Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 2e chambre, 8 février 2018, n° 15/00312

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Chronologie de l’affaire

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Lettre des Réseaux · 17 décembre 2021

CA Aix en Provence, 8 février 2018, n°15/00312 La portée de la cession de ses droits par un auteur s'interprète strictement et ne saurait couvrir des actes de reproduction sur des supports non expressément mentionnés. Ce qu'il faut retenir : La portée de la cession de ses droits par un auteur s'interprète strictement et ne saurait couvrir des actes de reproduction sur des supports non expressément mentionnés. Pour approfondir : L'affaire soumise à la Cour opposait un photographe à une agence de communication à qui il avait cédé le droit d'utiliser une photographie pour illustrer une …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 2e ch., 8 févr. 2018, n° 15/00312
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 15/00312
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Marseille, 17 décembre 2014, N° 13/02063
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

2e Chambre

ARRÊT AU FOND

DU 08 FEVRIER 2018

N° 2018 / 62

Rôle N° 15/00312

Z X

C/

SAS EXPRIMER

Grosse délivrée

le :

à :

Me Bernard AUBRESPY

Me Laurence BRANDEHO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 18 Décembre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 13/02063.

APPELANT

Monsieur Z X

[…]

représenté par Me Bernard AUBRESPY, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SAS EXPRIMER,

dont le […]

représentée et assistée par Me Laurence BRANDEHO, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Zakaria EL YOUSFI, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 14 Décembre 2017 en audience publique. Conformément à l’article 785 du code de procédure civile, Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente, a fait un rapport oral de

l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente

Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller

Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme B C.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Février 2018.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Février 2018,

Signé par Madame Marie-Christine AIMAR, Présidente et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu les articles 455 et 954 du code de procédure civile,

Vu le jugement contradictoire du 18 décembre 2014 rendu par le tribunal de grande instance de Marseille, première chambre civile,

Vu l’appel interjeté le 14 janvier 2015 par monsieur Z X,

Vu les dernières conclusions de monsieur Z X, appelant en date du 4 juin 2015,

Vu les dernières conclusions de la SAS Exprimer, intimée en date du 2 novembre 2017,

Vu l’ordonnance de clôture en date du 13 novembre 2017,

SUR CE, LA COUR,

Il est expressément renvoyé pour un plus ample exposé des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures des parties,

Il sera simplement rappelé que :

Monsieur X est photographe professionnel et il a à ce titre cédé au mois d’août 2011 ses droits d’auteur à l’agence Exprimer, agence de communication et de publicité, pour l’utilisation d’une de ses photos référence CMOIRENC-002255 Vue Aérienne pour illustrer la plaquette commerciale et le site internet du programme immobilier à Saint-Tropez moyennant le prix de 844 euros.

Faisant valoir qu’ayant appris que sa photographie a été également utilisée en mentionnant son nom

et celui de l’agence Exprimer, pour une campagne publicitaire de Kaufman Et Broad relative à leur programme immobilier à Saint-Tropez, sans son autorisation et sans en avoir été informé, et que celle-ci a fait l’objet d’autres parutions, sans avoir reçu de rémunérations supplémentaires, monsieur Z X a, selon acte d’huissier du 28 janvier 2013 fait assigner sur le fondement des articles L 111-1, L 11-3 et L 131-1 du code de la propriété intellectuelle, la société Exprimer devant le tribunal de grande instance de Marseille en paiement de la somme de 8.123 euros au titre de ses droits d’auteur et la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire du 18 décembre 2014 le tribunal a :

— dit que l’existence des reproductions incriminées n’est pas établie,

— débouté monsieur Z X de l’intégralité de ses demandes,

— condamné monsieur Z X à verser une somme de 1.500 euros à la société Exprimer en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné monsieur Z X aux dépens,

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Dans ses dernières écritures en date du 4 juin 2015 monsieur Z X demande de :

— réformer le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Marseille le 18 décembre 2014 dans toutes ses dispositions,

A titre principal

— condamner la SAS Exprimer au paiement de la somme 8123 euros à titre de droits d’auteur,

— condamner la SAS Exprimer au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens,

— dire et juger que dans l’hypothèse où à défaut de règlement des condamnations prononcées par le « jugement » à intervenir, l’exécution forcée devra être réalisée par l’intermédiaire d’un huissier, le montant des sommes retenues par l’huissier par application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 numéro 96/1080 (tarif des huissiers) devront être supportées par le débiteur en sus de l’application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

à titre subsidiaire :

— condamner la SAS Exprimer au paiement de la somme 4007 ,40 euros à titre de droits d’auteur pour la parution de sa photographie dans Paris Match et Côte,

— condamner la SAS Exprimer au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu’aux entiers dépens.

— dire et juger que dans l’hypothèse où à défaut de règlement des condamnations prononcées par « jugement » à intervenir, l’exécution forcée devra être réalisée par l’intermédiaire d’un huissier, le montant des sommes retenues par l’huissier par application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 numéro 96/1080 (tarif des huissiers) devront être supportées par le débiteur en sus de l’application des dispositions de l’article 700 du Nouveau

Code de Procédure Civile.

La SAS Exprimer, intimée, s’oppose aux prétentions de l’appelant, et demande au visa des articles 1315 du code civil et 6 et 9 du code de procédure civile, dans ses dernières écritures en date du 2 novembre 2017 de :

— confirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de Marseille en date du 18 décembre 2014 dans toutes ses dispositions,

— débouter monsieur X de toutes ses demandes comme étant non fondées,

— condamner monsieur X au paiement de la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

— condamner monsieur X aux entiers dépens.

***************

L’article L111-1 du code de la propriété intellectuelle dispose : L’auteur d’une 'uvre de l’esprit jouit sur cette 'uvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous.

L’article L111-3 précise : La propriété incorporelle définie par l’article L111-1 est indépendante de la propriété matérielle. L’acquéreur de cet objet n’est investi, du fait de cette acquisition d’aucun des droits prévus par le présent code.

Les attributs de ce droit de propriété sont d’ordre moral et patrimonial puisque d’une part l’auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son 'uvre (article L121-1) et que d’autre part il est seul titulaire du droit d’exploitation (article L112-1 et suivants).

Le Code de la Propriété Intellectuelle précise encore que toute utilisation d''uvre de l’esprit en violation des droits de leur auteur est illicite (article L 122-4) et constitue une contrefaçon (article L 335-2, L335-3).

Enfin l’article L131-3 du CPI indique : La transmission des droits de l’auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine de l’exploitation soit délimitée quant à son étendue et à sa destination quant au lieu et à la durée.

La loi et la jurisprudence précisent qu’en cas d’absence d’écrit aucune cession ne peut intervenir

Monsieur X fait valoir que selon la facture établie à la suite de la cession au mois d’août 2011 de ses droits d’auteur pour l’utilisation d’une de ses photographies intitulée Vue Aérienne celle-ci mentionne 'vue aérienne pour illustrer la plaquette commerciale et le site internet du programme immobilier à Saint Tropez', ne porte que sur une utilisation précise et unique.

Que cette autorisation portait sur l’illustration de la plaquette commerciale du programme immobilier à Saint Tropez et non pas pour des publicités dans la presse ;

Qu’en l’absence de son autorisation pour l’utiliser dans des périodiques, la SAS Exprimer ne pouvait réutiliser cette photographie dans ses réalisations portant sur des publicités presse.

Il précise qu’il a produit la photographie litigieuse parue dans Paris Match Edition Nationale et qui lui est expressément attribuée, et surtout, que la société Exprimer reconnaît cette utilisation dans

Paris Match dans ses écritures.

Il soutient que la photographie est également parue dans quatre annonces presse : Elle Décoration, Paris Match Edition Paca, Paris Match Édition Côte, ce qu’a reconnu téléphoniquement la société Exprimer qui a répondu le 26 juillet 2012 à ses mails transmettant sa note d’honoraires 'le chèque est sur le bureau du PDG monsieur Y.' ne contestant pas l’étendue des parutions.

Qu’il communique également l’exemplaire du magazine Côte sur lequel sa photographie est utilisée.

La SAS Exprimer fait valoir qu’elle a utilisé la photographie comme il était convenu : illustrer le programme immobilier de Saint Tropez et qu’elle n’en a pas détourné l’utilisation ou ne l’a pas réutilisée à d’autres fins.

Elle précise que la cession des droits portait sur l’illustration du programme immobilier de Saint Tropez sur internet et sur support papier, ce qui impliquait qu’elle pouvait l’utiliser dans des annonces de presse pour ce même objet et souligne que le prix fixé à hauteur de 844 euros TTC est un montant élevé pour ce type de photographie par comparaison avec le barème indicatif publié par l’Union des Photographes professionnels et par d’autres photographes comme illustré par les factures produites, ce qui permet d’apprécier l’étendue des droits cédés et que ce montant ne peut correspondre à une cession de droit aussi limitée et restrictive que celle prétendue par monsieur X.

Que la seule facture émise par lui ne saurait constituer une preuve du champ de la cession de ses droits d’auteur et qu’il ressort du libellé de cette facture que la photographie était bien destinée à illustrer la campagne publicitaire de Kaufmann & Broad pour son programme immobilier à Saint Tropez.

Elle précise qu’elle a utilisé la photographie pour illustrer la présentation du programme immobilier dans la revue Paris Match seulement, le fait que la photographie soit également publiée dans une autre revue qui est le magazine Côte ne change rien à cet état de fait.

Elle indique qu’elle n’est pas à l’origine de cette dernière publication ; qu’elle ne peut contrôler l’utilisation qui est faite par son client des maquettes fichiers et supports visuels de présentation de son programme immobilier qu’elle lui a transmis et que cette publication respecte les droits d’auteur de monsieur X et relève de la cession des droits d’auteur opérée.

Elle souligne que monsieur X est un professionnel de la photographie exerçant en sa qualité de gérant de la S.A.R.L. Z X et en sa qualité d’entrepreneur individuel et qu’il a accepté de travailler, compte tenu de l’antériorité de leurs relations, avec l’agence Exprimer sans que soit formalisé au préalable un contrat de cession et ajoute qu’elle n’a pas exploité la photographie dans d’autres publications que dans Paris Match.

Elle précise que le traitement habituel de la deuxième facture émise par monsieur X par le service comptable reçu par lui ne préjuge en rien du caractère justifié de celle-ci et ce alors qu’aucun chèque n’a été établi et signé par le gérant de la société.

Elle souligne le caractère excessif des droits d’auteur réclamés s’agissant d’une photographie d’archive déjà vendue et non d’une réalisation à la demande .

Ceci rappelé, il convient de rechercher quelle a été l’étendue des droits cédés par monsieur X sur la photographie Vue Aérienne de Saint Tropez.

En l’absence de contrat écrit préalable, seules les mentions de la facture acceptée par la société Exprimer définit l’étendue de la cession.

Cette facture est ainsi libellée :' droits d’auteur pour l’utilisation d’une photographie pour illustrer la plaquette commerciale et le site internet du programme immobilier à Saint Tropez. Format double page + reprise sur internet tirage 1000 ex.'

Cette cession porte sur l’illustration d’une plaquette commerciale sans que soit expressément mentionné l’annonce presse de sorte que l’utilisation de celle-ci dans la revue Paris Match outrepasse l’autorisation donnée, le critère du montant des droits d’auteur ne permettant pas d’établir cette autorisation.

En revanche, il n’est pas justifié par monsieur X d’une utilisation de la photographie dans d’autres revues, à l’initiative de la société Exprimer, le simple mail évoqué n’étant pas de nature à établir l’acceptation par la société Exprimer d’être l’auteur de ces parutions.

En regard du barème incitatif des photographes, des revendications premières de monsieur X portant sur la somme de 2.200 HT pour quatre publications, et des honoraires initiaux, il convient de fixer ses droits patrimoniaux d’auteur à la somme de 2.000 euros.

Il convient en conséquence, réformant le jugement déféré, de condamner la société Exprimer à payer à monsieur X ladite somme.

L’équité commande d’allouer à l’appelant la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et de rejeter la demande formée à ce titre par l’intimée.

Les dépens resteront à la charge de l’intimée qui succombe sans qu’il y ait lieu de faire droit à la demande formée par l’appelant au titre de l’article 10 du décret du 8 mars 2001.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort,

Réforme le jugement déféré,

Dit que la société Exprimer a outrepassé les droits cédés par monsieur Z X sur la photographie CMoirenc -002255 Vue Aérienne,

La condamne à lui payer au titre de ses droits patrimoniaux d’auteur la somme de 2.000 euros,

Condamne la société Exprimer à payer à monsieur X la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette le surplus des demandes de monsieur X,

Rejette l’ensemble des demandes de la société Exprimer,

Condamne la société Exprimer aux entiers dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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