Cour d'appel de Rennes, 3e chambre commerciale, 26 avril 2022, n° 19/05431

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Gouache Avocats · 12 septembre 2022

Décision Un fonds de commerce de bar-tabac-presse-PMU est cédé. L'acte de cession prévoit : - un inventaire contradictoire des stocks de tabac ainsi que des autres marchandises. - l'engagement de l‘acquéreur à les racheter en sus du prix principal du fonds. Cet inventaire est réalisé et l'acquéreur règle le prix du stock de tabac. Toutefois, il conditionne le paiement du prix des autres marchandises à la résolution préalable de plusieurs autres litiges, à savoir : - au remboursement du prix de la location d'une caisse enregistreuse ; - à la restitution par le vendeur d'un ordinateur ; …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 3e ch. com., 26 avr. 2022, n° 19/05431
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 19/05431
Importance : Inédit
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 29 septembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

3ème Chambre Commerciale

ARRÊT N°244

N° RG 19/05431 – N° Portalis DBVL-V-B7D-QAYX

SNC LA MARINE

C/

Mme [Y] [O]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me CAHOURS

Me FAURE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 AVRIL 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,

Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,

Assesseur : Monsieur Dominique GARET, Conseiller,

GREFFIER :

Mme Julie ROUET, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 07 Mars 2022 devant Monsieur Dominique GARET, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 26 Avril 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE :

SNC LA MARINE, immatriculée au RCS de BREST sous le n° 453 201 337, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Mélanie CAHOURS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de BREST

INTIMÉE :

Madame [Y] [O] es qualités de liquidateur amiable de la SNC [O]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Bertrand FAURE de la SELARL JURIS’ARMOR, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

FAITS ET PROCEDURE

Suivant compromis en date du 15 septembre 2016, la société [O], propriétaire d’un fonds de commerce de bar-tabac-presse-PMU exploité [Adresse 1], s’engageait à le vendre aux époux [E]-[X] ou à toute personne morale qui se substituerait à eux.

La vente était réitérée par acte notarié du 30 janvier 2017 au profit de la société La Marine.

Aux termes du compromis comme de l’acte définitif, il était prévu que les parties procéderaient à l’inventaire contradictoire des stocks de tabac ainsi que des autres marchandises restant à vendre, la cessionnaire s’engageant à les racheter en sus du prix principal du fonds.

Si la société La Marine allait régler sans discuter le prix du stock de tabac, en revanche elle s’abstenait de payer celui des autres marchandises, pourtant fixé à la somme de 4.802,69 € selon inventaire contradictoire en date du 30 janvier 2017.

Relancée par la société [O], la société La Marine lui faisait savoir, par un courrier du 22 mars 2017, qu’elle était 'd’accord de payer’ cette somme, sous réserve seulement de la résolution préalable de plusieurs autres litiges, en particulier :

— le fait qu’elle devait désormais rembourser le prix de la location d’une caisse enregistreuse certes reprise par elle, mais qui intégrait le prix d’une précédente caisse dont le contrat de location avait pourtant été résilié;

— le défaut de restitution par la cédante d’un ordinateur, bien que celui-ci ait été compris dans le périmètre de la cession du fonds;

— la découverte de plusieurs 'vices cachés ' affectant certains équipements cédés, en particulier un 'arrière-bar pourri'.

Par lettre du 10 mai 2017, la société [O], qui contestait l’ensemble de ces griefs, mettait en demeure la société La Marine de régler sans plus tarder la facture émise le 30 janvier 2017 à la suite de l’inventaire du stock dit de 'tabletterie'.

En l’absence de règlement amiable, la société [O], désormais en liquidation amiable et représentée par son liquidateur Mme [Y] [G] épouse [O], faisait assigner la société La Marine devant le tribunal de commerce de Saint Brieuc qui, par jugement du 18 décembre 2017, se déclarait territorialement incompétent au profit de celui de Brest.

Finalement et par jugement du 24 mai 2019, le tribunal de commerce de Brest :

— déclarait Mme [O] recevable en son action en qualité de liquidateur amiable de la société [O];

— condamnait la société La Marine à payer à Mme [O] ès-qualités la somme de 4.802,69€ au titre de la facture de marchandises 'tabletterie’ et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2017;

— déboutait la société La Marine de l’ensemble de ses demandes;

— condamnait la société La Marine à payer à Mme [O] ès-qualités une somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

— ordonnait l’exécution provisoire de sa décision;

— condamnait la société La Marine aux entiers dépens de l’instance.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 7 août 2019, la société La Marine interjetait appel de cette décision.

L’appelante notifiait ses dernières conclusions le 17 juillet 2020, l’intimée les siennes le 8 juin 2020.

La clôture de la mise en état intervenait par ordonnance du 3 février 2022.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société La Marine demande à la cour de :

Vu les articles 1219, 1304, 1347, 1353, 1641 et suivants du code civil,

Vu l’article 202 du code de procédure civile,

Infirmant le jugement,

Sur l’exception d’inexécution :

— constater que Mme [O] ès qualités ne démontre pas que la société [O] a respecté la clause de présentation, et écarter d’ailleurs les attestations fournies par elle comme n’étant pas conformes aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile;

— constater que n’ayant pu prendre connaissance du stock tabac et tabletterie, et n’ayant pas pu procéder à la réalisation de l’inventaire de manière contradictoire, la société La Marine a été contrainte d’apposer la seule mention « pris connaissance » sur les inventaires et non pas « certifié exact » comme elle avait pris le soin de le faire sur le stock matériel;

— constater également que la société La Marine, malgré les difficultés, a accepté de payer la facture du stock tabletterie sous condition seulement d’être elle-même indemnisée de ses préjudices;

— ainsi, donner acte à la société La Marine de ce qu’elle ne s’oppose pas au paiement de la somme de 4.802,69 € représentant la facture tabletterie mais que pour autant, elle entend se prévaloir d’une exception d’inexécution; qu’en effet, une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave;

— donner acte également à la société La Marine de ce qu’elle se réserve la possibilité d’établir l’existence d’erreurs de stock et de chiffrer le préjudice en découlant;

Sur les manquements de Mme [O] ès-qualités :

1- Le surcoût de loyer :

Rappelant que celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation,

— constater que Mme [O] ès-qualités ne démontre pas avoir payé l’indemnité de fin de contrat de location 'Strator';

— qu’à l’inverse, elle reconnait que l’indemnité du précédent contrat’Strator’ a été intégrée dans le nouveau contrat de location;

— qu’elle indique d’ailleurs que le fait de faire payer une telle indemnité par un repreneur serait d’usage, sans toutefois en rapporter la preuve (admettant ainsi que c’est ce qu’elle a pratiqué en l’espèce);

— dire et juger que Mme [O] ès-qualités ne démontre pas que la société [O] en avait avisé le repreneur;

— condamner Mme [O] ès-qualités à payer à la société La Marine une somme de 2.754 € au titre de la surcharge du loyer Grenke;

2- La non restitution de l’ordinateur :

— constater que dans un courrier adressé à la société La Marine par le conseil de la société [O], il est indiqué : « En second lieu, l’ordinateur visé dans l’inventaire correspond à celui visé dans les amortissements. L’ordinateur en possession de mes clients est un ordinateur personnel, ne dépendant pas du fonds »;

— constater dès lors que Mme [O] ès-qualités a reconnu ne pas avoir laissé l’ordinateur pourtant indiqué dans l’inventaire comme faisant partie des éléments du fonds;

— dire et juger qu’il incombe à Mme [O] ès-qualités, puisqu’elle se prétend libérée, de démontrer qu’elle a bien remis l’ordinateur objet de la reprise du fonds à la société La Marine;

— condamner Mme [O] ès-qualités à payer à la société La Marine une somme de 1.200 € au titre de l’ordinateur manquant;

3- L’arrière du bar :

— dire et juger que le vice était caché, qu’il était nécessairement antérieur à la vente, et enfin que le vendeur en avait connaissance pour avoir installé des cales;

— condamner Mme [O] ès-qualités à payer à la société La Marine une somme de 4.960 € au titre du vice affectant l’arrière bar, à titre principal sur la garantie légale des vices cachés, à titre subsidiaire sur le fondement d’une faute contractuelle;

4- Le remplacement de la terrasse :

— condamner Mme [O] ès-qualités à payer à la société La Marine une somme de 4.926 € au titre du remplacement de la terrasse, à titre principal sur la garantie légale des vices cachés, à titre subsidiaire sur le fondement d’une faute contractuelle;

— ordonner la compensation des créances réciproques;

— au besoin, condamner Mme [O] ès-qualités à restituer à la société La Marine la somme de 4.803 € par elle versée au titre des causes du jugement de première instance, avec intérêts de droit à compter de la décision à intervenir;

— condamner Mme [O] ès-qualités à payer à la société La Marine une somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Au contraire, Mme [O], en qualité de liquidateur amiable de la société [O] en liquidation, demande à la cour de :

— dire recevable mais non fondée la société La Marine en son appel ;

— l’en débouter ;

— confirmer la décision dont appel ;

Y additant,

— condamner la société La Marine à payer à Mme [O] ès-qualités une somme de 4.000 € au visa des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel;

— condamner la société La Marine aux entiers dépens.

Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le bien-fondé de la somme réclamée par la sociéété [O] au titre de l’inventaire dit de 'tabletterie':

L’article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L’article 1104 ajoute qu’ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

En l’espèce, le compromis de vente du 15 septembre 2016 ainsi que l’acte définitif notarié du 30 janvier 2017 précisent :

— que la vente du fonds de commerce est consentie et acceptée moyennant un prix global de 900.000 € dont 800.000 € pour les éléments incorporels et 100.000 € pour le matériel et le mobilier;

— que toutefois, ne sont pas comprises dans ce prix les marchandises qui garniront le fonds vendu au jour fixé pour l’entrée en jouissance, que ces marchandises seront reprises par l’acquéreur du fonds dans la limite d’une somme de 90.000 €, stock tabac inclus, enfin qu’elles feront l’objet d’un inventaire physique descriptif et estimatif établi contradictoirement entre les parties.

Suivent ensuite les modalités de détermination du prix de rachat desdites marchandises en fonction de leur ancienneté (100 % du prix d’achat pour celles de moins d’un an, 75 % pour celles de plus d’un an et de moins de deux ans, 50 % pour celles de plus de deux ans avec possibilité pour l’acquéreur de refuser de les racheter).

Enfin, il a été convenu que le prix ainsi fixé donnerait lieu à l’émission d’une facture payable comptant pour les tabacs, et à un mois pour les autres marchandises.

C’est ainsi que dès le 30 janvier 2017, soit le jour même de l’acte définitif, les deux parties ont procédé à deux inventaires :

— le premier concernant les tabacs, comprenant une liste détaillée des produits recensés, ainsi que leur valeur de rachat pour un montant total de 78.506,55 €,

— le second concernant les objets dits de 'tabletterie', comprenant également une liste détaillée de ces objets ainsi que leur valeur de rachat pour une somme totale de 4.802,69 €.

Le premier inventaire a été signé par les deux parties et accompagné de la mention manucrite 'certifié exact'.

Le second, également signé par les deux parties, comporte seulement, à côté de la signature de l’acquéreur, la mention 'pris connaissance'.

Pour justifier cette différence, la société La Marine fait aujourd’hui valoir qu’elle n’a pas eu la possibilité de s’assurer par elle-même de la réalité du stock des objets effectivement présents dans le magasin au jour de l’inventaire, ni de leur valeur, l’appelante affirmant que l’inventaire aurait été 'préparé par le vendeur'.

Ce premier argument sera écarté, faute pour l’appelante d’expliquer pourquoi elle a accepté de signer cet inventaire si ce n’est pour en approuver le contenu.

Au demeurant et à supposer même que l’inventaire ait été 'préparé’ par la société [O] seule, rien n’empêchait la société La Marine d’en vérifier ensuite l’exactitude.

De même et contrairement à ce que l’appelante laisse entendre, la mention 'pris connaissance’ qu’elle a apposée sur le document ne peut pas être interprétée comme l’expression d’une réserve de sa part quant à la sincérité dudit document.

En conséquence et à l’instar des premiers juges, la cour confirmera qu’il a été procédé à l’inventaire contradictoire du stock des objets dits de 'tabletterie', de sorte qu’en signant le document qui en fait foi, la société La Marine s’est engagée, au même titre que la société [O], à reconnaître la validité et la sincérité des indications qui y figurent, notamment quant à la liste des objets recensés ainsi qu’à leur valeur de rachat, et ce, pour un prix total fixé d’un commun accord à 4.802,69 €.

Enfin et dans la mesure où la somme des prix de rachat des deux stocks (tabac et tabletterie) n’atteignait pas le plafond global convenu entre les parties, en l’occurrence de 90.000 €, la société La Marine était tenue de racheter ces deux stocks pour leurs valeurs respectivement fixées à 78.506,55 € et 4.802,69 €.

Or, s’il est constant qu’elle a réglé le prix du stock de tabac, en revanche elle s’est abstenue de payer celui de la 'tabletterie', à tout le moins dans le délai contractuel de paiement, d’une durée d’un mois courant à compter de l’émission de la facture, elle-même en date du 30 janvier 2017.

Sur l’exception d’inexécution :

L’article 1219 prévoit qu’une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

Encore faut-il que la partie qui s’en prévaut rapporte la preuve, non seulement de l’inexécution incombant à l’autre, mais également de la gravité de cette inexécution.

— Sur le non-respect allégué de la clause dite de 'mise au courant':

Le compromis comprenait effectivement une clause rédigée comme suit :

'Mise au courant :

Le vendeur s’engage à prêter gratuitement sa collaboration à l’acquéreur si ce dernier l’exige, pendant un délai de trente jours avant la prise de possession + 2 commandes tabac, sauf dispositions contraires des parties, pour lui faire connaître la clientèle, l’initier au commerce et aux habitudes de la maison, le présenter à tous fournisseurs et ce, à peine de dommages-intérêts.'

Quant à l’acte définitif, il se borne à rappeler :

'Mise au courant :

Aux termes de l’avant-contrat ayant précédé les présentes, le cédant s’est engagé à mettre le cessionnaire au courant de ses affaires et à le présenter comme son successeur à ses fournisseurs, ses prestataires de services et à sa clientèle ainsi que dans le cadre des contrats dont la transmission au cessionnaire est soumise à agrément'.

Il en résulte qu’il n’a pas été convenu entre les parties que cet engagement du cédant se prolonge au-delà de l’acte définitif de vente du fonds.

Sinon, le notaire n’aurait pas manqué de le préciser.

Dès lors, en acceptant de signer cet acte sans protester et sans réclamer que cet engagement se prolonge davantage, la société La Marine s’est nécessairement considérée comme suffisamment 'mise au courant’ par la société [O].

D’ailleurs, elle ne s’en est jamais plainte jusqu’à la procédure en appel, ce grief, de pure opportunité, n’étant apparu pour la première fois qu’à l’occasion des dernières conclusions (n° 2) déposées devant la cour.

Au surplus, aux termes mêmes du compromis, la clause dite de 'mise au courant’ n’engageait le vendeur que pour autant que l’acquéreur 'l’exige'.

Au demeurant, Mme [O] ès-qualités produit devant la cour quatre attestations, dont la valeur probatoire ne saurait être remise en cause du seul fait qu’elles ne sont pas strictement conformes aux prescriptions de l’article 202 du code de procédure civile, qui témoignent :

— pour la première, d’un accompagnement de l’acquéreur du fonds auprès de l’expert-comptable du vendeur et ce, au mois de janvier 2017, peu avant la signature de l’acte définitif (pièce n° 10 de l’intimée),

— pour la deuxième, de l’accompagnement de l’acquéreur par le vendeur, 'plusieurs fois courant janvier 2017", et ce, 'pour lui apprendre la gestion du commerce’ (pièce n° 11),

— pour la troisième, de l’accompagnement de l’acquéreur par le vendeur, toujours courant janvier 2017, pour assurer sa 'formation au bar-PMU’ (pièce n ° 12),

— enfin pour la quatrième, de la présentation de l’acquéreur par le vendeur, en date du 24 janvier 2017, à un fournisseur de tabac afin qu’ils puissent passer ensemble une première commande, de sorte que l’acquéreur soit ensuite 'en mesure de lancer son activité'.

Il est ainsi démontré que la société [O] a amplement satisfait à son obligation de 'mise au courant’ voire d’accompagnement de la société La Marine au cours des mois qui ont suivi la signature du compromis.

Dès lors, la société La Marine ne saurait se prévaloir d’un manquement de la société [O] à ses engagements pour justifier qu’elle ne respecte pas les siens.

— Sur le moyen tiré d’une prise en charge indue des frais de location d’une caisse enregistreuse non comprise dans le périmètre de la cession :

La société La Marine, qui reconnaît avoir accepté le transfert du contrat n° 068-022299 afférent à la location d’une caisse enregistreuse 'Pack WT 100", explique avoir découvert, depuis la vente du fonds, que le coût de cette location intégrait celui de la fin de location d’une autre caisse, de marque Strator, elle-même non comprise dans le périmètre de la cession.

Elle estime ce procédé anormal, faisant valoir que si elle l’avait su, elle n’aurait pas repris le contrat litigieux, mais en aurait souscrit un autre, nécessairement moins coûteux pour elle.

Elle demande en conséquence à la société [O] de lui rembourser une somme totale de 2.754 € égale à la différence entre les loyers qu’elle est désormais tenue de régler jusqu’à la fin du contrat transféré, et ceux qu’elle aurait payés si le coût de la machine précédente n’y avait pas été intégré.

Pour s’en défendre, la société [O] explique que la reprise dudit contrat a été négociée dès le stade du compromis, de sorte que l’acquéreur a eu tout le temps pour se convaincre des avantages et inconvénients de la vente du fonds dans son ensemble, transfert du contrat de location compris, alors par ailleurs qu’il lui a été remis tous les documents afférents à la vente, y compis ceux en rapport avec le contrat litigieux.

Sur le fond du grief qui lui est fait, la société [O] confirme qu’en 2014, au moment où elle a changé de caisse, elle a pu négocier avec la société Grenke, comme il est d’usage, la reprise de l’ancienne caisse et la fourniture d’une nouvelle, cette négociation ayant donné lieu à l’établissement d’un nouveau contrat qui s’est substitué à l’ancien, dont la charge financière résiduelle, contrairement à ce que la société La Marine laisse entendre, ne lui a jamais été transférée.

En toute hypothèse, la cour constate que le transfert du contrat litigieux, soit celui souscrit le 16 juin 2014 par la société [O] auprès de la société Grenke pour la location d’une caisse de type Pack WT 100, a été expressément convenu entre les parties aux termes du compromis de vente du fonds de commerce, et qu’une copie dudit contrat a été annexée au compromis pour être paraphée par les parties et suivie de la mention 'pris connaissance'.

Il en résulte que la société La Marine a eu toute latitude pour prendre connaissance du contenu de ce contrat et, par là même, pour comprendre les circonstances et raisons qui ont présidé à la détermination du loyer convenu entre la société [O] et la société Grenke, loyer que la société La Marine a finalement accepté de prendre en charge par suite du transfert dudit contrat.

Dès lors, elle est mal fondée à prétendre à un quelconque remboursement à ce titre.

— Sur le défaut de restitution d’un ordinateur :

La société La Marine reproche encore à la société [O] d’avoir emporté un ordinateur alors qu’il faisait partie des matériels cédés dans le cadre de la vente du fonds, demandant en conséquence le remboursement d’une somme de 1.200 € correspondant à la valeur de ce matériel telle qu’elle a été fixée par les deux parties lors de l’établissement de l’inventaire contradictoire des équipements cédés.

Pour s’opposer à cette demande, la société [O] fait valoir qu’elle a offert de restituer l’ordinateur à la société La Marine, mais que celle-ci a refusé d’en prendre possession.

En effet, la société [O] produit une photographie du colis postal qu’elle a adressé à la société La Marine en septembre 2017, ainsi que deux photographies de la feuille de distribution 'Colissimo’ qui porte la mention 'refusé'.

A cet égard, la société La Marine, qui reconnaît avoir refusé ce colis, est mal fondée à justifier ce refus par l’argument selon lequel l’ordinateur expédié ne serait pas celui visé dans l’inventaire contradictoire.

En effet, la cour déduit d’abord de cette affirmation que la société La Marine reconnaît elle-même que le colis contenait bien un ordinateur.

Par ailleurs, l’inventaire contradictoire produit en pièce n° 3 de l’appelante ne contient aucune précision quant au type de l’ordinateur cédé avec le fonds de commerce, la seule mention figurant sur cet inventaire étant : 'ordinateur de caisse : 1.200 €'.

Dès lors, la société La Marine ne peut s’en prendre qu’à elle-même d’avoir refusé de prendre possession de l’ordinateur que la société [O] lui adressait, alors en effet que cette dernière a toujours affirmé qu’il s’agissait bien de celui visé à l’inventaire.

En conséquence et dans la mesure où la société [O] justifie du fait qui a produit l’extinction de son obligation au sens de l’article 1353 alinéa 2 du code civil, en l’occurrence de la restitution de l’ordinateur qu’elle avait conservé, la société La Marine est mal fondée à réclamer le paiement du prix correspondant.

— Sur les prétendus vices cachés :

La société La Marine fait valoir qu’elle a découvert, depuis la vente, deux vices affectant des équipements du fonds :

— d’une part l’arrière du bar, 'totalement pourri’ par l’humidité due à la présence d’une machine à café qui ne devait son équilibre qu’à son maintien par des cales, meilleure preuve de ce que la société [O] connaissait parfaitement l’état dégradé du bar, ce qu’elle s’est pourtant abstenue de lui révéler au moment des négociations sur la vente du fonds; la société La Marine explique en effet s’en être rendu compte lorsqu’elle a voulu remplacer la machine;

— d’autre part la terrasse de l’établissement, également en très mauvais état voire source d’un danger pour la clientèle, ce dont la société La Marine dit s’être rendu compte à l’occasion d’un nettoyage.

Elle réclame en conséquence la condamnation de la société [O] au paiement des frais de remise en état de ces deux équipements, selon devis versés aux débats, à hauteur de 4.960 € pour le bar et de 4.926 € pour la terrasse.

Elle ajoute qu’elle demeure recevable à le faire, dès lors qu’elle a agi dans le délai de l’article 1648 du code civil, d’une durée de deux ans courant à compter de la découverte du vice.

Elle précise enfin que la société [O] ne peut pas s’exonérer de son obligation de garantie, dès lors que les deux vices étaient vraiment cachés, alors au surplus que l’article 1112-1 du code civil dispose que celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

De son côté et pour s’opposer à toute demande à ce titre, la société [O] fait d’abord valoir que la demande relative à la terrasse est irrecevable comme nouvelle en cause d’appel.

Sur le fond, elle fait valoir que l’acquéreur a eu tout loisir de visiter les lieux, avant même la signature du compromis, et de s’assurer ainsi de la consistance des lieux comme de leur état, qu’il s’agisse du bar ou de la terrasse, pour en détecter, le cas échéant, les éventuels défauts.

Elle ajoute que la présence de cales pour maintenir la machine à café était parfaitement visible, et qu’elle n’a rien fait pour dissimuler quelque vice que ce soit, ni pour faire obstacle aux interogations et investigations de l’acquéreur qui, au surplus, a travaillé au moins une dizaine de fois dans le bar avec les époux [O] avant de signer l’acte définitif, ce qui lui a encore permis de prendre la pleine mesure de l’état des locaux qu’elle s’apprêtait à investir.

S’agissant de la recevabilité de la demande d’indemnisation en rapport avec la terrasse, force est de constater qu’elle n’est pas contestable, dès lors en effet qu’en application de l’article 567 du code civil, les demandes reconventionnelles sont toujours recevables, même présentées pour la première fois en cause d’appel.

En revanche et sur le fond, les demandes indemnitaires de la société La Marine sont injustifiées.

En effet, l’article 1642 du code civil dispose que le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même.

Or, qu’il s’agisse du bar ou de la terrasse, soit des équipements parfaitement visibles et qui sont utilisés quotidiennement dans le cadre de l’exploitation d’un débit de boissons, la société La Marine a eu l’occasion de les observer et de les utiliser à de nombreuses reprises pendant toute la période d’accompagnement ayant précédé la signature de l’acte définitif d’acquisition.

Or, elle a signé sans protester cet acte qui stipule d’ailleurs que 'le cessionnaire prendra le fonds avec tous les éléments corporels et incorporels en dépendant dans l’état où le tout se trouve actuellement, sans recours contre le cédant pour quelque cause que ce soit.'

En conséquence et dans la mesure où elle ne démontre pas que les vices dont elle se prévaut lui aient jamais été cachés, volontairement ou non de la part de la société [O], la société La Marine sera déboutée des demandes indemnitaires qu’elle forme à ce titre.

En définitive, la société La Marine n’est pas fondée à se prévaloir d’une quelconque inexécution des engagements contractuels incombant à la société [O] pour prétendre s’exonérer de ses propres engagements, en particulier du paiement de l’intégralité du prix convenu et, plus précisément, du prix de rachat des marchandises dites de 'tabletterie'.

Dès lors, le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société La Marine à payer à Mme [O], en qualité de liquidateur amiable de la société [O], la somme de 4.802,69 € au titre de la facture de 'tabletterie’ du 30 janvier 2017, et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10 mai 2017 conformément aux dispositions de l’article 1231-6 du code civil, de même qu’en ce qu’il a débouté la société La Marine de l’intégralité de ses demandes reconventionnelles.

Sur les autres demandes :

Le jugement sera encore confirmé en ce qu’il a condamné la société La Marine au paiement d’une somme de 1.500 € au titre des frais irrépétibles exposés par son adversaire en première instance.

Y ajoutant, la cour condamnera la société La Marine au paiement d’une somme de 2.500 € au titre des frais irrépétibles d’appel.

Enfin, partie perdante, la société La Marine supportera les entiers dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour :

— confirme le jugement en toutes ses dispositions;

— y ajoutant :

* déboute les parties du surplus de leurs demandes;

* condamne la société La Marine à payer à Mme [Y] [G] épouse [O], en qualité de liquidateur amiable de la société [O], une somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel;

* condamne la société La Marine aux entiers dépens de la procédure d’appel.

Le greffierLe président

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Rennes, 3e chambre commerciale, 26 avril 2022, n° 19/05431