Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 3 mars 2022, n° 19/05774

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 1-5, 3 mars 2022, n° 19/05774
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 19/05774
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, 4 février 2019, N° 16/04776
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-5

ARRÊT AU FOND

DU 03 MARS 2022

lv

N° 2022/ 117

Rôle N° RG 19/05774 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BEC2F

Société LE BELVEDERE

C/

C Z

D Y

E A

Société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS – MAF -

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON


SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH


SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES


SCP JACQUIER ET ASSOCIES

Décision déférée à la Cour :


Jugement du Tribunal de Grande Instance d’Aix en Provence en date du 05 Février 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 16/04776.

APPELANT

Syndicat des copropriétaires LE BELVEDERE , Votre Maison – […], dont le siège social est sis […], représent é par son syndic en exercice la société FONCIA TERRES DE PROVENCE dont le siège social est 21 Avenue Victor Hugo 13100 AIX-EN-PROVENCE

r e p r é s e n t é p a r l a S C P B A D I E S I M O N – T H I B A U D J U S T O N , a v o c a t a u b a r r e a u d ' A I X – E N – P R O V E N C E , a s s i s t é d e M e N i c o l a s M E R G E R , a v o c a t a u b a r r e a u d’AIX-EN-PROVENCE

INTIMES

Monsieur C Z, demeurant […]

représenté par Me Mathieu JACQUIER de la SCP JACQUIER & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Caroline CALPAXIDES, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame D Y, demeurant […]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au b a r r e a u d ' A I X – E N – P R O V E N C E , a s s i s t é d e M e J o ë l l e E S T E V E , a v o c a t a u b a r r e a u d’AIX-EN-PROVENCE

Maître E A demeurant […], agissant en sa qualité de liquidateur de la SCCV LE BELVEDEDERE dont le siège social est

[…]

représenté par Me Jean-François JOURDAN de la SCP JOURDAN / WATTECAMPS ET ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Jean Philippe FOURMEAUX de la SELARL CABINET FOURMEAUX-LAMBERT ASSOCIES, avocat au barreau de DRAGUIGNAN substitué par Me Hélène AUBERT, avocat au barreau de DRAGUIGNAN

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS – MAF – société d’assurance mutuelle à forme variable intervenant dans les limites des garanties accordées à son assuré, agissant en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[…]

représentée par Me Joseph MAGNAN de la SCP MAGNAN PAUL MAGNAN JOSEPH, avocat au b a r r e a u d ' A I X – E N – P R O V E N C E , a s s i s t é d e M e J o ë l l e E S T E V E , a v o c a t a u b a r r e a u d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR


L’affaire a été débattue le 18 Janvier 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Laetitia VIGNON, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.


La Cour était composée de :

Madame Sylvaine ARFINENGO, Président

Madame Hélène GIAMI, Conseiller

Madame Laetitia VIGNON, Conseiller

qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.


Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Mars 2022.

ARRÊT


Contradictoire,


Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Mars 2022,


Signé par Madame Sylvaine ARFINENGO, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE


Courant 2008, la société LE BELVEDERE a fait construire sur les parcelles cadastrées AD 44 et 155, lieudit la Tuilière à ROUSSET, un bâtiment soumis au statut de la copropriété qu’elle a commercialisé sous forme de ventes en l’état futur d’achèvement.


Ce bâtiment confronte à l’Est la parcelle AD 289 appartenant aux époux X.


Pour cette opération de construction, une mission de maîtrise d’oeuvre complète a été confiée à Mme D Y, architecte, assurée auprès de la MAF.

M. C Z a été chargé d’établir un bornage des parcelles ainsi qu’un procès-verbal d’implantation le 28 mars 2008.


Se plaignant d’un empiètement sur leur fonds, M. et Mme X ont obtenu, par jugement avant dire droit du tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence, une expertise judiciaire confiée à M. F B, au contradictoire de la société LE BELVEDERE.


La procédure a été dénoncée par les époux X au syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE afin qu’il participe aux opérations d’expertise.


La société LE BELVEDERE a mis en cause Mme Y et la MAF, tandis que Mme Y a appelé en garantie M. Z.


Le 31 mars 2013, la société LE BELVEDERE a été radiée du registre du commerce et des sociétés ayant fait l’objet d’une liquidation amiable conduite par M. A.

M. B a déposé son rapport définitif le 25 novembre 2013, aux termes duquel il conclut à l’existence d’un empiètement de l’immeuble en surélévation ainsi qu’au niveau des fondations et préconise pour y remédier un sciage du débord de l’ouvrage en fondation et la réalisation d’un contre-voile en étages.


Par jugement du 09 juin 2015, le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence a:


- condamné le syndicat des copropriétaires à démolir les ouvrages constituant l’empiètement,


- condamné M. E A, liquidateur amiable de la société LE BELVEDERE à payer à M. et Mme X 12.000 € en réparation de leur perte de chance d’être indemnisés,
- déclarer irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires irrecevables pour défaut d’habilitation du syndic pour ester en justice.


La cour d’appel de céans, par arrêt du 20 octobre 2016, a partiellement infirmé le jugement en ce qu’il avait condamné M. A alors qu’il n’était pas appelé en la cause à titre personnel mais seulement es qualités, et a confirmé, pour le surplus, la décision attaquée.


Par protocole d’accord transactionnel signé le 29 mars 2016 entre les époux X et le syndicat des copropriétaires, les premiers ont accepté de renoncer au bénéfice des dispositions du jugement du 09 juin 2015 en ce qu’il ordonne la réalisation des travaux préconisés par l’expert et de vendre au syndicat une bande de terrain d’environ 0,20 m pour 1 euro symbolique, à détacher de leur propriété au droit des ouvrages empiétant sur celle-ci, avec création d’une servitude de tréfonds au profit de leur propriété, le tout au frais du syndicat. En contrepartie, ce dernier a accepté de verser aux époux X une indemnité forfaitaire de 60.000 €.


Par actes des 1er, 4 et 12 juillet 2016, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE a fait assigner Mme Y, la MAF, M. Z et M. A, en qualité de liquidateur amiable de la société LE BELVEDERE devant le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence afin de solliciter leur condamnation à lui payer la somme de 60.000€ au titre des frais supportés pour indemniser les époux X , outre 10.000 € en réparation de ses autres préjudices.

Par jugement contradictoire en date du 05 février 2019, le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence a:


- déclaré irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE,


- déclaré le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE infondé en ses prétentions au titre des frais irrépétibles,


- débouté M. Z, la société MAF et Mme Y de leur demande du chef de l’article 700 du code de procédure civile,


- condamné le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE aux dépens.


Par déclaration en date du 09 avril 2019, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 29 décembre 2021, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE , représenté par son syndic en exercice la SAS FONCIA TERRES DE PROVENCE, demande à la cour de:


- infirmer le jugement du 05 février 2019,


Statuant à nouveau,


Vu les articles 1240, 1241, 1355, 1646-1, 1792, 1792-1, 1792-4-3 et 2051 du code civil,


Vu le protocole d’accord transactionnel du 29 mars 2016,


- dire et juger recevables les demandes du syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE,


- dire et juger que M. E A, Mme D Y et M. C Z sont responsables à l’égard du syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE, des fautes qu’ils ont respectivement commises dans le cadre de la construction de l’ouvrage litigieux et qui ont amenées celui-ci à indemniser les époux X,


- en conséquence, condamner in solidum M. E A, Mme D Y, la MAF et M. C Z à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE les sommes suivantes:

* 60.001 € au titre des indemnités versées aux époux X,

* 2.952,46 € au titre des frais supportés par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE,

* 30.000 € au titre du préjudice moral et du préjudice de jouissance,


- condamner in solidum M. E A, Mme D Y, la MAF et M. C Z à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE la somme de 10.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.


Il rappelle que dans son arrêt du 20 octobre 2016, la cour d’appel a stigmatisé les différentes fautes commises par les intimés en ce qu’elle:


- n’a pas remis en cause la responsabilité délictuelle de la société LE BELVEDERE mais a précisé que la responsabilité personnelle de M. E A ne pouvait pas être retenue dans la mesure où il n’avait pas été assigné à titre personnel mais en qualité de liquidateur amiable de la dite société,


- a retenu que Mme Y, qui n’ignorait pas l’empiètement du mur du rez-de-chaussée, reconstruit en cours de chantier, ne pouvait non plus ignorer l’empiètement du mur de soubassement,


- a relevé que M. Z était intervenu pour attester à tort comme il le reconnaît lui-même que la façade de l’immeuble jouxtant les parcelles voisines se trouvait bien à l’intérieur de la propriété de la société LE BELVEDERE.


Il estime que ces différentes fautes ont concouru au préjudice des époux X qu’il a accepté d’indemniser et qu’il est donc fondé à solliciter la condamnation in solidum des intimés à lui régler les sommes qu’il a versées à ses voisins.


Il ne partage pas l’analyse des intimés qui considèrent que son action se heurte à l’autorité de la chose jugée attachée au jugement du 09 juin 2015 au motif qu’il aurait été négligeant pour ne pas avoir convoqué une assemblée générale afin de régulariser la procédure et qu’il pouvait le faire à tout moment et même devant la cour d’appel, alors que:


- il n’a été ni appelant, ni intimé en appel sur le jugement du 09 juin 2015, ce qui ne saurait lui être reproché du moment qu’il ne forme plus les mêmes demandes,


- il s’est rapproché des époux X , a signé un protocole d’accord et l’assemblée générale du 13 janvier 2016 a habilité le syndic à agir en justice pour obtenir le paiement des indemnités versées aux époux X dans le cadre de cette transaction, ce qui s’est matérialisée par l’assignation du 1er juillet 2016,


- il ne peut donc lui être reproché une quelconque négligence et la résolution du syndic prise postérieurement au jugement d’irrecevabilité constitue un fait juridique nouveau privant celui-ci de l’autorité de la chose jugée à l’égard de la seconde instance,


- les demandes qu’ils formulent dans le cadre de cette instance sont radicalement différentes de celles qu’il avait présentées et ayant donné lieu au jugement du 09 juin 2015,


- les demandes opposent certes les mêmes parties, mais n’ont ni le même objet, ni la même cause, puisqu’entre-temps un accord est intervenu avec les époux X permettant d’éviter toute démolition.


Il s’oppose également à la fin de non recevoir tirée de la prescription de son action, soutenant que les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux, qu’en l’espèce celle-ci est intervenue le 24 septembre 2009 et que dès lors la présente procédure, introduite le 1er juillet 2016, est parfaitement recevable.


Il ajoute que:


- il a fait citer M. A personnellement, sa responsabilité étant engagée pour avoir, en sa qualité de liquidateur amiable, clôturé les opérations de liquidation de la société alors qu’un procès était en cours contre celle-ci,


- les responsabilités de M. Z et Mme Y ne peuvent plus être remises en cause, la cour ayant déjà tranché, dans son arrêt du 20 octobre 2016, les fautes commises,


- le rapport d’expertise est opposable à M. Z dès lors qu’il a été versé aux débats et soumis à la discussion des parties.

Mme D Y et la MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS ( MAF), suivant leurs dernières conclusions déposées et signifiées le 30 décembre 2021, demandent à la cour de:


- c o n f i r m e r d a n s t o u t e s s e s d i s p o s i t i o n s l e j u g e m e n t d u t r i b u n a l d e g r a n d e i n s t a n c e d’Aix-en-Provence en date du 5 février 2019,


Et pour cela:


- dire et juger qu’en l’espèce, il y a une triple identité de parties, de chose et de cause,


- dire et juger que l’autorité de la chose jugée doit s’appliquer,


En conséquence,


- dire et juger que les demandes du syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELEVEDERE se heurtent a l’autorité de chose jugée du jugement rendu par le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence le 9 juin 2015,


- déclarer irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE.


- débouter le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE de toutes ses demandes, fin et conclusions,


Et encore,


- dire et juger prescrite l’action engagée par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE à l’encontre de Mme Y et de son assureur,
En conséquence,


- déclarer irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE.


- débouter le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE de toutes ses demandes, fins et conclusions,


Subsidiairement, sur le fond,


- dire et juger que Mme Y a parfaitement accompli sa mission.


- dire et juger qu’aucune faute n’est démontrée à l’encontre de Mme Y,


- dire et juger que Mme Y ne peut engager sa responsabilité tant sur le volet de la garantie décennale que sur le volet de la responsabilité contractuelle.


- dire et juger que les demandes formulées à l’encontre de Mme Y qui sont injustifiées et infondées, correspondent à un véritable enrichissement sans cause.


- dire et juger que la MAF ne peut être tenue que dans les limites et conditions du contrat d’assurance qui a été souscrit par Mme Y.


- dire et juger que la MAF opposera sa franchise à son assurée.


- dire et juger que la solidarité ne se présume pas et ce conformément aux dispositions contractuelles.


En conséquence,


- débouter le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE et tout concluant de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l’encontre des concluantes.


A titre infiniment subsidiaire, si une condamnation était prononcée à l’encontre des concluantes,


- condamner M. Z et M. A à les relever et garantir intégralement en principal, accessoire, intérêt et frais sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle.


A titre très infiniment subsidiaire,


- prononcer d’éventuelles condamnations à un taux de TVA réduit.


- réduire à de plus juste proportion les demandes de condamnations financières dirigées a I’encontre des concluantes.


Et en tout état de cause,


- condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE et à défaut tout succombant à verser à Mme Y et la MAF la somme de 5000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.


- condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE ou tout succombant aux entiers dépens d’instance.


Elles sollicitent la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a retenu que l’action du syndicat appelant se heurtait à l’autorité de la chose jugée attachée au jugement du 09 juin 2015 dès lors que:


- le syndicat des copropriétaires n’a pas régularisé en appel la procédure par un procès-verbal d’assemblée générale habilitant le syndic à ester, négligeant d’accomplir une diligence en temps utile,


- l’habilitation à ester pour la seconde procédure ne peut constituer un fait nouveau,


- la demande formulée dans le cadre de la seconde procédure est la même que celle présentée au reconventionnel dans le cadre de la première procédure.


Elle relèvent que le syndicat des copropriétaires n’a pas interjeté appel du jugement du 09 juin 2015 et n’a pas non plus été intimé devant la cour, que ce premier jugement rendu est donc définitif à son égard, que contrairement à ce que prétend l’appelant, les demandes qu’il présente dans le cadre de cette instance sont similaires de celles faites lors de la première procédure, à savoir obtenir une indemnisation au titre des travaux de démolition. Elles en tirent pour conséquence qu’il y a bien une triple identité de parties, de chose et cause, entraînant l’irrecevabilité de l’action du syndicat.


Elles opposent également à celui-ci la prescription de sa demande:


- au visa de l’article 2224 du code civil, le délai de prescription décennal a commencé à courir à compter du 04 juin 2010, date à laquelle il a été attrait à la procédure diligentée par les époux X par assignation du 30 septembre 2008,


- les demandes que le syndicat avaient présentées dans le cadre de cette première procédure n’ont pas pu interrompre la prescription puisqu’elles n’ont pas prospéré,


- le syndicat ne peut invoquer la responsabilité décennale des articles 1792 et suivants du code civil, alors que le dommage est intervenu antérieurement à la réception.


Sur le fond, elles considèrent que la responsabilité de Mme Y ne peut être engagée, celle-ci ayant parfaitement accompli sa mission, que s’agissant d’un désordre d’empiètement, il appartient exclusivement au géomètre, en l’occurrence M. Z de délimiter la construction et que surtout le maître d’oeuvre est seulement tenu d’une mission de direction générale des travaux et n’est pas astreint à une présence permanente sur le chantier. Elles ajoutent que Mme Y ne pouvait avoir connaissance de la présence de désordres affectant les fondations réalisées avant le chantier, sauf à réaliser des forages destructifs comme l’expert judiciaire a été contraint d’y procéder.


En tout état de cause, elles concluent :


- à l’absence de condamnation in solidum, l’appelant ne rapportant la preuve de l’existence des conditions nécessaires pour prononcer une telle condamnation,


- au bien fondé de leurs appels en garantie à l’encontre de M. A et de M. Z, les manquements de ce dernier étant avérés,


- au rejet des demandes indemnitaires du syndicat appelant qui sont non seulement purement forfaitaires, mais correspondent à un véritable enrichissement sans cause,


- à l’inopposabilité du protocole d’accord du 29 mars 2016, de sorte qu’elles ne peuvent se voir condamner à assumer les conséquences de son exécution au lieu et place du syndicat des copropriétaires qui l’a négocié et en a accepté les termes.

M. C Z, par ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 30 décembre 2021, demande à la cour de:
- confirmer le jugement dont appel,


- en conséquence, déclarer irrecevable l’action du syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE en l’état du principe de l’autorité de la chose jugée,


- rejeter toutes les demandes formulées à l’encontre de M. C Z,


A titre subsidiaire,


- déclarer prescrite l’action engagée par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE à l’encontre de M. C Z,


- rejeter toutes les demandes formulées à l’encontre de M. C Z,


A titre infiniment subsidiaire,


- déclarer le rapport d’expertise inopposable à M. Z,


- débouter le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE de toutes ses demandes, fins et conclusions à l’encontre de M. Z,


- débouter Mme Y et la MAF de toutes leurs demandes, fins et conclusions à l’encontre de M. Z,


- plus généralement, mettre M. Z purement et simplement hors de cause,


Dans tous les cas,


- condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE au paiement de la somme de 5.000 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.


Il conclut à l’irrecevabilité de l’action du syndicat comme se heurtant à l’autorité de la chose jugée en rappelant que le fait pour ce dernier de se prévaloir à présent d’un nouveau pouvoir pour agir en justice n’est pas constitutif d’un élément nouveau de nature à lui permettre d’échapper aux dispositions de l’article 1355 du code civil, un tel événement n’étant pas de nature à modifier la situation antérieurement reconnue en justice. Il expose que le syndicat pouvait, même en cause d’appel, mettre en ordre sa procédure pour éviter son irrecevabilité et faute de l’avoir fait, l’irrecevabilité est irrémédiable, aucun événement postérieur, étranger à l’appelant, auteur de la procédure mal conduite, n’étant démontré.


Il ajoute que:


- le syndicat prétend que l’appel du jugement du 09 juin 2015 était sans fondement le concernant, reconnaissant implicitement que la présente procédure n’est pas fondée puisqu’elle concourt aux mêmes fins que la première,


- l’objet de la présente procédure est strictement le même que celui, objet du jugement susvisé et accepté par le syndicat des copropriétaires, dès lors que les demandes qu’il avait formulées ne consistaient pas être simplement relevé et garanti d’éventuelles condamnations mais bien au contraire de tirer les conséquences pécuniaires de la responsabilité des requis et à obtenir des dommages et intérêts.


Il considère également que la demande du syndicat est irrecevable comme étant prescrite, faute d’avoir été engagée avant le 04 juin 2015 dès lors qu’il est établi que celui-ci était informé que sa responsabilité était recherchée depuis l’assignation qui lui avait été délivrée le 04 juin 2010. Il fait valoir que l’appelant ne peut pas davantage se prévaloir de la responsabilité décennale des articles 1792 et suivants, faute d’indiquer en quoi un géomètre pourrait être qualifié de constructeur de l’ouvrage.


A titre subsidiaire, il estime que le rapport d’expertise judiciaire lui est inopposable, ce qui a d’ailleurs été admis par la cour de céans dans son arrêt du 20 octobre 2016 et qu’en toute hypothèse, le syndicat ne rapporte pas la preuve d’une quelconque faute qu’il aurait commise, qu’il ne saurait en effet être responsable d’un débord survenu en sous-sol et en hauteur alors que les mesures qu’il a réalisées en surface sont parfaitement valides. Il ajoute que dans sa décision du 20 octobre 2016, la cour d’appel n’a pas retenu une quelconque faute à son encontre, puisqu’elle a considéré que le rapport d’expertise lui était inopposable et que en tout état de cause, l’expert judiciaire ne remettait en cause l’implantation faite par le géomètre-expert.


Invoquant les dispositions de l’article 1199 du code civil, il souligne que le protocole d’accord du 29 mars 2016 ne lui est pas non plus opposable et qu’il ne peut se voir condamner à en assumer les conséquences.

M. E A, ès qualité de liquidateur de la SCCV LE BELVEDERE, par ses dernières conclusions signifiées le 04 octobre 2019, demande à la cour de:


- constater que la SCCV LE BELVEDERE a été radiée du registre du commerce et des sociétés à effet du 31 mai 2013 et n’a donc plus d’existence depuis cette date,


- constater que M. E A n’est par conséquent plus liquidateur amiable de la SCCV LE BELVEDERE et qu’il ne peut être poursuivi en cette qualité,


- dire et juger irrecevable toute demande dirigée à l’encontre de M. E A, ès qualité de liquidateur de la SCCV LE BELVEDERE,


- condamner tout succombant aux entiers frais et dépens.


Il soutient que le syndicat des copropriétaires l’a assigné, es qualité de liquidateur de la SCCV LE BELVEDERE, que ladite société n’a plus d’existence légale comme ayant été radiée du registre du commerce et des sociétés le 26 juin 2013, qu’il n’en est donc plus liquidateur amiable, toute demande dirigée à son encontre étant irrecevable.


La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 04 janvier 2022.

MOTIFS


Les intimés concluent à l’irrecevabilité des demandes du syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE comme se heurtant à l’autorité de la chose jugée attachée au jugement du tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence du 09 juin 2015.


En application de l’article 1355 du code civil ( ancien article 1351), l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même; que la demande soit fondée sur la même cause; que la demande soit entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité.


L’autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des éléments postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice.


Cette limite à l’irrecevabilité suppose néanmoins de caractériser la nouveauté du fait justifiant d’écarter l’autorité de la chose jugée.


Le caractère nouveau de cet événement permettant d’échapper à cette fin de non recevoir ne peut résulter de ce que la partie qui l’invoque a négligé d’accomplir une diligence en temps utile.


En l’espèce, il n’est pas contesté que par jugement du 09 juin 2015, le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence a notamment:


- condamné, sous astreinte, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE à faire réaliser les travaux préconisés par l’expert judiciaire B, afin mettre fin à l’empiètement,


- condamné M. E A à payer à M. et Mme X la somme de 12.000 € à titre de dommages et intérêts au titre de la perte d’une chance d’obtenir réparation de leur préjudice,


- déclaré irrecevables les demandes formulées par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE, pour défaut d’autorisation de l’assemblée générale habilitant le syndic à ester en justice.

M. A a interjeté appel de cette décision, intimant les époux X, Mme Y, la MAF et M. Z.


Si conformément à l’article 55 du décret du 17 mars 1967, le syndic ne peut ester en justice devant le juge du fond sans y avoir été habilité par l’assemblée générale des copropriétaires, la régularisation de la procédure est possible, en tout état de cause, et même en appel jusqu’à ce que le juge statue, à condition que l’habilitation du syndic intervienne avant l’expiration des délais de prescription et de forclusion de l’action.


Le syndicat des copropriétaires avait donc le pouvoir de convoquer une nouvelle assemblée générale pour régulariser la procédure, à tout moment et même devant la cour d’appel.


Il a ainsi été négligent à mettre de l’ordre dans sa procédure et ne peut prétendre qu’il n’était pas partie au procès en appel qui était sans fondement le concernant, sauf à admettre le bien fondé de la décision du tribunal le concernant et plus particulièrement en ce qu’il l’a condamné à effectuer des travaux sous astreinte mais surtout à déclarer irrecevables ses demandes reconventionnelles présentées à l’encontre de M. A, Mme Y, la MAF et M. Z pour un motif auquel il pouvait précisément remédier devant la cour d’appel.


C’est donc à juste titre que le premier juge a retenu que le syndicat des copropriétaires ne pouvait se prévaloir de l’habilitation nouvellement donnée comme étant un élément nouveau permettant de faire l’échec à l’autorité de la chose jugée attachée à la décision du 09 juin 2015, en ce que cet événement n’est que la conséquence de sa négligence à accomplir les diligences en temps utile.


Le syndicat des copropriétaires soutient que les demandes formulées dans le cadre de cette nouvelle instance sont radicalement différentes de celles qu’il avait présentées et ayant donné lieu au jugement susvisé, de sorte que si le litige oppose bien les mêmes parties, il n’y a pas d’identité de cause et d’objet.


Or, il ressort de la motivation du jugement du 09 juin 2015 que les demandes alors formulées par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE ne consistaient pas à être seulement relevé et garanti des éventuelles condamnations prononcées à son encontre mais visaient à obtenir des avantages distincts, à savoir la condamnation de M. A, de M. Z, de Mme Y et de la MAF à lui verser des dommages et intérêts et par conséquent à tirer les conséquences pécuniaires de la responsabilité de ces différents intervenants dans le dommage subi par les époux X et au regard de la décision du tribunal.
Les demandes que l’appelant présente dans le cadre de cette seconde instance le sont à l’encontre de ces mêmes parties et en leur même qualité, puisqu’il s’agit d’obtenir des dommages et intérêts au regard des différentes fautes commises par chacune d’entre elles suite au jugement du 09 juin 2015 ayant consacré le principe de leur responsabilité notamment à son égard.


L’objet de la présente procédure est strictement la même que celui ayant donné lieu au jugement querellé, de même que la cause est identique, obtenir une indemnisation des intervenants à l’opération de construction pour son préjudice résultant des fautes commises par ces derniers et à l’origine de l’empiètement dénoncé par les époux X. La signature, entre-temps, d’un protocole transactionnel entre ces derniers et le syndicat des copropriétaires a certes eu pour conséquence de modifier le quantum des demandes de dommages et intérêts réclamés par le syndicat des copropriétaires entre les deux instances mais une telle circonstance est sans incidence sur l’objet et la cause qui restent identiques.


Dans ces conditions, le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes du syndicat du copropriétaires comme se heurtant à l’autorité de la chose jugée attachée au jugement du 09 juin 2015 du tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence, sera confirmé.


Vu l’article 700 du code de procédure civile,


Vu l’article 696 du code de procédure civile,

PAR CES MOTIFS


La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,


Confirme le jugement du tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence déféré en toutes ses dispositions,


Y ajoutant,


Condamne le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE à payer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, les sommes de:


- 1.500 € à Mme D Y et la MAF,


- 1.500 € à M. C Z,


Constate que M. E A ne formule aucune demande au titre des frais irrépétibles,


Condamne le syndicat des copropriétaires de l’immeuble LE BELVEDERE aux dépens de la procédure d’appel qui pourront être recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.


Le greffier Le président
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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-5, 3 mars 2022, n° 19/05774