Cour d'appel de Paris, 3 juillet 2012, n° 11/08630

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  • Participation

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 3 juill. 2012, n° 11/08630
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 11/08630
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 30 mars 2011, N° 08/045483

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 8

ARRÊT DU 03 JUILLET 2012

(n° , pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 11/08630

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Mars 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 08/045483

APPELANT

Monsieur O V W C

XXX

XXX

Représenté et assisté par la SCP BOLLING – DURAND – LALLEMENT (Me Didier BOLLING) (avocats au barreau de PARIS, toque : P0480)

et Me Marie Claude ALEXIS

INTIMES

Monsieur Z A

XXX

XXX

Représenté par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS (avocat au barreau de PARIS, toque : B1055)

Monsieur M B

XXX

CLOS DE LA PRAIRIE

XXX

Représenté par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS (avocat au barreau de PARIS, toque : B1055)

Madame S X divorcée C

XXX

XXX

XXX

K L prise en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

Représenté et assisté par la SCP Jeanne BAECHLIN (Me Jeanne BAECHLIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0034)

et de Me Alain GALISSARD (avocat au barreau de Marseille)

SAS VIVERIS MANAGEMENT prise en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

Représentée et assisté par la SCP Jeanne BAECHLIN (Me Jeanne BAECHLIN) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0034)

et de Me Alain GALISSARD (avocat au barreau de Marseille)

Société MEDICAL COMPUTERS COMMUNICATION CARAIBE 'MC3" prise en la personne de ses représentants légaux

XXX

XXX

XXX

Représenté et assisté de Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS – AVOCATS (avocat au barreau de PARIS, toque : B1055)

et de Me O HASTINGS et de Me Nicolas FAGUER

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 21 Mai 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie HIRIGOYEN, Présidente

Madame Evelyne DELBES, Conseiller

Monsieur Joël BOYER, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Marie-Claude HOUDIN

MINISTÈRE PUBLIC :

L’affaire a été communiquée au ministère public,

ARRÊT :

— réputé contradictoire

— rendu publiquement et par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Marie HIRIGOYEN, président et par Mme Alix DUPLESSY, greffier présent lors du prononcé.

La société Medical Computers Communications Caraïbe ci-après MC3, société anonyme à directoire et conseil de surveillance, est la société holding d’un groupe fondé en 1995 par MM. C, A et Z, ayant pour activité la distribution de matériel informatique. En 2006, elle contrôlait 17 filiales en zone Caraïbe, dans l’Océan indien, en Polynésie française et en Afrique et employait environ 180 salariés.

M. C était alors actionnaire majoritaire, détenant 51% du capital, et président du directoire.

Pour financer son projet de croissance, courant 2005, le groupe MC3 s’est rapproché de la société Viveris Management, gestionnaire du fonds commun de placement à risque K L. Au terme de la négociation, il a été convenu d’ une participation du K dans la société MC3 correspondant à un investissement de 2 millions d’euros. par souscription d’actions nouvelles et d’obligations convertibles.

Le 28 février 2007, un pacte d’actionnaires, accompagné d’un contrat d’émission d’obligations convertibles et d’une garantie d’actif et de passif. a été conclu entre les trois actionnaires principaux de la société MC3 qualifiés d’hommes clés ou de groupe fondateur, d’une part, et Viveris Management, d’autre part.

L’assemblée générale extraordinaire de la société MC3 du 28 février 2007 a approuvé la souscription à une augmentation de capital à hauteur de 999 896,50 € représentant 695 actions de préférence et l’émission d’un emprunt obligataire converti le 28 juin 2011 en actions de préférence à hauteur de 999 896,50 € représentant 695 obligations . Puis, l’assemblée générale extraordinaire du 30 mars 2007 a approuvé des apports en nature par les fondateurs.

A l’issue de ces opérations, M. C détenait 42 % du capital.

En vertu du pacte d’actionnaires, le conseil de surveillance était composé de Viveris Management, de M. A et de Mlle C, le directoire restant présidé par M. C et comprenant M. B.

Les relations au sein du directoire se sont dégradées notamment après que M. C eut émis deux notes en date des 27 février et 7 mars 2008 mettant en cause l’action des autres actionnaires lesquels y ont vu une démarche de déstabilisation et de discrédit contraire à l’intérêt social .

A la suite du conseil de surveillance du 22 mars 2008 au cours duquel était présenté un rapport faisant grief à M. C de ses initiatives personnelles méconnaissant le fonctionnement collégial du directoire et de fausses allégations auprès de tiers, M. C a été révoqué de son mandat de membre du directoire par l’assemblée générale du 31 mars 2008

C’est dans ces circonstances que, par acte du 14 mai 2008, M. C a assigné M. Z A, M. M B, la société MC3, le K L, la société Viveris Management en qualité de représentant du K L, la société Viveris intervenant volontairement à l’instance, puis qu’il a assigné Mme X, son ex-épouse au regard de l’indivision post-communautaire existant entre eux, aux fins d’obtenir l’annulation du pacte d’actionnaires et, par suite, des augmentations de capital des 28 février et 30 mars 2007, la mise sous séquestre de toutes les actions nouvelles émises, l’annulation de sa double révocation, la nomination d’un mandataire ad hoc ayant mission de gérer la société MC3 à la place des deux co-fondateurs, et la réparation de son préjudice.

M. C J ensuite contre les actionnaires une procédure de référé-expertise aux fins d’expertise de gestion qui sera rejetée, après l’échec d’une médiation, par ordonnance du 26 octobre 2009, puis déposera une plainte pour abus de biens sociaux, la société MC3, MM A et B déposant une plainte contre M. C du même chef.

Par jugement du 31 mars 2011, le tribunal de commerce de Paris a dit le K L, M. Z A, M. M B et la société MC3 recevables mais non fondés à soulever la nullité de l’assignation délivrée par M. O C, a donné acte à la Sas Viveris qu’aucune demande n’est formulée à son encontre, a mis celle-ci hors de cause, a débouté M. O C de sa demande tendant à la requalification du contrat du 28 février 2007 et de toutes demandes subséquentes, l’a encore débouté de ses demandes dirigées contre MM A et B pour révocation abusive et abus de majorité, l’a condamné à payer, à titre de dommages intérêts et pour procédure abusive, à la société MC3 la somme de 50 000 €, à MM. A, B et au K L, chacun, 1 €, et au titre des frais visés par l’article 700 du code de procédure civile, à la société MC3 la somme de 3 000 €, à M. A 5 000 €, à M. B, 5 000 €, au K L 3 000 € et à la société Viveris 1 000 €, a rejeté toutes autres demandes.

M. C a relevé appel de cette décision par déclaration du 9 mai 2011, intimant MM A et B, le K. L, la société Viveris Management, la société MC3 et Mme X.

Après rejet de l’incident aux fins de radiation fondée sur l’article 526 du code de procédure civile par ordonnance du conseiller de la mise en état du 15 mai 2012, dans le dernier état de la procédure, par conclusions d’appel en réplique et récapitulatives signifiées le 6 décembre 2011, M. C demande à la cour, outre divers constats, vu les articles 6 §1 de la Convention européenne des droits l’homme, l’article 1er du Protocole additionnel, les articles 1134 du code civil, 455 du code de procédure civile, 9-1 du code civil et l’article préliminaire du code de procédure pénale, d’infirmer le jugement déféré en ses dispositions le déboutant de ses demandes et le condamnant au profit des parties adverses et, statuant à nouveau, vu l’article 12 du code de procédure civile, de requalifier le contrat du 28 février 2007 en contrat de prêt, en conséquence, d’annuler la prise de participation du K L représenté par sa société de gestion Viveris Management, d’annuler voire de déclarer inopposable le pacte d’associés conclu le 28 février 2007 en ce qu’il entérine un changement de répartition dans le capital social de la société MC3, d’annuler l’ensemble des assemblées générales de la société MC3 des 28 février, 30 mars 2007, 22 mars 2008, 31 mars, 25 septembre, 4 novembre 2008, 26 mars2009, 30 septembre 2010 à 8 heures 30 et 30 septembre 2010 à 10 heures et 22 juin 2011, de remettre les associés de la société MC3 dans le même état où ils se trouvaient avant l’augmentation de capital, M. C redevenant titulaire de 51 % du capital, de condamner in solidum MM A et B à lui payer la somme de 300 000 € au titre de son préjudice matériel et 150 000 € au titre de son préjudice moral résultant de la violation du contrat du 28 février 2007 et plus spécialement de la convention de vote, prévue en page 6, subsidiairement dans l’hypothèse où la cour ne ferait pas droit à la demande de requalification du contrat, de condamner le K L, représenté par sa société de gestion Viveris Management à lui payer conjointement et solidairement avec MM A et B la somme de 300 000 € à titre de dommages intérêts pour son préjudice matériel et 150 000 € pour son préjudice moral, en tout état de cause, de condamner in solidum MM A et B à lui payer la somme de 300 000 € au titre de son préjudice moral du fait de sa révocation abusive et, en outre, 400 000 € au titre de son préjudice matériel et 150 000 € au titre du préjudice moral subi compte tenu de l’abus de majorité dont il a été victime, de condamner in solidum MM A et B ainsi que la société MC3 à lui payer la somme de 64 285,86 € à titre de dommages intérêts pour violation de la présomption d’innocence, confirmer le jugement en ce qu’il a mis hors de cause la société Viveris alors, effectivement, que seule la société Viveris Management gère le K L, en ce qu’il a refusé d’accueillir le moyen pris de la nullité de l’assignation introductive d’instance et débouté de toutes leurs prétentions financières les partie adverses, dans tous les cas, de débouter celles-ci de toutes leurs demandes.

Par conclusions récapitulatives signifiées le 2 avril 29012, MM A, B et la société MC3 demandent à la cour, vu les articles 960 et suivants du code de procédure civile, Y et suivants, L.232-11 et L.235-1 et suivants du code de commerce, 1157 et 1382 du code civil et le pacte d’actionnaires du 28 février 2007, outre divers constats, de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. C de l’ensemble de ses demandes fondées sur le prétendu caractère de prêt du pacte d’actionnaires du 28 févier 2007 et la prétendue nullité de la prise de participation du K L, à titre subsidiaire, de déclarer M. C irrecevable en sa demande de nullité de la prise de participation du K L dès lors qu’en l’absence d’affectio societatis liée à la clause de sortie prioritaire, seule cette clause serait entachée de nullité et qu’au surplus, M. C a renoncé à se prévaloir de la nullité de la prise de participation, à titre infiniment subsidiaire, de débouter M. C de sa demande de remboursement des sommes versées au titre des obligations convertibles, de le débouter de ses demandes aux fins de remboursement des sommes correspondant au TRI et de ses demandes de dommages intérêts au titre d’un prétendu préjudice matériel et moral , de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. C de l’ensemble de ses demandes formées au titre de sa révocation et d’un prétendu abus de majorité, de rejeter la demande de dommages intérêts pour violation de la présomption d’innocence comme nouvelle en cause d’appel ou à défaut comme mal fondée, d’infirmer le jugement quant au quantum des sommes allouées au titre des demandes reconventionnelles et, statuant à nouveau de ce chef, de condamner M. C à payer à chacun la somme de 300 000 € de dommages intérêts et 150 000 € au titre de la procédure abusive, en tout état de cause, de débouter M. C de l’ensemble de ses prétentions et de le condamner au paiement à chacun de la somme de 50 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 10 octobre 2011, et à Mme C par acte du 8 novembre 2011, la société Viveris Management et 'la société’ K L demandent à la cour, vu les dispositions des articles 122, 960, 961 du code de procédure civile et le principe d’estoppel, de déclarer irrecevables les conclusions signifiées par M. C à défaut pour ce dernier de ne pas faire connaître sa véritable adresse, de dire irrecevable l’action et l’instance engagées par lui au regard de la contradiction de ses positions successives, à titre subsidiaire sur le fond, de confirmer le jugement dont appel, de débouter M. C de toutes prétentions, d’accueillir l’appel incident et de condamner M. C à payer 'au concluant’ la somme de 300 000 € à titre de dommages intérêts et 25 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, subsidiairement pour le cas où la cour devrait considérer le pacte d’actionnaires nul, de condamner la société MC3 et M. C in solidum à rembourser les sommes mises à dispositions en vertu des actes annulés soit au total la somme de 1 999 793 € outre intérêts de droit et à indemniser le K du préjudice subi à hauteur de 1 680 851,13 € pour la perte du bénéfice du TRI et de 300 000 € du chef des préjudices matériel et moral outre 25 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme C qui a reçu signification des conclusions de l’appelant en date du 9 août 2011 par acte du 22 août 2011 remis à personne et des conclusions de la société Viveris Management avec copie de la déclaration d’appel suivant acte du 8 novembre 2011, déposé en l’étude de l’huissier, n’a pas constitué avocat.

SUR CE

— Sur les parties au litige

Ainsi qu’il est rappelé dans les conclusions de M. C, le K L , dépourvu de la personnalité morale, est qualifié de manière erronée de 'société’ aux écritures de la société Viveris Management où elle apparaît comme partie.

Il sera observé que cette erreur n’est d’aucune incidence sur la régularité de la procédure dès lors qu’il est acquis que la société Viveris Management est au procès en qualité de gestionnaire du K L.

— Sur la recevabilité des conclusions de l’appelant

Au dispositif de ses conclusions, la société Viveris Management demande à la cour de déclarer irrecevables les conclusions signifiées par M. C à défaut pour ce dernier de faire connaître sa véritable adresse .

Cependant, elle a saisi aux mêmes fins le conseiller de la mise en état, qui a compétence exclusive en cette matière, puis a renoncé à l’incident après la notification par M. C de son adresse suivant acte du 12 octobre 2011.

Cette demande ne peut, dès lors, qu’être rejetée.

— Sur la recevabilité de l’action

La société Viveris Management, gestionnaire du K, demande encore à la cour de dire irrecevable l’action et l’instance engagées par M C en vertu du principe de l’estoppel, au regard de la contradiction de ses positions successives, soulignant que M. C prétend à la nullité de l’ensemble des opérations ayant conduit à la création d’actions nouvelles et à leur attribution pour partie au K en contrepartie des fonds propres apportés à la société MC3, et que, dans le même temps, il a proposé d’acquérir les mêmes actions de sorte qu’il a nécessairement admis la régularité des opérations dont il conteste pourtant la légalité.

M. C réplique qu’il ne retire aucun profit de prétendues contradictions et qu’à ce jour, la nullité du pacte d’actionnaires n’étant pas acquise, il est contraint, hors du prétoire, à le respecter sauf à s’exposer à de nouveaux griefs.

L’estoppel se définit comme un comportement procédural d’une partie, constitutif d’un changement de position, en droit, de nature à induire l’autre partie en erreur sur ses intentions.

La contradiction invoquée qui n’est pas d’ordre procédural n’entraîne pas fin de non recevoir.

— Sur la demande en nullité de la prise de participation du K L

Au soutien de son appel, M. C fait plaider que le pacte d’actionnaires a la nature d’un prêt et doit être requalifié en ce sens, avec pour conséquence la nullité de la prise de participation du K L, en considération de l’absence d’affectio societatis de la part du K dans la mesure où celui-ci s’exonère de tout risque de perte, à la faveur d’une clause intitulée clause de sortie prioritaire faisant peser sur les autre actionnaires une obligation de rachat à un prix plancher majoré assorti d’un taux de rentabilité interne (TRI) convenu contractuellement, en l’espèce, 15 %, lui assurant, en toute hypothèse, sa rémunération sur le capital investi et ce, en violation de l’article 1844-1 du code civil qui répute une telle clause non écrite, qu’attestent notamment de la nature de prêt l’anatocisme inscrit dans la formule du taux d’intérêt et le tableau d’amortissement figurant en annexe D bis, que la société Viveris Management qui n’a pas le statut d’établissement bancaire a tourné la difficulté en se faisant passer pour un associé de son emprunteur alors que l’investisseur s’avère être, en réalité, un bailleur de fonds. Il critique le jugement pour avoir 'refusé de statuer’ sur ces moyens en considérant qu’en traitant le K comme un associé et en sollicitant de la société Viveris la cession de ses actions comme celles des autres actionnaires , il aurait reconnu la qualité d’associé du K et aurait ainsi renoncé a invoquer une qualification du contrat autre que celle nommée par les parties, pour avoir méconnu l’obligation de motivation énoncée par l’article 455 du code de procédure civile et pour l’avoir privé d’un accès effectif à un tribunal en violation de l’ article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l’homme, que la conséquence doit en être l’annulation de la prise de participation du K et de l’ensemble des assemblées générales. Il conteste que les titres litigieux dépendent de l’ indivision ayant existé avec son ex-épouse.

MM A et Ferrandi approuvent le tribunal pour avoir retenu que M. C a tacitement et nécessairement renoncé à se prévaloir de la nullité de la prise de participation du K L dans la mesure où de multiples actes ont été accomplis tels sa présidence des assemblées générales désormais contestées, le vote favorable à toutes les résolutions proposées à l’assemblée générale du 30 mars 2007, la validation du rapport du directoire confirmant l’augmentation de capital et l’entrée du RCPR, l’approbation des comptes ultérieurs qui en témoignent sans équivoque. Subsidiairement, ils font valoir que l’engagement de la société Viveris Management, représentante du FPCR, est parfaitement établi et par suite son affectio societatis . Ils ajoutent que la clause de sortie prioritaire n’institue en rien une immunité contre les pertes mais à vocation à s’appliquer seulement en cas de désaccord sur une cession de plus de 10 % des titres des trois fondateurs, l’entrée au capital d’un industriel ou une cession substantielle des actifs de MC3 ou des titres qu’elle détient dans les sociétés qu’elle contrôle mais non en cas de liquidation amiable ou judiciaire comme il est, à tort, prétendu.

La société Viveris Managment et 'la société’ K soulignent que la sanction d’un éventuel défaut d’affectio societatis ne consiste pas dans une requalification des opérations d’apports de fonds ou de cessions mais dans une nullité de la société qui est soumise à une prescription triennale par l’article L.235-9 alinéa 1 du code de commerce, en l’espèce acquise depuis le 27 février 2010, alors que la demande n’a été formulée par M. C que par des conclusions du 28 octobre 2010, que les clauses du pacte d’actionnaires prétendument léonines sont encore nécessairement prescrites, que la demande est donc irrecevable, qu’elle est tout aussi mal fondée dans la mesure où contrairement aux allégations de M. C, la société Viveris s’est toujours manifestée comme un associé participant activement à la vie sociale en exerçant les droits de contrôle, de critique et de révocation dans les conditions imposées par la loi et où le droit de sortie prioritaire prévu à l’article 43 du pacte ne constitue ne rien une manière pour l’investisseur d’imposer sa volonté mais constitue un moyen de protection au cas où le hommes clés ne respecteraient pas les objectifs du plan ce qui exclut le caractère léonin au sens de l’article 1844-1 alinéa 2 du code civil.

Il importe de rappeler que M. C poursuit la requalification en prêt déguisé du pacte d’actionnaires en date du 28 févier 2007 fixant les modalités d’intégration du K au capital de la société MC3 et , 'par conséquent', la nullité du pacte d’actionnaires en date du 28 février 2007 en ce qu’il entérine un changement de répartition du capital de la société MC3 ainsi que l’annulation de l’ensemble des assemblés générales subséquentes.

Il est vrai que M. C a participé à la mise en oeuvre du pacte dont il est l’un des signataires, qu’il a présidé les assemblées générales des 28 février et 30 mars 2007 qui ont approuvé les modalités d’intégration du K, qu’il a voté favorablement à toutes les résolutions confirmant les décisions d’augmentation de capital, qu’il a validé le rapport du directoire relatif à cette opération, qu’il a certifié l’exactitude des mentions des feuilles de présence et approuvé les comptes lors de l’assemblée générale du 30 juin 2007.

Pour autant, ces actes pris isolément et ensemble ne manifestent pas de manière certaine et non équivoque une renonciation au droit d’agir en nullité du pacte d’actionnaires.

Par ailleurs, la demande ne se heurte pas à la prescription triennale de l’article L.235-9 alinéa 1 du code de commerce pour avoir été formulée dans le dispositif de son acte d’introductif d’instance en date du 14 mai 2008. Peu importe, à cet égard que M. C ait initialement soutenu la nullité du pacte d’actionnaires en considération de la méconnaissance des droits de son ex-épouse et invoqué, dans la suite de la procédure, le moyen pris du prêt déguisé.

La clause du pacte d’actionnaires qui, selon M. C exonérerait l’investisseur de toute contribution aux pertes, est inscrite à l’article 4.3 sous l’intitulé 'droit de sortie prioritaire de l’investisseur'.

Il y est stipulé que l’investisseur bénéficie d’un tel droit qui lui permet de céder tout ou partie des titres qu’il détient ou détiendra dans le capital de la société aux autres actionnaires qui s’obligent à les racheter au prix convenu 'pour le cas où l’une ou plusieurs des opérations suivantes seraient envisagées et effectivement réalisées sans son accord écrit et préalable'.

Suit l’énumération et la description des opérations concernées au nombre de quatre à savoir la cession de titres par un homme clé de plus de 10 % des actions ou ayant pour effet de porter la participation totale des hommes clés dans la société à moins de 50 % du capital ou des droits de vote de la société, l’entrée immédiate ou à terme, par quelque mode que ce soit, d’un industriel au capital de la société à hauteur minimale de 20 % ou au capital d’une participation de la société faisant perdre le contrôle de cette participation à la société, le non respect des articles 10-1 à 10-10 du pacte relatifs à la déontologie des hommes clés et la cession d’actifs de la société.

Cette clause qui instaure, en des termes clairs et sans ambiguïté, une protection en faveur de l’investisseur pour le cas où, dans des situations précises, dont la survenance ne dépend pas de son fait, les hommes clés, ne respectant pas les objectifs du plan, se désengageraient de la société ne fait aucunement disparaître l’aléa social auquel le nouvel actionnaire est soumis au même titre que les autres actionnaires.

L’exonération de l’actionnaire entrant de la totalité des pertes alléguée n’est donc pas démontrée et la clause critiquée n’apparaît pas léonine ou contraire à l’intérêt social.

C’est donc vainement que M. C prétend déduire de cette clause licite un défaut d’affectio societatis de la part du nouvel actionnaire.

Il convient, à ce motif, de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. C de sa demande aux fins de requalification du pacte d’actionnaires en prêt, nullité dudit pacte et de toutes assemblées générales de la société MC3 tenues depuis l’augmentation de capital et de remise des associés en l’état antérieur.

— Sur la violation de la convention de vote

Il a été prévu par le pacte d’actionnaires que 'Le directoire est à partir des dates des présentes et restera composé de MM C, A et B. Le président du directoire est et restera M. C'

M. C fait plaider que cette disposition devait agir pendant trois ans soit jusqu’au remboursement des sommes réclamées par le K, ayant pour objet d’éviter sa spoliation, que dès lors, le caractère licite ou non de la convention de vote au regard du droit positif interne est superfétatoire compte tenu de sa conformité manifeste avec l’article 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne des droits de l’homme, qui s’impose aux juridictions nationales, selon lequel toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Il précise qu’il a perdu sa majorité de contrôle et se trouve, en raison de la violation de la convention de vote, privé depuis 2008 de toute rémunération alors qu’il percevait jusqu’alors une rémunération de 9 000 € par mois. Il critique les premiers juges pour n’avoir pas répondu à ses moyens et pour avoir cité, à l’appui de leur décision, trois courriers sortis de leur contexte. Il invoque l’absence de débat contradictoire préalable à l’assemblée du 30 mars 2008, l’imprécision des motifs de révocation allégués et le manque d’information en amont de cette assemblée générale l’ayant privé des moyens de préparer sa défense.

Tandis que MM A et Ferrandi soutiennent que le pacte ne pouvait faire obstacle à la révocation de M. C que dictait la préservation de l’intérêt social, que les principaux griefs qui ont été notifiés à M. C portent sur la mise en cause de la loyauté d’un membre du directoire et la diffusion de fausses informations concernant le président du conseil de surveillance, le dépassement de ses pouvoirs, le discrédit porté à un membre du personnel d’encadrement, tous comportements à l’origine d’une perte de confiance et d’une grave mésentente. Ils soulignent que M. C a été entendu, convoqué et mis en mesure de présenter ses observations sur la mesure de révocation, qu’il a même saisi un avocat qui a diligenté un référé d’heure à heure devant le juge de référés du tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre puis qu’il a soutenu avec succès une requête devant le président du tribunal de commerce de Bobigny afin de faire désigner un huissier et un sténotypiste lesquels ont assisté à l’assemblée générale du 31 mars 2008.

La société Viveris Management observe que le pacte d’actionnaires ne contient aucune renonciation au principe de libre révocabilité des dirigeants sociaux et affirme que la procédure de révocation a été diligentée de façon contradictoire et pour de justes motifs compte tenu du comportement de M. C devenu incompatible avec ses fonctions et l’intérêt social..

Selon l’article L.225-61 du code de commerce, les membres du directoire peuvent être révoqués par l’assemblée générale. Si la révocation est prononcée sans juste motif, elle peut donner lieu à dommages intérêts.

Il ne peut être dérogé à cette disposition d’ordre public par une convention comme l’ont justement relevé les premiers juges lesquels ont, par ailleurs, apprécié exactement toutes les circonstances qui attestent du respect du principe de la contradiction, en particulier, la présence lors de l’assemblée générale d’un huissier de justice désigné à la demande de M. C ce qui démontre que ce dernier était effectivement informé de la procédure en cours et des griefs imputés et mis en mesure de se défendre, et qui ont caractérisé les justes motifs de révocation sans dénaturer les écrits cités.

Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. C de ses demandes de dommages intérêts formées au titre de sa révocation.

— Sur l’abus de majorité relatif à la non distribution des dividendes

M. C fait valoir que depuis 2008 la décision d’affectation aux réserves a été prise contrairement à l’intérêt de la société qui n’utilise pas ces fonds pour investir, l’unique dessein des co-associés étant de le priver de tout revenu en violation de l’article 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne des droits de l’homme, ce que récusent les parties intimées en soulignant que la preuve n’est pas rapportée que les décisions prises ont favorisé les associés majoritaires et qu’elles sont contraires à l’intérêt social.

Il convient de souligner que M. C ne peut arguer d’un abus de majorité s’agissant de la non distribution des dividendes pour l’exercice clos le 31 décembre 2009. En effet, lors de l’assemblée générale du 30 septembre 2010, le mandataire désigné pour représenter M. C a voté en faveur du report, la décision étant ainsi unanime.

Quant aux autres exercices, pas plus qu’en première instance, il n’est démontré la contrariété des reports à l’intérêt social ni la volonté de favoriser les actionnaires majoritaires comme l’ont justement analysé les premiers juges qui n’ont pas méconnu, contrairement aux allégations répétées de M. C, les dispositions de l’article 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne des droits de l’homme.

Le jugement sera encore confirmé en ce qu’il a débouté M. C de ses demandes de dommages intérêts de ce chef et de tous autres.

— Sur les demandes reconventionnelles de dommages intérêts

C’est par des motifs que la cour adopte que les premiers juges ont, d’une part, caractérisé le comportement fautif de M. C et le préjudice qui en est résulté pour la société MC3, MM A et B et la société Viveris Management en sa qualité de gestionnaire du K, d’autre part, évalué le préjudice subi du fait tant du dénigrement que de la procédure abusive en distinguant, à juste titre, l’impact de ces fautes sur la société et sur les co-associés.

Le jugement mérite confirmation sur ce point.

— Sur la demande nouvelle de M. C en réparation de l’atteinte à la présomption d’innocence

Au soutien de sa demande,M. C fait valoir que la société MC3, MM A et B, encouragés par leurs succès judiciaires, persistent à le mettre en cause en violation de la présomption d’innocence et que dans leurs conclusions d’appel signifiées le 7 octobre 2011, ils méconnaissent de plus fort la présomption d’innocence, notamment en pages 12 (points 8 et 9) et 46 (point1).

La société MC3, MM A et B opposent l’irrecevabilité de la demande comme nouvelle en cause d’appel et, subsidiairement, indiquent s’être bornés à relater une réalité factuelle sans présenter M. C comme coupable.

Si la demande ne se heurte pas à la prohibition des demandes nouvelles en ce qu’elle tend aux mêmes fins de réparation, M. C qui procède par simple renvoi sans même énoncer les allégations prétendument attentatoires à la présomption d’innocence ne peut qu’être débouté de sa demande.

— Sur l’article 700 du code de procédure civile

L’équité commande de confirmer les dispositions du jugement relatives aux frais visés par l’article 700 du code de procédure civile sans qu’il y ait lieu d’y ajouter pour les frais exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Déboute les parties de toutes autres demandes,

Condamne M. C aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel de Paris, 3 juillet 2012, n° 11/08630