Tribunal de grande instance de Paris, 1re chambre nationalité, 17 avril 2015, n° 13/17333

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 1re ch. nationalité, 17 avr. 2015, n° 13/17333
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 13/17333

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

1/2/2 nationalité B

N° RG : 13/17333

N° PARQUET : 14/157

N° MINUTE :

Assignation du :

31 Octobre 2013

Extranéité

J.D.

(footnote: 1)

JUGEMENT

rendu le 17 Avril 2015

DEMANDEUR

Monsieur X, Y Z

B.P 1254

[…]

représenté par Me Saint-Cyr GOBA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1328

DEFENDEUR

LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE

[…]

[…]

[…]

Madame Brigitte FRANCESCHINI, Premier Vice-Procureur

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Mme Jeanne DREVET, Vice-Présidente

Mme Sonia LION, Vice-Présidente

Mme Christelle HILPERT, Vice-Présidente

assistées de Mme Anne-Charlotte COS, Greffier

DEBATS

A l’audience du 13 Mars 2015 tenue en audience publique

JUGEMENT

Contradictoire

en premier ressort

Rendu publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Jeanne DREVET, Président, et par Anne-Charlotte COS, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l’assignation du 31 octobre 2013 que Monsieur X Y Z, né le […] à […]), a fait délivrer au procureur de la République près ce tribunal, aux termes desquelles il demande au tribunal, au visa des articles 18 et 29-3 du code civil, de constater qu’il est de nationalité française, comme né d’un père français, Monsieur A Z, lequel a souscrit une déclaration de nationalité française le 27 janvier 1986, enregistrée le 3 décembre suivant et de lui délivrer un certificat de nationalité française ;

Vu le récépissé justifiant de l’accomplissement de la formalité prévue par l’article 1043 du code de procédure civile a été délivré le 12 décembre 2013 ;

Vu les dernières écritures du ministère public notifiées par voie électronique le 11 juin 2014, aux termes desquelles il conclut à l’extranéité du demandeur, aux motifs que :

— la situation du demandeur ne relève pas des dispositions de l’article 18 du code civil, d’abord parce qu’il est né en 1971, ensuite, parce qu’à supposer que la déclaration de nationalité française alléguée a bien été souscrite, son présumé père n’était pas français en 1971 ;

— le bénéfice de l’effet collectif attaché à la déclaration de nationalité française de Monsieur A Z suppose que la filiation du demandeur à l’égard de ce dernier soit établie, au regard de la loi de la mère, qui n’est pas déterminable, l’acte de naissance de l’intéressée, Madame B C étant dépourvue de force probante,

— même à retenir la loi ivoirienne, la filiation paternelle du demandeur n’est pas établie ; en effet, l’acte de naissance du demandeur, mentionnant que la naissance a été déclarée par le père présente diverses anomalies ; deux levées de cet acte ont été effectuées, dont la première a révélé qu’initialement, l’acte de naissance du demandeur n’avait pas été signé par le prétendu père, alors que la seconde a montré que l’acte avait été signé, par la suite, par Monsieur A Z ; entre les deux vérifications, d’autres mentions de l’acte ont aussi été modifiées, sans respect de la procédure prévue par la loi ivoirienne ; ainsi l’acte est non seulement irrégulier mais son contenu est mensonger,

— plusieurs éléments extérieurs confirment que l’acte n’est pas conforme à la réalité : la carte nationale d’identité ivoirienne du demandeur, le disant né le […] (au lieu du 18 septembre), le nombre d’enfants dont Monsieur A Z serait le père (24 nés de 20 mères différentes), dont les actes de naissance présentent tous des irrégularités ; l’acte d’individualité produit par le demandeur n’est pas seulement dépourvu de toute valeur juridique ; sa présentation et son contenu démontrent qu’il n’est pas authentique (notamment deux greffiers différents),

— dès lors que le présumé père n’a pas signé l’acte de naissance, en l’absence de reconnaissance par le père ou du mariage de ses parents, la filiation paternelle du demandeur n’est pas établie;

— la signature, par le père, de l’acte de naissance plus de 30 ans après la naissance ne régularise pas le vice substantiel dont il est affecté ; de surcroît, cette signature est intervenue après la souscription de la déclaration de nationalité française du présumé père, alors que le demandeur était majeur ; en conséquence, même à supposer que cette signature tardive établisse sa filiation paternelle, elle serait sans effet en matière de nationalité ;

Vu l’ordonnance de clôture en date du 12 décembre 2014 ;

Vu les articles 455 et 753 du code de procédure civile en application desquels il est expressément fait référence aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des faits, du déroulement de la procédure, des prétentions et moyens des parties ;

SUR CE :

En application de l’article 30 du code civil, le demandeur, auquel la délivrance d’un certificat de nationalité française a été refusée par décision du service de la nationalité des Français nés et établis hors de France en date du 5 septembre 2002 (confirmée sur recours gracieux le 24 novembre 2006), doit rapporter la preuve que les conditions requises par la loi pour l’établissement de sa nationalité française sont remplies.

A cet égard, il convient de rappeler que les dispositions du code civil relatives à la nationalité française distinguent selon les hypothèses énumérées par l’article 17, entre l’attribution et l’acquisition de cette nationalité ; ainsi, Monsieur X Y Z, qui n’est pas né d’un père français à sa naissance, puisqu’il se prévaut de la déclaration de nationalité française souscrite par Monsieur A Z le 27 janvier 1986, ne relève pas, comme il le soutient à tort, de l’article 18 du code civil, inséré dans le chapitre II relatif à la nationalité française d’origine, mais de l’article 84 du code de la nationalité française ; ce dernier texte, dans sa rédaction issue de la loi n°73-42 du 9 janvier 1973, ici applicable, dispose que “L’enfant mineur de dix-huit ans, légitime ou naturel, ou ayant fait l’objet d’une adoption plénière, dont l’un des parents acquiert la nationalité française, devient français de plein droit..”

Dès lors, il incombe au demandeur de justifier, outre de l’acquisition, par son père, de la nationalité française, d’un lien de filiation légalement établi à l’égard de ce dernier, ce, au moyen d’actes d’état civil probants au sens de l’article 47 du Code civil, étant précisé qu’afin de satisfaire aux exigences des articles 20-1 et 311-14 de ce code, cet établissement est régi par la loi personnelle de sa mère lors de la naissance et doit être intervenu pendant sa minorité pour avoir des effets sur sa nationalité.

Mais il convient également de rappeler que nul ne peut se voir attribuer la nationalité française, sur quelque fondement que ce soit, s’il ne justifie pas de façon certaine de son état civil, par la production d’un acte de naissance répondant aux exigences du texte précité, lequel est en principe un acte unique, conservé dans le registre des actes de naissance, de sorte que les copies de cet acte doivent toujours avoir les mêmes références et le même contenu.

Au soutien de sa demande, Monsieur X Y Z, produit une copie intégrale de son acte de naissance n° 01253, mentionnant qu’il a été dressé le 20 septembre 1971, sur la déclaration du père et qu’il est né le […] à […]), de A X Z, né en 1950 à Atram, sous-préfecture de Bondoukou (Côte d’Ivoire) et de B C, née en 1900, cette date se trouvant rectifiée par mention marginale, suivant ordonnance N° 59 du 13/02/2002 de la Justice d’Agboville, en ce sens que la date de naissance de la mère est le quinze août 1952.

L’acte produit au soutien de la demande de délivrance d’un certificat de nationalité française, délivré le 29 octobre 2001 (pièce n° 6 du ministère public), comportant la même erreur quant à la date de naissance de la mère, mais sans la mention rectificative intervenue postérieurement, une levée d’acte a été sollicitée.

Le ministère public produit une copie de la souche de cet acte de naissance (pièce n° 7) obtenue dans le cadre de cette vérification, dont il résulte, outre que la date de naissance de la mère qui y figure est bien 1900 (ce qui exclut l’hypothèse d’une erreur de retranscription dans la copie), mais également que le déclarant n’a pas signé l’acte de naissance ; ainsi, le contenu de l’acte de naissance mentionnant le contraire “nous avons signé avec le déclarant”, n’apparaît pas conforme à la réalité ; de surcroît, cet acte n’a pas été régulièrement établi, au regard du droit ivoirien, l’article 44 de la loi n° 64-374 du 7 octobre 1964, relative à l’état civil, disposant que l’acte de naissance, rédigé immédiatement, lors de la déclaration de naissance, est signé du déclarant et de l’officier ou de l’agent de l’état civil ; dès lors, l’authenticité de son contenu, notamment quant à l’auteur de la déclaration (dont peut résulter la filiation de l’enfant), s’avère ainsi sérieusement mise en cause.

On ajoutera que le ministère public produit, en pièce n° 9, un autre exemplaire de l’acte de naissance de X Y Z, produit par celui-ci au soutien de son recours gracieux, comportant plusieurs différences avec celui produit initialement, notamment sur la mention essentielle qu’est la date de naissance, puisqu’il est dit né le […], ainsi qu’une nouvelle copie de la souche de l’acte obtenue dans le cadre d’une seconde vérification ; or, il apparaît que la souche a subi plusieurs modifications entre les deux vérifications, dont certaines par des ratures très visibles sur la photocopie versée aux débats (pièce 10 du ministère public); mais en outre, la souche porte désormais une signature du déclarant, laquelle, intervenue plus de 30 ans après la date présumée de l’établissement de l’acte, ne régularise pas valablement le vice substantiel l’affectant.

Enfin, le ministère public rappelle à bon droit que l’acte d’individualité produit par le demandeur n’est pas de nature à suppléer aux anomalies de son acte de naissance et observe à juste titre qu’au surplus, ce document comporte lui-même des différences de typographies ainsi que des contradictions, sur la date à laquelle il a été établi, sur le nom du greffier et sur les différents sceaux utilisés, correspondant à ceux de plusieurs juridictions qui révèlent son absence d’authenticité.

Au vu de ces éléments, l’acte de naissance de Monsieur X Y Z, qui n’apparaît pas seulement irrégulier au regard de la loi ivoirienne mais également non conforme à la réalité, ne saurait se voir reconnaître la force probante au sens de l’article 47 précité du code civil, le ministère public justifiant au surplus d’éléments extérieurs qui confirment l’incertitude de l’état civil du demandeur, notamment la carte nationale d’identité ivoirienne, le disant né le […].

Monsieur X Y Z ne justifiant pas d’un état civil fiable et certain, il ne peut qu’être débouté de son action déclaratoire de nationalité française, sans qu’il soit besoin de statuer sur l’état civil et la nationalité de sa présumée mère ainsi que sur sa filiation paternelle, également contestés par le ministère public, de constater son extranéité et de le condamner aux dépens.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

Déboute le demandeur de son action déclaratoire ;

Dit que Monsieur X Y Z, se disant né le […] à […]), n’est pas français ;

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du Code Civil ;

Condamne le demandeur aux dépens.

Fait et jugé à Paris, le 17 Avril 2015.

Le Greffier Le Président

A-C. COS J. DREVET

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