Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 10 décembre 2020, n° 19/11218

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 2, 10 déc. 2020, n° 19/11218
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/11218
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Paris, 26 septembre 2019, N° 19/01772
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 2

ARRET DU 10 DECEMBRE 2020

(n° , 15 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/11218 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CA5TK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Septembre 2019 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 19/01772

APPELANTES

SA G7 Agissant poursuites et diligences en la personne de son directeur général domicilié en cette qualité audit siège.

[…]

[…]

Représentée par Me Luca DE MARIA, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant, et par Maître Z NERET, avocat au Barreau de Paris, toque T03, avocat plaidant

SA C.O.P.A.G.A.U Agissant poursuites et diligences en la personne de son directeur général domicilié en cette qualité audit siège.

[…]

[…]

Représentée par Me Luca DE MARIA, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant et par Maître Z NERET, avocat au Barreau de Paris, toque T03, avocat plaidant

INTIMES

Monsieur H I J par Décret n°028/458 du 18 juillet 2018 publié au JO du 20/07/2018, a été naturalisé français et a été autorisé à s’appeler légalement X Z

Né le […] à […]

[…]

[…]

Comparant en personne, assisté par Me F G, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, toque : 70 (bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/61421 du 20/12/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

Association CHAMBRE SYNDICALE DES LOUEURS DE VOITURES AUTOMOBI LES – CSLVA

[…]

[…]

Représenté par Me Anne-laure ISTRIA de la SELEURL 41 FOCH AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0260

Syndicat SYNDICAT PROFESSIONNEL DES CENTRAUX RADIO DE TAXI DE PARIS ET DE LA REGION PARISIENNE

[…]

[…]

Représenté par Me Anne-laure ISTRIA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0260

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 08 Octobre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme D E, Présidente

M. Christophe ESTEVE, Conseiller

M. A B, Magistrat C

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame D E dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : M. Olivier POIX

ARRET :

—  CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par D E, Présidente et par Olivier POIX, Greffier.

***

Statuant sur l’appel interjeté le 12 novembre 2019 par les sociétés G7 et COPAGAU (enregistré sous le numéro de répertoire général 19/11218) d’un jugement n° 19/01772 rendu le 27 septembre 2019 par le conseil de prud’hommes de Paris, qui dans le cadre du litige opposant ces sociétés ainsi que l’association professionnelle Chambre syndicale des loueurs de voitures automobiles (CSLVA) et le syndicat professionnel des centraux radio de taxi de Paris et de la région parisienne (SCR), tous deux intervenants volontaires, à M. H I J s’est déclaré compétent pour connaître le litige et a renvoyé l’affaire à une audience du bureau de jugement en réservant les dépens.

L’appel interjeté le 13 novembre 2019 par la société G7 (enregistré sous le numéro de répertoire général 19/11221) d’un jugement n° 19/04380 rendu le 27 septembre 2019 par le conseil de prud’hommes de Paris, qui dans le cadre du litige opposant cette société à M. H I J s’est déclaré compétent pour connaître le litige et a renvoyé l’affaire à une audience du bureau de jugement en réservant les dépens.

Vu les requêtes transmises le 13 novembre 2019 sur le fondement de l’article 84 alinéa 2 du code de procédure civile dans le cadre des deux procédures et les ordonnances subséquentes rendues le 5 décembre 2019 par le délégataire du premier président de la cour de céans autorisant les appelants à assigner à jour fixe les intimés pour l’audience du 29 avril 2020,

Vu la jonction des procédures n° 19/11218 et n° 19/11221 par mention au dossier du 5 décembre 2019,

Vu les assignations à jour fixe délivrées le 7 janvier 2020 dans le cadre des deux procédures par les sociétés G7 et COPAGAU à M. Z X ainsi qu’aux deux syndicats professionnels CSLVA et SCR et les conclusions transmises le 24 septembre 2020 aux termes desquelles ces sociétés demandent à la cour de :

— réformer les jugements rendus par le conseil de prud’hommes de Paris,

— vus les contrats de location de véhicule équipé taxi conclus entre M. X et la société COPAGAU,

— vu le contrat d’affiliation au central de radio G7 conclu par M. X avec la société G7,

— juger que l’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu’elles ont entendu donner à leurs conventions, mais dépend uniquement des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs,

— juger que le lien de subordination se caractérise par l’existence d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir, tout au long de la relation de travail, de donner des ordres et de les modifier à tout moment, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner le manquement du subordonné,

— constater que les clauses litigieuses des contrats souscrits ne sont que la conséquence, soit des contraintes administratives très strictes régissant la circulation et l’exploitation des véhicules équipés taxis, soit des obligations pesant sur la société G7 en sa qualité de centrale de réservation,

— constater que les contrats de location de véhicule équipé taxi conclus entre M. X et la société COPAGAU, de même que le contrat d’affiliation au central de radio G7 conclu avec la société G7, ne présentent aucune des caractéristiques du travail salarié,

En conséquence,

— se déclarer incompétent au profit du tribunal judiciaire de Nanterre,

— rejeter la demande d’évocation de M. X,

— condamner M. X aux entiers dépens,

subsidiairement, vu l’article 122 du code de procédure civile,

— juger que l’action de M. X dirigée contre la société G7 est prescrite en application de l’article 1471-1 du code du travail,

— juger en conséquence M. X irrecevable en ses demandes à l’égard de la société G7,

— débouter en tout état de cause M. X de toutes ses demandes,

— le condamner aux entiers dépens,

Vu les conclusions transmises le 2 octobre 2020 par l’association professionnelle Chambre syndicale des loueurs de voitures automobiles (ci-après dénommée la CSLVA), intimé, qui demande à la cour de :

vu l’article 330 du code de procédure civile,

vu l’article L.2132-3 du code du travail,

vu l’article 1709 et suivants du code civil,

— recevoir la CSLVA en son intervention volontaire et la déclarer bien fondée en ses moyens, demandes et prétentions,

— débouter M. X de l’ensemble de ses moyens, demandes et prétentions,

— dire n’y avoir lieu à la requalification du contrat de location de véhicule équipé taxi en date du 2 avril 2014 en contrat de travail,

— se déclarer en conséquence incompétente au profit du tribunal judiciaire de Nanterre,

— condamner M. X aux entiers dépens,

Vu les conclusions transmises le 7 octobre 2020 par le syndicat professionnel des centraux radio de taxi de Paris et de la région parisienne, encore appelé le Syndicat des Centraux Radio (ci-après dénommé le SCR), autre intimé, qui demande à la cour de :

vu les statuts du Syndicat Professionnel des Centraux Radio de Taxi de Paris et la Région Parisienne,

vu l’Arrêté inter-préfectoral du 31 juillet 2001,

vu ce qui précède,

— déclarer le Syndicat des Centraux Radio recevable en son intervention volontaire,

— déclarer irrecevables les demandes formées par Monsieur X pour cause de prescription,

— se déclarer incompétente au profit du tribunal judiciaire de Nanterre en disant n’y avoir lieu à

requalification du contrat de Monsieur X,

— le condamner aux entiers dépens,

Vu les conclusions transmises le 24 janvier 2020 par M. Z X, autre intimé, qui demande à la cour de :

— constater que M. X a été engagé par un contrat de travail à durée déterminée,

— juger que M. X était placé dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard des

sociétés COPAGAU et G7 et qualifier de contrat de travail leur relation contractuelle dans le cadre du « contrat de location de véhicule équipé taxi »,

— confirmer le jugement en ce qu’il s’est reconnu compétent ratione materiae,

— évoquer le fond des demandes de M. X en application de l’article 88 du code de procédure civile,

Statuant au fond,

— prononcer aux torts des sociétés COPAGAU et G7 la résiliation judiciaire du contrat de travail à la date de la décision à intervenir,

— condamner solidairement les sociétés COPAGAU et G7 à payer à M. X avec intérêts légaux à compter de la réception de la convocation devant la juridiction de première instance à titre de :

— remboursement de frais, subsidiairement à titre de dommages et intérêts : 148.000,86 euros

— rappel de salaire d’avril 2016 à la décision à intervenir (42 mois) : 115.346,70 euros brut

— congés payés sur rappel de salaire de 11.534,67 euros bruts

— indemnité pour non respect de la procédure : 2.746,35 euros

— indemnité de préavis : 5.492,70 euros brut

— indemnité de congés payés sur préavis : 549,27 euros brut

— indemnité de licenciement : 17.741,41 euros

— indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse : 46.687,95 euros

— condamner solidairement les sociétés COPAGAU et G7 à remettre à M. X un bulletin de paie conforme au jugement à intervenir,

— condamner solidairement les sociétés COPAGAU et G7 à verser à M. X la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 2° ainsi qu’aux entiers dépens,

La cour faisant expressément référence aux écrits susvisés pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties,

SUR CE,

EXPOSE DU LITIGE

La société COPAGAU est une société de location de véhicules équipés taxi.

La société G7, anciennement dénommée SOCIETE NOUVELLE GROUPEMENT TAXI (SNGT), exploite un central de radio sous la marque TAXIS G7.

La CSLVA est une association professionnelle qui réunit des entreprises assurant la location de véhicules équipés taxi.

Le syndicat professionnel SCR regroupe des sociétés de services exploitant un central radio taxi et a

pour but selon ses statuts de défendre les intérêts de ses adhérents et les « intérêts généraux de l’industrie du radio taxi ».

Ces deux sociétés, qui font partie du groupe ROUSSELET, et ces deux organisations professionnelles sont tous domiciliés […].

Titulaire de la carte professionnelle de conducteur de taxi, M. Z X s’est fait immatriculer à compter du 17 février 1991 en qualité d’artisan exerçant l’activité de transports de voyageurs par taxis (4932Z).

Il a toutefois été employé du 27 mai 1998 au 15 juin 1998 sous contrat de travail à durée déterminée en qualité de conducteur de taxi par la société COPAGLY, également domiciliée […].

Dès le 16 juin 1998, M. Z X a conclu avec cette société un contrat de location de véhicule équipé taxi, qui sera renouvelé le 11 septembre 1998, puis le 6 avril 2000 pour une fin de contrat fixée initialement au 2 août 2004.

Un contrat semblable a été signé avec la société G7 TAXI SERVICES le 7 novembre 2001 pour une durée de 48 mois à compter du 9 novembre 2001, puis le 24 janvier 2005 pour une durée de 12 mois, le relevé de carrière détaillée de l’intéressé ne rattachant cependant pas celui-ci au régime général de la sécurité sociale mais au RSI au cours des années 2002-2004.

M. Z X a souscrit à compter du 2 novembre 2005 auprès de la société COPAGAU plusieurs contrats successifs de location de véhicule équipé taxi moyennant redevance, le dernier conclu à compter du 2 avril 2014 devant venir à terme le 3 avril 2016.

Parallèlement aux contrats de location conclus avec les sociétés du groupe, il s’est en outre affilié au central de radio TAXIS G7 auprès de la société SNGT, désormais dénommée G7, moyennant des redevances mensuelles au titre de l’équipement radio et de la location du navigateur.

Le solde de son compte de location étant régulièrement débiteur – en dernier lieu à hauteur de 8 866,21 € selon ordonnance de référé rendue le 5 décembre 2017 par le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris – M. Z X a en définitive restitué le véhicule équipé taxi le 13 mai 2015 à la société COPAGAU.

L’intéressé a en outre signé le 9 octobre 2015 avec la société SNGT un accord amiable de démontage de l’équipement radio dans le cadre d’une résiliation du contrat les liant.

Dès le 17 septembre 2015, M. Z X a saisi le conseil de prud’hommes de Paris de demandes dirigées contre la société COPAGAU tendant à la requalification du contrat de location liant les parties en contrat de travail à durée indéterminée.

Le conseil de prud’hommes de Paris a radié l’affaire par décision du 30 mars 2017.

M. Z X a sollicité le rétablissement de l’affaire devant les premiers juges le 1er mars 2019. Le 29 mars 2019, il a sollicité la convocation de la société G7 et a conclu en dirigeant ses demandes contre les sociétés COPAGAU et G7.

La CSLVA et le SCR sont intervenus volontairement à l’instance.

Parallèlement, le 22 mai 2019, M. Z X a saisi le conseil de prud’hommes de Paris d’une requête dirigée exclusivement contre la société G7.

C’est dans ces conditions qu’ont été rendus le 27 septembre 2019 les deux jugements entrepris, aux termes desquels le conseil de prud’hommes de Paris s’est déclaré compétent « pour juger si oui ou non il peut exister une relation de travail avec lien de subordination » entre les parties.

***

La société COPAGAU rappelle :

— que l’activité de taxi est régie par la loi n°95-66 du 20 janvier 1995 relative à l’accès à l’activité de conducteur et à la profession de taxi, le décret d’application n°95-935 du 20 janvier 1995, outre le décret n°73-225 du 2 mars 1973 relatif à l’exploitation des taxis et voitures de remise, l’arrêté interpréfectoral n°01-16385 du 31 juillet 2001 relatif aux exploitants et aux conducteurs de taxis dans la région parisienne et divers autres textes de nature réglementaire,

— que le statut de chauffeur de taxi locataire résulte en particulier des ordonnances et arrêtés du Préfet de police de Paris du 1er février 1973 et qu’il y a été mis fin par la loi n°2014-1104 du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transports avec chauffeur, qui a prévu que l’exploitation d’une autorisation de stationnement ne pourrait être mise en 'uvre que dans le cadre d’un contrat de location-gérance,

— que, sous ce statut, le chauffeur locataire organise son temps de travail comme il l’entend (liberté de choix de ses horaires de travail quotidiens ou de la répartition hebdomadaire entre ses jours de travail et ses jours de repos, par exemple), la seule limite temporelle qui lui est imposée étant la réglementation applicable au temps de conduite des conducteurs locataires fixée à dix heures,

— qu’outre ses horaires de travail, le chauffeur locataire détermine comme il le souhaite ses zones de travail et ses méthodes de recherche de clientèle et peut s’affilier, s’il le souhaite, à un « central radio »,

— qu’il dispose personnellement du véhicule équipé taxi qui lui est donné en location, que ce soit dans le cadre de l’exercice de son activité professionnelle ou à des fins personnelles et familiales, puisqu’il le conserve par-devers lui,

— que le chauffeur locataire n’est donc jamais tenu d’aucun passage dans les locaux du loueur, si ce n’est pour permettre au garage du loueur de procéder à l’entretien et à la maintenance du véhicule, qui sont inclus dans le coût forfaitaire de la location,

— qu’il alimente son véhicule en carburant auprès du fournisseur de son choix et qu’il bénéficie personnellement de la détaxe sur le carburant du véhicule équipé taxi, qu’il récupère la TVA sur toutes les dépenses professionnelles qu’il engage : les carburants et les redevances de location, et reverse celle qu’il perçoit sur les recettes,

— que le chauffeur locataire perçoit la totalité de la recette, de laquelle il dégage les ressources nécessaires au paiement des charges qui sont les siennes, en raison de sa qualité de travailleur indépendant, le loueur ignorant tout de son montant et n’ayant aucun droit ni possibilité d’accès à une information en la matière,

— que le chauffeur locataire bénéficie d’un régime particulier d’affiliation par assimilation au régime général de la sécurité sociale, selon l’article L.311-3 7° du code de la sécurité sociale, un arrêté du ministre du travail du 4 octobre 1976 définissant les modalités du calcul des cotisations de sécurité sociale dues et leur l’assiette, fixée sur la base d’un gain égal à 70% du plafond mensuel de la sécurité sociale, arrêté qui prévoit également, pour des raisons de fiabilité du recouvrement, que c’est au loueur et non au chauffeur locataire qu’incombe la charge du recouvrement et du reversement au profit de l’URSSAF de ces cotisations.

La société COPAGAU expose également que sous l’égide du ministère de l’intérieur, les principales organisations syndicales concernées ont négocié et signé le 31 janvier 1996 un protocole d’accord comportant, en annexe, un modèle du nouveau contrat de location, dont s’est inspiré le ministère de l’intérieur pour élaborer un contrat-type de location de taxi, en application de l’article 10 du décret n°95-935 du 17 août 1995, qui a été transmis aux préfets le 20 janvier 1997, que l’arrêté interpréfectoral n°01-16385 du 31 juillet 2001 a ainsi prévu en son article 10 que « l’autorisation d’exploiter un taxi par location est subordonnée à la présentation par le demandeur d’un contrat de location conforme au contrat type approuvé conformément aux dispositions du troisième alinéa de l’article 10 du décret du 17 août 1995 », qu’un nouveau contrat-cadre a été ensuite élaboré sous l’égide des services du ministère de l’intérieur et diffusé le 13 octobre 2010 et qu’elle s’est elle-même conformée à ces prescriptions.

La société COPAGAU soutient que M. Z X ne recevait aucune directive de sa part relative à l’exercice de son activité, qu’il a signé un contrat conforme au contrat-type, qui reprend pour l’essentiel le régime imposé par l’autorité de police en ce qui concerne l’exploitation des licences de taxis, notamment s’agissant des normes de sécurité, de continuité et de propreté puisqu’il participait à l’exécution d’un service public de transports urbains.

La CSLVA développe un argumentaire conforme à celui de la société COPAGAU en citant l’abondante jurisprudence contraire à la thèse de M. Z X, en faisant valoir que le contrat de louage résultant de la législation alors applicable s’analyse en un contrat de louage de chose et en soulignant que depuis la loi du 1er octobre 2014 ce statut de locataire a disparu pour être remplacé par celui de locataire-gérant, comme l’énonce désormais l’article L 3121-1-2 du code des transports.

La société G7 expose qu’elle exploite un central de radio taxi sous la marque TAXIS G7, qu’elle exerce une activité de mise en relation au sens de l’article L 3141-1 du code des transports et qu’elle est donc une centrale de réservation, responsable de plein droit à ce titre, à l’égard du client, de la bonne exécution des obligations résultant du contrat de transport, en application des articles L 3142-1 et L 3142-3 du code des transports.

Elle précise que l’affiliation du chauffeur de taxi au réseau G7 s’analyse en un second contrat permettant au chauffeur affilié de conclure et d’exécuter des contrats de transport de taxi.

Elle fait valoir que le chauffeur qui décide de s’affilier à un central de radio taxi recherche une source complémentaire de clientèle, en sus de sa clientèle personnelle et de celle qu’il charge dans la rue, l’activité principale de la « maraude » ayant été préservée au profit du chauffeur de taxi en vertu des dispositions de l’article L 3142-5 du code des transports aux termes duquel le central de radio ne peut lui interdire « de prendre en charge un client qui le sollicite directement alors que le taxi n’est pas rendu indisponible par une réservation et qu’il est arrêté ou stationné ou qu’il circule sur la voie ouverte à la circulation publique dans le ressort de son autorisation de stationnement ».

En contrepartie de ses propres obligations et responsabilité vis-à-vis du passager l’ayant sollicitée, elle demande aux chauffeurs « de respecter « les sept commandements de la charte qualité » à l’égard de la clientèle transportée à partir du moment où le chauffeur a formellement accepté une proposition de course : respecter les délais annoncés par le chauffeur lui-même, respecter les compteurs d’approche, utiliser un véhicule propre et et parfait état, avoir une tenue et une présentation soignées, accepter toute destination pour toute course radio, accepter tous les moyens de paiement agréés par la société G7, avoir un comportement professionnel responsable et commercial ».

Elle indique que « les manquements à l’égard du passager transporté dont un chauffeur peut être à l’origine (surfacturation ou facturation frauduleuse, course non effectuée sans prévenir, fraude dans l’utilisation du matériel par exemple) sont dès lors susceptibles d’entraîner de la part de la société G7, s’ils sont renouvelés et selon un barème de points, après examen par une commission paritaire de suivi qualité, une pénalité à raison des obligations qui pèsent sur la centrale de réservation à l’égard

du client transporté ».

Elle souligne :

— que le chauffeur de taxi affilié demeure un travailleur indépendant qui choisit librement de se connecter ou non et donc d’allumer ou non son terminal informatique et qui choisit librement de se déclarer sur la zone de son choix afin de recevoir des offres de courses sur cette zone,

— que le chauffeur agit en toute liberté dans le cadre de l’exécution de la prestation de transport qu’il réalise et détermine l’itinéraire à sa guise, aucun mécanisme prédictif ne lui imposant un itinéraire spécifique, à la différence des plateformes de VTC,

— que contrairement encore à celles-ci, elle ne fixe ni même ne propose le prix de la course qui est fixé par voie réglementaire et résulte du compteur horokilométrique réglementaire et obligatoire,

— qu’à la différence d’un contrat de travail qui se caractérise par le caractère évolutif des ordres et des directives, l’exécution du contrat conclu entre le chauffeur de taxi et elle-même n’est sujette à aucune variation unilatérale, le chauffeur n’ayant aucune autre obligation que celles qu’il l’a acceptées en décidant de s’affilier,

Elle soutient que les notes attribuées par le client et par lui seul ne s’analysent pas en un pouvoir de direction ou de sanction et que l’application éventuelle du barème de points en cas de non-respect de la charte qualité par le chauffeur ne résulte pas de l’exercice d’un pouvoir de direction ou d’un quelconque pouvoir de sanction mais uniquement de l’appréciation par le client et par lui seul du service qui lui a été fourni, l’attribution par celui-ci d’une note de 1 à 3 (sur 5) donnant lieu à une demande d’explications au chauffeur ayant exécuté la course.

Elle ajoute que contrairement au prestataire VTC, le chauffeur de taxi qui bénéficie du droit de stationner et de charger sur la voie publique une clientèle personnelle ainsi que du droit de maraude n’est pas sous dépendance économique.

Le SRC développe la même argumentation après avoir rappelé que les centraux radio n’exploitent pas eux-même de taxis, ne sont pas titulaires d’autorisations de circulation et de stationnement et ne sont pas davantage propriétaires de véhicules.

Le syndicat décrit les contrats conclus par les entreprises de ce secteur, soit, d’une part, les contrats d’abonnement avec des clients utilisateurs de taxi et d’autre part, les contrats de location de matériel embarqué et d’abonnement à un central radio souscrits avec les chauffeurs de taxi.

Il soutient que le chauffeur de taxi n’a aucun compte à rendre au central radio « si ce n’est d’assurer celui-ci qu’il a bien pris en charge le passager et que par ailleurs il a exécuté sa prestation conformément à des standards de qualité que le central radio détermine » et « qu’il n’existe pas de sanction émanant de la société G7 mais de la seule appréciation par le passager transporté du service qui lui a été fourni notamment par le chauffeur ».

Il ajoute qu’un intermédiaire ne peut pas et n’est jamais l’employeur de l’une des parties qu’il met en rapport avec l’autre.

De son côté, M. Z X répond :

- qu’il travaillait « sous le lien de subordination exclusif de COPAGAU – SNGT – G7 car il n’était pas titulaire personnellement de l’autorisation de stationnement sur la voie publique et de la licence taxi », qu’il « ne pouvait ni confier le véhicule à un tiers ni assurer des courses pour un autre réseau que G7 », que « le véhicule appartenait à COPAGAU – SNGT – G7 qui prenait en charge son

entretien et ses réparations et la souscription d’une assurance responsabilité civile spécifique au transport automobile de passagers », que « la société COPAGAU – SNGT – G7 était titulaire du pouvoir disciplinaire et de direction » à son égard dans la mesure où elle vérifiait le respect de la charte qualité et du règlement intérieur G7, évaluait le travail en fonction des différents standards de service offerts par le réseau G7, contrôlait notamment le temps de disponibilité, plus particulièrement l’amplitude et la célérité de sa disponibilité dans une zone de géolocalisation, ou encore inspectait sa tenue vestimentaire et l’état du véhicule, que son activité était en permanence géolocalisée, qu’il recevait des instructions sous forme de notes d’instruction et d’information notamment quant aux secteurs à couvrir prioritairement, qu’il devait appliquer les tarifs imposés par le réseau G7 (compteur d’approche au forfait, réductions en fonction du type d’abonnement, tarifs promotionnels, réservations prépayées, etc…), une partie des recettes étant versée directement à la COPAGAU – SNGT – G7 avant de lui être reversée après compensation avec les sommes qui lui étaient prélevées, « que COPAGAU – SNGT – G7 gérait jusqu’en mars 2016 dans le cadre d’un protocole tripartite les encaissements au moyen d’un compte bancaire spécifique ouvert au nom de Taxi G7 et percevait directement la détaxe carburant », que son activité faisait l’objet d’une notation et enfin qu’il devait prendre en charge prioritairement certains types de commande.

MOTIFS :

A titre liminaire, il est fait observer que dès lors que les sociétés COPAGAU et G7 maintiennent leur exception d’incompétence, soulevée in limine litis, tendant à voir dire le conseil de prud’hommes de Paris incompétent pour connaître du litige au profit du tribunal judiciaire de Nanterre, exception qu’elles fondent sur l’inexistence du contrat de travail allégué, la cour saisie sur appel compétence est tenue pour statuer sur cette exception de se prononcer sur les moyens soulevés par ces sociétés pour contester l’existence d’un contrat de travail et par voie de conséquence de trancher la question de fond dont dépend la compétence.

La cour fait également observer que sauf évocation, il appartiendra à la juridiction désignée compétente de statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action dirigée contre la société G7.

Enfin, la cour constate que s’il soulève dans la partie « discussion » de ses écritures l’irrecevabilité de « l’intervention des associations », lesquelles sont en réalité intimées, M. Z X n’en tire aucune conséquence procédurale dans le dispositif de ses conclusions, de sorte que par application de l’article 954 du code de procédure civile la cour n’est saisie d’aucune prétention à ce titre.

Aux termes de l’article L. 1411-1 du code du travail, « le conseil de prud’hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu’ils emploient » et « juge les litiges lorsque la conciliation n’a pas abouti ».

Le contrat de travail se définit par l’engagement d’une personne à travailler pour le compte et sous la direction d’une autre moyennant rémunération, le lien de subordination juridique ainsi exigé se caractérisant par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Il doit encore être précisé que le fait que le travail soit effectué au sein d’un service organisé peut constituer un indice de l’existence d’un lien de subordination lorsque l’employeur en détermine unilatéralement les conditions d’exécution.

Enfin, l’existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité.

L’article L 8221-6 du code du travail dispose quant à lui que : " I.- Sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription :

1° Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales ;

2° Les personnes physiques inscrites au registre des entreprises de transport routier de personnes, qui exercent une activité de transport scolaire prévu par l’article L. 214-18 du code de l’éducation ou de transport à la demande conformément à l’article 29 de la loi n°82-1153 du 30 décembre 1982 d’orientation des transports intérieurs ;

3° Les dirigeants des personnes morales immatriculées au registre du commerce et des sociétés et leurs salariés ;

II.- L’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque les personnes mentionnées au I fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci. (')".

En premier lieu, M. Z X n’est pas fondé à opposer aux sociétés COPAGAU et G7 le contrat de travail à durée déterminée conclu du 27 mai 1998 au 15 juin 1998 avec la société COPAGLY, qui n’est pas dans la cause, alors en outre qu’il n’est nullement établi au regard des documents contractuels, ni dans les faits, que ledit contrat se soit poursuivi dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée.

En deuxième lieu, la présomption de non-salariat prévue par l’article L 8221-6 précité est opposable à l’intéressé qui a été répertorié en tant qu’artisan chauffeur de taxi du 17 février 1991 jusqu’au 2 février 2018. En tout état de cause, il n’existe aucun contrat de travail apparent entre M. Z X et les sociétés dans la cause, de sorte qu’il lui appartient de démontrer l’existence de la relation de travail salarié dont il se prévaut à leur encontre.

En troisième lieu, M. Z X qui n’a pas même recours à la notion de coemploi n’est pas fondé à faire l’amalgame « COPAGAU – SNGT – G7 », quand bien même les sociétés COPAGAU et G7 (anciennement dénommée SNGT) appartiennent au même groupe.

En effet, il ne résulte pas des documents contractuels communiqués ni des faits avérés que M. Z X en qualité de locataire d’un véhicule équipé taxi ait été contraint de s’affilier au central radio G7 et aucun élément ne permet de retenir que les contrats souscrits à des dates différentes avec la société COPAGAU et la société G7 étaient indissociables, le protocole d’accord tripartite conclu le 22 septembre 2006 en vue du remboursement de la dette de loyers contractée envers la société COPAGAU étant à cet égard très insuffisant.

C’est dès lors à juste titre que les sociétés COPAGAU et G7 concluent à la nécessité d’analyser séparément les relations contractuelles les ayant unies à M. Z X.

Sur la nature de la relation contractuelle entre M. Z X et la société COPAGAU

L’étude des contrats communiqués par M. Z X et notamment les conditions générales du contrat de location de véhicule équipé taxi avec assurance (sa pièce n° 6) permet à la cour de constater que les engagements écrits souscrits par la société COPAGAU et l’intéressé sont conformes au contrat type approuvé conformément aux dispositions du troisième alinéa de l’article 10 du décret

du 17 août 1995.

Les conditions générales rappellent le cadre législatif et réglementaire alors applicable.

Leur article 1.2 stipule que le locataire assume la responsabilité pleine et entière de son activité, en qualité de travailleur indépendant et qu’il organise librement à son seul profit et sous sa responsabilité personnelle son activité de conduite et de gestion du taxi.

L’article 1.3 rappelle que le locataire s’engage à exercer l’activité de taxi dans le respect de la réglementation en vigueur concernant l’exercice de la profession de taxi ainsi que les dispositions du code de la route.

La durée de la location, qui ne peut être inférieure à douze mois, ne place pas le locataire dans une situation précaire.

Il dispose personnellement du véhicule équipé taxi, que ce soit dans le cadre de l’exercice de son activité professionnelle ou à des fins personnelles puisqu’il le conserve par devers lui. L’article 4.6 précise que le locataire s’interdit de prêter ou confier à titre gratuit ou onéreux le véhicule à quiconque à l’exception de son conjoint pour une utilisation à usage de simple véhicule privé.

Les obligations du loueur dont fait état M. Z X (prise en charge des opérations d’entretien et de réparation nécessaires à la conservation du véhicule en bon état de fonctionnement, fourniture d’un véhicule de remplacement), qui s’inscrivent dans les prescriptions réglementaires contrôlées par l’autorité de police et en outre ne dépassent en rien les clauses contractuelles habituelles du louage de chose ne sont pas révélatrices de la relation salariée alléguée.

Si le locataire conserve à sa charge les dépenses de carburant, il est précisé à l’article 4.4 que le loueur lui reverse la part de la détaxe sur les carburants lui revenant. C’est ainsi que la société COPAGAU a procédé ainsi qu’il en est justifié.

Les conditions de résiliation du contrat ne sont pas défavorables au locataire, qui dispose de la possibilité de le dénoncer de manière anticipée, sans motif, moyennant un préavis d’un mois, alors que le loueur ne dispose de la même faculté que pour sanctionner des manquements graves du locataire aux obligations contractuelles ou réglementaires, lesquels peuvent également entraîner une dénonciation anticipée de plein droit du contrat, n’établissent pas ce lien de subordination ;

La gratuité de la redevance pour un 12e mois avec mise à disposition du véhicule pour un usage à des fins personnelles à l’exclusion de toute activité professionnelle n’est qu’une faculté à laquelle le locataire peut librement renoncer s’il le souhaite au profit d’une remise sous forme d’avoir, ce que confirment les stipulations de l’article 5.4.2. Cette clause ne caractérise pas le lien de subordination allégué.

Il en est de même de la clause prévoyant la suspension du contrat à la demande du locataire pour raison de santé, pour une durée maximum d’un mois.

Pour le surplus, il s’agit essentiellement des normes et prescriptions imposées par la réglementation et l’autorité de tutelle.

Il est rappelé à cet égard que l’assujettissement du locataire de véhicule équipé taxi au régime général de la sécurité sociale procède des dispositions impératives des articles L 311-2 et L 311-3. 7° du code de la sécurité sociale de sorte qu’aucun argument ne peut être tiré de la circonstance que le loueur effectue pour le compte du locataire le versement des cotisations sociales et lui en communique le décompte mensuellement.

S’agissant des conditions de travail effectives, i l ne résulte d’aucun élément que la société COPAGAU avait le pouvoir de donner à M. Z X des ordres ou des directives en ce qui concerne son activité de chauffeur de taxi et l’organisation de cette dernière, en lui fixant un périmètre géographique, une durée du travail, des périodes de congés ou en lui imposant la prise de certains clients, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les éventuels manquements de l’intéressé, les seules restrictions à cet égard lui étant imposées par l’administration et découlant du caractère réglementé de la profession de chauffeur de taxi.

Il s’ensuit que M. Z X manque à rapporter la preuve qu’il était lié à la société COPAGAU par un contrat de travail.

S’agissant des rapports entre ces deux parties, il convient en conséquence de dire que M. Z X n’a pas été lié à la société COPAGAU par un contrat de travail, d’infirmer sur ce point le jugement entrepris et de renvoyer l’affaire devant le tribunal judiciaire de Nanterre.

Sur la nature de la relation contractuelle entre M. Z X et la société G7 (anciennement dénommée SNGT)

Il ressort des productions que la société G7 (anciennement dénommée SNGT) a conclu avec M. Z X divers contrats de location de l’équipement radio et du navigateur installés dans le véhicule équipé taxi.

Dans ce cadre la société G7 a régulièrement géré les mouvements comptables de fonds entre les parties, notamment ceux liés aux facturations différées au bénéfice de certains clients, aux encaissements du prix des courses réglées à M. Z X par carte bancaire et par chèques, aux avoirs et aux remises qualité, aux redevances et frais de gestion, par le truchement d’un compte bancaire ouvert au nom de la société, dont la convention tripartite déjà citée du 22 septembre 2006 fait expressément état.

Les mêmes numéros de code radio (3448) et de compte (826803) apparaissent déjà sur un courrier du 31 juillet 1998 (pièce n° 22), puis sur les relevés de compte figurant en pièce n° 25, le premier d’entre eux ayant été établi le 2 juillet 2010.

Le courrier précité du 31 juillet 1998 adressé à M. Z X par la société SNGT fait état d’un récapitulatif du dossier de discipline du chauffeur de taxi depuis un an et d’un solde de 5 points calculés en fonction de l’article III du règlement intérieur, étant précisé qu’ à cette période le contrat de location d’un véhicule équipé taxi était conclu avec la société COPAGLY.

Le dossier de presse de « G7 », manifestement postérieur à l’année 2015 dès lors que le chiffre d’affaires « G7 » en 2015 est mentionné, fait en particulier état de la réservation à l’avance et commande immédiate, d’une réglette pour le choix du niveau de service, de la géolocalisation des taxis, du suivi de l’approche et de la notation du chauffeur (pièce n° 14).

Les documents relatifs au guide du chauffeur de taxi G7, mis à jour en janvier 2009, listent les 7 commandements de la charte qualité : respecter les délais, respecter les compteurs d’approche, avoir un véhicule propre et en parfait état, avoir une tenue et une présentation soignées, accepter toute destination pour toute course radio, accepter tous les moyens de paiement agréés TAXIS G7 et avoir un comportement professionnel responsable et commercial (pièces n° 20 et 21).

Ils formalisent des consignes précises relatives aux procédures de « non charge », en fonction des clients et des types d’abonnement (envoi du « non charge », paiement du « non charge » et temps d’attente), la « fausse non charge » étant sanctionnée d’un retrait de 10 points dans le barème d’évaluation.

Ces documents décrivent le service qualité mis en place par la société SNGT comme suit :

« 1- Principes d’évaluation

Tout chauffeur de taxi affilié débute avec un capital de 20 points. Les retraits de points éventuels sont effectifs pendant un an, le capital étant réactualisé en permanence pour ne tenir compte que des événements intervenus au cours des 12 derniers mois.

Lorsqu’un retrait de 10 points ou plus est envisagé, le chauffeur de taxi est convoqué et entendu par SNGT, son cas est soumis alors à une commission de suivi qualité qui confirme , le cas échéant, le retrait.

Lorsque le capital est épuisé, la résiliation du contrat radio est prononcée pour inexécution des obligations contractuelles du locataire, sans préavis ni indemnité, dans les conditions prévues à l’article 11 des conditions générales du contrat radio.

[…]

Les anomalies peuvent être constatées par tout moyen à la disposition de SNGT et notamment :

— par les préposés de SNGT qui effectuent des contrôles sur le terrain,

— par les opérateurs du centre d’appels sous le contrôle du superviseur,

— par les réclamations téléphoniques ou écrites de la clientèle auprès de SNGT,

— par les données enregistrées dans le système informatique de SNGT concernant le dispatching des courses, les messages de service et les données de localisation échangées entre le terminal embarqué et l’ordinateur central.

Chaque anomalie fait l’objet d’un rapport instruit par SNGT et entraîne, s’il y a lieu, le retrait de points prévu au barème qualité.

En cas de manquement avéré, le chauffeur de taxi concerné sera prévenu par courrier simple de l’anomalie en cause et son capital de points réactualisé lui sera communiqué à cette occasion.

3- Mesures complémentaires

Les mesures additionnelles suivantes sont susceptibles d’être appliquées :

— en cas de compteur abusif, de surtaxe ou de fraude : remboursement par le chauffeur de taxi du trop perçu, voire de la totalité du montant de la ou des courses en cause, en fonction des circonstances et notamment des difficultés de circulation.

— en cas de non réponse à une offre de course dans la zone primaire : désinscription de la zone considérée assortie d’une suspension temporaire.

— en cas de véhicule, de présentation ou de publicité non conformes malgré mise en garde : suspension de l’attribution informatique des courses sans interruption de facturation de la redevance radio, jusqu’à remise en conformité.

— en cas de présomption de manquement grave à la charte qualité ou mettant en cause l’intégrité de l’image de TAXIS G7 : suspension à titre conservatoire de l’attribution informatique des courses sans interruption de facturation de la redevance radio, jusqu’à traitement de la non conformité. »

Le paragraphe 4 décrit ensuite la procédure de recours écrit, non suspensif, ouverte au chauffeur de taxi et le paragraphe 5 est constitué du barème d’évaluation qui présente, sous forme de tableau sur une page entière, le nombre de points retirés en fonction de la nature et de la gravité de la faute commise.

Contrairement à l’argumentaire de la société G7 et de son syndicat professionnel qui font reposer la notation du chauffeur sur le seul client, il apparaît clairement à l’examen de ces éléments pris dans leur ensemble, d’une part, que la « notation » du chauffeur de taxi ne relève nullement de la seule appréciation du client transporté dans la mesure où il est aussi prévu que les anomalies soient constatées par les préposés de SNGT, par les opérateurs du centre d’appels et par les données enregistrées dans le système informatique de SNGT, d’autre part, que la géolocalisation du véhicule taxi constitue de fait le vecteur permettant à la société G7 (SNGT) de contrôler le respect par le chauffeur des directives données dans la charte qualité et des instructions transmises par le terminal embarqué.

A cet égard, le barème d’évaluation prévoit un retrait de 5 points pour un nombre mensuel de refus ou de non réponse excessif et un retrait de 3 points pour deux anomalies constatées telles que « le non-respect des consignes affichées sur le terminal ».

Ce système de consignes et de contrôle, très élaboré, peut donner lieu à des remises qualité en cas de bon comportement du chauffeur de taxi, qui sont créditées au compte bancaire géré par la société G7 (SNGT), ou au contraire à des sanctions qui s’échelonnent du retrait de points, variable en fonction de la nature et de la gravité de la faute, jusqu’à la déconnexion temporaire et, pour les comportements les plus graves, jusqu’à la résiliation du contrat.

Il ne s’agit pas d’une simple pétition de principes, M. Z X ayant été effectivement soumis à ce système ainsi qu’il ressort des remises qualité figurant sur certains relevés de son compte bancaire (pièces n° 25), de la sanction notifiée le 31 juillet 1998 (pièce n° 22 première page) et du courrier du 12 juin 2015 relatif à son taux anormalement bas d’acceptation de carte bancaire, qui s’analyse en un véritable avertissement (pièce n° 22 seconde page).

Dans ces conditions, M. Z X établit suffisamment que dès lors qu’il se connectait au central radio G7 et se déclarait disponible, il n’exerçait pas librement son activité et se trouvait sous la subordination permanente de la société G7 (SNGT), qui exerçait à son égard un réel pouvoir de direction et de sanction.

S’agissant des rapports entre ces deux parties, il convient en conséquence de dire que M. Z X a été lié à la société G7 (SNGT) par un contrat de travail, de confirmer sur ce point le jugement entrepris et de renvoyer l’affaire devant le conseil de prud’hommes de Paris, la cour n’estimant pas de bonne justice d’évoquer.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :

En application de l’article 700 2° du code de procédure civile, il apparaît équitable de condamner la société G7 à payer à Me F G, avocat de M. Z X, la somme de 3 000 €.

La société G7 qui succombe supportera les dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Dit que M. Z X n’a pas été lié à la société COPAGAU par un contrat de travail ;

Infirme sur ce point le jugement entrepris ;

Dit que M. Z X a été lié à la société G7 anciennement dénommée SNGT par un contrat de travail ;

Confirme sur ce point le jugement entrepris ;

Dit n’y avoir lieu d’évoquer ;

Ordonne une disjonction d’instances ;

Renvoie l’affaire opposant M. Z X à la société COPAGAU et à l’association professionnelle Chambre syndicale des loueurs de voitures automobiles (CSLVA) devant le tribunal judiciaire de Nanterre ;

Renvoie l’affaire opposant M. Z X à la société G7, anciennement dénommée SOCIETE NOUVELLE GROUPEMENT TAXI (SNGT), et au syndicat professionnel des centraux radio de taxi de Paris et de la région parisienne, encore appelé le Syndicat des Centraux Radio (SCR), devant le conseil de prud’hommes de Paris ;

Condamne la société G7 à payer à Me F G, avocat de M. Z X, la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 2° du code de procédure civile ;

Condamne la société G7 aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 10 décembre 2020, n° 19/11218