Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, Chambre civile ti, 28 mai 2021, n° 19/01853

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Saint-Denis de la Réunion, ch. civ. ti, 28 mai 2021, n° 19/01853
Juridiction : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion
Numéro(s) : 19/01853
Décision précédente : Tribunal d'instance de Saint-Benoît, 28 avril 2019
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N°

PF

R.G : N° RG 19/01853 – N° Portalis DBWB-V-B7D-FG2Q

Y

C/

X

COUR D’APPEL DE SAINT – DENIS

ARRÊT DU 28 MAI 2021

Chambre civile TI

Appel d’une décision rendue par le TRIBUNAL D’INSTANCE DE SAINT BENOIT en date du 29 AVRIL 2019 suivant déclaration d’appel en date du 29 MAI 2019 RG n° 11-18-0161

APPELANTE :

Madame M N Y

[…]

[…]

Représentant : Me R claude JEBANE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMÉE :

Madame F X

[…]

[…]

Représentant : Me H I, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DATE DE CLÔTURE : 28 Janvier 2021

DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 19 Mars 2021 devant Madame FLAUSS Pauline, Conseillère, qui en a fait un rapport, assistée de Mme Véronique X, Greffier, les parties ne s’y étant pas opposées.

Ce magistrat a indiqué, à l’issue des débats, que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 28 Mai 2021.

Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre

Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère

Conseiller : M. Thibaud RHIM, Vice-président placé

Qui en ont délibéré

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 28 Mai 2021.

* * *

LA COUR :

Par acte d’huissier du 9 mars 2018, Mme Y a saisi le tribunal d’instance de Saint Benoît aux fins de bornage de sa parcelle cadastrée section AT 872 sur la même commune avec celle voisine cadastrée […], propriété de Mme X.

Par jugement avant dire droit du 4 juin 2018, une expertise a été confiée à M. A, géomètre expert, lequel a déposé son rapport le 8 janvier 2019.

Par jugement du 29 avril 2019, le tribunal a:

— Dit que la limite séparative entre les parcelles de Mme Y située sur la commune de Saint Benoit cadastrée section AT 872 et la parcelle contiguë cadastrée […] appartenant à Mme X, passera par la ligne A-B-C-E, matérialisée par un angle de mur s’agissant du point A et par des chandelles concernant les points, B-C-E, conformément à l’annexe 11 du rapport d’expertise,

— Dit que la pose des bornes se fait à frais partagés et sera réalisée par la partie la plus diligente,

— Débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamné les parties aux entiers dépens qui seront partagés par moitié entre chacune des parties, dépens qui comprendront notamment les frais d’expertises.

Par déclaration du 29 mai 2019 au greffe de la cour d’appel de Saint Denis, Mme Y a formé appel du jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées au greffe de la cour par voie électronique le 5 octobre 2020, Mme Y demande à la cour de :

— déclarer son appel recevable et bien fondé';

— débouter purement et simplement Mme X de toutes ses demandes, fins et conclusions';

— infirmer le jugement en date du 29 avril 2019';

— dire et juger que l’expert n’a pas analysé le plan de division';

— dire et juger que l’expert n’a pas procédé à une analyse de tous les documents en sa possession';

— dire et juger que l’expert s’est uniquement reposé sur le cadastre';

— dire et juger qu’un tel document n’a qu’une valeur fiscale';

— ordonner un complément d’expertise et désigner tel expert autre que l’expert G A qu’il

plaira à cette fin';

— constater que la chandelle D existe depuis plus de trente ans';

— constater que les points correspondant à la ligne A-B-C-D figurant à l’annexe 11 du rapport de l’expert sont présents depuis au moins trente ans sur le terrain';

— constater qu’elle a prescrit définitivement la portion de terrain occupée';

— dire et juger qu’elle occupe le terrain tel que délimité par la ligne A B C D depuis plus de trente ans de façon paisible, continue et non-équivoque';

— dire que la limite entre ses parcelles et celles de Mme X passe par la ligne A-B-C-D figurant à l’annexe 11 du rapport de l’expert';

— condamner Mme X à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle fait valoir que les délimitations proposées par l’expert ne sauraient avoir pour seul fondement le plan cadastral de sorte qu’il convient d’ordonner une mesure d’expertise complémentaire. Elle se prévaut en outre des dispositions de l’article 2272 du code civil relatif à la prescription acquisitive et affirme occuper le terrain délimité par la ligne A-B-C-D depuis au moins trente ans de façon paisible, continue et non équivoque sans aucune contestation de Mme X

Aux termes de ses dernières conclusions, déposées au greffe de la cour par voie électronique le 27 novembre 2019, Mme X demande à la cour de':

— débouter Mme Y de son appel tendant à voir ordonner un complément d’expertise et constater que les points correspondant à la ligne A-B-C-D figurant à l’annexe 11 du rapport de l’expert sont présent depuis au moins trente ans, et que de ce fait, elle aurait prescrit définitivement la portion de terre occupée';

— débouter Mme Y à voir dire que la limite entre sa parcelle et la sienne passe par la ligne A-B-C-D figurant à l’annexe 11 du rapport de l’expert';

— débouter Mme Y en sa demande de condamnation en paiement de la somme de 2.000 euros à son encontre à titre de frais irrépétibles';

— confirmer le jugement du 29 avril 2019 ayant :

.dit que la limite séparative entre les parcelles de Mme Y située sur la commune de Saint-Benoit cadastrée section AT 872 et la sienne contiguë cadastrée […] passera par la ligne A-B-C-E, matérialisée par un angle de mur s’agissant du point A et par des chandelles concernant les points B-C-E, conformément à l’annexe 11 du rapport d’expertise,

. dit que la pose des bornes se fait à frais partagés et sera réalisée par la partie la plus diligente,

. débouté les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné les parties aux dépens qui seront partagés par moitié entre chacune des parties, dépens qui comprendront notamment les frais d’expertise,

Y ajoutant,

. condamner Mme Y à lui payer la somme de 4.000 euros à titre de frais irrépétibles';

.condamner la même aux dépens d’appel dont distraction au profit de Me H I en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Mme X soutient que Mme Y échoue à rapporter la preuve de son moyen de prescription acquisitive sur lequel elle fonde sa demande de contre-expertise et qu’en tout état de cause, la contestation de la proposition de bornage que lui avait faite le géomètre D rendait toute prétendue occupation de cette dernière équivoque.

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures ci-dessus visées figurant au dossier de la procédure en application de l’article 455 du code de procédure civile.

Une ordonnance de clôture est intervenue le 28 janvier 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

En application de l’article 646 du code civil, tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës.

En l’espèce, il résulte du plan annexé à l’expertise judiciaire que les parcelles de Mmes Y (AT 872) et X ([…]) sont contiguës sur une soixantaine de mètres.

Il ressort des débats que les parties s’accordent sur la limite séparative proposée par l’expert sur une ligne quasiment droite entre les points AB et C de son plan, soit sur une quarantaine de mètres, mais, qu’en revanche, elles s’opposent sur la dernière partie de la limite séparative d’une vingtaine de mètres, Mme Y soutenant que la limite extrême de la parcelle est matérialisée par une chandelle représentée par le point D du plan de l’expert et Mme X que cette limite résulte d’une chandelle représentée par un point E, distant d’environ 5 mètres du point D.

Sur la demande de complément d’expertise.

Vu l’article 144 du code de procédure civile';

En l’espèce, si Mme Y expose que l’expert judiciaire n’a fondé son expertise qu’au regard des documents cadastraux n’ayant qu’une valeur fiscale, il appert de la lecture du rapport d’expertise de M. A a effectué une analyse des différents actes notariés de propriété et qu’il s’est appuyé sur les documents d’arpentage, notamment le n°969, lesquels coïncident avec les documents cadastraux, ainsi que du positionnement des chandelles constatées lors de sa venue sur les lieux pour proposer une limite de parcelle correspondant au cadastre.

L’appelante fait également grief à l’expert de ne pas avoir procédé à des mesurages de surface ou à une enquête sur place auprès du voisinage mais ces points ne figuraient pas précisément dans la mission de l’expert, lequel est libre dans le choix de ses méthodes et moyens pour l’accomplir.

Enfin, si Mme Y reproche à l’expert de ne pas avoir tenu compte du plan de division de la parcelle AT 532, dont est issue la parcelle AT 872, établi le 16 novembre 2004, et s’il ressort du rapport d’expertise que cette pièce a été transmise à l’expert, il ne saurait lui être fait grief de ne pas l’avoir analysé dès lors qu’il a été le support d’un projet de bornage jamais abouti. Ce plan étant soumis aux débats devant la cour par Mme Y, celle-ci est à même d’apprécier s’il est de nature à remettre en cause les conclusions de l’expert, sans qu’il soit besoin d’ordonner une nouvelle expertise.

Mme Y sera déboutée de sa demande de contre-expertise.

Sur la limite séparative des parcelles AT 872 et […]

Il résulte des actes notariés annexés au rapport d’expertise que Mme X est propriétaire de la parcelle […] suite à donation du 22 janvier 1988 de son père, J X, lequel l’avait lui reçu d’une donation de ses parents suite à partage au début des années 80 d’une plus grande parcelle qu’ils avaient acquise le 9 mai 1973 d’L E et son épouse.

Il en ressort également que Mme Y est propriétaire, suite à donation de son père, K Y et de sa grand mère, P Q I veuve B, du […], de la parcelle AT 872, laquelle provient de la division de la parcelle AT 532, elle même issue de deux terrains acquis par ses grands parents auprès d’L E et son épouse les 18 janvier, 28 décembre 1972 et 23 octobre 1973.

La limite en litige entre les parcelles AT 872 et […] est la même que celle de l’ancienne parcelle AT 532 et de la parcelle […].

La limite entre les parcelles AT 532 et […] a fait l’objet d’un document d’arpentage, repris au cadastre. Ce document comporte d’une part la signature de l’auteur de Mme X à savoir, M. J X et d’autre part, de Mme B. Mme X indique sans être contredite sur ce point que Mme B est l’auteur de Mme Y pour être sa grand mère, P Q I veuve B, usufruitière de la parcelle AT 532.

Comme l’a relevé l’expert dans son rapport, cette limite coïncide grossièrement avec la ligne définie par les points ABCE de son annexe 11.

Pour critiquer la limite ainsi définie, Mme Y produit une attestation sur l’honneur en date du 10 mars 2020 de M. E R S, fils de l’ancien propriétaire de la parcelle AT 532, indiquant que «'l’extrémité du terrain vendu par [son] père à Mme C, grand-mère de Mme M Y, a toujours mesuré douze mètres de large'». Ce témoignage ne relate toutefois pas de circonstances suffisantes permettant d’en apprécier la pertinence, d’autant que le témoin présente un lien d’alliance avec Mme Y.

Mme Y verse également aux débats un plan réalisé par M. D, géomètre, le 16 novembre 2004 en vue d’un bornage. Ce plan fait figurer une limite FGHI entre les parcelles AT 532 et […] correspondant à la limite suivant les points ABCD du plan de l’annexe 11 au rapport de M. A. La ligne HI, équivalente à la ligne CD passe par deux plants «'d’avocat marron'», qui n’ont pas été relevés ni mentionnés par les parties ou l’expert judiciaire au vu des mentions du rapport de 2019. En outre, le plan de M. D porte la mention expresse de ce que cette ligne ne constitue qu’une proposition de bornage, laquelle n’a ensuite pas été acceptée par Mme X.

Il en résulte que c’est à bon droit que les premiers juges ont fixé les limites séparatives des parcelles AT 872 et […] suivant les points ABCE de l’annexe 11 au rapport de M. A.

Sur l’existence d’une prescription acquisitive

Les dispositions de l’article 2258 du code civil définit la prescription acquisitive comme un moyen d’acquérir un bien ou un droit par l’effet de la possession sans que celui qui l’allègue soit obligé d’en rapporter un titre ou qu’on puisse lui opposer l’exception déduite de la mauvaise foi.

Les articles 2260 et suivants du code civil régissent les conditions de la prescription acquisitive selon lesquelles celui qui entend s’en prévaloir doit établir une possession «'continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire'» sur le bien ou droit à prescrire.

Aux termes de l’alinéa 1er de l’article 2272 du Code civil, le délai de prescription requis pour

acquérir la propriété immobilière est de trente ans.

En l’espèce, Mme Y soutient en substance qu’en tout état de cause, elle a prescrit la portion de parcelle délimitée par les points CDE au plan de M. A, à raison notamment des chandelles implantés par son père depuis plus de trente ans.

L’affirmation suivant laquelle le père de Mme Y aurait planté le chandelle positionné au point E du plan n’est corroboré par aucun des éléments versés aux débats. Le plan dressé par M. D en 2004, qui retient ce chandelle comme point de délimitation, n’apporte pas davantage d’éléments sur la datation de ce chandelle ou l’occupation de la portion de terrain par Mme Y. L’attestation de M. E est à elle seule insuffisante à établir l’existence d’une possession trentenaire, paisible et non équivoque de la portion en litige pour les motifs déjà évoqués.

Mme Y sera déboutée de sa demande tendant à dire qu’elle est propriétaire par usucapion de la parcelle AT 872 délimitée par les points A-B-C-D.

La cour confirmera le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Sur les dépens et frais irrépétibles

En application des dispositions des articles 696 et 699 du code de procédure civile, Mme Y, qui succombe, supportera les dépens, lesquels seront distraits au profit de Me H I.

Ni l’équité, ni la situation économique des parties ne justifie de faire application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

Rejette la demande de nouvelle expertise;

Confirme le jugement entrepris;

Rejette la demande tendant à juger qu’elle occupe le terrain tel que délimité par la ligne A B C D depuis plus de trente ans de façon paisible, continue et non-équivoque;

Déboute les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile';

Condamne Mme Y aux dépens, lesquels seront distraits au profit de Me H I.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Véronique X, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

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