Cour d'appel de Paris, 16 décembre 2014

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, 16 déc. 2014
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Décision précédente : Tribunal d'instance de Lagny-sur-Marne, 10 mars 2013, N° 11-12-0961

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5-7

ARRÊT DU 16 DÉCEMBRE 2014

(n° 174, 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 2013/12802

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 mars 2013

rendu par le Tribunal d’Instance de LAGNY SUR MARNE – RG n° 11-12-0961

APPELANTE :

— La société B C, S.A.S

Prise en la personne de ses représentants légaux

Dont le siège social est : XXX

Représentée par : Maître Mireille ABENSOUR GIBERT,

avocate au barreau de PARIS,

toque : A0525

XXX

et

INTIMÉ :

— Le MINISTÈRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS

— Le Directeur Régional des Douanes PARIS EST

— le Receveur Régional des Douanes de la Direction de PARIS

Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières

Agence de poursuites

XXX – XXX

Représenté par Mme Cécile BELAUD, inspectrice des douanes, munie d’un pouvoir

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 26 septembre 2014, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. Christian REMENIERAS, Président de chambre, chargé d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

— M. Christian REMENIERAS, président

— Mme Z A, conseillère

— Mme Valérie MICHEL- AMSELLEM, conseillère

GREFFIER, lors des débats : M. D E-F

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Christian REMENIERAS, président et par M. D E-F, greffier.

* * * * * * * *

Vu l’appel déclaré le 26 juin 2013 par la société B C du jugement prononcé le 11 mars 2013 par le tribunal d’instance de Lagny sur Marne :

— qui a rejeté la demande de nullité de l’avis de mise en recouvrement (AMR) n° 480 bis en date du 27 juillet 2011 qui a été délivré à cette société ;

— qui a constaté que l’administration des douanes s’engage à la réduction de cet AMR d’un montant de 30932 euros 'correspondant aux droits de douane relatifs aux oeufs de cabillaud relevant de la position tarifaire 03 03 80 90 81" ;

Vu les conclusions récapitulatives et en réponse de la société B C, appelante, déposées le 21 février 2014 ;

Vu les conclusions de M. le Directeur Régional des Douanes de Paris Est et de M. le Receveur Régional des Douanes de la direction Paris Est, intimés, déposées le 3 décembre 2013;

Sur ce,

La société B C, dont le siège social est situé à XXX de Marne) a pour activité l’importation de produits de la mer et en particulier de poissons et d’oeufs de poissons (saumon, truite, cabillaud et corégone) en provenance d’Amérique du Nord ainsi que d’Amérique du Sud.

Ces produits, particulièrement les saumons , sont destinés à être découpés, fumés et mis sous emballage plastique et, en ce qui concerne les oeufs de poissons, à être mis en verrine et pasteurisés (oeufs de saumon et de corégone) ou à entrer dans la fabrication du tarama (oeufs de cabillaud ou de truites).

Dans le cadre de son activité, B C a été conduite à solliciter auprès de l’administration des douanes l’autorisation 'de régime douanier économique / traitement tarifaire favorable en raison d’une destination particulière', dite du 'régime de destination privilégiée', conformément aux dispositions du Règlement n° 2454/93 du 2 juillet 1993 portant application du code des douanes (DAC), modifié parle Règlement n° 1602/2002 du 24 juillet 2000.

Cette autorisation lui a été accordée depuis l’année 2000 puis a été renouvelée à chaque échéance.

Le 3 juin 2010, le service régional d’enquêtes (SRE) des douanes de Paris Est a déclenché une enquête afin d’opérer un contrôle des opérations de dédouanement de la société B C depuis le 3 juin 2007.

A la suite de l’enquête, le SRE a estimé que B C avait mis en oeuvre le régime préférentiel de la destination particulière dans des conditions qui n’étaient pas conformes aux exigences réglementaires.

C’est dans ces circonstances que l’administration des douanes a adressé le 24 mai 2011 à la société contrôlée un avis de fin d’enquête dénonçant la découverte d’irrégularités consistant:

— en une utilisation du régime de la destination particulière pour des opérations non prévues par l’autorisation ;

— en un dépassement du délai d’apurement du régime prévu par l’autorisation ;

— en un dépassement des plafonds de valeur et de quantité prévus par l’autorisation.

Selon l’administration des douanes, les faits constatés étaient susceptibles de rendre la société contrôlée débitrice d’une dette douanière s’élevant à 119 583 euros.

Toutefois, par courrier du 22 juin 2011, B C demandait aux services des douanes :

— s’agissant du dépassement des plafonds en valeur et quantité et de l’utilisation du régime pour les opérations non prévues, de renoncer aux poursuites dès lors que l’infraction n’était pas constituée ;

— s’agissant du dépassement de délai, d’appliquer un délai d’apurement de 24 mois aux marchandises pour lesquelles elle avait constaté une infraction afin de régulariser la situation.

L’administration des douanes, qui n’a pas modifié sa position au regard de telles observations, a alors notifié à B C les infractions d’utilisation abusive du régime de la destination particulière et fausse déclaration d’espèce, de dépassement du délai d’apurement du régime de 12 mois et enfin de dépassement en valeur avec un montant de 119 583 euros.

S’agissant spécialement de l’infraction de fausse déclaration d’espèce, l’administration des douanes relevait que la redevable avait importé sous le régime de la destination particulière des oeufs de cabillaud en les déclarant à la position tarifaire correspondant aux succédanés de caviar – position 16 04 30 90 10 – alors que les oeufs de cabillaud relèvent de la position 03 03 80 90 81.

C’est dans ces circonstances que, le 27 juillet 2011, le receveur régional des douanes de Paris Est a émis un avis de mise en recouvrement (AMR)reprenant ce montant, avec en annexe un tableau récapitulant la taxation des marchandises en situation irrégulière au regard du régime de la destination particulière.

Par lettre recommandée du 8 septembre 2011, B C a contesté cet AMR et sollicité un sursis de paiement auprès de l’administration des douanes qui, si elle a fait droit à cette dernière demande, n’a toutefois pas reconsidéré sa position initiale.

C’est dans ces conditions que B C a assigné l’administration des douanes devant le tribunal d’instance de Lagny sur Marne afin d’obtenir l’annulation de l’avis de mise en recouvrement précité.

Sur la procédure

Considérant qu’il est rappelé que le code des douanes dispose :

— en son article 345 :

'Les créances de toute nature constatées et recouvrées par l’administration des douanes font l’objet d’un avis de mise en recouvrement sous réserve, le cas échéant, de la saisine du juge judiciaire.

L’avis de mise en recouvrement est signé et rendu exécutoire par le directeur régional des douanes ou le comptable des douanes ainsi que, sous l’autorité et la responsabilité de ce dernier, par un agent ayant au moins le grade de contrôleur.

L’avis de mise en recouvrement indique le fait générateur de la créance ainsi que sa nature, son montant et les éléments de sa liquidation. Une copie est notifiée au redevable.

Les recours prévus aux articles 346 et 347 ne suspendent pas l’exécution de l’avis de mise en recouvrement.'

— en son article 67 A :

'Sous réserve des dispositions de l’article 67 B, toute décision prise en application du code des douanes communautaire et de ses dispositions d’application, lorsqu’elle est défavorable ou lorsqu’elle notifie une dette douanière telle que définie à l’article 4, paragraphe 9, du code des douanes communautaire, est précédée de l’envoi ou de la remise à la personne concernée d’un document par lequel l’administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée ainsi que la possibilité dont dispose l’intéressé de faire connaître ses observations dans un délai de trente jours à compter de la notification ou de la remise de ce document.'

Considérant que B C sollicite l’infirmation du jugement déféré en faisant valoir que, contrairement à ce qu’a décidé le premier juge, l’AMR, faute de motivation, est irrégulier et doit être annulé ; que l’appelante prétend ainsi :

— qu’en infraction avec les dispositions de l’article 1er de la loi n° 79- 587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public, l’AM R ne la met pas en mesure de connaître avec précision les faits qui lui sont reprochés ni de les critiquer utilement, dès lors que cet acte fait seulement état des infractions retenues à son encontre, sans faire référence , ni à un procès-verbal, ni à une procédure comportant des indications sur un contrôle ainsi que sur une période contrôlée ;

— que l’indication dans l’avis des bases de liquidation et de la procédure servant de fondement à la demande de paiement constitue d’autant plus une obligation à la charge de l’administration des douanes que l’AMR a la nature d’un titre exécutoire ;

— qu’en l’absence de précision concernant les taux applicables aux différentes bases retenues pour la taxation, elle était privée de la possibilité de vérifier la validité des calculs opérés par les services des douanes et n’était mise en mesure de vérifier, ni la régularité des taux appliqués, ni la conformité des droits réclamés ;

Mais considérant qu’il suffit de constater, d’une part, que, dans la rubrique ' désignation des créances fait générateur, nature, montant et éléments de liquidation', l’avis de mise en recouvrement vise de manière précise les diverses infractions relevées à l’encontre de B C et, d’autre part, qu’il comporte, en annexe, un tableau récapitulatif qui mentionne de manière très détaillée les déclarations d’importation visées, la nature des produits, leur quantité, leur valeur, la base de la taxation et qui retrace précisément la liquidation par nature de créances (droits de douane, X) ;

Considérant que l’avis indiquant bien ainsi, en conformité avec les exigences des dispositions précitées de l’article 345 du code des douanes, le fait générateur de la créance ainsi que sa nature, son montant et les éléments de sa liquidation, la redevable n’est pas fondée à prétendre qu’elle ignorait les faits reprochés et qu’elle était privée de la possibilité de procéder, le cas échéant, à des vérifications concernant le calcul des droits réclamés, ce d’autant que, ainsi que le fait observer l’intimée, les agents des douanes n’ont pas remis en cause la valeur déclarée des marchandises importées ;

Considérant que ce n’est qu’au surplus que la cour relève que la référence faite par l’appelante à l’article 1er de la loi n° 79- 587 du 11 juillet 1979 sur l’obligation de motivation des actes administratifs qui infligent une sanction est inopérante, dès lors que l’AMR, qui est un acte authentifiant les créances douanières constatées, n’est pas un acte administratif infligeant une sanction ;

Considérant, dès lors, que c’est à bon droit, que le tribunal a écarté le moyen d’annulation tiré du prétendu défaut de motivation de l’avis de mise en recouvrement ;

Considérant que l’appelante prétend encore que l’annulation de l’AMR est également encourue au motif qu’en violation des dispositions de l’article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans les relations avec les administrations ainsi que du principe du contradictoire , elle a été privée de la possibilité de faire valoir ses observations sur l’infraction pour fausse déclaration d’espèces, dès lors que cette infraction ne lui a été notifiée pour la première fois qu’en vertu du procès – verbal de notification d’infraction du 6 juillet 2001 et qu’à tout le moins, l’administration des douanes n’ayant pas attiré son attention sur ce point, elle n’a pas été à même de présenter ses observations écrites ;

Que B C fait encore valoir, qu’à tout le moins, la violation du principe du contradictoire résulte également de l’émission de l’AMR moins de 30 jours après la notification de cette nouvelle infraction ;

Mais considérant que la teneur des procès – verbaux de constat d’infraction, qui comportent tous une rubrique, renseignée, sur la ' déclaration de la personne intéressée',en l’espèce M. Y, représentant de B C, permet d’établir qu’à l’occasion de chaque acte d’investigation, le représentant de l’entreprise contrôlée a été mis en mesure de présenter ses observations tant orales qu’ écrites sur les faits constatés par les agents des douanes qui ont conduit à la notification des infractions douanières d’utilisation du régime de la destination particulière pour des opérations autres que celles prévues dans l’autorisation, d’une part, et de fausse déclaration d’espèce pour les oeufs de cabillaud ;

Qu’en outre, à l’issue de l’enquête, l’administration des douanes a adressé à B C un courrier du 24 mai 2011 mentionnant en objet ' Avis de résultat d’enquête / Exercice du droit d’être entendu article 67 du code des douanes ' qui portait à sa connaissance les constatations du service d’enquête et lui précisait en quoi la société avait utilisé de manière abusive le régime de la destination particulière par la société , en important sous couvert de ce régime préférentiel des marchandises dans des conditions ne correspondant pas à celles fixées par l’autorisation, lui accordait un délai de 30 jours afin de présenter ses observations concernant les faits constatés et reprochés, ce que B C n’a pas manqué de faire dans un courrier du 22 juin 2011 aux termes duquel elle soulevait diverses contestations ;

Considérant, concernant spécialement le grief fait à l’administration des douanes par l’appelante au sujet de la notification de fausse déclaration d’espèce pour les oeufs de cabillaud, que l’intimée est fondée à rappeler que les dispositions précitées de l’article 67 A du code des douanes, si elles imposent à l’administration d’énoncer les faits qui sont à l’origine d’une dette douanière, ne lui font pas pour autant obligation de procéder à une qualification des infractions douanières antérieurement à la notification de la dette douanière ;

Considérant ,dès lors, qu’il est établi que, contrairement à ce qui est soutenu, la procédure d’enquête a été conduite de manière régulière sans atteinte à l’exercice du droit d’être entendu garanti par l’article 67 du code des douanes ou aux droits de la défense ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que c’est à juste titre que le tribunal a rejeté les demandes de B C tendant à l’annulation de la procédure ;

Sur le fond

Considérant que le régime de destination particulière en cause prévu par les dispositions des article 21 et 82 du code de douanes communautaire et dont les modalités pratiques sont fixées aux article 291 à 300 du règlement 2454/ 93 de la Commission du 2 juillet 1993 portant application du code des douanes (DAC) modifié par le règlement (CE) n° 1602/2000 est une procédure de contrôle douanier applicable à certaines marchandises qui peuvent bénéficier d’une préférence tarifaire – réduction ou suspension de droits de douanes – sous réserve de leur affectation à la destination réglementaire prévue ;

Que l’admission d’une marchandise au bénéfice d’une préférence tarifaire sous condition de destination est subordonnée à la délivrance par les autorités douanières, sur demande écrite de l’intéressé, d’une autorisation et qu’en vertu de l’article 87 du code des douanes communautaire, les conditions dans lesquelles le régime de destination particulière est utilisé sont fixées dans l’autorisation ;

Que l’article 292 des DAC dispose que 'la demande d’autorisation est établie par écrit selon le modèle figurant à l’annexe 67" ;

Qu’il est constant, enfin, qu’en raison de leur destination particulière, les marchandises mises en libre pratique restent soumises à la surveillance douanière et qu’en définitive, l’utilisation des marchandises à des fins autres que celles prescrites pour l’application du droit à l’importation réduit ou nul est admise contre paiement des droits dus ;

En ce qui concerne l’utilisation du régime de la destination particulière pour des opérations non prévues par l’autorisation :

Considérant qu’il est constant qu’alors que le bénéfice du régime de la destination particulière a été accordé pour les succédanés de caviar, oeufs de poisson (oeufs de saumon) pour la mise en verrine et pasteurisation, B C, sous couvert de la préférence 115 (régime tarifaire erga omnes + suspension tarifaire avec destination particulière)a importé des oeufs de cabillaud et des oeufs de truite pour lesquels les seules opérations effectuées sont le fumage, le pelage et l’égrenage afin d’obtenir une pulpe qui est utilisée dans la fabrication du tarama ;

Que les services des douanes ont également relevé que sur certaines déclarations , la préférence 100 a (tarif extérieur commun) a été sollicitée avec le bénéfice de la destination particulière et que les droits dus n’ont pas été acquittés ;

Que c’est dans ces conditions que l’administration des douanes a notifié à B C une infraction qualifiée d’utilisation abusive du régime de destination particulière et de fausse déclaration d’espèce, prévue et réprimée par les articles 412, 426 – 4 et 414 du code des douanes national pour un montant de droits et taxes éludés de 30 932 euros, soit 29 017 euros de droits de douanes et 1915 euros de X ;

Considérant, cependant, que l’administration des douanes a admis devant le tribunal et confirme devant la cour que les importations d’oeufs de cabillaud font l’objet en vertu du règlement 1255/96 du 27 juin 1996 d’une politique commerciale portant suspension des droits,

en indiquant qu’elle était conduite à abandonner le recouvrement des sommes réclamées en ce qui concerne les oeufs de cabillaud ;

Qu’ainsi que l’a constaté à juste titre le tribunal, l’avis de mise en recouvrement contesté devait, en conséquence, être réduit d’un montant de 30 932 euros, somme correspondant aux droits de douane relatifs aux oeufs de cabillaud relevant de la position tarifaire 03 03 80 90 81 et à la X calculée sur la base d’une assiette intégrant ces droits de douanes ;

Considérant qu’en cet état, l’intimée est toutefois fondée à préciser que l’absence d’incidence fiscale ainsi constatée n’emporte pas pour autant la disparition de l’infraction de fausse déclaration d’espèce, dès lors que les oeufs de cabillaud ne pouvaient être importés sous le régime de la destination particulière ;

En ce qui concerne le dépassement du délai d’apurement pour l’affectation des produits à la destination prévue :

Considérant qu’il est rappelé :

— que l’autorisation de régime douanier économique du 7 décembre 2005 dont la validité courait du 7 décembre 2005 au 7 décembre 2008 mentionnait un délai d’apurement de 12 mois;

— que la demande de renouvellement en date du 5 septembre 2008 présentée à l’administration des douanes par B C ne comportait aucune précision en ce qui concerne le délai d’apurement ;

— que l’autorisation de régime douanier économique du 8 septembre 2008 dont la validité courait du 8 septembre 2008 au 8 septembre 2011 mentionnait un délai d’apurement de 12 mois;

Considérant que les services des douanes ont relevé que B C n’a pas affecté à la destination prévue une série de marchandises dans le respect du délai convenu de 12 mois fixé par l’autorisation, ce dépassement de délai constituant une inexécution des engagements souscrits, infraction prévue et réprimée par l’article 411 du code des douanes ;

Considérant que B C prétend que l’administration des douanes a opéré délivré à tort une délivrance de l’autorisation, sans disposer pour ce faire de toutes les informations requises ; qu’elle précise ainsi qu’alors qu’elle avait régulièrement utilisé un autre modèle que celui qui figure à l’annexe 67 – à laquelle renvoie l’article 292 des DAC – et qu’elle n’y avait pas fait figurer le délai d’apurement, l’administration des douanes aurait cependant dû lui enjoindre alors de donner en application de l’article 292 § 4 )e des DAC le renseignement requis concernant le délai prévu pour assigner la destination particulière aux marchandises et non lui octroyer elle-même, de manière unilatérale et discrétionnaire, un délai de 12 mois, alors qu’elle n’aurait pas manqué d’indiquer à la douane qu’elle souhaitait obtenir un délai d’apurement de 24 mois ;

Que l’appelante affirme également que le caractère discrétionnaire des décisions de l’administration des douanes qui, par surcroît, s’est traduit par une différence de traitement à son détriment s’est aussi manifesté, en 2008, par la délivrance d’une autorisation à la société C Sea Food, société soeur appartenant au même groupe, d’une autorisation portant sur le régime de la destination particulière pour le même produit avec cette fois-ci un délai d’apurement supérieur d’une durée de 24 mois, alors pourtant qu’elle avait déposé la même demande pour les mêmes produits au même moment et dans les mêmes termes, sans demande particulière de complément d’information ;

Que B C soutient qu’au regard de ces éléments elle était ainsi fondée à solliciter la délivrance d’une autorisation rétroactive, conformément aux dispositions de l’article 294 du code des douanes communautaire (CDC) ;

Que l’appelante prétend, enfin, qu’elle est en droit, en tout état de cause, en application des dispositions de l’article 239 du même code ainsi que des articles 899 et suivants des DAC, de demander la remise des droits et taxes réclamés dans la mesure où les circonstances relatives aux exportations litigieuses, qui, dans cette situation particulière, procèdent d’un simple oubli de sa part et alors que la C Sea Food, avait bénéficié d’un délai d’apurement de 24 mois , n’impliquent, ni manoeuvre, ni négligence manifeste de sa part ;

Considérant, cependant, que, contrairement à ce qui est soutenu, l’article 292 § 4 des DAC, qui dispose que lorsque les autorités douanières estiment que les renseignements figurant dans la demande d’autorisation sont insuffisantes, elles peuvent exiger que le demandeur communique des informations supplémentaires, n’instituent nullement une obligation à la charge de l’administration des douanes ;

Considérant qu’au cas d’espèce, B C est particulièrement mal fondée à reprocher à l’administration des douanes de ne pas lui avoir signalé l’absence de mention de délai d’apurement dans son courrier de demande d’autorisation, dès lors, qu’à l’évidence, il lui incombait de mentionner elle-même ce renseignement qui, comme les autres éléments d’information qui viennent d’être mentionnés – quantité et valeur des produits placés sous le régime préférentiel -est nécessaire à la délivrance d’une autorisation en adéquation avec son activité économique et industrielle et qu’il ne revenait pas à l’administration des douanes de réparer sa négligence ;

Que le représentant de B C a d’ailleurs déclaré aux enquêteurs ' ne pas avoir prêté attention aux termes, obligations relatives à l’autorisation de destination particulière quant à la nature des marchandises, valeurs et délais…' (PV de notification du 6 juillet 2011 – soulignement ajouté) ;

Considérant, surtout, que l’administration des douanes est en droit d’opposer à B C qu’alors que la première autorisation de destination particulière relative aux opérations contrôlées intervenue en 2005 mentionnait déjà un délai d’apurement de 12 mois, il lui appartenait de demander elle-même l’augmentation de ce délai, en signalant qu’il ne correspondait pas aux contraintes du processus industriel de pasteurisation et de mise sous verrine propres à ses activités et solliciter un délai plus long, tel, si elle l’estimait adapté, le délai de 24 mois qui avait bénéficié la société C Sea Food ;

Considérant que s’il est vrai que l’article 294 des DAC prévoit que les autorités douanières peuvent délivrer une autorisation rétroactive avec un effet étendu pour une durée ne pouvant pas excéder un an avant la date du dépôt de la demande, c’est à la condition que l’existence d’un besoin économique puisse être démontrée et que ' a) la demande ne soit pas liée à une tentative de manoeuvre ni à une négligence manifeste ; '

Considérant que si aucune tentative de manoeuvre n’est imputée à B C par la douane, il ressort cependant des développements qui précèdent que la négligence de cette entreprise qui ne démontre pas, par ailleurs, l’existence d’un besoin économique, est amplement établie, de sorte que les conditions de délivrance d’une autorisation rétroactive ne sont pas réunies au cas d’espèce ;

Et considérant qu’en l’état des constatations qui précèdent et de la négligence manifeste imputable à B C, celle-ci n’est pas en droit de solliciter le remboursement des droits en cause en application des dispositions de l’article 239 du CDC, dès lors que n’est pas remplie la condition exigée par ces dispositions tenant à l’existence de situations qui résultent de circonstances n’impliquant, ni manoeuvre, ni négligence manifestes de la part de l’intéressé ;

En ce qui concerne le dépassement du plafond de valeur :

Considérant qu’il est rappelé qu’alors que suivant l’autorisation en cause, la valeur des marchandises pouvant être placées sous le régime de la destination particulière a été fixée à 1 000 000 euros et que les quantités de marchandises pouvant être placées sous le régime de la destination particulière ont été fixées à 40 tonnes, un dépassement en valeur de 167 003 euros et de 8 984 kg en quantité a été constaté parles services des douanes ;

Considérant que B C conteste les griefs qui ont été formulés à son encontre, qu’elle qualifie de contraires à sa demande et à la réalité économique et procédant d’une erreur manifeste des services des douanes, en expliquant qu’elle a demandé l’autorisation à hauteur de 40 tonnes par an pour une valeur de 1 million d’euros par an soit 140 tonnes pour 3 ans, d’une valeur de 3 millions d’euros sur 3 ans, en fixant ainsi une valeur conforme à la quantité annuelle souhaitée;

Qu’elle affirme également que l’abandon par l’administration des douanes du recouvrement des sommes réclamées au titre du régime de la destination particulière pour les oeufs de cabillaud, démontre que l’administration des douanes commet des erreurs ;

Mais considérant que la demande de renouvellement d’autorisation effectuée par B C elle-même à l’expiration de la période de 3ans qui avait débuté en décembre 2008 et pour une nouvelle durée de trois ans jusqu’au mois de septembre 2008 mentionnait : ' Volumes 40 tonnes par an – 1 000 000 euros ' ;

Considérant qu’au regard des termes mêmes de cette demande, l’administration des douanes est ainsi fondée à opposer à B C qu’alors que les volumes étaient calculés 'par an', la valeur n’est cependant pas assortie d’une telle mention et qu’à tout le moins la demande de renouvellement ne comporte, ni précision, ni réserve, sur le fait que cette valeur de 1 million d’euros ne concernait qu’une seule année d’importation et non les trois années couvertes par l’autorisation dont le renouvellement était sollicité ;

Qu’ en outre, alors qu’elle prétend que la valeur mentionnée ne correspond pas à la 'réalité économique', B C n’a pas sollicité la modification du plafond de valeur fixé pour une valeur moindre de 915 000 euros dans la précédente autorisation concernant la période 2005/2008 dont le renouvellement était sollicité et qu’il est constant, au surplus, que la redevable n’a jamais soumis de réclamations ou soulevé de contestations à ce sujet auprès de l’administration des douanes ;

Considérant, au demeurant, que, s’agissant d’une procédure déclarative, l’appelante n’est pas fondée à reprocher aux services des douanes de ne pas avoir vérifié la cohérence entre une valeur librement déterminée par l’entreprise dans la demande d’autorisation, d’une part, et des données commerciales ou économiques concernant la valeur réelle des produits en question, d’autre part, qu’elle est, à l’évidence, seule en mesure d’apprécier ;

Considérant, enfin, que l’appelante n’est pas fondée à reprocher à l’administration des douanes d’avoir abandonné le recouvrement des sommes réclamées au titre de la destination particulière en raison d’erreurs imputables à ses services ;

Qu’en effet, ainsi que l’explique l’intimée, si elle reconnaît que les oeufs de cabillaud relevant de la position tarifaire 03 03 80 90 81 font l’objet d’une politique commerciale portant suspension des droits, la fausse déclaration d’espèce n’en demeure pas moins établie dès lors que, nonobstant l’abandon du recouvrement de ce chef, les oeufs de cabillaud ne pouvaient, pour autant, être importés sous le bénéfice de la destination particulière ;

Considérant qu’il s’ensuit que c’est à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de nullité de l’avis de mise en recouvrement de B C ;

Que le jugement mérite d’être confirmé en toutes ses dispositions ;

Et considérant que B C n’est pas en droit de réclamer l’application à son bénéfice des dispositions de l’article 220 paragraphe 2b) du code des douanes communautaire sur la non prise en compte a posteriori des divers droits et taxes réclamés dès lors qu’il résulte suffisamment des développements qui précèdent que ne sont pas réunies au cas d’espèce les conditions exigées pour bénéficier de ces dispositions, tant en ce qui concerne l’existence d’une erreur des autorités douanières elles-mêmes qui ne pouvait raisonnablement être décelée par le redevable que l’exigence de bonne foi de celui-ci ainsi que son observation de toutes les dispositions prévues par la réglementation en vigueur en ce qui concerne la déclaration en douane;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris,

Déboute la société B C de toutes ses demandes,

Dit n’y avoir lieu à dépens.

LE GREFFIER,

D E-F

LE PRÉSIDENT,

Christian REMENIERAS

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Cour d'appel de Paris, 16 décembre 2014