Cour de cassation, Chambre commerciale, 7 mai 2019, 17-28.229, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Me Patricia Hirsch · consultation.avocat.fr · 17 juin 2019

Après qu'une société lui eut notifié qu'il se livrait à des actes de contrefaçon en vendant à des tiers des plants d'une variété couverte par un certificat d'obtention végétale dont elle était titulaire, un producteur-multiplicateur de plants de pommes de terre a été exclu temporairement du syndicat des producteurs de plants de pommes de terre dont il était adhérent. Après annulation de la saisie-contrefaçon pratiquée à la demande de la société titulaire du certificat d'obtention végétale, le producteur a demandé l'annulation de la décision d'exclusion. C'est en vain que le producteur fait …

 
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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 7 mai 2019, n° 17-28.229
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-28.229
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Douai, 6 septembre 2017, N° 16/04581
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000038488711
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:CO00358
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Sur les parties

Texte intégral

COMM.

JL

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 7 mai 2019

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 358 F-D

Pourvoi n° K 17-28.229

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Q…, exploitation agricole à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 7 septembre 2017 par la cour d’appel de Douai (chambre 1 section 1), dans le litige l’opposant :

1°/ à l’association Comité Nord des plants de pommes de terre, dont le siège est […] ,

2°/ au Syndicat des producteurs des plants de pommes de terre d’Artois-Bapaume, dont le siège est […] ,

3°/ à la Station de recherche du comité Nord, groupement d’intérêt économique, dont le siège est […] ,

4°/ à la société Desmazières, société anonyme, dont le siège est […] ,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 12 mars 2019, où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme Le Bras, conseiller référendaire rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Labat, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Le Bras, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Q…, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de l’association Comité Nord des plants de pommes de terre, du Syndicat des producteurs des plants de pommes de terre d’Artois-Bapaume, du groupement d’intérêt économique Station de recherche du comité Nord et de la société Desmazières, l’avis de Mme Beaudonnet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai, 7 septembre 2017), que la société Q…, producteur-multiplicateur de plants de pommes de terre, est, à ce titre, adhérente du Syndicat des producteurs de plants de pommes de terre d’Artois-Bapaume (le syndicat) ; que la société Desmazières lui a notifié qu’elle se livrait à des actes de contrefaçon en vendant à des tiers des plants d’une variété couverte par un certificat d’obtention végétale dont elle-même était titulaire ; que l’association Comité Nord des plants de pommes de terre (l’association) a adressé à la société Q… un courrier rappelant la réglementation en matière de propriété intellectuelle ; que le syndicat a convoqué cette société devant son conseil d’administration qui, en sa séance du 18 avril 2008, a prononcé son exclusion temporaire et dit que, pour l’année 2008, le syndicat ne pourrait pas présenter ses cultures au contrôle ; que les actionnaires principaux de la société Desmazières et le groupement d’intérêt économique Station de recherche du comité Nord (le GIE) ont fait pratiquer, le 23 avril 2008, une saisie-contrefaçon ; que celle-ci a été judiciairement annulée ; que la société Q… a demandé l’annulation de la décision d’exclusion et a assigné la société Desmazières, l’association et le GIE, en leur reprochant d’avoir provoqué cette décision, pour obtenir l’indemnisation de son préjudice ;

Attendu que la société Q… fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande d’annulation de la décision d’exclusion temporaire alors, selon le moyen, que même si la procédure est orale, le principe de la contradiction implique, pour une personne poursuivie disciplinairement, la faculté de prendre connaissance, préalablement à son audition, des observations et pièces produites à son encontre ainsi que d’en discuter ; qu’en énonçant que Mme Q… ne pouvait se prévaloir du défaut de communication préalable du dossier, dès lors qu’elle avait refusé de comparaître et que, la procédure étant orale, le rapport devait lui être présenté oralement, de sorte que, si elle avait comparu, elle aurait pu solliciter un délai pour discuter les informations révélées lors de son audition, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, dont il résultait que la société Q… n’avait pas pu prendre connaissance des pièces fondant les accusations de contrefaçon dirigées contre elle préalablement à son audition disciplinaire, a violé, par refus d’application, le principe de la contradiction tel que résultant de l’article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 15 et 16 du code de procédure civile ;

Mais attendu que l’arrêt constate que les parties conviennent que, même en l’absence de toute disposition statutaire relative à la procédure à suivre lorsque le conseil d’administration prend une sanction envers l’un des membres du syndicat, les droits de la défense, et en particulier le principe de la contradiction, doivent être respectés ; qu’il retient, à bon droit, que la société Q… ne peut se prévaloir du défaut de communication du dossier, dès lors qu’elle a pris la décision de refuser de comparaître et que c’est de son seul fait qu’elle n’a pas été à même de présenter ses explications sur les faits susceptibles de la mettre en cause ; qu’en l’état de ces constatations et énonciations, la cour d’appel a fait l’exacte application des textes et principe prétendument violés, dès lors que le principe de la contradiction suppose seulement que l’adhérent ait été mis en mesure de présenter ses observations préalablement à la décision de révocation ; que le moyen n’est pas fondé ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Q… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer au Syndicat des producteurs de plants de pommes de terre d’Artois-Bapaume, à la société Desmazières, à l’association Comité Nord des plants de pommes de terre et au groupement d’intérêt économique Station de recherche du comité Nord la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept mai deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Q…

PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir débouté la SCEA Q… de sa demande tendant à l’annulation de la décision du 18 avril 2008 de l’exclure du Syndicat des producteurs de plants de pommes de terre d’Artois-Bapaume, et de l’avoir condamnée à payer 3 000 € à ce syndicat, ainsi que 3 000 € au GIE Station de recherche du comité Nord, à la société Demazières et au Comité Nord des plants de pommes de terre, au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Aux motifs propres que « Sur la décision d’exclusion : Le compte-rendu du conseil d’administration du syndicat du 18 avril 2008 expose : – que la SCEA Q… est apparue comme fournisseur des plants de la variété protégée Agata trouvés chez un producteur mis en cause pour non-respect de la propriété intellectuelle ; – que la société Q… ne disposait d’aucune autorisation d’utilisation des semences émanent du titulaire des droits ; – que l’on a trouvé des caisses de pommes de terre Agata, lors d’une visite de l’inspecteur de culture agréé le 14 mars 2008 ; que ce compte rendu se conclut par une décision unanime de l’exclusion temporaire de la SCEA Q…, pour la campagne 2008/2009 ; Méconnaissance des droits de la défense ; que les parties conviennent de ce que, même en l’absence de toute disposition statutaire relative à la procédure à suivre lorsque le conseil d’administration du syndicat prend une sanction envers l’un de ses membres, les droits de la défense doivent être respectés et en particulier le principe de la contradiction ; que l’appelant soutient n’avoir pas été mis en mesure de se justifier et n’avoir pas bénéficié de la communication préalable des griefs ainsi que des pièces du dossier ; que M. et Mme Q…, en qualité de représentants de la SCEA Q… ont été convoqués au conseil d’administration du syndicat du 20 mars 2008 par courrier du 18 mars ; que l’ordre du jour est ainsi précisé : – mise en cause du producteur de plants adhérent à notre syndicat, la SCEA Q…, dans un procès en contrefaçon ; – présentation des faits ; – entendre le producteur convoqué à notre conseil mis en cause dans cette affaire ; – discussion et prise de décision le cas échéant ; qu’à ce courrier, M. et Mme Q… ont fait répondre par leur conseil le 19 mars ; que Me Q… expose avoir été consulté par M. et Mme Q… et ajoute : « Pour assurer le respect du contradictoire, je vous prie de me fournir les pièces du dossier (

) Je souhaite également que vous me justifiez des statuts du syndicat afin que je vérifie les modalités de la procédure. Compte tenu de la brièveté du délai de votre convocation, il me semble qu’un report serait envisageable » ; que par courrier du 20 mars 2008, le comité a adressé à la SCEA Q… un courrier contenant des « rappels réglementaires » concernant l’organisation de la culture des pommes de terre et un rappel de la législation concernant la propriété intellectuelle ; que le 27 mars 2008 le comité adressait par fax à la SCEA Q…, son bulletin de liaison 109 dont le point III est intitulé « contrefaçon » qui expose notamment : « Votre conseil d’administration a décidé, après un large débat, que tout adhérent d’un syndicat, au sein du Comité Nord, qui serait reconnu par la SICASOV [un mot semble manquer] de contrefaçon (

) devrait être exclu de nos organisations professionnelles » ; que le 4 avril 2008, le comité indiquait à la SCEA Q… qu’elle allait être convoquée, à sa demande, au prochain conseil d’administration du 18 avec le même ordre du jour que précédemment et la précision suivante : « vous avez la possibilité de vous présenter à cette réunion assisté de votre avocat » ; que ce courrier était transmis à Me Q… avec la mention suivante : « Pourriez-vous nous représenter, je ne compte pas y aller » ; que dans un dernier échange de correspondances, Me Q… sollicitait à nouveau les documents déjà visés dans son courrier du 19 mars ainsi que l’autorisation de représenter ces clients ; qu’il lui était répondu que ceux-ci devaient être entendus par le conseil et que, s’ils pouvaient être assistés, ils ne pouvaient être représentés ; qu’il ressort de ce rappel que le conseil d’administration se situait dans le cadre d’une procédure orale au cours de laquelle devait, tout à la fois, être exposés les éléments recueillis par la SICASOV et les explications du mis en cause entendues ; que le compte-rendu expose que « Au cours d’une réunion organisée par les établissements Desmazières dans ses locaux, ces informations ont été communiquées verbalement à Mme Q… afin qu’elle puisse apporter des explications » ; que la SCEA Q… ne mentionne pas cet événement ; que quoi qu’il en soit de ce point, en l’absence de toute procédure formalisée dans les statuts de l’organisme en cause, on ne peut faire reproche au syndicat d’avoir conçu l’instance disciplinaire comme une procédure orale dès lors que le mis en cause était en mesure de s’expliquer une fois présenté le rapport concernant les faits qui lui étaient reprochés ; que l’appelant ne peut se prévaloir du défaut de communication du « dossier » dès lors qu’il a pris la décision de refuser de comparaître et que, dans ces conditions, c’est de son seul fait qu’il n’a pas été à même de présenter ses explications sur les faits susceptibles de le mettre en cause ; que l’absence de communication préalable à la réunion du conseil, du rapport ne constitue pas en soi un manquement au principe de la contradiction puisque ce rapport devait être présenté oralement à l’intéressée, rien ne lui interdisant de solliciter un délai pour discuter les informations ainsi révélées si cela lui apparaissait nécessaire, à charge pour lui de contester un éventuel refus » (arrêt attaqué, p. 4 et 5) ;

Et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges que « a) sur la violation des droits de la défense : que selon les articles L. 2131-1 et L. 2131-2 du code du travail, les syndicats ou association de personnes exerçant la même profession peuvent se constituer librement, ils ont exclusivement pour objet l’étude et la défense des droits ainsi que des intérêts matériels et moraux, tant collectifs qu’individuels, des personnes mentionnées dans leurs statuts ; qu’il s’agit d’un type particulier d’association ; que l’article premier de la Loi du Premier juillet 1901 rappelle qu’une association est une convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun d’une façon permanente leurs connaissances ou leur activité dans un but autre que de partager des bénéfices ; qu’elle est régie, quant à sa validité, par les principes généraux du droit applicable aux contrats et obligations ; qu’en outre, l’article 1134 du code civil dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise, elles doivent être exécutées de bonne foi ; qu’il est communément admis, qu’à l’occasion d’une procédure disciplinaire à l’égard de l’un de ses adhérents, le syndicat ou groupement professionnel doit respecter les droits de la défense, notamment en l’informant des griefs invoqués à son encontre et en lui laissant la possibilité de s’en expliquer de manière effective ; que dans le cadre de la présente espèce, il sera tout d’abord relevé que les parties s’accordent sur la teneur des statuts et produisent à cet effet les mêmes pièces, à savoir les « statuts des groupements de producteurs de plants » signés le 29 mai 1964, ainsi que le règlement intérieur comportant la même date ; que ce règlement stipule en son article VII : « tout adhérent qui ne se soumettrait pas aux statuts, au règlement intérieur et aux décisions du groupement prises en Assemblée Générale, est passible des sanctions suivantes : a) avertissements b) amende allant de 100 à 1.000 francs c) exclusion sans préjudice des dommages et intérêts que le groupement pourra réclamer devant les tribunaux par tous les moyens de droit et son pouvoir et des poursuites qu’il pourra engager » ; qu’il ressort de ces statuts qu’aucune procédure ou formalité particulière n’est exigée préalablement à l’application des sanctions précitées ; que c’est donc à l’aune des principes énumérés précédemment qu’il y a lieu d’examiner si les droits de la défense de la SCEA Q… ont été respectés ou non ; que la SCEA Q… a tout d’abord été convoquée par courrier du 18 mars 2008 en vue d’une audition prévue le 20 mars 2008 dans ces termes : « Suite à la mise en cause de votre société dans une affaire de contre façon de plants de pommes de terre par les établissements Desmazières s.a., représentant de l’obtenteur de la variété de pommes de terre Agata en France, je vous demande de venir vous expliquer devant le conseil d’administration du syndicat (

) Ordre du jour : sujet : Mise en cause du producteur de plant adhérent à notre syndicat, la SCEA Q… dans un procès pour contrefaçon, présentation des faits, entendre le producteur, convoqué à notre conseil mis en cause dans cette affaire, discussions et prises de décisions le cas échéant » ; qu’à la demande de la SCEA Q…, cette audition sera repoussée ; que la requérante a ensuite été convoquée par courrier du 14 avril 2008 en vue de l’audition fixée le 18 avril 2008, pour statuer sur l’ordre du jour suivant ; « 1 Examen de la situation de votre entreprise agricole au regard des droits de propriété intellectuelle des obtenteurs végétaux et de la règlementation sur les cultures et la certification des plants de pommes de terre. 2 Recueil de toutes informations et explications de votre part, 3 Ediction de toutes sanctions ou mesures conservatoires à votre encontre. Vous avez la possibilité de vous présenter à cette réunion, assistés de votre avocat » ; qu’à réception de cette convocation, le conseil de la SCEA Q… a communiqué un bulletin de situation relatif à l’hospitalisation de M. G… Q…, mari de Mme Q… au CHRU de Lille en date du 16 avril 2008 ; qu’il sollicite la possibilité pour la SCEA Q… d’être représentée par un avocat, lors de cette audition ; que le Président du Syndicat lui répond le 15 avril 2008, en ces termes : « La SCEA Q… peut être représentée par Madame Q… en raison de l’état de santé de son mari Monsieur Q…. Je vous rappelle que je souhaite obtenir des informations de la part de cet adhérent, dans le cadre de nos relations professionnelles. Cet adhérent peut se faire représenter par un avocat, mais en aucun cas se faire représenter en tant que professionnel par un avocat » ; qu’à l’examen de ces échanges, il apparaît en premier lieu que la présence de l’avocat a explicitement été autorisée aux côtés d’un membre de la SCEA Q…, à savoir Madame Q…, G… Q… justifiant son incapacité à comparaître ; qu’or, la SCEA Q… ne peut pas faire grief au Syndicat Producteurs de Plants de Pommes de Terre d’Artois-Bapaume d’avoir refusé la représentation de la SCEA Q… en qualité de professionnel devant le conseil d’administration, une telle audition ne s’apparentant pas à une audience judiciaire, ni même à une audience disciplinaire d’une profession réglementée disposant d’un conseil ordinal ; qu’ainsi les règles de la procédure civile ne s’y appliquent pas ; que de plus, s’agissant de l’absence de comparution de Madame Q… lors de cette réunion, il doit être relevé que celle-ci n’a, à aucun moment, justifié d’un motif légitime d’absence ; qu’il est même précisé sur la télécopie du 14 avril 2008 adressé à son conseil, produite au débat sous la pièce n°9 de la requérante : « je ne compte pas y aller » ; que Madame Q… a donc délibérément refusé de déférer à cette convocation, sans démontrer son incapacité de se déplacer ; qu’en outre, comme précisé ci-avant, la convocation initiale, en date du 18 mars 2008 a été repoussée au 18 avril 2008, permettant à la SCEA Q… de préparer sa défense ; que d’autre part, la SCEA Q… ne peut pas soutenir que les motifs de sa convocation seraient demeurés « obscurs » dans la mesure où les termes de la convocation initiale en date du 18 mars 2008 sont clairs et non équivoques, puisqu’ils citent la nature du grief : « litige en contrefaçon » et de l’auteur de la plainte : la SA Demazières ; qu’ainsi, la SCEA Q… ne démontre pas en quoi elle a été dans l’incapacité de présenter sa défense à l’occasion de cette procédure disciplinaire dans le cadre de laquelle le motif de la convocation est clairement identifié ; qu’enfin, la demanderesse n’explique pas sur quelle disposition contractuelle, règlementaire ou légale le Syndicat aurait été dans l’obligation de lui communiquer les éléments du dossier au préalable, dans un cadre où, là encore, les dispositions du code de procédure civile n’ont pas vocation à s’appliquer ; qu’à titre surabondant, il sera relevé que la nature temporaire de la sanction est tout aussi dénuée d’équivoque puisqu’il est notifié la décision suivante : « à l’unanimité le conseil d’administration décide de l’exclusion temporaire de la SCEA Q… pour la campagne 2008/2009 » ; qu’en conséquence, il n’est pas démontré que la décision prise le 18 avril 2008 par le Conseil d’Administration du Syndicat des producteurs de plants de pommes de terre d’Artois-Bapaume serait irrégulière » (jugement entrepris, p. 6 à 9) ;

Alors que même si la procédure est orale, le principe de la contradiction implique, pour une personne poursuivie disciplinairement, la faculté de prendre connaissance, préalablement à son audition, des observations et pièces produites à son encontre ainsi que d’en discuter ; qu’en énonçant que Mme Q… ne pouvait se prévaloir du défaut de communication préalable du dossier, dès lors qu’elle avait refusé de comparaître et que, la procédure étant orale, le rapport devait lui être présenté oralement, de sorte que, si elle avait comparu, elle aurait pu solliciter un délai pour discuter les informations révélées lors de son audition, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, dont il résultait que la SCEA Q… n’avait pas pu prendre connaissance des pièces fondant les accusations de contrefaçon dirigées contre elle préalablement à son audition disciplinaire, a violé, par refus d’application, le principe de la contradiction tel que résultant de l’article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 15 et 16 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué d’avoir débouté la SCEA Q… de sa demande tendant à l’annulation de la décision d’exclusion du 18 avril 2008, d’avoir rejeté l’action en responsabilité dirigée à l’encontre du Syndicat des producteurs de plants de pommes de terre d’Artois-Bapaume, et de l’avoir condamnée à payer la somme de 3 000 € à ce syndicat, ainsi que celle 3 000 € au GIE Station de recherche du comité Nord, à la société Demazières et au Comité Nord des plants de pommes de terre, au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Aux motifs propres que « Sur la décision d’exclusion : Le compte-rendu du conseil d’administration du syndicat du 18 avril 2008 expose : – que la SCEA Q… est apparue comme fournisseur des plants de la variété protégée Agata trouvés chez un producteur mis en cause pour non-respect de la propriété intellectuelle ; – que la société Q… ne disposait d’aucune autorisation d’utilisation des semences émanent du titulaire des droits ; – que l’on a trouvé des caisses de pommes de terre Agata, lors d’une visite de l’inspecteur de culture agréé le 14 mars 2008 ; que ce compte rendu se conclut par une décision unanime de l’exclusion temporaire de la SCEA Q…, pour la campagne 2008/2009 » (arrêt attaqué, p. 4 in limine) ;

Et que « Sur les faits ; que la contestation de l’appelant relativement aux faits repose sur l’incompétence du tribunal de grande instance d’Arras pour juger de faits de contrefaçon, celui de Lille étant seul compétent pour connaître de tels faits dans le ressort des cours d’appel d’Amiens et de Douai ainsi que sur l’absence de toute suite judiciaire aux procès-verbaux de saisie contrefaçon ; que c’est à juste titre que le jugement critiqué retient que, s’il est exact que le procès-verbal de saisie contrefaçon du 23 avril 2008 a été annulé par le tribunal de grande instance de Lille le 17 décembre 2009, confirmé en cela par la cour d’appel de Douai le 22 février 2010, avec cette circonstance que le pourvoi frappant cet arrêt a été rejeté le 6 juin 2013, la décision d’exclusion critiquée est antérieure à ce procès-verbal ; qu’en revanche celui du 30 janvier 2008 mentionne la vente de plants Agata ainsi que divers achats de plants de la même variété pour l’année 2005, dont les factures sont établies au nom de Mme Q… ou de la SCEA Q… ; que ces faits ne sont d’ailleurs pas discutés dans leur matérialité, l’appelante invoquant seulement l’article L. 623-27-1 du code de la propriété intellectuelle qui prévoit l’annulation de la saisie à la demande du saisi à défaut pour le demandeur de s’être pourvu au fond ; que toutefois, sur cet argument et sur la question de la compétence du tribunal de grande instance d’Arras, il sera observé que la sanction n’a pas été prise dans le cadre d’une instance judiciaire en contrefaçon mais dans le cadre d’une procédure disciplinaire d’un syndicat professionnel que cette juridiction avait compétence pour apprécier et au vu de faits constatés par un procès-verbal qui, au jour de l’audience, n’avait pas fait l’objet par le saisi, d’une demande d’annulation ; qu’il en résulte que c’est à juste titre que le jugement a retenu que les faits étaient établis et que le syndicat pouvait prendre la sanction qu’il a prise ; qu’il convient en conséquence de confirmer le jugement » (arrêt attaqué, p. 5 et 6) ;

Et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges que « b) Sur le caractère avéré des faits ; que le motif principal de l’exclusion est constitué par la mise en cause de la SCEA Q… pour non-respect de la propriété intellectuelle portant sur la variété Agata, découlant de la vente de cette variété sans autorisation des obtenteurs des droits, en l’occurrence la SA Desmazières, à des tiers ; qu’il est également reproché l’absence de demande de certification de la carte professionnelle ; qu’il est exact, comme le soutient la SCEA Q… que le procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 23 avril 2008 par la SCP K… & T…, huissiers de justice à Beaumetz les Loges, a été annulé ultérieurement par le tribunal de grande instance de Lille le 17 décembre 2009, ce qu’a confirmé par la cour d’appel de Douai le 22 février 2012, puis la Cour de cassation a rejeté le pourvoi par arrêt rendu le 6 juin 2013, anéantissant cette procédure ; que toutefois, il doit être relevé que ce procès-verbal de saisie-contrefaçon ne pouvait être évoqué au soutien de la procédure disciplinaire engagée à l’encontre de la SCEA Q…, puisqu’il a été établi postérieurement à la décision d’exclusion ; qu’à l’inverse, le procès-verbal de saisie-contrefaçon, produit aux débats sous la pièce n°7 des défendeurs, dressé le 30 janvier 2008 par Maître H… P…, huissier de justice à Noyon au sein des établissements SAS A… B… n’a pas été annulé ; qu’il mentionne la vente de plants d’Agata 35/45, 45/50 et 35/45 pour l’année 2007, 35/45 pour l’année 2006 et divers achats de plants d’Agata pour l’année 2005 ; qu’or, les factures relatives à ces références figurent au Grand Livre de la SAS A… B… lequel mentionne ses achats sous les noms de « Mme Q… » ou de « SCEA Q… » ; qu’en outre, le compte-rendu de visite rédigé le 28 mars 2008 par Monsieur N… et donc la teneur n’est pas contestée par la requérante, établit qu’elle n’a pas respecté les règles de certification dans la mesure où elle n’a jamais reçu l’accord de la SA Desmazières ; qu’il y a lieu de relever que la requérante ne conteste ni ne critique ce document au terme de ses écritures ; que dans ces conditions, il apparaît que les faits, tels que relatés au terme de la décision du 18 avril 2008, sont établis ; qu’en conséquence, le conseil d’administration du Syndicat des producteurs de plants de pommes de terre d’Artois-Bapaume pouvait prononcer l’exclusion temporaire de la SCEA Q… sans commettre une faute à son égard ; que de la même façon, l’association Comité Nord des plants de pommes de terre et la Société Anonyme (SA) Desmazières n’ont, par leurs agissements, commis aucune faute à l’égard de la requérante ; qu’en l’absence de fait fautif susceptible d’avoir pu lui causer un préjudice, la SCEA Q… sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts en réparation de son préjudice matériel et de son préjudice moral (jugement entrepris p. 10, et p. 11 §1).

1) Alors que les actions civiles et les demandes relatives aux obtentions végétales, y compris lorsqu’elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, sont exclusivement portées devant les tribunaux de grande instance déterminés par voie réglementaire, à l’exception des recours formés contre les actes administratifs ministériels, qui relèvent de la juridiction administrative ; que cette compétence d’attribution d’ordre public interdit au juge normalement saisi d’une action de droit commun relevant de sa compétence, de trancher la question de la contrefaçon d’obtentions végétales dont dépend l’issue du litige dont il est saisi ; qu’il doit surseoir à statuer dans l’attente de la décision du tribunal de grande instance investi d’une compétence d’attribution d’ordre public ; qu’en l’espèce le litige dont le tribunal était compétemment saisi quant à la régularité de l’exclusion d’un adhérent d’un syndicat dépendait exclusivement du problème de savoir si cet adhérent avait commis le délit de contrefaçon d’obtentions végétales, délit relevant de la connaissance exclusive d’un autre tribunal de grande instance ; qu’en retenant la compétence du tribunal de grande instance de droit commun pour trancher cette question sans surseoir à statuer, la cour d’appel a violé les articles L. 623-31 et D. 631-1 du code de la propriété intellectuelle et 49 du CPC ;

2) Alors que constitue une contrefaçon l’atteinte à un droit exclusif de propriété intellectuelle ; que dans ses conclusions d’appel, la SCEA Q… faisait valoir que la décision d’exclusion prise à son encontre était intervenue sans qu’aucun acte de contrefaçon n’ait été caractérisé (conclusions d’appel de l’exposante, p. 21, B, et p. 24) ; qu’en fondant la validité de la décision d’exclusion de la SCEA Q… sur le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 30 janvier 2008, dès lors qu’il mentionnait l’achat et la vente par elle de plants de pommes de terre de variété Agata, sans expliquer, comme elle y était invitée, en quoi ces faits caractérisaient la commission d’actes de contrefaçon, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;

3) Alors que dans ses conclusions d’appel, la SCEA Q… faisant valoir que le procès-verbal du 30 janvier 2008 n’avait jamais été suivi d’une action au fond, de sorte que celui-ci était nul et ne pouvait sortir aucun effet (cf. concl. p. 24 § 1 et 2) ; qu’en se fondant sur le procès-verbal pour valider l’exclusion de la SCEA Q… sans répondre au moyen pris de la nullité et de l’inopposabilité de ce procès-verbal du 30 janvier 2008, la Cour d’appel a violé l’article 455 du CPC.

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Cour de cassation, Chambre commerciale, 7 mai 2019, 17-28.229, Inédit