Cour administrative d'appel de Marseille, 15 avril 2011, n° 10MA02398

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Marseille, 15 avr. 2011, n° 10MA02398
Juridiction : Cour administrative d'appel de Marseille
Numéro : 10MA02398
Décision précédente : Tribunal administratif de Toulon, 21 avril 2010, N° 0805234

Sur les parties

Texte intégral

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE MARSEILLE

N° 10MA02398-10MA03091


COMMUNE DE LA GARDE

c/ M. Y X

________

Mme Massé-Degois

Rapporteur

________

Mme Fedi

Rapporteur public

________

Audience du 22 mars 2011

Lecture du 15 avril 2011

________

54-04-03-02

C

lv

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

La Cour administrative d’appel de Marseille

(2e Chambre)

Vu, I, sous le n° 10M02398, la requête et le mémoire enregistrés les 24 juin et

4 août 2010, présentés pour la COMMUNE DE LA GARDE dont le siège est Hôtel de Ville

XXX dûment représentée par son maire en exercice habilité par une délibération en date du 21 mars 2008, par la SCP d’avocats Nicolaÿ-de Lanouvelle-Hannotin ;

La COMMUNE DE LA GARDE demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0805234 en date du 22 avril 2010 par lequel le tribunal administratif de Toulon l’a condamnée à verser à M. X, pour la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2007, la somme de 45 369,69 euros ;

2°) de rejeter la demande de M. X ;

3°) de mettre à la charge de M. X la somme de 5 000 euros au titre des frais d’instance ;

Elle soutient que le jugement est irrégulier dès lors que le juge a omis de viser les notes en délibéré produites les 19 et 23 mars 2010 par M. X ; que le premier juge a, à tort, écarté la prescription quadriennale régulièrement opposée par le maire ; que s’agissant de la période non prescrite, la demande indemnitaire de M. X est infondée dès lors qu’elle repose sur des heures de présence sur le lieu de travail et non sur des heures de travail effectif ; que M. X ne peut invoquer ni la directive 93-104 du Conseil du 23 novembre 1993 ni la jurisprudence communautaire dès lors que cette directive exclut de son champ d’application la rémunération d’un agent public ; qu’en outre, les collectivités territoriales disposent d’une compétence particulière en matière de détermination du temps de travail de leurs agents notamment pour instaurer un système d’équivalence ; qu’alors que M. X ne se prévalait pas du décret

n° 2002-813 du 3 mai 2002 et indiquait même dans sa requête que ce décret n’était pas applicable à sa situation, le juge de première instance a fondé sa décision sur ces dispositions réglementaires ; que le juge désigné a ainsi méconnu son office ; qu’à titre subsidiaire, si la demande indemnitaire était fondée en droit et que le décret n° 2002-813 devait être écarté, en tout état de cause, cette demande repose sur un calcul inexact ; que les pièces du dossier attestent de ce que M. X était en congés du 6 au 16 janvier 2003 et qu’ainsi, le nombre d’heures de présence de l’intéressé était non de 261 mais de 153 correspondant à 144 heures de présence le samedi, le dimanche et la nuit auxquelles s’ajoutent 9 heures de présence un jour férié payées en heures supplémentaires ; que, de même, il ressort de la liste de pointage que le nombre d’heures de présence pour le mois de juillet 2003 s’élève à 192 et non à 267 ; que, dans ces conditions, la somme de 45 369,69 euros doit être ramenée à 27 934,58 euros compte tenu, en outre, de la période prescrite ; qu’enfin, en application des dispositions du décret du 3 mai 2002, a été versé à M. X un trop perçu au cours des années 2003 à 2007 de 19 138,79 euros ; que M. X a écarté, dans ses conclusions, l’application du décret précité dès lors qu’il a perçu une rémunération au titre de cette période supérieure à celle à laquelle il était en droit de prétendre ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2010, présenté pour M. X par Me Lopasso, avocat, qui conclut :

— à la confirmation du jugement entrepris en tant qu’il a condamné la COMMUNE DE LA GARDE à lui verser la somme 45 369,69 euros et à sa réformation en tant qu’il a rejeté sa demande tendant à la reconstitution de sa carrière ;

— à ce qu’il soit enjoint à la COMMUNE DE LA GARDE de reconstituer sa carrière et de procéder au règlement ainsi qu’à la régularisation des contributions sociales afférentes aux heures supplémentaires en litige dans un délai de six mois à compter de la décision à intervenir sous peine d’astreinte de 200 euros par jour de retard ;

— à la condamnation de la COMMUNE DE LA GARDE à lui verser la somme de

3 000 euros au titre des frais d’instance ;

M. X soutient que la requête est tardive ; que la requérante a eu communication des notes en délibéré qu’il a produites ; que la prescription n’a pas été opposée, en première instance, de manière régulière par l’avocat de la COMMUNE DE LA GARDE ; que l’arrêté du 22 mars 2010 ne permet pas de régulariser la procédure ; que le déséquilibre entre le délai imparti aux créanciers de l’administration et celui octroyé aux personnes publiques créancières constitue une atteinte à l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que le tribunal n’a commis aucune erreur de droit ; que les heures d’astreinte ou de permanence en litige constituent des heures de travail effectif ; que les dispositions de la directive 93/104, et notamment celles de l’article 2, s’appliquent à tous les secteurs d’activité ; que la requérante n’apporte aucun élément de nature à établir le caractère inexact des calculs des heures qu’il a effectuées au cours de la période du 1er janvier 2003 au

31 décembre 2007 ; qu’en conséquence, la requête de la COMMUNE DE LA GARDE doit être rejetée ; qu’il entend, en outre, former un appel incident et demander à la Cour d’enjoindre à la requérante de reconstituer sa carrière et de procéder au règlement ainsi qu’à la régularisation des contributions sociales afférentes aux heures supplémentaires en litige dans un délai de six mois à compter de la décision à intervenir sous peine d’astreinte de 200 euros par jour de retard ;

Vu le mémoire enregistré le 1er mars 2011, présenté pour la COMMUNE DE LA GARDE , par la SCP d’avocats Nicolaÿ-de Lanouvelle-Hannotin ;

La requérante persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens en faisant, en outre, valoir que le moyen d’ordre public communiqué aux parties susceptible de fonder la décision de la Cour est de nature à conduire à l’annulation du jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 18 mars 2011, présenté pour M. X par Me Lopasso, avocat ;

M. X persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens en faisant, en outre, valoir que si la Cour venait à retenir le moyen d’ordre public communiqué aux parties susceptible de fonder sa décision, il conviendrait alors que la juridiction évoque le dossier ;

Vu, II, sous le n° 10MA03091, la requête enregistrée le 4 août 2010, présentée pour la COMMUNE DE LA GARDE dont le siège est XXX, par la SCP d’avocats Nicolaÿ-de Lanouvelle-Hannotin ;

La COMMUNE DE LA GARDE demande à la Cour :

1°) d’ordonner le sursis à exécution du jugement n° 0805234 en date du 22 avril 2010 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulon l’a condamnée à verser à

M. X, pour la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2007, la somme de

45 369,69 euros ;

2°) de mettre à la charge de M. X la somme de 3 000 euros au titre des frais d’instance ;

Elle soutient qu’en application des dispositions de l’article R. 811-16 du code de justice administrative, elle est fondée à demander le sursis à exécution du jugement dont elle sollicite, par ailleurs, l’annulation, dès lors que l’exécution de cette décision risque de l’exposer à la perte définitive d’une somme qui ne devrait pas rester à sa charge dans le cas où ses conclusions d’appel seraient accueillies ; qu’en l’espèce, le jugement en cause l’a condamnée à verser à

M. X une somme manifestement sans proportion avec la rémunération de l’intéressé ; qu’ainsi, dans l’hypothèse où sa requête à fin d’annulation du jugement serait accueillie, la rémunération de M. X ne lui permettra pas de rembourser ladite indemnité ; qu’à titre subsidiaire, l’exécution du jugement entrepris risque d’entraîner des conséquences difficilement réparables et les moyens présentés à l’appui de ses conclusions à fin d’annulation sont sérieux ; que, dans ces conditions, le sursis à exécution du jugement peut être également prononcé sur le fondement des dispositions de l’article R. 811-7 du code de justice administrative ; que l’existence du risque de non remboursement doit s’apprécier par rapport aux revenus du créancier ; qu’en outre, le magistrat désigné a commis une double erreur de droit en écartant la prescription quadriennale et en admettant le caractère fondé de la demande indemnitaire de M. X ; que, par ailleurs, en application du décret du 3 mai 2002, M. X aurait dû percevoir la somme de 19 138,79 euros ; que le magistrat désigné a donc méconnu le principe selon lequel une personne publique ne peut pas se voir condamner à verser une somme qu’elle ne doit pas ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 décembre 2010, présenté pour M. X par

Me Lopasso, avocat, qui conclut au rejet de la requête de la COMMUNE DE LA GARDE et à sa condamnation à lui verser la somme de 3 000 euros au titre des frais d’instance ;

M. X soutient que la requête est tardive ; que la COMMUNE ne démontre pas que le paiement de la somme de 45 369,69 euros serait susceptible d’entraîner une perte définitive de celle-ci ; que les conditions posées à l’article R. 811-16 du code de justice administrative ne sont ainsi pas remplies ; que, par ailleurs, les dispositions de l’article R. 811-17 du même code ne sont pas applicables en l’espèce dans la mesure où la condition tenant à l’existence des conséquences difficilement réparables n’est pas remplie ; qu’en outre, aucun des moyens développés au soutien de la requête n’est sérieux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l’audience devant ces juridictions ;

Vu l’arrêté du vice-président du Conseil d’Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel autorisés à appliquer, à titre exceptionnel, les dispositions de l’article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

En application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ayant été informées que le jugement paraissait susceptible d’être fondé sur un moyen soulevé d’office ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 22 mars 2011,

— le rapport de Mme Massé-Degois, premier conseiller ;

— les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public ;

— et les observations de Me Gaullier, de la SCP d’avocats Nicolaÿ-de Lanouvelle-Hannotin pour la COMMUNE DE LA GARDE, et de Me Poitout, substituant Me Lopasso, pour

M. X ;

Considérant que la COMMUNE DE LA GARDE relève appel du jugement du

22 avril 2010 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulon l’a condamnée à verser à M. X, pour la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2007, la somme de

45 369,69 euros ; qu’elle demande, en outre, à la Cour d’ordonner le sursis à exécution de ce jugement ;

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes enregistrées sous les numéros 10MA02398 et 10MA03091 présentées par la COMMUNE DE LA GARDE concernent la même affaire ; qu’elles ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;

Sur les conclusions de la requête n° 10MA02398 à fin d’annulation du jugement contesté :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

Considérant qu’aux termes de l’article R. 222-13 du code de justice administrative : «Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu’il désigne à cette fin … statue en audience publique (…) : (…) 2° sur les litiges relatifs à la situation individuelle des agents publics, à l’exception de ceux concernant l’entrée au service, la discipline et la sortie du service ; (…) 7° Sur les actions indemnitaires, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 222-14 du même code alors en vigueur : «Les dispositions du 7° de l’article précédent sont applicables aux demandes dont le montant n’excède pas 10 000 euros.» ;

Considérant qu’il résulte des dispositions dérogatoires ci-dessus, lesquelles sont d’interprétation stricte, que la compétence du magistrat-délégué ne s’étendait pas au présent litige compte tenu de la nature et du montant des sommes demandées représentant l’indemnisation d’un préjudice ; que, dès lors, le magistrat-désigné du tribunal administratif de Toulon n’était pas compétent pour statuer sur la demande de M. X ; qu’ainsi, le jugement attaqué doit être annulé ;

Considérant qu’il y a lieu de renvoyer M. X devant le tribunal administratif de Toulon pour qu’il soit statué sur sa requête ;

Sur les conclusions de la requête n° 10MA03091 aux fins de sursis à exécution du jugement contesté :

Considérant que, dès lors que le jugement litigieux est annulé par le présent arrêt, il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête précitée tendant à ce qu’il soit sursis à son exécution ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’il n’y a, dans les circonstances de l’espèce, ni lieu de mettre à la charge de M. X le versement à la COMMUNE DE LA GARDE d’une quelconque somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, ni lieu de mettre à la charge de la COMMUNE DE LA GARDE le versement à M. X d’une quelconque somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0805234 en date du 22 avril 2010 du tribunal administratif de Toulon est annulé.

Article 2 : Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la COMMUNE DE LA GARDE enregistrée sous le n° 10MA03091.

Article 3 : Les conclusions présentées par la COMMUNE DE LA GARDE et par M. X sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative dans l’instance n° 10MA02398 sont rejetées.

Article 4 : M. X est renvoyé devant le tribunal administratif de Toulon pour qu’il soit statué sur sa demande.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE LA GARDE, à M. Y X et au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration.

Délibéré après l’audience du 22 mars 2011, où siégeaient :

— M. Fédou, président assesseur, président de la formation de jugement en application de

l’article R. 222-26 du code de justice administrative,

— Mme Busidan, premier conseiller,

— Mme Massé-Degois, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 15 avril 2011.

Le rapporteur, Le président,

signé signé

C. MASSE-DEGOIS G. FEDOU

Le greffier,

signé

C. LAUDIGEOIS

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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