Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 4 février 2020, n° 17/02020

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Sur la décision

Référence :
CA Pau, 1re ch., 4 févr. 2020, n° 17/02020
Juridiction : Cour d'appel de Pau
Numéro(s) : 17/02020
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

CD/SI

Numéro 20/00530

COUR D’APPEL DE PAU

1re Chambre

ARRET DU 04/02/2020

Dossier : N° RG 17/02020 – N° Portalis DBVV-V-B7B-GSML

Nature affaire :

Action en responsabilité exercée contre le syndic ou tendant à sa révocation

Affaire :

Z X, D E épouse X

C/

SAS AGENCE ATURRI

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 04 février 2020, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l’audience publique tenue le 26 Novembre 2019, devant :

Madame N, Président, magistrat chargé du rapport conformémént à l’article 785 du code de procédure civile

Madame ROSA SCHALL, Conseiller

Monsieur SERNY, Conseiller

assistés de Madame FITTES-PUCHEU, Greffier, présente à l’appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l’affaire opposant :

APPELANTS :

Monsieur Z X

[…]

[…]

Représenté par Me Vincent LIGNEY de la SCP DUALE-LIGNEY-MADAR-DANGUY, avocat au barreau de PAU

Assisté de Monsieur le Bâtonnier Hervé COLMET, avocat au barreau de BAYONNE

Madame D E épouse X

[…]

[…]

Représentée par Me Vincent LIGNEY de la SCP DUALE-LIGNEY-MADAR-DANGUY, avocat au barreau de PAU

Assistée de Monsieur le Bâtonnier Hervé COLMET, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMEE :

SAS AGENCE ATURRI représentée par son Président Mme F G, domiciliée en cette qualité audit siège

[…]

[…]

Représentée par Me Philippe VELLE-LIMONAIRE de la SARL VELLE-LIMONAIRE DECIS, avocat au barreau de BAYONNE

Assistée de Me Marcel PORCHER de la SELAS PORCHER & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

sur appel de la décision

en date du 15 MAI 2017

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE

RG numéro : 16/01282

FAITS ET PROCEDURE :

Par acte en date du 23 avril 2012 M. Z X et son épouse, Mme D E, ont acquis des lots de copropriété n°17,36,37 et 38 de la résidence « Les Dauphins » sise à A (64600) consistant en un appartement en duplex et trois emplacements de parking.

L’appartement des époux X, situé au deuxième et dernier étage de l’immeuble en angle Ouest, ouvre principalement par une large baie sur une terrasse en façade Nord-ouest et aussi sur un prolongement de cette terrasse en façade Sud-Ouest, le tout face à l’océan.

Entre 2003 et 2007, la copropriété avait fait procéder à un ravalement de la façade de cet immeuble avec la mise en 'uvre de travaux d’étanchéité, de peinture et de pose de carrelage sur les balcons .

Ces travaux ont été réceptionnés le 2 juin 2005 pour les façades Nord-Ouest et Sud-Ouest, avec des réserves portant sur des reprises de peinture, et le 2 février 2007 pour les façades Nord-Est et Sud-Est sans réserves.

Le Cabinet ALSUNARD qui était à cette époque le syndic de la copropriété, avait souscrit auprès de la compagnie AXA FRANCE IARD, une assurance dommages-ouvrage pour ces travaux.

A l’occasion de l’assemblée générale du 5 novembre 2007, l’AGENCE ATURRI IMMOBILIER a été désignée comme syndic de la copropriété.

Le 23 octobre 2008, la société ATURRI IMMOBILIER, adressait à la compagnie AXA FRANCE IARD, une déclaration de sinistre relative à une « apparition de cloques importantes sur les façades ».

L’assureur a missioné son expert, le Cabinet B, aux fins d’expertise amiable, lequel a pu relever, dans son rapport définitif du 21 mai 2013, l’existence de deux dommages: – cloquage de la façade arrière (Est) trouvant sa cause dans un défaut de mise en 'uvre du revêtement, entraînant la pénétration d’eau et la formation ponctuelle de cloques ;

— décollement de la peinture sous-face du balcon au-dessus de l’appartement LOM (Ouest) pouvant trouver sa cause soit, dans un défaut de réalisation de l’étanchéité, soit dans la réalisation de la protection en carrelage qui a pu abîmer l’étanchéité.

A la lecture de cette expertise, la SA AXA FRANCE IARD a indemnisé la copropriété à hauteur de 4.399€ au titre du 1er dommage et de 2.245,03€ au titre du second.

Le 22 juillet 2013, la SARL ATURRI IMMOBILIER a procédé à une nouvelle déclaration de sinistre auprès de la SA AXA FRANCE IARD concernant des imprégnations en façades d’eau de pluie et d’embruns d’océan chargés de sel oxydants, générant des dommages au niveau du rez-de-jardin en façade Ouest, au niveau de l’appartement du 1er étage (propriété LOM). Par ce courrier, le syndic signalait également les désordres subis sur l’appartement des époux X, au niveau de la terrasse et des façades :

— le carrelage posé sur la dalle de la terrasse des époux X est disjoint, fissuré et ébréché dans les zones d’insertion ou de fixation des barreaux de la balustrade-garde-corps mais aussi dans l’aire de la terrasse et ses plinthes, ce qui laisse les eaux de pluie et les embruns s’infiltrer dans la dalle attaquant sa sous-face constituant le plafond de la terrasse de l’appartement inférieur, et cheminer à l’intérieur de l’appartement, dans le plancher haut constituant le plafond de la terrasse, des chutes de morceaux d’enduit et de revêtement extérieur, laissant à nu les armatures métalliques de la dalle en béton, rouillées et boursouflées,

— une simple pression du doigt sur le parement extérieur du mur dans l’entourage de la baie vitrée Ouest fait jaillir l’eau de l’intérieur de la paroi,

— la présence de cloques et manifestations d’humidité dans la même zone du mur, sur son parement intérieur.

Une nouvelle expertise amiable, confiée au cabinet B, a eu lieu. L’expert, dans son rapport en date du 17 juin 2014 a retenu deux dommages indemnisables :

— infiltrations au plafond du séjour de l’appartement LOM, trouvant sa cause dans un défaut de réalisation de l’étanchéité des balcons,

— décollement et rupture du carrelage des balcons LOM et X, trouvant sa cause dans un défaut de mise en 'uvre du carrelage.

La corrosion des armatures en façade ouest n’a pas été retenue au motif que ce dommage porte sur des armatures qui ne faisaient pas partie de l’opération de construction assurée (ravalement) au titre de l’assurance dommage-ouvrage.

L’assureur a proposé à la copropriété une indemnisation de 24.610,03€, laquelle ne prenait en compte qu’un seul balcon et correspondait à l’indemnisation du premier désordre.

Suivant courrier en date du 9 octobre 2014, la SAS AGENCE ATURRI, nouvellement nommée en remplacement de la SARL ATURRI IMMOBILIER, a contesté cette proposition d’indemnisation auprès de l’assureur, en indiquant qu’il manquait l’étanchéité du balcon des époux X et que les dommages s’étaient depuis aggravés. Une nouvelle réunion d’expertise était organisée le 24 octobre 2014.

Un rapport d’expertise complémentaire a été déposé le 9 décembre 2014, l’expert chiffrant le coût des réparations du second dommage à la somme de 43.049,09€ TTC, suivi, le 17 février 2015 d’une proposition d’indemnité pour un montant de 42.421,19 €, acceptée par le syndic après avis du conseil syndical.

Par ailleurs, à l’occasion de la réunion d’expertise complémentaire du 24 octobre 2014, la SAS AGENCE ATURRI a constaté l’apparition de fissures sous les pannes au niveau du mur pignon Sud-Ouest situées au-dessus de l’appartement des époux X. Le syndicat des copropriétaires a sollicité de la SOCOTEC et de L’APAVE la réalisation d’un diagnostic de solidité du mur pignon.

L’APAVE a rendu un rapport confirmant l’existence d’une fissure de pignon sous les pannes et formulant un certain nombre de préconisations à la suite desquelles le syndic a fait procéder à la mise en place d’étais à titre conservatoire.

Le syndic a également sollicité l’avis de Monsieur H Y, expert prés de la cour d’appel de PAU qui, a déposé un rapport le 18 avril 2016 concluant à l’existence de désordres d’origine structurelle dus notamment à la carbonatation du béton et nécessitant la démolition et la reconstruction des balcons et des avant-toits de l’appartement des époux X.

A la suite de ce rapport, le syndic a sollicité des devis auprès de deux entreprises (société BAM ' devis du 9 mai 2016 pour un montant de 1742€ TTC ' et la société TOFFOLO ' devis du 26 mai 2016 d’un montant de 3290,10€ TTC) en vue de la mise en place d’un nouvel étaiement sur une autre zone à la demande de M. Y.

Par assignation à jour fixe délivré le 28 juin 2016,les époux X ont attrait la SAS AGENCE ATURRI, devant le tribunal de grande instance de BAYONNE, sur le fondement des articles 18 et 14 de la loi du 10 juillet 1965, 1382, 1792 et suivants et 1134 et suivants du code civil, pour qu’il soit, notamment :

— condamné à faire exécuter à ses frais et sous sa responsabilité les travaux préconisés par le rapport du 18 avril 2016 et tous travaux seront nécessaires pour supprimer les désordres des façades Nord-Ouest et Sud-Ouest de la résidence, outre l’indemnisation de leur préjudice de jouissance;

— tenu d’engager, pour le compte du syndicat des copropriétaires contre les constructeurs responsables des désordres des balcons, des avants-toits et des façades Nord-Est et Sud-Est de la résidence, dans les délais de responsabilité décomptés à partir de la réception intervenue en 2007, tous les recours nécessaires et les décharger ainsi, comme tout copropriétaire, de toute dépense à cet égard.

Le syndic a convoqué une assemblée générale pour le 24 juin 2016 en prévoyant dans les questions mises à l’ordre du jour la désignation d’un maître d''uvre pour étudier et assurer la maîtrise d''uvre des travaux à réaliser suite aux rapports des experts. A l’occasion de cette assemblée générale, le contrat de syndic de la

SAS AGENCE ATURRI n’a pas été renouvelé.

En cours de procédure, les époux Z et D X ont recentré leurs prétentions sur des demandes indemnitaires contre le syndic.

Par jugement contradictoire rendu le 15 mai 2017 (RG n°16/01282), le tribunal de grande instance de BAYONNE a :

— dit que la SAS AGENCE ATURRI, en sa qualité de syndic de la copropriété de la résidence « Les Dauphins » n’a commis aucune faute dans l’exercice de son mandat,

— débouté les époux X de l’intégralité de leurs demandes,

— débouté la SAS AGENCE ATURRI de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et pour préjudice moral,

— condamné solidairement les époux X d’avoir à régler à la SAS AGENCE ATURRI la somme de 5000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens de l’instance,

— débouté les époux X de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration n°17/01382 régularisée le 30 mai 2017 les époux X interjeté appel de cette décision qu’ils contestent en toutes ses dispositions.

Aux termes de leurs dernières écritures en date du 19 octobre 2017, M. Z X et Mme D E épouse X demandent à la cour sur le fondement des articles 14 et 18 de la loi du 10 juillet 1965, 1382 (ancien) et 1792 et suivants du code civil, 256 et suivants du code de procédure civile:

— d’infirmer le jugement dont appel et, statuant à nouveau :

— de débouter la SAS AGENCE ATURRI de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

— avant dire droit désigner tel consultant qu’il plaira avec pour mission de rendre un rapport écrit procédant à chiffrage de la réfection de l’ensemble des balcons de la Résidence et, dans tous les cas, de l’ensemble des dommages l’affectant au fruit du rapport de M. Y en date du 18 avril 2016,

— de dire que le consultant ainsi désigné devra préciser très exactement la durée des travaux de reprise et que la mesure de consultation fera l’objet d’une note écrite communiquée aux parties et fonctionnera à leurs frais avancés.

— de surseoir à statuer dans l’attente du rendu de la consultation

En tout état de cause,

— de dire et juger que la SAS AGENCE ATURRI en ne suspendant pas le délai de la garantie décennale, en ne saisissant pas le tribunal de grande instance au fond ou en référé afin de voir réparer les désordres affectant l’immeuble, a commis une faute en relation de cause à effet avec le préjudice des époux Z et D X ,

— de condamner la SAS AGENCE ATURRI à payer aux époux Z et D X , au titre de leur préjudice économique, la somme de 3.200 € par mois à compter du début des travaux de reprise du balcon et des avants-toits de l’immeuble jusqu’au jour de l’achèvement et de la réception des travaux de réparation

appliquant la remise des lieux en parfait état d’habitation dûment constatée par un huissier assisté d’un homme de l’art,

Y ajoutant,

— de condamner la SAS AGENCE ATURRI à payer aux époux Z et D X la somme qu’il ressortira de la consultation au titre de la réparation du trouble de jouissance,

— de dire que l’ensemble des sommes auxquelles la SAS AGENCE ATURRI sera condamnée seront assorties d’un intérêt au taux légal à compter de la délivrance de l’assignation introductive d’instance en date du 28 juin 2016,

— de condamner la SAS AGENCE ATURRI à payer aux époux Z et D X la somme de 8.000 € en réparation de leur préjudice moral,

— de condamner la SAS AGENCE ATURRI à payer aux époux Z et D X la somme de 10.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, dont distraction.

Par conclusions déposées le 18 décembre 2017, la SAS AGENCE ATURRI, demande à la cour, sur le fondement des dispositions prévues aux articles 32-1, 256, 378, 699 et 700 du code de procédure civile, 14 et 18 alinéa 3 de la loi du 10 juillet 1965, 10, 44 et 55 du décret du 17 mars 1967et 1240 (nouveau) du code civil :

— de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté intégralement les demandeurs de leurs prétentions et les a condamnés d’avoir à lui verser une somme de 5000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

— A titre incident, d’infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a rejeté sa demande reconventionnelle,

— de condamner solidairement les époux Z et D X d’avoir à lui régler une somme de 10 000€ à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et préjudice moral,

— de les condamner à lui payer la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile , outre les dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 octobre 2019 et l’affaire, appelée à être plaidée à l’audience du 26 novembre 2019 a été mise en délibéré.

SUR CE :

Avant d’envisager s’il y a lieu d’ordonner une consultation ou autre mesure d’investigation quant à l’évaluation du préjudice, il appartient à la cour de statuer sur le principe de la responsabilité recherchée contre le syndic, c’est à dire sur la faute reprochée par les époux Z et D X .

La cour rappelle en liminaire que seule la responsabilité du syndic est recherchée et non pas celle du syndicat de la copropriété concernée. Par suite, c’est par des motifs pertinents que le premier juge a retenu que :

— les demandes des époux Z et D X telles que fondées sur les dispositions de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965 ne peuvent pas prospérer puisque les obligations définies à ce texte sont mises à la charge du syndicat des copropriétaires, non partie au présent litige;

— la responsabilité du syndic vis à vis des copropriétaires peut être engagée par un copropriétaire sur le fondement de la responsabilité délictuelle (articles 1382 et 1383 anciens du code civil applicables à l’espèce), lorsque le syndic a commis une faute causant au copropriétaire un préjudice directe et personnel dans la jouissance de ses lots privatifs.

Les obligations du syndic sont définies à l’ article 18 de la loi du 10 juillet 1965, suivant lequel le syndic est chargé d’assurer l’exécution des dispositions du règlement de copropriété et des délibérations de l’assemblée générale, d’administrer l’immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien et, en cas d’urgence, de faire procéder de sa propre initiative à l’exécution de tous travaux nécessaires à la sauvegarde de celui-ci.

Les époux Z et D X reprochent à la SAS AGENCE ATURRI de ne pas avoir engagé les instances qui auraient permis d’interrompre les délais de la garantie décennale des constructeurs ayant procédé au ravalement des façades et de leurs assureurs, cette garantie ayant expiré le 2 juin 2015 pour les façades Ouest, alors même que les entreprises sont intervenues sur un support défaillant, ce qu’ils ne pouvaient ignorer et auraient dû à minima signaler au maître de l’ouvrage.

Période d’intervention de la SAS AGENCE ATURRI

L’agence ATURRI IMMOBILIER a été désignée en qualité de syndic de copropriété suivant assemblée générale en date du 5 novembre 2007. Elle a été remplacée par la SAS AGENCE ATURRI lors de l’assemblée générale en date du 4 août 2014. L’activité de syndic de l’agence ATURRI IMMOBILIER avait en effet été cédée à la SAS AGENCE ATURRI . La durée du mandat voté par l’assemblée générale était d’un an, du 4 août 2014 au 4 août 2015.

Lors de l’assemblée générale du 6 juillet 2015, le mandat de la SAS AGENCE ATURRI a été renouvelé pour une durée d e 15 mois à compter du 6 juillet 2015, soit jusqu’au 5 octobre 2016.

Lors de l’assemblée générale du 24 juin 2016, le contrat de syndic de la SAS AGENCE ATURRI n’a pas été renouvelé. Cependant un nouveau syndic n’a pas été désigné lors de cette assemblée générale.

Le cabinet I J a été désigné en qualité de syndic pour une durée de 3 ans à compter du 10 septembre 2016, soit jusqu’au 10 septembre 2019.

Par suite, c’est par une juste appréciation des faits que le premier juge a retenu que le mandat de la SAS AGENCE ATURRI avait commencé le 4 septembre 2014 et pris fin le 10 septembre 2016.

C’est également par une juste motivation que le tribunal a considéré qu’en l’absence d’éléments justifiant la reprise du passif de l’agence ATURRI IMMOBILIER par la SAS AGENCE ATURRI, sa responsabilité ne peut être engagée que pour les fautes commises pendant la durée de l’exercice de son mandat soit entre le 4 août 2014 et le 10 septembre 2016.

Les faits suivants doivent être rappelés, pour la compréhension du litige :

— la résidence Les Dauphins a été construite dans les années 1970, ainsi que cela résulte du règlement de copropriété contenant état descriptif de division en date du 29 janvier 1970. L’immeuble, situé […] à A se trouve à 70 mètres de l’océan, face à la mer.

— l’appartement des époux Z et D X est situé en façade Ouest et Sud-Ouest de la résidence.

— la résidence a fait l’objet de travaux de ravalement entre 2003 et 2007 comprenant, étanchéité, peinture, pose de carrelage sur les balcons. Ces travaux ont fait l’objet d’un procès-verbal de réception le 2 juin 2005 pour la façade Ouest, assorti des réserves suivantes :

' suite à intervention DISFEB concernant les points de rouille apparents en sous-face dalle béton au dessus terrasse LOM niveau I :

- prévoir raccord peinture sous-face dalle béton terrasse

- lavage et rinçage préalable du support.

Suite à intervention DISFEB concernant traitement éclat béton en sous-face dalle béton au dessus terrasse GOROSTIAGA niveau 2 :

- prévoir raccord peinture sous-face dalle béton terrasse

- lavage et rinçage préalable du support.'

— la 2e tranche des travaux a fait l’objet d’un procès-verbal de réception sans réserve le 2 février 2017 pour la peinture extérieure concernant le ravalement des façades Est et Nord de la résidence.

— au moment de ces travaux, le syndic était le cabinet ALSUNARD qui a géré la copropriété de 1989 à 2007.

— Suite aux travaux de ravalement, des désordres de nature décennale ont fait l’objet de deux déclarations de sinistre auprès de l’assureur dommages ouvrage en date des 23 octobre 2008 et 23 juillet 2013. Une expertise amiable a été réalisée par le cabinet B qui a déposé un rapport le 10 décembre 2008 complété par deux notes d’information les 15 septembre 2011 et 21 mai 2013.

— Des fissures sous les pannes au niveau du mur pignon Sud-Ouest, ont été constatées par la SAS AGENCE ATURRI à l’occasion d’une réunion d’expertise intervenue le 24 octobre 2014.

Les rapports d’expertises dans le cadre de l’assurance dommages-ouvrage

Il s’agit d’expertises non judiciaires, dont le caractère contradictoire et les conclusions ne sont pas remis en cause par les parties.

Les rapport et notes du cabinet B font état des dommages suivants :

Désordres dénoncés le 23 octobre 2008

— un cloquage du revêtement I3 en façade arrière (orientée Est) provenant d’un défaut de mise en oeuvre du revêtement entraînant une pénétration d’eau et la formation ponctuelle de cloques . Les travaux de reprise ont été chiffrés à 4.399 € HT. Ce désordre affectant la façade Est ne concerne pas le présent litige.

— un décollement de peinture en sous face du balcon au dessus de l’appartement LOM (Ouest) provenant d’un défaut de préparation du support au droit de joint d’une reprise de bétonnage de la dalle béton composant le balcon. Les travaux de reprise ont été chiffrés à 2.245,03 € HT.

Les sommes ont été versées à la copropriété par l’assureur dommages-ouvrage.

Désordres dénoncés le 22 juillet 2013 (par le prédécesseur de la SAS AGENCE ATURRI )

Le désordre dénoncé à l’assureur dommages-ouvrage concernait des imprégnations en façades d’eau de pluies et d’embruns d’océan chargés de sel oxydants, générant des dommages au niveau du rez-de-jardin en façade Ouest, de l’appartement du 1er étage (propriété LOM) ainsi que des désordres subis par l’appartement des époux Z et D X , au niveau de la terrasse et des façades.

L’expertise diligentée par l’assureur a été réalisée par le cabinet POLYGON dont le rapport a été déposé le 6 novembre 2013, il conclut à un défaut de réalisation du relevé d’étanchéité sur le sol du balcon du 2e étage et à de nombreuses fissures et décollements de enduits de façades.

Le cabinet B intervenu dans un second temps a conclu, le 18 novembre 2013, à l’existence de 4 catégories de désordres :

— dommage 1 : infiltrations au plafond du séjour de l’appartement LOM au 1er étage se manifestant par la façade au niveau de la peinture I3 et par l’étanchéité des balcons, ayant pour origine un défaut de réalisation de l’étanchéité des balcons;

— dommage 2 : décollement et rupture du carrelage des balcons des appartements LOM et X ayant pour origine un défaut de mise en oeuvre du carrelage des balcons de ces deux appartements par l’entreprise DISFEB;

— dommage 3 : corrosion d’armatures en façade Ouest, au niveau de l’entrée, de l’escalier d’accès au sous-sol depuis le hall d’entrée, également pour l’appartement LOM au niveau de la sous-face de la poutre supportant le balcon situé au dessus et pour l’appartement X, au niveau du plafond du balcon. Les corrosions constatées constituent de nouveaux désordres ne rentrant pas dans le cadre des conditions de la police de travaux réalisés en 2005, suivant le cabinet B;

— dommage 4 : infiltrations par peinture pour lesquelles l’expert note que la garantie DO avait été acceptée, une indemnité avait été versée mais les travaux de réparation n’ont pas été réalisés.

S’agissant du dommage n°3, l’assureur DO refusait sa garantie au motif qu’il affectait les armatures et ne faisait donc pas partie de l’opération de construction assurée;

Pour le dommage n°4, la garantie était refusée au motif que la copropriété avait été indemnisée et qu’il lui appartenait de faire exécuter les travaux.

Pour les dommages 1 et 2 retenus par l’assureur, le cabinet B chiffrait les travaux de reprise dans un rapport du 17 juin 2014, à la suite duquel l’assurance proposait à la copropriété le 22 juillet 2014, une indemnisation de 24.610,33 €.

L’intervention de la SAS AGENCE ATURRI

Suite à la proposition de l’assureur dommages-ouvrage en date du 22 juillet 2014, la SAS AGENCE ATURRI , qui avait pris ses fonctions le 4 août 2014, refusait la proposition au motif qu’elle ne prenait en compte que l’étanchéité des balcons, sans tenir compte de celui des époux Z et D X et qu’il y avait en outre une aggravation des dommages.

Une nouvelle réunion d’expertise était alors réalisée par le cabinet B qui après prise en compte des désordres subis par le balcon des époux Z et D X , chiffrait le coût des travaux de reprise à la somme de 42.421,19 €, montant sur lequel un accord intervenait le 13 avril 2015 entre l’assureur et la copropriété représentée par son syndic .

C’est par une juste analyse de ce déroulement des faits que le premier juge a dit que la SAS AGENCE ATURRI , en refusant une première proposition d’indemnisation qui ne prenait pas en compte le préjudice des époux Z et D X , a parfaitement veillé à la garantie des intérêts de ces copropriétaires, permettant ainsi une indemnisation plus importante.

Sur le désordre n°3 non pris en charge par l’assureur

Le désordre en cause a été décrit par le rapport B du 18 novembre 2013 comme consistant en la corrosion d’armatures en façade Ouest, au niveau de l’entrée, de l’escalier d’accès au sous-sol depuis le hall d’entrée, également pour l’appartement LOM au niveau de la sous-face de la poutre supportant le balcon situé au dessus et pour l’appartement X, au niveau du plafond du balcon.

Il a été écarté par l’assureur comme ne relevant pas de l’opération de construction assurée.

C’est notamment sur ce point que porte la critique des époux Z et D X qui reprochent au

syndic de ne pas avoir saisi le juge des référés d’une demande d’expertise suite au refus de l’assureur, ce qui aurait permis d’interrompre le délai de prescription de la responsabilité décennale.

Le défaut par le syndic d’engager une action en justice devant le juge des référés ne peut constituer une faute que si une telle action avait quelque chance d’aboutir.

La responsabilité décennale des constructeurs alléguée par les appelants, définie par les dispositions de l’article 1792 du code civil, suppose que le dommage qui compromet la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rend impropre à sa destination, soit imputable aux travaux considérés.

Or en l’espèce, le désordre constitué par la corrosion des armatures portait sur un élément de structure de l’immeuble, qui ne pouvait manifestement pas être imputé aux travaux de ravalement réceptionnés en 2005 et 2007. Par ailleurs, à supposer qu’une faute puisse être mise à la charge des intervenants au ravalement dans le fait de ne pas avoir dénoncé le défaut du support, cette faute est sans rapport avec le dommage constitué par la défectuosité dudit support, dont les époux Z et D X recherchent la prise en charge.

Par conséquent, lors des propositions d’indemnisations faites par l’assureur dommages ouvrage les 22 juillet 2014, puis suite à l’intervention de la SAS AGENCE ATURRI le 17 février 2015, une action en justice de la copropriété sur le fondement de la responsabilité décennale, voire contractuelle des intervenants au ravalement des façades réceptionnés en 2005 et 2007 n’avait aucune chance d’aboutir. Le fait que cette action n’ait pas été intentée ne saurait donc engager la responsabilité du syndic qui aurait au contraire pu se voir reprocher d’avoir exposé des frais d’instance inconsidérés.

De plus, à aucun moment les époux Z et D X n’ont mis la SAS AGENCE ATURRI en demeure de saisir le juge des référés.

Sur les suites données par le syndic au désordre de corrosion

La SAS AGENCE ATURRI n’est pas restée inactive quant à la prise en charge du désordre nouveau de corrosion puisque :

— à l’occasion de la réunion d’expertise complémentaire en date du 24 octobre 2014, la SAS AGENCE ATURRI a constaté l’apparition de fissures sous les pannes au niveau du mur pignon Sud-Ouest, situées au dessus de l’appartement des époux Z et D X ;

— la SAS AGENCE ATURRI a alors fait intervenir l’ APAVE pour la réalisation d’un diagnostic de solidité du mur pignon.

Les conclusions de l’ APAVE sont les suivantes :

'les éléments préjudiciables ayant certainement été responsables de l’apparition des fissures sont :

- le poids de la dalle, car son inertie créée des mouvements dans la structure béton;

- l’implantation (proximité océan) et la hauteur du bâtiment (force du vent plus importante en hauteur);

- l’âge du bâtiment;

- éventuellement la conception du bâtiment (absence de chaînage continu du pignon, à confirmer);

- un mouvement de la poutre béton.'

Suite à ce rapport et aux préconisations qu’il contenait, la SAS AGENCE ATURRI a fait procéder à la mise en

place d’étais à titre conservatoire au niveau des terrasses DOUCET, LOM et X.

La SAS AGENCE ATURRI a ensuite pris l’avis de Monsieur H Y, expert inscrit sur la liste de la cour d’appel de PAU, qui a procédé à une réunion le 18 décembre 2014, assisté par le laboratoire GINGER CEBTP spécialiste des matériaux constituant les ouvrages et leur pathologie et par le cabinet VERDI, expert en ingénierie.

L’expert Y a établi une liste de désordres :

— apparition de fissures sur la façade Ouest de la résidence, ainsi que sur le pignon Sud-Ouest,

— éclatement et décollement du béton laissant apparaître des aciers corrodés participant à la résistance de la structure, en particulier à l’aplomb du balcon et en sous-face de l’avant-toit de l’appartement des époux Z et D X ,

— présence de points de rouille réguliers très visibles à l’oeil nu sous les balcons en façade exposée au Nord de la résidence.

Il conclut comme suit : ' on note sur l’ensemble des balcons et des avants-toits une pathologie déjà bien engagée de la carbonatation (…)comme le souligne le rapport GINGER CEBTP, la teneur critique des chlorures pouvait amorcer un phénomène de corrosion est admis scientifiquement à 0,4 % par rapport au ciment enrobant les armatures en béton. Les teneurs en chlorure mesurées (…) Soit près de trois fois supérieurs aux seuils définis par la norme'

Pour la plupart des balcons, les enrobages des armatures sont vraiment en dessous des normes, les espacements des armatures sont irréguliers.

Il résulte de ces rapports, particulièrement précis et circonstanciés, que :

— les désordres sont en lien avec la structure même de l’immeuble (vieillissement naturel du béton), sa conception propre aux constructions des années 1970 ( faiblesse de la quasi totalité des enrobages et espaces irréguliers des armatures), son implantation à proximité de l’océan;

— ni l’ APAVE, ni l’expert Y n’ont imputé les désordres constatés aux travaux de ravalement réalisés entre 2003 et 2007, venant ainsi confirmer qu’une action en garantie décennale contre les intervenants au ravalement du fait de ces désordres était vouée à l’échec pour défaut d’imputabilité aux travaux.

Par ailleurs, le premier juge a justement fait observer que les défaillances de la structure de l’immeuble étaient connues du syndicat des copropriétaires au moins depuis 1992 puisqu’un procès-verbal d’assemblée générale en date du 4 août 2003 relève que ' les Ets SIKA, consultés en 92, avaient une préconisation que vous n’aviez pas retenue en raison de son prix élevé. Mr C, architecte consulté à l’époque sur le même point avait fait des préconisations similaires.

Tant que les balcons ne seront pas repris dans les règles de l’art, des problèmes subsisteront et le risque d’une dégradation plus importante de la structure des balcons est donc à craindre.

Il semble que tous les fers à béton ne soient pas à la distance requise de la surface. Etant trop superficiel se corrodent et ce 'cancer’ doit être traîté sérieusement.'

La transmission de droits réels sur l’immeuble aux époux Z et D X a pour effet de leur rendre opposables les décisions des assemblées générales antérieures à leur acquisition , en ce qu’elles ont écarté lors de la décision de ravalement des façades, les travaux lourds dont la nécessité avait été soulignée dés 1992 et qui ont ensuite été préconisés par l’ APAVE. Ils ne peuvent donc arguer de leur acquisition postérieure, en 2012, à l’appui de leur recherche d’une responsabilité du syndic intervenu entre 2014 et 2016.

Si la connaissance en 2003 et 2005 par le syndicat des copropriétaires de la déficience du support de ravalement ne dispensait pas nécessairement les entrepreneurs de leur obligation d’information, le respect ou le non respect de celle-ci est sans incidence quant au présent litige, en ce qu’un éventuel manquement au devoir d’information n’est pas la cause des défauts anciens et par ailleurs connus de la copropriété, affectant la structure de l’immeuble.

Par conséquent, aucun manquement ne saurait être reproché à la SAS AGENCE ATURRI dans le fait de ne pas avoir engagé d’action judiciaire visant à voir réparer les désordres constitués par l’usure (ou carbonnatation) du béton et à la corrosion de l’acier en ce qu’ils affectent notamment l’appartement des époux Z et D X , ces défauts ne pouvant en aucune manière, ni sur le fondement décennal, ni sur celui de la responsabilité contractuelle, être imputables aux travaux de ravalement réceptionnés en 2005 et 2007.

Par ailleurs, relativement aux investigations (expertises APAVE et Y) rendues nécessaires par l’ampleur des désordres et aux mesures conservatoires urgentes rendues nécessaires par leur gravité, le premier juge a par des motifs pertinents que la cour adopte relevé les démarches et initiatives prises par la SAS AGENCE ATURRI dans le cadre de son mandat, pour en conclure que ce syndic s’est montré tout particulièrement diligent dans la gestion des nouveaux désordres.

En conclusion, le jugement dont appel sera confirmé en ce qu’il a jugé qu’aucune faute ne peut être retenue contre la SAS AGENCE ATURRI dans l’administration de l’immeuble, dans la gestion des désordres affectant notamment le bien des époux Z et D X , dans les actions qu’il a entreprises aux fins de faire procéder aux travaux nécessaires à la sauvegarde le l’ensemble immobilier du fait de l’urgence et de la gravité de la situation et que le syndic n’a pas contrevenu aux dispositions de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

C’est par de justes motifs que le premier juge a considéré que quoique mal fondée, l’action engagée par les époux Z et D X ne relève pas de l’abus du droit d’agir en justice, l’intention de nuire, la mauvaise foi ou la légèreté blâmable n’étant pas démontrés.

Il en va de même pour l’exercice du droit d’appel dont le caractère abusif n’est pas démontré.

Sur les dépens et les frais de procédure

La décision dont appel sera confirmée en ce qu’elle a condamné les époux Z et D X solidairement aux dépens, outre le paiement de la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Les époux Z et D X supporteront solidairement les dépens d’appel.

Au regard de l’équité, les époux Z et D X seront condamnés solidairement à payer à la SAS AGENCE ATURRI la somme de 8.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme la décision dont appel,

Y ajoutant,

Condamne solidairement les époux Z et D X à payer à la SAS AGENCE ATURRI la somme de 8.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés en appel,

la somme fixée par le premier juge étant par ailleurs confirmée,

Condamne solidairement les époux Z et D X aux dépens d’appel, ceux de première instance restant répartis conformément à la décision dont appel.

Le présent arrêt a été signé par Mme N, Président, et par Mme L, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

K L M N

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Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 4 février 2020, n° 17/02020