Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 10 juin 2020, n° 18/09892

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 3, 10 juin 2020, n° 18/09892
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/09892
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 21 février 2018, N° 14/03250
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRÊT DU 10 JUIN 2020

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/09892 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B5WRK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Février 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 14/03250

APPELANTE

SCI ALJ, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 432 485 639

[…]

[…]

représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065, avocat postulant

assistée de Me Boris HOCHMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E2098

INTIMÉE

SARL LA MONTMARTOISE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 490 245 123

[…]

[…]

représentée par Me Arezki CHABANE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1472

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 Février 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Sandrine GIL, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Agnès THAUNAT, présidente

Madame Sandrine GIL, conseillère

Madame Elisabeth GOURY, conseillère

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, le prononcé de l’arrêt, (initialement fixé au 29 avril 2020) ayant été renvoyé en raison de l’état d’urgence sanitaire.

— signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte du 23 avril 1993, M. et Mme X ont donné à bail à M. Z A des locaux à usage commercial et d’habitation, dépendant d’un immeuble situé […] à Paris 18e. Le bail a été renouvelé à compter du 1er janvier 2002, le prix étant fixé par décision du juge des loyers commerciaux du 26 mai 2009 à la somme annuelle en principal de 11.597,45 euros. M. et Mme X ont vendu l’immeuble loué à la SCI ALJ par acte du 28 juin 2002, M. Z A cédant son fonds de commerce à la société LA MONTMARTOISE par acte du 22 septembre 2006.

Par acte extrajudiciaire du 30 mars 2011, la SCI ALJ a fait délivrer à la société LA MONTMARTOISE un congé avec refus de renouvellement et refus de versement d’une indemnité d’éviction, à effet au 30 septembre suivant.

Par acte du 11 octobre 2011, la société locataire a fait citer devant le tribunal de grande instance de Paris la SCI ALJ en nullité du congé et en paiement de l’indemnité d’éviction, l’instance étant enregistrée sous le n° 11/14841.

Par jugement du 25 avril 2013, le tribunal de grande instance de Paris a notamment :

— dit que le congé sans offre de renouvellement délivré le 30 mars 2011 a mis fin à compter du 1er janvier 2010 (sic) au bail,

— dit qu’en l’absence de motif grave et légitime, le congé avait ouvert droit pour la société LA MONTMARTOISE au versement d’une indemnité d’éviction,

— avant dire droit au fond sur le montant de l’indemnité d’éviction, tous droits et moyens des parties demeurant réservés à cet égard, désigné en qualité d’expert M. Y avec la mission habituelle sur la détermination de l’indemnité d’éviction,

— mis à la charge de la SCI ALJ les frais de consignation de la provision à valoir sur les honoraires de l’expert.

La SCI ALJ n’a pas consigné dans les délais impartis et l’affaire a été radiée par ordonnance du juge de la mise en état du 7 février 2014.

L’affaire a été rétablie au rôle le 4 mars 2014 sous le n° 14/03250 à la demande de la société LA MONTMARTOISE et, par ordonnance du 24 octobre 2014, la SCI ALJ a été relevée de caducité pour consigner les frais d’expertise.

M. Y a déposé son rapport le 23 juillet 2015, concluant a une indemnité d’éviction d’un montant de 572.000 euros en cas de perte du fonds, et, en cas de transfert du fonds, à une indemnité d’un montant de 426.000 euros ou de 338.000 euros selon que le prix du bail qui aurait été renouvelé en 2011 aurait été ou non plafonné.

Par acte d’huissier en date du 26 novembre 2015, la SCI ALJ a fait notifier à la société LA MONTMARTOISE son droit de repentir en consentant au renouvellement du bail.

Par jugement en date du 22 février 2018, le tribunal de grande instance de Paris a :

— Constaté que, par l’effet du repentir du bailleur, le bail liant la SCI ALJ à la société LA

MONTMARTOISE et portant sur des locaux à usage commercial et d’habitation situés […] à Paris 18e, s’est renouvelé pour une durée de neuf années à compter du 26 novembre 2015,

— Fixé le prix du bail renouvelé à compter du 26 novembre 2015 à la somme annuelle de 15.823 euros en principal, hors taxes et hors charges,

— Dit qu’ont couru des intérêts au taux légal sur le différentiel entre le loyer effectivement

acquitté et le loyer dû, à compter du 31 janvier 2017 pour les loyers avant cette date, puis à compter de chaque échéance contractuelle pour les loyers échus postérieurement,

— Rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande formée par la SCI ALJ en paiement de l’indemnité d’occupation pour la période ayant couru entre le 1er octobre 2011 et le 25 novembre 2015,

— Fixé à la somme de 19.041 euros annuelle le montant de l’indemnité d’occupation dont la société LA MONTMARTOISE est redevable durant cette période intermédiaire,

— Condamné la société LA MONTMARTOISE à payer à ce titre la somme totale de 79.073,04 euros, en deniers ou quittances, les versements opérés entre le 1er octobre 2011 et le 25 novembre 2015 devant venir en déduction,

— Rejeté la demande de la société LA MONTMARTOISE en paiement dirigée contre la SCI ALJ sur le fondement de l’article L 145-58 du code de commerce,

— Condamné la SCI ALJ aux entiers dépens, incluant les frais de l’expertise judiciaire,

— Condamné la SCI ALJ à payer à la société LA MONTMARTOISE la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 22 mai 2018, la SCI ALJ a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par le RPVA le 14 janvier 2019, la SCI ALJ demande à la cour de :

— C les demandes, fins et prétentions formées à l’encontre de la SCI ALJ par la SARL LA MONTMARTOISE ;

En conséquence,

Sur le loyer en renouvellement :

A titre principal,

— D le jugement de première instance en ce qu’il a fixé le prix du bail renouvelé à compter du 26 novembre 2015 à la somme annuelle de 15.823 euros en principal, hors taxes et hors charges,

Et statuant à nouveau,

— DIRE ET JUGER que la SCI ALJ est bien fondée à soutenir que le déplafonnement du loyer est applicable au motif de la modification notable des facteurs locaux de commercialité ;

— DIRE ET JUGER que le prix du bail renouvelé doit être fixé à la valeur locative ;

— E le montant du loyer en renouvellement des lieux loués en application de l’article L. 145-34 à la somme de 38.000,00 hors taxes et hors charges à compter du 26 novembre 2015 ;

— DIRE ET JUGER que le loyer fixé portera intérêts au taux légal, conformément aux dispositions de l’article 1155 du Code civil, de plein droit à compter de la date d’effet du nouveau loyer et que les intérêts échus depuis plus d’une année produiront eux-mêmes intérêts en conformité avec les dispositions de l’article 1154 du Code civil ;

A titre subsidiaire,

— DESIGNER tel Expert qu’il plaira à la Cour, avec pour mission de donner son avis sur la valeur locative des locaux loués, en procédant notamment à l’examen des éléments susceptibles d’écarter la règle du plafonnement du loyer de renouvellement;

A titre infiniment subsidiaire,

— CONFIRMER le jugement de première instance en date du 22 février 2018 en ce qu’il fixe le prix du bail renouvelé à compter du 26 novembre 2015 à la somme annuelle de 15.823 euros en principal, hors taxes et hors charges ;

Sur l’indemnité d’occupation :

— CONFIRMER le jugement de première instance en date du 22 février 2018 en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande formée par la SCI ALJ en paiement de l’indemnité d’occupation pour la période ayant couru entre le 1er octobre 2011 et le 25 novembre 2015 ;

Toutefois,

— D le jugement de première instance en date du 22 février 2018 en ce qu’il a fixé à la somme de 19.041 euros annuelle le montant de l’indemnité d’occupation dont la société LA MONTMARTOISE est redevable durant cette période intermédiaire,

Et statuant à nouveau,

— E le montant de l’indemnité d’occupation due par la SARL LA MONTMARTOISE entre le 1er octobre 2011 et le 25 novembre 2015 à la somme de 28.530 € HT/HC ;

— DIRE ET JUGER que ce montant sera indexé chaque année, à la date anniversaire de la prise d’effet du congé avec refus de renouvellement (les 1er octobre 2012, 1er octobre 2013, 1er octobre 2014 et 1er octobre 2015), en fonction de la variation de l’indice des loyers commerciaux, l’indice de référence étant celui du 1er trimestre 2011 (103,64) ;

— CONDAMNER la société LA MONTMARTOISE à régler en deniers ou quittances le montant de cette indemnité d’occupation à la SCI ALJ, avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision à intervenir ;

Sur les frais d’instance,

— C la demande en paiement de la SARL LA MONTMARTOISE de la somme de 11.467,67 euros en application de l’article L. 145-58 du Code de commerce formulée à l’encontre de la société ALJ ;

En conséquence,

— CONFIRMER le jugement de première instance en date du 22 février 2018 en ce qu’il a rejeté la demande de la société LA MONTMARTOISE en paiement dirigée contre la SCI ALJ sur le fondement de l’article L. 145-58 du code de commerce ;

En tout état de cause,

— CONDAMNER la SARL LA MONTMARTOISE à verser à la SCI ALJ la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

— CONDAMNER la SARL LA MONTMARTOISE aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont le recouvrement sera poursuivi par Maître Frédérique ETEVENARD, Avocat près la Cour d’Appel, conformément aux dispositions de l’article 699 du CPC.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par le RPVA le 22 octobre 2018, la SARL LA MONTMARTOISE demande à la cour de :

— DIRE et JUGER la SARL LA MONTMARTOISE, Société A Responsabilité Limitée au capital social de 7.500 €, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 490 245 123, dont le siège social est sis […], représentée par son gérant domicilié en cette qualité audit siège, recevable et bien fondée en ses écritures

— Vu l’article L 145-58 du Code de Commerce

— Vu l’article L 145-60 du Code de Commerce

— Vu l’article L145-28 du Code de commerce

— Vu l’article L145-12 du Code de commerce

— Vu l’article 700 du CPC.

— B C purement et simplement les prétentions de la SCI ALJ

En conséquence,

1°) Sur le renouvellement.

— B CONFIRMER le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris en date du 22 février 2018 en ce qu’il a constaté le renouvellement du bail consenti par la SCI ALJ, Société Civile Immobilière au capital social de 1.524,49 €, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 432 485 639, dont le siège social est sis […], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, à la SARL LA MONTMARTOISE à compter du 26 novembre 2015 pour une durée de neuf années entières et consécutives comme suite à la notification d’exercice du droit de repentir.

— B CONFIRMER le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris en date du 22 février 2018 en ce qu’il a constaté l’absence de motifs de déplafonnement.

— B D le jugement en ce qui concerne le quantum du montant du loyer annuel

— B E le loyer annuel plafonné à la somme de 11.526,03 euros à compter du 26 novembre 2015 déterminé comme suit : (11.597,45X1614/1624)

2°) Sur l’indemnité d’occupation.

— B D la décision entreprise

En conséquence,

— B CONSTATER que la demande de la SCI ALJ est prescrite ; en conséquence B C purement et simplement cette demande.

Subsidiairement ; si la Cour venait à écarter la prescription,

— B F un abattement de 50 % sur le montant de la valeur locative fixée par la SCI ALJ à la somme de 28.530 €.

— B CONDAMNER la SCI ALJ à payer à la SARL LA MONTMARTOISE la somme de 11.467,67 € sur le fondement de l’article L 145-58 du Code de commerce, ainsi qu’aux entiers dépens et ce y compris les frais d’expertise.

— B C la demande de désignation d’expert comme étant mal fondée et injustifiée.

— B CONDAMNER la SCI ALJ, bailleresse, à payer à la SARL LA MONTMARTOISE la somme de 5.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 30 janvier 2020.

MOTIFS

Sur le loyer du bail renouvelé le 26 novembre 2015

L’appelante fait valoir que le loyer du bail renouvelé par l’effet du droit de repentir doit être déplafonné, contrairement à ce que le jugement de première instance a retenu, en raison de la modification notable des facteurs locaux de commercialité aux motifs que:

— l’expert judiciaire a relevé que sur une partie de la période considérée du 1er janvier 2002 au 30

septembre 2011, 216 logements, 2 633 m² de surfaces commerciales et 2 628m² d’équipements collectifs ont vu le jour dans le quartier dans un périmètre de 400 m² des locaux donnés à bail,

— ces modifications ont entraîné un nouveau flux de chalands favorable à l’activité de boulangerie-pâtisserie- traiteur de la locataire.

Elle conclut à titre subsidiaire que s’il était retenu l’absence de motifs de déplafonnement du loyer alors le loyer du bail renouvelé s’élève à la somme de 15 823 euros au 26 novembre 2015.

L’intimée réplique qu’aucune modification notable des facteurs locaux de commercialité susceptible d’avoir une incidence sur le commerce n’est établie dès lors que les nouveaux logements et les mètres carrés supplémentaires constatés autour des lieux loués n’ont pas eu d’incidence sur le commerce exercé, étant éloignés de plus de 200 mètres de la boulangerie et plusieurs concurrents étant présents dans un rayon de 400 mètres, contrairement aux affirmations de l’expert et selon procès-verbal dressé le 11 avril 2016.

Elle sollicite un loyer renouvelé fixé à la somme 11 526 euros/an.

En l’absence d’éléments nouveaux, la cour renvoie à la motivation pertinente du jugement entrepris qui, après avoir rappelé les textes applicables et avoir considéré, sans être contredit par les parties de ce chef, que le bail était renouvelé par l’effet de l’exercice par le bailleur de son droit de repentir selon acte d’huissier du 26 novembre 2015, à compter du même jour, aux clauses et conditions du bail expiré du 1er janvier 2002, sauf le prix, a écarté le motif du déplafonnement du loyer tiré de la modification des facteurs locaux de commercialité.

Il n’est pas nécessaire d’ordonner une expertise judiciaire, celle-ci étant sollicitée à titre subsidiaire par le bailleur qui n’invoque pas en cause d’appel de nouveaux motifs de déplafonnement pendant la période du bail expiré autres que ceux examinés par l’expert judiciaire, étant relevé que le procès-verbal du 11 avril 2016, établi à la demande du preneur, dont fait état le bailleur à l’appui de sa demande est postérieur à la date de renouvellement du bail et qu’il ne constitue en tout état de cause pas un élément en faveur du déplafonnement allégué puisqu’il relève au contraire la présence de commerces similaires concurrents.

Il s’ensuit que c’est de manière justifiée que le jugement de première instance a considéré qu’en l’absence de motif de déplafonnement, le prix du bail renouvelé doit être fixé en application de l’indice du coût de la construction, tel que visé au bail et à l’article L. 145-34 du code de commerce dans sa version applicable à la présente instance, introduite avant la loi du 18 juin 2014.

Le bail s’étant renouvelé le 26 novembre 2015, le loyer plafonné HT/HC doit être calculé à cette date en fonction des indices applicables, soit un loyer de 16 464 euros (arrondi) :

1614 (indice 2e trimestre 2015)

11 597,45 euros (loyer au 1er janvier 2002) x -----------------------------------------

1139 (indice 2e trimestre 2001)

Toutefois le bailleur sollicitant, à titre infiniment subsidiaire, que le loyer du bail plafonné soit fixé à la somme de 15 823 euros, correspondant au montant du loyer retenu par le jugement entrepris, le loyer sera fixé à cette somme.

Il convient par conséquent de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a fixé le loyer du bail renouvelé à compter du 26 novembre 2015 à la somme annuelle de 15.823 euros en principal, hors taxes et hors charges.

Il sera également confirmé sur les intérêts par renvoi à la motivation du jugement.

Sur l’indemnité d’occupation pour la période allant du 1er octobre 2011 au 25 novembre 2015

La SARL LA MONTMARTOISE soutient que, contrairement à ce que le jugement de première instance a retenu, la demande de la SCI ALJ aux fins de condamnation au paiement de l’indemnité d’occupation concernant la période intermédiaire de maintien dans les lieux est prescrite comme n’ayant été formée que le 11 mars 2016, alors que le point de départ du délai de prescription biennale de l’action en fixation de l’indemnité d’occupation a couru à compter du 25 avril 2013, date à laquelle le tribunal a consacré le principe du droit à une indemnité d’éviction.

La SCI ALJ réplique que le délai de prescription n’a pas commencé à courir à compter du 25 mars 2013, la décision n’ayant pas été signifiée, mais à compter de l’exercice de son droit de repentir le 26 novembre 2015 de sorte que sa demande n’est pas prescrite et elle ajoute 'à titre superfétatoire’ qu’elle avait introduit une demande en fixation de l’indemnité d’occupation dans ses conclusions du 30 avril 2012 dans la procédure RG11/1481.

Par application des articles L. 145-28 alinéa 1 et L. 145-60 du code de commerce, l’indemnité d’occupation due pendant la période qui s’écoule entre l’expiration du bail et l’exercice du droit de repentir est exclusivement statutaire et l’action en fixation et en paiement de cette indemnité d’occupation est soumise à un délai de prescription de deux ans.

Il est constant que le délai de l’action en paiement de l’indemnité d’occupation fondée sur l’article L. 145-28 du code de commerce ne peut commencer à courir avant le jour où est définitivement consacré dans son principe, le droit du preneur au bénéfice d’une indemnité d’éviction, soit par une décision définitive, soit à la suite de l’exercice par le bailleur de son droit de repentir.

La cour relève à titre liminaire que par conclusions du 30 avril 2012 notifiées par la SCI ALJ dans le cadre de la procédure par laquelle elle contestait le droit à une indemnité d’éviction pour motifs graves et légitimes et qui a donné lieu au jugement mixte du 25 juin 2013, la SCI ALJ a sollicité l’expulsion de la locataire ainsi que le paiement d’une indemnité d’occupation de droit commun de sorte qu’elle ne peut prétendre avoir ainsi formé une indemnité d’occupation statutaire, les deux indemnités étant de nature différente.

La cour renvoie, en l’absence de moyens nouveaux, à la motivation pertinente du jugement entrepris qui a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription pour la période ayant couru entre le 1er octobre 2011 et le 25 novembre 2015.

La SCI ALJ considère que l’abattement de 40% retenu par le juge est excessif alors que la SARL LA MONTMARTOISE ne justifie d’aucune perturbation de son activité ; qu’il doit être fait application du coefficient d’usage de 10% de sorte que l’indemnité d’occupation s’élève à la somme de 28 530 euros HT/HC/an. Elle ajoute que ladite indemnité doit faire l’objet d’une indexation annuelle.

La SARL LA MONTMARTOISE réplique que l’abattement doit être de 50% compte tenu du fait qu’elle a été mise pendant plus de 4 ans et demi dans l’impossibilité de faire les investissements nécessaires pour maintenir et développer son activité en raison de l’incertitude dans laquelle elle se trouvait.

S’agissant de la fixation de l’indemnité d’occupation, la cour observe que les parties ne discutent pas que la période de fixation de l’indemnité d’occupation est celle ayant couru entre le 1er octobre 2011 et le 25 novembre 2015.

La cour renvoie à la motivation détaillée du jugement entrepris qui a, pour la période intermédiaire ayant couru entre le 1er octobre 2011 et le 25 novembre 2015, considéré que la valeur locative de

renouvellement, hors abattement, s’établit à la somme de 31.735 euros annuelle en principal, ce que les parties ne contestent pas.

Il est d’usage que l’abattement pour précarité soit de 10%, sauf circonstances particulières.

La durée de la procédure qui a entraîné l’impossibilité de faire des investissements pendant la période d’incertitude générée par le congé et le différentiel important entre le montant du loyer du bail expiré, celui du loyer de renouvellement et le montant de la valeur locative résultant du refus de renouvellement du bail et de l’exercice du droit de repentir justifient un abattement de 20 % sur la valeur locative, le pourcentage de 40% étant manifestement excessif par rapport aux usages et aux circonstances de l’espèce.

Il s’ensuit que l’indemnité d’occupation sera fixée à la somme annuelle de 25 388 euros HT/HC de sorte que le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

S’agissant de l’indexation de ladite indemnité d’occupation, la cour renvoie à la motivation pertinente du jugement de première instance qui a écarté à bon droit cette demande.

Pour la période considérée allant du 1er octobre 2011 au 25 novembre 2015, la locataire est en conséquence, redevable de la somme de 101 552 euros (25 388 euros x 4 ans), outre 2 115,66 euros pour le mois d’octobre 2015 (25 388 /12) et 1 763,05 euros prorata temporis pour le mois de novembre 2015 [(2 115,66 euros/30) x 25], soit la somme totale de 105 430, 71 euros en deniers ou quittances.

Par conséquent le jugement qui a condamné la locataire à régler au bailleur la somme de 79.073,04 euros au titre de l’indemnité d’occupation sera infirmé sur le quantum de cette condamnation.

Par application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, la demande du bailleur de faire application des intérêts à taux légal à la condamnation de la société LA MONTMARTOISE au titre de l’indemnité d’occupation à compter de la signification du

présent arrêt sera accueillie, s’agissant d’une condamnation en paiement, de sorte que le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les frais de l’article L 145-58 du code de commerce

La SARL LA MONTMARTOISE sollicite l’infirmation du jugement qui l’a déboutée de sa demande au titre de l’article L 145-58 du code de commerce, exposant avoir réglé dans le cadre de la procédure la somme de 11 467,67 euros, somme contestée par la SCI ALJ au motif qu’il n’en est pas justifié.

Il résulte des dispositions de l’article L. 145-58 du code de commerce que l’exercice du droit de repentir entraîne l’obligation pour le bailleur de supporter les frais de la procédure, c’est-à-dire l’ensemble des frais, qu’ils soient constitués de frais taxables ou d’honoraires d’avocat, exposés par le locataire jusqu’au terme de l’instance pendant laquelle le repentir est exercé.

Il a été versé aux débats les factures relatives aux honoraires d’avocat et d’huissier réglés par la SARL LA MONTMARTOISE à hauteur de la somme de 11 467,67 euros TTC au titre de la procédure de première instance, lesdites factures concernant la période 2011-2017. Il est ainsi justifié conformément aux dispositions de l’article précité que ces sommes ont été engagées dans le cadre de l’instance pendant laquelle le repentir a été exercé. Il sera toutefois déduit la somme de 5 000 euros déjà accordée par le jugement entrepris au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La demande de la SARL LA MONTMARTOISE sera donc accueillie à hauteur de 6 467,67 euros

sur le fondement de l’article L. 145-58 du code de commerce.

Sur les demandes accessoires

Le jugement entrepris étant en partie confirmé au principal, il le sera également sur la condamnation de la SCI ALJ au titre de l’article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens incluant les frais d’expertise judiciaire, celle-ci, auteur du congé refusant le renouvellement du 30 mars 2011, étant à l’origine de la procédure.

L’équité commande en cause d’appel de condamner la SCI ALJ à régler à la SARL LA MONTMARTOISE la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Eu égard à l’exercice du droit de repentir par la SCI ALJ, celle-ci sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris sauf sur le montant de l’indemnité d’occupation pour la période ayant couru entre le 1er octobre 2011 et le 25 novembre 2015, le montant de la condamnation de la SARL LA MONTMARTOISE en deniers et quittances au titre de ladite indemnité, et en ce que la société LA MONTMARTOISE a été déboutée de sa demande en paiement dirigée contre la SCI ALJ sur le fondement de l’article L 145-58 du code de commerce, et en ce que la SCI ALJ a été déboutée de sa demande d’intérêts au taux légal sur la condamnation en paiement de l’indemnité d’occupation;

L’infirme sur ces points,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe à la somme de 25 388 euros /an/HT/HC le montant de l’indemnité d’occupation dont la société LA MONTMARTOISE est redevable durant la période allant du 1er octobre 2011 au 25 novembre 2015,

Condamne la société LA MONTMARTOISE à payer à la SCI ALJ à ce titre la somme totale de 105 430, 71 euros HT/HC, en deniers ou quittances, les versements opérés entre le 1er octobre 2011 et le 25 novembre 2015 devant venir en déduction, outre les intérêts au taux légal à compter de la signification de l’arrêt ;

Condamne la SCI ALJ à payer à la société LA MONTMARTOISE la somme de 6 467,67 euros sur le fondement de l’article L 145-58 du code de commerce,

Rejette les autres demandes,

Condamne la SCI ALJ à payer à la société LA MONTMARTOISE la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SCI ALJ aux dépens d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 10 juin 2020, n° 18/09892