Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 14 janvier 2020, n° 17/00285

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 1re ch. 1re sect., 14 janv. 2020, n° 17/00285
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 17/00285
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 7 septembre 2016, N° 13/07778
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

1re chambre 1re section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 28A

DU 14 JANVIER 2020

N° RG 17/00285

N° Portalis DBV3-V-B7B-RHDB

AFFAIRE :

C I AA épouse X

E I AA épouse M N

D I AA épouse Y

C/

Z-AB A (décédé le […])

O P épouse A

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Septembre 2016 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section : 3

N° RG : 13/07778

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

— Me T U- DELAFOSSE,

— Me Xavier DECLOUX

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATORZE JANVIER DEUX MILLE VINGT,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant après prorogation le 07 janvier 2020, les parties en ayant été avisées dans l’affaire entre :

Madame C I AA épouse X

née le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Madame E I AA épouse M N

née le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Madame D I AA épouse Y

née le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

représentées par Me T U-DELAFOSSE, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 428

assistées de Me Elodie ALVES substituant Me Catherine FAVAT, avocat plaidant – barreau de PARIS

APPELANTES

****************

Monsieur Z-AB A

né le […] à […] et décédé le […]

INTIMÉ

****************

Madame O P épouse A

née le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

représentée par Me Xavier DECLOUX, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 315

assistée de Me AB FREGER, avocat plaidant – barreau de CRETEIL

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 21 Octobre 2019 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame AG LELIEVRE, Conseiller chargée du rapport et Madame Nathalie LAUER, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Alain PALAU, Président,

Madame AG LELIEVRE, Conseiller,

Madame Nathalie LAUER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

Vu le jugement rendu le 8 septembre 2016 par le tribunal de grande instance de Nanterre qui a :

— ordonné la mise hors de cause de Mme AG-AH A, en qualité de tutrice de Q A, décédée ;

— constaté que l’instance a été régulièrement reprise à l’égard de Z-AB A en qualité d’ayant droit de Q A ;

— dit Mmes C, D et E I-AA recevables en leurs demandes,

— ordonné le partage judiciaire de l’indivision existant entre d’une part, D, E, C I- AA venant aux droits d’R I-AA et d’autre part, Z-AB A, venant aux droits de Q I-AA épouse A relativement au bien immobilier sis […] ,

— constaté que le prix de la vente du bien immobilier indivis a été amiablement partagé entre les indivisaires, sans qu’aucune contestation ne s’élève de ce chef ;

— débouté Mmes C, D et E I-AA de leurs demandes de créances à l’encontre de l’indivision ;

— débouté Mmes C, D et E I-AA de leur demande relative aux loyers perçus par Q A de la SCM Radio Centre Paix à compter du mois de juin 2008 et jusqu’au 31 janvier 2011 ;

— débouté M. Z-AB A de sa demande reconventionnelle en fixation d’une indemnité d’occupation à l’encontre de Mmes D, C et E I-AA ;

— rejeté toute autre demande ;

— laissé à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles et de ses dépens ;

Vu l’appel de ce jugement interjeté le 10 janvier 2017 par Mme C X, Mme E AC N et Mme D Y ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 10 mai 2019 par lesquelles Mme C X, Mme E AC N et Mme D Y demandent à la cour de :

— juger recevables et bien fondées Mmes C, E et D I-AA en leur appel du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Nanterre le 8 septembre 2016 ,

Y faisant droit ;

Vu les articles 815-1 et suivants et 1873-11 du code civil,

— infirmer ledit jugement en ce qu’il les a déboutées de leurs demandes formulées à l’encontre de M. Z-AB A ,

— débouter l’intimé de l’ensemble de ses moyens, fins et conclusions,

Statuant à nouveau ;

— condamner Mme O P épouse A, ayant droit à la succession de M. Z-AB A, à verser à Mmes C, E et D I-AA :

·la somme de 11 022,36 euros au titre de sa contribution pour les dépenses liées à la chaudière ;

·la somme de 19 644,92 euros au titre de sa contribution pour les charges d’entretien de l’immeuble indivis,

·la somme de 18 352 euros au titre de la moitié des bénéfices de l’indivision perçus entre juillet 2008 et janvier 2011,

— juger que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du 20 avril 2013, date de réception de la mise en demeure,

— prononcer la capitalisation des intérêts échus et dus AC plus d’une année, en application de l’article 1343-2 du code civil,

— condamner Mme O P épouse A, ayant droit à la succession de M. Z-AB A, à verser à Mmes C, E et D I-AA la somme de 6 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner Mme O P épouse A, ayant droit à la succession de M. Z-AB A, aux entiers dépens et autoriser, pour ceux-là concernant, Me T U à en poursuivre directement le recouvrement, sur le fondement des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 6 juin 2019 par lesquelles Mme O P veuve A demande à la cour de :

Vu l’article 31 du code de procédure civile,

Vu les articles 418, 815-3, 815-9 et 815-17 du code civil,

Vu les pièces produites aux débats,

— confirmer le jugement du 8 septembre 2016 rendu par le tribunal de grande instance de Nanterre en ce qu’il a :

+débouté Mmes C I-AA épouse X, E I-AA épouse M-N et D I-AA épouse Y de l’intégralité de leurs demandes ;

A titre reconventionnel :

— infirmer le jugement du 8 septembre 2016 rendu par le tribunal de grande instance de Nanterre en ce qu’il a rejeté la demande de Mme O P veuve A au titre de l’indemnité d’occupation,

— condamner solidairement Mmes C I-AA épouse X, E I-AA épouse M-N et D I-AA épouse Y à payer à Madame O P veuve A la somme de 5 750 euros au titre de l’indemnité d’occupation due pour la période du 31 décembre 2010 au 7 décembre 2012 ;

En tout état de cause :

— condamner solidairement Mmes C I-AA épouse X, E I-AA épouse M-N et D I-AA épouse Y à payer à Mme O P veuve A la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner solidairement Mmes C I-AA épouse X, E I-AA épouse M-N et D I-AA épouse Y aux entiers dépens de l’instance ;

FAITS ET PROCÉDURE

Mme Q A et son frère, M. R I-AA, étaient propriétaires indivis à parts égales, d’un immeuble situé […] à Troyes, provenant de l’héritage de leurs parents .

Par acte sous seing privé en date du 26 février 1985, le rez-de-chaussée de cet immeuble a été donné à bail, à la société civile de moyens des Docteurs R I-AA, V J et Z-AI AJ.

M. R I-AA et son épouse résidaient au premier étage dudit immeuble.

En contrepartie de cette occupation, M.et Mme I-AA avaient convenu avec Mme Q A qu’elle serait seule bénéficiaire des loyers versés par la Société Civile de Moyens (SCM).

Au décès de M. R I-AA survenu le […], son épouse, Mme AK I-AA a continué à occuper l’immeuble et Mme Q A à percevoir, à titre d’indemnité d’occupation, l’intégralité des loyers versés par la SCM. Les lieux loués à la SCM des Docteurs R I-AA, V J et Z-AI AJ dans un premier temps ont été par la suite loués à SCM Centre radio paix.

Mme AK I-AA est décédée au mois de juin 2008.

Madame Q A a continué à percevoir l’intégralité des loyers versés par la SCM.

Par acte d’huissier du 21 janvier 2010, Mmes C I-AA épouse X, E I-AA épouse M-N et D I-AA épouse Y (ci-après les consorts I-AA) en leurs qualité d’héritières de leurs parents et Mme Q A ont délivré congé à la SCM Centre radio Paix pour le 31 décembre 2010.

Par jugement en date du 30 juin 2011 Mme Q A a été placée sous la tutelle de Mme AG-AH A.

Par acte notarié en date du 7 décembre 2012, le bien immobilier indivis a été vendu et son prix de vente a été partagé amiablement entre les consorts I-AA et Mme Q A.

A la suite de la vente, les consorts I-AA ont vainement réclamé à leur tante, Mme Q A, le remboursement de diverses dépenses prétendument effectuées pour la conservation du bien immobilier indivis.

C’est ainsi que par acte introductif d’instance du 14 juin 2013, Mesdames C, E et D I-AA ont assigné devant le tribunal de grande instance de Nanterre, Mme AG AH A, ès-qualités de tutrice de Mme Q A afin d’obtenir principalement sa condamnation à leur verser les sommes suivantes :11 022,36 euros au titre des dépenses liées à la chaudière, 19 644,92 euros au titre des charges d’entretien de l’immeuble indivis et 17 592,50 euros au titre des bénéfices de l’indivision perçus entre juillet 2008 et janvier 2011 correspondant à la moitié des sommes dont elles disent avoir fait seules l’avance sur leurs deniers personnels pour le compte de l’indivision ayant existé entre elles.

Q A étant décédée le […], les consorts I-AA ont attrait à la cause Z-AB A, venant seul aux droits de la défunte.

Z-AB A est, AC le jugement déféré, lui-même décédé le […], laissant pour lui succéder selon acte de notoriété du 24 novembre 2017, sa veuve, Mme O P, laquelle n’a été assignée en intervention forcée que le 27 mars 2019, après qu’une ordonnance d’interruption d’instance ait été rendue le 7 septembre 2017 par le magistrat chargé de la mise en état.

SUR CE , LA COUR,

Il n’est pas discuté, nonobstant le partage du prix de vente de l’immeuble indivis litigieux que les comptes d’indivision n’ont pas été établis.

La demande des appelantes vise à faire valoir leur créance sur l’indivision au titre des dépenses qu’elles disent avoir effectuées personnellement AC le décès de leurs parents ou antérieurement par leur mère, AK I-AA.

Le caractère recevable de cette demande n’est plus discuté en cause d’appel.

Sur les dépenses de remplacement de la chaudière

Les appelantes exposent que Mme AK I-AA a, courant 2007, assumé seule le coût de remplacement de le chaudière, pour un montant total de 22 077,41 euros dont elles sollicitent le remboursement par Mme O A à hauteur de moitié, soit de 11 022,36 euros.

Elles font valoir à cet effet qu’en matière d’indivision, les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis ne se réduisent pas aux actes conservatoires au sens général de cette expression en droit civil ; que la jurisprudence a ainsi dégagé des critères de la mesure nécessaire à la conservation du bien, qui est destinée à parer un péril qui menace la conservation matérielle ou juridique d’un bien indivis, ladite mesure ne devant pas mettre en péril l’existence des droits des indivisaires ; elles soutiennent que la chaudière était vétuste et fonctionnait mal et que son remplacement était d’autant plus nécessaire que les coïndivisaires, en tant que bailleurs de la partie située au rez de chaussée de l’immeuble, étaient tenus de délivrer et d’entretenir les locaux loués de manière à permettre au locataire d’ y exploiter son activité dans de bonnes conditions, conformément aux articles 1719 et 1720 du code civil. Elles rappellent que le preneur exploitait un cabinet médical de radiologie et se réfèrent aux attestations des locataires. Elles font valoir que l’acte passé unilatéralement par Mme I-AA est valable et opposable à Mme O P épouse A ayant droit à la succession de M. Z-AB A, qui doit supporter la dépense à hauteur de la moitié.

Pour s’opposer à cette demande, l’intimée fait valoir que le remplacement d’une chaudière constitue un acte d’administration et non un acte de conservation. Elle prétend sur ce point que ne peut être qualifiée de mesure nécessaire à la conservation du bien indivis, qu’une mesure ayant pour fonction de préserver le bâti de l’immeuble et non d’en assurer le confort ; que tel n’est pas le cas du changement d’une chaudière auquel Mme I-AA a procédé en raison de son occupation de l’immeuble. Elle critique, en raison de leur tardiveté, les attestations émanant des anciens locataires, produites par les appelantes ainsi qu’en raison de l’identité de l’un des témoins, M. K L dont les appelantes sollicitent le remboursement de prestations d’entretien fournies par ce dernier et de la communauté d’intérêts liant les témoins aux consorts I-AA . Elle relève qu’en vertu de l’article 815-3 du code civil, l’accord des indivisaires titulaires d’au moins deux tiers des droits indivis était donc nécessaire pour procéder au remplacement de la chaudière et que selon l’alinéa 3 de ce texte, Mme I-AA aurait dû informer Mme Q A de l’acte d’administration qu’elle entendait effectuer.

Mme O A observe en outre que les appelantes ne versent aux débats qu’une simple facture de la société Tribouley du 20 novembre 2007, libellée à l’ordre de Mme I-AA qui n’est pas de nature à démontrer son propre consentement ou son information concernant la dépense litigieuse.

Elle prétend qu’à défaut d’accord la décision de remplacer la chaudière était inopposable à Mme Q A et en conséquence à son ayant-droit ; que Mesdames E, C et D I-AA ne justifient nullement que le remplacement de la chaudière constituait un acte matériel nécessaire à la conservation du bien indivis ; que les dispositions de l’article 815-2 du code civil n’ayant pas vocation à s’appliquer en l’espèce, l’accord de Mme Q A était nécessaire, de sorte que la décision de changer la chaudière, prise unilatéralement par Mme I-AA , sans que soit recueilli cet accord, est inopposable à cette dernière.

***

Il résulte de l’article 815-13 du code civil que lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu’il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu’elles ne les aient point améliorés.

Selon l’article 815-2 du code civil, tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la

conservation du bien indivis, même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence .

L’article 815-3 du code civil fixe les règles en matière d’administration des biens indivis.

Le remplacement d’une chaudière ne constitue pas un acte d’administration.

La question posée est donc de savoir si cette mesure était nécessaire au regard de l’article 815-2 du code civil et si le remplacement de la chaudière a amélioré le bien, au sens de l’article 815-13 du code civil.

L’intimée ne peut sérieusement soutenir qu’une maison peut ne pas être équipée de chauffage sans pour autant se dégrader alors que le bien immobilier litigieux était pourvu d’une installation de chauffage, que Mme I-AA continuait d’occuper le bien, ce en contrepartie de quoi Mme Q A percevait, à titre d’ indemnité d’occupation les loyers procurés par la location du rez de chaussée et qu’il était nécessaire que la maison qui comportait une surface globale de 700 m² soit équipée d’une installation de chauffage pérenne.

Les appelantes soulignent à juste titre que l’ensemble des coïndivisaires étaient tenus de délivrer des locaux conformes au bail à la conclusion duquel Mme Q A avait consenti, c’est à dire des locaux bénéficiant d’une installation de chauffage fonctionnant dans des conditions normales.

Il résulte suffisamment des attestations produites aux débats, que l’intimée ne critique pas utilement, dans la mesure où d’une part il importe peu qu’elles ne soient produites qu’en appel, et où d’autre part, la communauté d’intérêts prétendue entre les appelantes et les témoins n’est pas démontrée, que l’installation de chauffage, selon M. V J qui est l’un des médecins ayant fait partie de la SCM locataire, était, vétuste et particulièrement contraignante ; que la chaudière remplacée était une chaudière à vapeur déficiente , nécessitant un remplissage régulier d’eau , que son remplacement était devenu impératif ; M. J précise avoir toujours connu cette chaudière, ce dont il se déduit qu’elle était déjà présente dans les locaux en 1985, lors de la conclusion du bail.

M. K L qui dit avoir assuré l’entretien du jardin et accompli de multiples travaux de réfection dans la maison, AC 1976, indique pour sa part avoir toujours connu la chaudière à vapeur, qui présentait des problèmes de fuite d’eau, confirme sa vétusté et les difficultés rencontrées AC longtemps par le cabinet médical en raison des pannes de chauffage.

Au vu de ces circonstances, la nécessité du remplacement de cette chaudière de plus de 31 ans d’ancienneté dont la nature était obsolète et le fonctionnement défectueux ne peut être sérieusement contestée. Mme I-AA y a ainsi légitimement procédé en application de l’article 815-2 du code civil. Il n’est au surplus pas contestable qu’il s’agit à tout le moins d’une dépense d’amélioration s’agissant de la mise en oeuvre d’un élément d’équipement indispensable compte tenu de l’occupation des lieux , non seulement par certains coïndivisaires mais également par des locataires et plus moderne que celui, défaillant, qui préexistait.

En conséquence, les appelantes qui produisent une facture émanant de la société Tribouley en date du 20 novembre 2007 dont il n’est pas contesté qu’elle a été acquittée par Mme AK I-AA, sont fondées à faire valoir une créance sur l’indivision de 22 078,41 euros, en application de l’article 815-13 du code civil, dont l’intimée doit être déclarée redevable à hauteur de la moitié, soit de 11 022,36 euros.

Sur les dépenses relatives aux charges d’entretien de l’immeuble indivis

Les appelantes sollicitent au titre des dépenses d’entretien de l’immeuble le remboursement de la somme de 39 289,84 euros sur le fondement de l’article 815-10 alinéa 4 du code civil selon lesquelles, chaque indivisaire a droit aux bénéfices provenant des biens indivis et supporte les pertes

proportionnellement à ses droits dans l’indivision.

Elles exposent que les tâches réalisées par le dénommé « K » s’apparentent à des actes de gestion courante et non à des actes dits d’administration ; que dès lors qu’aucune disposition du code civil ne précise que les actes de gestion courante nécessitent l’accord de tout ou partie des indivisaires, ils peuvent être passés par un indivisaire seul et qu’il appartient à l’ensemble des indivisaires d’y contribuer chacun à hauteur de leur quote-part.

Elles soutiennent de même avoir intégralement payé les factures EDF, France Télécom, Sécuritas et les factures d’approvisionnement en fioul.

Elles critiquent le jugement de les avoir déboutées de leurs demandes en retenant notamment qu’elles avaient conservé la jouissance privative de l’immeuble, suite au décès de leur père et mère, ce qu’elles contestent. Elles font en premier lieu valoir que l’immeuble n’a jamais été occupé privativement dans sa totalité par M.et Mme I-AA qui ne disposaient que d’un droit d’usage sur une partie de celui-ci, soit sur le premier étage. Elles font valoir que Mme Q A a toujours eu la jouissance du 2e étage de l’immeuble, suite au décès de sa mère et qu’elle a toujours disposé d’un jeu de clefs pour accéder à l’immeuble de sorte qu’elles n’étaient pas tenues de lui en remettre un autre au décès de leurs parents ; que l’immeuble lui était accessible, que des meubles appartenant en propre à Z-AB A s’y trouvaient. Elles font valoir que les dépenses exposées étaient liées à la surveillance de l’immeuble, à son chauffage, qui bénéficiaient à tous, y compris à la société locataire du rez de chaussée ; que ces charges incombaient donc à l’indivision.

Elles incluent dans ce décompte une facture « Tredi » relative à l’enlèvement d’un transformateur à pyralène se trouvant dans le cabinet médical du rez de chaussée qui a été nécessaire avant la vente du bien, dans la mesure où il s’agissait d’un appareil polluant, ce à quoi il a été procédé en 2011 avant la mise en vente du bien.

Elles invoquent enfin l’existence d’autres factures : des factures d’huissier, facture d’avocat liée au congé délivré au preneur.

L’intimé s’oppose à l’ensemble de ces demandes, en faisant valoir principalement :

— s’agissant de la rémunération de « K » pour l’entretien de l’immeuble, pour un montant de 6 613,08 euros que ne sont versés aux débats , ni contrat de travail, ni devis, ni factures relatives aux services prétendus et que les pièces produites ne justifient légalement d’aucune dépense ;

— s’agissant des demandes formulées au titre des factures de la société d’assurance Aviva, que la cour ne peut condamner Mme O A à rembourser lesdites sommes qui ont été payées par M. Dominique M N qui n’est pas partie à la procédure, sans que soit connu le régime matrimonial de Mme E I-AA épouse M-N ;

— s’agissant des factures de la société Tribouley pour un montant de 2 139,20 euros, que ces factures caractérisent des actes d’administration pour lesquels l’accord des indivisaires titulaires d’au moins 2/3 des droits indivis est nécessaire et que Mme Q A n’a jamais donné son accord sur les travaux réalisés ;

— s’agissant des factures EDF, France Telecom, Securitas et CPE correspondant à la fourniture de fioul, pour un total de 9 915,85 euros, que ces dépenses ne sont pas liées à la conservation du bien immobilier dont Mme Q A était coïndivisaire, mais uniquement à l’usage exclusif du bien immobilier des appelantes ; que cet usage exclusif est démontré par les factures de consommation d’électricité, de fioul et de de téléphone pour les années 2008 à 2012 ; qu’il importe peu que ces consommations soient faibles ; qu’il est contesté que Mme Q A aurait eu la jouissance

privative du 2e étage de l’immeuble ; que son état de santé excluait cela ;

— s’agissant de la demande formulée au titre de la facture Tredi, correspondant à l’enlèvement d’un transformateur PCB se trouvant dans le cabinet médical exploité dans les locaux loués du rez de chaussée, qu’il n’y avait pas d’obligation d’enlèvement de ce matériel et qu’en outre cette opération correspond à un acte d’administration au sens de l’article 815-3 du code civil auquel Mme Q A n’avait pas donné son accord et qu’il n’y avait pas de mandat tacite de sa part pour gérer le bien ;

— s’agissant des demandes de remboursement de deux factures d’huissier pour 1 399,45 euros et d’avocat pour 2 368,08 euros et d’une facture de l’entreprise 3ECAD d’un montant de 1 000 euros qu’aucune facture n’est produite aux débats et que les relevés bancaires sont insuffisants à justifier les prétentions des appelantes.

***

Sur les dépenses d’entretien correspondant à la rémunération d’un tiers

Il est réclamé une somme de 6 613,08 euros correspondant à la rémunération des services rendus de 2008 à 2012 par « K » qui, selon les affirmations des appelantes, a procédé à l’accompagnement des agences immobilières pour les visites de l’immeuble après sa mise en vente et a entretenu le jardin et la maison.

D’une part, il apparaît en effet qu’aucun accord n’a été requis de Mme Q A ou de sa tutrice en ce qui concerne l’emploi de K, son objet et sa rémunération ; que d’autre part, comme l’a dit le premier juge, les dépenses invoquées ne résultent que de décomptes manuscrits établis par l’intéressé, sans qu’aucun contrat de travail, ni bulletin de salaire ou chèques emplois services soient produits ; que la réalité de la dépense et son montant ne résultent pas de pièces suffisamment probantes.

La demande de ce chef est donc écartée.

Sur les primes versées à la société d’assurance Aviva

Les appelantes réclament à ce titre le remboursement de la moitié des primes d’assurances au titre du contrat d’assurance multi-risque-habitation pour les années 2009 à 2012, qui se sont élevées à 4 675 euros pour ces quatre années.

Comme l’a à juste titre retenu le premier juge, le versement de primes d’assurance au titre d’un contrat multi-risque-habitation constitue une dépense de conservation du bien indivis en ce qu’il est destiné à garantir sa valeur en cas de sinistre , à laquelle l’ensemble des coïndivisaires doit contribuer. Le contrat d’assurance et ses conditions particulières a été versé au débat devant la cour. Les réglements effectués ne sont pas contestés.

Il importe peu que ceux-ci aient été avancés par le mari de Mme E I-AA, qui a agi pour le compte et dans l’intérêt de l’indivision avec mandat tacite des consorts I-AA.

Il convient dès lors de condamner Mme O A à rembourser aux appelantes la moitié de la dépense, soit la somme de 2 337,50 euros.

Sur les demandes au titre des factures de la SAS Tribouley

Les appelantes arguent de diverses factures versées aux débats émanant de la société Tribouley pour un montant total de 2 139 euros dont elles demandent le remboursement à hauteur de moitié.

Ces dépenses correspondent à l’entretien de la chaudière qui est une mesure nécessaire à la pérennité d’un élément d’équipement indispensable à la conservation de l’immeuble.

Les consorts I-AA ont pu les engager, conformément aux dispositions de l’article 815-2 du code civil sans avoir besoin de recourir à l’accord de Mme Q A.

Les appelantes sont donc fondées à en réclamer la moitié à Mme O A, soit la somme de 1069,50 euros.

Sur les demandes au titre des factures EDF, France Télécom, Securitas et CPE et sur la demande de paiement de la moitié des loyers

Les appelantes réclament à ce titre le remboursement de la moitié des sommes suivantes :

—  4 791,05 euros (abonnement et consommation EDF),

—  1 055,65 euros (abonnement et consommation France telecom),

—  1 476,55 euros (abonnement auprès de la société Securitas),

—  2 592,60 euros (factures de fourniture de fioul),

—  35 704 euros (loyers perçus par Mme Q A de juillet 2008 à janvier 2011).

Il apparaît que le tribunal a exactement écarté ces demandes, par des motifs pertinents que la cour adopte.

En effet, il est constant que les parents des appelantes occupaient à titre privatif l’appartement situé au premier étage de l’immeuble en vertu d’un accord conclu entre eux et Mme Q A, celle-ci en contrepartie, percevant seule les loyers relatifs au bail conclu par l’indivision avec le cabinet médical occupant le rez de chaussée.

Ce mode de fonctionnement n’a pas été dénoncé après le décès de Mme I-AA, mère des appelantes, survenu en 2008. Ces dernières n’ont en effet jamais sollicité auprès de leur tante le versement de la quote-part des loyers qui auraient pu leur revenir si l’accord conclu avait été dénoncé, ni fait savoir qu’elles n’entendaient plus profiter de la jouissance exclusive de l’appartement du premier étage. Elles n’ont en effet présenté des demandes au titre des loyers litigieux et des dépenses engagées que postérieurement à la vente du bien dont le prix a été partagé à l’amiable et pour la première fois officiellement par un courrier valant mise en demeure de leur conseil en date du 19 avril 2013.

Il leur appartenait de mettre fin à la jouissance divise de partie du bien qui leur a été transmise suite au décès de leur dernier parent, en remettant à disposition de l’ensemble des indivisaires la jouissance de l’immeuble dans son intégralité, sauf les locaux loués, ce qu’elles ne démontrent pas avoir fait. Il n’est pas contesté que l’accès à l’immeuble était sécurisé par l’utilisation d’un code d’accès dont il n’est pas démontré que Mme Q A avait connaissance. Il est de plus, sans incidence que Mmes I-AA aient établi leur résidence principale en un autre lieu dans la mesure où la jouissance exclusive du bien n’implique pas une occupation physique permanente de celui-ci. Il résulte en outre de la nature des dépenses alléguées, relatives à des consommations d’électricité, de téléphone et d’énergie, la preuve d’une occupation effective, temporaire, qui n’était pas le fait de Mme Q A qui a été placée sous tutelle et dans une maison de retraite médicalisée.

A cet égard, l’attestation de M. L est insuffisante à établir que Mme Q A disposait de la jouissance du second étage de l’immeuble.

Les appelantes n’établissent pas que Mme Q A disposait d’un accès à la maison, M. et Mme I-AA en étant, de leur vivant, les seuls occupants avec les locataires.

La demande de prise en charge des dépenses inhérentes à la jouissance de partie de l’immeuble ne peut donc qu’être rejetée.

En outre, en ce qui concerne le contrat de surveillance à distance, s’il a pu constituer une dépense utile à l’ensemble de l’indivision, il n’est pas établi, s’agissant d’un acte d’administration que le consentement de Mme Q A ou de sa tutrice ait été sollicité lors de sa conclusion. La demande de remboursement à ce titre doit donc être, elle aussi, rejetée.

Compte tenu de ce qui précède, les consorts I-AA, en l’absence de preuve de la libération effective des lieux occupés par leurs parents et de mise à disposition de ceux-ci à leur coïndivisaire, ce dont il résulte qu’elles ont conservé la jouissance exclusive de ceux-ci, doivent être déboutés de leur demande de paiement de la quote-part de loyers correspondant à leurs droits dans l’indivision, puisque celle-ci était due à Mme Q A à titre d’ indemnité d’occupation.

Sur les demandes formulées au titre de la facture de la société TREDI

Les appelantes réclament à ce titre le remboursement de la moitié de la somme de 4 670,33 euros correspondant à la dépense engagée pour procéder à l’enlèvement du transformateur PCB installé dans les locaux du cabinet médical, matériel potentiellement polluant.

Le paiement et sa finalité ne sont pas contestés dans leur matérialité.

Il doit être retenu que les coïndivisaires s’étaient mis d’accord pour vendre le bien et que l’enlèvement du transformateur était une mesure nécessaire à la vente dont il ne peut être reproché aux consorts I-AA d’avoir pris l’initiative, eu égard au risque présenté par cet appareil, ce afin de favoriser la vente. Il convient de se reporter à la pièce n°28 des appelants qui est un échange de mail entre M. M-N et M. Z-AB A lequel démontre que celui-ci, informé de l’enlèvement du transformateur, n’a pas désapprouvé cette initiative et considérait bien qu’il s’agissait d’un élément de moins value.

Dans ces conditions il sera fait droit à la demande de partage de cette dépense.

Mme O A sera donc condamnée à payer à ce titre la somme de 2 335,16 euros.

Sur les demandes formulées au titre des frais d’huissier, d’avocat et de l’entreprise 3ECAD

Les appelantes sollicitent le remboursement de la moitié des honoraires d’huissiers exposés aux fins de permettre la vente du bien, libre d’occupation, ce qui a nécessité de faire délivrer un congé à la société locataire. Il a également été procédé à un constat d’état des lieux avant le déménagement de matériel lourd du cabinet médical.

Les frais invoqués ont constitué des mesures nécessaires préalables à la vente décidée d’un commun accord et accomplies dans l’intérêt de l’indivision.

Il est justifié du paiement d’une somme de 830 euros (procès-verbal de constat des lieux) et d’une autre somme de 569,45 euros (délivrance du congé).

Les appelantes ne justifient en revanche ni d’une facture d’honoraires d’avocat, ni n’explicitent en quoi ceux-ci correspondraient à des frais engagés pour l’indivision, ni de la facture de l’entreprise 3ECAD.

Il sera en conséquence fait droit à la seule demande de partage des frais d’huissier, en conséquence de quoi, Mme O A sera condamnée à payer aux consorts I-AA la moitié de la somme de 1 399,45 euros, soit 699,72 euros.

Mme O A doit donc être condamnée en définitive à payer aux consorts I-AA la somme globale de 17 464,24 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 20 avril 2013, date de mise en demeure. Il sera fait droit à la demande de capitalisation des intérêts présentée par les appelantes conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil, à compter du présent arrêt.

Sur l’ indemnité d’occupation réclamée par Mme O A

Mme O A sollicite sur le fondement de l’article 815-9 alinéa 2 du code civil, la condamnation des appelantes à payer une indemnité d’occupation au titre de leur jouissance exclusive de l’appartement du premier étage pour la période allant du 1er janvier 2011, à compter de laquelle Mme Q A n’a plus perçu de loyer, en raison de la fin du bail consenti à la SCM Centre Radio Paix jusqu’au 7 décembre 2012, date de la vente du bien.

Elle sollicite une indemnité d’occupation de la moitié de 500 euros par mois, équivalente au loyer qu’elle percevait, ce pendant 23 mois, soit une somme de 5 750 euros.

Les consorts I-AA s’opposent à juste titre à cette demande dès lors qu’il incombe à Mme O A de justifier de la valeur vénale du bien immobilier, ce qu’elle ne fait pas, puisqu’elle ne verse aucune pièce tendant à l’établir.

Mme O A sera donc déboutée de sa demande de ce chef.

Sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile

Le tribunal a exactement statué sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile.

Compte tenu de la nature du litige, chacune des parties conservera la charge de ses dépens d’appel. Il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Les parties sont donc respectivement déboutées de leurs demandes à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

CONFIRME le jugement en ce qu’il a :

— ordonné le partage judiciaire de l’indivision existant entre d’une part, D, E et C I-AA venant aux droits d’R I-AA et d’autre part, Z-AB A, venant aux droits de Q I-AA épouse A relativement au bien immobilier sis […],

— débouté Mmes C, D et E I-AA de leur demande relative aux loyers perçus par Q A de la SCM Radio Centre Paix à compter du mois de juin 2008 et jusqu’au 31 janvier 2011,

— débouté M. Z-AB A de sa demande reconventionnelle en fixation d’une indemnité d’occupation à l’encontre de Mmes D, C et E I-AA,

— statué sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile,

L'

INFIRME en ses autres dispositions critiquées,

Statuant à nouveau et ajoutant au jugement entrepris,

CONDAMNE Mme O A à payer aux consorts I-AA la somme globale de 17 464,24 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 20 avril 2013,

DIT que les intérêts susvisés seront capitalisés conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil, à compter du présent arrêt,

REJETTE toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d’appel et de ses frais,

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Madame AG LELIEVRE, conseiller pour le président empêché, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Conseiller,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 14 janvier 2020, n° 17/00285