Juge aux affaires familiales de Paris, 15 juin 2020, n° 16/33207

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Sur la décision

Référence :
JAF Paris, 15 juin 2020, n° 16/33207
Numéro(s) : 16/33207

Texte intégral

TRIBUNAL

JUDICIAIRE

DE PARIS

P O L E F A M I L L E

A F F A I R E S F A M I L I A L E S

JAF section 1 cab 4 JUGEMENT rendu le 15 Juin 2020 Affaire : BLUM IN / Z D’A 20ème Chambre civile N° RG 16/33207 – N° Portalis 352J-W -B7A-CHDJY

N° M INUT E :

DEMANDEUR :

Madame B X […]

Représentée par Me Anne-Sophie REMY-MESSECA, Avocat, #C1166

DÉFENDEUR :

Monsieur H Z D’A CHEZ MADAME […]

Représenté par Me Jean-Bernard LUNEL, Avocat, #A0924

JUGE AUX AFFAIRES FAMILIALES :

C D

GREFFIER :

E F

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DÉBATS :A l’audience tenue le 02 Mars 2020 en chambre du conseil,

JUGEMENT : Prononcé par mise à disposition au greffe, Contradictoire , susceptible d’appel

EXPOSE DU LITIGE

De l’union entre Monsieur H Z D’A et Madame B X sont issus deux enfants:

- Y née le […] à […],

- Adrien, né le […] à […].

Par jugement en date du 24 mars 2011, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Paris a organisé les modalités d’exercice de l’autorité parentale compte tenu de la séparation du couple.

Par acte d’huissier en date du 14 janvier 2016, Madame B X a assigné Monsieur Z D’A en partage devant le tribunal de grande instance de Paris.

L’assignation a été distribuée au juge aux affaires familiales.

Par ordonnance du 6 février 2017, le juge aux affaires familiales statuant en qualité de juge de la mise en état a rejeté l’exception d’incompétence soulevée par le défendeur au profit du tribunal de grande instance.

Vu l’article 455 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions de Madame X signifiées le 21 octobre 2019 par lesquelles elle demande au juge aux affaires familiales de :

"Vu les articles précités et notamment les articles 2224 et 2241, Vu les arrêts rendus par la Cour de cassation, et notamment : Cass. Civ. 24 septembre 2008 Cass. Civ. 23 janvier 2014, n° 12-27180,

- dire et juger recevable et bien fondée en l’ensemble de ses demandes Madame X, Y faisant droit :

- dire et juger que les demandes reconventionnelles de Monsieur Z D’A dirigées à l’encontre de Madame X sont irrecevables et infondées ;

- En conséquence, débouter Monsieur Z D’A de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de Madame X ;

- le condamner à restituer les biens meubles suivants appartenant à Madame X, aux frais de Monsieur Z D’A :

* deux statues Tao Tao d’Indonésie;

* un tableau de Pont-Aven;

* le piano de leur fille Y.

- condamner Monsieur Z D’A à rembourser à Madame X le montant du prêt qu’elle a entièrement pris en charge, soit la somme de 66 546,70 €, ainsi que les intérêts au taux légal dus sur cette somme depuis la date de séparation du couple le 15 mars 2011;

- condamner Monsieur Z D’A à verser en sus à Madame X le montant correspondant à la plus-value généré par son investissement dans l’appartement, soit à due concurrence des 66 546 € financés par elle et qui ont permis de participer à la valorisation actuelle dudit appartement, compte tenu du prix 18auquel il a été vendu en 2017 soit, à défaut d’avoir eu communication de l’acte de vente, si l’on

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prend un prix de vente de 2,9 M€, une plus-value égale à 189.000 €, à parfaire ;

- condamner Monsieur Z D’A à payer la somme de 3 000 € à Madame X au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Monsieur Z D’A aux entiers dépens".

Vu les dernières conclusions de Monsieur Z d’A signifiées le 15 novembre 2019 et par lesquelles il demande au juge aux affaires familiales de :

"Vu les articles 9, 32 et 122 du code de procédure civile, Vu les articles 2224, 2231, 2241 et 2243du code civil,

- dire et juger Monsieur Z d’A recevable et fondé en ses présentes écritures, A titre principal :

- dire et juger que les demandes de Madame X aux fins de remboursement de prêt et de paiement d’une plus-value, dirigées à l’encontre de Monsieur Z d’A, sont irrecevables, Dans l’hypothèse ou la juridiction estimerait Madame X recevable à agir à l’encontre de Monsieur Z d’A :

- dire et juger que l’ensemble des demandes de Madame X sont prescrites,

- dire et juger en conséquence Madame B X irrecevable en toutes ses demandes,

- dire et juger en tout état de cause la demande en paiement de Madame X au titre du montant d’une plus-value généré par son investissement dans l’appartement, irrecevable comme prescrite ; A titre subsidiaire, sur le fond : Sur les demandes de Madame X aux fins de restitution d’objets mobiliers :

- donner acte à Monsieur Z d’A de son accord pour restituer à Madame X le tableau et le piano à charge pour celle-ci de supporter l’intégralité des frais de déménagement du piano,

- donner acte à Monsieur Z d’A de son accord pour restituer les deux statues Tao Tao à Madame B X dans les huit jours du remboursement par celle-ci de l’intégralité des frais de dédouanement, soit la somme de 900 € ; Sur les demandes de Madame X aux fins de remboursement de prêt et de paiement d’une plus-value :

- débouter Madame X de sa demande aux fins de remboursement par Monsieur Z d’A de la somme de 66 546,70 € avec intérêts légaux,

- débouter Madame X de sa demande de versement correspondant au montant d’une plus-value, Subsidiairement, dans l’hypothèse où la juridiction de céans estimerait que le remboursement du prêt par Madame X a excédé sa participation normale aux dépenses de la famille :

- condamner Madame X à rembourser à Monsieur Z d’A la somme de 5 556,50 € au titre de la taxe d’habitation,

- condamner Madame X à payer à Monsieur Z d’A à titre d’indemnité d’occupation la somme de 210 000 € ; En tout état de cause :

- condamner Madame X à verser à Monsieur Z d’A une indemnité de 4 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

- condamner Madame X aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Jean-Bernard LUNEL, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile".

La clôture de l’affaire a été ordonnée le 16 décembre 2019.

«En application de l’ordonnance du 16 mars 2020 actionnant le plan de continuation d’activité du tribunal judiciaire de Paris, le prononcé de la présente décision initialement fixé au 18 mai 2020 a été renvoyé à une date ultérieure, fixée au 15 juin 2020, par mise à disposition au greffe après avis donné aux parties à l’issue des débats dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile. »

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MOTIFS DE LA DÉCISION

SUR LA RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE PRINCIPALE

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de droit d’agir contre le défendeur
Monsieur Z d’A conclut à l’irrecevabilité de la demande de Madame X dirigée à son encontre en remboursement de sa créance tirée des travaux qu’elle prétend avoir financé dans l’ancien logement de la famille, au motif que ce bien ne lui appartenait pas en propre mais était la propriété d’une SCI dans laquelle il détenait au départ la totalité des 3000 parts sociales avant d’en céder 50 à chacun des deux enfants. La demande ne serait donc pas dirigée à l’encontre du propriétaire du bien et serait ainsi irrecevable sur le fondement des articles 32 et 122 du code de procédure civile.

En réponse, Madame X fait valoir que lorsqu’elle a financé les travaux litigieux par un prêt, Monsieur Z d’A était le seul propriétaire du bien immobilier constituant le logement de la famille, la SCI n’ayant été créée qu’en 2007, de sorte qu’elle détient bien une créance sur Monsieur Z d’A et non sur la SCI Z.

Sur ce,

Il ressort de l’article 32 du code de procédure civile qu’est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.

Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité.

En l’espèce, Madame X sollicite la fixation d’une créance à son profit sur Monsieur Z d’A au titre d’un crédit travaux financé sur ses deniers personnels sur le bien de son ancien concubin et au titre de la plus-value générée par cet investissement lors de la vente du bien. Monsieur Z d’A se prévaut de son absence de qualité de propriétaire du bien immobilier objet des demandes en paiement introduites par Madame X, et par conséquent selon lui, l’action aurait dû être dirigée à l’encontre la SCI Z et non à son encontre.

Il ressort des pièces versées aux débats que les statuts constitutifs de la SCI Z ont été déposés au greffe le 21 avril 1964. La date du 5 janvier 2007 à laquelle Madame X fait référence et apparaissant sur infogreffe correspond en réalité à la mise à jour des statuts par suite de l’entrée de deux nouveaux associés dans la SCI, à savoir les enfants communs du couple, impliquant la rédaction de statuts modifiés produits par le défendeur et leurs enregistrements sur infogreffe. S’il convient de relever que Monsieur Z d’A ne produit pas au tribunal de documents relatifs à la propriété du logement de la famille litigieux, il apparaît néanmoins que les avis de la taxe foncière des années 2000 à 2010 relatifs au bien immobilier situé […] sont adressés par l’administration fiscale à la SCI Z avec la mention propriétaire et non à Monsieur Z d’A. Si Monsieur Z d’A est effectivement l’associé principal de la SCI et le gérant majoritaire, il n’en demeure pas moins que l’action en paiement de Madame X doit être dirigée à l’endroit de la SCI, dotée de la personnalité juridique.

En conséquence, l’action en fixation de créance dirigée à l’encontre de Monsieur Z d’A sera déclarée irrecevable.

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Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande en restitution de meubles :
Monsieur Z d’A soutient que l’action en restitution de biens meubles introduites par Madame X est prescrite, faute de démontrer une cause d’interruption de la prescription quinquennale.

Aux termes de l’article 2224 du code civil, les actions mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

L’article 2241 du code civil dispose que l’action en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Il en est de même lorsqu’elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l’acte de saisine de la juridiction est annulé par l’effet d’un vice de procédure.

Toutefois, l’article 2243 du code civil précise que l’interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l’instance ou si sa demande est définitivement rejetée.

En l’espèce, le point de départ de la prescription doit être considéré comme étant la date de séparation du couple. Madame X indique dans ses écritures que le couple s’est séparé en mars 2011 alors que Monsieur Z d’A a saisi le juge aux affaires familiales par requête en date du 14 octobre 2010 aux fins de voir organiser les conséquences de la séparation du couple, de sorte que le point de départ de la prescription doit être fixé au 14 octobre 2010, laquelle constitue une date certaine.

Au regard de cette date, l’action de Madame X est prescrite au 15 octobre 2015, sauf cause interruptive de la prescription.

Si le dépôt de conclusions par Madame X le 20 décembre 2010 sollicitant la liquidation des intérêts patrimoniaux des concubins constitue une cause d’interruption du délai de prescription de l’action en restitution de meubles dans le cadre de la séparation de concubins, s’agissant d’une demande de partage relative à la situation patrimoniale globale des concubins, qu’il s’agisse de biens personnels, indivis ou de fixation de créance, encore faut-il que Madame X ne se soit pas désistée de cette demande. Or, il ressort du jugement du juge aux affaires familiales en date du 24 mars 2011 que Madame X s’est désistée à l’audience de cette demande. Par conséquent, cette demande en justice ne peut être une cause interruptive de la prescription.

En revanche, par conclusions en date du 30 juin 2015, Madame X a expressément présenté une demande de partage de l’indivision qu’il convient de considérer comme le partage des intérêts patrimoniaux des concubins, de sorte qu’elle a effectivement interrompu le délai de prescription.

Son action est donc recevable sur ce point.

SUR LA DEMANDE EN RESTITUTION DES MEUBLES
Madame X sollicite la condamnation du défendeur à lui restituer à ses frais les biens meubles suivants :

- deux statues Tao Tao d’Indonésie;

- un tableau de Pont-Aven;

- le piano de leur fille Y.

Monsieur Z d’A exprime dans ses écritures son accord pour restituer à Madame X le tableau et le piano à charge pour celle-ci de supporter l’intégralité des frais de déménagement du piano.

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Il sollicite également qu’il lui soit donner acte de son accord pour restituer les deux statues Tao Tao à Madame B X dans les huit jours du remboursement par celle-ci de l’intégralité des frais de dédouanement, soit la somme de 900 €.

Il convient d’ordonner à Monsieur Z d’A de restituer les biens ci-dessus listés, à charge pour la demanderesse de supporter les frais de déménagement du piano. Concernant les statues, il ressort effectivement d’un message écrit par Madame X et adressé à Monsieur Z d’A qu’elle s’est engagée expressément à rembourser la somme de 900 €, de sorte que Monsieur Z d’A justifie d’une créance de cette somme sur la demanderesse.

Il convient par conséquent d’ordonner à Monsieur Z d’A de restituer les statues immédiatement après réception du paiement par Madame X de ladite somme de 900 € qu’elle sera condamnée à lui payer.

SUR LES AUTRES DEMANDES

Les dépens seront partagés par moitié entre les parties.

Madame X, dont les demandes sont partiellement déclarées irrecevables, sera condamnée à verser à Monsieur Z d’A la somme de 1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge aux affaires familiales, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

Reçoit la fin de non-recevoir soulevée par Monsieur Z d’A avant toute défense au fond concernant la demande en paiement ;

En conséquence, déclare la demande de Madame X en remboursement de prêt et en fixation d’une plus-value irrecevable ;

Déclare recevable l’action en restitution de meubles introduites par Madame X;

Condamne Monsieur Z d’A à restituer dès signification de la présente décision à Madame X le tableau de Pont-Aven et le piano, les frais de déménagements du piano étant mis à la charge de Madame X ;

Condamne Madame X à payer à Monsieur Z d’A la somme de 900 € au titre des frais de dédouanement des deux statues Tao Tao d’Indonésie ;

Ordonne à Monsieur Z d’A de restituer immédiatement à réception de la somme précitée de 900 € les deux statues Tao Tao d’Indonésie ;

Condamne Madame X à verser à Monsieur Z d’A la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Dit que les dépens seront pris en charge par les parties chacun par moitié.

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Jugement prononcé par mise à disposition au greffe du juge aux affaires familiales, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par C D, exerçant les fonctions de juge aux affaires familiales et par E F, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Fait à Paris le 15 Juin 2020

E F C D Greffier Vice-Présidente

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Textes cités dans la décision

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  2. Code civil
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