Cour de cassation, Chambre sociale, 20 septembre 2017, 16-11.275, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 20 sept. 2017, n° 16-11.275
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 16-11.275
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Lyon, 26 novembre 2015, N° 14/09353
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000035615703
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2017:SO01949
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Sur les parties

Texte intégral

SOC.

JT

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 20 septembre 2017

Rejet

Mme X…, conseiller le plus ancien

faisant fonction de président

Arrêt n° 1949 F-D

Pourvoi n° M 16-11.275

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. Gérard Y…, domicilié […] ,

contre l’arrêt rendu le 27 novembre 2015 par la cour d’appel de Lyon (chambre sociale C), dans le litige l’opposant à la société Transports publics de l’agglomération stéphanoise (TPAS), société anonyme, dont le siège est […] ,

défenderesse à la cassation ;

La société Transports publics de l’agglomération stéphanoise

a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 20 juin 2017, où étaient présents : Mme X…, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Z…, conseiller rapporteur, Mme Schmeitzky-Lhuillery, conseiller, Mme Lavigne, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Z…, conseiller, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. Y…, de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Transports publics de l’agglomération stéphanoise, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Lyon, 27 novembre 2015), que M. Y… a été engagé le 2 novembre 1981 par la société Transports publics de l’agglomération stéphanoise, en qualité de conducteur-receveur puis d’ouvrier OP3 ; qu’il ne s’est pas présenté sur son lieu de travail le 22 mars 2012 en raison de son incarcération pour des faits relevant de sa vie privée ; qu’il a, le 18 octobre 2012, informé son employeur qu’il était disponible pour reprendre le travail ; qu’il a été licencié le 13 décembre 2012 pour faute grave en raison de son absence injustifiée ayant perturbé le fonctionnement du service et de l’absence d’informations données à l’entreprise dans un délai raisonnable ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter de ses demandes en paiement d’indemnités de rupture et de dommages-intérêts alors, selon le moyen :

1°/ que la faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, la mise en oeuvre de la rupture du contrat de travail doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits allégués lorsqu’aucune vérification n’est nécessaire ; que le non-respect du délai restreint interdit à l’employeur d’invoquer la qualification de faute grave, même si les faits reprochés au salarié ne sont pas prescrits ; qu’en se bornant à relever que l’employeur avait engagé la procédure de licenciement dans le délai de prescription, sans vérifier, comme elle y était invitée par le salarié, si la procédure avait été mise en oeuvre dans le délai restreint inhérent à toute procédure de licenciement pour faute grave, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

2°/ qu’en l’état d’une absence injustifiée d’un salarié, d’un courrier de l’employeur mettant celui-ci en demeure de justifier cette absence avant une date expressément fixée à peine de prise des mesures qui s’imposent et d’un défaut de réponse du salarié à cette date, l’abstention de l’employeur de toute procédure ou mesure disciplinaire dans un délai restreint à compter de la date limite par lui-même fixée implique qu’il ne regarde pas le maintien du salarié dans l’entreprise comme impossible et interdit que le comportement du salarié soit qualifié de faute grave ; qu’en retenant néanmoins la qualification de faute grave, cependant qu’il avait été expressément relevé, d’abord, que par courrier en date du 29 mars 2012, l’employeur avait demandé au salarié de justifier son absence et indiqué que sans réponse de sa part avant le 4 avril 2012, « les mesures qui s’impos[ai]ent » seraient prises, ensuite, que le salarié n’avait pas répondu avant le 19 avril 2012, du reste en des termes regardés comme insuffisamment clairs, enfin, que la convocation à un entretien préalable à un éventuel n’avait pas eu lieu avant le 22 octobre 2012, c’est-à-dire au-delà d’un délai restreint à compter de la date limite de réponse fixée par l’employeur lui-même, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de cette constatation d’une inaction prolongée de l’employeur, a violé les articles susvisés ;

3°/ que le salarié avait fait valoir que par un courrier en date du 15 novembre 2012, postérieur à l’entretien préalable à un éventuel licenciement tenu le 30 octobre précédent, l’employeur lui avait reproché de ne pas avoir respecté les engagements pris lors dudit entretien en présence de la personne qui l’accompagnait et que de ce fait, l’employeur envisageait de reprendre la procédure de licenciement ; qu’en ne recherchant pas si, à l’issue de l’entretien préalable au licenciement tenu le 30 octobre 2012, l’employeur n’avait pas regardé comme possible le maintien du salarié dans l’entreprise, et s’il n’en résultait pas l’absence d’une faute grave, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

Mais attendu qu’il ne résulte ni de l’arrêt attaqué ni des pièces de la procédure que le salarié ait soutenu devant le juge du fond que l’employeur n’avait pas mis en oeuvre la procédure de licenciement dans un délai restreint après qu’il avait eu connaissance des faits fautifs invoqués ; que, nouveau et mélangé de fait et de droit, le moyen est irrecevable ;

Sur le second moyen du même pourvoi, ci-après annexé :

Attendu que le moyen qui, sous le couvert des griefs de défaut de motivation et de violation de l’article L. 1221-1 du code du travail, critique une omission de statuer sur un chef de demande pouvant être réparée dans les conditions prévues à l’article 463 du code de procédure civile, est irrecevable ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de l’employeur :

Attendu que l’employeur fait grief à l’arrêt de le condamner à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour la perte de ses droits individuels à la formation alors, selon le moyen, que des dommages-intérêts ne peuvent être alloués sans que soient caractérisés une faute et un préjudice en résultant ; que, pour la condamner au paiement de dommages-intérêts pour non-respect de l’obligation d’information relative au droit individuel à la formation, la cour d’appel s’est bornée à constater l’absence d’information du salarié au droit individuel à la formation dans la lettre de licenciement ; qu’en statuant ainsi sans constater que le salarié, qui selon les propres constatations de l’arrêt, avait été « informé de ses droits au cours de l’exécution du contrat de travail », avait subi un préjudice, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu’ayant relevé que l’employeur n’avait pas informé le salarié dans la lettre de licenciement de ses droits en matière de droit individuel à la formation, en violation de l’article L. 6323-19 du code du travail, en sa rédaction alors applicable, la cour d’appel en a déduit qu’il en résultait pour celui-ci un préjudice dont elle a souverainement apprécié le montant ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour M. Y…, demandeur au pourvoi principal

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, D’AVOIR dit que le licenciement de monsieur Y…, salarié, par la TPAS, employeur, était fondé sur une faute grave et débouté le salarié de l’ensemble de ses demandes en paiement d’indemnités de rupture et de dommages et intérêts ;

AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES QU’aux termes de la lettre de licenciement du 13 décembre 2012, les trois griefs suivants avaient été faits à monsieur Gérard Y… : « Absence injustifiée, provoquée par votre détention, qui a perturbé le fonctionnement du service matériel roulant et rendu votre remplacement nécessaire après plusieurs semaines de dysfonctionnement / Omission de notifier votre absence auprès de l’entreprise dans un délai acceptable alors que vous avez continué à entretenir des liens personnels avec des salariés de l’entreprise / Absence totale d’information de l’entreprise sur la durée de votre incarcération » ; qu’ainsi qu’en avaient justement décidé les premiers juges, la prescription de deux mois de l’article L. 1332-4 du code du travail n’était pas acquise au jour de l’engagement de la procédure de licenciement par lettre de convocation à entretien préalable du 22 octobre 2012, alors que l’absence injustifiée, comme le défaut d’information quant au motif et à la durée prévisible de l’absence, étaient des faits continus qui s’étaient poursuivis jusqu’au 18 octobre 2012, date à laquelle le salarié avait demandé à reprendre son travail au sein de l’entreprise ; que monsieur Y… ne pouvait sérieusement soutenir que la société TPAS était pleinement informée dès l’origine des raisons de son absence ; que son affirmation, selon laquelle il aurait été interpelé par les forces de l’ordre sur son lieu de travail, était nouvelle en appel, puisqu’aux termes de ses conclusions soutenues devant les premiers juges, il avait expliqué qu’il avait été arrêté alors qu’il se rendait à son travail ; que le témoignage de monsieur Daniel A… (salarié de l’entreprise) ne saurait par ailleurs emporter la conviction de la cour, alors que c’était quelques jours avant sa mort et plus deux ans après les faits, que ce témoin, qui était hospitalisé pour une grave maladie, avait attesté que l’interpellation s’était déroulée le 22 mars 2012 sur le lieu de travail, circonstance qu’il n’avait pas cru devoir signaler spontanément aux termes d’une première attestation délivrée quelques jours auparavant destinée à préciser les fonctions de monsieur Y…, étant observé que l’authenticité de la seconde attestation était sérieusement contestée par l’employeur qui faisait observer, ce que la cour avait pu elle-même constater, que les signatures apposées sur les deux attestations étaient très différentes ; qu’au demeurant ce témoin n’affirmait pas avoir assisté à l’interpellation sur le lieu de travail, puisqu’il se bornait à faire état de ce que « des policiers [étaient] venus au garage interpeler monsieur Y… qui devait arriver à 14h30 », ce qui ne constituait pas une preuve suffisante d’une arrestation effective dans les locaux de l’entreprise au vu et au su de tous ; que l’attestation délivrée par madame B…, qui était une amie de monsieur Y…, n’était pas plus probante, alors que celle-ci se bornait à faire état de ce qu’elle aurait été prévenue de l’incarcération par l’assistante sociale de l’entreprise, ce qui n’impliquait nullement que l’employeur avait eu connaissance dans le même temps du motif de l’absence ; que d’ailleurs madame Jacqueline C…, assistante sociale de l’entreprise, avait attesté régulièrement le 2 septembre 2013 que les informations dont elle avait eu connaissance étaient soumises au secret professionnel et que le « courrier qu’elle [avait] envoyé [avait] été fait à son initiative personnelle sans en référer à son employeur » ; que les courriers que monsieur Y… a adressés à la direction de la société TPAS n’apportaient pas davantage la preuve d’une information précise et non équivoque donnée à l’employeur quant au motif et à la durée prévisible de l’absence ; que répondant à la mise en demeure du 29 mars 2012 le sommant de s’expliquer sur les raisons de son absence, monsieur Y… avait en effet adressé le 19 avril 2012 à la société TPAS une première lettre particulièrement confuse, aux termes de laquelle il n’évoquait pas sa détention et déclarait ne pas connaître sa « nouvelle situation actuelle », ce qui laissait l’employeur dans l’ignorance des raisons et de la durée de l’absence, ce d’autant plus qu’il y était mentionné l’adresse personnelle du salarié et non pas celle de la maison d’arrêt ; que le second courrier du 27 avril 2012 était, certes, plus explicite, alors que monsieur Y… faisait état d’une absence « à l’encontre de sa volonté » et indiquait qu’il « fai[sai]t son possible auprès de son défenseur pour sortir », mais ne donnait toujours pas l’information claire et précise des raisons et de la durée prévisible de l’absence à l’employeur avait droit ; que s’il était établi que monsieur Y… avait reçu en détention la visite de l’assistante sociale de l’entreprise, cette circonstance ne pouvait en outre faire présumer de la connaissance complète que la société TPAS aurait eu de la situation de son salarié ; qu’il en était de même du courrier que l’assistante sociale, tenue au secret professionnel, avait adressé le 5 juin 2012 à monsieur Y… pour l’inciter à contacter l’employeur par l’intermédiaire de son avocat afin de connaître les conditions de son éventuel retour ; qu’ainsi, n’ayant adressé à son employeur aucun document officiel attestant des raisons et de la durée de son absence, alors pourtant que purgeant une peine il était en mesure de connaître la date de sa libération, monsieur Y… avait-il laissé pendant plusieurs mois son employeur dans l’ignorance de sa situation exacte, étant observé que c’était seulement en réponse à la mise en demeure délivrée par ce dernier qu’il avait tenté de justifier son absence en des termes pour le moins confus et ambigus trahissant sa volonté de ne pas exécuter loyalement son obligation d’information ; que ce manquement, qui a nécessairement affecté le bon fonctionnement de l’entreprise, laquelle avait dû procéder au remplacement du salarié sans connaître la durée prévisible de l’absence, constituait une faute d’une importance telle qu’elle rendait impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; que le jugement serait par conséquent confirmé en ce qu’il avait décidé que le licenciement pour faute grave de monsieur Y… était justifié et que celui-ci devait donc être débouté de l’ensemble de ses demandes en paiement d’indemnités de rupture et de dommages et intérêts (arrêt, pp. 4 à 7) ; qu’il n’était pas contesté par les parties que monsieur Y… avait été incarcéré le 22 mars 2012 pour un motif sans lien avec son activité professionnelle ; que par courrier en date du 29 mars 2012, envoyé à son adresse personnelle, la société TPAS avait demandé à monsieur Y… de bien vouloir justifier de son absence à son poste de travail depuis le 22 mars 2012 à 14 heures 30, lui faisait observer qu’il n’avait pas avisé son supérieur hiérarchique conformément au règlement intérieur en vigueur dans l’entreprise et lui indiquait que sans réponse de sa part avant le 4 avril 2012, elle prendrait les mesures qui s’imposaient ; que monsieur Y… répondait à ce courrier par un courrier recommandé en date du 19 avril 2012 sur lequel il mentionnait, en haut à gauche, son adresse personnelle et non l’adresse de la maison d’arrêt au sein de laquelle il était alors incarcéré ; que ce courrier indiquait : « Je fais suite de vos courriers du 30.03.2012. Je vous précise que vous saviez très bien ma situation. Hors mon comportement ne relève pas d’une personne (autre) et ne donne pas lieu à une suspicion ; je vous invite à modérer vos écritures. / Je ne connais pas ma nouvelle situation actuelle. Je me permets par ailleurs que mon contrat de travail ne stipule pas autre que chauffeur en CDI » ; que dans un second courrier recommandé en date du 27 avril 2012, monsieur Y…, qui mentionnait toujours, en haut à gauche, son adresse personnelle et non l’adresse de la maison d’arrêt au sein de laquelle il était toujours incarcéré, indiquait : « Je suis en absence à mon poste totalement à l’encontre de ma volonté. Une situation imprévisible suite à une décision d’une magistrate revenant cinq ans auparavant dont la prescription ne compte pas (

) je fais mon possible auprès de mon défenseur pour sortir et par ailleurs je vous informerai de suite de l’évolution » ; qu’il ressortait des éléments versés au dossier que l’assistante sociale de la TPAS était informée de l’incarcération de monsieur Y… ; qu’elle lui avait d’ailleurs écrit à la maison d’arrêt le 5 juin 2012, le renvoyant à la société TPAS pour toute question concernant son contrat de travail ; que monsieur Y… indiquait être sorti de détention le 17 octobre 2012 ; que par courrier en date du 18 octobre 2012, soit le lendemain de sa sortie de détention, il avait écrit à son employeur qu’il était disponible pour reprendre son poste de travail ; que par courrier recommandé en date du 22 octobre 2012, il était cependant convoqué pour un entretien préalable à sanction ; que ce courrier avait indiqué à monsieur Y… que suite à son absence injustifiée depuis le 22 mars 2012, la société TPAS était amenée à envisager son licenciement pour faute grave ; que ce courrier le convoquait à un entretien préalable le 30 octobre 2012 ; que les courriers en date des 15, 19 et 20 novembre 2012, échangés entre la société TPAS et monsieur Y… montraient que monsieur Y…, après l’entretien préalable du 30 octobre 2012, devait effectuer des démarches personnelles en lien avec une éventuelle mise en pré-retraite et en tenir informé son employeur, ce qu’il a fait le 20 novembre 2012 en indiquant à la société TPAS qu’il n’entendait pas prendre sa retraite et souhaitait reprendre son emploi ; que cependant, par courrier recommandé en date du 23 novembre 2012, la société TPAS convoquait monsieur Y… à un « entretien d’instruction » le 29 novembre 2012 et à un « conseil de discipline » le 4 décembre 2012 et ce, conformément à la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs du 11 avril 1986 applicable à monsieur Y… ; que monsieur Y… ne s’était pas présenté à l’entretien d’instruction prévu le 29 novembre 2012 ; que par courrier du 4 décembre 2012 monsieur Y… réitérait son refus d’envisager une préretraite et faisait une nouvelle fois part de son souhait de reprendre son poste ; que cependant, par courrier recommandé en date du 13 décembre 2012, la société TPAS signifiait à monsieur Y… son licenciement pour faute grave, la lettre de licenciement mentionnant les trois griefs suivants : « absence injustifiée, provoquée par votre détention, qui a perturbé le fonctionnement du service matériel roulant et rendu votre remplacement nécessaire après plusieurs semaines de dysfonctionnements / omission de notifier votre absence auprès de l’entreprise dans un délai acceptable alors que vous avez continué à entretenir des liens personnels avec des salariés de l’entreprise / absence totale d’information de l’entreprise sur la durée de votre incarcération » ; que sur la non application de l’article L. 1332-4 du code du travail, cet article indiquait : « Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuite disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuites pénales » ; que la jurisprudence considérait comme sans cause réelle et sérieuse un licenciement ne respectant pas ce délai de deux mois à compter de la connaissance qu’avait l’employeur du fait fautif ; que cependant, ce délai de deux mois ne commençait à courir qu’à compter du jour où l’employeur avait eu une connaissance exacte de la réalité, la nature et l’ampleur des faits fautifs imputables au salarié ; qu’en outre, si les faits fautifs se prolongeaient dans le temps, le délai de deux mois ne commençait à courir qu’à compter du moment où ces faits avaient cessé ; qu’en l’espèce, la lettre de licenciement en date du 13 décembre 2012 mentionnait trois griefs : l’absence injustifiée à son poste de travail à compter du 22 mars 2012, provoquée par son placement en détention, l’omission de notifier son absence auprès de l’entreprise dans un délai acceptable alors qu’il avait continué à entretenir des liens personnels avec des salariés de l’entreprise, l’absence totale d’information de l’entreprise sur la durée de son incarcération ; que ce troisième grief concernant l’absence totale d’information de l’entreprise sur la durée de son incarcération avait perduré jusqu’au 18 octobre 2012, date à laquelle monsieur Y… avait informé son employeur de ce qu’il se tenait désormais à sa disposition ; qu’en conséquence, l’article L. 1232-4 du code du travail ne pouvait s’appliquer, le délai de deux mois n’ayant pu commencer à courir qu’à compter du 18 octobre 2012, date à laquelle l’employeur avait été pleinement informé de la situation de monsieur Y… ; que sur la rupture du contrat de travail, aux termes des articles L. 1232-1 et suivants du code du travail, le licenciement constituait une sanction prise par l’employeur à la suite d’un agissement considéré comme fautif ; que la faute grave était celle qui rendait impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; qu’elle exonérait donc l’employeur du paiement des indemnités de préavis et des indemnités de licenciement ; que la preuve de la faute grave devait être rapportée par l’employeur ; qu’il ressortait des éléments versés au dossier que monsieur Y… avait été incarcéré le 22 mars 2012 pour des faits sans lien avec son activité professionnelle ; que monsieur Y… n’ayant versé aux débats aucun document officiel concernant cette incarcération, le dossier ne permettait pas de déterminer si cette incarcération avait été programmée et préparée, ce qui aurait permis à monsieur Y… de prévenir son employeur, ou si il était intervenue, comme l’affirmait monsieur Y…, de manière soudaine et inattendue ; que toujours était-il que monsieur Y… n’avait pas immédiatement fait aviser son employeur de sa situation comme il aurait pu le faire par l’intermédiaire de son conseil ou de sa famille qui étaient informés de cet événement ; que bien au contraire, il avait attendu la réception du courrier de la TPAS en date du 29 mars 2012 pour répondre à son employeur par deux courriers en date des 19 et 27 avril 2012 ; que la lecture attentive de ces deux courriers permettait d’observer : d’une part, qu’alors qu’il se trouvait incarcéré à la maison d’arrêt de la Talaudière depuis plusieurs semaines, monsieur Y… continuait à mentionner en haut à gauche de son courrier (dans la partie habituellement réservée aux coordonnées de l’expéditeur du courrier) son adresse personnelle, d’autre part, que ces deux courriers manquaient de clarté, monsieur Y… s’abstenant manifestement volontairement de prononcer le terme d’incarcération et utilisant des périphrases plus ou moins claires ; qu’il ne pouvait être sérieusement exigé de l’employeur qu’il « devine » à la lecture de courriers particulièrement et volontairement confus et ambigus les motifs de l’absence de son salarié ; qu’il apparaissait également que monsieur Y… n’avait jamais adressé à son employeur le moindre justificatif officiel de son incarcération alors que l’obtention d’un tel document délivré par l’administration pénitentiaire ou par l’institution judiciaire est tout à fait habituelle et que monsieur Y… avait à l’époque un conseil qui assurait sa défense ; que monsieur Y… n’avait par ailleurs jamais indiqué à son employeur la durée prévisible de son incarcération qui pouvait pourtant être connue de ce dernier puisqu’il exécutait alors une peine d’emprisonnement d’une durée déterminée ; qu’ainsi la société TPAS avait dû pallier à l’absence de son salarié sans savoir combien de temps cette absence allait durer ; que monsieur Y… avait donc volontairement laissé son employeur pendant près de sept mois dans l’ignorance de sa situation exacte, maintenant sciemment le flou autour de sa situation et de sa date de retour et n’avait jamais fourni aucun justificatif de sa situation à son employeur, y compris après sa sortie de détention et y compris dans le cadre de la présente instance ; que face à ce manquement grave, les allégations de monsieur Y… concernant d’éventuels manquements de l’administration pénitentiaire, ne permettaient pas de l’exonérer de ses propres défaillances ; qu’en conséquence le licenciement de monsieur Y… pour faute grave n’apparaissait pas abusif et que monsieur Y… serait débouté de l’ensemble de ses demandes (jugement, pp. 5 à 8) ;

ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE la faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, la mise en oeuvre de la rupture du contrat de travail doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits allégués lorsqu’aucune vérification n’est nécessaire ; que le non-respect du délai restreint interdit à l’employeur d’invoquer la qualification de faute grave, même si les faits reprochés au salarié ne sont pas prescrits ; qu’en se bornant à relever que l’employeur avait engagé la procédure de licenciement dans le délai de prescription, sans vérifier, comme elle y était invitée par le salarié (conclusions, pp. 11 et 15), si la procédure avait été mise en oeuvre dans le délai restreint inhérent à toute procédure de licenciement pour faute grave, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QU’en l’état d’une absence injustifiée d’un salarié, d’un courrier de l’employeur mettant celui-ci en demeure de justifier cette absence avant une date expressément fixée à peine de prise des mesures qui s’imposent et d’un défaut de réponse du salarié à cette date, l’abstention de l’employeur de toute procédure ou mesure disciplinaire dans un délai restreint à compter de la date limite par lui-même fixée implique qu’il ne regarde pas le maintien du salarié dans l’entreprise comme impossible et interdit que le comportement du salarié soit qualifié de faute grave ; qu’en retenant néanmoins la qualification de faute grave, cependant qu’il avait été expressément relevé, d’abord, que par courrier en date du 29 mars 2012, l’employeur avait demandé au salarié de justifier son absence et indiqué que sans réponse de sa part avant le 4 avril 2012, « les mesures qui s’impos[ai]ent » seraient prises, ensuite, que le salarié n’avait pas répondu avant le 19 avril 2012, du reste en des termes regardés comme insuffisamment clairs, enfin, que la convocation à un entretien préalable à un éventuel n’avait pas eu lieu avant le 22 octobre 2012, c’est-à-diure au-delà d’un délai restreint à compter de la date limite de réponse fixée par l’employeur lui-même, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de cette constatation d’une inaction prolongée de l’employeur, a violé les articles susvisés ;

ALORS, EN TROISIEME LIEU, QUE le salarié avait fait valoir (conclusions, p. 3, in fine) que par un courrier en date du 15 novembre 2012, postérieur à l’entretien préalable à un éventuel licenciement tenu le 30 octobre précédent, l’employeur lui avait reproché de ne pas avoir respecté les engagements pris lors dudit entretien en présence de la personne qui l’accompagnait et que de ce fait, l’employeur envisageait de reprendre la procédure de licenciement ; qu’en ne recherchant pas si, à l’issue de l’entretien préalable au licenciement tenu le 30 octobre 2012, l’employeur n’avait pas regardé comme possible le maintien du salarié dans l’entreprise, et s’il n’en résultait pas l’absence d’une faute grave, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, D’AVOIR débouté monsieur Y…, salarié, de sa demande à l’encontre de la TPAS, employeur, d’un rappel de salaire ;

AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES QU’ainsi qu’en avaient justement décidé les premiers juges, la prescription de deux mois de l’article L. 1332-4 du code du travail n’était pas acquise au jour de l’engagement de la procédure de licenciement par lettre de convocation à entretien préalable du 22 octobre 2012, alors que l’absence injustifiée, comme le défaut d’information quant au motif et à la durée prévisible de l’absence, étaient des faits continus qui s’étaient poursuivis jusqu’au 18 octobre 2012, date à laquelle le salarié avait demandé à reprendre son travail au sein de l’entreprise ; que le jugement serait par conséquent confirmé en ce qu’il avait décidé que le licenciement pour faute grave de monsieur Y… était justifié et que celui-ci devait donc être débouté de l’ensemble de ses demandes en paiement d’indemnités de rupture et de dommages et intérêts (arrêt, pp. 4 à 7) ; que monsieur Y… indiquait être sorti de détention le 17 octobre 2012 ; que par courrier en date du 18 octobre 2012, soit le lendemain de sa sortie de détention, il avait écrit à son employeur qu’il était disponible pour reprendre son poste de travail ; que ce troisième grief concernant l’absence totale d’information de l’entreprise sur la durée de son incarcération avait perduré jusqu’au 18 octobre 2012, date à laquelle monsieur Y… avait informé son employeur de ce qu’il se tenait désormais à sa disposition ; qu’en conséquence le licenciement de monsieur Y… pour faute grave n’apparaissait pas abusif et que monsieur Y… serait débouté de l’ensemble de ses demandes (jugement, pp. 5 à 8) ;

ALORS QU’en s’abstenant de donner tout motif à sa décision du chef de la demande du salarié en paiement d’un rappel de salaires sur la période du 18 octobre au 13 décembre 2012, la cour d’appel méconnu l’article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE l’employeur est tenu de payer sa rémunération et de fournir un travail au salarié qui se tient à sa disposition ; qu’en déboutant le salarié de sa demande en rappel de salaires sur la période du 18 octobre au 13 décembre 2012, sans constater que l’employeur démontrait que le salarié avait refusé d’exécuter son travail, cependant qu’elle relevait que, le 18 octobre 2012, le salarié avait informé son employeur être disponible pour reprendre son poste, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail. Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat aux Conseils, pour la société Transports publics de l’agglomération stéphanoise, demanderesse au pourvoi incident

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR condamné la société STAS à payer au salarié la somme de 1.131,60 euros à titre de dommages et intérêts pour la perte de ses droits individuels à la formation ;

AUX MOTIFS QUE « n’ayant pas informé le salarié dans la lettre de licenciement de ses droits en matière de droit individuel à la formation en violation de l’article L. 6323'19 du code du travail, la société STAS sera en revanche condamnée à titre de dommages et intérêts au paiement de la somme non contestée dans son quantum de 1131,60 euros correspondant aux 120 heures acquises de droit individuel à la formation, peu important que le salarié ait été informé de ses droits au cours de l’exécution du contrat de travail » ;

ALORS QUE des dommages et intérêts ne peuvent être alloués sans que soient caractérisés une faute et un préjudice en résultant ; que, pour condamner l’exposante au paiement de dommages et intérêts pour non-respect de l’obligation d’information relative au droit individuel à la formation, la cour d’appel s’est bornée à constater l’absence d’information du salarié au droit individuel à la formation dans la lettre de licenciement ; qu’en statuant ainsi sans constater que le salarié, qui selon les propres constatations de l’arrêt, avait été « informé de ses droits au cours de l’exécution du contrat de travail », avait subi un préjudice, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil.

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Cour de cassation, Chambre sociale, 20 septembre 2017, 16-11.275, Inédit