Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 5 juillet 2018, n° 16/05225

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Chronologie de l’affaire

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Simon François-luc · Lettre des Réseaux · 17 décembre 2021

Cass. com., 2 octobre 2019, n°18-15.676, Publié au Bulletin Est nulle la clause de non-concurrence post-contractuelle qui n'est pas limitée dans l'espace, celle limitée à un territoire imprécis, comme celle dont la limitation territoriale apparaît excessive. Il en va de même de la clause érigeant une interdiction dans un rayon de cinquante kilomètres autour du point de vente et de tout fonds de commerce exploité par le créancier de l'obligation, une telle interdiction conduisant au cas présent, compte tenu du maillage de l'enseigne, à une impossibilité de fait de toute réinstallation du …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 5, 5 juill. 2018, n° 16/05225
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 16/05225
Décision précédente : Tribunal de commerce d'Évry, 12 janvier 2016, N° 2014F00694
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRÊT DU 05 JUILLET 2018

(n° , 12 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/05225 ( jonction avec le dossier n°16/15878)

Décision déférée à la cour : jugement du 13 janvier 2016 -tribunal de commerce d’EVRY (RG n° 2014F00694) – jugement du 18 mai 2016 – tribunal de commerce d’EVRY (RG n°2014F00694)

APPELANTE

Madame A X

[…]

[…]

née le […] à […]

Représentée par Maître Bruno REGNIER de la SCP REGNIER – BEQUET – MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

Ayant pour avocat plaidant Maître Nicolas AUCLAIR, avocat au barreau de PARIS, toque : C1175

INTIMÉE

SA Z

Ayant son siège social […]

91700 SAINTE-GENEVIÈVE-DES-BOIS

N° SIRET : 510 302 953

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Jean-Jacques FANET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0675

Ayant pour avocat plaidant Maître Jean-Claude BOUHENIC, avocat au barreau de PARIS, toque : A0861

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 17 Mai 2018, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur K L, Président de chambre

Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère

Madame Anne DU BESSET, Conseillère chargée du rapport

qui en ont délibéré,

Greffière, lors des débats : Madame C D

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par K L, Président de chambre et par C D, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

De 1971 à 2009, M. E F a exercé, en son nom propre et sous l’enseigne Z, l’activité de courtier en prêts immobiliers ; son activité consistait dans le montage de dossiers de demande de prêts immobiliers de ses clients, aux fins d’être présentés en vue de l’obtention de prêts aux organismes prêteurs avec lesquels il nouait un partenariat.

Par acte du 5 juin 2009, M. E F a fait apport de son fonds de commerce à la société Z, constituée la même année par lui-même, ayant pour activité le courtage en opérations de banque et en services de paiement, en assurance-crédit, en produits d’assurance et en produits financiers et toutes autres activités accessoires.

En parallèle, avait été créée en 1993 la société Vitae Assurances, ayant pour activité le courtage en produits d’assurance et pour gérant le frère de M. E F, M. G F, puis à compter de 2012, M. E F. Cette société Vitae Assurances a établi un partenariat informel avec M. E F puis, à partir de 2009, avec la société Z, afin de bénéficier du réseau d’agents commerciaux de ces derniers.

Par contrat du 11 avril 2011, Mme A H épouse X (ci-après Mme X) qui exerce en son nom personnel l’activité d’agent commercial, s’est vue confier un mandat d’agent commercial en financement par la société Z, prévoyant un barème des rémunérations.

Mme X a exercé sur le secteur de Serris (77) et ponctuellement, en octobre 2013, sur celui de Meaux (77).

Par la suite, Mme X a signé deux autres contrats avec la société Z :

— le 1er juillet 2011, en tant que «mandataire d’intermédiaire d’assurance à titre accessoire» (MIA),

— le 15 janvier 2013, en tant que «mandataire d’intermédiaire en opérations de banque» (MIOB), se substituant à son contrat initial d’agent commercial, le tableau de calcul des rémunérations afférent étant signé le 10 mars 2013.

Par courrier RAR du 12 décembre 2013, la société Z a demandé à Mme X des explications

sur une possible tentative de détournement de clientèle de sa part, faisant valoir que Z avait été contactée par les consorts Y-J qui lui avaient fait part de difficultés dans le suivi de leur dossier par Mme X, alors que ce dossier n’apparaissait pas sur le logiciel Provisio recensant les mandats, et qu’il semblerait que Mme X ait informé Mme Y de son intention de quitter Z et lui ait donc dit de la contacter sur son téléphone portable.

Par courrier en réponse du 14 décembre 2013, Mme X a contesté de façon circonstanciée les griefs opposés et a fait part, à son tour, à la société Z des difficultés et des tensions qu’elle avait rencontré dans l’exercice de sa mission et des brimades qu’elle avait subi, particulièrement depuis le mois d’août 2013.

Par courrier RAR de son conseil du 21 février 2014, Mme X a notifié à la société Z qu’elle était contrainte de constater la rupture immédiate de son contrat aux torts de Z, en raison de ses différents manquements, et sollicité une indemnisation de son préjudice.

Selon courrier de son conseil du 5 mars 2014, la société Z a indiqué à Mme X qu’elle contestait les manquements reprochés et qu’elle n’était redevable d’aucune somme envers elle.

Considérant avoir indûment privée d’une partie de sa rémunération et que la rupture était imputable à la société Z, Mme X a, par acte du 16 septembre 2014, assigné la société Z en paiement et indemnisation.

Par jugement rendu le 13 janvier 2016, le tribunal de commerce d’Évry a :

— condamné la société Z à payer à Mme X le montant des commissions restant dues,

— sursis à statuer sur ledit montant et ordonné la réouverture des débats à l’audience du 30 mars 2016, sur la seule détermination du montant de commissions restant dues,

— condamné Mme X à payer à la société Z les sommes de :

* 7.374 euros, pour rupture anticipée de son contrat,

* 20.000 euros, pour violation de la clause de non-concurrence,

— débouté les parties de leurs autres demandes,

— dit n’y avoir lieu, à ce stade, à faire application de l’article 700 du code de procédure civile et ordonner l’exécution provisoire ;

— réservé les dépens.

Par jugement du 18 mai 2016, le tribunal de commerce d’Évry a :

— débouté Mme X de sa demande de rejet des conclusions et pièces produites par la société Z à l’audience du 30 mars 2016,

— condamné la société Z à payer à Mme X les sommes de :

* 762,20 euros au titre des commissions MIOB restant dues,

* 1.206,22 euros, en deniers ou quittances valables, au titre des commissions MIA restant dues,

— dit que les sommes ci-dessus porteraient intérêt au taux légal à compter du 24 février 2014 et

ordonné la capitalisation des intérêts conformément à l’article 1154 du code civil,

— rappelé les condamnations de Mme X au titre de la rupture anticipée de son contrat et de la violation de la clause de non-concurrence,

— condamné Mme X à payer à la société Z la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté les parties de leurs autres demandes,

— dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire,

— condamné la société Z et Mme X à conserver la charge de leurs propres dépens.

Vu les appels interjetés les 26 février et 20 juillet 2016 par Mme X à l’encontre de ces décisions et la jonction ordonnée ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 20 avril 2018 par Mme X, par lesquelles il est demandé à la cour de :

Vu les articles 1134, 2224 du code civil et les articles L.134-1 et suivants du code de commerce,

— infirmer la décision du tribunal de commerce d’Évry en date du 13 janvier 2016, et par voie de conséquence la décision du 18 mai 2016, sauf en ce qu’elles ont retenu dans le principe qu’un solde de commissions doit être versé à Mme X ;

— dire non fondé l’appel incident de la Z et l’en débouter,

— rejeter les demandes reconventionnelles de la Z,

En conséquence,

' Sur les demandes de Mme X,

Vu les articles 1134 du code civil et les articles L.134-1 et suivants du code de commerce et 1147 du code civil,

' Sur les manquements de la Z au titre de la cagnotte et de « l’amie » :

— constater le prélèvement par la Z d’une cagnotte d’un montant total de 5.350 euros au titre de la cagnotte et de 1715euros au titre de l’amie sur les commissions de Mme A X ;

— constater que la Z n’a jamais procédé à une régularisation en fin d’année du budget non utilisé comme cela est contractuellement prévu ;

En conséquence,

— condamner la Z à payer à Mme A X à titre de dommage et intérêts la somme de 3.420,49 euros en principal majorée des intérêts légaux à compter de la mise en demeure en date du 24 février 2014 et la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil ;

' Sur les manquements graves de la Z dans l’exécution du contrat d’agent commercial :

' Sur la rémunération incorrecte de la vente de produits d’assurance :

— constater la rémunération par la Z de Mme A X pour entremise dans la conclusion de contrats d’assurance ;

— constater que cette rémunération avait lieu par chèques cadeaux ou prime évaluée sur la seule première année d’existence du contrat ; alors qu’en pratique la rémunération a lieu sur toute la vie du contrat ;

— juger que les sommes restant dues à titre de commissions pour l’ensemble des contrats souscrits s’élèvent à 146.030,35 euros ;

En conséquence,

— condamner la Z à payer à Mme A X à titre de dommage et intérêts la somme de 146.030,35 euros en principal majorée des intérêts légaux à compter de la mise en demeure en date du 24 février 2014 et la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil;

Subsidiairement en cas de contestation de ce montant par la Z,

— enjoindre à la Z de produire tout document utile et plus particulièrement tout document comptable de nature à fixer le montant des commissions dues pour tous les contrats Vitae conclus par Mme A X pour la période correspondant à la durée de son contrat d’agent commercial, ainsi que tous les documents de nature à rendre compte de leur exécution jusqu’à la date de la signification de la présente assignation ; et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;

' Sur la modification déloyale des contrats par la Z au moment du changement de statut des IOBSPÀ titre principal :

— juger dolosive la modification des contrats réalisée par la Z au moment du changement de statut des IOBPS ;

En conséquence,

— constater que le vice du consentement invoqué a pour effet d’engendrer la nullité du contrat MIOB en date du 15 janvier 2013 et de toutes ses dispositions ;

— juger constitutif d’une faute grave cette modification imposée du contrat d’agent commercial ;

Subsidiairement,

— juger que Mme X a subi un préjudice en raison de cette modification déloyale de son contrat par la Z,

En conséquence,

— juger que le préjudice qui en résulte consiste en la rédaction de nouvelles clauses de concurrence et de résiliation aux dépens de Mme X,

— juger ces clauses non opposables à Mme X,

' Autres agissements déloyaux de la Z lors de l’exécution du contrat de Mme X :

— constater les comportements déloyaux de la Z lorsqu’elle a tenté d’imposer à Mme A X un changement d’agence de Serris vers Meaux,

— juger que ce comportement a causé un préjudice à Mme X,

— fixer le préjudice en résultant à la somme de 5.000 euros ;

En conséquence,

— condamner la Z à reverser à Mme A X la somme de 5.000 euros à titre de dommage et intérêts ;

' Effets des graves manquements de la Z : l’indemnité due à Mme X par la Z pour rupture fautive de son contrat aux torts de la Z,

— constater les fautes graves commises par la Z à l’encontre de Mme X dans l’exécution du contrat d’agent commercial ;

En conséquence,

— dire que la rupture du contrat est imputable à la Z,

— fixer le préjudice en résultant pour Mme A X à une année de commissions soit 131.433,72 euros ;

— condamner la Z à payer à Mme A X la somme de 131.433,72 euros en principal ;

' Solde des commissions, primes et versement assurances restant du par la Z à Mme X pour les contrats qu’elle a initiés avant son départ :

— constater que la Z reste devoir à Mme A X la somme de 4.036,54 euros au titre des commissions et primes qu’elle a initiées avant son départ ;

En conséquence,

— condamner la Z à payer à Mme A X la somme de 4.036,54 euros en principal majorée des intérêts légaux à compter de la mise en demeure en date du 24 février 2014 et la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil ;

' Le caractère infondé des demandes reconventionnelles de la Z :

— rejeter car non fondées les demandes d’indemnisation de la Z,

' Autres demandes :

— condamner la société Z à payer à Mme A X la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société Z aux entiers dépens dont le recouvrement sera poursuivi par la SCP Regnier Bequet Moisan conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions signifiées le 10 avril 2018 par la société Z, par lesquelles il est demandé à la cour de :

À titre principal,

Vu les dispositions du contrat d’agent commercial,

Vu les dispositions du contrat de MIOB,

Vu les dispositions du contrat de MIA,

Vu les dispositions de l’article 1134 du code civil,

Vu les dispositions de l’article 1186 du code civil,

Vu les dispositions de l’article 2007 du code civil,

Vu les pièces versées aux débats ;

— confirmer le jugement rendu le 13 janvier 2016 par le Tribunal de commerce d’Évry en ce qu’il a débouté Mme X de l’intégralité de ses demandes financières hormis un solde de commissions sollicitées,

— confirmer le jugement rendu le 13 janvier 2016 par le Tribunal de commerce d’Évry en ce qu’il a :

' dit et jugé que la rupture de des relations contractuelles était imputable à Mme X,

' constaté que Mme X a rompu de façon brusque les relations contractuelles,

' constaté que Mme X a violé l’obligation de non-concurrence qu’elle a souscrite,

Ce faisant,

— débouter Mme X de son appel, de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

— condamner Mme X à verser à la société Z, en réparation du préjudice qu’elle a subi du fait de la rupture brutale et anticipée du contrat, et générant un manque à gagner pour l’avenir, la somme de 73.746 euros (7.374,66 euros x 10 mois), se rapportant aux 10 mois de commissions qu’elle aurait pu percevoir sur la production de Mme X, si cette dernière avait poursuivi son mandat de représentation jusqu’à son terme ;

— prendre acte de la violation manifeste par Mme X de ses engagements contractuels envers la société Z, après la période contractuelle, tels que stipulés à l’article 5.3 du contrat MIOB conclu le 15 janvier 2013 ;

— condamner Mme X à payer à la société Z de la somme de 98.250 euros au titre de la violation de la clause de non concurrence en application de l’article 5.3 alinéa 3 du contrat conclu le 15 janvier 2013;

À titre subsidiaire,

Vu les dispositions du contrat de MIOB ;

— fixer l’indemnité de rupture à 5% de la moyenne annuelle des commissions versées au mandataire durant les 2 dernières années d’exécution complètes, en rémunération de son activité de MIOB, soit 2.973,50 euros pour le cas où la cour reconnaîtrait Mme X bien fondée à réclamer une indemnité de rupture ;

— fixer le montant au titre de la cagnotte et budget « AMIE» à la somme de 2.402,10 euros ;

— fixer le montant réclamé au titre des récurrents à 11.896,75 euros pour le cas où la cour reconnaîtrait Mme X bien fondée à réclamer des primes récurrentes sur la durée de vie des contrats d’assurances placés,

En toutes hypothèses,

— débouter Mme X du surplus de ses demandes,

— condamner Mme X à payer à la société Z la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner Mme X aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 3 mai 2018.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et des prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

***

MOTIFS :

1°/ – Sur les demandes de Mme X :

Sur la cagnotte et le budget AMIE :

Le jugement entrepris sera confirmé par motifs adoptés en ce qu’il a avec raison débouté Mme X de sa demande de remboursement des retenues effectuées au titre du budget 'Action Marketing Investissements et Equipements’ (AMIE), la participation à ce budget étant expressément prévue et rendue obligatoire dans la grille de rémunération signée par celle-ci le 10 mars 2013 en complément de son contrat du 15 janvier 2013 de 'mandataire d’intermédiaire en opérations de banque’ (MIOB).

Concernant la cagnotte appliquée jusqu’au 15 janvier 2013, date d’entrée en vigueur du contrat MIOB, s’il est constant que ce prélèvement n’était pas expressément prévu dans le contrat d’agent commercial et la grille de rémunération annexée, il apparaît pour autant avoir été implicitement convenu au titre partiel de la 'ristourne' ou des 'sorties' prévue dans la dite grille – la ristourne désignant de façon impropre les sommes venant rémunérer des apporteurs d’affaires ou des actions et, ainsi, en déduction de l’assiette de calcul de la rémunération des agents commerciaux – et accepté par Mme X, ainsi qu’il résulte de la pratique d’alors non contestée des parties, aucune observation ou réclamation n’ayant jamais été formulée par Mme X à ce propos (ni sur le principe, ni sur le quantum) durant l’exécution du contrat, pratique dont l’existence est d’ailleurs corroborée par sa contractualisation sous la dénomination 'budget AMIE’ dans le contrat MIOB du 15 janvier 2013. En particulier, dans son courrier du 14 décembre 2013, Mme X n’émet aucun grief au sujet de la cagnotte.

Au surplus, le consentement exprès de Mme X à ce prélèvement résulte de sa signature, à une date certes non précisée, d’un tableau de calcul des rémunérations de 2010 détaillant notamment les règles d’imputation des actions sur le budget AMIE et précisant sans ambiguïté possible : 'Il est entendu que chaque euro mis dans ce budget vient en diminution de la base de calcul' (pièce n°39 de Z).

Cette pratique convenue d’abondement de la cagnotte, consistant à faire participer par provision les agent commerciaux aux actions commerciales, marketing et publicitaires nationales ou locales leur bénéficiant, ressort en outre de la documentation commerciale de 2006 de Z détaillant de façon précise le mode de calcul des ristournes, en ce compris les cagnottes, des fiches préparatoires de base de calcul de ses commissions établies par Mme X qu’elle adressait au secrétariat de Z et des fiches de pré-paiement le cas échéant signées par Mme X distinguant clairement dans les deux cas le montant de la ristourne et celui, inclus, de l’AMIE ('ristourne : … euros dont AMIE : … euros'), ou encore de la présentation du directeur marketing Z aux directeurs de région.

Il est ainsi établi par ces éléments de la parfaite connaissance et de l’acceptation par Mme X des déductions contractuelles opérées sur sa base de commissionnement, dont il apparaît en outre qu’elle en fixait librement le montant. Il n’y a donc pas lieu d’en ordonner la réintégration dans les bases de calcul des commissions.

Les jugements querellés seront en conséquence confirmés en ce qu’ils ont débouté l’appelante de sa demande de paiement au titre de la cagnotte.

Sur les commissions récurrentes relatives aux contrats d’assurance :

Mme X ne présente en appel aucun moyen nouveau de droit ou de fait qui justifie de remettre en cause le jugement attaqué, en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de paiement de commissions récurrentes relatives aux contrats d’assurance.

En effet, pour la période courant jusqu’au 1er juillet 2011, Mme X ne justifie d’aucune stipulation contractuelle, d’aucune pratique ou d’aucun usage faisant obligation à Z, partenaire de la société distincte de courtage en assurance Vitae Assurances, de lui verser des commissions récurrentes au titre de la durée des contrats d’assurance adossés aux prêts immobiliers qui auraient été souscrits par son intermédiaire.

De même, il apparaît qu’à compter du 1er juillet 2011, date à partir de laquelle la situation des parties s’est trouvée régie par le contrat de mandataire d’intermédiaire d’assurance (MIA), signé à cette date entre Mme X et Z, aucune commission de récurrence n’était non plus due.

En effet, l’article 3 de ce contrat stipule que la rémunération du mandataire (Mme X) est constituée d’une rétrocession des commissions encaissées par le mandant (Z) sur les primes réglées pour les polices souscrites par l’entremise du mandataire, et que les modalités de rémunération dépendent de chaque partenaire assurance et figurent sur les fiches techniques mises à la disposition du mandataire.

Or, contrairement à ce que soutient Z, selon ces fiches techniques (pièce n°21 de Z), la limitation des commissions à la première année d’existence du contrat d’assurance n’est prévue que dans certains cas, à savoir par exemple pour AIG Jeune Emprunteur, mais non pour Cardif.

Pour autant, Z démontre, d’une part, être intervenue comme partenaire de Vitae Assurances, société appartenant au même groupe informel Z qu’elle, seule interlocutrice et partenaire des compagnies d’assurance, fonctionnant ainsi selon la formule du professeur Bigot 'comme un courtier grossiste', et, d’autre part, ne jamais avoir perçu de commissions de récurrence de Vitae Assurances au moyen d’une attestation non démentie de l’expert comptable de celle-ci, de sorte qu’elle ne peut être tenue de rétrocéder des commissions qu’elle n’a elle-même pas perçues, cette pratique étant d’ailleurs conforme à l’esprit et à la lettre du contrat MIA (article 1) de Mme X excluant expressément de sa mission la gestion du contrat d’assurance, son rôle se limitant en définitive à celui d’apporteur d’affaires accessoirement à son activité de MIOB.

Il n’est par ailleurs pas justifié par l’appelante que Vitae Assurances, qui employait quatorze salariés

en 2014 et a été rachetée en 2016 par le groupe Axelliance, serait une 'coquille vide', ou encore d’un usage généralisé d’octroi des récurrents aux mandataires d’intermédiaire d’assurance à titre accessoire, tel étant le statut de Mme X.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point, par motifs adoptés.

Sur le dol :

Le jugement sera également confirmé, par motifs que la cour fait siens, en ce qu’il a débouté Mme X de ses demandes indemnitaires à raison des modifications dolosives du contrat d’agent commercial et de voir juger le contrat MIOB nul en toutes ses stipulations, faute de justifier des agissements dolosifs allégués de Capfi, qui ne reposent sur aucun élément du dossier et ne sauraient en particulier résulter du seul courrier-type de celle-ci indiquant 'Bien évidemment, cet avenant n’implique aucun changement dans votre activité avec la Z', insuffisant à cet égard, compte tenu de son caractère non daté et général, ainsi que de la qualité d’agent commercial dans une matière financière de Mme X faisant d’elle une professionnelle avertie, nécessairement à même de comprendre et d’apprécier la portée de ce courrier, ainsi que les différences entre l’ancien contrat (d’agent commercial) et le nouveau contrat (MIOB), ce qui est confirmé par les termes de son courrier du 14 décembre 2013 qui attestent de sa capacité d’analyse et de la structuration de son raisonnement.

Sur les autres agissements déloyaux de Z :

Mme X reproche à Z d’avoir eu un comportement déloyal à son égard, en ce que le poste d’agent senior – poste dont la réalité est attestée par le dossier – de l’agence de Meaux pour lequel elle a postulé et quitté l’agence de Serris, était déjà occupé, ainsi qu’elle l’aurait constaté sur place en octobre 2013, en ce que elle n’aurait pu reprendre son bureau à l’agence de Serris, occupé par un autre mandataire qui en gardait la clé, et, en ce que Z aurait pris le prétexte fallacieux d’une tentative de détournement de clientèle pour essayer de l’évincer.

Or, il ressort des pièces et il n’est pas contesté que Mme X intervenait sur le secteur de Serris jusqu’à fin septembre 2013, qu’en octobre 2013, elle a exercé sur le secteur de Meaux, et que postérieurement, elle est retournée à Serris. Par ailleurs, il ressort du courriel de plainte du 8 décembre 2013 de Mme I Y à Z, que cette cliente a rencontré de réelles difficultés dans le suivi de sa demande de prêt qu’elle avait confié à Mme X et que celle-ci lui a fait comprendre qu’elle allait travailler pour un concurrent, de sorte que la demande d’explications à ce propos adressée par Z à Mme X dans son courrier du 12 décembre 2013, ne peut être considérée comme illégitime, nonobstant les explications circonstanciées fournies à ce sujet par Mme X dans son courrier du 14 décembre 2013 qui permettent de relativiser ces difficultés.

Pour autant, les allégations très détaillées et circonstanciées (notamment dans le temps) de Mme X dans ce courrier quant à sa promotion manquée à Meaux et à son retour dans des conditions vexatoires à Serris, doivent être accréditées, même si elles n’exclut pas une certaine incompatibilité de caractère entre les personnes qui y sont évoquées, en ce qu’elles sont confirmées par la durée éphémère (pour le seul mois d’octobre 2013) du passage à Meaux de Mme X et par le fait que Z demeure mutique sur les problèmes de personnes et de management qui y sont évoqués – qu’elle n’explique donc pas utilement – et au surplus ne conteste pas sur le plan matériel que Mme X n’a pu retrouver son bureau à Serris, faisant valoir que cela ne l’empêchait pas d’exercer son mandat et que la mise à disposition d’un bureau n’était pas prévue au contrat, ce qui n’est pas le sujet.

Enfin, il est avéré que dès le 6 mai 2014, Mme X a travaillé pour un concurrent de Z, Home Finance exerçant sous l’enseigne Meilleurtaux.com, ce qui vient corroborer le témoignage de Mme Y.

Par suite, il apparaît que la rupture, effective au 21 février 2014, est intervenue aux torts partagés des parties, Z et Mme X s’étant toutes deux montrées dans une certaine mesure déloyales l’une envers l’autre et le comportement de l’une ne pouvant justifier celui de l’autre. Par suite, Mme X sera déboutée de sa demande de dommages intérêts au titre du comportement fautif adverse, faute en toutes hypothèses de justifier d’un préjudice consécutif.

Sur l’indemnité de rupture :

Vu l’article L. 134-12 du code de commerce ;

Mme X a été à juste titre déboutée par les premiers juges de sa demande d’indemnité de rupture (égale à un an de commissions) prévue à l’article L. 134-12 du code de commerce, son contrat de MIOB, profession réglementée par le décret n°2012-101 du 26 janvier 2012, excluant qu’elle bénéficie du statut d’agent commercial. Le jugement est donc confirmé sur ce point par motifs propres.

Sur les commissions, primes et sommes restant dues :

Vu l’article 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016 applicable au litige ;

Z ne présente en appel aucun élément de fait ou de droit justifiant de remettre en cause le jugement dont appel en ce qu’il l’a condamnée à payer à Mme X les sommes de 762,20 euros au titre des commissions MIOB restant dues, et de 1.206,22 euros, en deniers ou quittances valables, au titre des commissions MIA restant dues. Mme X n’établit pas davantage le caractère inexact des comptes précis effectués par le tribunal de commerce qui sera confirmé à cet égard.

2°/ – Sur les demandes reconventionnelles de Z :

Sur la rupture brutale du contrat :

L’article 6 du contrat MIOB stipule que le contrat prend effet le même jour et est conclu pour une durée d’un an, renouvelable par tacite reconduction sauf dénonciation par l’une des parties un mois avant l’arrivée du terme par lettre recommandée avec avis de réception.

Z demande la somme de 73.746 euros au titre de la rupture prétendument 'brutale', ou plus exactement anticipée, du contrat MIOB, faute pour Mme X d’avoir respecté le délai de préavis ainsi stipulé, au regard du terme du contrat renouvelé fixé au 14 janvier 2015.

Or, ainsi que cela a été démontré, il s’avère que la rupture, notifiée par Mme X le 21 février 2014, est intervenue aux torts partagés ; en outre, il apparaît que Z, postérieurement, n’a à aucun moment, et notamment pas dans son courrier du 5 mars 2014, réclamé l’exécution d’un préavis par Mme X et ainsi l’exécution du contrat jusqu’à son terme renouvelé ; il s’en évince que c’est d’un commun accord que les parties ont renoncé à ce que Mme X exécute son préavis et exerce sa mission jusqu’au terme du contrat.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu’il a fait droit à la demande indemnitaire de Z sur ce point.

Sur l’obligation de non concurrence :

Mme X excipe à bon droit de la nullité de la clause de non concurrence post contractuelle stipulée à l’article 5.3 alinéa 2 de son contrat MIOB, qui s’est expressément substitué à son contrat d’agent commercial. En effet, il est soutenu avec raison que cette clause est illicite en ce que sa

limitation non pas tant dans l’espace (le secteur de 80 km autour de l’agence de Serris étant raisonnable), mais dans le temps (à savoir, 2 ans), apparaît disproportionnée et excessivement longue au regard des intérêts à protéger de son bénéficiaire, Z, au vu des éléments du dossier, celle-ci se disant notamment 'n°1 des courtiers’ en prêts immobiliers en France et compte tenu du maillage important du territoire et en particulier de la région concernée par ses agences et bureaux.

En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé, en ce qu’il a accueilli la demande indemnitaire formée par Z au titre de la violation de la clause de non concurrence.

Le deuxième jugement sera infirmé concernant la charge des dépens et l’indemnité allouée sur le fondement de l’article 700 du code civil, les dépens de première instance et d’appel devant être mis à la charge de Z et celle-ci, par équité, étant tenue payer une somme de 6.000 euros à l’appelante au titre de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME les jugements entrepris en ce qu’ils ont :

— déclaré irrecevable comme prescrite la demande de Mme X tendant à se voir payer les commissions récurrentes sur les primes d’assurance,

— condamné Mme X à payer à la société Z les sommes de 7.374 euros, pour rupture anticipée du contrat, de 20.000 euros, pour violation de la clause de non-concurrence, et de 1.500 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— partagé les dépens ;

Statuant de nouveau sur les points infirmés,

DÉCLARE recevable la demande de Mme X tendant à se voir payer les commissions récurrentes sur les primes d’assurance ;

L’EN DÉBOUTE ;

DÉBOUTE la société Z de ses demandes au titre de la rupture anticipée ou brutale du contrat et au titre de la violation de la clause de non-concurrence ;

CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;

CONDAMNE la société Capfi à payer à Mme X la somme de 6.000 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE le surplus des demandes ;

CONDAMNE la société Z aux dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de la SCP Regnier, Bequet, Moisan, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

La Greffière Le Président

C D K L

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 5 juillet 2018, n° 16/05225