Cour d'appel de Versailles, 12ème chambre, 29 novembre 2011, n° 10/02163

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 12e ch., 29 nov. 2011, n° 10/02163
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 10/02163
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Pontoise, 7 février 2010, N° 09/8567
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

12e chambre

XXX

ARRET N° Code nac : 30B

contradictoire

DU 29 NOVEMBRE 2011

R.G. N° 10/02163

AFFAIRE :

XXX

C/

X N B

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Février 2010 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE

N° Chambre : 2

N° Section :

N° RG : 09/8567

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

Me J-Michel TREYNET

Me Farid SEBA

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE ONZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

XXX, RCS PARIS 495 022 394, ayant son siège XXX, agissant poursuites et diligences de son gérant y domicilié.

représentée par Me J-Michel TREYNET, avoué – N° du dossier 19614

Rep/assistant : Me Danielle BUSSELET, avocat au barreau de VAL D’OISE.

APPELANTE

****************

Monsieur X N B P Q R J-T U V.

représenté par Me Farid SEBA, avoué – N° du dossier 0012865

Rep/assistant : Me Bernard DEMONT, avocat au barreau de PARIS (P.37).

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 06 Octobre 2011 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Dominique ROSENTHAL, Président,

Madame Marion BRYLINSKI, conseiller,

Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller, (rédacteur)

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Thérèse GENISSEL,

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing privé en date du 22 avril 2002, Mme F Z épouse Y et M. J-K Z ont renouvelé le bail commercial consenti à M. X B, portant sur des locaux sis Q, R J T à V, pour une durée de neuf années à compter du 1er décembre 2000, moyennant un loyer annuel de 6.097,97 € HT.

Le 23 juillet 2007, les consorts Z ont vendu leur immeuble à la SCI Etoile.

Le 03 juin 2009, le président du tribunal de grande instance de Pontoise, au vu de la requête de la SCI Etoile, commettait un huissier aux fins de mener toutes investigations utiles concernant l’entretien des locaux loués et leurs conditions d’occupation.

L’huissier de justice dressait un procès-verbal de constat le 24 septembre 2009.

Par acte d’huissier de justice du 27 novembre 2009, la SCI Etoile a assigné M. X B au visa des articles 1741 et 1184 du code civil, aux fins de voir prononcer à titre principal la résiliation judiciaire du bail, ordonner l’expulsion de ce dernier et le voir condamner à lui verser une indemnité d’occupation de 200,00 euros par jour à compter du jour de la résiliation ainsi qu’une somme de 5.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, le tout sous le bénéfice de l’exécution provisoire.

Par jugement rendu le 8 février 2010, le tribunal de grande instance de Pontoise a déclaré la SCI Etoile recevable en ses demandes mais l’en a déboutée et l’a condamnée aux dépens.

La SCI Etoile a relevé appel de ce jugement.

Par dernières conclusions signifiées le 31 mai 2011, la SCI Etoile demande à la cour d’infirmer le jugement et statuant à nouveau, de :

— prononcer la résiliation judiciaire du bail dont M. X B est titulaire pour les locaux sis à V (U) Q R J T, en conséquence, ordonner son expulsion et celle de tous occupants de son chef des lieux dont il s’agit dans les 48 heures de la décision à intervenir avec l’assistance de la Force Publique si besoin est ;

— condamner M. X B à lui payer à compter du prononcé de la résiliation et jusqu’à complète libération des locaux une indemnité d’occupation de 200 € par jour, outre une indemnité de 6 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions signifiées le 5 mai 2011, M. X B demande à la cour de confirmer le jugement rendu en tant que de besoin, par substitution de motif alors que le bailleur a accepté le renouvellement du bail pour 9 années à compter du 1er janvier 2010, à défaut d’avoir signifié par exploit d’huissier son refus de renouvellement dans les 3 mois de la demande en renouvellement signifié le 26 novembre 2009 par le preneur, soit avant le 27 février 2010, ce qui vaut renonciation à se prévaloir des éventuelles infractions litigieuses, et en conséquence de condamner la SCI Etoile à lui payer 3.000 € à titre de dommages-intérêts pour appel abusif par application des dispositions de l’article 559 du code de procédure civile et 2.000 € au titre de l’article 700 du même code.

La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 9 juin 2011.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières conclusions signifiées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR :

Sur la recevabilité de la demande de la SCI Etoile

M. X B oppose en premier lieu à la demande de résiliation judiciaire de la SCI Etoile qu’elle est irrecevable au motif qu’avant même l’assignation en résiliation judiciaire, il a fait signifier une demande en renouvellement du bail commercial le 26 novembre 2009, que la SCI Etoile n’a notifié son refus de renouvellement que par acte du 27 février 2010, qu’en conséquence, le bail se trouve renouvelé à compter du 1er janvier 2010, la SCI Etoile ayant renoncé de manière non équivoque et de manière expresse à se prévaloir d’éventuelles infractions au bail pour la période antérieure à ce renouvellement.

La SCI Etoile soutient que M. X B ne peut se prévaloir de l’expiration du délai de trois mois de l’article L. 145-10 du code de commerce au motif qu’elle n’a pas eu connaissance de la demande de renouvellement signifiée dans les conditions de l’article 659 du code de procédure civile qui n’a pas pu faire courir un délai dans la mesure où les diligences suffisantes pour chercher le destinataire n’ont pas été effectuées.

Ce n’est que par la signification des écritures de M. X B le 19 octobre 2010 qu’elle a eu connaissance de l’acte susvisé et elle a notifié son refus de renouvellement par acte extra-judiciaire du 23 décembre 2010.

*

En vertu de l’article L. 145-10 du code de commerce, le locataire qui veut obtenir le renouvellement du bail doit en faire la demande au bailleur par acte extra-judiciaire et dans les trois mois de la signification de la demande de renouvellement, le bailleur doit, dans les mêmes formes, faire connaître au demandeur s’il refuse le renouvellement en précisant les motifs de ce refus. A défaut de faire connaître ses intentions dans ce délai, le bailleur est réputé avoir accepté le principe du renouvellement du bail précédent.

M. B a fait délivrer à la SCI Etoile une demande de renouvellement de bail commercial à compter du 1er décembre 2009, pour une durée de neuf année, par acte extra-judiciaire, après tentatives des 19 et 24 novembre, en date du 26 novembre 2009 dans les formes de l’article 659 du code de procédure civile.

L’huissier instrumentaire a indiqué s’être transporté à l’adresse indiquée, le siège social de la SCI Etoile, XXX, XXX, et avoir constaté qu’à ce jour, aucune personne morale répondant à l’identification du destinataire de l’acte n’y a son siège ou son établissement, que le nom de la société ne figure ni sur la liste des occupants, ni sur les boîtes aux lettres, qu’il n’y a pas de gardien, qu’un locataire lui déclare que la société est inconnue à cette adresse.

Il a ajouté que de retour à son étude, il a consulté le service infogreffe et vérifié l’exactitude du siège social, que les diligences effectuées n’ayant pas permis de retrouver le destinataire de l’acte, il a dressé le 26 novembre 2009 le procès-verbal de recherches infructueuses prévu à l’article 659 du code de procédure civile.

L’huissier de justice à la suite de la tentative du 19 novembre avait adressé un fax au conseil de M. B pour lui indiquer qu’il ne trouvait pas trace de la SCI Etoile et lui demander notamment le nom du gérant de la SCI Etoile. Il n’est pas produit de réponse à cette demande.

Il résulte de l’article 659 du code de procédure civile que pour que la signification par procès-verbal de recherches infructueuses soit valablement effectuée, il faut que la personne à qui l’acte doit être signifié n’ait ni domicile, ni résidence, ni lieu de travails connus. Il faut que le requérant ignore l’adresse à laquelle le destinataire peut être touché.

En l’espèce, il ressort de la consultation de l’extrait Kbis de la SCI Etoile à laquelle l’huissier indique avoir procédé que celle-ci a son siège social au XXX, que le gérant de la SCI Etoile est M. H C, domicilié à la même adresse, et qu’il s’agit d’une société civile immobilière familiale qui est domiciliée chez son gérant – informations dont l’huissier de justice disposait donc après ses premières diligences.

Il ressort par ailleurs des courriers produits par M. B que la SCI Etoile a reçu plusieurs courriers recommandés à l’adresse à laquelle l’huissier s’est présenté, en particulier une lettre recommandée dont la SCI Etoile a accusé réception le 18 novembre 2009, soit la veille de la première tentative de l’huissier de justice, avec la précision d’adresse apportée par M. B qui a indiqué " SCI Etoile chez C XXX

Ainsi n’étant pas discuté que la SCI Etoile a bien son siège social à l’adresse indiquée, et même si le nom de la société ne figure ni sur la liste des occupants, ni sur les boîtes aux lettres, comme l’a constaté l’huissier de justice, il ne ressort pas des énonciations du procès-verbal dressé le 26 novembre 2009 que l’huissier, après avoir vérifié la réalité du siège social, le nom et l’adresse du gérant figurant au registre du commerce et des sociétés, a accompli les diligences nécessaires pour vérifier s’il n’y avait pas une boîte aux lettres au nom de C, gérant de la SCI Etoile, à la même adresse, avant de dresser le procès-verbal de recherches infructueuses.

Aucune recherche en ce sens n’est mentionnée dans le procès-verbal.

Or, la signification faite à la SCI Etoile à la personne de son gérant au siège social aurait été, conformément à l’article 654 du code de procédure civile, faite à personne. A tout le moins, la signification aurait pu être accomplie dans les conditions des articles 655 ou 656 du code de procédure civile.

Il est indifférent à cet égard comme le soutient M. B que « chez C » ne figure pas sur l’extrait Kbis de la société et même que la SCI Etoile fasse notifier ses propres exploits d’huissier, sans faire figurer cette précision, dès lors que celle-ci était connue de M. B, que de toute évidence, la SCI Etoile avait son siège social chez son gérant dont il n’est pas contesté qu’il habite bien à cette adresse, ce que l’huissier pouvait constater en se rendant au XXX, et que l’accomplissement de ces diligences auraient permis de délivrer la demande de renouvellement à la SCI Etoile et non de dresser un procès-verbal de recherches infructueuses.

Dans ces conditions, est irrégulière la signification faite le 26 novembre 2009 dans les formes de l’article 659 du code de procédure civile, de la demande de renouvellement du bail commercial formée par M. B.

M. B est donc mal fondé à prétendre que, faute pour la SCI Etoile d’avoir fait notifier avant le 27 février 2010 par exploit d’huissier un refus de renouvellement, la SCI Etoile aurait renoncé à se prévaloir d’éventuelles infractions au bail pour la période antérieure au renouvellement, puisque l’acte irrégulier n’a pas pu faire courir le délai de trois mois de l’article L. 145-10 alinéa 4 du code de commerce, que la SCI Etoile n’ayant eu connaissance de la demande de renouvellement que le 19 octobre 2010, celle-ci a fait notifier un refus de renouvellement le 23 décembre 2010 de sorte que la renonciation alléguée n’est pas établie.

La demande de la SCI Etoile est donc recevable et il ne peut lui être opposé aucune renonciation même tacite à se prévaloir des infractions antérieures au renouvellement du bail.

Au P, à considérer même que la SCI Etoile aurait renoncé à se prévaloir d’éventuelles infractions au bail pour la période antérieure au renouvellement, cela ne lui interdirait pas de poursuivre sa demande de résiliation judiciaire sur des agissements postérieurs à ce renouvellement.

Sur la demande de résiliation judiciaire

La SCI Etoile fait valoir en substance que la résiliation judiciaire du bail est motivée par plusieurs griefs et notamment par les troubles de voisinage occasionnés, en observant que M. B est comptable vis-à-vis des tiers et de son bailleur des agissements de son locataire-gérant, par des sous-locations prohibées par le bail, le non respect de l’obligation de réfection des peintures extérieures, l’absence de souscription d’un contrat d’assurance, que sur ce dernier point, il ne s’agit que d’un moyen nouveau articulé à l’appui de la demande de résiliation judiciaire et non d’une demande nouvelle en cause d’appel.

M. B répond en premier lieu que le constat établi le 24 septembre 2009 à la requête de la SCI Etoile est nul, que la SCI Etoile est irrecevable à se prévaloir des infractions antérieures à son acquisition, qu’elle a renoncé à se prévaloir des infractions alléguées, que la SCI Etoile est de mauvaise foi car propriétaire de l’immeuble contigu du 224 ou à tout le moins du fonds de commerce qui y est exploité, elle cherche à réaliser une opération immobilière.

Il soutient que la preuve des nuisances n’est pas apportée, pas plus que celle de la sous-location, que la SCI Etoile reconnaît que les nuisances proviennent des agissements de la clientèle à l’extérieur des locaux qui sont exploités en location-gérance, que s’agissant des peintures extérieures, le juge du premier degré a parfaitement pu estimer que ce grief n’était pas suffisamment grave pour justifier la résiliation, que la SCI Etoile elle-même vient de réaliser des travaux de ravalement, que la demande au titre de la souscription d’un contrat d’assurance est nouvelle et donc irrecevable, qu’il justifie en tout état de cause que les locaux étaient assurés au moment de la délivrance de la sommation du 13 juillet 2010 et qu’ils le sont encore. Il sollicite à tout le moins un délai de grâce pour se mettre en conformité avec ses obligations contractuelles.

*

En vertu de l’article 1er de l’ordonnance n°45-2592 du 2 novembre 1945, les huissiers de justice peuvent être commis par justice pour effectuer des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter ; ils peuvent également procéder à des constatations de même nature à la requête des particuliers : dans l’un et l’autre cas, ces constatations n’ont valeur que de simples renseignements.

La SCI Etoile a été autorisée à faire procéder à un constat par un huissier de justice dans les locaux loués, en vertu d’une ordonnance rendue par le président du tribunal de grande instance de Pontoise en date du 9 juin 2009.

L’huissier de justice qui a été désigné par l’ordonnance, non par la SCI Etoile, s’est rendu sur place et a exécuté sa mission le 24 septembre 2009 conformément à l’ordonnance en se bornant à effectuer des constatations matérielles et à recueillir des renseignements.

Le constat dressé par l’huissier de justice n’est qu’un moyen de preuve auquel M. B peut apporter la contradiction et non un acte de procédure soumis au régime des nullités de tels actes.

La présence du gérant de la SCI Etoile lors de ce constat comme la remise par celui-ci de documents annexés au constat ne sont pas de nature à entacher de nullité un tel constat, étant relevé qu’il n’est pas prétendu que l’huissier désigné aurait excédé les limites de sa mission et de ses pouvoirs.

Par ailleurs, si l’acquéreur de l’immeuble ne peut agir contre le preneur pour des manquements antérieurs à la vente, en revanche, dès lors que ces manquements se sont poursuivis après la vente, il est en droit d’invoquer à l’appui de sa demande de résiliation judiciaire du bail, ces manquements, leur ancienneté et leur persistance.

En l’espèce, il est notamment stipulé à l’article 4 du renouvellement de bail commercial que :

« Le Preneur s’interdit toute activité bruyante susceptible d’apporter un trouble quelconque de voisinage dans l’immeuble ou dans les immeubles voisins et à garantir le Bailleur contre toute réclamation à cet égard. Au cas néanmoins où le Bailleur aurait à payer des sommes quelconques du fait du Preneur, celui-ci serait tenu de les lui rembourser sans délai.

Le Preneur, dont les activités peuvent entraîner des nuisances sonores, s’oblige expressément à prendre toutes dispositions et mesures nécessaires à la réduction au plus bas niveau possible de ces nuisances, et si le voisinage ou les autorités administratives le demandent, à établir des isolations antibruit.

Il s’oblige à prendre toutes dispositions et mesures nécessaires pour éviter au voisinage toute pollution sur le plan des trépidations, odeurs, émanations, fumées.

Le tout de telle sorte que le Bailleur ne puisse en aucune manière être recherché au sujet de ces troubles. »

Le preneur est responsable envers le bailleur du locataire-gérant qu’il installe dans les locaux loués.

En l’espèce, il résulte des pièces produites que la SCI Etoile a été destinataire de plusieurs pétitions concernant les nuisances liées à l’activité du bar « les Arcades » exploitée dans les locaux loués, signées par les plus proches voisins, faisant état de nuisances liées au bruit notamment la nuit, musique, disputes, bagarres des clients sur le trottoir, au stationnement anarchique des véhicules des clients du bar gênant la sortie des véhicules des voisins, aux débris de bouteilles cassées le long du trottoir, aux clients qui urinent ou vomissent sur les murs ou devant les portes du voisinage.

Ces faits ont fait notamment l’objet d’une pétition signée par 18 voisins en date du 29 mai 2009, d’une nouvelle pétition signée le 24 septembre 2009, annexée au constat de l’huissier de justice comportant les pièces d’identité des signataires, d’une pétition du 27 novembre 2010 dénonçant les mêmes faits signée par 17 personnes. Toutes ces pétitions sont postérieures à l’acquisition des locaux par la SCI Etoile.

Elles viennent conforter une précédente pétition du voisinage de mai 2007.

La SCI Etoile produit également un courrier en date du 15 septembre 2009 émanant du commissaire principal d’V, lequel après enquête sur place, relevant qu’une précédente demande aux mêmes fins avait été formée le 16 juin 2008, sollicite une fermeture administrative de l’établissement en raison notamment des troubles à l’ordre public et des nuisances, toujours réguliers.

Ce courrier reprend l’historique des appels à la police ou interventions de celle-ci en lien avec des rixes ou des nuisances.

Même si comme le fait observer M. B, lorsque la police est appelée et arrive sur place, elle ne constate en général plus de nuisances sonores, – le locataire-gérant présent reconnaissant cependant à certaines occasions que des clients ont pu quitter bruyamment son établissement – il n’en demeure pas moins que la réalité, l’importance et la persistance de ces nuisances sont suffisamment attestées par la multiplication des pétitions signées par une grande partie du voisinage qui décrit ces nuisances de toute sorte subies depuis plusieurs années et le trouble apporté à la tranquillité qui en résulte.

Ces pétitions ne constituent pas des attestations au sens de l’article 202 du code de procédure civile mais la preuve peut être apportée librement et elles sont suffisamment précises et étayées pour avoir valeur probante.

Le fait que la pétition annexée au constat ait été manifestement signée par les riverains avant cette date ne remet pas en cause sa valeur probante alors que les photocopies des pièces d’identité jointes permettent à la cour de vérifier l’identité des signataires.

Au P, si M. B conteste dans leur ensemble ces pétitions, il ne discute pas que les signataires sont bien des voisins et il n’apporte aucune preuve contraire, par exemple l’attestation d’un voisin venant témoigner de l’absence de toute nuisance.

En outre, contrairement à ce que prétend M. B, la demande de fermeture administrative formulée dans le courrier précité du commissaire principal est fondée tant sur les interventions multiples liées aux nuisances dont se plaignent les riverains que sur le procès-verbal dressé pour travail dissimulé.

M. B informé de ces manquements graves aux clauses du bail, à tout le moins depuis l’assignation qui lui a été délivrée le 27 novembre 2009, ne justifie d’aucune mesure propre à y mettre un terme, d’aucune mise en demeure faite au locataire-gérant dont il répond, puisque la dernière pétition datée du 27 novembre 2010 est même postérieure au jugement critiqué qui invitait pourtant l’intéressé à se conformer aux stipulations contractuelles en prenant toutes dispositions et mesures nécessaires à la réduction des nuisances, en lui rappelant les risques encourus faute de s’y conformer.

S’agissant de la présence, constatée dans les locaux loués par l’huissier de justice, de M. A qui a déclaré payé un loyer de 340 € par mois pour la location de sa chambre, M. B ne conteste pas cette sous-location ni la prohibition de cette sous-location par l’article 8 du bail.

Il fait valoir que M. A habite les lieux depuis 1969, époque à laquelle son frère était propriétaire du fonds de commerce et que tout le quartier le savait, y compris les consorts C et les anciens propriétaires, les consorts Z.

La preuve de la connaissance des bailleurs successifs de la sous-location en cause et de ce qu’ils auraient renoncé à se prévaloir de ce manquement au bail ne saurait être rapportée par la seule attestation de M. A lui-même, quand bien même il serait dans les lieux depuis 1969.

Il n’est notamment produit par M. B aucun document émanant des consorts Z, et pas plus de la SCI Etoile, établissant qu’ils auraient, contrairement à la clause sans équivoque du bail, admis la sous-location au bénéfice de M. A.

Cette sous-location constitue donc également une infraction au bail.

Contrairement à ce que prétend M. B, la délivrance de quittances de loyer par la SCI Etoile à M. B ne fait qu’établir l’exécution par ce dernier de son obligation de paiement des loyers et ne vaut en aucune façon renonciation de la SCI Etoile à se prévaloir des manquements du preneur à ses autres obligations contractuelles.

Ces manquements graves du preneur suffisent à justifier de prononcer la résiliation du bail, sans avoir à examiner les autres griefs allégués par la SCI Etoile.

M. B suffisamment alerté par le premier juge des conséquences de ces manquements contractuels se poursuivant depuis plusieurs années et invité à y mettre fin, n’a pris aucune mesure pour y remédier, décidant seulement de continuer à en contester la réalité ou la gravité.

Il n’y a pas lieu en conséquence de lui octroyer un délai de grâce supplémentaire pour se mettre en conformité avec le bail.

Le jugement sera donc réformé en ce qu’il a débouté la SCI Etoile de sa demande de résiliation judiciaire et de ses demandes accessoires.

Il sera fait droit à la demande d’expulsion, sauf à accorder en revanche à M. B, eu égard à la nature commerciale des locaux et à l’activité exploitée par un locataire-gérant, un délai de trois mois pour libérer les lieux à compter de la signification du présent arrêt. En conséquence, l’indemnité d’occupation sera fixée au montant du loyer et des charges exigibles contractuellement pendant ce délai, mais passé ce délai, l’indemnité d’occupation sera fixée à 100 € par jour.

Compte tenu du sens de la décision, M. B sera débouté de sa demande de dommages-intérêts pour appel abusif.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Les dépens d’instance seront à la charge de M. B.

L’équité commande de le condamner à payer à la SCI Etoile une indemnité de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en ce qu’il a déclaré la SCI Etoile recevable en ses demandes.

Reforme le jugement entrepris pour le surplus.

Statuant à nouveau,

Prononce la résiliation judiciaire du bail commercial consenti à M. X B portant sur des locaux sis Q, R J T à V (U).

Accorde à M. B un délai de trois mois pour libérer les locaux loués à compter de la signification du présent arrêt.

Ordonne son expulsion et celle de tous occupants de son chef des lieux dont il s’agit passé le délai de trois mois de la signification du présent arrêt, avec l’assistance de la Force Publique si besoin est.

Condamne M. X B à payer à la SCI Etoile, à compter du présent arrêt, une indemnité d’occupation égale au montant du loyer et des charges contractuellement exigibles, et passé le délai de trois mois de la signification du présent arrêt et jusqu’à complète libération des locaux, une indemnité d’occupation égale à 100 € par jour.

Y ajoutant,

Déboute M. X B de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif.

Condamne M. X B aux dépens et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Condamne M. X B à payer à la SCI Etoile une indemnité de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le déboute de sa demande au même titre.

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Dominique ROSENTHAL, Présidente et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, La PRESIDENTE,

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