Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 16 décembre 2020, n° 17/14051

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 3, 16 déc. 2020, n° 17/14051
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 17/14051
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Meaux, 12 septembre 2017, N° F15/01357
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le

 : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 3

ARRET DU 16 DECEMBRE 2020

(n° , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/14051 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B4PS5

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Septembre 2017 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MEAUX – RG n° F 15/01357

APPELANT

Monsieur Y X

[…]

[…]

Représenté par Me Julien SAINT-FELIX, avocat au barreau de PARIS, toque : C1094

INTIMÉES

SAS MANPOWER FRANCE

[…]

[…]

Représentée par Me Florence FARABET ROUVIER, avocate au barreau de PARIS, toque : C0628

SAS ANGELO MECCOLI & CIE

[…]

[…]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 02 Novembre 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat, entendu en son rapport, a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Fabienne ROUGE, Présidente de Chambre

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de Chambre

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Clémentine VANHEE

ARRET :

—  CONTRADICTOIRE,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Fabienne ROUGE, Présidente de Chambre, et par Madame Nasra ZADA, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur Y X, engagé par la société MANPOWER FRANCE par plusieurs contrats de travail temporaire à compter du 4 octobre 2007, a été mis à disposition de la société ANGELO MECCOLI & CIE dans le cadre de missions successives à compter du 4 juillet 2011, et ce, jusqu’au 25 juillet 2014. M. X a saisi la juridiction prud’homale aux fins d’obtenir la requalification de ses contrats de mission en contrat à durée indéterminée, ainsi que des sommes liées à l’exécution et la rupture de la relations de travail.

Par jugement du 13 septembre 2017, le Conseil de prud’hommes de MEAUX a débouté M. X de ses demandes.

M. X en a relevé appel.

Par conclusions récapitulatives auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, M. X demande à la cour de réformer le jugement et de’requalifier les contrats de mission par lesquels il a été mis à la disposition de la société ANGELO MECCOLI & Cie par la société MANPOWER France en contrat de travail à durée indéterminée.

Il demande de condamner la société ANGELO MECCOLI & Cie in solidum avec la société MANPOWER France à lui verser :

—  3.435 euros à titre d’indemnité de requalification

—  26 565, 00 euros au titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

—  2 576, 25 euros nets au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement.

—  6 870 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis

—  687 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis

Il demande en outre de condamner la société ANGELO MECCOLI & Cie à lui verser :

—  5.000 euros à titre de dommages-intérêts au titre du préjudice subi lié à la violation de ses

obligations en matière de sécurité au travail

—  5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination à l’embauche

Il demande de condamner la société MANPOWER France à lui verser :

—  1.6311,50 euros bruts à titre de rappel de salaires, outre la somme de 1.631,15 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés

—  1 794, 26 euros bruts à titre de rappel d’indemnité de fin de mission

—  14.235 euros bruts à titre de rappel sur indemnités de déplacement

—  5.910 euros bruts au titre de l’indemnité de paniers repas

—  6.123 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice pour hébergement non conforme

—  2.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’absence des visites médicales obligatoires

Il demande de condamner la société ANGELO MECCOLI & Cie et la société MANPOWER France à verser à M. X la somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives du 12 mars 2018, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société MANPOWER FRANCE demande de confirmer le jugement, de prendre acte que M. X ne formule aucun grief et ne reproche aucune faute à l’encontre de la SAS MANPOWER FRANCE au titre de sa demande de requalification, de mettre la SAS MANPOWER FRANCE hors de cause, de débouter Monsieur X de ses demandes, de débouter la société MECCOLI de sa demande de garantie formée à l’encontre de la SAS MANPOWER FRANCE, er de condamner Monsieur X au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives du 18 avril 2018, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société ANGELO MECCOLI & CIE demande de confirmer le jugement ou, à titre subsidiaire, de condamner la société MANPOWER FRANCE à garantir à hauteur de 50% les condamnations éventuellement prononcées à son encontre de la société ANGELO MECCOLI & CIE, et de de condamner M. X au paiement de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

****

MOTIFS

Sur la requalification des contrats de travail temporaire

Sur le bien-fondé de la demande

Aux termes des dispositions combinées des articles L.1251-5 et L.1251-6 du code du travail, la possibilité donnée à l’entreprise utilisatrice de recourir à des contrats de missions successifs avec le

même salarié intérimaire pour remplacer un ou des salariés absents ou pour faire face à un accroissement temporaire d’activité ne peut avoir pour objet, ni pour effet, de pourvoir durablement un emploi lié à son activité normale et permanente. Par application de l’article L.1251-40 du code du travail dans sa rédaction en vigueur du 1er mai 2008 au 24 septembre 2017, lorsqu’une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d’une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions précitées, ce salarié peut faire valoir auprès de l’entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission.

Au vu des explications fournies, la société ANGELO MECCOLI & CIE justifie le recours aux missions d’intérim en faisant valoir la nature irrégulière de son activité compte tenu des demandes du donneur d’ordre et des appels d’offres et marchés qui peuvent lui être attribués.

Or, elle ne transmet à cet égard aucun élément sur les demandes de chantier pour lesquelles le recours aux missions d’intérim était nécessaire ou, à tout le moins, ne démontre une corrélation entre la variation alléguée de l’activité et l’emploi récurrent de M. X, de sorte que la réalité de l’accroissement temporaire d’activité n’est pas établie.

Au vu des pièces versées aux débats, M. X a été engagé dans le cadre de 63 contrats de travail temporaire sur la période du 4 juillet 2011 au 25 juillet 2014 pour occuper le même emploi de man’uvre au sein de la société ANGELO MECCOLI & CIE aux fins de remplacer des salariés absents ou de faire face à un accroissement temporaire d’activité. Ses missions se sont donc succédées sur une période de trois ans avec de courtes interruptions, la plus longue étant de deux mois et quatorze jours du 1er février 2013 au 15 mars 2013.

Il s’ensuit que l’intéressé, engagé par la société de façon systématique et pour certaines missions au nom d’un motif dont la réalité n’est pas établie, a été employé en réalité pour faire face à un besoin structurel de main d''uvre.

Ainsi, en l’espèce, le recours au travail temporaire a eu pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice. En conséquence, il convient d’infirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point et de prononcer la requalification des contrats de travail temporaires de M. X sur la période du 4 juillet 2011 au 25 juillet 2014 en un contrat à durée indéterminée.

Sur la condamnation in solidum des sociétés

L’article L.1251-40 du code du travail relatif à la requalification du contrat de mission ne visant que l’entreprise utilisatrice, la responsabilité de l’entreprise de travail temporaire ne peut être engagée que s’il est démontré qu’elle a agi de concert avec l’entreprise utilisatrice pour contourner l’interdiction faite à celle-ci de recourir au travail temporaire pour pourvoir durablement un emploi lié à son activité normale et permanente.

En l’espèce, M. X sollicite la condamnation solidaire de la société utilisatrice ANGELO MECCOLI & CIE et de la société de travail temporaire MANPOWER FRANCE au paiement des sommes dues consécutivement à la requalification des contrats de travail temporaire, au motif que l’action des deux sociétés a conduit à superposer, pour des mêmes périodes, des contrats de mission avec des motifs de recours différents.

Au vu des pièces versées aux débats, aucune entente illicite entre la société ANGELO MECCOLI & CIE et la société MANPOWER FRANCE n’est démontrée, ni une méconnaissance de cette dernière de ses obligations d’entreprise de travail temporaire, de sorte que la société MANPOWER FRANCE doit être mise hors de cause.

Il n’y a pas lieu de retenir une condamnation de la société MANPOWER in solidum avec la société ANGELO MECCOLI & Cie en ce qui concerne les condamnations dues au titre de la requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée et des sommes dues au titre de la rupture de la relation de travail (dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, indemnité conventionnelle de licenciement, indemnité compensatrice de préavis et congés payés sur préavis).

Sur l’appel en garantie de la société MANPOWER France

La société ANGELO MECCOLI & CIE sollicite le recours en garantie de la société MANPOWER FRANCE au motif que cette dernière, en sa qualité de professionnelle de l’intérim, était tenue d’une obligation de conseil à son égard.

Cependant, le seul fait que l’entreprise de travail temporaire soit une professionnelle de l’intérim ne crée pas pour elle une obligation de vérification de la légalité de l’effectivité de la relation de travail entre l’entreprise utilisatrice et le travailleur intérimaire, qui supposerait d’ailleurs de s’immiscer dans la gestion de l’entreprise utilisatrice. Il revient en effet à l’entreprise utilisatrice de s’assurer qu’elle respecte les dispositions d’ordre public du code du travail.

En conséquence, il convient de débouter la société ANGELO MECCOLI & CIE de son appel en garantie de la société MANPOWER FRANCE.

Sur les conséquences indemnitaires

Par application de l’article L.1251-41 du code du travail, si le juge fait droit à la demande de requalification du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l’entreprise utilisatrice, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.

Cette indemnité doit être calculée, non seulement sur le salaire de base, mais également sur les accessoires du salaire.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point et de condamner la société ANGELO MECCOLI & CIE à payer à M. X la somme de 3.435 euros à titre d’indemnité de requalification.

La société ayant mis fin aux relations de travail au seul motif de l’arrivée du terme du contrat improprement qualifié de contrat de travail temporaire, la rupture s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par application de l’article L.1235-3 dans sa rédaction en vigueur du 1er mai 2008 au 24 septembre 2017, le salarié dont le licenciement survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse bénéficie d’une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être aux salaries des six derniers mois.

Au vu des pièces et des explications fournies, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée (salaire moyen brut mensuel de référence retenu de 2.535 euros au vu des éléments produits), de l’ancienneté du salarié (période de travail du 4 juillet 2011 au 25 juillet 2014) et des conséquences de la rupture à son égard, la cour dispose des éléments nécessaires et suffisants pour fixer à 15.210 euros le montant de la réparation du préjudice subi en application de l’article L.1235-3 du code du travail dans sa rédaction ici applicable.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point et de condamner la société ANGELO MECCOLIE & CIE à payer à M. X la somme de 15.210 euros à titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Aux termes de l’article 10.3 de la convention collective nationale des ouvriers du bâtiments ici applicable applicable à la société ANGELO MECCOLIE & CIE, l’employeur verse au salarié justifiant de deux à cinq années d’ancienneté dans l’entreprise une indemnité de licenciement égale à un dixième de mois de salaire par année d’ancienneté. Par application de l’article L.1234-9 du code du travail dans sa rédaction en vigueur du 27 juin 2008 au 24 septembre 2017, le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Aux termes de l’article R.1234-2 du code du travail dans sa version ici applicable, l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d’ancienneté. Les dispositions conventionnelles étant moins favorables que les dispositions légales, il convient de calculer l’indemnité de licenciement conformément aux articles L.1234-9 et R.1234-2 du code du travail.

En conséquence, au vu des éléments versés au débat et compte tenu de l’ancienneté de l’intéressé, il convient d’infirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point et de condamner la société ANGELO MECCOLIE & CIE à payer à M. X la somme de 1.605,5 euros à titre d’indemnité légale de licenciement.

Par application de l’article L.1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit à un préavis de deux mois s’il justifie d’une ancienneté de services continus d’au moins deux ans.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point et de condamner la société ANGELO MECCOLIE & CIE à payer à M. X les sommes de 5.070 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et de 507 euros au titre des congés payés y afférents.

Sur le non-respect des conditions minimales de sécurité

Aux termes de l’article L.1251-21 du code du travail, pendant la durée de la mission, l’entreprise utilisatrice est responsable des conditions d’exécution du travail, telles qu’elles sont déterminées par les dispositions légales et conventionnelles applicables au lieu de travail. Pour l’application de ces dispositions, les conditions d’exécution du travail comprennent limitativement ce qui a trait à la durée du travail, au travail de nuit, au repos hebdomadaire et aux jours fériés, à la santé et la sécurité au travail et au travail des femmes, des enfants et des jeunes travailleurs.

M. X sollicite le paiement de dommages et intérêts pour manquement de la société ANGELO MECCOLIE & CIE à ses obligations en matière de sécurité au travail.

Au vu des pièces versées aux débats, M. X se limite à transmettre une photographie non circonstanciée d’un chantier pour faire valoir que la société utilisatrice aurait violé les normes de sécurité et d’hygiène, sans en faire une quelconque démonstration.

Le défaut de mise en 'uvre de mesures de décontamination et la nécessité de prendre ces mesures ne sont pas établis, ainsi que l’absence d’équipement invoqué par l’appelant qui ne démontre pas la forte perte d’audition qui en aurait découlé, et ce alors qu’il ressort du compte rendu de son accident de travail du 10 février 2012 qu’il portait ses équipements de protection individuelle (EPI). S’agissant dudit accident de travail, la société démontre la prise en considération des conditions météorologiques en ayant organisé un accueil de sécurité sur le chantier au-delà des mesures générales de prévention dispensées à tout nouveau travailleur embauché et de la formation «'Sécurité ferroviaire et caténaire'» que M. X reconnait avoir suivi. Enfin, il ne peut être reproché à la société ANGELO MECCOLIE & CIE l’absence de structure pour se restaurer ou se changer dès lors

que l’alinéa 2 de l’article L.1251-21 du code du travail limite les conditions d’exécution du travail dont est responsable l’entreprise utilisatrice à ce qui a trait à la durée du travail, au travail de nuit, au repos hebdomadaire et aux jours fériés, à la santé et la sécurité au travail et au travail des femmes, des enfants et des jeunes travailleurs.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point et de débouter M. X de sa demande de dommages et intérêts pour manquement aux conditions minimales de sécurité.

Sur la discrimination à l’embauche

Par application de l’article L.1132-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l’article 1er de la loi du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L.3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

Aux termes de l’article L.1134-1 du code du travail dans sa rédaction ici applicable, lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une telle discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En l’espèce, M. X fait valoir que la société ANGELO MECCOLO & CIE ne lui a jamais proposé un contrat à durée indéterminée alors qu’elle aurait embauché d’autres travailleurs temporaires aux compétences comparables et justifiant d’anciennetés moindres.

Au vu des pièces versées aux débats et des explications fournies, c’est à juste titre que les premiers juges ont retenu que la demande de M. X n’était étayée d’aucun élément laissant supposer l’existence d’une discrimination. A tout le moins, aucun des motifs prohibés par l’article L.1132-1 du code du travail n’est invoqué par l’appelant alors qu’il n’y a discrimination que si le traitement défavorable infligé au travailleur est fondé sur un de ces motifs.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point et de débouter M. X de sa demande de dommages et intérêts pour discrimination à l’embauche.

Sur les demandes de rappel de salaire, d’indemnités de déplacement et de paniers repas

M. X sollicite des rappels de salaire auprès de la société MANPOWER FRANCE à titre d’heures de déplacement domicile/entreprise, d’heures de déplacement entreprise/chantiers et au titre d’ heures de nuit, ains que des congés payés afférents.

Selon M. X, son temps de déplacement pour se rendre sur certains chantiers dépassait le temps normal de trajet entre son domicile et son lieu habituel de travail qui, selon lui, devait être fixé à son agence de rattachement.

Il soutient que ce temps devait faire l’objet d’une rémunération qui n’a pas été versée puisque la

société MANPOWER France a considéré que ce temps ne constituait pas du temps de travail effectif.

M. X produit un document mentionnant les trajets qu’il prétend avoir effectués et qui constituent selon lui un temps de travail effectif, ajoutés au temps de travail passé sur le lieu du chantier. Il soutient que l’entreprise de travail temporaire lui doit :

—  518 heures de déplacement domicile/entreprise â 9,50€ en moyenne de l’heure, soit 4

921,00 euros

—  899 heures déplacement entreprise/chantiers à 9,50€ en moyenne de l’heure, soit 8 540,50 euros

—  300 heures de nuit à 9,50€ en moyenne de l’heure, soit 2 850 €.

Il sollicite la condamnation de la société MANPOWER FRANCE à lui payer la somme globale de 16 311,50 € bruts à titre de rappels de rémunération et 1 631,15 € au titre des congés payés afférents.

Cependant, s’agissant des heures de déplacement, au vu des éléments versés au débat, le temps de déplacement domicile-entreprise ne doit pas ici être considéré comme un temps de travail effectif rémunéré comme tel, mais un temps de trajet et les bulletins de salaire justifient que le salarié a bien perçu les indemnités de déplacement mises en place au sein de la société MECCOLI à raison de 25 € par jour. Il est par ailleurs observé à cet égard que M. X établit à tort des demandes au départ de l’agence de la SAS MANPOWER FRANCE qui lui aurait proposé la mission, alors même qu’il ne devait en aucun cas s’y rendre avant chaque mission, l’agence MANPOWER n’ayant été ni son lieu de travail habituel, ni son lieu de domicile. Au vu des éléments produits et explications fournies, il n’est dû au salarié aucun rappel au titre d’heures de déplacements domicile ou au titre de déplacements entreprise/chantiers.

Pour le surplus, au titre d’heures de nuit, la société ANGELO MECCOLI verse aux débats les décomptes hebdomadaires des heures rémunérées à M. X. Il ressort de l’ensemble des documents versés au débat, y compris des bulletins de salaire, que l’intéressé a été rempli de ses droits, y compris s’agissant des heures de nuit.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point.

S’agissant des demandes au titre d’indemnités de déplacement et de paniers repas, M. X sollicite le versement par la société MANPOWER FRANCE de la somme de 14.235 euros à titre de rappel d’indemnités de déplacement, et 5.910 euros à titre de rappel des paniers repas en invoquant la convention collective des employés, techniciens et agents de maîtrise des travaux publics du 12 juillet 2006 alors que la société MECCOLI relève de la convention collective des ouvriers du bâtiment.

S’agissant des demandes formulées, les éléments produits montrent que le salarié a perçu les indemnités de déplacement et les indemnités repas auxquelles il pouvait prétendre sur la période travaillée.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point et de débouter M. X de ses demandes à titre d’indemnités de déplacement et de paniers repas.

Sur l’ indemnités de fin de mission

M. X sollicite une indemnité de fin de mission due sur les rappels de salaire qu’il formule dans le cadre de la présente instance. Cependant, l’intéressé est débouté de ses demandes de rappel de salaire et n’apporte pas de justification sur une indemnité de fin de mission qui lui serait due. Il sera

débouté de sa demande.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point.

Sur le non-respect des conditions d’hébergement

En l’espèce, M. X sollicite le paiement de dommages et intérêts pour manquement de la société MANPOWER FRANCE à son obligation générale de maintien de la propreté et de l’hygiène des locaux mis à disposition des salariés. Il sollicite la somme de 6 123 € au motif qu’il a été dans l’obligation de partager sa chambre d’hôtel avec un ou deux autres salariés, lesquels auraient tenu des propos à consonance raciste.

Monsieur X Il se limite à produire à l’appui de sa demande un document de présentation sur l’hôtellerie 'formule 1"

La SAS MANPOWER FRANCE rappelle qu’elle n’est jamais intervenue dans le choix des logements attribués dans la mesure où seule la société MECCOLI pouvait l’effectuer et s’y devait légalement conformément à l’article L.1251-21 du code du travail qui dispose:

« Pendant la durée de la mission, l’entreprise utilisatrice est responsable des conditions d’exécution du travail, telles qu’elles sont déterminées par les dispositions légales et conventionnelles applicables au lieu de travail. (') »

Au vu des éléments produits au débat, il n’est pas démontré que les conditions d’hébergement de M. X ne correspondaient pas aux normes en vigueur et n’étaient pas satisfaisantes, et M. X n’apporte la preuve d’aucun préjudice subi.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point et de débouter M. X de sa demande.

Sur l’absence de visite médicale

Aux termes de l’article L.1251-22 du code du travail, les obligations relatives à la médecine du travail sont à la charge de l’entreprise de travail temporaire. En contravention avec les termes des articles R.4624-10 et R.4624-31 du code du travail, il n’est pas justifié en l’espèce que le salarié a bénéficié, au moment de son embauche et au plus tard à l’issue de sa période d’essai, d’une visite médicale ni d’une visite médicale de reprise à l’issue de son absence d’au moins 30 jours pour cause d’accident du travail. Cependant, il n’est démontré aucun préjudice à cet égard, de sorte qu’il n’y a pas lieu d’accueillir favorablement la demande de M. X.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes sur ce point et de débouter M. X de sa demande de dommages et intérêts à l’encontre de la société MANPOWER FRANCE pour absence des visites médicales.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement, mais seulement en ce qu’il a rejeté la demande requalification des contrats de travail temporaires de M. X sur la période du 4 juillet 2011 au 25 juillet 2014 en un contrat à durée indéterminée et débouté M. X de ses demandes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à titre d’indemnité légale de licenciement, d’indemnité compensatrice de préavis et au titre des congés payés sur préavis,

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés:

REQUALIFIE les contrats de travail temporaires de M. X sur la période du 4 juillet 2011 au 25 juillet 2014 en un contrat à durée indéterminée,

CONDAMNE la société ANGELO MECCOLI & CIE à payer à M. X la somme de:

—  15.210 euros à titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

—  1.605,5 euros à titre d’indemnité légale de licenciement

—  5.070 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis

—  507 euros au titre des congés payés y afférents.

REJETTE la demande de condamnation in solidum de la société MANPOWER FRANCE concernant les condamnations susvisées,

DEBOUTE la société ANGELO MECCOLI & CIE de son appel en garantie de la société MANPOWER FRANCE.

CONFIRME le jugement en ses autres dispositions,

Y ajoutant,

Vu l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la société ANGELO MECCOLI & CIE à payer à M. X en cause d’appel la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toute autre demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties du surplus des demandes ,

CONDAMNE la société ANGELO MECCOLI & CIE aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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