Tribunal de grande instance de Paris, 1re chambre section sociale, 17 mai 2016, n° 13/14758

  • Sécurité sociale·
  • Urssaf·
  • Prescription·
  • Contrat d'assurance·
  • Décès·
  • Obligation·
  • Profession libérale·
  • Titre·
  • Qualités·
  • Assurance vieillesse

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 1re ch. sect. soc., 17 mai 2016, n° 13/14758
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 13/14758

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

1/4 social

N° RG :

13/14758

N° MINUTE :

Assignation du :

4 octobre 2013

DEBOUTE

L. G.

(footnote: 1)

JUGEMENT

rendu le 17 mai 2016

DEMANDERESSES

Madame C Z tant en son nom personnel qu’en qualité d’ayant droit de Monsieur G-H Z

domiciliée C/o Mme X

[…]

[…]

Madame D Z, épouse Y tant en son nom personnel qu’en qualité d’ayant droit de Monsieur G-H Z

[…]

[…]

représentées par Maître E F de l’AARPI LEGIPASS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E1970

DÉFENDERESSE

CAISSE INTERPROFESSIONNELLE DE PRÉVOYANCE ET D’ASSURANCE VIEILLESSE (CIPAV)

[…]

[…]

représentée par Maître Carine BAILLY LACRESSE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire E1441

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laurence GUIBERT, Vice-Président

Président de la formation

Madame Pénélope POSTEL-VINAY, Vice-Président

Monsieur Julien SENEL, Vice-Président

Assesseurs

assistées de Mathilde ALEXANDRE, Greffier lors des débats

DÉBATS

A l’audience du 22 mars 2016

tenue en audience publique

JUGEMENT

— Contradictoire.

— En premier ressort.

— Prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— Signé par Laurence GUIBERT, Président et par Sarah AYAD, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur Z, qui exerçait sous la forme libérale une activité d’expert en objets d’art est décédé le 4 octobre 2008 à la suite d’une maladie ayant nécessité son hospitalisation à compter de février 2008.

Monsieur Z était affilié à la Caisse Interprofessionnelle de Prévoyance et d’Assurance (ci-après CIPAV).

Soutenant que la CIPAV avait méconnu son devoir d’information et de conseil dans le cadre de l’exécution d’un contrat d’assurance invalidité-décès souscrit le 1er janvier 1986 par son époux, Madame C Z et Madame Y, leur fille, ont fait assigner, le 4 octobre 2013, cet organisme social à l’effet d’obtenir le paiement de diverses indemnités.

Selon leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique, le 9 novembre 2015, Madame Z et Madame Y demandent, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, de :

— dire et juger Madame C Z et Madame D Y née Z recevables et bien fondées en leurs demandes,

— dire et juger que Mesdames Z ont qualité à agir, tant en leur nom personnel qu’en qualité d’ayants droit de Monsieur Z,

En conséquence,

— les déclarer recevables en leurs demandes,

— dire et juger l’action non prescrite,

A titre principal,

— dire et juger que les informations de la CIPAV données à Madame C Z sont dolosives et frauduleuses en ce qu’elles étaient destinées à annihiler la prise d’effet de l’assurance décès-invalidité,

— dire et juger que la CIPAV a manqué à ses obligations contractuelles et notamment à son obligation de loyauté contractuelle et à ses obligations d’information et de conseil,

— dire et juger que Madame C Z et Madame D Y née Z ont fait l’objet de manœuvres dolosives et frauduleuses,

— dire et juger que ces manœuvres ont empêché Madame C Z, en sa qualité d’ayant cause, de bénéficier de l’assurance décès-invalidité souscrite par Monsieur Z,

En conséquence,

— condamner la CIPAV à payer à Madame C Z et à Madame D Y née Z la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi par Mesdames Z,

— condamner la CIPAV à exécuter ses obligations contractuelles au titre de l’assurance décès-invalidité,

— condamner la CIPAV à verser à Madame Z et à Madame Y née Z, ès qualités d’ayants droit de Monsieur G-H Z, la rente due au titre de l’assurance invalidité, en application de l’article 4.23 et suivants des statuts de la CIPAV,

— condamner la CIPAV à verser à Madame Z, en sa qualité de conjoint survivant, le capital décès dû au titre de l’assurance décès, en application de l’article 4.13 des statuts de la CIPAV,

— condamner la CIPAV à verser à Madame Z, en sa qualité de conjoint survivant, la rente survie due au titre de l’assurance, en application de l’article 4.15 des statuts de la CIPAV,

Le tout sous astreinte d’un montant de 50 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir.

A titre subsidiaire,

— dire et juger que les informations de la CIPAV données à Madame C Z sont dolosives et frauduleuses en ce qu’elles étaient destinées à annihiler la prise d’effet de l’assurance décès-invalidité,

— dire et juger que la CIPAV a manqué à ses obligations contractuelles et notamment à son obligation de loyauté contractuelle, et à ses obligations d’information et de conseil,

— dire et juger que Madame C Z et Madame D Y née Z ont fait l’objet de manœuvres dolosives et frauduleuses,

— dire et juger que ces manœuvres ont empêché Madame C Z, en sa qualité d’ayant cause, de bénéficier de l’assurance décès-invalidité souscrite par Monsieur Z,

— prononcer la résolution du contrat d’assurance décès invalidité souscrit par Monsieur G-H Z avec la CIPAV,

— condamner la CIPAV à verser à Madame Z et à Madame Y née Z la somme de 80.000 euros à titre de dommages et intérêts,

A titre infiniment subsidiaire,

— constater que la demande de réouverture des droits de Monsieur Z est sollicitée auprès de l’URSSAF,

En conséquence,

— surseoir à statuer dans l’attente de l’arrêt qui sera rendu par la Cour d’Appel de PARIS, enregistré sous le numéro RG 13/09673 (Pole 6 chambre 12) et revenant à l’audience du 15 septembre 2016,

En tout état de cause,

— condamner la CIPAV à verser à Madame C Z et Madame D Y née Z la somme de 3.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître E F conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures notifiées par voie électronique, le 8 décembre 2015, la CIPAV demande de :

A titre principal :

— déclarer irrecevable l’action de Madame Z C et de Madame D Y, née Z pour défaut de qualité à agir,

— déclarer irrecevable l’action de Madame Z C et de Madame D Y, née Z pour cause de prescription,

A titre subsidiaire :

— surseoir à statuer dans l’attente de l’arrêt de la cour d’appel de Paris dans le cadre du litige opposant Madame Z à l’U.R.S.S.A.F,

A titre très subsidiaire :

— débouter Madame Z C et de Madame D Y, née Z de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

En tout état de cause :

— condamner conjointement et solidairement Madame Z C et Madame D Y, née Z à verser à la C.I.P.A.V. une somme de 3.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits et de l’argumentation des parties, il est renvoyé, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions précitées.

MOTIVATION

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité pour agir

Selon l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L’article 31 du code de procédure civile ajoute que l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

La CIPAV soutient qu’en vertu des dispositions de l’article 1165 du code civil, seul le titulaire du droit, Monsieur Z, et non les tiers au contrat d’assurance décès-invalidité souscrit par celui-ci le 1er janvier 1986, peut exercer une action à son encontre ; qu’ainsi, l’action de Mesdames Z serait irrecevable faute pour les intéressées de justifier de leur qualité à agir ; qu’elles ne peuvent valablement se fonder sur le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige les opposant à l’URSSAF au motif qu’elles auraient été déclarées recevables dans leurs demandes relatives à la réouverture des droits de Monsieur Z du 1er janvier 2008 au 4 octobre 2008.

Elle relève que Monsieur Z est décédé avant l’introduction de toute procédure intentée à son encontre ; qu’au surplus, l’action engagée par Mesdames Z a pour objet de solliciter l’application du droit commun des contrats puisque les intéressées lui font grief d’avoir violé son obligation de conseil et d’avoir commis des manoeuvres dolosives aux fins de ne pas accorder les garanties offertes par le contrat d’assurance décès-invalidité ; qu’à ce titre, elles ne peuvent arguer de l’application des dispositions de l’article 724 du code civil dans la mesure où aucune demande n’est formulée dans l’intérêt de Monsieur Z ; qu’enfin, le devoir d’information et de conseil, qui existe à l’égard de tout contractant, prend fin avec l’extinction du contrat et n’est pas transmissible aux héritiers du cocontractant.

Mesdames Z rétorquent qu’elles agissent en leur nom personnel et en leur qualité d’ayants droit de Monsieur Z ; que pour ce faire, elles fournissent un acte authentique de notoriété ; qu’en tout état de cause, les droits du défunt sont transmis aux ayants droit qui le substituent dans son patrimoine et dans ses droits en vertu de l’article 724 du code civil.

Au soutien de leurs demandes de condamnation, Madame Z et Madame Y font grief à la CIPAV de ne pas avoir mis en oeuvre le contrat souscrit en 1986 par Monsieur Z lorsqu’elle a été informée de sa situation et d’avoir au contraire fourni des conseils de nature à tromper celui-ci et son épouse sur l’étendue de leurs droits, lesdits conseils constituant une fraude ayant pour objet de la libérer de toute obligation de paiement et de garantie pour l’avenir.

C’est la raison pour laquelle Madame Z et Madame Y agissent en qualité d’ayants droit de Monsieur Z mais également à titre personnel pour les préjudices qu’elles ont subis, tenant notamment à la non-perception d’un capital décès et de la rente survie qui auraient dus être versés à Madame Z en sa qualité de conjoint survivant.

Il résulte de l’acte authentique de notoriété dressé le 11 février 2009 par Maître A, notaire, que Madame C X, épouse Z et Madame D Z épouse Y sont habiles à recueillir la succession de Monsieur G Z.

En conséquence, en leur qualité d’ayants droit de Monsieur Z, elles sont recevables à faire valoir les droits de ce dernier sur le fondement de l’article 724 du code civil dès lors qu’il est reproché à la CIPAV de ne pas avoir exécuté le contrat souscrit en 1986.

S’agissant de leur action intentée à titre personnel, Madame Z et Madame Y, comme le relève la cour d’appel de Paris, dans l’arrêt rendu le 2 septembre 2014, sollicitent uniquement l’application du droit commun des contrats “puisqu’elles fondent leur action sur les éventuels manquements de la CIPAV à ses devoirs d’information et de conseil dans l’exécution du contrat d’assurance décès-invalidité qui avait été souscrit par Monsieur Z”.

Il n’est pas sérieusement contesté que Madame B et Madame Y n’ont pas souscrit le contrat critiqué de sorte qu’elles ne disposent pas de la qualité à agir pour formuler à titre personnel des prétentions articulées sur de prétendus manquements contractuels imputables à la CIPAV.

Dans ces conditions, leurs demandes formulées à titre personnel seront déclarées irrecevables.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription

Selon l’article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer

La CIPAV fait valoir que Madame B et Madame Y perpétuant un droit personnel du défunt, la prescription de l’action s’apprécie en fonction de la connaissance que Monsieur Z avait de la situation ; que ce dernier ayant conclu le contrat litigieux, le 1er janvier 1986, le point de départ de la prescription quinquennale, dont la durée initiale a été modifiée par la loi du 17 juin 2008, court à compter de la conclusion du contrat de sorte que l’action des demandeurs est prescrite ; que Madame B et Madame Y ne sauraient se prévaloir des dispositions de l’article 2224 du code civil, au motif que la prescription court à compter de la date à laquelle elles ont eu connaissance des manquements de la CIPAV à son obligation de conseil et de renseignement dans la mesure où le contrat a pris fin le 4 octobre 2008, date du décès de Monsieur Z, l’assignation ayant été délivrée le 4 octobre 2013 soit au-delà du délai de 5 ans ; qu’au surplus, l’organisme social n’était tenu d’aucune obligation à leur égard puisqu’elles étaient tiers au contrat ; qu’en tout état de cause, il leur appartient de rapporter la preuve que Madame B et Madame Y ont découvert l’existence du contrat d’assurance invalidité-décès après le décès de l’adhérent, lequel était tenu de cotiser aux trois régimes obligatoires gérés par la CIPAV ; qu’enfin, l’intégralité des demandes étant formulées au bénéfice de Mesdames Z, elles ne peuvent valablement soutenir que ce litige “concerne les difficultés d’exécution du contrat que le défunt avait souscrit et qui faisait partie de son patrimoine”.

Madame B et Madame Y font valoir que le délai de prescription court à compter de la date à laquelle Madame B a eu connaissance du manquement de la CIPAV à son obligation de conseil et de renseignement ; que Madame Z a appris, après le décès de son époux, que celui-ci disposait d’une assurance décès-invalidité auprès de la CIPAV ; qu’ainsi, la prescription quinquennale ne pouvait commencer à courir avant le 4 octobre 2008 ; qu’au surplus, Monsieur Z étant hospitalisé pendant la période durant laquelle les informations ont été communiquées par la CIPAV, l’intéressé se trouvant dans l’impossibilité d’agir au sens de l’article 2234 du code civil, le délai de prescription ne pouvait commencer à courir qu’à compter du 4 octobre 2008 ; qu’en outre, les droits du défunt étant transmis aux héritiers, conformément aux dispositions de l’article 724 du code civil, la CIPAV ne saurait leur opposer la prescription, ce d’autant que c’est le décès de son époux qui est le fait générateur de l’exécution du contrat par la CIPAV compte tenu de l’invalidité-décès souscrite ; qu’en tout état de cause, la prescription ne saurait être retenue s’agissant de la demande subsidiaire dans la mesure où la cour d’appel de Paris doit statuer sur l’appel d’un jugement rendu par le tribunal des affaires de la sécurité sociale le 9 juillet 2013 dans un litige les opposant à l’URSSAF ; que le délai de prescription commencera à courir à compter de la date de la décision judiciaire qui fixera les droits des parties.

L’appréciation de cette fin de non-recevoir suppose un examen au fond puisqu’il convient de vérifier notamment à quelle date ont été commis le manquement au devoir de conseil et les manoeuvres dolosives prétendument imputables à la CIPAV, lesquels seraient selon les affirmations de Madame Z et Madame Y, à l’origine de l’inexécution des obligations contractuelles pesant sur l’organisme social.

Sur le fond

Madame Z et Madame Y exposent à l’appui de leurs demandes que lorsque Monsieur Z a été hospitalisé, son épouse s’est renseignée auprès de la CIPAV sur les démarches à effectuer, que cette dernière lui a conseillé de procéder auprès des URSSAF à la déclaration de la cessation d’activité professionnelle de son mari, rétroactivement au 31 décembre 2007, pour lui permettre de percevoir sa retraite et de ne pas régler les cotisations URSSAF 2008, en lui indiquant que celui-ci ne pouvait bénéficier de la pension d’invalidité du régime général puisqu’il avait plus de 60 ans, mais sans l’informer de l’existence du contrat d’assurance invalidité-décès souscrit par ce dernier le 1er janvier 1986 et de la caducité de ce contrat en cas de cessation d’activité, que suivant les conseils de la CIPAV, elle a déclaré la cessation d’activité de son mari à compter du 1er janvier 2008 alors que celui-ci avait travaillé en janvier et février 2008, que cette situation a entraîné la perte des droits au titre du contrat souscrit.

Elles ajoutent qu’à la suite du rejet par l’URSSAF de la demande de Madame Z tendant à voir rouvrir les droits de son mari pour les mois de janvier et février 2008, le tribunal des affaires de sécurité sociale a partiellement fait droit à sa demande en rouvrant les droits jusqu’au 31 janvier 2008.

Elles reprochent à la CIPAV ne pas avoir mis en oeuvre le contrat souscrit en 1986 par Monsieur Z lorsqu’elle a été informée de sa situation et d’avoir au contraire fourni des conseils de nature à les tromper sur l’étendue des garanties.

Monsieur Z a été affilié à la CIPAV du 1er janvier 1986 au 31 décembre 2007, exerçant sous la forme libérale une activité d’expert en objets d’art.

Selon l’article R. 641-1 11° du code de la sécurité sociale, la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales comprend dix sections professionnelles, dont la section professionnelle des architectes, agréés en architecture, ingénieurs, techniciens, géomètres, experts et conseils, artistes auteurs ne relevant pas de l’article L. 382-1, enseignants, professionnels du sport, du tourisme et des relations publiques, et de toute profession libérale non rattachée à une autre section.

L’article L. 642-1 du code de la sécurité sociale précise que “toute personne exerçant une activité professionnelle relevant de l’Organisation autonome d’assurance vieillesse des professions libérales est tenue de verser des cotisations destinées à financer notamment :

1° Les prestations définies au chapitre III du présent titre ;

2° Les charges de compensation incombant à cette organisation en application des articles L. 134-1 et L. 134-2"

L’article 1.3 des statuts de la CIPAV stipule :

“Sont affiliés à la CIPAV et tenus de cotiser aux trois régimes obligatoires et indissociables visés à l’article 1.2 :

1) les personnes qui exercent à titre libéral :

- les professions d’architecte, d’agréé en architecture, de conseil, de dessinateur technique ou projeteur, d’économiste du bâtiment, d’expert, de géomètre, d’ingénieur-conseil, d’interprète, de maître-d’oeuvre, de métreur, de psychologue, de technicien, de traducteur technique, de vérificateur, de vigile,

- ainsi que toute activité professionnelle non salariée non agricole, non commerciale ou non artisanale, et non rattachée à l’une des autres sections professionnelles visées à l’article R 641-1 du code de la sécurité sociale (…)”

L’article 1.2, auquel renvoie l’article 1.3, ajoute que “la CIPAV assure la gestion du régime d’assurance vieillesse de base des professions libérales relevant de sa compétence, pour le compte de la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse des professions libérales, en application de l’article L 642-5 du code de la sécurité sociale. A ce titre, elle est habilitée à recouvrer les cotisations de ce régime et liquider les pensions. Elle assure également la gestion du régime de retraite complémentaire et du régime invalidité-décès institués en application du livre VI, titre IV du code de la sécurité sociale”.

Il résulte de l’application combinée de ces articles que Monsieur Z était tenu de cotiser aux trois régimes listés à l’article 1.2 des statuts de la CIPAV, étant rappelé que son affiliation à cet organisme revêtait un caractère obligatoire comme cela ressort des articles R. 643-1 et R. 643-2 du code de la sécurité sociale.

Plus précisément sur le régime d’assurance invalidité-décès, objet du présent litige, l’article 4.1 des statuts rappelle qu’il est “institué par le décret n°79-263 du 21 mars 1979 conformément à l’article L 644-2 du code de la sécurité sociale et qu’il s’applique de manière obligatoire à toutes les personnes affiliées à la CIPAV”.

L’article 4.11 des statuts décline les prestations accordées à l’adhérent. Ainsi, en cas de décès de ce dernier, est prévu le versement d’un capital-décès aux ayants droit (article 4.13), d’une rente de survie au conjoint (article 4.15) et d’une rente aux orphelins. En cas d’invalidité de l’adhérent, une pension d’invalidité lui est versée (article 4.23).

Il s’évince donc de ce qui précède que les garanties dont bénéficiait Monsieur Z étaient de nature statutaire et non contractuelle.

A supposer même, qu’un contrat d’assurance invalidité-décès ait été souscrit par Monsieur Z, le 1er janvier 1986, auprès de la CIPAV, force est de constater que Madame Z ne rapporte pas la preuve de l’existence de celui-ci de sorte qu’elle ne peut valablement soutenir que la CIPAV n’aurait pas exécuté ses obligations contractuelles.

Il appartient également à Madame Z et Madame Y de rapporter la preuve que la CIPAV aurait manqué à son obligation générale d’information et de conseil, qui est à la charge des organismes de sécurité sociale, envers Monsieur Z, son adhérent. En effet, Madame Z ne saurait valablement se prévaloir de la violation d’une quelconque obligation à son égard, de la part de la CIPAV, puisqu’elle est tiers à la relation ayant existé entre l’organisme social et son époux, lequel ne bénéficiait d’ailleurs, comme le précise Madame Z, d’aucune mesure de protection ordonnée par le juge des tutelles.

Or, contrairement aux dires de Madame Z, son époux ne pouvait ignorer l’étendue de ses droits et de ses obligations, puisqu’il n’est pas sérieusement contesté que celui-ci était destinataire des circulaires d’information, dont celle de 2006 produite aux débats par les demanderesses, lesquelles contiennent tous les renseignements relatifs aux cotisations et aux garanties offertes aux adhérents et à leur conjoint.

De surcroît, il n’est pas démontré que la CIPAV aurait “conseillé” à Madame Z, comme elle le soutient, de déclarer une date de cessation d’activité au 31 décembre 2007, pour lui permettre de percevoir une retraite, de cesser de verser des cotisations à l’URSSAF et par voie de conséquence de ne pas pouvoir bénéficier de la pension d’invalidité évoquée à l’article 4.23 des statuts de la CIPAV. En effet, Madame Z ne saurait se prévaloir des propos qu’elle tient dans ses lettres des 26 octobre 2008 et 14 janvier 2009 adressées à la CIPAV pour voir engager la responsabilité de cette dernière sans que ses dires ne soient corroborés par aucun justificatif.

Enfin, aux termes d’un arrêt rendu par la cour d’appel de Paris en date du 2 septembre 2014, qui a confirmé l’ordonnance du 28 janvier 2014 du juge de la mise en état dans la présente instance sur l’exception d’incompétence soulevée par la CIPAV au profit du tribunal des affaires de sécurité sociale de l’Oise, il a été relevé que “Mesdames Z ne [demandaient] pas l’application des dispositions contenues dans le code de la sécurité sociale mais celles du droit commun des contrats”, de sorte qu’il importe peu que la cour d’appel de Paris, saisie dans le cadre du litige opposant les demanderesses à l’URSSAF, fasse droit à l’éventuelle réouverture des droits réclamée par ces dernières, puisqu’en tout état de cause, la modification de la date de radiation retenue initialement par l’URSSAF serait sans incidence sur la solution du présent litige.

Dans ces conditions, il conviendra de débouter Madame Z et Madame Y de l’ensemble de leurs prétentions.

Sur l’exécution provisoire

L’exécution provisoire, qui est compatible avec la nature de l’affaire, sera ordonnée.

Sur les frais irrépétibles

Madame Z et Madame Y, qui succombent, seront condamnées aux dépens. Cette condamnation ne sera pas prononcée solidairement mais in solidum, la solidarité ne se présumant pas.

L’équité commande qu’il ne soit pas fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal,

DECLARE irrecevables les demandes formées par Madame Z et Madame Y, à titre personnel,

DEBOUTE Madame Z et Madame Y de l’ensemble de leurs prétentions,

ORDONNE l’exécution provisoire,

REJETTE les demandes formulées sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE in solidum Madame Z et Madame Y aux dépens.

Fait et jugé à Paris le 17 mai 2016

Le Greffier Le Président

S. AYAD L. GUIBERT

FOOTNOTES

1:

Expéditions

exécutoires

délivrées le :

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal de grande instance de Paris, 1re chambre section sociale, 17 mai 2016, n° 13/14758