Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 9 juillet 2019, n° 18/03601

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 12e ch., 9 juill. 2019, n° 18/03601
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 18/03601
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce de Nanterre, 9 avril 2018, N° 2015F01489
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 12 novembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

TA

Code nac : 39H

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 9 JUILLET 2019

N° RG 18/03601 – N° Portalis DBV3-V-B7C-SMXB

AFFAIRE :

SAS SDLEASE prise en la personne de son représentant légal domicilié aud

it siège en cette qualité

C/

SAS ECONOCOM-OSIATIS FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 10 Avril 2018 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2015F01489

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Christophe DEBRAY,

Me Martine DUPUIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF JUILLET DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SAS SDLEASE

N° SIRET : 414 98 2 0 82

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 – N° du dossier 18216 – Représentant : Me Gaël GRIGNON DUMOULIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

SAS ECONOCOM-OSIATIS FRANCE

N° SIRET : 414 96 7 9 84

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 1859935 – Représentant : Me Frédéric COULON de la SCP BIGNON LEBRAY, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Mai 2019 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Thérèse ANDRIEU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Thérèse ANDRIEU, Président,

Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,

Mme Véronique MULLER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Econocom Services est une société prestataire de services spécialisée dans le domaine de l’informatique. Elle a fusionné avec la société Econocom Osiatis France (ci-après Econocom) le 1er janvier 2017.

Le 1er juillet 2013, la société Econocom Services a conclu avec la société Sdlease un contrat d’agent commercial.

Le 8 décembre 2014, la société Econocom Services a notifié à la société Sdlease, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, la modification de son secteur de représentation et sa volonté de reprendre l’exploitation du compte AG2R- La Mondiale (AG2R) et de ses filiales après l’écoulement d’une période de préavis de six mois.

Le 14 janvier 2015, la société Sdlease s’est opposée par courrier à la modification de secteur tout en indiquant être ouverte à « toute discussion sur la reprise du compte AG2R ».

Le 20 février 2015, la société Sdlease a indiqué par courrier à la société Econocom Services accepter la reprise d’AG2R moyennant une indemnisation de 100.000 € HT par an pendant trois ans.

Le 12 mars 2015, la société Econocom Services a proposé à la société Sdlease, par courrier, une indemnisation de 12.530 €, complétée par une indemnité supplémentaire de 10.000 € si la société Sdlease acceptait que la reprise du compte AG2R intervienne au 15 avril 2015.

Le 3 avril 2015, la société Sdlease a, par l’intermédiaire de son conseil, refusé cette proposition et indiqué que le préavis qui avait pour point de départ le courrier du 12 mars 2015, devait prendre fin le 12 septembre 2015.

Par acte d’huissier du 7 juillet 2015 et du 16 juillet 2015, la société Sdlease a respectivement assigné les sociétés Econocom Services et Econocom Osiatis devant le tribunal de commerce de Nanterre pour résiliation du contrat d’agent commercial aux torts de la société Econocom Services et à sa condamnation à lui verser notamment les sommes de 300 000 € en raison d’actes de concurrence déloyale et de la rupture du contrat d’agence commerciale et celle de 50000 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis en application de l’article L 134-11 du code de commerce.

Parallèlement, par acte d’huissier du 11 décembre 2015, la société Econocom Services a assigné la société Sdlease en référé devant le Président du tribunal de commerce de Nanterre.

Par ordonnance de référé du 28 janvier 2016, le Président du tribunal de commerce de Nanterre a fait injonction à la société Sdlease :

— "de cesser toute initiative de contact commercial de quelque nature que ce soit avec le client Groupe AG2R LA MONDIALE ayant trait au contrat d’agence commerciale conclu le 1er juillet 2013 avec la Econocom Services;

— De restituer, sous astreinte de 150 € par jour à compter du 15ème jour suivant la signification de la présente ordonnance et dans la limite de 90 jours, la documentation commerciale constituée dans le cadre du contrat d’agence commerciale et pour les prestations qu 'il inclut […] ».

Par jugement du 10 avril 2018, le tribunal de commerce de Nanterre a :

— Débouté la société Sdlease de sa demande de nullité du contrat d’agent commercial au titre de la violence économique ;

— Débouté la société Sdlease au titre de ses demandes relatives au non-respect par la société Econocom Services du délai de préavis contractuel;

— Débouté la société Sdlease de ses demandes au titre de la nullité de la clause 4.9.3. ;

— Dit que la société Econocom Services a respecté les stipulations du contrat d’agent commercial signé le 1er juillet 2013 et a débouté la société Sdlease de sa demande portant sur le versement d’une indemnité d’un montant de 350.000 € ;

— Débouté la société Sdlease au titre de ses demandes relatives à des actes de concurrence déloyale de la part de la société Econocom Services ;

— Condamné la société Sdlease à payer à la société Econocom Osiatis la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamné la société Sdlease à payer à la société Econocom Services la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamné la société Sdlease aux entiers dépens.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu l’appel interjeté le 22 mai 2018 par la société Sdlease contre le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 10 avril 2018.

Vu les dernières conclusions notifiées le 24 juillet 2018 par lesquelles la société Sdlease demande à la cour de :

— Infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 10 avril 2018 par le tribunal de commerce de Nanterre;

Et statuant à nouveau,

— Accueillir l’appel interjeté par la société Sdlease à l’encontre du jugement du 10 avril 2018 et le dire recevable et bien fondé ;

En conséquence,

A titre principal :

— Prononcer la nullité du contrat d’agence du 1er juillet 2013 entre la société Econocom Services et la société Sdlease en raison de la violence économique entachant le consentement de cette dernière et de son déséquilibre significatif ;

En conséquence,

— Condamner la société Econocom Osiatis France à payer à la société Sdlease la somme de 350.000,00 €, à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

A titre subsidiaire :

— Dire que la société Econocom Osiatis France s’est rendue responsable de la résiliation du contrat d’agence commerciale conclu avec la société Sdlease retirant le client AG2R sans respecter son obligation contractuelle de proposer d’affecter plusieurs clients ou prospects représentant le même potentiel de rémunération ni proposer une indemnisation correspondant à la perte potentielle de rémunération de l’agent ;

En conséquence,

— Prononcer la résiliation du contrat d’agence en date du 1er juillet 2013 aux torts exclusifs de la société Econocom Osiatis France ;

— Condamner la société Econocom Osiatis France à payer à la société Sdlease la somme de 300.000 €, à titre d’indemnité de cessation de contrat d’agence commerciale et de

dommages et intérêts pour les agissements déloyaux ayant entouré la rupture ;

— Dire que le montant des condamnations portera intérêts au taux légal à compter

de l’exploit introductif d’instance avec anatocisme.

A titre infiniment subsidiaire :

Si la Cour s’estimait insuffisamment informée, il lui est demandé de désigner un expert afin

d’évaluer l’indemnisation de la société Sdlease pour le retrait du client AG2R La Mondiale Reunica en fonction du potentiel de chiffre d’affaires que ce dernier représente

pour la société Econocom Services, au sens de l’article 4.9.3 du contrat d’agence commercial ;

En tout état de cause :

— Déclarer non écrite la clause 4.9.3. du contrat d’agence commercial en date du 1er juillet

2013, en application des articles L.134-12 et L.134-16 du code de commerce qui ont transposé dans le droit national les articles 17, 18 et 19 de la Directive Européenne N° 86/563/CEE du 18 décembre 1986;

— A défaut de prononcer la nullité et avant de statuer sur la validité de la clause 4.9.3 du contrat d’agence commercial en date du 1er juillet 2013, il est demandé à la Cour de poser la question préjudicielle suivante à la Cour de Justice de l’Union Européenne :

« La clause permettant, dans un contrat d’agent commercial, de fixer à l’avance et forfaitairement le montant d’indemnisation pour le retrait d’un client ou d’une catégorie de clients ou territoire est-elle valide au regard des dispositions 17, 18 et 19 prévues par la Directive 86/653/CEE du Conseil du 18 décembre 1986 » '

— Débouter la société Econocom Osiatis France en l’ensemble de ses demandes ;

— Condamner la société Econocom Osiatis France au paiement de la somme de 8 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, au profit de la société Sdlease ;

— Condamner la société Econocom Osiatis France aux entiers dépens avec distraction au profit de Maître Debray en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile .

Vu les dernières conclusions notifiées le 22 octobre 2018 au terme desquelles la société Econocom-Osiatis France demande à la cour de :

A titre principal :

— Confirmer la décision du tribunal de commerce de Nanterre du 10 avril 2018;

et en conséquence

— Rejeter l’ensemble des demandes de la société Sdlease, et à ce titre :

Rejeter la demande de nullité du contrat d’agent du 1 er juillet 2013 ;

Rejeter la demande subsidiaire tendant à considérer que la société Econocom Osiatis, venant aux droits de la société Econocom Services a résilié le contrat d’agent commercial du 1 er juillet 2013 ;

Décider qu’il n’y a pas lieu à prononcer la nullité de l’article 4.9.3 du contrat d’agent du 1 er juillet 2013 ;

Décider qu’il n’y a pas lieu à expertise ;

Décider qu’il n’y a pas lieu à question préjudicielle.

A titre subsidiaire :

— Décider que la société Sdlease ne produit aucun élément de nature à démontrer l’existence et l’étendue de son préjudice ;

— Décider que les demandes de la société Sdlease sont fondées tant sur la responsabilité délictuelle que sur la responsabilité contractuelle ;

— Décider, si par extraordinaire la Cour d’appel considérait que les stipulations relatives à l’indemnisation de la société Sdlease pour le retrait du client AG2R était nulle, que celle-ci est en droit de percevoir une indemnisation d’un montant de 12.530 € en réparation de son préjudice ;

En conséquence,

— Rejeter l’ensemble des demandes la société Sdlease .

En tout état de cause :

— Condamner la société Sdlease au versement de la somme de 10.000 euros à la société Econocom Osiatis au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamner la société Sdlease aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Dupuis Marine, avocat conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 21 mars 2019.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions déposées par les parties et au jugement dont appel.

SUR CE, LA COUR

Sur la demande de nullité du contrat d’agence commerciale pour violence économique

à titre principal

La société Sdlease fait valoir qu’elle a été contrainte de signer le 1er juillet 2013 un nouveau contrat d’agence avec la société Econocom Services dans des conditions relevant de la violence économique alors qu’elle travaillait pour son mandant depuis plusieurs années. Elle considère que la société Econocom Services n’avait aucune raison objective de lui faire signer un nouveau contrat mais qu’elle a fait pression sur elle, bénéficiant du déséquilibre économique entre les parties. Elle relève que la signature d’un protocole d’accord concomitamment à la signature du contrat le même jour ne fait que révéler la conscience de la part de la société Econocom Services de l’altération du consentement de la société Sdlease. Elle estime qu’elle a ainsi signé un contrat d’adhésion avec des clauses déséquilibrées, qu’une diminution de sa rémunération sur les contrats en cours par l’instauration d’une commission fixe sur le chiffre d’affaires de 6 % par rapport à la moyenne du taux de commissionnement ancien sur marge qui s’élevait respectivement à 9 % et 8,2 % du chiffre d’affaires en 2011 et 2012 lui a été imposée.

Elle conclut à la nullité du contrat à titre principal pour vice du consentement et au versement de la somme de 350000 € à titre de dommages et intérêts.

En réponse, la société Econocom outre le fait qu’elle considère que ces demandes sont nouvelles et tardives, fait valoir qu’elles sont sans fondement, la violence économique invoquée par la société Sdlease ne pouvant l’être au regard des textes applicables à la date du contrat d’une part et celle-ci mélangeant d’autre part volontairement la notion de violence économique avec celle de déséquilibre économique.

Elle conclut à l’irrecevabilité des demandes et relève en tout état de cause qu’elles sont infondées. Elle explique qu’en raison d’une fusion, elle a décidé d’une résiliation des contrats des agents commerciaux pour tendre à une harmonisation , que le nouveau contrat a été négocié avec la société Sdlease, que celle-ci avait un conseil à ses côtés, que la signature du protocole d’accord établit qu’une négociation est intervenue et que la société Econocom Services n’a pas commis d’abus, que le changement de rémunération n’est pas défavorable à la société Sdlease.

Elle remarque que la société Sdlease ne justifie pas de son préjudice.

Elle demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Sdlease.

Sur ce

L’article 1109 du code civil dans sa version applicable à l’espèce dispose qu’il n’y a point de consentement valable si le consentement n’a été donné que par erreur, ou s’il a été extorqué par violence ou surprise.

L’article 1111 dans sa version applicable à l’espèce dispose que la violence exercée contre celui qui a contracté l’obligation est une cause de nullité du contrat.

La contrainte économique peut se rattacher à la violence.

En l’espèce, la société Sdlease invoque avoir subi une violence économique, faisant état de ce qu’elle a été contrainte de signer un nouveau contrat d’agence qui la défavorisait étant dans une situation de dépendance économique.

Contrairement à ce que soutient la société Econocom, la société Sdlease est recevable en sa demande celle-ci n’étant pas nouvelle, ayant soulevé la nullité du contrat devant les premiers juges. En revanche, il convient d’analyser si sa demande de nullité du contrat conclu le 1er juillet 2013 est bien fondée.

La société Sdlease se plaint de la contrainte économique qu’aurait exercée la société Econocom à son égard laquelle lui aurait imposé ses conditions sous la menace de ne plus payer les commissions, de ne plus accorder de nouveaux prospects , de ne pas ouvrir l’accès aux nouvelles activités.

Il est établi que la société Sdlease a signé un protocole d’accord le 1er juillet 2013 concomitamment au contrat d’agence dans lequel les parties ont convenu du sort donné aux

contrats antérieurs et du règlement des commissions liées aux affaires rapportées par l’agent au titre des contrats et qui se poursuivaient au-delà de la résiliation des contrats sur la base de commissionnements dérogatoires figurant en annexe 1.

La société Sdlease estime avoir été contrainte de signer ce protocole dont elle demande aussi la nullité l’ayant signé selon elle dans une situation de contrainte économique.

Cependant, il ressort d’un courrier qu’elle a adressé à la société Econocom Services le 12 décembre 2012 qu’elle a pris acte de la résiliation des deux contrats précédents, qu’elle est dans l’attente de propositions contractuelles nouvelles et qu’elle a l’intention de faire valoir ses droits.

Les deux sociétés ont donc négocié les termes du nouveau contrat et si la négociation n’avait pas abouti, la société Sdlease comme elle l’annonce dans son courrier du 12 décembre 2012 savait être en droit de solliciter une indemnité de fin de contrat.

Le contrat n’a été signé que six mois plus tard laissant le temps à la société Sdlease de choisir l’option qu’elle souhaitait prendre et de signer un protocole pour régler le sort des contrats antérieurs résiliés en précisant les modalités financières. Elle fait état de ce que son conseil ne l’assistait pas lors de la signature du contrat mais il lui appartenait si elle en avait trouvé la nécessité de le faire intervenir pour l’assister, celui-ci étant intervenu dans ses relations avec la société Econocom antérieurement comme en attestent des courriers rédigés le 15 décembre 2011 et le 23 février 2012 et des courriers adressés postérieurement à la signature du contrat du 1er juillet 2013 en mars 2015.

Enfin, la société Sdlease fait état de ce que la rémunération imposée par la société Econocom Services était inférieure à la précédente dans la mesure où l’instauration d’une commission fixe sur le taux de chiffre d’affaires de 6% était moindre que le taux de commissionnement mis en oeuvre antérieurement qui était calculé non pas sur le chiffre d’affaires mais sur la marge et s’élevait respectivement à 9 % et 8,2 % du chiffre d’affaires en 2011 et 2012.

La société Econocom fait valoir qu’il n’est pas établi que le calcul sur la marge était défavorable à l’agent commercial dans la mesure où asseoir la commission sur le chiffre d’affaires du client est plus fiable que sur la marge qui pouvait parfois être inexistante.

Pour démontrer ses dires, la société Sdlease produit un tableau intitulé 'tableau des marges 2011 et 2012" sans pour autant y préciser quel était le montant de ses commissions et sans fournir une analyse comparative avec les commissions perçues postérieurement pour les mêmes clients suivant le nouveau mode de calcul de la commission.

Dès lors, la cour au regard de cette pièce dénuée de pertinence n’est pas en mesure d’apprécier si le nouveau mode de calcul des commissions était défavorable à la société Sdlease.

Il résulte de ce qui précède que celle-ci ne démontre pas avoir signé le contrat du 1er juillet 2013 sous la contrainte économique.

Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté la société Sdlease de sa demande de nullité du contrat.

Sur la demande de résiliation du contrat aux torts de la société Econocom Osiatis France pour non respect des clauses contractuelles

— sur la nullité de la clause de l’article 4.9.3 du contrat

La société Sdlease soutient que la clause prévue à l’article 4.9.3 du contrat qui prévoit un mode de calcul de l’indemnité au titre du retrait d’un client alors que celui-ci est son client essentiel revient à contourner le caractère impératif de l’article L 134-12 du code de commerce, qu’elle doit dès lors être déclarée réputée non écrite.

Elle conclut à la nullité de la clause et à défaut demande à la cour de poser une question préjudicielle à la cour de justice de l’Union Européenne avant de se prononcer.

La société Econocom conclut au rejet de la demande de nullité de la clause. Elle explique que cette clause ne vide pas le contrat de l’agent commercial de 'sa substance’ comme le soutient la société Sdlease dans la mesure où la modification n’a pas eu d’impact significatif sur le périmètre du contrat de l’agent commercial, rappelant que les commissions versées à la société Sdlease pour l’AG2R ne correspondaient qu’à 13,7 % du montant global des commissions qui lui étaient versées.

*****

L’article L 134-16 du code de commerce dispose que 'est réputée non écrite toute clause ou convention contraire aux dispositions des …. L 134-12 et L 134-13 du code de commerce.

L’article L 134-12 du code de commerce prévoit qu’ 'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi…'

La cour relève que le mandant n’a pas souhaité en l’espèce mettre un terme au contrat d’agent commercial liant les parties mais revoir le périmètre de clientèle de l’agent.

Dès lors, la clause figurant à l’article 4-3-9 du contrat n’est pas une clause visée par les articles L 134-12 et L 134-16 du code de commerce.

Cependant, la société Sdlease prétend que sous couvert d’un retrait de client, la société Econocom Services a entendu contourner les dispositions de l’article L 134-12 du code de commerce en fixant une indemnité compensatrice relevant de l’article L 134-12 du code de commerce par le biais du retrait d’un client .

Elle demande à la cour au cas où elle entendrait rejeter sa demande de voir déclarer non écrite la clause litigieuse de poser une question préjudicielle à la cour de justice de l’Union Européenne qui serait libellée de la façon suivante : la clause permettant dans un contrat d’agent commercial , de fixer à l’avance et forfaitairement le montant d’indemnisation pour le retrait d’un client ou d’une catégorie de clients ou territoire est-elle valide au regard des dispositions 17,18 et 19 prévues par la directive 86/653/CEE du conseil du 18 décembre 1986 '

Il convient de rappeler que la directive européenne a été transcrite dans la loi française notamment sous les articles précités. Dès lors, la question posée par la société Sdlease est une question qui ne porte pas sur l’interprétation du droit de l’Union mais sur une question de fait. Il n’y a donc pas lieu de poser une question préjudicielle.

Il s’agit en effet de savoir si la modification du contrat d’agent commercial a eu pour conséquence la résiliation dissimulée de celui-ci aux fins de contourner la loi.

La cour relève que le périmètre du contrat d’agent commercial de la société Sdlease n’a pas été modifié de façon conséquente sauf à interdire toute évolution du portefeuille de l’agent commercial. Il ne s’agit donc pas d’une clause de résiliation qui serait dissimulée sous couvert du retrait d’un client ; elle n’est donc pas contraire aux dispositions des articles précités et n’a pas à être réputée non écrite.

— sur le non respect des dispositions du contrat

La société Sdlease qui demande de voir prononcer la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la société Econocom venant aux droits de la société Econocom Services reproche tout d’abord à celle-ci le non -respect des dispositions de l’article 4-9-2 du contrat du 1er juillet 2013 qui stipule que le mandant doit , en cas de retrait d’un client, proposer à l’agent un ou plusieurs clients et / ou prospects représentant un potentiel de chiffres d’affaires équivalent.

Elle considère qu’en refusant de lui proposer de lui affecter plusieurs clients ou prospects représentant le même potentiel de rémunération que le client AG2R qu’elle comptait lui retirer et ce avant de lui proposer une indemnisation, la société Econocom Services a manqué au respect de ses obligations .

Par-ailleurs, elle fait valoir que l’indemnisation proposée était insuffisante alors que celle-ci était destinée à compenser la perte potentielle de rémunération par l’agent du fait de la modification de secteur, l’indemnisation ayant été calculée sur les années passées lesquelles avaient été mauvaises pour des circonstances qui lui étaient étrangères alors qu’il convenait de prendre en compte le courant d’affaires futur.

Elle sollicite si nécessaire la désignation d’un expert aux fins d’évaluer l’indemnisation qui aurait du lui revenir.

En réplique, la société Econocom fait valoir que la société Sdlease fait une lecture parcellaire des clauses contractuelles lesquelles prises en leur ensemble prévoyaient que la société Econocom Services n’avait pas pour obligation de proposer de nouveaux clients à l’agent si cela lui était impossible, que la société Sdlease n’a pas eu l’intention de prendre de nouveaux clients mais d’obtenir une indemnisation disproportionnée, que pour sa part, elle considère que l’offre d’indemnisation était parfaitement en adéquation avec les termes du contrat alors que le montant de l’indemnisation sollicitée à hauteur de 300000 € par la société Sdlease est infondée et totalement disproportionnée.

*****

L’article 4-9 du contrat d’agent commercial du 1er juillet 2013 dispose que :

au 4-9-1 : le MANDANT pourra avec un préavis de six mois (notifié par courrier recommandé avec accusé de réception) modifier les clients entrant dans le secteur de représentation de l’AGENT (tels que listés en annexe 2 et/ ou dans la base RCE) à condition de respecter les conditions suivantes :

au 4-9-2 : Le MANDANT communiquera par écrit à l’AGENT le ou les clients dont il souhaite reprendre l’exploitation . En contrepartie, le MANDANT proposera à l’AGENT, en remplacement du ou des clients qui lui sont retirés un ou plusieurs clients et/ou prospects représentant un potentiel de chiffre d’affaires équivalent afin de maintenir à l’AGENT le même potentiel de rémunération.

Au 4-9-3 En cas de désaccord entre l’AGENT et le MANDANT sur le potentiel représenté par le ou les clients ou prospects proposés , ou en cas d’impossibilité pour le MANDANT de faire une proposition de remplacement , l’AGENT et le MANDANT tenteront par tout moyen de trouver une solution amiable. A cet effet, il est prévu que le MANDANT pourra proposer à l’AGENT une indemnité destinée à compenser la perte potentielle de rémunération subie par l’AGENT du fait de la modification de son secteur. Cette perte potentielle est estimée à un montant forfaitaire égal à douze (12 ) mois de commissions versées au titre des contrats sur le ou les clients concernés par la modification , ces commissions étant calculées sur la base de la moyenne des vingt quatre derniers mois pour un client de plus de deux ans et des douze derniers mois pour un client de moins de deux ans. Il est précisé que les vingt-quatre ou les douze derniers mois sont décomptés à partir de la fin du préavis tel que défini à l’article 4.9.1 ci-dessus et qu’il sera fait déduction des commissions d’avance éventuellement versées par le MANDANT à l’AGENT sur ce même client.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 8 décembre 2014, la société Econocom Services a informé la société Sdlease de son souhait 'de faire évoluer votre secteur de représentation et reprendre l’exploitation du compte client AG2R la mondiale et ses filiales qui vous sont affectées….et lui a écrit nous vous remercions de bien vouloir nous faire part de votre position à ce sujet, afin que nous arrêtions les termes de notre accord'.

Des échanges ont eu lieu sur la reprise du client AG2R entre les parties lesquelles se sont notamment réunies le 20 février 2015 pour en discuter.

Suite à cet échange, par courrier du 20 février 2015, la société Sdlease a écrit à la société Econocom Services qu’elle réalisait que chercher à conserver le client dans un contexte de conflit serait compliqué, qu’elle savait qu’il n’était pas possible de retrouver un compte équivalent avec la même dimension et le même potentiel en chiffre d’affaires, que d’ailleurs la société Econocom Services ne lui avait pas proposé de compte de remplacement comme cela était prévu à l’article 4-9-2 , que dès lors, elle proposait le versement par la société Econocom Services d’une somme de 100000 € pendant trois ans.

Il ressort de ces échanges de courriers que la société Econocom Services a respecté la procédure en envoyant une lettre pour manifester son intention de modifier les clients entrant dans le secteur de l’agent, que des échanges ont eu lieu, que dès le 20 février 2015, la société Sdlease prenait acte de ce qu’il était impossible de retrouver un compte équivalent à la société AG2R.

La société Sdlease ne peut dès lors reprocher à la société Econocom Services de ne pas avoir respecté son obligation de lui proposer d’autres clients, la société Econocom Services exposant pour sa part avoir été dans l’impossibilité de le faire et avoir en conséquence fait application des dispositions de l’article 4-9-3 du contrat prévoyant le cas d’impossibilité pour le MANDANT de faire une proposition de remplacement.

Concernant l’indemnisation, la société Econocom Services a proposé par courrier du 12 mars 2015 une indemnisation calculée suivant les modalités de calcul prévues à l’article 4-9-3 du contrat selon lesquelles l’indemnité correspondant à la perte potentielle du client est estimée à un montant forfaitaire égal à douze (12 ) mois de commissions versées au titre des contrats sur le ou les clients concernés par la modification , ces commissions étant calculées sur la base de la moyenne des vingt quatre derniers mois pour un client de plus de deux ans et des douze derniers mois pour un client de moins de deux ans. Il est précisé que les vingt-quatre ou les derniers mois sont décomptés à partir de la fin du préavis tel que défini à l’article 4.9.1 ci-dessus, déduction faite des commissions d’avance éventuellement versées par le MANDANT à l’AGENT sur ce même client.

Elle indique que le client AG2R la mondiale a généré des commissions sur les deux dernières années pour une moyenne annuelle de 12530 € correspondant à une facturation client moyenne (soit de 171790 € en 2013 pour 7409 € de commissions et de 268940 € de facturation client en 2014 pour 17561 € de commissions).

La cour relève que la société Econocom Services a donc respecté les termes du contrat dans son offre d’indemnité dont d’ailleurs la société Sdlease ne conteste pas le calcul alléguant seulement du fait que la perte potentielle de client devait être évaluée pour l’avenir.

Cette allégation est en contradiction avec les termes mêmes des clauses contractuelles précitées, la société Sdlease sollicitant une indemnisation à hauteur de 300000 € sans que les éléments de son calcul qui se réfèrent à une chiffre d’affaires global de l’entité AG2R La Mondiale Reunica ne soient en rapport avec les termes de calcul prévus au contrat.

Il n’y a pas lieu d’ordonner une expertise comme le sollicite la société Sdlease pour évaluer l’indemnisation correspondant au retrait d’un client, la société Sdlease ne justifiant pas de sa demande par des éléments pertinents.

En conséquence, il ressort de ce qui précède que la société Sdlease échoue à rapporter la preuve de manquements contractuels aux torts de la société Econocom.

Le jugement est confirmé.

Sur les actes de concurrence déloyale

La société Sdlease fait grief à la société Econocom-Osiatis France d’avoir adopté l’enseigne (pour ensuite évoquer la marque) Econocom-Osiatis et d’avoir ainsi créé une confusion dans l’esprit de la clientèle au profit de la société Osiatis dont l’activité concurrente s’est exercée au préjudice de la société Sdlease.

Cependant, le fait d’adopter une enseigne ou une marque commune aux sociétés objet de la fusion absorption ne caractérise pas une faute à la charge de la société Econocom-Osiatis France, la société Sdlease ne rapportant pas en outre la preuve d’un lien de causalité et d’un préjudice constitutifs d’actes de concurrence déloyale qu’elle allègue sans les expliciter et en rapporter la preuve.

Elle ne peut davantage invoquer le non respect d’une clause d’exclusivité concernant le client AG2R la mondiale qui serait constitutif d’acte de concurrence déloyale à la charge de la société Osiatis en l’absence de preuve du renouvellement de cette période d’exclusivité contractuelle laquelle était de six mois à compter de la date du contrat ou de la date d’affectation d’un client dans la base RCE suivant l’article 7 du contrat.

Elle reproche également à la société Econocom Services le brutal retrait du client AG2R la mondiale sans que pour autant ce retrait ne soit constitutif d’actes de concurrence déloyale.

Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté la société Sdlease de ses demandes de dommages et intérêts au titre d’actes de concurrence déloyale.

Sur les autres demandes :

Le jugement est confirmé en ce qu’il a condamné la société Sdlease aux dépens et au versement d’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Sdlease qui succombe en appel est condamnée aux dépens d’appel avec droit de recouvrement direct et à verser à la société Econocom Osiatis France la somme de 3000 € au titre des frais exposés non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement,

Confirme le jugement rendu le 10 avril 2018 par le tribunal de commerce de Nanterre en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déboute la société Sdlease de sa demande de question préjudicielle,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société Sdlease aux dépens avec droit de recouvrement direct,

La condamne à verser à la société Econocom Osiatis France la somme de 3000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

signé par Madame Thérèse ANDRIEU, Président et par Madame Patricia GERARD, Faisant Fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Faisant Fonction de greffier Le président,

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Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 9 juillet 2019, n° 18/03601