Cour de cassation, Chambre sociale, 26 juin 2013, 12-17.019, Inédit

  • Amiante·
  • Salarié·
  • Énergie·
  • Harcèlement moral·
  • Préjudice·
  • Carrière·
  • Travail·
  • Poussière·
  • Employeur·
  • Équipement de protection

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 26 juin 2013, n° 12-17.019
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 12-17.019
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Versailles, 31 janvier 2012
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000027637291
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2013:SO01229
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X…, salarié depuis 1987 de la société CGEC, aujourd’hui société Suez énergie services, a exercé divers mandats syndicaux à partir de 1998 ; qu’il a saisi, en 2008, la juridiction prud’homale de demandes indemnitaires notamment fondées sur la discrimination syndicale et le harcèlement dont il estimait avoir été victime ;

Sur le premier moyen et sur le deuxième moyen, pris en ses cinq premières branches :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à eux seuls, à justifier l’admission du pourvoi ;

Sur le deuxième moyen, pris en sa sixième branche, et le quatrième moyen :

Attendu que la société Suez fait grief à l’arrêt, d’une part, de la condamner dans le dispositif de la décision au paiement d’une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, alors que dans ses motifs, l’arrêt fixait à 2 000 euros la somme due à ce titre, et d’autre part, de la condamner deux fois dans son dispositif au versement de la même indemnité au titre du harcèlement subi par le salarié ;

Mais attendu que les vices allégués par le moyen procèdent d’erreurs purement matérielles dont la rectification sera ci-après ordonnée ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l’article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que pour condamner la société Suez au paiement d’une somme au titre du préjudice d’anxiété subi par le salarié du fait de son exposition à l’amiante entre 1999 et 2007, la cour d’appel, après avoir écarté le caractère discriminatoire de la mutation du salarié sur un site présentant des risques d’amiante, retient qu’il n’est cependant pas contesté que la société Suez a ce faisant exposé M. X… à un risque de contamination, et que l’exposition à l’amiante crée un préjudice d’anxiété ;

Qu’en retenant d’office le moyen tiré du préjudice d’anxiété lié à la présence du salarié dans des lieux exposés à l’amiante, sans le soumettre à la discussion des parties, la cour d’appel a méconnu le principe de la contradiction ;

Et vu l’article 462 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

Dit que dans le dispositif de l’arrêt attaqué :

— la somme de 2 000 euros sera substituée à celle de 3 000 euros mentionnée par erreur pour la condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— la mention « 25 000 euros en réparation du préjudice du fait du harcèlement moral » sera supprimée, en ce qu’elle figure deux fois dans le dispositif ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a condamné la société Suez énergie au paiement d’une somme à titre d’indemnisation du préjudice d’anxiété subi par le salarié, l’arrêt rendu le 1er février 2012, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Versailles, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Suez énergie services

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée D’AVOIR condamné la société SUEZ ENERGIE à payer à Monsieur X… une somme à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la discrimination syndicale,

AUX MOTIFS QUE le salarié ne rapporte pas la preuve qu’il occupait un poste d’encadrement permettant de prétendre au niveau 8 € 1 de la nouvelle classification ; que le conseil de prud’hommes a justement considéré que les allégations du salarié concernant la discrimination sur son évolution de carrière ne sont étayées par aucun comparatif avec des salariés se trouvant dans une situation comparable et par aucune pièce venant contredire les tableaux et les éléments présentés par l’employeur en faveur d’une évolution normale de sa carrière ; que c’est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté leur demande d’indemnité pour blocage de salaire et de carrière de M. X… (arrêt attaqué p. 5) ; (¿) que la privation d’augmentation de salaire et l’application d’un coefficient erroné ne résultent pas de l’examen qui précède ; qu’il est par ailleurs douteux que l’envoi de M. X… dans un site amiante ait été décidé en raison de son activité syndicale ; qu’outre le fait que cette mutation était liée à d’autres motifs tenant aux plaintes de clients quant à la qualité de son travail, une telle décision aurait été pour le moins inconséquente s’agissant d’un délégué du personnel dont on aurait ainsi sanctionné l’intransigeance pour les problèmes d’hygiène et de sécurité du travail ; qu’en revanche, la privation, entre le 23 janvier 2002 et le 27 juin 2006, d’entretiens annuels qui, précisément, étaient destinés, selon l’article 4 de l’accord d’entreprise du 22 novembre 2001, à « examiner si les moyens mis en place pour concilier les nécessités du poste de travail et le ou les mandats sont suffisamment adaptés », caractérise une pratique discriminatoire ; que toute mesure prise contrairement aux dispositions d’ordre public des articles L. 2141-5 à L. 2441-7 est considérée comme abusive et donne lieu à dommages et intérêts ; qu’il convient donc de faire droit à la demande de M. X… de ce chef dans la limite de 10.000 euros (arrêt attaqué p. 11) ;

1°) ALORS QUE la discrimination syndicale n’est caractérisée que si l’employeur prend en considération l’activité syndicale du salarié pour arrêter ses décisions à son égard ; que ne caractérise aucun acte discriminatoire le juge qui se borne à relever que l’employeur a simplement omis d’organiser pendant quelques années, sans qu’il n’en résulte le moindre préjudice pour le salarié, les entretiens annuels d’évaluation d’un salarié titulaire d’un mandat syndical, de telles constatations ne suffisant pas à caractériser l’intention discriminatoire de l’employeur ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a expressément constaté que Monsieur X… n’avait subi aucun retard de carrière, qu’il n’avait été privé d’aucune augmentation de salaire et que les coefficients qui lui étaient appliqués n’étaient pas erronés ; qu’en se bornant à relever, pour lui imputer une « pratique discriminatoire », que l’employeur n’avait pas organisé, sur une période limitée de 2002 à 2006, les entretiens annuels d’évaluation qui étaient destinés à vérifier l’adéquation du poste de travail aux mandats, lorsqu’elle n’avait nullement caractérisé le moindre élément de nature à révéler l’intention discriminatoire d’un employeur qui avait par ailleurs accordé au salarié un déroulement de carrière conforme à celui de ses collègues, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1134-1 et L. 2141-5 du Code du travail ;

2°) ALORS en outre QUE le juge qui se borne à relever qu’un salarié n’a pas bénéficié d’entretiens annuels d’évaluation sans pour autant caractériser une intention discriminatoire de l’employeur ne peut accorder de réparation qu’en fonction du préjudice réel subi par le salarié ; qu’en accordant une indemnisation de 10.000 euros à Monsieur X…, lorsqu’elle n’avait pas caractérisé le moindre préjudice résultant de cette absence limitée dans le temps d’entretiens annuels d’évaluation, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR condamné la société SUEZ ENERGIE à verser à Monsieur X… une somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice du fait du harcèlement moral, outre une somme de 25.000 euros de ce même chef,

AUX MOTIFS QUE le salarié ne rapporte pas la preuve qu’il occupait un poste d’encadrement permettant de prétendre au niveau 8 € 1 de la nouvelle classification ; que le conseil de prud’hommes a justement considéré que les allégations du salarié concernant la discrimination sur son évolution de carrière ne sont étayées par aucun comparatif avec des salariés se trouvant dans une situation comparable et par aucune pièce venant contredire les tableaux et les éléments présentés par l’employeur en faveur d’une évolution normale de sa carrière ; que c’est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté leur demande d’indemnité pour blocage de salaire et de carrière de M. X… (arrêt attaqué p. 5) ;

Que la privation d’augmentations de salaire et d’un coefficient erroné ne résultent pas de l’examen des éléments du débat (arrêt attaqué p. 11);

(¿)

Que le harcèlement moral défini par l’article L. 1152-1 du code du travail se caractérise par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu’en l’espèce, l’absence répétée d’entretien annuel d’évaluation et de stage de formation, la surcharge de travail causée par le fait d’avoir occupé seul pendant près de 7 années un poste nécessitant la présence de deux voire trois personnes, le courrier du 12 janvier 2005 dans lequel l’employeur sans égard pour la difficulté de sa situation demande au salarié de faire le nécessaire pour remédier à l’état de propreté du site jugé insatisfaisant en rappelant que ce problème a été déjà évoqué à plusieurs reprises avec lui à l’occasion de précédentes visites et ce en dépit du danger que représente le balayage de résidus et la diffusion dans l’air de poussières d’amiante caractérisent des agissements répétés ayant pour effet de dégrader ses conditions de travail et son état de santé et de compromettre son avenir professionnel ; que les faits de harcèlement moral sont donc constitués ; que c’est d’ailleurs à tort que les premiers juges ont reproché au salarié de n’avoir pas justifié de la volonté de l’employeur de pratiquer un harcèlement moral alors qu’il n’est pas nécessaire que l’employeur ait intentionnellement recherché ce résultat ; que la somme réclamée de ce chef (25.000 euros) n’apparaît pas excessive eu égard à la durée de ce préjudice et aux conséquences que les agissements ci-dessus décrits ont eu sur l’état de santé de M. X… ;

1°) ALORS QUE la seule absence d’entretiens annuels d’évaluation ou de stages de formation ne saurait constituer des faits de harcèlement moral s’il n’en est résulté aucun préjudice dans le déroulement de la carrière du salarié, ni aucune dégradation de ses conditions de travail ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a expressément retenu que « la privation d’augmentations de salaire et l’application d’un coefficient erroné ne résultent pas de l’examen » des éléments du débat et rejeté en conséquence les demandes d’indemnité pour « blocage de salaire et de carrière » (arrêt attaqué p. 11 et 5) ; qu’en se bornant à relever que Monsieur X… n’avait pas bénéficié de la totalité des entretiens d’évaluation et des stages de formation, lorsqu’elle n’avait nullement constaté que cette absence de formation et d’entretiens d’évaluation sur une période de temps donnée (2002 à 2006) aurait, en quoi que ce soit, porté atteinte à la carrière de Monsieur X…, ni même que la société SUEZ ENERGIE SERVICES aurait agi intentionnellement afin de nuire au salarié, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1152-1 du Code du travail ;

2°) ALORS QUE le seul sous-effectif, fût-il persistant, dans le service où travaille le salarié ne saurait suffire à caractériser des agissements de harcèlement moral, dès lors que le salarié n’a éprouvé de ce fait aucune altération de son état de santé, ni n’a encouru de sanction du fait d’une inexécution partielle ou d’une exécution insatisfaisante de ses tâches ; qu’en se bornant à relever que Monsieur X… avait occupé seul un « poste nécessitant la présence de deux voire trois personnes » et que son employeur lui avait demandé de remédier à l’état de propreté du site jugé insatisfaisant, sans constater que Monsieur X… aurait accompli des heures supplémentaires, ni que son état de santé physique ou moral se serait dégradé, ni même qu’il aurait été sanctionné à raison d’une mauvaise exécution de ses tâches de travail, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 11152-1 du Code du travail ;

3°) ALORS QU’un acte isolé ne saurait suffire à caractériser des agissements répétés de harcèlement moral, a fortiori s’il n’a occasionné aucun préjudice au salarié ; qu’en se bornant à relever que l’employeur avait demandé au salarié par un courrier isolé de 2005 de remédier à l’état de propreté du site « en dépit du danger que représente le balayage de résidus et la diffusion dans l’air de poussières d’amiante », lorsqu’il résultait en outre de ses propres constatations que Monsieur X… bénéficiait de protections personnelles, qu’il avait obtenu des formations adaptées et qu’aucune lésion liée à la présence de matériaux contenant de l’amiante n’avait jamais été constatée, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé des agissements répétés de harcèlement moral, a privé sa décision de base légale de l’article L. 1152-1 du Code du travail.

5°) ALORS QUE le juge ne saurait prononcer une condamnation pour harcèlement moral sur le seul fondement d’un état dépressif du salarié, un tel état de santé n’étant pas nécessairement imputable à des agissements de l’employeur ou de membres de l’entreprise ; qu’en se fondant sur l’état de santé du salarié, lorsqu’elle n’avait pas exposé en quoi l’état de santé du salarié aurait été la résultante d’agissements de l’employeur, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L 1152-1 du Code du travail ;

6°) ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif de l’arrêt équivaut à un défaut de motifs ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a retenu, dans ses motifs, qu’il convenait d’accorder à Monsieur X… les dommages et intérêts réclamés, soit une somme de 25.000 euros (arrêt attaqué, p. 11 et 12) ; qu’en condamnant cependant, dans son dispositif, la société SUEZ ENERGIE SERVICES à verser au salarié deux sommes de euros en réparation du préjudice du fait du harcèlement moral, la cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR condamné la société SUEZ ENERGIE à payer à Monsieur X… la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice lié à l’exposition à l’amiante, outre une somme de 10.000 euros de ce même chef,

AUX MOTIFS QUE la société SUEZ ENERGIE SERVICES expose que Monsieur X… avait d’abord fréquenté le site de CHEVALERET lorsqu’il occupait un poste itinérant et qu’il y avait par la suite été affecté de manière exclusive et sédentaire pour des raisons disciplinaires en raison des plaintes de clients concernant la qualité de son travail ; qu’il avait bénéficié d’une prime mensuelle de 500 francs pour compenser les avantages liés à son statut d’itinérant et non à raison des risques auxquels l’exposait sa nouvelle affectation ; qu’il a bénéficié de formations adaptées et d’équipements de protection individuelle pour se prémunir contre les inconvénients liés à la présence d’amiante ; qu’il était régulièrement suivi médicalement et spécifiquement pour ce risque ; qu’aucune lésion pleurale n’a été décelée lors de ces examens ; que le site a fait l’objet d’études et des mesures ont été prises pour limiter les risques telles l’encapsuage et le désamiantage de la gaine et du local SES ; que les travaux effectués n’entraînent pas de risques particuliers s’agissant d’une activité de maintenance ou d’installation d’équipements de chauffage et non de désamiantage ou de calorifugeage ; que par ailleurs, l’inspection du travail a complété les mesures prises sur certains points et n’a pas relevé la validité d’un éventuel droit d’alerte ni constaté l’aspect discriminatoire de l’affectation de M. X… ;

Qu’il n’est pas contestable, en dépit des explications qui précèdent, que la société SUEZ ENERGIE SERVICES a exposé Monsieur X… à un risque de contamination puisque ce n’est qu’après le 12 mars 2003, soit plus de 3 ans après son arrivée qu’a été protégée la gaine traversant le local qui présentait le rapport de l’APAVE un danger de niveau 3 ; que le rapport du médecin du travail daté du 7 septembre 2005 fait état d’une « exposition passive mais quasi permanente à des matériaux susceptibles de libérer des fibres d’amiante » ; que c’est seulement en juin 2006 que l’inspection du travail a imposé, entre autres, l’emploi de combinaisons jetables sur chaussures dans les passage exigus et d’un sac à déchets pour lesdites combinaisons ainsi que la révision du plan de prévention jugé par elle non conforme aux dispositions des articles R. 237-6 et R. 237-7 du code du travail ; que le rapport du CHSCT en date du 18 avril 2006 relevait encore à cette date la présence de gaines entourées d’amiante dans des couloirs étroits et la présence d’amiante sur les vêtements et le sol et constate que « plusieurs matériels à remplacer ou à entretenir étaient très exposés à l’amiante voire inaccessibles à moins de frotter l’amiante » ; que si le salarié a bénéficié de formations adaptées e d’équipements de protection individuelle, ces précautions n’étaient manifestement pas suffisantes puisque des travaux destinés à limiter les risques ont été effectués pendant les ans qui ont suivi son arrivée ; que l’exposition à l’amiante créée un préjudice d’anxiété dû à la peur de rejoindre un jour la liste des victimes nonobstant l’absence de symptômes cliniques ; que ce préjudice doit être apprécié en fonction de l’ampleur du risque et de sa durée ; que les éléments ci-dessus permettent à la Cour de l’évaluer à 10.000 euros ;

1°) ALORS QUE les demandes qui tendent, sous couvert d’une action en responsabilité pour manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat, à la réparation du préjudice résultant de l’exposition aux poussières d’amiante ne sauraient être portées devant la juridiction prud’homale, tant qu’un refus de prise en charge au titre des maladies professionnelles n’a pas été opposé au salarié ; qu’en l’espèce, la société SUEZ ENERGIE faisait expressément valoir que la juridiction prud’homale n’était pas compétente pour statuer sur une demande en réparation d’une affection susceptible d’être prise en charge comme une maladie professionnelle ; qu’en condamnant néanmoins la société SUEZ ENERGIE SERVICES à payer des dommages et intérêts de ce chef, la cour d’appel a violé l’article L. 451-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 142-1 du Code de la sécurité sociale et L. 1411-1 du Code du travail ;

2°) ALORS en tout état de cause QUE les juges du fond ne peuvent soulever d’office un moyen sans provoquer les explications contradictoires des parties ; qu’en l’espèce, à l’appui de sa demande de dommages et intérêts pour exposition aux poussières d’amiante, Monsieur X… faisait valoir que la société SUEZ ENERGIE SERVICES l’avait muté à dessein sur un site amianté par une décision « punitive et discriminatoire qui avait pour objectif d’isoler et de maintenir le salarié dans une situation professionnelle précaire et risquée » (conclusions p. 19) ; qu’il demandait en conséquence des dommages et intérêts « en réparation de la décision discriminatoire de l’affecter et de le maintenir à un poste exposé à l’amiante de juin 1999 à juillet 2006 », sans à aucun moment demander réparation à titre subsidiaire d’un prétendu préjudice d’anxiété ; qu’en soulevant d’office le moyen pris du préjudice d’anxiété, sans à aucun moment inviter SUEZ ENERGIE SERVICES à présenter ses observations, la cour d’appel a violé l’article 16 du Code de procédure civile ;

3°) ALORS plus subsidiairement QUE la réparation d’un préjudice d’anxiété relatif à l’éventuelle survenance d’une affection d’origine professionnelle suppose que le salarié soit soumis à un risque avéré de développement d’une telle maladie eu égard aux conditions dans lesquelles il a exécuté ses missions ; que le salarié qui a bénéficié de formations spécifiques et de protections personnelles adéquates et efficaces contre les poussières d’amiante ne justifie donc d’aucun préjudice actuel et certain d’anxiété résultant de l’exposition à de telles poussières ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a expressément constaté que le salarié «a bénéficié de formations adaptées et d’équipements de protection individuelle » (arrêt attaqué p. 10), si bien qu’il n’avait jamais développé la moindre affection en relation avec la présence de matériaux susceptibles de dégager des poussières d’amiante ;

qu’en se bornant à relever que la société SUEZ ENERGIE SERVICES avait exposé Monsieur X… à un risque de contamination pour ordonner la réparation d’un préjudice d’anxiété, lorsqu’elle n’avait pas relevé en quoi le salarié qui avait disposé de protections personnelles et bénéficié de formations professionnelles aurait été exposé à un risque avéré de développer une maladie en relation avec l’inhalation de poussières d’amiante, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du Code civil ;

4°) ALORS QUE le seul fait que l’employeur effectue des travaux de protections pour satisfaire à son obligation de sécurité de résultat ne saurait préjuger de l’efficacité des équipements de protection de personnelle attribués au salarié ; qu’en se bornant à affirmer que l’employeur avait poursuivi les travaux pendant les 6 années ayant suivi l’arrivée de Monsieur X… pour en déduire que la formation et les équipements de protection individuelle n’étaient manifestement pas suffisantes, la cour d’appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du Code civil ;

5°) ALORS QU’en l’espèce, il résultait d’une fiche d’attribution personnelle d’équipement (production n° 10) que Monsieur X… avait toujours bénéficié d’équipements de protection individuelle, la cour d’appel ayant seulement mis en doute le fait que de tels équipements fussent suffisants ; qu’en se bornant à relever que c’était seulement en juin 2006 que l’inspection du travail avait « imposé » l’emploi de combinaisons jetables dans les passages exigus et d’un sac à déchets pour ces combinaisons, lorsque de tels motifs ne pouvaient suffire à établir que Monsieur X… n’aurait pour sa part pas bénéficié d’équipements individuels de protection, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du Code civil ;

6°) ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif de l’arrêt équivaut à un défaut de motifs ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a retenu, dans ses motifs, qu’il convenait d’évaluer à 10.000 euros le montant du préjudice subi par le salarié du fait de l’exposition à l’amiante ; qu’en condamnant cependant, dans son dispositif, la société SUEZ ENERGIE SERVICES à verser au salarié deux sommes de 10.000 euros en réparation de ce même préjudice, la cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR condamné la société SUEZ ENERGIE SERVICES à payer au salarié une somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

AUX MOTIFS QU’il apparaît équitable de dédommager M. X… de ses frais non compris dans les dépens à hauteur de 2.000 euros à défaut de justificatif plus précis de ces frais ;

ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif de l’arrêt équivaut à un défaut de motifs ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a retenu, dans ses motifs, qu’il convenait de dédommager M. X… de ses frais non compris dans les dépens à hauteur de euros à défaut de justificatif plus précis de ces frais (arrêt attaqué p. 12) ; qu’en condamnant cependant, dans son dispositif, la société SUEZ ENERGIE SERVICES à verser au salarié une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, la cour d’appel a violé l’article 455 du Code de procédure civile.

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour de cassation, Chambre sociale, 26 juin 2013, 12-17.019, Inédit