CJCE, n° C-379/98, Arrêt de la Cour, PreussenElektra AG contre Schleswag AG, en présence de Windpark Reußenköge III GmbH et Land Schleswig-Holstein, 13 mars 2001

  • Avantage accordé sans transfert de ressources publiques·
  • Exclusion ) 3. aides accordées par les États·
  • Utilisation de ressources publiques·
  • Cee/ce - contentieux * contentieux·
  • Libre circulation des marchandises·
  • Aides accordées par les États·
  • 1. questions préjudicielles·
  • Mesures d'effet équivalent·
  • Restrictions quantitatives·
  • Dispositions du traité

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 13 mars 2001, C-379/98
Numéro(s) : C-379/98
Arrêt de la Cour du 13 mars 2001.#PreussenElektra AG contre Schleswag AG, en présence de Windpark Reußenköge III GmbH et Land Schleswig-Holstein.#Demande de décision préjudicielle: Landgericht Kiel - Allemagne.#Électricité - Sources d'énergie renouvelables - Réglementation nationale imposant à des entreprises d'approvisionnement en électricité une obligation d'achat d'électricité à des prix minimaux et répartissant les charges en découlant entre ces entreprises et les entreprises d'exploitation de réseaux en amont - Aide d'État - Compatibilité avec la libre circulation des marchandises.#Affaire C-379/98.
Date de dépôt : 23 octobre 1998
Précédents jurisprudentiels : 26 septembre 2000, Kachelmann, C-322/98
Bosman, C-415/93
Campus Oil e.a., 72/83
Cour du 13 mars 2001. - PreussenElektra AG contre Schhleswag AG
Ecotrade, C-200/97, Rec. p. I-7907, point 35, et du 17 juin 1999, Piaggio, C-295/97
Sloman Neptun, C-72/91 et C-73/91
Viscido e.a., C-52/97 à C-54/97
WWF e.a., C-435/97
Solution : Renvoi préjudiciel
Identifiant CELEX : 61998CJ0379
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2001:160
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Sur les parties

Texte intégral

Avis juridique important

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61998J0379

Arrêt de la Cour du 13 mars 2001. – PreussenElektra AG contre Schhleswag AG, en présence de Windpark Reußenköge III GmbH et Land Schleswig-Holstein. – Demande de décision préjudicielle: Landgericht Kiel – Allemagne. – Electricité – Sources d’énergie renouvelables – Réglementation nationale imposant à des entreprises d’approvisionnement en électricité une obligation d’achat d’électricité à des prix minimaux et répartissant les charges en découlant entre ces entreprises et les entreprises d’exploitation de réseaux en amont – Aide d’Etat – Compatibilité avec la libre circulation des marchandises. – Affaire C-379/98.


Recueil de jurisprudence 2001 page I-02099


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


1. Questions préjudicielles – Compétence de la Cour – Limites – Questions manifestement dénuées de pertinence et questions hypothétiques posées dans un contexte excluant une réponse utile – Questions sans rapport avec l’objet du litige au principal

(Traité CE, art. 177 (devenu art. 234 CE))

2. Aides accordées par les États – Notion – Avantage accordé aux producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables, résultant de l’obligation légale imposée aux entreprises privées d’approvisionnement en électricité de leur acheter leur production à un prix minimal supérieur à sa valeur – Avantage accordé sans transfert de ressources publiques – Exclusion

(Traité CE, art. 92, § 1 (devenu, après modification, art. 87, § 1, CE))

3. Aides accordées par les États – Dispositions du traité – Champ d’application – Relation entre l’article 92 du traité (devenu, après modification, article 87 CE) et l’article 5, second alinéa, du traité (devenu article 10, second alinéa, CE)

(Traité CE, art. 92 (devenu, après modification, art. 87 CE) et art. 5, al. 2 (devenu art. 10, al. 2, CE))

4. Libre circulation des marchandises – Restrictions quantitatives – Mesures d’effet équivalent – Régimes de prix – Réglementation imposant aux entreprises privées d’approvisionnement en électricité d’acheter, à un prix minimal supérieur à sa valeur, l’électricité produite dans leur zone d’approvisionnement à partir de sources d’énergie renouvelables – Admissibilité

(Traité CE, art. 30 (devenu, après modification, art. 28 CE))

Sommaire


1. Dans le cadre de la coopération entre la Cour et les juridictions nationales instituée par l’article 177 du traité (devenu article 234 CE), il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit communautaire, la Cour est, en principe, tenue de statuer.

Toutefois, dans des hypothèses exceptionnelles, il appartient à la Cour d’examiner les conditions dans lesquelles elle est saisie par le juge national en vue de vérifier sa propre compétence. Le refus de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation du droit communautaire sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées.

( voir points 38-39 )

2. Seuls les avantages accordés directement ou indirectement au moyen de ressources d’État sont considérés comme des aides au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité (devenu, après modification, article 87, paragraphe 1, CE). En effet, la distinction établie dans cette disposition entre les «aides accordées par les États» et les aides accordées «au moyen de ressources d’État» ne signifie pas que tous les avantages consentis par un État constituent des aides, qu’ils soient ou non financés au moyen de ressources étatiques, mais vise seulement à inclure dans cette notion les avantages qui sont accordés directement par l’État ainsi que ceux qui le sont par l’intermédiaire d’un organisme public ou privé, désigné ou institué par cet État.

Par conséquent, une réglementation d’un État membre qui, d’une part, oblige des entreprises privées d’approvisionnement en électricité à acheter l’électricité produite dans leur zone d’approvisionnement à partir de sources d’énergie renouvelables à des prix minimaux supérieurs à la valeur économique réelle de ce type d’électricité et, d’autre part, répartit la charge financière résultant de cette obligation entre lesdites entreprises d’approvisionnement en électricité et les exploitants privés des réseaux d’électricité situés en amont ne constitue pas une aide d’État au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

( voir point 58, disp. 1 )

3. L’article 92 du traité (devenu, après modification, article 87 CE) se suffit à lui-même pour interdire les comportements étatiques qu’il vise et l’article 5 du traité (devenu article 10 CE), qui, en son second alinéa, prévoit que les États membres s’abstiennent de toutes mesures susceptibles de mettre en péril la réalisation des buts du traité, ne saurait servir à étendre le champ d’application dudit article 92 à des comportements étatiques qui n’en relèvent pas, tels que des mesures de soutien décidées par l’État mais financées par des entreprises privées.

( voir points 63, 65 )

4. En l’état actuel du droit communautaire relatif au marché de l’électricité, n’est pas incompatible avec l’article 30 du traité (devenu, après modification, article 28 CE) une réglementation d’un État membre qui, d’une part, oblige des entreprises privées d’approvisionnement en électricité à acheter l’électricité produite dans leur zone d’approvisionnement à partir de sources d’énergie renouvelables à des prix minimaux supérieurs à la valeur économique réelle de ce type d’électricité et, d’autre part, répartit la charge financière résultant de cette obligation entre lesdites entreprises d’approvisionnement en électricité et les exploitants privés des réseaux d’électricité situés en amont, une telle réglementation étant utile à la protection de l’environnement dans la mesure où l’utilisation de sources d’énergie renouvelables qu’elle vise à promouvoir contribue à la réduction des émissions de gaz à effet de serre qui figurent parmi les principales causes des changements climatiques que la Communauté européenne et ses États membres se sont engagés à combattre.

( voir points 73, 81, disp. 1- 2 )

Parties


Dans l’affaire C-379/98,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l’article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par le Landgericht Kiel (Allemagne) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

PreussenElektra AG

et

Schleswag AG,

en présence de:

Windpark Reußenköge III GmbH

et

Land Schleswig-Holstein,

une décision à titre préjudiciel sur l’interprétation des articles 30 et 92 du traité CE (devenus, après modification, articles 28 CE et 87 CE), ainsi que 93, paragraphe 3, du traité CE (devenu article 88, paragraphe 3, CE),

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, C. Gulmann, M. Wathelet et V. Skouris, présidents de chambre, D. A. O. Edward, J.-P. Puissochet, P. Jann, L. Sevón et R. Schintgen (rapporteur), juges,

avocat général: M. F. G. Jacobs,

greffier: M. H. A. Rühl, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

— pour PreussenElektra AG, par Me D. Sellner, Rechtsanwalt,

— pour Schleswag AG, par Me M. Nebendahl, Rechtsanwalt,

— pour Windpark Reußenköge III GmbH et le Land Schleswig-Holstein, par Me W. Ewer, Rechtsanwalt,

— pour le gouvernement allemand, par MM. W.-D. Plessing et C.-D. Quassowski, en qualité d’agents,

— pour le gouvernement finlandais, par M. H. Rotkirch et Mme T. Pynnä, en qualité d’agents,

— pour la Commission des Communautés européennes, par MM. V. Kreuschitz et P. F. Nemitz, en qualité d’agents,

vu le rapport d’audience,

ayant entendu les observations orales de PreussenElektra AG, de Schleswag AG, de Windpark Reußenköge III GmbH, du Land Schleswig-Holstein, du gouvernement allemand et de la Commission à l’audience du 27 juin 2000,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 octobre 2000,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


1 Par ordonnance du 13 octobre 1998, parvenue à la Cour le 23 octobre suivant, le Landgericht Kiel a posé, en vertu de l’article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), trois questions préjudicielles sur l’interprétation des articles 30 et 92 du traité CE (devenus, après modification, articles 28 CE et 87 CE), ainsi que 93, paragraphe 3, du traité CE (devenu article 88, paragraphe 3, CE).

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d’un litige opposant PreussenElektra AG (ci-après «PreussenElektra») à Schleswag AG (ci-après «Schleswag») au sujet du remboursement de sommes versées par la première à la seconde en application de l’article 4, paragraphe 1, du Gesetz über die Einspeisung von Strom aus erneuerbaren Energien in das öffentliche Netz, du 7 décembre 1990 (loi relative à l’arrivée de courant provenant d’énergies renouvelables dans le réseau de service public, BGBl. 1990 I, p. 2633, ci-après le «Stromeinspeisungsgesetz»), dans sa version résultant de l’article 3, paragraphe 2, du Gesetz zur Neuregelung des Energiewirtschaftsrechts, du 24 avril 1998 (loi portant réglementation nouvelle du droit de l’énergie, BGBl. 1998 I, p. 730, ci-après la «loi de 1998»).

Le cadre réglementaire

3 Le Stromeinspeisungsgesetz est entré en vigueur le 1er janvier 1991. Aux termes de son article 1er, intitulé «Champ d’application», il régissait, dans sa version initiale, l’achat par les entreprises publiques d’approvisionnement en électricité de courant produit exclusivement à partir de l’énergie hydraulique, de l’énergie éolienne, de l’énergie solaire, de gaz issus de décharges et d’installations d’épuration ou de produits ou de résidus et déchets biologiques de l’agriculture et de la sylviculture, ainsi que l’indemnité à payer pour ce type de courant.

4 Il est constant que la notion d’entreprise publique d’approvisionnement en électricité recouvre tant des entreprises privées que des entreprises appartenant partiellement ou entièrement au secteur public.

5 Le Gesetz zur Sicherung des Einsatzes von Steinkohle in der Verstromung und zur Änderung des Atomgesetzes und des Stromeinspeisungsgesetzes, du 19 juillet 1994 (loi garantissant l’approvisionnement en charbon des centrales électriques et modifiant la loi sur l’énergie nucléaire et le Stromeinspeisungsgesetz, BGBl. 1994 I, p. 1618, ci-après la «loi de 1994»), a étendu le champ d’application du Stromeinspeisungsgesetz, tel que défini à son article 1er, au courant provenant de l’industrie du bois. La loi de 1998 a remplacé la référence aux produits ou résidus et déchets biologiques de l’agriculture et de la sylviculture ainsi qu’à l’industrie du bois par l’expression «la biomasse» et a précisé que le Stromeinspeisungsgesetz s’applique au courant produit à partir des sources d’énergie renouvelables énumérées «dans le domaine de validité de la présente loi».

6 L’article 2 du Stromeinspeisungsgesetz, intitulé «Obligation d’achat», prévoit que les entreprises d’approvisionnement en électricité ont l’obligation d’acheter le courant produit dans leur zone d’approvisionnement à partir d’énergies renouvelables et de le payer conformément aux dispositions de l’article 3. Dans sa version résultant de la loi de 1998, qui y a ajouté une deuxième et une troisième phrase, cet article est libellé comme suit:

«Les entreprises d’approvisionnement en électricité qui exploitent un réseau d’approvisionnement général sont tenues d’acheter le courant produit dans leur zone d’approvisionnement à partir d’énergies renouvelables et de payer une indemnité pour ces arrivées de courant conformément à l’article 3. En ce qui concerne les installations de production qui ne sont pas situées dans la zone d’approvisionnement d’un exploitant de réseau, cette obligation concerne l’entreprise dont le réseau adapté à l’arrivée de courant est le plus proche de l’installation. Les surcoûts résultant de l’application des articles 2 et 4 peuvent être imputés, dans le cadre de la comptabilité, à la distribution ou au transport et pris en compte lors de la détermination de l’indemnité de transit.»

7 L’article 3 du Stromeinspeisungsgesetz, dans sa version résultant de la loi de 1998, intitulé «Montant de l’indemnité», dispose:

«1. En ce qui concerne le courant produit à partir de l’énergie hydraulique, à partir de gaz issus de décharges ou d’installations d’épuration ainsi qu’à partir de la biomasse, l’indemnité s’élève à 80 % au moins de la recette moyenne par kilowattheure provenant de la fourniture de courant à tous les consommateurs finals par les entreprises d’approvisionnement en électricité. Dans le cas de centrales hydrauliques ou d’installations de traitement de gaz issus de décharges ou d’installations d’épuration dont la puissance dépasse 500 kilowatts, cette règle ne vaut que pour la partie du courant arrivé chaque année de compte qui correspond à 500 divisé par la puissance de l’installation en kilowatts; la puissance est définie par la moyenne annuelle de la puissance effective maximale mesurée pour chaque mois. Le prix du surplus de courant s’élève à au moins 65 % de la recette moyenne au sens de la première phrase.

2. En ce qui concerne le courant produit à partir de l’énergie solaire ou éolienne, l’indemnité s’élève à au moins 90 % de la recette moyenne au sens de la première phrase du paragraphe 1.

3. La recette moyenne à considérer au sens des paragraphes 1 et 2 est la valeur publiée chaque année par l’office fédéral des statistiques pour l’avant-dernière année civile, exprimée hors impôt sur le chiffre d’affaires en pfennigs par kilowattheure. Pour le calcul de l’indemnité en application des paragraphes 1 et 2, il convient d’arrondir à deux chiffres après la virgule.»

8 Tandis que, à la suite de la modification apportée au Stromeinspeisungsgesetz par la loi de 1994, l’indemnité fixée pour le courant visé à l’article 3, paragraphe 1, est passée de 75 % à 80 % de la recette moyenne par kilowattheure provenant de la fourniture de courant à tous les consommateurs finals, celle fixée pour le courant produit à partir de l’énergie solaire et de l’énergie éolienne, visé à l’article 3, paragraphe 2, n’a pas varié depuis l’entrée en vigueur du Stromeinspeisungsgesetz.

9 Dans sa version initiale, l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz, intitulé «Clause pour les cas de rigueur», était libellé comme suit:

«1. Les obligations prévues aux articles 2 et 3 n’existent pas lorsque leur respect constituerait un cas de rigueur injustifiée ou rendrait impossible le respect par l’entreprise d’approvisionnement en électricité de ses obligations découlant de la Bundestarifordnung Elektrizität du 18 décembre 1989 (BGBl. 1989 I, p. 2255). En pareil cas, les obligations sont transmises à l’entreprise d’approvisionnement en électricité située en amont.

2. Il y a cas de rigueur injustifiée notamment lorsque l’entreprise d’approvisionnement en électricité serait contrainte de porter ses prix à un niveau sensiblement supérieur à ceux d’entreprises d’approvisionnement similaires ou situées en amont.»

10 La loi de 1998 a apporté plusieurs modifications à l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz. Elle y a ajouté, d’une part, deux nouveaux paragraphes, qui sont devenus les paragraphes 1 et 4. Elle a apporté, d’autre part, certaines adaptations à l’ancien paragraphe 1, qui est devenu le nouveau paragraphe 2. L’ancien paragraphe 2, resté inchangé, est devenu le nouveau paragraphe 3. En conséquence, dans sa version résultant de la loi de 1998, l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz se présente comme suit:

«1. Dans la mesure où les kilowattheures à indemniser excèdent 5 % de la totalité des kilowattheures fournis par l’entreprise d’approvisionnement en électricité, au cours d’une année civile, par l’intermédiaire de son réseau, l’exploitant de réseau situé en amont est tenu de rembourser à l’entreprise d’approvisionnement les surcoûts qui découlent des kilowattheures excédant cette part. Dans le cas d’exploitants de réseau situés en amont, la charge constituée par le droit au remboursement au sens de la première phrase fait également partie de ces surcoûts. À défaut d’un tel exploitant, l’obligation prévue à l’article 2, première phrase, disparaît, en ce qui concerne les entreprises d’approvisionnement en électricité se trouvant dans la situation visée aux première et deuxième phrases, au début de l’année civile qui suit la réalisation de cette situation, dans le cas d’installations non encore achevées pour l’essentiel à ce moment. S’il s’agit d’éoliennes, le moment pertinent est l’installation du mât et du rotor.

2. Les obligations prévues aux articles 2 et 3 n’existent pas lorsque, même en cas d’application de la clause de remboursement du paragraphe 1, leur respect constituerait un cas de rigueur injustifiée. En pareil cas, les obligations sont transmises à l’exploitant de réseau situé en amont.

3. Il y a cas de rigueur injustifiée notamment lorsque l’entreprise d’approvisionnement en électricité serait contrainte de porter ses prix à un niveau sensiblement supérieur à ceux d’entreprises d’approvisionnement similaires ou situées en amont.

4. Le ministre fédéral de l’Économie doit faire un rapport au Bundestag sur les effets de la clause pour les cas de rigueur au plus tard en 1999 et en tout cas en temps utile afin qu’une autre réglementation compensatoire soit adoptée avant que les conséquences visées au paragraphe 1, troisième phrase, se produisent.»

11 Il ressort de l’ordonnance de renvoi ainsi que des observations écrites déposées devant la Cour que, par lettre du 14 août 1990, le gouvernement allemand a, conformément aux dispositions de l’article 93, paragraphe 3, du traité, notifié à la Commission, en tant qu’aide d’État, le projet de loi devenu, après adoption, le Stromeinspeisungsgesetz. Par lettre du 19 décembre 1990, la Commission a autorisé le projet notifié, après avoir considéré, d’une part, que ce projet était conforme aux objectifs de politique énergétique des Communautés européennes et, d’autre part, que les énergies renouvelables ne constituaient qu’une partie réduite du secteur énergétique et que les recettes supplémentaires ainsi que les répercussions sur les prix du courant seraient faibles. La Commission a toutefois invité le gouvernement allemand à lui communiquer des informations sur l’application du Stromeinspeisungsgesetz, celui-ci devant être réexaminé deux ans après son entrée en vigueur, et a souligné que toute modification ou prorogation de ladite loi devrait faire l’objet d’une notification préalable.

12 Il résulte également de l’ordonnance de renvoi et des observations écrites déposées devant la Cour que, à la suite de nombreuses plaintes émanant d’entreprises d’approvisionnement en électricité, la Commission a, par lettre du 25 octobre 1996, fait part au ministre fédéral de l’Économie de ses doutes quant à la question de savoir si, compte tenu de l’augmentation de la production d’électricité d’origine éolienne, le Stromeinspeisungsgesetz continuait d’être compatible avec les dispositions du traité en matière d’aides. Dans cette lettre, la Commission a fait plusieurs propositions de modification en ce qui concerne la réglementation applicable à l’énergie éolienne et a précisé que, si le Bundestag n’était pas disposé à modifier le Stromeinspeisungsgesetz à cet égard, elle pourrait se voir obligée de proposer à la République fédérale d’Allemagne des mesures utiles au sens de l’article 93, paragraphe 1, du traité, afin de rendre la loi compatible avec les règles communautaires en vigueur dans le domaine des aides.

13 Il résulte en outre des observations écrites de Windpark Reußenköge III GmbH (ci-après «Windpark») et du Land Schleswig-Holstein, parties intervenantes dans le litige au principal, ainsi que de la Commission que, à la demande de celle-ci, le gouvernement allemand a informé la Commission de l’état d’avancement des travaux relatifs au projet de loi portant réglementation nouvelle du droit de l’énergie. Dans une lettre du 29 juillet 1998, soit postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi de 1998, la Commission a fait savoir au ministre fédéral de l’Économie que, eu égard aux développements en cours au niveau communautaire concernant notamment d’éventuelles propositions d’harmonisation des règles en matière d’arrivée de courant provenant de sources d’énergie renouvelables, elle n’envisageait pas de prendre une décision formelle relative au Stromeinspeisungsgesetz, dans sa version résultant de la loi de 1998, avant que le rapport ministériel sur les effets de la clause pour les cas de rigueur, prévu à son article 4, paragraphe 4, soit établi, bien que le législateur allemand, lors de l’adoption de la loi de 1998, n’ait pas tenu compte des propositions formulées dans sa lettre du 25 octobre 1996.

14 Il résulte enfin d’une note en bas de page publiée avec la loi de 1998 que celle-ci, dont l’article 1er est intitulé «Gesetz über die Elektrizitäts- und Gasversorgung» (loi relative à l’approvisionnement en électricité et en gaz), a transposé en droit national la directive 96/92/CE du Parlement européen et du Conseil, du 19 décembre 1996, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité (JO 1997, L 27, p. 20).

15 Cette directive, dont le troisième considérant confirme qu’elle n’affecte en rien l’application du traité, et notamment de ses dispositions relatives au marché intérieur et à la concurrence, dispose, en son article 8, paragraphes 3 et 4, qui fait partie du chapitre IV, intitulé «Exploitation du réseau de transport»:

«3. Un État membre peut imposer au gestionnaire du réseau, lorsqu’il appelle les installations de production, de donner la priorité à celles qui utilisent des sources d’énergie renouvelables ou des déchets ou qui produisent de la chaleur et de l’électricité combinées.

4. Un État membre peut, pour des raisons de sécurité d’approvisionnement, ordonner que les installations de production utilisant des sources combustibles indigènes d’énergie primaire soient appelées en priorité, dans une proportion n’excédant pas, au cours d’une année civile, 15 % de la quantité totale d’énergie primaire nécessaire pour produire l’électricité consommée dans l’État membre concerné.»

16 Par ailleurs, conformément à son article 11, paragraphe 3, qui figure au chapitre V, intitulé «Exploitation du réseau de distribution»,

«[u]n État membre peut imposer au gestionnaire du réseau de distribution, lorsqu’il appelle les installations de production, de donner la priorité à celles qui utilisent des sources d’énergie renouvelables ou des déchets ou qui produisent de la chaleur et de l’électricité combinées.»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

17 PreussenElektra exploite, en Allemagne, plus de vingt centrales électriques conventionnelles et nucléaires ainsi qu’un réseau de distribution électrique à haute et très haute tension. Par ce réseau, PreussenElektra fournit de l’électricité à des entreprises régionales d’approvisionnement en électricité, à des entreprises communales d’une certaine importance et à des entreprises industrielles.

18 Schleswag est une entreprise régionale d’approvisionnement en électricité, qui achète l’électricité dont elle a besoin pour approvisionner ses clients dans le Land Schleswig-Holstein presque exclusivement auprès de PreussenElektra.

19 PreussenElektra possède 65,3 % des actions de Schleswag. Les 34,7 % restants sont détenus par diverses autorités communales du Land Schleswig-Holstein.

20 Conformément à l’article 2 du Stromeinspeisungsgesetz, Schleswag a l’obligation d’acheter l’électricité produite dans sa zone d’approvisionnement à partir de sources d’énergie renouvelables, y compris l’électricité d’origine éolienne. Il résulte de l’ordonnance de renvoi que la part de l’électricité d’origine éolienne dans le chiffre d’affaires total en matière d’électricité de Schleswag, qui était de 0,77 % en 1991, a augmenté de manière continue et devait atteindre environ 15 % en 1998. En conséquence, le surcoût pesant sur Schleswag en raison de l’obligation d’achat au prix minimal fixé par le Stromeinspeisungsgesetz, qui était de 5,8 millions de DEM en 1991, devait passer à environ 111,5 millions de DEM en 1998, dont seulement 38 millions de DEM environ devaient rester à la charge de Schleswag compte tenu de l’application du mécanisme de compensation introduit à l’article 4, paragraphe 1, du Stromeinspeisungsgesetz par la loi de 1998.

21 À la fin du mois d’avril 1998, l’approvisionnement de Schleswag en électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables a atteint 5 % de la quantité d’électricité vendue au cours de l’ensemble de l’année précédente. Schleswag a alors facturé à PreussenElektra, conformément à l’article 4, paragraphe 1, du Stromeinspeisungsgesetz, dans sa version résultant de la loi de 1998 (ci-après le «Stromeinspeisungsgesetz, modifié»), les surcoûts résultant de l’achat d’électricité provenant de sources d’énergie renouvelables, lui réclamant dans un premier temps des paiements fractionnés de 10 millions de DEM par mois.

22 PreussenElektra a versé le paiement réclamé pour le mois de mai 1998, tout en se réservant le droit d’en demander à tout moment la restitution. C’est ce qu’elle a fait en saisissant le Landgericht Kiel d’une demande en remboursement d’un montant de 500 000 DEM, représentant la part de la somme payée à Schleswag en compensation des surcoûts occasionnés par l’achat par celle-ci d’électricité d’origine éolienne. Le Landgericht indique, dans son ordonnance de renvoi, que ces surcoûts ne peuvent pas être répercutés sur les clients de Schleswag dès lors que le ministère de l’Énergie du Land Schleswig-Holstein a refusé d’approuver une demande de modification des tarifs de Schleswag.

23 Devant le Landgericht, PreussenElektra a fait valoir que la somme réclamée avait été versée à Schleswag sans motif juridique valable et devait faire l’objet d’une répétition, dans la mesure où l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, sur lequel était fondé ce paiement, était contraire aux dispositions directement applicables du traité en matière d’aides d’État et ne pouvait dès lors être appliqué. La modification du champ d’application du Stromeinspeisungsgesetz et l’introduction d’une règle de répartition des surcoûts, qui résultent de la loi de 1998, auraient nécessité, avant l’entrée en vigueur de celle-ci, la mise en oeuvre de la procédure prévue à l’article 93 du traité, ce que la République fédérale d’Allemagne aurait omis de faire. Aussi, PreussenElektra a conclu à ce que Schleswag soit condamnée à lui rembourser la somme de 500 000 DEM, majorés des intérêts au taux de 5 % à compter du 15 juillet 1998.

24 Schleswag a conclu au rejet de cette demande. Tout en reconnaissant que le Stromeinspeisungsgesetz, modifié, contenait un régime d’aides remanié, elle a soutenu que son article 4 ne constituait qu’une simple règle de redistribution, visant à atténuer les conséquences que les entreprises d’approvisionnement en électricité subiraient en raison des articles 2 et 3 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, et, considéré isolément, n’aurait dès lors pas le caractère d’une aide au sens de l’article 92 du traité. Or, d’une part, les articles 2 et 3 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, n’affecteraient pas la relation juridique existant entre PreussenElektra et Schleswag, de sorte que le Landgericht ne pourrait pas, dans le litige au principal, écarter leur application. D’autre part, la non-application de l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, laisserait intacte l’obligation de Schleswag d’acheter l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables aux prix minimaux fixés. En conséquence, l’effet de sanction découlant de l’application directe de l’article 93, paragraphe 3, troisième phrase, du traité ne permettrait ni de sanctionner l’aide illégale constituée par les articles 2 et 3 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, ni de s’opposer à l’application de l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, de sorte que le paiement litigieux devrait être considéré comme ayant été fait en vertu d’un motif juridique valable.

25 D’une part, constatant que la Commission n’avait pas été informée, conformément à l’article 93, paragraphe 3, du traité, des modifications apportées au Stromeinspeisungsgesetz par la loi de 1998, le Landgericht a considéré que la question de savoir si la nouvelle version de celui-ci, dans son ensemble, ou certains de ses éléments constituent une aide d’État au sens de l’article 92 du traité restait pertinente, même si le gouvernement allemand et la Commission avaient déjà qualifié d’aide le régime initial du Stromeinspeisungsgesetz dans le cadre de la procédure de notification entreprise en 1990. En effet, selon le Landgericht, même si les modifications apportées par la loi de 1998 au Stromeinspeisungsgesetz devaient être considérées comme constituant un remaniement du régime initial, la procédure de l’article 93, paragraphe 3, du traité n’aurait dû être appliquée à ce régime remanié que si celui-ci constituait lui-même un régime d’aides au sens de l’article 92 du traité.

26 D’autre part, le Landgericht a considéré que l’obligation d’acheter l’électricité produite en Allemagne à partir de sources d’énergie renouvelables à des conditions qui ne pourraient pas être obtenues sur un marché libre pouvait entraîner une baisse de la demande d’électricité produite dans d’autres États membres, de sorte qu’une entrave au commerce entre États membres, prohibée par l’article 30 du traité, ne pouvait être exclue.

27 Dans ces conditions, considérant que l’interprétation des articles 30, 92 et 93, paragraphe 3, du traité lui était nécessaire pour résoudre le litige pendant devant lui, le Landgericht Kiel a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1) L’indemnité pour arrivée de courant (Stromeinspeisevergütung) et la règle relative à la restitution, selon les articles 2 ou 3 ou 4 ou 2 à 4 combinés du Gesetz über die Einspeisung von Strom aus erneuerbaren Energien in das öffentliche Netz, du 7 décembre 1990 (BGBl. I, p. 2633), dans la version de l’article 3, paragraphe 2, du Gesetz zur Neuregelung des Energiewirtschaftsrechts, du 24 avril 1998 [BGBl. I, p. 730 (734-736)], constituent-elles une aide d’État au sens de l’article 92 du traité CE?

L’article 92 du traité CE est-il à interpréter en ce sens que la notion d’aide à la base de cette disposition s’étend également à des réglementations nationales qui ont pour but de soutenir la personne qui reçoit le paiement, pour lesquelles les moyens de soutien nécessaires ne proviennent toutefois ni directement ni indirectement des budgets publics, mais sont imposés, en vertu d’obligations d’achat prescrites par la loi à des prix minimaux fixés, à certaines entreprises d’un secteur, qui, pour des motifs de droit et de fait, ne peuvent pas répercuter ces charges sur le consommateur final?

L’article 92 du traité CE est-il à interpréter en ce sens que la notion d’aide à la base de cette disposition s’étend également à des réglementations nationales qui règlent uniquement la répartition, entre des entreprises se trouvant à des stades de production différents, de charges qui sont la conséquence d’obligations d’achat et d’indemnités minimales, lorsque la conception du législateur entraîne en fait une répartition durable de ces charges, sans que l’entreprise qui supporte la charge perçoive une contrepartie?

2) Dans la mesure où il est répondu par la négative à la question [1)] en ce qui concerne l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz[, modifié]:

L’article 93, paragraphe 3, du traité CE est-il à interpréter en ce sens que l’effet d’obstacle de cette disposition ne s’étend pas seulement au soutien en tant que tel, mais aussi aux règles d’exécution telles que l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz[, modifié]?

3) Dans la mesure où il est répondu par la négative aux questions 1) et 2):

L’article 30 du traité CE est-il à interpréter en ce sens qu’une restriction quantitative à l’importation ou des mesures d’effet équivalent entre États membres existent au sens de l’article 30 du traité CE, lorsqu’une réglementation nationale impose à des entreprises d’acheter du courant provenant de sources d’énergie régénératrices à des prix minimaux et met de plus à contribution les exploitants de réseaux pour assurer le financement, sans contrepartie?»

Sur la recevabilité

28 Windpark et le Land Schleswig-Holstein (ci-après les «parties intervenantes au principal») ainsi que le gouvernement allemand contestent la recevabilité de tout ou partie du renvoi préjudiciel.

29 En premier lieu, les parties intervenantes au principal font valoir que l’ordonnance de renvoi contient plusieurs lacunes ou erreurs factuelles.

30 À cet égard, elles soutiennent que la juridiction de renvoi a considéré à tort, d’une part, que la Commission n’avait pas été informée des modifications apportées au Stromeinspeisungsgesetz par la loi de 1998 et, d’autre part, que les entreprises d’approvisionnement en électricité ne pouvaient pas, pour des raisons de fait et de droit, répercuter sur le consommateur final les dépenses qu’elles supportent au titre de l’indemnité visée à l’article 3 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié.

31 En deuxième lieu, les parties intervenantes au principal et le gouvernement allemand soutiennent que le litige au principal ne constitue pas un litige réel mais a été construit de toutes pièces.

32 À cet égard, ils relèvent que la demanderesse et la défenderesse au principal s’accordent à penser que les articles 2 à 4 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, lus ensemble, sont contraires au droit communautaire. PreussenElektra aurait néanmoins effectué le paiement compensatoire prévu à l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, tout en en demandant immédiatement la restitution partielle. Ils soutiennent également que PreussenElektra est l’actionnaire principal de Schleswag et aurait, de ce fait, une influence prépondérante sur les décisions et positions juridiques de celle-ci.

33 En troisième lieu, les parties intervenantes au principal et le gouvernement allemand font valoir que les questions posées ne sont pas pertinentes aux fins de la solution du litige au principal.

34 S’agissant des questions relatives à l’interprétation des articles 92 et 93 du traité, les parties intervenantes au principal rappellent que, en vertu de la jurisprudence de la Cour (arrêt du 11 décembre 1973, Lorenz, 120/73, Rec. p. 1471, point 9), il appartient à l’ordre juridique interne de chaque État membre de déterminer le procédé juridique permettant d’assurer l’effet direct de l’article 93, paragraphe 3, troisième phrase, du traité. Or, la juridiction de renvoi n’indiquerait pas si et à quelles conditions PreussenElektra aurait, dans l’ordre juridique allemand, droit au remboursement des sommes qu’elle réclame et, dès lors, ne démontrerait pas la pertinence des questions préjudicielles au regard du droit national.

35 En outre, les parties intervenantes au principal font valoir qu’il résulte d’une jurisprudence constante (voir, notamment, arrêt du 17 mars 1993, Sloman Neptun, C-72/91 et C-73/91, Rec. p. I-887, points 11 et 12) que la Cour n’est compétente pour interpréter la notion d’aide au sens de l’article 92 du traité que lorsque la procédure de contrôle préalable prévue à l’article 93, paragraphe 3, du traité n’a pas été respectée. Or, d’une part, le Stromeinspeisungsgesetz, dans sa version initiale, aurait été notifié à la Commission et autorisé par celle-ci, d’autre part, les modifications apportées au Stromeinspeisungsgesetz par la loi de 1998 ne constitueraient pas une modification d’aide, au sens de l’article 93, paragraphe 3, du traité, qui aurait nécessité une nouvelle notification. En tout état de cause, l’échange de correspondance qui a eu lieu avant et après l’adoption de la loi de 1998 entre les autorités allemandes et la Commission vaudrait, d’un côté, notification par le gouvernement allemand des modifications que cette loi a apportées au Stromeinspeisungsgesetz et, de l’autre, autorisation implicite par la Commission desdites modifications.

36 Quant au gouvernement allemand, il estime qu’une réponse aux questions relatives à l’article 92 du traité n’est pas nécessaire pour permettre à la juridiction de renvoi de rendre son jugement dans la mesure où, dans le litige au principal, la seule question déterminante serait de savoir si Schleswag a droit à un paiement compensatoire au titre de l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, article qui ne régirait toutefois que la répartition des charges consécutives au paiement de l’indemnité pour arrivée de courant et ne contiendrait pas d’aide au profit des destinataires de cette indemnité.

37 S’agissant de la question relative à l’article 30 du traité, les parties intervenantes au principal et le gouvernement allemand soulignent que le litige au principal ne présente aucun caractère transfrontalier et que la demanderesse et la défenderesse au principal n’ont pas non plus démontré que le Stromeinspeisungsgesetz, modifié, les empêche d’importer de l’électricité en provenance d’autres États membres.

38 Il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, dans le cadre de la coopération entre la Cour et les juridictions nationales instituée par l’article 177 du traité, il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, tant la nécessité d’une décision préjudicielle pour être en mesure de rendre son jugement que la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que les questions posées portent sur l’interprétation du droit communautaire, la Cour est, en principe, tenue de statuer (voir, notamment, arrêt du 15 décembre 1995, Bosman, C-415/93, Rec. p. I-4921, point 59).

39 Toutefois, la Cour a également indiqué que, dans des hypothèses exceptionnelles, il lui appartient d’examiner les conditions dans lesquelles elle est saisie par le juge national en vue de vérifier sa propre compétence (voir, en ce sens, arrêt du 16 décembre 1981, Foglia, 244/80, Rec. p. 3045, point 21). Le refus de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que lorsqu’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation du droit communautaire sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (voir, notamment, arrêts Bosman, précité, point 61; du 13 juillet 2000, Idéal tourisme, C-36/99, non encore publié au Recueil, point 20, et du 26 septembre 2000, Kachelmann, C-322/98, non encore publié au Recueil, point 17).

40 En l’occurrence, s’agissant, en premier lieu, des prétendues lacunes et erreurs factuelles contenues dans l’ordonnance de renvoi, il suffit de rappeler qu’il n’appartient pas à la Cour mais à la juridiction nationale d’établir les faits qui ont donné lieu au litige et d’en tirer les conséquences pour la décision qu’elle est appelée à rendre (voir, notamment, arrêt du 16 septembre 1999, WWF e.a., C-435/97, Rec. p. I-5613, point 32).

41 Il convient, en deuxième lieu, de relever que le recours formé par PreussenElektra vise au remboursement de la somme qu’elle a dû payer à Schleswag pour compenser le surcoût découlant, pour celle-ci, de l’achat d’électricité d’origine éolienne effectué, en application de l’obligation d’achat prévue par le Stromeinspeisungsgesetz, modifié, auprès des producteurs de ce type d’électricité établis dans sa zone d’approvisionnement.

42 Le litige au principal ne peut donc être considéré comme ayant un caractère hypothétique.

43 Certes, Schleswag a, comme PreussenElektra, intérêt à ce que les articles 2 et 3 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, prévoyant ladite obligation d’achat et fixant le prix à payer en conséquence, soient considérés comme constituant une aide illégale, au paiement de laquelle elle pourrait de ce fait échapper. Toutefois, le litige au principal ne porte pas sur l’aide que Schleswag, en application des articles 2 et 3 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, apporte prétendument aux producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables, mais sur la partie de cette prétendue aide que PreussenElektra a dû rembourser à Schleswag en vertu de l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié.

44 Ces obligations à la charge de Schleswag et de PreussenElektra découlant directement du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, le litige qui oppose la demanderesse et la défenderesse au principal ne saurait être considéré comme constituant une construction procédurale arrangée par les parties au principal en vue d’amener la Cour à prendre position sur certains problèmes de droit communautaire qui ne répondent pas à un besoin objectif inhérent à la solution du litige.

45 Cette conclusion est corroborée par le fait que la juridiction de renvoi a admis l’intervention dans le litige au principal, à l’appui des conclusions de Schleswag, de Windpark et du Land Schleswig-Holstein, qui soutiennent la légalité des articles 2 et 3 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié.

46 Dans ces conditions, le fait que PreussenElektra est l’actionnaire principal de Schleswag n’est pas de nature à priver le litige qui les oppose de son caractère réel.

47 En dernier lieu, il convient de constater que, dans son ordonnance de renvoi, le Landgericht a suffisamment défini le cadre réglementaire national et a clairement expliqué les raisons pour lesquelles il considère que les questions qu’il pose sont pertinentes et qu’une réponse à ces questions est nécessaire à la solution du litige.

48 S’agissant, d’une part, des questions relatives aux articles 92 et 93 du traité, la juridiction de renvoi a indiqué, en particulier, ainsi qu’il résulte du point 25 du présent arrêt, que la question de savoir si le Stromeinspeisungsgesetz, modifié, constitue une aide est préalable à celle de savoir si les modifications que la loi de 1998 a apportées à la version initiale du Stromeinspeisungsgesetz constituent une modification d’aide, au sens de l’article 93, paragraphe 3, du traité, nécessitant l’application de la procédure prévue à cette disposition en vue de l’adoption de ladite modification.

49 La juridiction de renvoi a également expliqué que, si la procédure de contrôle préalable n’a, à tort, pas été respectée, il lui appartiendra de tirer, conformément à son droit national, les conséquences de l’effet direct de l’article 93, paragraphe 3, troisième phrase, du traité, en décidant que le régime remanié du Stromeinspeisungsgesetz est inapplicable et que les paiements effectués par PreussenElektra à Schleswag doivent être restitués.

50 Ainsi que le reconnaissent elles-mêmes les parties intervenantes au principal, l’argument tiré de ce que la Cour ne serait compétente pour interpréter la notion d’aide au sens de l’article 92 du traité que lorsque la procédure de contrôle préalable prévue à l’article 93, paragraphe 3, n’a pas été respectée nécessite une interprétation du critère de la modification d’aide ou de la portée de l’effet suspensif de la troisième phrase de cette dernière disposition, interprétation qui constitue l’objet même de certaines des questions posées.

51 Il en va de même de l’argument du gouvernement allemand tiré de ce qu’une réponse aux questions relatives à l’article 92 du traité ne serait pas nécessaire dans la mesure où, dans le litige au principal, seul l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, régirait les relations entre PreussenElektra et Schleswag. En effet, les questions relatives à l’article 92 du traité portent précisément sur le point de savoir si l’article 4 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, constitue, à lui seul ou en combinaison avec les articles 2 et 3, un régime d’aides au sens de cette disposition.

52 S’agissant, d’autre part, de la question relative à l’article 30 du traité, il suffit de relever qu’il n’apparaît pas de manière manifeste que l’interprétation sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal.

53 Il résulte des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de répondre aux questions posées.

Sur l’interprétation de l’article 92 du traité

54 À titre liminaire, il y a lieu de constater, d’une part, qu’il n’est pas contesté qu’une obligation d’achat, à des prix minimaux, de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables, telle que celle prévue aux articles 2 et 3 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, apporte un avantage économique certain aux producteurs de ce type d’électricité, en ce qu’elle leur garantit, sans aucun risque, des gains supérieurs à ceux qu’ils réaliseraient en son absence.

55 Il convient de relever, d’autre part, qu’il ressort de la réponse donnée par le gouvernement allemand à une question écrite de la Cour que c’est seulement dans deux des huit principales entreprises allemandes qui produisent de l’électricité et exploitent des réseaux de transport à haute tension, au nombre desquelles figure PreussenElektra, que la participation des pouvoirs publics est majoritaire. Il résulte en outre de cette réponse que PreussenElektra est une filiale à 100 % d’une autre société détenue à 100 % par des intérêts privés. Par ailleurs, ainsi qu’il résulte du point 19 du présent arrêt, Schleswag est détenue à 65,3 % par PreussenElektra et seulement à 34,7 % par certaines autorités communales du Land Schleswig-Holstein.

56 Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de comprendre la première question préjudicielle comme visant, en substance, à savoir si une réglementation d’un État membre qui, d’une part, oblige des entreprises privées d’approvisionnement en électricité à acheter l’électricité produite dans leur zone d’approvisionnement à partir de sources d’énergie renouvelables à des prix minimaux supérieurs à la valeur économique réelle de ce type d’électricité et, d’autre part, répartit la charge financière résultant de cette obligation entre lesdites entreprises d’approvisionnement en électricité et les exploitants privés des réseaux d’électricité situés en amont constitue une aide d’État au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

57 À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’article 92, paragraphe 1, du traité déclare incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.

58 Or, il résulte de la jurisprudence de la Cour que seuls les avantages accordés directement ou indirectement au moyen de ressources d’État sont considérés comme des aides au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité. En effet, la distinction établie dans cette disposition entre les «aides accordées par les États» et les aides accordées «au moyen de ressources d’État» ne signifie pas que tous les avantages consentis par un État constituent des aides, qu’ils soient ou non financés au moyen de ressources étatiques, mais vise seulement à inclure dans cette notion les avantages qui sont accordés directement par l’État ainsi que ceux qui le sont par l’intermédiaire d’un organisme public ou privé, désigné ou institué par cet État (voir arrêts du 24 janvier 1978, Van Tiggele, 82/77, Rec. p. 25, points 24 et 25; Sloman Neptun, précité, point 19; du 30 novembre 1993, Kirsammer-Hack, C-189/91, Rec. p. I-6185, point 16; du 7 mai 1998, Viscido e.a., C-52/97 à C-54/97, Rec. p. I-2629, point 13; du 1er décembre 1998, Ecotrade, C-200/97, Rec. p. I-7907, point 35, et du 17 juin 1999, Piaggio, C-295/97, Rec. p. I-3735, point 35).

59 En l’espèce, il y a lieu de constater que l’obligation, faite à des entreprises privées d’approvisionnement en électricité, d’acheter à des prix minimaux fixés l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables n’entraîne aucun transfert direct ou indirect de ressources d’État aux entreprises productrices de ce type d’électricité.

60 Partant, la répartition de la charge financière découlant pour ces entreprises privées d’approvisionnement en électricité de ladite obligation d’achat entre celles-ci et d’autres entreprises privées ne saurait non plus constituer un transfert direct ou indirect de ressources d’État.

61 Dans ces conditions, le fait que l’obligation d’achat est imposée par la loi et confère un avantage incontestable à certaines entreprises n’est pas de nature à lui conférer le caractère d’une aide d’État au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

62 Cette conclusion ne saurait être infirmée par la circonstance, relevée par la juridiction de renvoi, que la charge financière découlant de l’obligation d’achat à des prix minimaux est susceptible de se répercuter de façon négative sur les résultats économiques des entreprises assujetties à cette obligation et d’entraîner, en conséquence, une diminution des recettes fiscales de l’État. En effet, cette conséquence est inhérente à une telle réglementation et ne saurait être considérée comme constituant un moyen d’accorder aux producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables un avantage déterminé à la charge de l’État (voir, en ce sens, arrêts précités Sloman Neptun, point 21, et Ecotrade, point 36).

63 À titre subsidiaire, la Commission soutient que la préservation de l’effet utile des articles 92 et 93 du traité, lus en combinaison avec l’article 5 du traité CE (devenu article 10 CE), exige que la notion d’aide d’État soit interprétée de façon à s’étendre également à des mesures de soutien qui, telles celles prévues par le Stromeinspeisungsgesetz, modifié, sont décidées par l’État mais financées par des entreprises privées. Elle fonde son analyse, par analogie, sur la jurisprudence de la Cour selon laquelle l’article 85 du traité CE (devenu article 81 CE), lu en combinaison avec l’article 5 du même traité, interdit aux États membres d’adopter des mesures, même sous la forme de lois ou de règlements, susceptibles d’éliminer l’effet utile des règles de concurrence applicables aux entreprises (voir, notamment, arrêt du 17 novembre 1993, Meng, C-2/91, Rec. p. I-5751, point 14).

64 À cet égard, il suffit de souligner que, contrairement à l’article 85 du traité, qui concerne uniquement le comportement des entreprises, l’article 92 du traité vise directement des mesures émanant des États membres.

65 Dans ces conditions, l’article 92 du traité se suffit à lui-même pour interdire les comportements étatiques qu’il vise et l’article 5 du traité, qui, en son second alinéa, prévoit que les États membres s’abstiennent de toutes mesures susceptibles de mettre en péril la réalisation des buts du traité, ne saurait servir à étendre le champ d’application dudit article 92 à des comportements étatiques qui n’en relèvent pas.

66 Il convient, dès lors, de répondre à la première question préjudicielle qu’une réglementation d’un État membre qui, d’une part, oblige des entreprises privées d’approvisionnement en électricité à acheter l’électricité produite dans leur zone d’approvisionnement à partir de sources d’énergie renouvelables à des prix minimaux supérieurs à la valeur économique réelle de ce type d’électricité et, d’autre part, répartit la charge financière résultant de cette obligation entre lesdites entreprises d’approvisionnement en électricité et les exploitants privés des réseaux d’électricité situés en amont ne constitue pas une aide d’État au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

67 Eu égard à cette réponse, il n’y a pas lieu de répondre à la deuxième question préjudicielle, qui n’a été posée que dans la mesure où l’obligation d’achat à des prix minimaux fixés constituerait une aide d’État, alors que la répartition de la charge financière en découlant n’en serait pas une.

Sur l’interprétation de l’article 30 du traité

68 Par sa troisième question préjudicielle, la juridiction de renvoi vise en substance à savoir si ladite réglementation est ou non incompatible avec l’article 30 du traité.

69 À cet égard, il y a lieu de rappeler, en premier lieu, que, conformément à la jurisprudence de la Cour, l’article 30 du traité, en interdisant entre les États membres les mesures d’effet équivalant à des restrictions quantitatives à l’importation, vise toute mesure nationale susceptible d’entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement le commerce intracommunautaire (arrêt du 11 juillet 1974, Dassonville, 8/74, Rec. p. 837, point 5).

70 Il convient de relever, en second lieu, qu’il résulte également de la jurisprudence de la Cour que l’obligation faite à des opérateurs économiques d’un État membre de s’approvisionner en un produit déterminé, à concurrence d’un certain pourcentage, auprès d’un fournisseur national limite d’autant les possibilités d’importation de ce même produit en empêchant ces opérateurs de s’approvisionner pour une partie de leurs besoins auprès d’opérateurs situés dans d’autres États membres (voir, en ce sens, arrêts du 10 juillet 1984, Campus Oil e.a., 72/83, Rec. p. 2727, point 16, et du 20 mars 1990, Du Pont de Nemours Italiana, C-21/88, Rec. p. I-889, point 11).

71 Or, il ressort expressément des articles 1er et 2 du Stromeinspeisungsgesetz, modifié, que l’obligation d’achat imposée aux entreprises d’approvisionnement en électricité ne vaut que pour l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables dans le domaine de validité de cette loi et dans la zone d’approvisionnement respective de chaque entreprise concernée et est susceptible de ce fait d’entraver au moins potentiellement le commerce intracommunautaire.

72 Toutefois, pour apprécier si une telle obligation d’achat est néanmoins compatible avec l’article 30 du traité, il convient de tenir compte, d’une part, de l’objectif de la réglementation en cause et, d’autre part, des particularités du marché de l’électricité.

73 À cet égard, il y a lieu de relever que l’utilisation de sources d’énergie renouvelables pour la production d’électricité, que vise à promouvoir une réglementation tel le Stromeinspeisungsgesetz, modifié, est utile à la protection de l’environnement dans la mesure où elle contribue à la réduction des émissions de gaz à effet de serre qui figurent parmi les principales causes des changements climatiques que la Communauté européenne et ses États membres se sont engagés à combattre.

74 À ce titre, le développement de cette utilisation figure parmi les objectifs prioritaires que la Communauté et ses États membres entendent poursuivre en vue de la mise en oeuvre des obligations qu’ils ont contractées en vertu de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, approuvée au nom de la Communauté par la décision 94/69/CE du Conseil, du 15 décembre 1993 (JO 1994, L 33, p. 11), ainsi que du protocole de la troisième conférence des parties à cette convention, fait à Kyoto le 11 décembre 1997, signé par la Communauté européenne et ses États membres le 29 avril 1998 [voir, à cet égard, notamment, la résolution 98/C 198/01 du Conseil, du 8 juin 1998, sur les sources d’énergie renouvelables (JO C 198, p. 1), et la décision n° 646/2000/CE du Parlement européen et du Conseil, du 28 février 2000, arrêtant un programme pluriannuel pour la promotion des sources d’énergie renouvelables dans la Communauté (Altener) (1998/2002) (JO L 79, p. 1)].

75 Il y a lieu d’observer que cette politique vise également la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ainsi que la préservation des végétaux.

76 En outre, ainsi qu’il ressort de la troisième phrase de l’article 130 R, paragraphe 2, premier alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 174, paragraphe 2, premier alinéa, CE), les exigences en matière de protection de l’environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en oeuvre des autres politiques de la Communauté. Le traité d’Amsterdam a transféré cette disposition, dans une forme légèrement modifée, à l’article 6 CE, qui figure dans sa première partie intitulée «Les principes».

77 Il résulte d’ailleurs expressément du vingt-huitième considérant de la directive 96/92 que c’est «pour des raisons de protection de l’environnement» que celle-ci, en ses articles 8, paragraphe 3, et 11, paragraphe 3, autorise les États membres à donner la priorité à la production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables.

78 Il importe également de relever que cette directive, ainsi qu’il ressort de son trente-neuvième considérant, ne constitue qu’une nouvelle phase de la libéralisation du marché de l’électricité et laisse subsister des entraves aux échanges d’électricité entre États membres.

79 Il convient de constater en outre que la nature de l’électricité est telle que, une fois admise dans le réseau de transport ou de distribution, il est difficile d’en déterminer l’origine et notamment la source d’énergie à partir de laquelle elle a été produite.

80 À cet égard, la Commission a estimé, dans sa proposition de directive 2000/C 311 E/22 du Parlement européen et du Conseil relative à la promotion de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables sur le marché intérieur de l’électricité (JO 2000, C 311 E, p. 320), présentée le 31 mai 2000, que la mise en oeuvre, dans chaque État membre, d’un système de certificats d’origine de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables, susceptibles de faire l’objet d’une reconnaissance mutuelle, est indispensable afin de rendre les échanges de ce type d’électricité à la fois fiables et possibles en pratique.

81 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la troisième question préjudicielle que, en l’état actuel du droit communautaire relatif au marché de l’électricité, une réglementation telle que le Stromeinspeisungsgesetz, modifié, n’est pas incompatible avec l’article 30 du traité.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

82 Les frais exposés par les gouvernements allemand et finlandais, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement. La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR,

statuant sur les questions à elle soumises par le Landgericht Kiel, par ordonnance du 13 octobre 1998, dit pour droit:

1) Une réglementation d’un État membre qui, d’une part, oblige des entreprises privées d’approvisionnement en électricité à acheter l’électricité produite dans leur zone d’approvisionnement à partir de sources d’énergie renouvelables à des prix minimaux supérieurs à la valeur économique réelle de ce type d’électricité et, d’autre part, répartit la charge financière résultant de cette obligation entre lesdites entreprises d’approvisionnement en électricité et les exploitants privés des réseaux d’électricité situés en amont ne constitue pas une aide d’État au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité CE (devenu, après modification, article 87, paragraphe 1, CE).

2) En l’état actuel du droit communautaire relatif au marché de l’électricité, une telle réglementation n’est pas incompatible avec l’article 30 du traité CE (devenu, après modification, article 28 CE).

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CJCE, n° C-379/98, Arrêt de la Cour, PreussenElektra AG contre Schleswag AG, en présence de Windpark Reußenköge III GmbH et Land Schleswig-Holstein, 13 mars 2001