Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 22 novembre 2018, n° 17/02416

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, ch. soc., 22 nov. 2018, n° 17/02416
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 17/02416
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

DT/CD

Numéro 18/04348

COUR D’APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 22/11/2018

Dossier : N° RG 17/02416

Nature affaire :

Demande d’indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Affaire :

A B

C/

SARL LES JARDINS D’IROISE DE PAU

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 22 Novembre 2018, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 03 Septembre 2018, devant :

Madame X, magistrat chargé du rapport,

assistée de Madame HAUGUEL, greffière.

Madame X, en application des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :

Madame THEATE, Présidente

Madame X, Conseiller

Madame NICOLAS, Conseiller qui en ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTE :

Madame A B

[…]

[…]

Comparante, assistée de Maître KHERFALLAH, avocat au barreau de PAU

INTIMÉE :

SARL LES JARDINS D’IROISE DE PAU

prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Comparante en la personne de son Directeur, assisté de Maître AZAVANT, avocat au barreau de PAU et Maître SOURD, avocat au barreau de BORDEAUX

sur appel de la décision

en date du 12 JUIN 2017

rendue par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE PAU

RG numéro : F 16/00252

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La SARL Les Jardins d’Iroise de Pau a pour activité l’exploitation d’une maison de retraite.

Elle emploie plus de 11 salariés et relève de la convention collective de l’hospitalisation privée du 18 avril 2002.

Par contrat à durée déterminée du 1er octobre 2009 au 31 octobre 2009, Madame A B a engagé par la société MEDOTELS en qualité d’aide-soignante affecté à la maison de retraite Hotelia Lorca à Pau.

Elle a conclu un contrat de travail à durée indéterminée, avec le même employeur, le 2 décembre 2009 pour un emploi d’aide-soignante de nuit prenant effet à cette date.

Cet établissement pour personnes âgées a été acheté le 1er juillet 2013, par le groupe CGMR et renommé 'les Jardins d’Iroise'.

L’exécution du contrat de travail de Madame A B a été émaillée d’accident du travail et d’arrêts maladie à compter du mois de mars 2010.

Le 18 novembre 2013, Madame A B a fait l’objet d’un avertissement motivé par des dysfonctionnements consécutifs au décès de l’une des résidentes.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 mai 2015, la salariée a été convoquée à se présenter le 9 juin 2015 à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

La SARL Les Jardins d’Iroise de Pau lui a notifié son licenciement pour absence prolongée entraînant des perturbations dans le fonctionnement de l’établissement, par lettre recommandée avec accusé de réception datée du 16 juin 2015.

Madame A B a saisi le conseil de prud’hommes de Pau le 19 mai 2016, pour faire juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse, annuler l’avertissement du 18 novembre 2013, et obtenir la condamnation de l’employeur au paiement de rappel de salaire, indemnité de congés payés documents de rupture outre le versement d’une indemnité de procédure et l’exécution provisoire du jugement intervenir.

La tentative de conciliation ayant échoué, l’affaire et les parties ont été renvoyées devant la formation de jugement, où la requérante a maintenu ses prétentions initiales et présenté de nouvelles demandes.

La SARL Les Jardins d’Iroise de Pau a conclu au débouté de Madame A B de l’intégralité de ses prétentions, à sa condamnation aux dépens et au versement d’une indemnité de procédure.

Par jugement du 12 juin 2017, auquel il conviendra de se reporter pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, le conseil de prud’hommes de Pau, section activités diverses, statuant en formation paritaire, a :

* dit que le licenciement de Madame A B est justifié ;

* dit que l’employeur a rempli ses obligations en matière de santé sécurité au travail ;

* dit que Madame A B était remplie de ses droits en matière de travail de nuit et de compléments de rémunération liés à ses arrêts maladie ;

* dit qu’il n’y a pas eu de travail dissimulé ;

* dit que Madame A B a subi des retenues anormales liées à ses arrêts de travail consécutifs à des accidents du travail ;

* dit que le décompte des congés payés présente des erreurs et incohérences manifestes et que Madame A B doit donc être remplie de ses droits ;

* condamné en conséquence la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à verser à Madame A B les sommes suivantes :

—  50,92 € à titre de rappel de salaire au titre de l’accident du travail du 31 décembre 2013 ;

—  963,33 € à titre de rappel de salaire au titre de la période du 1er au 26 janvier 2014 (accident du travail) ;

—  695,55 € à titre de rappel de salaire au titre de la période du 21 août au 31 août 2014 (accident du travail) ;

—  64,08 € en remboursement de frais de taxi liés à l’accident du travail du 31 décembre 2013 ;

—  6.085,78 € au titre de rappel de congés payés ;

—  533,52 € au titre du complément d’indemnité de licenciement ;

—  1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

* condamné la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à rectifier les documents sociaux conformément au jugement ;

* ordonné l’exécution provisoire de la décision dans la limite et par l’effet de l’article R. 1454-28 du code du travail ;

* débouté les parties pour le surplus ;

* dit que les dépens sont à la charge de la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau.

**************

Par déclaration transmise par voie électronique le 3 juillet 2017, l’avocat de Madame A B a fait appel de ce jugement, au nom et pour le compte de sa cliente à qui il avait été notifié le 15 juin 2017.

**************

Par conclusions récapitulatives transmises par voie dématérialisée le 6 avril 2018, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, Madame A B demande à la cour de confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

* condamné la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à lui verser les sommes suivantes :

—  50,92 € à titre de rappel de salaire au titre de l’accident du travail du 31 décembre 2013 ;

—  963,33 € à titre de rappel de salaire au titre de la période du 1er au 26 janvier 2014 (accident du travail) ;

—  695,59 € à titre de rappel de salaire au titre de la période du 21 août au 31 août 2014 (accident du travail) ;

—  64,08 € en remboursement de frais de taxi lié à l’accident du travail du 31 décembre 2013 ;

Y ajoutant :

* de condamner la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à lui verser les sommes suivantes :

—  4.841,96 € à titre de régularisation des sommes dues lors des arrêts de travail pour la période du 21 avril 2012 au 6 octobre 2013 ;

—  8.758,40 € au titre de rappel de congés payés ;

* de l’infirmer pour le surplus ;

Et statuant à nouveau :

* de condamner la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à lui verser les sommes suivantes :

—  1.569,71 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect des contreparties liées au travail de nuit (article 53-3 de la Convention collective) ;

—  600 € à titre de rappel de prime de sécurité de nuit ;

—  13.017,36 € sur le fondement des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail ;

—  10.000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect répété de l’obligation de sécurité de résultat ;

—  30.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;

—  831,66 € de complément d’indemnité de licenciement ;

* de condamner la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à produire sous astreinte de 80 € par jour de retard le registre du personnel ainsi que les bulletins de paie des mois de juin et de juillet 2015, et à défaut, de condamner la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à lui verser la somme de 15.000 € à titre de dommages-intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles de priorité de reclassement ;

* de condamner la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à rectifier le certificat de travail sous astreinte de 80 € par jour ;

* de condamner la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à lui verser une somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

* de fixer la moyenne des rémunérations à 2.169,56 € bruts ;

* de condamner la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau aux entiers dépens.

**************

Par conclusions transmises par voie dématérialisée le 6 juin 2018 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau demande à la cour de confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

* débouté Madame A B de ses demandes ;

* de juger en conséquence parfaitement valable le licenciement de Madame A B

* de l’infirmer pour le surplus ;

Et statuant à nouveau :

* de juger que Madame A B a été parfaitement remplie de ses droits en matière de congés payés, de salaire à la suite de ces arrêts de travail et quant à son indemnité de licenciement ;

* de débouter Madame A B de l’intégralité de ses demandes ;

* de la condamner au paiement d’une indemnité de procédure de 1.500 € outre les dépens.

**************

L’ordonnance de clôture porte la date du 3 août 2018.

**************

MOTIFS

Sur la demande d’annulation de l’avertissement

Madame A B ne reprend pas devant la cour, cette demande jugée prescrite par le conseil de prud’hommes. Le jugement est en conséquence confirmé de ce chef conformément à la demande qui en est faite par la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau.

Sur les rappels de salaire en complément des indemnités journalières

Madame A B expose qu’elle n’a eu de cesse d’alerter son employeur et le service comptabilité sur les décalages importants dans le versement des sommes complémentaires des indemnités journalières versées par la sécurité sociale : le plus souvent de deux à trois mois, ce décalage ayant même atteint 12 mois pour le complément des indemnités journalières de juillet 2013. Il en est résulté des erreurs et incohérences. Ainsi, selon la salariée, un courriel adressé le 19 mai 2014 par l’organisme complémentaire Malakoff Mederic démontrerait que des sommes ont été perçues en trop par l’employeur pour un total de :

* 2.896,61 € pour la période du 23 juillet 2012 au 30 juin 2013 ;

* 1.945,35 € pour la période du 1er juillet 2013 au 30 novembre 2013 ;

soient un total dû par l’employeur à ce titre de 4.841,96 €.

Elle conteste la prescription opposée par l’employeur, en faisant valoir que n’ayant pris connaissance de ses droits qu’à la lecture du courriel du 19 mai 2014, elle disposait d’un délai expirant le 19 mai 2017 pour agir. Or, l’action a été engagée le 19 mai 2016.

La SARL Les Jardins d’Iroise de Pau oppose en effet la prescription en invoquant les dispositions de l’article L. 3245-1 du code du travail et la prescription triennale qui conduit à rejeter toute demande antérieure au 9 mai 2013. Subsidiairement, l’employeur soutient que tous les compléments de salaires dus ont été versés.

Sur la prescription, et les demandes de Madame A B portant sur des sommes ayant la nature de créances salariales, le délai de prescription est de trois ans. L’article L. 3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi du 14 juin 2013, dispose en effet :

« L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat ».

Il ressort de ces dispositions que les demandes en rappel de salaire sont recevables en tant qu’elles portent sur les trois années antérieures à la rupture du contrat, soit en l’occurrence jusqu’au 6 juin 2012.

La demande de Madame A B portant sur la période du 23 juillet 2012 au 30 juin 2013 (2.896,61 €), puis du 1er juillet 2013 au 30 novembre 2013 (1.945,35 €) est recevable.

Elle ne se fonde cependant sur aucun décompte précis et détaillé – et donc matériellement vérifiable par l’employeur – et repose seulement sur un courriel ambigu et tout aussi peu détaillé, adressé le 19 mai 2014 par l’organisme prestataire de prévoyance aux services paye de l’employeur (pièce n° 27 de la salariée) pour l’informer qu’à la suite d’une modification, ' par la Sécurité sociale' du taux des indemnités journalières depuis le 21 avril 2012 il y aurait :

* 'pour la période du 23 juillet 2012 au 30 juin 2013, un trop-perçu de 2.896,61 € au titre de KORIAN VILLA LORCA' (précédent employeur de Madame A B) ;

* 'à compter du 1er juillet 2013 jusqu’au 30 novembre 2013 – notre intervention s’établirait à 1.945,35 € pour le compte des JARDINS D’IROISE DE PAU'.

Ce document ne permet ni de connaître les modalités de calcul de ce trop-perçu, ni d’en vérifier le montant pas même de déterminer l’identité de son débiteur ou de son bénéficiaire.

Sur les rappels de rémunération liés aux suspensions du contrat de travail pour accident du travail

Madame A B expose sans être contredite qu’ayant été victime d’un accident du travail le 31 décembre 2013, l’employeur a retenu la somme de 85,38 € sur son salaire de décembre pour cette absence.

La SARL Les Jardins d’Iroise de Pau ne conteste pas le droit pour la salariée de percevoir l’intégralité de sa rémunération le jour de travail au cours duquel l’accident s’est produit. Or, il résulte du bulletin de salaire du mois de janvier 2014 que les 'heures d’absence accident du travail du 31-12' soit 7 heures ont été décomptées du salaire du à la salariée représentant une somme de 85,38 € (7 x 12,197).

Ayant partiellement rétabli la salariée dans ses droits (34,96 € payés pour 3 heures), un solde de 50,92 € reste dû par l’employeur qui ne le conteste pas sérieusement. La décision du conseil de prud’hommes est en conséquence confirmée de ce chef.

Arguant de ce que l’employeur ne peut appliquer de jours de carence en cas d’accident du travail, Madame A B ajoute qu’une somme de 963,33 € a été irrégulièrement déduite de la rémunération due pour le mois de février 2014 pour lequel elle n’a perçu aucun montant, dans la mesure où la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau a également prélevé l’intégralité d’une avance sur salaire qui lui avait été consentie (500 €).

La SARL Les Jardins d’Iroise de Pau rétorque que l’intégralité des compléments de salaire ont été versés et que la salariée a été remplie de ses droits.

Il ressort du bulletin de salaire du mois de février 2014 que l’intégralité des heures d’absences du 1er janvier 2014 au 26 janvier 2014 a été déduite de la paye du mois de février 2014 (outre l’acompte de 500 € du mois de septembre 2013).

Le prélèvement de la somme de 500 € n’est pas discutable s’agissant d’une avance sur salaire consentie par l’employeur dont Madame A B conteste seulement les modalités de remboursement et non l’obligation de le déduire.

Quant à la déduction de la somme de 963,33 €, il apparaît qu’elle a été compensée par le versement d’indemnités journalières de sécurité sociale sans délai de carence, (38,84 € par jour sur 26 jours soit 1.009,84 € sans application de charges sociales hors CSG et CRDS) auxquelles se sont ajoutées des indemnités de prévoyance (pièce 12 intimée) pour un montant de 399,09 €, si bien que la salariée ne peut prétendre au versement de la somme réclamée (963,33 €).

Il en va de même de la somme de 695,55 € prétendument relative à des prélèvements consécutifs à l’accident du travail du 21 août 2014 qu’elle n’explique pas et dont elle ne justifie pas, le bulletin de

salaire du mois de septembre 2014 qu’elle invoque n’étant, contrairement à ses allégations, pas produit et aucune vérification ne pouvant être faite à partir de pièces qui ne sont ni précisément numérotées, ni reprises au bordereau.

Au demeurant, les plaintes récurrentes régulièrement formulées par Madame A B auprès du service paye de la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à partir de 2012, dont la précision permet de dire qu’elles faisaient suite à un examen attentif de ses relevés et bulletins de salaire, ont toutes trait à des retards de versement considérés comme injustifiés et non à des défauts de paiement, et ce, même après que la salariée ait pris connaissance de la lettre du 19 mai 2014.

Il en résulte que ces demandes ne sont pas fondées, à l’exception du solde de 50,92 €. Le jugement est infirmé en ce qu’il a les déclarées pour partie irrecevables, pour parties fondées. Les demandes de rappels de salaire en complément d’indemnités journalières sont déclarées recevables mais mal fondées et Madame A B en est déboutée pour le tout.

Quant aux 64,08 € de frais de taxi correspondant à une prise en charge du 22 août 2014, à 1 h 40 qui ne sont pas 'prescrits', comme le soutient sans autre développement l’employeur, ils ne sont pas non plus justifiés sachant que le certificat d’accident du travail date du 21 août 2014 et que rien n’établit que ce déplacement était lié au travail.

Le jugement entrepris est infirmé de l’ensemble de ces chefs, les demandes de Madame A B étant jugées dans leur ensemble recevables et mal fondées, en sorte qu’il y a lieu de l’en débouter, sous réserve du solde restant dû par l’employeur au titre de l’accident du travail du 31 décembre 2013 (50,92 €).

Sur le rappel de congés payés

Madame A B soutient qu’elle a été privée de plusieurs jours de congés payés :

* 6 jours supprimés en mai 2012, (cette demande se heurte cependant à la prescription) soit l’équivalent de 600,60 € ;

* 8 jours de congés payés en avril 2014 ;

* 12 jours de congés payés en juin 2015 ;

* 44 jours de congés payés en août 2015 ;

* jours de congés durant la période de préavis.

La SARL Les Jardins d’Iroise de Pau s’oppose à cette demande en se référant aux dispositions de la Convention collective relative au décompte des jours de congés pendant les périodes d’arrêt pour maladie d’origine non professionnelle. Elle en déduit même un trop-perçu par Madame A B à ce titre.

Les dispositions applicables sont celles énoncées à l’article 56 de la Convention collective applicable selon lesquelles :

'Sont considérés comme périodes de travail effectif pour le calcul de la durée des congés payés, outre les périodes assimilées par la loi à du travail effectif :

- (…) ;

- les absences justifiées par la maladie non professionnelle :

- dans la limite des 30 premiers jours continus ou non pendant la période de référence ;

- au-delà de ces 30 premiers jours considérés comme travail effectif, l’absence donne droit à la moitié du congé auquel le salarié aurait pu prétendre s’il avait travaillé pendant cette période.

En tout état de cause, le calcul du droit à congé cesse au 1er juin de chaque année, si bien que les droits ne seront reconstitués que pour autant que le salarié ait retravaillé au préalable pendant au moins 1 mois'.

S’agissant d’abord des 8 jours imputés en avril 2014, sur le bulletin de salaire du mois de mai 2014 est mentionnée une absence congés payés de 12 jours dont la salariée ne conteste pas avoir effectivement bénéficié, de sorte que le solde passant de 38 à 26 jours est cohérent. En revanche 24 jours sont ensuite décomptés sans explication et correspondent au courriel (pièce 25 appelante) indiquant une mise à jour du solde alors que selon le décompte d’acquisition des congés payés versé aux débats par l’employeur (pièce 12) du 1er juin 2012 au 31 mai 2013 les droits à congés payés correspondaient à 16,25 jours, auxquels s’ajoute un solde de 8 jours au titre de l’exercice antérieur (le plafond annuel étant de 30 jours acquis) soit 24,25 jours au total. Ainsi même en déduisant les 12 jours pris du 2 au 15 avril 2014, la salariée pouvait prétendre à un solde de congés payés et sa demande s’agissant de 8 jours doit être accueillie.

S’agissant des jours de congés payés acquis sur la période du 1er juin 2013 au 31 mai 2014, il ressort du décompte tenu par l’employeur ainsi que des bulletins de salaire versés aux débats qu’au 31 mai 2015, la salariée disposait d’un solde de 18 jours. Selon le même décompte du 1er juin 2014 au 31 mai 2015, elle avait acquis 22,5 jours arrondis à 23 jours. Au 1er juin 2015 elle cumulait ainsi 41 jours de congés payés qui n’ont pas été réglés. En revanche, à partir de cette date, la salariée n’a plus travaillé en raison d’une absence pour maladie non professionnelle, si bien qu’en application de la convention collective aucun droit n’est à reconstituer sur la période du 1er juin 2015 au 16 août 2015.

En conséquence, il convient de condamner l’employeur à régler à la salariée une indemnité compensatrice de 49 jours de congés payés (41 + 8) qui correspond à un quantum journalier de 100,10 €, lequel n’est pas discuté par l’intimée, soit à la somme globale de 4.904,90 €.

Sur les contreparties du travail de nuit

Madame A B expose tout d’abord qu’au-delà de la majoration de salaire pour travail de nuit, la Convention collective prévoit des repos compensateurs dont elle n’a pas bénéficié et qu’elle évalue à 109,77 heures représentant une somme de 1.569,71 € (109,77 heures x 14,30 €). Elle souligne qu’en méconnaissance de la Convention collective ces temps de repos compensateurs, assimilés à du temps de travail effectif, auraient dû être comptabilisés sur les bulletins de salaire ce qui n’a pas été le cas.

Pour conclure au rejet de cette demande, la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau fait valoir d’une part, que les contreparties prévues par la Convention collective nationale ne sont applicables qu’en cas de travail effectif ; d’autre part, que la Convention collective nationale ne prévoit pas de contrepartie financière mais une prise de repos effective. Or, Madame A B réclame cette contrepartie pour des périodes au cours desquelles elle était en maladie, et ne démontre pas qu’elle n’a pas bénéficié des repos qu’elle revendique. Elle soutient surtout que les prises de repos cumulées doivent faire l’objet d’une demande spécifique que Madame A B n’a jamais présentée et qu’en tout état de cause, au regard de son temps de travail effectif (6 mois sur trois ans) les temps de repos qu’elle réclame ne peuvent dépasser 23,5 heures.

L’article 53.3 de la Convention collective nationale dispose :

'Indépendamment de l’indemnité de sujétion pour travail de nuit, telle que définie par l’article 82.1 de la convention collective, il sera accordé, lorsque le travailleur de nuit au sens de l’article 53.1.2 a au moins accompli 3 heures de travail de nuit, par heure, un temps de repos équivalant à 2,50 % de chacune des heures réalisées entre 21 heures et 6 heures.

Ce temps de repos en compensation, assimilé à du temps de travail effectif, sera comptabilisé sur le bulletin de salaire et pourra être pris par journée ou demi-journées lorsque le repos acquis représentera une journée correspondant à la durée quotidienne de travail de l’intéressé. Dans cette hypothèse, le salarié en fera la demande moyennant le respect d’un délai de prévenance de 15 jours ouvrés, en précisant la date et la durée du repos souhaité. Sauf nécessité du service, le repos sera accordé à la date souhaitée par le salarié'.

Contrairement à ce que soutient Madame A B, le solde CTN (contrepartie travail de nuit) en juin 2013 est de 13,55 et non de 83,55 heures, et selon le tableau récapitulatif (pièce 30 appelante) de 26,69 heures au 31 janvier 2014. Les dispositions de la Convention collective relatives à cette contrepartie visent bien l’accomplissement et partant la réalisation 'effective’ d’heures de nuit, en sorte que les semaines où la salariée a été absente, elle ne peut y prétendre. Au surplus, le relevé qu’elle produit présente des incohérences, à titre d’exemple pour les mois d’avril et mai 2014, elle réclame 3,75 et 2,25 heures de CTN alors que suivant ce document elle a accompli le même nombre d’heures de nuit (pièce 49 appelante). Il en résulte que seules les 26,69 heures mentionnées au tableau récapitulatif sont démontrées et doivent faire l’objet d’une indemnisation dans la mesure où l’employeur n’établit pas que la salariée a été en mesure de liquider ces droits.

La SARL Les Jardins d’Iroise de Pau est en conséquence condamnée à régler à Madame A B la somme de 306,61 € en considération du taux horaire de base, à titre de dommages et intérêts en réparation des repos non pris en contrepartie du travail de nuit. Le jugement entrepris est infirmé en ces dispositions.

Madame A B relève ensuite qu’elle n’a pas perçu la prime spécifique dite de 'sécurité nuit’ insérée dans son contrat de travail par avenant du 23 juillet 2014, avec effet rétroactif au 1er avril 2014, d’un montant de 75 € bruts par mois, et 's’interroge’ sur la validité de cette clause qui introduit une discrimination liée à la maladie.

La SARL Les Jardins d’Iroise de Pau se fonde sur l’avenant qui stipule que :

'Ce montant sera ainsi proratisé et cas d’absence du salarié au cours du mois pour quelque motif que ce soit (congés payés, congés autres, maladie, etc)',

en rappelant que la salariée a accepté cette clause plus favorable que les dispositions de la Convention collective applicable.

Le 23 juillet 2014, les parties ont en effet signé un avenant au contrat de travail relatif au travail de nuit destiné à remplacer, après consultation du CHSCT et des délégués du personnel, les usages en vigueur jusqu’à cette date, par l’adoption de mesures plus avantageuses.

S’agissant de la prime spécifique dite 'de sécurité nuit', elle est ainsi rédigée :

' Le présent avenant a également pour objet de prévoir, à effet rétroactif du 1er avril 2014 le versement d’une prime spécifique dite « sécurité nuit », laquelle sera d’un montant de 75 € bruts mensuels pour un mois passé en poste de nuit à temps plein (pour 151,67 heures de travail mensuelles). Ce montant sera ainsi proratisé en cas d’absences du salarié au cours du mois pour quelque motif que ce soit (congés payés, congés autre, maladie, etc), de même qu’en cas de travail à temps partiel (…)'.

Il convient en premier lieu, d’écarter le caractère prétendument discriminatoire de la clause litigieuse

en constatant que la proratisation de la prime n’est pas liée à la maladie mais s’applique indistinctement à toute forme d’absence, la proratisation trouvant en outre sa justification dans l’objet même de la prime en cause, liée à l’exercice effectif du travail.

De plus, Madame A B ne conteste pas le caractère globalement plus favorable de la clause contractuelle par rapport aux dispositions spécifiques de la convention collective relatives aux indemnités pour travail de nuit (article 82.1 de la Convention collective de l’hospitalisation privée du 18 avril 2002).

Enfin, il ressort de la lecture des bulletins de salaire que la salariée a perçu la prime de nuit lorsqu’elle a effectivement travaillé.

Le conseil des prud’hommes qui a débouté Madame A B de cette demande est en conséquence confirmé.

En troisième lieu, l’appelante déduit de l’article 53.3 de la convention collective précité ('Ce temps de repos en compensation, assimilé à du temps de travail effectif, sera comptabilisé sur le bulletin de salaire') qu’en ne faisant pas figurer ces temps de repos sur ses bulletins de salaire, l’employeur s’est rendu coupable de travail dissimulé. Il en va de même de l’ensemble des compléments de salaires, congés payés, et prime de sécurité qui n’ont pas été payés et qui par suite ne figure pas sur ses bulletins de salaire. Selon Madame A B, ces omissions qui ont pour objet de faire échapper l’employeur aux charges salariales correspondantes, sont certainement intentionnelles.

Outre le caractère infondé de ces prétentions, l’employeur fait observer que la sanction de l’article L. 8221-5 du code du travail ne s’applique qu’aux heures de travail effectivement accomplies. En tout état de cause, il expose que les bulletins de paie sont réalisés par un cabinet d’expertise comptable et que le caractère intentionnel des omissions éventuellement commises n’est en toute hypothèse pas démontré.

Est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié, le fait pour tout employeur de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie du code du travail.

La dissimulation d’emploi salarié prévue par l’article L. 8221-5 du code du travail n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur s’est intentionnellement soustrait à la déclaration aux organismes de protection sociale ou à l’administration fiscale, ou à la remise du bulletin de salaire, ou a intentionnellement mentionné sur le bulletin de salaire un nombre d’heures de travail inférieur au nombre d’heures effectivement réalisées.

En l’occurrence, le caractère intentionnel des prétendues carences reprochées à l’employeur n’est pas démontré, en sorte que le premier juge doit être confirmé.

Sur les manquements de l’employeur à l’obligation de sécurité de résultat

Madame A B expose que la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau a gravement manqué à cette obligation en ne respectant pas l’amplitude du travail de nuit qui parfois atteignait 11 heures à 12 heures alors que selon l’article L. 3122-34 du code du travail elle ne peut excéder 8 heures.

Si la convention collective (article 53-2) autorise un dépassement jusqu’à 12 h 00 maximum c’est à la condition qu’un accord d’entreprise ait été conclu, à défaut, qu’un vote anonyme ait recueilli la majorité des suffrages exprimés après information et consultation du comité d’entreprise ou à défaut des délégués du personnel. Or, la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau ne justifie d’aucun accord en ce sens.

L’appelante en déduit qu’en dépassant régulièrement la limite des 8 heures de travail de nuit, l’employeur a sévèrement exposé sa santé.

Elle ajoute qu’à compter du 20 octobre 2014, la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau ne lui a plus proposé de visite de reprise alors même que le contrat avait été suspendu pour cause d’accident de travail de plus de 30 jours.

La salariée établit une relation directe entre ces conditions de travail et le burn out, le syndrome anxieux dépressif, la pathologie liée aux troubles musculo squelettiques dont elle est affectée et dont elle considère que l’origine professionnelle ne fait aucun doute.

La SARL Les Jardins d’Iroise de Pau souligne tout d’abord que Madame A B n’a pas repris d’activité professionnelle à partir du 2 août 2014 et n’a pas non plus saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale pour obtenir un complément d’indemnité à la suite d’un accident du travail ou faire requalifier ses arrêts de travail pour maladie non professionnelle en maladie professionnelle. Elle rappelle ensuite que la charge de la preuve incombe à la salariée.

L’employeur fait enfin valoir, à l’instar du conseil de prud’hommes, que la salariée est mal venue à se prévaloir d’une amplitude excessive de travail dans la mesure où les pièces du dossier démontrent qu’en totale méconnaissance de ses obligations, Madame A B a travaillé pour le compte d’un autre établissement, en remplacement et de nuit, alors qu’elle était engagée pour un travail à temps plein vis-à-vis de la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau, ce que la salariée ne conteste pas. Elle en déduit que s’il y a eu dépassement des amplitudes horaires, la responsabilité en incombe exclusivement à l’appelante.

Sur l’absence de visite de reprise, il convient de reprendre le motif retenu par le conseil de prud’hommes selon lequel l’employeur n’a pas l’obligation d’organiser de telles visites tant que le salarié ne reprend pas le travail, ou ne fait pas connaître son intention de le reprendre, ce qui était le cas en l’espèce.

S’agissant des dépassements de l’amplitude du travail de nuit, il ressort des pièces produites non contestées par l’employeur que jusqu’au 1er avril 2014 les salariés avaient un temps de présence de 10 heures pour un temps de travail effectif de 9 heures (ponctué par une heure de pause rémunérée) à partir du 1er avril 2014, le temps de présence est passé à 11 heures coupé par une heure de pause non rémunérée selon l’horaire suivant (pour les AS) : 20 h 30/7 h 30 (voir pièce n° 13 de l’appelante), étant observé que selon la Convention collective (article 53-1-1) :

'Tout travail entre 21 heures et 6 heures est considéré comme travail de nuit'.

Il en découle que l’amplitude légale et conventionnelle de 8 heures de travail de nuit n’a été dépassée ni avant, ni après le 1er avril 2014.

Les plaintes de Madame A B sur l’amplitude jugée excessive du travail de nuit, sont à mettre en relation avec la lettre qu’elle a envoyée le 26 mars 2014 au directeur de l’établissement, dans laquelle, avec trois autres collègues, elle exprimait son opposition à la modification du contrat de travail telle qu’appliquée à partir du 1er avril 2014 pour des raisons exclusivement financières :

'que nous ayons à travailler 1 heure de plus pour l’équilibre des heures avec nos collègues de jours, nous pose aucun souci, mais de là à avoir 1 heure de coupure en plein milieu de la nuit implique une perte de salaire sur les primes de nuit et les compteurs temps de nuit'.

S’agissant enfin, de la dégradation de l’état de santé de la salariée, il ressort des pièces médicales produites, que :

* Madame A B a constamment été déclarée apte à son poste de nuit (sous réserve des restrictions liées à la reprise de l’activité consécutives à un arrêt pour accident de travail : reprise à temps partiel) ;

* les états anxieux constatés chez Madame A B sont liés à des événements familiaux, des difficultés personnelles sur la nature desquelles elle s’est expliquée auprès du directeur de la maison de retraite, et qui sont à eux seuls largement suffisants pour expliquer l’état d’anxiété voire de dépression de la salariée.

Les demandes formées au titre du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité ne sont dès lors pas fondées, et le conseil de prud’hommes est confirmé en ce qu’il en a débouté Madame A B.

Sur le licenciement abusif

Madame A B fait tout d’abord valoir que la lettre de licenciement est imprécise et vague, ce qui constituerait un premier motif de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur le fond ensuite, elle considère que l’employeur ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la désorganisation de l’entreprise causée par ses absences prolongées.

Elle fait enfin valoir que, lorsque l’absence prolongée du salarié pour cause de maladie résulte d’un manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité de résultat, ses conséquences sur le fonctionnement de l’entreprise ne peuvent être invoquées pour justifier son licenciement.

Pour la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau le motif du licenciement est parfaitement explicite, l’employeur considérant ensuite que la désorganisation du service est certainement établie par les attestations qu’il produit. Il conteste enfin, tout manquement à l’obligation de sécurité de résultat, en soulignant que la demande de communication des rapports d’enquête et du CHSCT consécutifs aux accidents de travail de la salariée – demande non reprise dans le dispositif de ses conclusions – est dépourvue de pertinence, plus de cinq ans après l’éventuel dépôt de ces rapports, et Madame A B ne démontrant pas que les conditions étaient réunies pour qu’ils soient établis.

A cet égard, il suffit de rappeler qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, la cour n’a pas à statuer sur les demandes non reprises dans le dispositif des conclusions des parties.

Sur le fond, et si le licenciement d’un salarié en raison de son état de santé ou de son handicap est prohibé par l’article L. 1132-1 du code du travail, il peut être justifié par la situation objective de l’entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l’absence prolongée ou les absences répétées du salarié. Dès lors, la lettre de licenciement doit énoncer expressément la perturbation apportée par l’absence du salarié dans le fonctionnement de l’entreprise et la nécessité de le remplacer définitivement, remplacement qui doit intervenir dans un délai raisonnable après le licenciement.

Si l’absence prolongée, ou les absences répétées du salarié, sont la conséquence d’un comportement imputable à l’employeur, celui-ci ne peut se prévaloir de la perturbation que cette absence a pu causer au fonctionnement de l’entreprise pour procéder au licenciement.

En l’espèce l’article 83-1 second alinéa de la Convention collective dispose :

'Les absences motivées par l’incapacité résultant de la maladie non professionnelle et de l’accident de trajet, justifiées par certificat médical et notifiées par le salarié dans les conditions prévues à l’article 84.1, constituent une simple suspension du contrat de travail pour une période garantie de 6 mois consécutifs ou 180 jours calendaires sur une période de 12 mois consécutifs.

Si l’absence se prolonge au-delà de la durée précitée et dans le cas où, sous peine de compromettre le fonctionnement de l’entreprise ou d’un service, il apparaîtrait indispensable de remplacer effectivement le salarié malade, l’employeur pourra rompre le contrat de travail en respectant la procédure de licenciement prévue aux articles L. 1232-2 et L. 1232-6 du code du travail'.

Contrairement aux allégations de la salariée, la lettre de licenciement du 16 juin 2015 est parfaitement claire sur les motifs du licenciement, à savoir, l’absence prolongée de Madame A B entraînant de sérieuses perturbations dans le fonctionnement de l’entreprise.

L’employeur relève en effet, ce qui n’est pas contesté, que Madame A B était absente de son poste de travail depuis plus de six mois sur les 12 derniers mois consécutifs, soit au-delà de la période de protection d’emploi accordée par la Convention collective de l’hospitalisation privée.

Les perturbations occasionnées par cette absence sont décrites par l’employeur :

— précarité de la situation du personnel remplaçant ;

— complexité des solutions à mettre en place (affectation exceptionnelle des salariés de la structure au poste de nuit, l’embauche de remplaçant en contrat à durée déterminée…) ;

— discontinuité dans la prise en charge des résidents.

Ces difficultés sont corroborées par les attestations produites par la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau :

— attestation de Monsieur C D du 26 septembre 2016 :

'Sur la période de septembre 2014 à août 2015,date à laquelle Madame A B est sortie de mes effectifs, nous avons été en difficultés régulières pour trouver des remplaçants à son poste. En effet, nous étions au courant des prolongations au dernier moment et n’avions pas de nouvelles de sa part. Ainsi, pour faire face au besoin de remplaçants et étant dans l’incapacité de trouver des CDD aide-soignant de nuit, j’ai dû faire appel au personnel de jour dans un premier temps réticent mais qui, par souci de prise en charge des résidents, ont accepté de faire des nuits. E F a pu faire les nuits de septembre 2014 mais pas plus. K L a pu faire 3 semaines en octobre 2014, Marine Y, la fin du mois. Ensuite, G H, CDD, a pu nous prendre quelques dates avant de repartir en Espagne. Marine Y a, malgré ses problèmes de disponibilité, prit la fin des jours de novembre 2014. Sur le début de l’année 2015, étant en grande difficulté pour trouver des remplaçants, I J, maîtresse de maison de Z m’a dépanné en adressant le CV d’une salariée de son pool de remplaçants qui a accepté de prendre les remplacements mais qui était aussi engagée ailleurs. Elle a donc réalisé des remplacements jusqu’à mai 2015 (par intermittence) notamment par le fait est qu’elle n’était jamais sûre que le contrat se prolonge. Elle s’engageait parfois ailleurs. C’est donc Marine Y et une nouvelle remplaçante qui ont assuré juin, juillet et août 2015. (…)'

— attestation de Monsieur K L, qui confirme avoir accepté d’effectuer des remplacements sur le poste de nuit de Madame A B mais déclare avoir ' malgré tout dû faire face à une désorganisation personnelle, ainsi qu’une perturbation dans mon rythme de vie et celui de mon épouse. J’ai accepté de faire seulement des remplacements temporaires car un remplacement de longue durée me pose des soucis sur l’adaptation du rythme jour/nuit'.

— attestation de Madame E F, aide médico-psychologique, qui déclare avoir elle-même effectué des remplacements de sa collègue de travail 'parfois aux pieds levés' : 'ma vie de famille a été grandement désorganisée car j’ai dû prendre une nourrice pour garder ma fille la nuit'.

Pour restreindre leur portée et contester la réalité des perturbations dénoncées, il ne suffit pas à Madame A B de relever que la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau avait l’habitude de recourir à des contrats à durée déterminée ou de remplacement, dans la mesure où il ressort clairement de ces attestations, que les perturbations dans l’organisation du travail dans l’établissement étaient principalement dues à la particularité du poste (travail exclusivement de nuit), au caractère imprévisible de la durée des arrêts de travail, et à la réitération des remplacements que cette imprévisibilité entraînait, a fortiori sur une durée aussi longue que celle du dernier arrêt de la salariée (huit mois) et dont le terme restait encore inconnu à la date de l’entretien préalable.

Il est d’ailleurs établi et non contesté que le poste de travail de Madame A B a été immédiatement occupé par une autre salariée. Il en découle que le motif allégué est parfaitement justifié.

S’agissant enfin du manquement de l’employeur qui serait à l’origine de l’arrêt de travail prolongé et de sa durée, il sera tout d’abord rappelé que les avis d’arrêts de travail n’étaient pas liés à un accident du travail ou une maladie professionnelle, et que la preuve du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité n’a pas été rapportée par la salariée. Quant à la comparaison avec les 'perturbations’ invoquées par les collègues qui ont dû la remplacer à son poste, et dont elle entend se prévaloir pour établir le caractère inacceptable des conditions dans lesquelles elle devait travailler, elle est tout aussi inopérante dès lors que ces salariés effectuaient normalement leur travail pendant la journée, étaient organisés en conséquence, et ont dû supporter ce remplacement en plus de leur activité habituelle.

Il est ainsi démontré que le licenciement de Madame A B repose sur un motif réel et sérieux. Les premiers juges qui ont statué en ce sens sont confirmés.

Sur le complément d’indemnité de licenciement

Le litige a trait au montant de la rémunération moyenne sur la base de laquelle doit être calculée cette indemnité et à la durée de l’ancienneté.

S’agissant tout d’abord de la détermination de la rémunération de référence, elle s’établit selon Madame A B ainsi qu’il suit :

—  1.742,41 € pour le salaire de base ;

—  123,96 € de prime d’ancienneté ;

—  172,35 € de primes de nuit ;

—  75 € de prime mensuelle de sécurité nuit ;

—  55,84 € de prime de dimanche ;

soit un total de 2.169,56 € bruts.

Pour la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau la rémunération moyenne mensuelle de la salariée n’excède pas 1.866,37 € et correspond au salaire de base ajouté à la prime d’ancienneté.

Selon l’article 47 de la Convention collective applicable, le salaire de référence à prendre en considération pour le calcul de cette indemnité est le 1/12e de la rémunération des 12 derniers mois précédant le licenciement ou, selon la formule la plus avantageuse, la moyenne des 3 derniers mois, étant précisé que toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel qui aurait été versée au salarié pendant cette période ne sera prise en compte que prorata temporis.

De plus, lorsque le contrat de travail est suspendu pour cause de maladie, le salaire de référence à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié, celui des 12 ou des 3 derniers mois précédant l’arrêt de travail pour maladie.

Pour le calcul de l’indemnité de licenciement la rémunération brute de référence à prendre en compte n’intègre ni les remboursements de frais et ni les sommes attribuées au titre du régime légal de la participation ou de l’intéressement. Elle inclut en revanche les majorations pour heures supplémentaires, toutes les primes ou gratifications ayant un caractère de salaire, y compris si elles sont exceptionnelle (sauf gratification bénévole), l’équivalent des avantages en nature, les rappels de salaire correspondant à la période de référence, l’indemnité de congés payés rémunérant les congés pris (à l’exclusion des indemnités compensatrice de congés payés et compensatrice de préavis).

Au vu de ces éléments, la rémunération de base pour le calcul de l’indemnité de licenciement due à Madame A B se détermine sur la période du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2014, le dernier arrêt de travail pour maladie débutant le 31 octobre 2014. Sur cette période le salaire doit être reconstitué comme si la salariée avait normalement travaillé (neutralisation des périodes d’absence et reprise des éléments variables tels prime de nuit et heures supplémentaires notamment). Il en résulte que la moyenne la plus élevée est celle des trois derniers mois, et correspond à la somme de 2.113,52 €.

S’agissant de la durée de l’ancienneté, les parties sont également en désaccord puisque l’employeur se réfère à 3,486 années et la salariée 4,92.

Du 2 décembre 2009 (date d’entrée) au 16 août 2015 (date de fin de préavis) la salariée a cumulé 5,71 années d’ancienneté desquelles il convient de déduire en application de l’article 44 de la convention collective applicable les périodes d’absence pour maladie non professionnelle (soit suivant le décompte d’indemnités journalières de sécurité sociale dont il est justifié du 1er au 11 juillet 2010, du 9 au 13 février 2011, du 30 octobre au 20 novembre 2011, du 21 avril 2012 au 30 novembre 2013, du 31 octobre 2014 au 16 août 2015, au total 825 jours). Il s’ensuit que le décompte de l’ancienneté tel qu’il a été réalisé par l’employeur doit être retenu, l’indemnité de licenciement se calculant comme suit : 3,49/5 x 2.113,52 € = 1.475,24 €, alors que la salariée a perçu la somme de 1.301,74 € à ce titre.

La SARL Les Jardins d’Iroise de Pau doit en conséquence être condamnée à verser à Madame A B la somme de 173,50 € à titre de complément de l’indemnité de licenciement, la décision du premier juge étant sur ce montant réformée.

Sur la remise d’un certificat de travail rectifié

Madame A B expose que le certificat de travail qui lui a été remis fait partir son ancienneté à compter du 1er juillet 2013 alors qu’elle a commencé à travailler au service de la maison de retraite le 2 décembre 2009.

Le certificat de travail du 16 août 2015 remis à la salariée, comporte en effet une mention erronée, que ne conteste pas la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau sur la date d’engagement de la salariée à partir de laquelle court son ancienneté.

Bien que le conseil de prud’hommes ait omis de statut de ce chef il convient de constater que la salariée formulait déjà cette demande dans sa requête initiale et qu’en dépit du caractère non contesté de l’erreur commise, l’employeur ne s’est pas spontanément exécuté.

Dans ces conditions, la demande d’astreinte est justifiée.

Sur la priorité de réembauchage

Madame A B réclame à ce titre le versement d’une somme de 15.000 €.

Cette demande, nouvelle en appel, est fondée sur l’article 83-2 de la convention collective ('Dans tous les cas, le salarié dont le contrat de travail aura été rompu bénéficiera pendant un délai de 1 an à compter de la date de cessation définitive de son contrat de travail d’une priorité de réembauchage dans son ancien emploi ou dans un emploi similaire') et sur l’attitude de l’employeur qui en dépit des demandes formulées dès la première instance s’abstient de communiquer le registre unique du personnel.

De fait, si la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau produit un extrait du registre unique du personnel sur la période du 3 août 2015 au 1er décembre 2015, ce document ne couvre que partiellement la période pendant laquelle Madame A B bénéficiait d’une priorité de réembauchage. De plus, la pièce produite établit que deux personnes, de qualification identique à celle de la salariée, ont été embauchées en contrat à durée indéterminée : la première le 20 octobre 2015, la seconde le 12 novembre 2015.

L’appelante fait donc valoir à bon droit que l’employeur ne rapporte pas la preuve qu’il a satisfait à son obligation.

Cependant, Madame A B ne soutient pas qu’elle a sollicité de l’employeur le bénéfice de cette priorité de réembauchage. Elle s’abstient en outre, de communiquer la moindre pièce sur la situation familiale, professionnelle et financière qui aurait été la sienne à la suite de la rupture du contrat de travail, Madame A B ne met pas la cour en mesure d’apprécier le préjudice dont l’existence est nécessaire au succès de sa demande.

Il y a donc lieu de débouter Madame A B de ce chef.

Sur les demandes annexes

Au vu de la décision rendue, la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau est condamnée aux dépens de l’instance d’appel, les demandes respectives fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile étant rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et par arrêt mis à disposition au greffe :

CONFIRME le jugement dont appel sauf en ce qu’il a :

* déclaré les demandes de compléments de rémunération en partie prescrites ;

* condamné la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à payer à Madame A B la somme de 963,33 € et de 695,55 € de rappels de salaire ;

* condamné la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à payer à Madame A B la somme de 64,08 € à titre de remboursement de frais de taxi ;

* fixé à la somme de 6.085,78 € la condamnation prononcée contre l’employeur au titre du rappel de congés payés ;

* fixé à la somme de 533,52 € la condamnation prononcée contre l’employeur au titre du

complément d’indemnité de licenciement ;

* débouté Madame A B de l’intégralité de ses demandes au titre des contreparties pour le travail de nuit ;

ET STATUANT À NOUVEAU DE CES CHEFS :

DÉCLARE les demandes de compléments de rémunérations liées à la période du 21 avril 2012 au 6 octobre 2013 recevables mais mal fondées ;

DÉBOUTE Madame A B de l’intégralité des demandes de complément de rémunération indemnités journalières et liés aux suspensions du contrat de travail pour accident du travail (à l’exception de la somme de 50,92 € relative à l’accident du travail du 31 décembre 2013) ;

CONDAMNE la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à payer à Madame A B la somme de 306,61 € (trois cent six euros et soixante et un centimes) en réparation des repos non pris en contrepartie du travail de nuit ;

CONDAMNE la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à payer à Madame A B la somme de 4.904,90 € (quatre mille neuf cent quatre euros et quatre-vingt-dix centimes) à titre de rappel de congés payés ;

CONDAMNE la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à payer à Madame A B la somme de 173,50 € (cent soixante treize euros et cinquante centimes) à titre de complément d’indemnité de licenciement ;

Y AJOUTANT :

DÉBOUTE Madame A B de sa demande de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à sa priorité de réembauchage ;

ORDONNE la remise par SARL Les Jardins d’Iroise de Pau à Madame A B d’un certificat de travail rectifié, et ce, sous astreinte de 50 € (cinquante euros) par jour de retard courant 8 jours après signification du présent arrêt et jusqu’à expiration d’un délai de six mois ;

REJETTE les demandes respectives fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL Les Jardins d’Iroise de Pau aux dépens de l’instance d’appel.

Arrêt signé par Madame THEATE, Présidente, et par Madame LAUBIE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 22 novembre 2018, n° 17/02416