars 2020.

Il convient en application de l’article 455 du Code de procédure civile de se référer aux conclusions respectives des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la pièce n°10

Même si elle n’est pas utile pour la solution du litige, il n’y a pas formellement lieu d’écarter cette pièce des débats, laquelle correspond, pour la période litigieuse, aux données de géolocalisation du véhicule désigné comme la camionnette 603, qui transportait les ouvriers sur les différents chantiers, dès lors que M. X allègue, sans être formellement contredit sur ce point par la SAS Thépault Réseaux, qu’il n’empruntait pas lui-même ce véhicule mais le plus souvent l’un des engins devant servir aux travaux sur place.

Cette pièce, d’usage interne à l’entreprise, ne porte donc pas atteinte au respect de son droit à une vie privée.

Sur le licenciement

M. X a été licencié par une lettre recommandée avec accusé de réception du 16 avril 2012 rédigée en ces termes :

« Je fais suite à l’entretien préalable que nous avons eu le 5 avril dernier, et je tiens à vous informer que j’ai pris la décision de vous licencier pour faute grave.

Rappel des faits :

Le 7 mars 2012, alors que vous réalisiez avec votre équipe une fouille pour implantation de supports béton sur le chantier de SEICHEPREY (54470), vous avez commis une infraction grave aux règles de sécurité. En effet, vous interveniez au fond de la fouille sans avoir réalisé préalablement d’étaiement, pourtant rendu obligatoire en raison de la profondeur importante et de la faible largeur de la fouille, afin de prévenir le risque d’éboulement. Devant le danger immédiat, le Responsable Qualité & Evaluation Fournisseurs d’ERDF, notre client présent sur place pour une visite sécurité inopinée du chantier, vous a fait évacuer la fouille immédiatement. Votre faute est d’autant plus grave qu’après le départ du chantier du responsable d’ERDF, vous êtes retourné au fond de la fouille, restée sans blindage, et donc sans tenir compte du rappel des règles de sécurité et du danger immédiat.

Votre attitude est d’autant plus inacceptable qu’il est de votre responsabilité en tant que chef d’équipe d’appliquer et de faire appliquer les règles de sécurité sur votre chantier. »

Votre licenciement prendra donc effet dès la première présentation de cette lettre recommandée sans préavis, ni indemnités. »

La Cour rappelle que lorsque l’employeur invoque une faute grave du salarié pour prononcer un licenciement avec effet immédiat, il lui incombe d’apporter la preuve des griefs avancés dans les termes énoncés par la lettre de licenciement, à charge ensuite pour le juge d’apprécier le caractère réel et sérieux de ces griefs et de rechercher s’ils constituaient une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rendait impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

La lettre de licenciement vise en l’espèce deux griefs : une intervention de M. X au fond d’une fouille non étayée relevée par un responsable du donneur d’ordre ERDF venu faire une visite inopinée de sécurité et une deuxième intervention au fond de la même fouille après le départ de ce dernier malgré le rappel des règles de sécurité.

Pour justifier de la réalité de ces griefs, la SAS Thépault Réseaux produit :

— une « fiche amélioration fournisseur » à l’en-tête d’ERDF, établie par M. J C, Chef d’Agence Etudes et Travaux, qui indique le n°de commande ou de contrat, le nom du fournisseur « THEPAULT », la nature des travaux « réseaux aériens électricité », le lieu du chantier « 54470 SEICHEPREY », la date de l’événement « 07/03/2012 » et comporte dans une rubrique « description de l’écart, constat » la mention suivante :

« ATTENTION décret de 1965 Fouille réalisée de profondeur >1m30 et de largeur = ou < au 2/3 de la profondeur, nécessite un étaiement et les moyens adaptés pour réaliser ces fouilles en sécurité. Rappel de ce point et évacuation d’un agent qui se trouvait dans cette fouille !!!! »

— des attestations établies par M. K Y et M. L Z, tous deux aides monteurs de l’équipe Thépault Réseaux qui indiquent avoir été présents sur le chantier de Seicheprey le 7 mars 2012 et témoignent en des termes identiques que :

« J’atteste qu’une personne d’ERDF a effectué une visite sur le chantier et a demandé à Monsieur H X d’évacuer la fouille dans laquelle il travaillait pour des raisons de sécurité (absence de blindage).

Après le départ de la personne d’ERDF, Monsieur H X est retourné dans la fouille, restée sans blindage, donc sans tenir compte du rappel des règles de sécurité effectué par la personne d’ERDF ».

— une attestation de M. Q-R A, chauffeur camion grue, qui témoigne que :

« Lors de la réalisation du chantier de Seicheprey le 7 mars 2012, j’étais chauffeur poids lourd.

J’ai commencé ma journée en allant chercher du béton à la centrale, puis nous avons coulé ce béton dans la fouille afin de stabiliser le pré-massif.

J’atteste que la fouille était bien étroite et rectiligne, je n’ai pas observé de talutage.

Comme habituellement sur ce type de travaux l’écartement entre le bord de la fouille et le pré-massif n’excédait pas 10-15 cms.

La largeur de la fouille faisait grand maximum 1,15 mètres. »

— le rapport journalier établi et signé par M. H X en qualité de chef de chantier pour le chantier de Seicheprey le 7 mars 2012, qui indique que les personnes affectées au service étaient lui-même, M. Y, M. Z et M. A et que les travaux réalisés ont été les suivants : «  Fouille + buzage poteau HTA + fouille +levage poteau bois + 18 m de tranchée pour terre HTA ».

— deux documents, que l’appelante précise avoir été initialement produits par M. X :

* l’un rappelant les dispositions de l’article 66 du décret du 8 janvier 1965 qui stipulent que « lorsqu’une tranchée à parois verticales a plus de 1,30 m de profondeur et que sa largeur est égale ou inférieure au 2/3 de sa profondeur, elle doit être obligatoirement blindée qu’elle que soit la nature du terrain ; dans tous les autres cas, les parois doivent être aménagées de façon à éliminer les risques d’écoulement », ce document supportant un dessin fait à la main montrant un quadrilatère de 1,40m de côté pour 1,80 m de haut

* l’autre présentant une « carotte de réservation, modèle 4 », correspondant à une buse dite « pré-massif » en béton destinée à constituer la fondation d’un poteau électrique et la façon de l’installer, un dessin montrant que cet élément mesure 1,80 m de haut pour une section de 86 x 73 ou 74 cms

— la demande initiale de M. X devant le conseil de prud’hommes, dans laquelle il expliquait que le responsable qualité ERDF ne l’a pas trouvé dans la fouille, mais a seulement fait la réflexion de la présence d’une échelle dans cette dernière, que la fouille était d’une profondeur de 1,80 m et d’une largeur de 1,20 m, que le fond de la fouille devait être aplani pour la mise en 'uvre d’une buse, mais que le chauffeur du tractopelle, qui devait faire le trou, l’aplanir et poser la buse avec cet engin, qui n’était pas le chauffeur habituel, mais un remplaçant mal formé, n’a pu mener ce travail à bien, « que face à cette situation (il) était contraint de procéder manuellement à l’aplanissement de la fouille » , tout en réaffirmant qu’à aucun moment le représentant d’ERDF n’a constaté sa présence dans cette dernière et « qu’il n’est pas redescendu dans la fouille » suite à l’observation de ce dernier.

— des photographies des buses en question et de divers matériels, étais et pièces de bardage ou blindage en métal à disposition des salariés de l’entreprise, pouvant a priori servir à étayer une fouille.

— le contrat à durée indéterminée de M. B, chauffeur poids lourd, à effet du 27 novembre 2006 et un certificat justifiant de l’obtention du CACES utilisation des engins de chantier par ce salarié le 12 janvier 2012.

— une fiche de poste de la société « chef d’équipe aérien » indiquant que celui-ci est, entre autres, chargé de faire appliquer et respecter les règles de sécurité liées aux procédures de l’entreprise et de veiller au bon état des véhicules, des nacelles, engins de chantier, matériel et outillage et à leur bonne utilisation sur le chantier, complétée d’un document définissant la fonction de chef d’équipe de travaux publics, qui indique que ce dernier seconde le chef de chantier dans les tâches à exécuter en appliquant les directives, normes et règlements en matière de sécurité, qu’il gère et commande l’équipe qui lui est affectée et prévoit l’approvisionnement en matériaux et matériel.

— de très nombreux documents concernant les formations suivies par M. X depuis son embauche dont encore début 2012 pour les branchements sur réseaux aériens et l’aptitude aux travaux sous tension et ses habilitations, notamment en qualité de chargé de travaux pour les réseaux aériens et souterrains.

— deux documents concernant les prescriptions de sécurité au sein de la société, dont l’un que M. X a reconnu expressément avoir reçu le 26 mai 2000 et qui reprend sous forme de schéma le caractère obligatoire du blindage d’une fouille si la profondeur est supérieure à 1,30 m et si la largeur est inférieure au 2/3 de la profondeur.

— plusieurs documents sur les accidents du travail dus aux ensevelissements dans les fouilles et tranchées, dont l’un évoque 117 accidents mortels en France en 14 ans, avec un ratio de 2/3 d’accidents mortels et présente la méthodologie de mise en place du blindage, un autre décrit les effets de l’ensevelissement sur le corps humain avec écrasement musculaire conduisant à un risque mortel.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que la matérialité des faits reprochés à M. X ne prête pas sérieusement à discussion, le salarié ayant reconnu lui-même qu’il a procédé manuellement à l’aplanissement de la fouille devant l’incapacité du chauffeur à le faire, ce qui suppose nécessairement qu’il a du se rendre dans cette dernière, qu’il a reconnu aussi d’ailleurs lors de sa demande initiale a minima que le responsable d’ERDF a constaté qu’une échelle était posée dans la tranchée, ce qui indique que quelqu’un y était descendu ou avait l’intention de le faire, tout en contestant y être « retourné » après son départ, ce qui confirme qu’il y avait déjà été.

Le rapport de M. C, représentant d’ERDF, est cependant clair et explicite, à savoir qu’il a constaté que la règle de sécurité issue du décret de 1965 n’était pas respectée, a fait un rappel sur ce point et demandé à un agent qui se trouvait dans la fouille d’évacuer cette dernière, en y ajoutant 4 points d’exclamation et le mot « attention » en majuscules, ce qui montre sa consternation et la perception qu’il avait du danger de la situation.

M. X met en cause la validité de ce document, mais, même si M. C n’y a pas apposé sa signature, il s’agit bien d’une fiche officielle d’intervention à l’en-tête d’ERDF, indiquant précisément la qualité de son émetteur, avec ses fonctions, soit chef d’agence études et travaux, ce qui ne fait pas de lui comme prétendu un simple cadre d’agence, mais bien un responsable habilité à prévoir et suivre les travaux, son n° de téléphone, son fax et son adresse mail.

Les deux ouvriers présents avec le chef d’équipe confirment que c’est bien M. X qui se trouvait dans la fouille lors du contrôle et aussi que ce dernier est retourné dans la tranchée malgré l’intervention et l’avertissement de M. C.

M. X met aussi en doute la sincérité des témoignages de ses deux co équipiers sur le chantier, mais le fait qu’ils soient établis en des termes identiques ne suffit pas à mettre en cause leur valeur probante alors qu’il s’agit d’attestations en bonne et due forme, reproduisant la mention de l’article 202 du code de procédure civile ' étant précisé que l’attestation de M. D, qui a côtoyé M. X et M. Y lors d’un stage en mars 2014, qui rapporte indirectement des propos de ce dernier sur un « problème au sein de l’entreprise Thépault » et la signature d’une clause de confidentialité et de non divulgation est particulièrement imprécise quant à l’objet des dits propos, qui ne font pas en l’occurrence référence à une attestation mensongère.

Dans ses derniers écrits devant la Cour, M. X explique que s’il est bien descendu dans la fouille pour réaliser un aplanissage manuel à la pelle, il estime cependant que le trou ne nécessitait pas de blindage, car ce trou faisait bien plus de 1,20 m (c’est le ratio de 2/3 pour une profondeur de 1,80m) et qu’il pouvait donc y descendre en toute sécurité.

Il en veut pour preuve un constat d’huissier qu’il a fait établir le 23 novembre 2017 sur un poteau EDF de Seicheprey, dont il prétend qu’il s’agirait de celui implanté le 7 mars 2012 car remplacé récemment (l’une des photos montre cependant d’autres poteaux en suite de celui mesuré), pour lequel l’huissier a mesuré la taille du poteau (50cms x 50 cms), la dalle de béton dite de sectionneur posée devant ce poteau (largeur 103cms) et ce qu’il indique être la taille des fondations de ce poteau matérialisées par des piquets implantés par M. X (incluant au vu des photos la dalle et le poteau), soit 194x172 cms.

Cependant, M. X admet dans ses écrits que ce constat n’a pas permis de mesurer la buse enterrée sous le poteau et explique que son ouvrage consistait à faire creuser la fouille à l’aide d’une

tractopelle, aplatir son fond avec cet engin pour que la buse soit droite, poser la buse au fond de la fouille, puis remplir la fouille de béton pour faire tenir la buse et retenir les terres, tandis qu’il revenait aux agents d’ERDF de poser le pylône dans la buse et de poser une dalle de sectionneur de 15 cms d’épaisseur, qui sert de support à un isolant en caoutchouc en cas d’intervention sur ce pylône.

Il admet aussi que la buse, qui doit servir à retenir un poteau de 50 cms de section, a une largeur de 86 cms pour 180 cms de haut.

La Cour relève, au vu du schéma de pose produit par les deux parties (annexe 8 de l’intimé), que la fouille destinée à contenir la buse n’a nul besoin d’avoir une dimension qui serait du double de sa taille – si on devait retenir la mesure de l’huissier, ce qui représenterait une grande quantité d’apport de béton pour la soutenir -, mais seulement d’une taille d’au maximum 120 cms, en tenant compte de la largeur de la barre qui doit être insérée dans le haut de la buse pour fixer l’élingue qui doit servir à la hisser au dessus de la fouille, puis à l’y descendre (86 cms plus environ 15 cms de part et d’autre pour la barre, l’élingue devant être accrochée sur cette barre à l’intérieur de la buse).

C’est bien en l’espèce cette largeur de 120 cms ou 1,20 m qu’a évoqué M. X dans sa demande initiale et il ne saurait à présent se contredire en produisant un constat qui n’a guère de valeur probante, l’huissier n’ayant pas pu mesurer exactement la buse avec sa gangue de béton, sans le débord éventuel, et les «fondations» désignées par le constat correspondant à l’emprise de l’ensemble de l’ouvrage, avec la dalle ajoutée par ERDF.

Au demeurant, M. C, en rappelant la règle de sécurité applicable, a nécessairement constaté que la fouille devant laquelle il se trouvait entrait dans les prévisions du décret de 1965 pour estimer impératif de demander à l’agent qui se trouvait dans le trou d’en sortir, lequel agent ne pouvait être que M. X, puisque ce dernier, qui s’est contredit plusieurs fois à ce sujet, a finalement admis qu’il était bien descendu dans la fouille pour en aplanir le fond et ne prétend pas que les autres ouvriers présents sur le chantier en auraient fait de même.

M. A, qui était chargé de couler le béton dans la fouille autour de la buse, confirme qu’habituellement l’écartement entre le bord de la fouille et le pré massif est de 10-15 cms pour ce type de travaux et il atteste en l’espèce que la fouille était bien droite et rectiligne et qu’il n’a pas constaté de talutage.

M. X soutient à ce sujet qu’un talutage aurait été inutile puisque la taille de la fouille excédait la norme du décret du 8 janvier 1965, mais il est relevé que l’article 66 de ce décret, codifié à l’article R. 4534-24 du code du travail dans sa version applicable à l’époque des faits, prévoit certes cette norme de plus de 1,30m de profondeur et de largeur égale ou inférieure aux 2/3 de cette profondeur pour un blindage ou étayage obligatoires des fouilles en tranchée, mais aussi que :

« Les parois des autres fouilles en tranchée, ainsi que celles des fouilles en excavation ou en butte sont aménagées, eu égard à la nature et à l’état des terres, de façon à prévenir les éboulements. A défaut, des blindages, des étrésillons ou des étais appropriés à la nature et à l’état des terres sont mis en place. (')

Ces mesures de protection sont prises avant toute descente d’un travailleur ou d’un employeur dans la fouille pour un travail autre que celui de la mise en place de dispositifs de sécurité.

Lorsque nul n’a à descendre dans la fouille, les zones situées à proximité du bord et qui présenteraient un danger pour les travailleurs sont nettement délimitées et visiblement signalées. »

Ainsi, même à supposer que la fouille excédait 1,20m de large pour 1,80m de haut, il appartenait au salarié d’apprécier en fonction de la nature du terrain, non connue en l’espèce, si une mesure de

sécurité devait néanmoins être prise, surtout dans une hypothèse où le trou avait forcément une taille carrée avec des parois rectilignes puisque devant contenir une buse droite à stabiliser avec du béton et au surplus alors qu’il n’était pas prévu qu’une personne se rende dans la fouille.

En effet, M. X admet lui même que le travail devait être fait uniquement par le conducteur de la minipelle, qui devait creuser la fouille, en aplanir le fond, puis poser la buse, donc que la seule intervention de lui-même et son équipe aurait du porter sur la délimitation de la fouille, sans que personne n’y pénètre.

Dès lors, en se rendant exceptionnellement dans la fouille, sans avoir mis en 'uvre aucune mesure de protection contre le risque de son éboulement, M. X a indiscutablement contrevenu à la disposition légale susvisée, qu’il ne prétend pas avoir ignoré (le document remis en 2000 en faisait état), même s’il se plaint de ne pas avoir été suffisamment formé au travail spécifique qu’il exerçait pourtant depuis de nombreuses années et même plusieurs mois si on tient compte de son transfert fin 2010 du réseau souterrain (où les règles d’étayage des tranchées sont a priori les mêmes) au réseau aérien, dont il fait grand cas, alors qu’il était habilité à travailler sur les deux types de réseaux.

A cet égard, tous les arguments qu’il avance sur le fait qu’il n’aurait pas disposé du matériel d’étayage adéquat ce jour là, – lequel n’était cependant pas nécessaire puisqu’il n’était pas prévu qu’un travailleur descende dans la fouille, mais qu’il aurait du se procurer avant de le faire ou à défaut s’abstenir d’y descendre ou faire valoir son droit de retrait pour sa propre sécurité si comme allégué ce matériel n’existait pas -, ou plus généralement, que les chantiers étaient mal préparés ou encore les attestations qu’il produit d’anciens collègues sur l’absence de coordination, de formation, de personnel qualifié ou de matériel utile ne sauraient remettre en cause ni la réalité des faits du 7 mars 2012, ni excuser leur caractère sérieux.

En effet, dès lors qu’il est établi, au vu des éléments produits par l’employeur, que M. X, contrairement à ce qui était prévu, est entré dans la fouille de sa seule initiative pour y travailler sans prendre aucune précaution, il ne peut être retenu que c’est à tort que le représentant d’ERDF aurait constaté une infraction à l’article 66 du décret du 8 janvier 1965, celui-ci ayant parfaitement été en mesure d’apprécier le danger de la situation, confirmé indirectement par le chauffeur, M. A, qu’au surplus les deux autres salariés présents ont constaté que M. X est retourné dans la tranchée, malgré l’avertissement de M. C, le caractère réel des griefs énoncés par la lettre de licenciement ne prête pas à discussion.

Ces griefs sont en outre sérieux, du fait de la violation par M. X d’une règle élémentaire de sécurité, alors qu’il incombe, selon une jurisprudence constante, à tout salarié de veiller en fonction de ses connaissances et de son expérience, acquises en l’espèce par l’intimé en plus de vingt ans passés sur des chantiers de travaux publics, ainsi que de ses responsabilités, à la préservation de sa santé et de sa sécurité et celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail.

Il est précisé que ce caractère sérieux ne peut être excusé ni par l’allégation que M. A aurait été incompétent ou mal formé pour le travail avec le tractopelle, n’ayant pas détenu l’option « télécommande » avec son CACES (ce que contredit le document produit par l’employeur qui indique que le CACES obtenu par M. A permet la conduite d’engins télécommandés de la catégorie correspondante, soit la catégorie 1 concernant les mini-pelles de ' de 6T, mini-chargeurs, mini-compacteurs et mini-tracteurs de ' de 4,5 T ' or le rapport journalier établi par M. X à la date du 7 mars 2012 indique comme engin utilisé par le chauffeur une mini-pelle qu’il était donc apte à manoeuvrer, y compris en faisant usage de la télécommande), ni le fait que la société Thépault Réseaux n’aurait pas établi de plan de prévention, ce qu’elle conteste, expliquant n’avoir plus été en mesure de le transmettre lorsqu’il a été demandé, compte tenu de la longueur de la procédure, radiée à trois reprises ' étant relevé que si un tel plan est une obligation en matière de travaux publics, il a forcément du être exigé par le donneur d’ordre ERDF lors de la conclusion du marché.

Quelles qu’aient été les circonstances entourant le chantier, le salarié devait s’abstenir d’agir comme il l’a fait, soit entrer sans précaution dans une fouille pour un travail non demandé au risque d’un éboulement qui pouvait lui coûter la vie.

Le licenciement de M. X reposait donc sur une cause réelle et sérieuse.

Il ressort par ailleurs des pièces produites par l’employeur que M. X avait fait l’objet antérieurement aux faits litigieux de plusieurs avertissements, dont seul le dernier a été contesté par lui :

— le 14 février 2011, pour un accident du travail survenu à l’un de ses co équipiers, qui a provoqué un arc électrique et qui ne portait pas, ainsi qu’un autre salarié, sa visière de protection, cet avertissement lui ayant rappelé qu’en tant que chef d’équipe sa première obligation est de garantir la sécurité de ses équipes et donc de veiller au port des EPI,

— le 21 décembre 2011, pour les faits suivants : retard dans la remise des rapports journaliers, absence de compte rendu journalier à votre hiérarchie après votre journée de travail, dénigrement de la société auprès de nos clients URM, ERDF et CLEMESSY,

— le 23 décembre 2011, pour avoir accroché la nacelle qu’il conduisait sous un pont en revenant d’un chantier et ne pas l’avoir signalé à son supérieur hiérarchique lors de son retour à l’entreprise.

La Cour relève que le premier de ces avertissements, que la SAS Thépault Réseaux pouvait produire même s’il n’en est pas fait état dans la lettre de licenciement, portait déjà sur une infraction à une règle de sécurité que M. X se devait de faire respecter par les personnes placées sous sa responsabilité, à l’origine d’un accident du travail.

Compte tenu de cet antécédent sérieux et surtout du fait que M. X a délibérément enfreint le jour des faits litigieux une autre règle de sécurité et donc violé une obligation essentielle née de son contrat de travail, celle de veiller à sa propre sécurité, renforcée par sa qualité de chef d’équipe, et ceci à deux reprises, puisqu’il est retourné dans la fouille malgré l’avertissement du représentant d’ERDF, la Cour estime qu’il était justifié pour l’employeur de retenir la faute grave et donc de prononcer la rupture à effet immédiat du contrat de travail.

Le jugement entrepris, soit celui du 29 juin 2017, sera dès lors infirmé et M. X sera débouté de toutes ses demandes en rapport avec son licenciement, qui sera dit bien fondé.

Sur les heures supplémentaires

M. X réclamait initialement une somme de 13 202,76 euros bruts au titre des heures supplémentaires effectuées entre le 1er avril 2008 et le 16 avril 2012 et 1 302,27 euros bruts pour les congés payés afférents, un montant qu’il reprend dans son appel incident, produisant un tableau, qui indique semaine par semaine les heures accomplies et les heures supplémentaires à rémunérer : 141 heures supplémentaires à 125% en 2008, 185,5 en 2009, 102 en 2010, 170,5 en 2011 et 23,5 en 2012, ainsi que 9 heures supplémentaires à 150% en 2010 , 10 en 2011 et 126 en 2012 (mais le calcul pour 2012 paraît d’emblée erroné puisqu’il assimile toutes les heures réalisées à des heures supplémentaires et il ne peut être retenu en fait que 23,5 heures à 25%).

Il explique que lui-même et les autres salariés devaient se présenter entre 7h et 7h30 au siège de la société pour préparer le matériel et prendre possession des véhicules, mais que le travail n’était rémunéré qu’à compter de 7h30, 8 h chez Thépault Réseaux, et que de même le temps de retour des chantiers après 16h30 n’était plus décompté.

Il expose aussi qu’il remplissait rigoureusement des feuilles de pointage journalières pour lui et son

équipe afin que les heures supplémentaires soient rémunérées, qu’il est en mesure de produire celles de juillet à octobre 2010 et janvier 2011 à mars 2012, mais que l’employeur a ignoré ces documents, qu’il n’a pas bénéficié de repos compensateur de remplacement et qu’il conteste la modulation dont fait état l’appelante et la géolocalisation de la camionnette qui transportait les ouvriers, puisque lui et son frère E faisaient habituellement les trajets sur les engins de chantier.

La SAS Thépault Réseaux fait valoir en réplique que M. X omet de préciser qu’il a déjà été rémunéré de nombreuses heures supplémentaires qui apparaissent sur ses bulletins de salaire, que le travail de l’entreprise est organisé sur un cycle de deux semaines de respectivement 38 et 32 heures (le vendredi n’étant pas travaillé la deuxième semaine et décompté comme RTT), ne nécessitant ni accord collectif, ni accord individuel, ce qu’indiquent les fiches d’activité quotidiennes de M. X dont il fait une lecture totalement erronée, enfin que la géolocalisation de la camionnette du chantier souligne les incohérences des décomptes et démontre que ceux-ci incluaient le temps de trajet.

La Cour rappelle qu’il résulte de l’article L. 3171-4 du Code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties, que l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié et que le juge doit se déterminer au vu de ces éléments et de ceux produits par le salarié.

Le salarié étant en demande, il lui appartient néanmoins de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande, tant sur l’existence des heures dont il revendique le paiement que sur leur quantum, à charge pour l’employeur de les contester ensuite en produisant ses propres éléments.

Ces éléments doivent être suffisamment sérieux et précis quant aux heures effectivement réalisées pour permettre à l’employeur d’y répondre.

M. X produit en l’occurrence en premier lieu diverses attestations :

— une attestation de son frère, E X, monteur, qui explique que chez Thépault, il leur était demandé de commencer le travail à 7 heures au dépôt de l’entreprise à Jouy aux Arches pour préparer le matériel et prendre les véhicules pour se rendre sur les chantiers, mais que les heures n’étaient payées qu’à compter de 7h30 (8 heures à partir de la mutation chez Thépault Réseaux), qu’il y avait une pause repas de midi à 13 heures, puis le travail reprenait jusqu’à 16h30, où le retour au dépôt durait de 1 h à 1h30, non payées, avec parfois obligation de faire le plein et de décharger les véhicules ;

— une attestation de M. M G, monteur chauffeur, qui témoigne dans les mêmes termes sauf qu’il parle d’une fin de travail à 17 heures le soir et d’un travail déclaré à partir de 7h30 dans le service aérien et 8 h dans le service souterrain,

— une attestation de M. N F, monteur, en ces termes :

« En ce qui concernent les heures du matin, ils étaient présents dès 7 heures pour charger ou décharger le matériel. Mais, sur ce on m’a dit qu’ils sont payer qu’à partir de 7h30 »,

— une attestation de M. S O-P, monteur réseaux, qui témoigne que :

« Pour les heures effectuées nous commencions à 7h00 payé à partir de 8h30 à 12h00, reprise à 13h00 jusqu’à 17h00 et le retour n’était jamais payé. Les trajets duraient 1h00 aller et 1h00 retour).

L’attestation de M. F ne peut être retenue car il ne témoigne apparemment que par ouï-dire et la Cour constate des incohérences entre les autres témoins quant aux heures auxquelles l’employeur

aurait commencé à les payer selon le service (le frère de M. X parle de 8 h pour le réseau aérien correspondant à l’activité de la SAS Thépault Réseaux et M. G de 7h30 pour ce même réseau, M. O-P indique 8h30 sans autre précision), aux durées des trajets (une demie-heure ou une heure le matin et 1 à 1h30 le soir pour un même trajet') et à l’heure de fin de service ' 16h30 ou 17 h.

Par ailleurs, il est surtout question dans ces attestations d’heures de trajet non payées, à savoir que l’employeur aurait omis de prendre en compte le temps passé pour aller du dépôt au chantier et y revenir à la fin de la journée de travail.

Il doit être rappelé que l 'article L. 3121-4 du code du travail dispose à ce sujet que :

« Le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif.

Toutefois s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il fait l’objet d’une contrepartie, soit sous forme de repos, soit financière. Cette contrepartie est déterminée par convention ou accord collectif de travail ou, à défaut, par décision unilatérale de l’employeur après consultation du comité d’entreprise ou des délégués du personnel, s’il en existe. La part de ce temps de déplacement professionnel coïncidant avec l’horaire de travail n’entraîne aucune perte de salaire ».

Il ressort en l’occurrence des bulletins de salaire de M. X qu’il percevait, comme le stipule l’article 8.8.3 de la convention collective applicable, des indemnités de trajet en fonction de la zone du chantier, classée de 1 à 6, ces indemnités étant prévues au profit des ouvriers non sédentaires des entreprises de travaux publics, définis comme « ceux qui sont occupés sur les chantiers et non pas ceux qui travaillent dans une installation fixe permanente de l’entreprise », « pour les petits déplacements qu’ils effectuent quotidiennement pour se rendre sur le chantier avant le début de la journée de travail et pour en revenir à la fin de la journée de travail. ».

En l’occurrence, M. X n’était pas affecté de manière permanente au dépôt de l’entreprise, mais sur différents chantiers où il était sensé se trouver au début de sa journée de travail à 7h30 pour en revenir à la fin de sa journée de travail à 16 h 30 (cf son contrat de travail qui indique comme lieu d’affectation Jouy aux Arches et tous chantiers CEE selon affectations) et son temps de déplacement sur ces chantiers, indemnisé comme prévu par la convention collective (qui dispose aussi dans un article 3.2 que le temps de travail effectif exclut le temps d’habillage et de déshabillage, de casse-croûte et de trajet), n’était donc pas à décompter en heures supplémentaires.

A cet égard, l’interprétation faite par les premiers juges de la convention collective, lesquels ont estimé qu’il n’y avait pas lieu à compensation entre les heures supplémentaires réclamées et les indemnités de trajet versées au salarié (pour un total de 7 363,35 euros selon calcul de l’employeur) est erronée, car soit on indemnise le temps de déplacement sur le lieu de travail en tant que tel par application de l’article L. 3124-4 susvisé, car ce n’est pas du temps de travail effectif mais une sujétion devant donner lieu à compensation, soit on considère qu’il s’agit de temps effectif de travail et ce temps est alors payé en heures de travail, le cas échéant en heures supplémentaires s’il excède l’horaire normal de travail, mais les deux ne sont pas cumulables.

En l’occurrence, la jurisprudence estime que le temps de trajet entre l’entreprise et le chantier ne doit être considéré comme du temps de travail effectif que si le salarié est obligé de passer d’abord par le siège de l’entreprise avant de se rendre sur le chantier, or M. X ne justifie pas qu’il aurait été contraint systématiquement de se rendre d’abord au dépôt avant de se déplacer sur les chantiers, les témoins n’évoquant pas le cas personnel de l’intimé.

En tout état de cause, si on retenait que ce temps de trajet doit en l’espèce être considéré comme du

temps de travail effectif, il faudrait déduire de la demande de M. X ce montant de 7 363,35 euros payé en indemnités de trajet, plus le montant de 3 968,96 euros déjà payé au titre des heures supplémentaires au vu de ses bulletins de salaire, que le salarié a omis d’imputer à son décompte, plus les 126 heures à 150%, représentant une somme de 3 025,26 euros, retenues de manière erronée pour l’année 2012, soit un total de 14 357,57 euros supérieur à sa demande…

Il en résulte pour le moins que le salarié a été plus que largement rempli de ses droits et que sa demande ne peut dès lors prospérer, même à prendre en compte les autres éléments qu’il produit aux débats, à savoir les rapports journaliers qu’il remplissait et signait, sur lesquels il pointait les heures de présence de chacun des ouvriers du service et de lui-même, dont il faut d’emblée constater que, comme il le reconnaît lui même il n’a pas été en mesure de tous les produire pour la période considérée et a donc procédé par extrapolation pour ceux qui manquaient, soit sur une importante période allant du 1er avril 2008 au 30 juin 2010 et pour les mois de novembre et décembre 2010.

Si l’on tient compte de l’horaire indiqué par le salarié comme correspondant à des heures payées, en l’occurrence de 7h30 à 16h30, moins une heure de pause déjeuner, soit 8 heures par jour, force est de constater par sondage que ces documents, qui ne précisent pas l’heure de début ou de fin de service (de sorte qu’il ne peut être apprécié si effectivement la journée commençait à 7h30 pour finir à 16h30 et si oui ou non le temps de trajet était inclus), mais seulement un nombre global d’heures, ce qui est déjà imprécis en soi, ne mentionnent que quelquefois un horaire supérieur de 8h30 et très rarement de 9h ou 9h30, parfois aussi un horaire inférieur de 7 h ou 7h30.

Ces rapports confirment que très régulièrement les salariés bénéficiaient d’une journée de RTT, soit un vendredi tous les quinze jours ' M. X contestant en vain la répartition mise en place par l’employeur du travail sur deux semaines, comprenant une semaine de cinq jours et une de quatre, qui correspondait à l’horaire de travail habituel de l’entreprise et ne nécessitait ni accord collectif, ni accord individuel (cf. l’article R. 3122-7-1 du code du travail permettant l’aménagement de la durée du travail sous formes de périodes de quatre semaines au plus).

Toujours en procédant par sondage, la Cour relève que, pour le mois d’avril 2011, si l’on exclut le 1er qui était un vendredi, M. X a mentionné sur les rapports journaliers les horaires de travail suivants :

— pour la semaine 14 du 4 au 7 avril (RTT le vendredi 8) : 7,5 + 8 + 9 +8 = 32,5 h

— pour la semaine 15 du 11 au 15 avril : 8 + 8 + 8,5 + 8,5 + 8 = 41 h

— pour la semaine 16 du 18 au 21 avril (férié le 22) : 8,5+ 8,5 + 8 + 8 = 33 h

— pour la semaine 17 du 24 au 29 avril (avec une journée marquée fériée le lundi 25 et le dimanche 24 marqué travaillé pour une intervention urgente) : 9,5 + 8 + 8,5 + 8,5 + 8 = 42,5

En comparaison, il a bien indiqué 41 heures dans son décompte pour la semaine 15, mais 40 et 43 pour les semaines 16 et 17, ce qui ne correspond pas aux mentions des rapports.

Si l’on tient compte de l’organisation du travail par quinzaine, le salarié pouvait tout au plus, au lieu des 19 heures supplémentaires imputées à son décompte pour ce mois d’avril 2011, retenir 3,5 heures supplémentaires la première quinzaine (73,5 h au lieu de 70 sur une base de 35 heures), 5,5 pour la seconde (75,5 au lieu de 70, aucune si on exclut le travail exceptionnel de 9,5 heures du dimanche 24, qui ramène le total des heures à 67,5), soit un maximum de 9 heures supplémentaires sur le mois.

Le bulletin de salaire correspondant indique que M. X a perçu 10 heures supplémentaires à 200%, correspondant a priori aux heures travaillées le dimanche 24, de sorte qu’il a largement été rempli de ses droits.

L’appelante cite dans ses conclusions de nombreuses autres erreurs et incohérences du décompte du salarié, qui n’a notamment pas déduit à au moins 15 reprises les heures de RTT qui se sont donc transformées à tort en heures supplémentaires, ce que la Cour a aussi pu vérifier par sondage.

L’appelante ne contestant pas les heures mentionnées sur les rapports journaliers, à partir desquels elle établissait les bulletins de salaire de l’équipe encadrée par M. X, les sommes versées à ce dernier au titre des heures supplémentaires résultant de ces documents et mentionnées dans ses fiches de paie doivent être considérées comme celles qui étaient effectivement dues au salarié et non celles calculées par lui dans un décompte entaché de nombreuses erreurs ou extrapolé pour les périodes pour lesquelles il n’a pu produire de rapports, sans oublier la confusion entre temps de travail et temps de trajet déjà indemnisé et les témoignages imprécis des collègues de travail.

Dès lors, M. X, qui n’a jamais émis la moindre contestation sur sa rémunération en plus de douze années de relations contractuelles et qui est de mauvaise foi à remettre en cause des horaires de travail certifiés par lui pour toute l’équipe de travail, ne pouvant se prévaloir de sa propre turpitude s’il devait s’avérer que ces horaires n’étaient pas exacts, notamment pour avoir sciemment omis des heures de trajet qui auraient pu être considérées comme du temps de travail effectif, aucune consigne de l’entreprise en ce sens n’étant formellement justifiée, sera débouté de sa demande au titre des heures supplémentaires, après infirmation sur ce point du jugement entrepris, en l’espèce celui du 29 juin 2017.

Il est précisé que, si M. X évoque dans ses dernières conclusions le travail dissimulé, il n’a cependant formé aucune demande à ce titre dans le dispositif de ces mêmes conclusions, ni apparemment en première instance.

Sur le paiement des astreintes

M. X rappelle qu’il lui était imposé d’importantes périodes d’astreinte, que l’employeur rémunérait à hauteur de 75 euros pour la semaine et 75 euros pour le week-end, soit 150 euros par période de 8 jours, alors que son collègue, M. F témoigne qu’il était rémunéré pour ses astreintes 75 euros le samedi et 75 euros le dimanche, ce qui représente une rupture flagrante d’égalité.

Le salarié revendique la fixation d’une somme de 75 euros par jour au titre de l’astreinte, soit 32 850 euros bruts sur la période concernée d’avril 2008 à avril 2011, ou à défaut un tarif équivalent à celui dont bénéficie le personnel d’ERDF ou celui dont bénéficiait M. F, soit au moins 225 euros par période, relevant aussi qu’en tout état de cause il n’a pas été payé de l’intégralité de ses périodes d’astreinte.

La SAS Thépault Réseaux invoque la prescription d’une partie de la demande, le salarié n’ayant formé celle-ci pour la première fois que dans des conclusions du 25 septembre 2013 postérieures à l’entrée en vigueur de la loi du 14 juin 2013, qui a réduit la prescription en matière de salaire à trois ans, estimant donc que la demande ne peut porter que sur la période du 25 septembre 2010 au 31 mars 2011 où, si on retenait néanmoins la prescription quinquennale, du 25 septembre 2008 à mars 2011.

L’appelante explique que trois personnes étaient d’astreinte de semaine, par roulement de huit heures, et que cette astreinte n’était contraignante que de nuit, d’où le tarif retenu pour la semaine, que M. F n’était lui d’astreinte que de week-end, étant durant la semaine en grand déplacement, ce qui justifie la différence de traitement.

En ce qui concerne la prescription, il est constant que M. X a introduit sa demande devant le conseil de prud’hommes le 10 avril 2013, soit avant l’entrée en vigueur de la loi du 14 juin 2013, qui a réduit le délai de prescription de l’article L. 3245-1 du code du travail concernant l’action en

paiement ou en répétition du salaire de 5 à 3 ans, de sorte que son action reste en entier soumise à l’ancienne prescription quinquennale aux termes des dispositions transitoires (article 21) de cette loi.

Par ailleurs, le conseil de prud’hommes a justement rappelé que la prescription avait été interrompue par la saisine du conseil de prud’hommes, de sorte

que les prétentions nouvelles ajoutées à la demande d’origine mais relatives à l’exécution du même contrat de travail sont atteintes par cet effet interruptif.

La demande de M. X est donc recevable pour les cinq années précédant son introduction, soit la période du 10 avril 2008 au 10 avril 2013.

S’agissant du montant de l’indemnisation des astreintes, les premiers juges ont rappelé qu’en vertu de l’article L. 3121-7 du code du travail c’est à l’employeur, à défaut d’accord collectif, de fixer les compensations financières ou en repos auxquelles peuvent donner lieu les astreintes, après consultation des institutions représentatives du personnel ou information de l’Inspecteur du travail.

Le juge n’a pas, comme le demande M. X, le pouvoir de se substituer au pouvoir de direction de l’employeur pour l’appréciation du montant de ces compensations, sauf à faire respecter le principe de non-discrimination, qui s’applique comme principe général du droit en matière de rémunérations.

L’article L. 3221-2 du Code du travail dispose en l’occurrence que «tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes ».

Cette disposition se fonde sur le principe « à travail égal, salaire égal » qui a vocation à s’appliquer à l’ensemble des salariés d’une même entreprise, quel que soit leur sexe, et qui repose lui-même sur le principe général de non discrimination édicté par l’article L. 1132-1 du même code.

L’article L. 3221-4 du Code du travail fixe, pour évaluer la discrimination, le principe que «sont considérés comme ayant une valeur égale les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l’expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse ».

En l’espèce, il n’est pas discuté par l’employeur, comme en attestent les bulletins de salaire produits aux débats, le calendrier des astreintes au sein de la société et l’attestation de M. F, que ce dernier, qui a participé au vu du calendrier aux astreintes, avec d’autres salariés, entre février 2010 et avril 2011, percevait une somme de 150 euros pour les astreintes uniquement de week-end, soit 75 euros le samedi et 75 euros le dimanche, car le reste de la semaine il était en grand déplacement et n’était donc disponible que pour ces astreintes de fin de semaine.

L’explication que donne l’employeur pour justifier la différence avec les autres salariés qui ne percevaient que 75 euros pour l’entier week end ne repose sur aucun élément objectif, car ce n’est pas parce que M. F était en grand déplacement la semaine ' tandis que M. X travaillait en petits déplacements et était souvent en outre d’astreinte de semaine, les équipes d’astreinte n’étant apparemment qu’au nombre de deux, se relayant donc d’une semaine sur l’autre, soit pouvait être dérangé la nuit à son domicile, dont il ne pouvait guère s’éloigner, – qu’il était forcément plus pénible pour lui d’être d’astreinte de week end, ce qui supposait de manière égale pour les deux salariés qu’ils devaient rester joignables et ne pas s’éloigner sensiblement de la zone géographique où leur intervention pouvait être requise, s’agissant de remédier dans l’urgence à tout incident réseau..

La sujétion étant la même au point de vue charge physique et nerveuse, la différence de traitement

était donc discriminatoire.

Dès lors, M. X est bien fondé à demander une somme supplémentaire de 75 euros pour les astreintes qu’il a effectuées le week-end, du moins à partir du moment où est née la discrimination avec M. F en février 2010, et éventuellement le paiement des astreintes dont il indique qu’elles ne lui auraient pas été réglées – le calendrier des astreintes fait en effet état de généralement deux astreintes par mois du jeudi 17h40 au jeudi suivant 17h40, soit deux astreintes de semaine et deux de week-end, alors que les bulletins de salaire ne mentionnent pour la plupart que le paiement d’un montant de 150 euros, correspondant à une seule astreinte de semaine et de week end.

Il est donc du au salarié une somme de 4 050 euros pour les astreintes non payées (52 selon le décompte du salarié pour 37 seulement reconnues par l’employeur, mais le décompte de M. X est conforme aux calendriers et bulletins de salaire produits par lui), à laquelle il convient d’ajouter 75 euros par astreinte de week-end entre février et mars 2011, soit 29 week-ends et donc un montant du de 2 175 euros, ce qui fait un total restant du au titre des astreintes de 6 225 euros bruts.

Le jugement entrepris, soit celui du 22 novembre 2018, sera amendé pour retenir ce montant.

Sur le surplus

La délivrance de documents rectifiés sera limitée à l’établissement d’un bulletin de salaire reprenant le montant accordé au titre des astreintes.

Chaque partie succombant à son tour, l’équité commande de procéder au partage des dépens des deux instances et de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Dit n’y avoir lieu d’écarter des débats la pièce n°10 produite par la SAS Thépault Réseaux, devenue SAS SPIE Citynetworks ;

Infirme le jugement mixte du 29 juin 2017 (dossier RG 2145/17) en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de M. H X pour faute grave était bien fondé ;

Déboute M. H X de l’ensemble de ses prétentions au titre de ce licenciement, de sa demande au titre des heures supplémentaires et des congés payés afférents et de sa demande de production de documents rectifiés dans ce cadre ;

Confirme le jugement du 22 novembre 2018 pour avoir fait droit à la demande de M. H X au titre des astreintes, mais en portant le montant accordé à ce titre à la somme de 6 225 euros bruts, avec les intérêts au taux légal à compter de la demande ;

Dit que la SAS SPIE Citynetworks devra délivrer à M. H X un bulletin de salaire complémentaire reprenant cette créance salariale ;

Dit que chaque partie supportera ses propres dépens de première instance et d’appel ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente

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Cour d'appel de Metz, Chambre sociale-section 1, 20 avril 2021, n° 17/02145