Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 20 février 2020, n° 17/02210

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 2e ch. civ., 20 févr. 2020, n° 17/02210
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 17/02210
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Angoulême, 15 mars 2017, N° 16/02572
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE


ARRÊT DU : 20 FEVRIER 2020

(Rédacteur : Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller)

N° RG 17/02210 – N° Portalis DBVJ-V-B7B-JY2X

Madame C Y

c/

Madame E F

EURL COGNAC DIAGNOSTICS

SARL SUBERVIE ASSURANCES

SA MMA IARD

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 16 mars 2017 (R.G. 16/02572) par le Tribunal de Grande Instance d’Angoulême suivant déclaration d’appel du 10 avril 2017

APPELANTE :

C Y

née le […] à DOVER

de nationalité Britannique

Enseignante,

demeurant […]

Représentée par Me DUPLESSIS substituant Me Laurent BENETEAU, avocat au barreau de CHARENTE

INTIMÉES :

E F

née le […] à GUILFORD

de nationalité Française

Profession : Graphiste,

demeurant […]

Représentée par Me Jean-david BOERNER de la SCP H. BOERNER J.D. BOERNER, avocat au barreau de BORDEAUX

EURL COGNAC DIAGNOSTICS prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis […]

Représentée par Me TOSTIVINT de la SCP LAYDEKER – SAMMARCELLI, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me Jean-Marc PEREZ de la SELARL HP & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

SARL SUBERVIE ASSURANCES prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis […]

Représentée par Me TOSTIVINT de la SCP LAYDEKER – SAMMARCELLI, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me Jean-Marc PEREZ de la SELARL HP & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

INTERVENANTES :

SA MMA IARD immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LE MANS, sous le numéro 440 048 882, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis […]

Représentée par Me TOSTIVINT de la SCP LAYDEKER – SAMMARCELLI, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me Jean-Marc PEREZ de la SELARL HP & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LE MANS, sous le numéro 775 652 126 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis […]

Représentée par Me TOSTIVINT de la SCP LAYDEKER – SAMMARCELLI, avocat au barreau de BORDEAUX

et assistée de Me Jean-Marc PEREZ de la SELARL HP & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 janvier 2020 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Roland POTEE, Président, et Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller chargé du rapport,

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Roland POTEE, Président,

Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller,

Madame Catherine LEQUES, Conseiller,

Greffier lors des débats : Mme Audrey COLLIN

Greffier lors du prononcé : Mme Annie BLAZEVIC

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Suivant compromis de vente en date du 04 septembre 2013 suivi d’un acte authentique du 15 novembre 2013, madame E F née X a acquis de madame C B épouse Y une maison d’habitation située au […]-les-Carrieres (16720). L’acte authentique de vente a été régularisé le 15 novembre 2013.

Un rapport sur l’état relatif à la recherche de termites, annexé à l’acte notarié, a été établi le 08 février 2012 et prorogé le 03 septembre 2013 par Monsieur Z, gérant de l’EURL Cognac Diagnostics (EURL Cognac), entreprise assurée au titre de sa responsabilité civile professionnelle par la société Subervie Assurances (société Subervie).

Après avoir pris possession des lieux, Mme X indique avoir été interpellée par des bruits dans la poutraison et la présence de poussière de bois sur le plancher de la salle à manger. Elle a fait appel au cabinet d’expertise Casabat qui est intervenu les 21 novembre 2014 et 23 février 2015 et a déposé un rapport le 25 janvier 2015.

Le 25 novembre 2014, l’acquéreur a dénoncé par lettre recommandée avec accusé de réception l’existence des désordres à l’assureur de I’EURL Cognac, avec copie à M. Z. Elle a ensuite mis en demeure l’assureur, suivant courrier recommandé du 08 janvier 2015, de formuler sous quinzaine une proposition d’indemnisation.

Ultérieurement saisi par Mme X, le juge des référés du tribunal de grande instance d’Angoulême a, suivant ordonnance en date du 03 juin 2015, désigné M. A en qualité d’expert.

Ce dernier a déposé son rapport définitif le 19 juillet 2016.

Par actes des 24 et 25 octobre 2016, Mme X a assigné Mme B, les sociétés Cognac et Subervie afin d’obtenir à titre principal la résolution et à défaut, la nullité de la vente du bien immobilier et en conséquence la restitution du prix de vente, en ce compris les frais de notaire, soit la somme de 236.430 €, assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation et jusqu’à complet règlement. Elle a également réclamé la condamnation in solidum de celles-ci au versement des sommes:

—  11.485,87 € à titre de dommages et intérêts représentant les frais inutilement exposés ;

—  22.786,80 € au titre de travaux de mise en sécurité du bâtiment ;

—  700 € par mois à compter de novembre 2015 jusqu’au paiement des dommages et intérêts, au titre de frais de relogement, outre le remboursement de la somme de 1.700€ exposée pour le relogement de juillet et août 2016 ;

—  252 € au titre de frais de déplacement et de gardiennage de son cheval ;

—  1.047 € au titre de la taxe foncière 2016 ;

—  10.000 € à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral ;

—  6.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement réputé contradictoire en date du 16 mars 2017, le tribunal de grande instance d’Angoulème a :

— prononcé la résolution de la vente intervenue entre mesdames X et Y ;

— condamné Mme B à restituer à Mme X le prix de vente, en ce compris les frais de notaire, soit la somme de 236.430 € assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de la décision et jusqu’à complet règlement, Mme X mettant à la disposition de Mme B le bien immobilier ;

— dit que les intérêts ainsi échus produiront eux-mêmes intérêts dès lors qu’ils auront couru au moins pour une année entière ;

— ordonné la publication du jugement au service de la publicité foncière aux frais de Mme B ;

— condamné in solidum Mme B, l’EURL Cognac et la S.A.R.L. Subervie à verser à Mme X les sommes de :

—  10.077,83 € en indemnisation de ses préjudices ;

—  700 € par mois à compter de novembre 2015 jusqu’au paiement des dommages et intérêts ;

—  3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— dit n’y avoir lieu au prononcé de l’exécution provisoire ;

— condamné in solidum Mme B, l’EURL Cognac et la S.A.R.L. Subervie aux entiers dépens.

Mme B a relevé appel de cette décision le 10 avril 2017.

Par ordonnance du 25 avril 2018, le conseiller de la mise en état s’est déclaré incompétent pour statuer sur l’intervention volontaire des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles et la mise hors de cause de la S.A.R.L. Subervie. Cette décision a également rejeté la demande d’expertise présentée par Mme X.

Dans ses dernières conclusions en date du 18 octobre 2018, l’appelante demande à la cour, au visa des articles 1116, 1641 et suivants du code civil, 16 et 444 du code de procédure civile, 6§1 de la convention européenne des droits de l’homme sur le droit à un procès équitable, 28 et suivants du décret n°55-22 du 4 janvier 1955, L271-4 du code de la construction et de l’habitation, de :

In limine litis :

— dire que le principe du contradictoire n’a pas été respecté dans le cadre de la procédure initiée devant le tribunal de grande instance d’Angoulème ;

— prononcer l’irrecevabilité de l’assignation en résolution de la vente initiée par Mme X ;

— déclarer par conséquent le jugement attaqué nul et de nul effet ;

— donner acte à la SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de leur intervention volontaire, es-qualité d’assureurs responsabilité civile professionnelle de la S.A.R.L. Cognac ;

— débouter purement et simplement les intimées et les intervenantes volontaires de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

Subsidiairement :

— réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

— juger, à titre principal, que la clause d’exclusion de garantie des vices cachés stipulée aux termes de l’acte de vente doit pleinement trouver à s’appliquer au regard de sa bonne foi et débouter par conséquent Mme X de toutes ses demandes à son égard;

— dire que la société Cognac a manifestement manqué à l’obligation de résultat qui lui incombait au titre de sa mission et la condamner, in solidum avec la S.A.R.L. Subervie, ou à défaut avec la SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, à la relever indemne de toute condamnation prononcée au profit de Mme X ;

— dire, à titre infiniment subsidiaire, que Mme X a commis une faute à l’origine des préjudices dont elle se prévaut en n’exécutant aucun traitement curatif suffisant contre les termites et en ne permettant pas aux parties d’y procéder elles-mêmes pour le compte de qui il appartiendra, ce qui exclut son droit à indemnisation ainsi qu’au remboursement éventuel du prix, et l’en débouter ;

En tout état de cause :

— débouter purement et simplement les intimées et les intervenantes volontaires de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires ;

— condamner in solidum Mme X, les sociétés Cognac, Subervie ou à défaut les SA MMA Iard et MMA Iard Assurance Mutuelles à lui verser la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Suivant leurs dernières écritures en date du 19 décembre 2017, l’EURL Cognac et les sociétés Subervie, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, qui souhaitent être déclarées recevables en leur intervention volontaire en leur qualité d’assureur RCP de la société Cognac, demandent à la cour, au visa de l’article 328 du code de procédure civile, de :

— prononcer la mise hors de cause de la S.A.R.L. Subervie ;

A titre principal :

— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

— prononcé la résolution de la vente intervenue entre Madame X et Mme B,

— condamné Mme B à restituer le prix de vente, soit la somme de 236.430 € ;

— infirmer le jugement entrepris pour le surplus ;

— ramener les demandes financières de Mme X à de plus justes proportions ;

A titre subsidiaire :

— dire que le montant des sommes réclamées par Mme X au titre de son action estimatoire ne saurait excéder celui des sommes retenues par l’expert judiciaire au titre des travaux de reprise des désordres ;

— ramener ses demandes financières à de plus justes proportions, les devis versés aux débats constituant une très nette amélioration de l’existant ;

En tout état de cause :

— condamner l’appelante à leur payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions du 10 octobre 2018, Mme X demande à la cour, au visa des articles 126 du code de procédure civile, 1641 et suivants, 1116, 1382 du code civil, de :

— confirmer le jugement rendu le 16 mars 2017 en ce qu’il a ordonné la résolution de la vente et retenu la responsabilité de Mme B et de la société Cognac mais le réformer conformément au dispositif ci- dessous ;

Sur la demande d’annulation du jugement :

— dire que le tribunal a respecté le principe du contradictoire ;

— constater que le défaut de publication de l’assignation constitue une fin de non-recevoir toujours régularisable et qu’elle a procédé à ladite publication ;

— rejeter en conséquence la demande d’annulation du jugement formulée par l’appelante;

— Subsidiairement, en vertu de I’effet dévolutif de I’appel, statuer sur le fond du litige,

A titre principal :

— confirmer le jugement entrepris ayant :

— fait application de la garantie des vices cachés et ordonné la résolution de la vente ;

— retenu la responsabilité de l’EURL Cognac ;

— En tout état de cause, dire et juger que Mme B s’est rendue coupable d’un dol justifiant la nullité de cette vente ;

— condamner l’appelante à lui payer le prix de vente de la maison la somme de 236.430€, comprenant les frais de notaire, avec intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation au référé du 8 avril 2015 ;

— dire que les intérêts ainsi échus produiront eux même intérêts dés lors qu’ils auront couru au moins pour une année entière en application de l’article 1343-2 du code civil;

— ordonner la publication du jugement à intervenir au service de la publicité foncière aux frais de Mme B ;

— réformer le jugement déféré n’ayant fait droit que partiellement à ses demandes indemnitaires ;

— dire par ailleurs qu’elle n’a commis aucune faute de nature à exclure ou limiter son droit à indemnisation ;

— condamner in solidum Mme B, les sociétés Cognac, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à lui verser les sommes suivantes :

—  22.786,80 € au titre des travaux de mise en sécurité du bâtiment ;

—  11.485,87 € au titre des frais exposés inutilement ;

— I. 610,49 € au titre des frais exposés pour l’entretien de la maison inhabitée ;

—  1.074,00 € au titre de la taxe foncière ;

—  252 € au titre des frais de pension du cheval ;

—  988 € au titre des frais de traduction et d’expert conseil ;

—  20.000 € au titre du préjudice moral ;

—  23.100 € au titre des loyers dus de novembre 2015 à septembre 2018, à I’exception de juillet et août 2016 (700 € par mois X 33 mois) ;

— I.878 € au titre des loyers dus pour les mois de juillet et août 2016 ;

lesdites sommes augmentées des intérêts au taux légal depuis la date de l’assignation en référé du 8 avril 2015, outre la capitalisation des intérêts ;

—  700 € par mois à compter de la date des présentes conclusions jusqu’au jour du paiement par l’appelante, les sociétés Cognac, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles de la somme de 236.430 € ;

—  8.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamner in solidum Mme B, les sociétés Cognac, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles aux entiers dépens, en ce compris ceux de référé, de première instance, ainsi que les frais d’expertise.

A titre subsidiaire :

— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a retenu la responsabilité de l’EURL Cognac;

— Ordonner une mesure d’expertise pour chiffrer le coût actuel et à ce jour des travaux de remise en état et surseoir à statuer sur cette demande ;

A titre très subsidiaire :

— condamner in solidum les sociétés Cognac, MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à lui verser :

— les sommes visées ci-dessus en réparation du préjudice subi, outre 130.670,66€ au titre des travaux de reprise, augmentée des intérêts de droit depuis le rapport de l’expert A du 19 juillet 2016 et de la capitalisation des intérêts au sens de l’article 1343-2 du code civil ;

— une somme de 8.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamner in solidum les sociétés Cognac, Mma Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles aux entiers dépens comprenant ceux de référé, de première instance, ainsi que les frais d’expertise.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 décembre 2019.

MOTIVATION

Sur la demande d’annulation du jugement

L’avocat mandaté par Mme B soutient ne pas avoir été en mesure de se constituer en première instance dans le délai imparti par le code de procédure civile, arguant d’une erreur de saisie commise par les services du greffe lors de l’enregistrement du dossier sur le logiciel dédié et d’une communication d’une mauvaise information de la part de celui-ci.

S’il apparaît effectivement que le dossier informatique du tribunal de grande instance a comporté une erreur initiale quant à l’orthographe du nom de famille de l’auteur de l’assignation, aucun élément ne vient attester la tardiveté de la réparation de cette erreur de saisie qui aurait empêché le conseil de la venderesse d’avoir accès aux informations utiles pour sa constitution. Il sera ajouté qu’une simple recherche informatique à partir du nom de famille de sa cliente aurait permis à son conseil de disposer des informations nécessaires. Enfin, l’avocat de Mme B ne justifie s’être rapproché du conseil de Mme X que très tardivement, soit près de quatre mois après la date de délivrance de l’acte introductif d’instance.

En conséquence, il ne peut être reproché au jugement attaqué d’avoir violé le principe du contradictoire et ignoré le droit à un procès équitable en refusant d’ordonner la réouverture des débats, le conseil de Mme B ne pouvant plus se constituer en raison de la tardiveté de sa démarche. La décision déférée ne sera dès lors pas annulée.

Sur la publication de la demande en résolution de la vente du bien immobilier

L’article 28 du décret n°55-22 du 4 janvier 1955 relatif à la publicité foncière prévoit que sont obligatoirement publiés au service chargé de la publicité foncière de la situation de l’immeuble les actes et décisions judiciaires, énumérés ci-après, lorsqu’ils portent sur des droits soumis à publicité (') : c) les demandes en justice tendant à obtenir, et les actes et décisions constatant, la résolution, la révocation, l’annulation ou la rescision d’une convention ou d’une disposition à cause de mort.

L’article 30.5 de ce texte indique que les demandes tendant à faire prononcer la résolution, la révocation, l’annulation ou la rescision de droits résultant d’actes soumis à publicité ne sont recevables devant les tribunaux que si elles ont été elles-mêmes publiées conformément aux dispositions de l’article 28-4 c) et s’il est justifié de cette publication par un certificat du service chargé de la publicité foncière ou la production d’une copie de la demande revêtue de la mention de publicité.

Mme X admet n’avoir seulement procédé qu’au cours de l’instance d’appel à la publication de son assignation introductive d’instance dans laquelle elle sollicitait à titre principal le prononcé de la résolution de la vente du bien immobilier, reconnaissant ainsi que cette formalité impérative n’a pas été accomplie au stade de la première instance.

L’appelante estime tardive la régularisation opérée par l’acquéreur et soulève en conséquence l’irrecevabilité de la demande de résolution.

Cette argumentation sera cependant écartée. L’article 126 du code de procédure civile ne fait en effet aucune distinction entre la procédure de première instance et celle d’appel de sorte que la demande de publication au service de la publicité foncière de l’assignation dans laquelle la résolution de la vente d’un bien immobilier est sollicitée peut intervenir pour la première fois en cause d’appel (arrêt de la troisième chambre civile du 15 novembre 1989).

En conséquence, la demande principale présentée par Mme X est recevable.

Sur la demande en résolution de la vente

L’expert judiciaire indique que de nombreuses parties du bien acquis par Mme X sont affectées par la présence de termites. L’ensemble des niveaux 0 et 1 du corps principal du bâtiment est très affecté par les termites. Il estime que l’intégralité du corps principal de l’immeuble est entièrement infesté et très dégradé par les termites souterrains.

La dépendance située dans la cour est également atteinte.

Ces éléments, inconnus de l’acquéreur à la date de la conclusion de la transaction immobilière, attestent la présence d’un vice dont la gravité est établie dans la mesure où le bien immobilier est impropre à l’habitation. L’existence d’un risque sécuritaire très important lié au risque d’effondrement de l’ensemble du plancher du niveau 1 est expressément soulignée par M. A. Le bien vendu apparaît donc impropre à sa destination.

Mme B conteste le caractère ancien de l’infestation en remettant en cause la crédibilité des conclusions expertales.

Il est inexact d’affirmer que le spécimen précis d’insectes xylophages n’a pas été précisé dans le rapport d’expertise alors qu’il est clairement fait état de la présence de termites souterrains de la famille Rhinotermitidae, du genre Réticulitermes. Il sera simplement ajouté que les parties ne contestent pas la réalité du phénomène d’infestation.

En outre, l’appelante ne peut remettre en cause les calculs opérés par M. A, effectués

en fonction de ses constations objectives des lieux infestés, en formulant des hypothèses purement théoriques qui ne tiennent pas compte de l’étendue des zones contaminées et ne prennent pas en considération le nombre important de termites déjà présents.

Les éléments permettant d’affirmer que Mme B connaissait la réalité de l’infestation ne sont pas suffisamment démontrés.

Mme B a acquis le bien immobilier concerné le 25 octobre 2001.

La page 8 de l’acte notarié mentionne la présence d’indices d’infestation de termites sans activité.

Mme B affirme avec une certaine logique, sans pouvoir être contestée sur ce point, avoir entrepris un traitement curatif l’année suivante. L’expert judiciaire a d’ailleurs noté de nombreuses traces de la mise en place de dispositifs ayant pour objectif de lutter contre les insectes nuisibles sans qu’il puisse déterminer s’il s’agit de ceux installés en 2002 par l’appelante ou en 2014 par la société mandatée par Mme X. A l’issue de cette opération, elle était donc en droit de considérer comme éradiquée toute infestation.

M. A a également observé dans la maison la présence de dégradations dues aux termites rebouchées à l’aide d’un plâtre peint de même que la présence dans la dépendance d’une latte de lambris masquant la déterioration du plancher.

Il n’est objectivement pas possible de déterminer si ces travaux ont été entrepris par Mme B à la suite du traitement mis en oeuvre en 2002 ou par les propriétaires antérieurs du bien immobilier.

Des photographies versées aux débats par l’appelante attestent l’absence de toute trace de peinture sur la poutre à la date de son occupation du bien immobilier. Certes, leur datation demeure incertaine mais l’ancienneté manifeste de ces clichés apparaît compatible avec cette affirmation.

Il n’est donc pas démontré que la venderesse a tenté de masquer l’infestation à Mme X.

Surtout, il convient de relever que le jugement attaqué a négligé à tort l’importance du rapport de diagnostic de l’EURL Cognac du 3 septembre 2013 qui concluait à l’absence d’insectes nuisibles ou de traces de contamination. Ayant été en possession de ce document qui est d’ailleurs annexé à l’acte de vente, la venderesse ne pouvait qu’être convaincue de l’absence de toute infestation de son bien immobilier.

L’affirmation péremptoire de l’expert judiciaire selon laquelle l’appelante connaissait la présence de termites et l’étendue de la contamination de sa maison d’habitation et de sa dépendance (cf p27) n’est donc pas étayée.

Dans l’ignorance du phénomène d’infestation, Mme B ne peut dès lors se voir reprocher d’avoir volontairement omis d’en informer l’acquéreur du bien immobilier. Elle ne s’est donc pas rendue coupable de réticences dolosives.

En conséquence, Mme B peut à bon droit se prévaloir de la clause d’exclusion des vices cachés figurant à l’acte notarié du 15 novembre 2013. La décision entreprise ayant ordonné la résolution de la vente du bien immobilier et condamné la venderesse à indemniser Mme X au titre de divers préjudices sera donc infirmée sur ces points.

Sur la responsabilité de l’EURL Cognac et la garantie de son assureur

L’article L 271-4 du code de la construction et de l’habitation énonce que le dossier de diagnostic technique annexé à la promesse de vente ou à l’acte authentique de vente d’un immeuble garantit l’acquéreur contre le risque mentionné au 3° du deuxième alinéa du I de ce texte.

Mme X recherche à titre subsidiaire la responsabilité du diagnostiqueur sur le fondement de l’article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance numéro 2016-131 du 10 février 2016.

L’EURL Cognac a établi deux rapports intitulés 'état du bâtiment relatif à la présence de termites'. Le premier est daté du 8 février 2012 alors que le second, improprement qualifié de 'prorogation', porte la date du 3 septembre 2013. Ce dernier document a été annexé à l’acte de vente.

En tant que professionnelle, l’EURL Cognac se devait de respecter la mission qui lui était confiée en conformité avec la norme NF P 03-201.

Or, son gérant a admis devant l’expert judiciaire n’avoir sondé que le plancher bas du salon-salle à manger. Il a ainsi reconnu ne pas avoir procédé à des vérifications du solivage, de la poutre centrale mais également des planchers et boiseries du premier étage.

Ainsi, il est établi que l’état parasitaire du 3 septembre 2013 contient des informations erronées.

Ces éléments traduisent l’attitude fautive de la société chargée du diagnostic qui a agi au mépris des dispositions contenues dans la loi 99-471 du 8 juin 1999 protégeant les vendeurs et acquéreurs de biens immobiliers contre les insectes xylophages, mais également de l’arrêté du 29 mars 2007 et de la norme précitée. Sa responsabilité civile est dès lors engagée.

Au regard de l’importance de l’infestation soulignée par l’expert judiciaire et des risques d’effondrement du premier étage de l’immeuble, il est établi que Mme X n’aurait pas acquis le bien immobilier si l’EURL Cognac avait conclu à la présence de termites en procédant à des recherches efficientes et complètes.

Il résulte des pièces versées aux débats que le diagnostiqueur était en réalité assuré au titre de sa responsabilité civile professionnelle auprès de la compagnie MMA. La S.A.R.L. Subervie, simple intermédiaire d’assurance, doit donc être mise hors de cause.

L’intervention volontaire des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles n’est pas contestée.

L’assureur de l’EURL Cognac reconnaît devoir sa garantie mais sollicite la minoration des sommes réclamées par Mme X.

Le préjudice certain de l’acquéreur est constitué du coût des réparations nécessitées par l’éradication de l’infestation (arrêt la troisième chambre civile de la cour de cassation du 15 octobre 2015) mais également du trouble de jouissance consécutif à cette situation (arrêt de la même juridiction du 7 mars 2019).

Aucun élément ne permet d’indiquer que Mme X a contribué à l’aggravation de la dégradation de son bien immobilier en abandonnant tout traitement curatif alors que l’expert judiciaire note dans son rapport qu’elle a très rapidement fait appel à une société spécialisée qui a vainement tenté de contenir le phénomène d’infestation. De même, Il ne peut lui être reproché d’avoir seulement pris possession de son bien immobilier plusieurs mois après la

date de la conclusion de la vente alors qu’elle ignorait l’existence de l’infestation et sa gravité.

Les éléments permettant de chiffrer l’étendue du préjudice de Mme X apparaissent suffisants sans qu’il soit utile d’ordonner une mesure d’expertise afin de déterminer le coût actuel des travaux de remise en état du bien immobilier.

Doivent donc être pris en considération :

— le coût du traitement de lutte contre les insectes xylophages réalisé par la société SAPA (2.876,83 € TTC) ;

— la dépense liée à la mise en oeuvre urgente d’un lourd traitement préconisé par l’expert judiciaire et chiffré par celui-ci à la somme de 9.600 € TTC ;

— les frais inhérents aux travaux de reprise non urgents estimés par l’expert, au regard des deux devis de la société Renovia, à la somme de 132.184,04 € TTC ;

— le coût de mise en sécurité du bien avant l’intervention de la société SAPA par la mise en place d’étais et de plots (13.186,80 €) .

Le total des sommes mentionnées ci-dessus représente un montant de 157.847,67 € TTC.

Le préjudice de jouissance, bien que non réclamé sous cette appellation par l’acquéreur, apparaît très important. Le bien immobilier est inhabitable à l’heure actuelle depuis la date des travaux de M. A, le risque d’effondrement du premier étage expliquant notamment cette situation. Il est avéré que Mme X a dû exposer des frais de relogement, tant d’elle-même que de son cheval. Ces éléments permettent de chiffrer le préjudice à la somme de 15.000 €.

Les autres montants réclamés par Mme X n’apparaissent pas directement en lien avec la faute commise par l’EURL Cognac et ne sont dès lors pas susceptibles d’indemnisation.

En définitif, le montant total du préjudice de l’acquéreur du bien immobilier représente la somme de 172.847,67 €.

Cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la date de l’assignation en justice délivrée à Mme B devant le tribunal de grande instance et non devant le juge des référés.

La capitalisation des intérêts, réclamée par Mme X, est de droit et sera ordonnée.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

La décision de première instance sera totalement infirmée. En cause d’appel, il y a lieu de condamner in solidum l’EURL Cognac, la SA MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles, à payer à Mme B la somme de 2.000 € et à Mme X la somme de 3.000 €. Les autres demandes seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

— Rejette la demande en nullité du jugement en date du 16 mars 2017 rendu par le tribunal de grande instance d’Angoulème ;

— Déclare recevable la demande en résolution de la vente du bien immobilier situé au numéro

[…] dans la commune de Saint- Meme-les-Carrieres (16720) présentée par madame E F née X ;

— Infirme en toutes ses dispositions le jugement en date du 16 mars 2017 rendu par le tribunal de grande instance d’Angoulème et, statuant à nouveau :

— Reçoit l’intervention volontaire des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles ;

— Rejette les demandes présentées par madame E F née X à l’encontre de madame C B épouse Y et de la S.A.R.L. Subervie ;

— Met hors de cause la société Subervie Assurances ;

— Rejette la demande d’expertise présentée par madame E F née X ;

— Condamne l’EURL Cognac Diagnostics, sous la garantie de la SA MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles, à payer à madame E F née X la somme de 172.847,67 euros (cent soixante douze mille huit cent quarante-sept euros et soixante-sept centimes) à titre de dommages et intérêts ;

— Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 24 octobre 2016 ;

— Ordonne la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;

Y ajoutant ;

— Condamne in solidum l’EURL Cognac Diagnostics, la SA MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles, à verser à madame C B épouse Y une somme de 2.000 euros (deux mille euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamne in solidum l’EURL Cognac Diagnostics, la SA MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles, à verser à madame E F née X une somme de 3.000 euros (trois mille euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Rejette les autres demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamne in solidum l’EURL Cognac Diagnostics, la SA MMA Iard et la société MMA Iard Assurances Mutuelles au paiement des dépens de première instance et d’appel comprenant les frais d’expertise judiciaire.

L’arrêt a été signé par Roland POTEE, Président et par Annie BLAZEVIC, Greffier auquel il a remis la minute signée de la décision.

Le Greffier, Le Président,

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Cour d'appel de Bordeaux, 2ème chambre civile, 20 février 2020, n° 17/02210