Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 4 mars 2020, n° 18/23996

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 - ch. 5, 4 mars 2020, n° 18/23996
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/23996
Sur renvoi de : Cour de cassation, 25 octobre 2017, N° 16-18.434
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 5

ARRÊT DU 04 MARS 2020

(n° 25 /2020, 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/23996

N° Portalis 35L7-V-B7C-B6W33

Décisions déférées à la Cour :

Arrêt du 26 Octobre 2017 – Cour de cassation – Pourvoi n° 16-18.434

Arrêt du 12 février 2016 – Cour d’appel de Paris – Pôle 4 chambre 6 – RG n°14/10526

Jugement du 18 mars 2014 – Tribunal de Grande instance de Paris – 4e chambre – 1re section – RG n°10/14874

RENVOI APRÈS CASSATION

DEMANDEURS À LA SAISINE

Monsieur C X, exerçant sous l’enseigne 'ENTREPRISE C X', inscrite au Registre de la Chambre des Métiers de Haute Savoie sous le n° 397.635.947.740

[…]

[…]

[…]

et

Maître E Y, pris en sa qualité de Commissaire à l’exécution du plan de Monsieur C X exerçant sous l’enseigne 'ENTREPRISE C X', fonction à laquelle il a été nommé suivant jugement rendu par le Tribunal de Commerce d’Annecy le 11 octobre 2011, substitué par le Tribunal de Grande Instance d’Annecy

domicilié […]

[…]

Représentés par Me F G H, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

Ayant pour avocat plaidant Me Charles-Emmanuel RICCHI, avocat au barreau d’ANNECY

DÉFENDERESSES À LA SAISINE

SA S.E.C.I – SUD CONSTRUCTIONS INDUSTRIALISEES

[…]

[…]

Représentée par Me Maryline LUGOSI de la SELARL MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073

Ayant pour avocat plaidant Me Franck PEYRON de la SELARL ALART ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

SA AXA FRANCE IARD es qualité d’assureur de la Société TRIVALOR (RCS de BOURG EN BRESSE 452.503.733) radiée d’office le 17 mars 2015 consécutivement à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif le 11 mars 2015.

Ayant son siège social […]

[…]

Défaillante (non représentée et assignée à personne habilitée)

SA AXA FRANCE IARD es qualité d’assureur de la Société SECI.

Ayant son siège social […]

[…]

Défaillante (non représentée et assignée à personne habilitée)

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 03 Décembre 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Agnès CHAUMAZ, Présidente de chambre

Mme Agnès TAPIN, Présidente de chambre exerçant les fonctions de Conseillère

Mme Valérie MORLET, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme Agnès TAPIN, Présidente de chambre exerçant les fonctions de Conseillère, dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.

Greffière lors des débats : Mme Vanessa ALCINDOR

Greffière lors de la mise à disposition : Mme Roxanne THERASSE

ARRÊT :

- Réputé Contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Marie-Agnès CHAUMAZ, Présidente de chambre et par Mme Roxanne THERASSE, Greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

******

FAITS

La SCI LES MARAIS DU BULLOZ, propriétaire d’un immeuble contenant des locaux commerciaux, situé […], Parc d’activités économiques des Glaisins à Annecy le […]), l’a vendu en 2002 à la SCI LE PARMELAN, assurée auprès de la société AVIVA suivant un contrat « Multirisques professionnelles + Bâtiment ».

Par contrat du 28 septembre 1998, la SCI LES MARAIS DU BULLOZ a donné à bail des locaux de cet immeuble à Monsieur C X, exerçant en son nom propre comme artisan-plombier sous l’enseigne : « ENTREPRISE C X » ou « ETABLISSEMENTS X », et assuré suivant un contrat « Multirisque professionnelle » par la société ACTE IARD depuis le 30 septembre 2005.

Ce contrat a été renouvelé en 2007 par la SCI LE PARMELAN venant aux droits de la SCI LES MARAIS DU BULLOZ.

Le 20 juin 2006, cette même société a signé un bail commercial portant sur d’autres locaux de l’immeuble précité avec la société MECALAC, ayant pour activité la « fabrication de machines et équipements ». La société MECALAC est assurée auprès de la SA AIG EUROPE pour une police dommages et pertes d’exploitation et auprès de la SA GENERALI pour sa responsabilité civile.

Le 10 juin 2008, la société MECALAC, désirant modifier ses locaux, a confié à la société Sud Est Constructions lndustrialisées (ci après la société SECI) des travaux d’extension dont de démolition des cloisons intérieures du local loué et d’un plancher intérieur composé d’un bac acier en face intérieure dans lequel le béton a été coulé.

Le 20 juin suivant, la société SECI, assurée par la société AXA FRANCE IARD, a sous-traité ces travaux avec l’accord de la société MECALAC, à la société TRI-VALOR, laquelle a fait appel à la société EST METAL, assurée par la SA AXA France IARD, pour découper au chalumeau le bac acier du plancher.

Le 2 juillet 2008, lors des opérations de découpe au chalumeau, des particules de métal en fusion ont été projetées, par l’espace existant entre les tôles à découper et la poutre IPN, dans le local de Monsieur X et y ont causé un incendie, détruisant ce local selon le rapport des pompiers.

La société AVIVA, assureur de la SCI LE PARMELAN, l’a indemnisée et a obtenu, dans le cadre de son recours subrogatoire, la désignation de Monsieur D B, en qualité d’expert, par ordonnance de référé du 28 octobre 2008.

Le rapport a été déposé le 2 juin 2009 (cf pièce 1 de Monsieur X).

PROCÉDURES DE PREMIÈRE INSTANCE ET D’APPEL

Par jugement du 12 octobre 2010 rendu par le tribunal de commerce d’Annecy, Monsieur X a été placé en redressement judiciaire, Monsieur Y ayant été désigné mandataire judiciaire.

Par jugement postérieur du 11 octobre 2011 du tribunal de grande instance d’Annecy, un plan de

redressement de l’entreprise de Monsieur X a été arrêté, Monsieur Y ayant été nommé commissaire à l’exécution du plan.

Après l’échec d’une tentative de règlement amiable, Monsieur X et Monsieur Y, mandataire judiciaire, ont fait assigner en référé les 7, 8, 11 et 12 octobre 2010 la société MECALAC, la société AIG EUROPE, la société TRI-VALOR, la société AXA, la société SECI et la société EST METAL ainsi que la société GENERALI ASSURANCES aux fins de versement d’une provision sur ses préjudices devant le juge des référés du tribunal de grande instance d’Annecy.

Par ordonnance du 6 décembre 2010, ce juge a déclaré recevable l’action de Monsieur X, mais a rejeté « la demande de provision qui se heurte à des contestations sérieuses ».

Par acte délivré le 7 octobre 2010 à la société MECALAC, à la société AIG Europe France (devenue société CHARTIS), à la société SECI, à la société AXA et à la société EST METAL, et le 8 octobre 2010 à la société TRI-VALOR, la SCI LE PARMELAN et son assureur la société AVIVA Assurances ont saisi le tribunal de grande instance de Paris.

Courant 2012, sont intervenus volontairement à cette procédure la société GENERALI, Monsieur X et Monsieur Y, commissaire à l’exécution du plan de redressement de Monsieur X.

Par jugement contradictoire du 18 mars 2014, le tribunal a :

— donné acte aux Etablissements X assistés de Monsieur E Y, pris en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de Monsieur X suivant jugement du tribunal de commerce d’Annecy du 11 octobre 2011, substitué par le tribunal de grande instance d’Annecy, et à la société GENERALI IARD de leur intervention,

— déclaré la société AVIVA recevable en ses demandes,

— condamné in solidum la société SECI, la société TRI-VALOR et dans les limites des contrats et sous réserve de la franchise la société GENERALI IARD et la société AXA FRANCE IARD à verser à la société AVIVA la somme de 311.388,63 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement,

— condamné in solidum la société SECI, la société TRI-VALOR et dans les limites des contrats et sous réserve de la franchise la société AXA FRANCE IARD à verser à la SCI LE PARMELAN la somme de 16.415 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement,

— condamné in solidum la société SECI, la société TRI-VALOR et dans les limites des contrats et sous réserve de la franchise la société AXA FRANCE IARD à verser aux Etablissements X assistés par Maître E Y la somme de 127.925,95 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du jugement,

— condamné in solidum la société SECI, la société TRI-VALOR, la société GENERALI IARD et la société AXA FRANCE IARD à verser :

*à la société AVIVA la somme de 2.000 €,

*à la SCI LE PARMELAN la somme de 2.000 €,

*aux Etablissements X assistés par Monsieur Y la somme de 2.000 €,

*à la société EST METAL la somme de 2.000 €,

par application de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire,

— condamné in solidum la société SECI, la société TRI-VALOR, la société GENERALI IARD et la société AXA FRANCE IARD aux dépens dont le recouvrement pourra être poursuivi conformément à l’article 699 du code de procédure civile,

— débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

Par déclaration reçue le 13 mai 2014, Monsieur X et Monsieur E Y, en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de Monsieur X, ont interjeté appel du jugement.

La société TRI-VALOR a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Bourg en Bresse du 17 septembre 2014, puis radiée d’office le 17 mars suivant. Son liquidateur est la SELARL MJ SYNERGIE.

Par arrêt réputé contradictoire en date du 12 février 2016, la cour d’appel de céans a :

— ordonné la jonction des instances 14/10526 et 14/20932 qui seront poursuivies sous le numéro 14/10526,

— infirmé le jugement du 18 mars 2014 en ce qu’il a :

*rejeté la demande d’indemnisation de Monsieur X au titre de la perte d’exploitation,

*dit que la SA GENERALI IARD n’était pas tenue au titre de la condamnation prononcée au pro’t de la SCI LE PARMELAN,

*rejeté la demande reconventionnelle de la société MECALAC,

Statuant à nouveau,

— condamné in solidum la SA SECI et la SA AXA FRANCE IARD, tant en sa qualité d’assureur de la SA SECI qu’en sa qualité d’assureur de la société TRI-VALOR à payer à Monsieur X et à Monsieur Y en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan la somme de 160.514,95 €,

— fixé à la somme de 160.514,95 € la créance de Monsieur X à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société TRI VALOR,

— dit que la SA GENERALI IARD, assureur de la société MECALAC est tenue in solídum avec son assurée au paiement des sommes allouées à la SA AVIVA et la SCI LE PARMELAN,

Y ajoutant et statuant sur les recours en garantie :

— dit que les recours en garantie et la contribution à la dette s’effectueront dans les proportions suivantes :

*société EST METAL, garantie par la SA AXA France IARD : 60%

*société TRI-VALOR, garantie par la SA AXA France IARD : 20%

*société SECI, garantie par la SA AXA France IARD : 15%

*société MECALAC, garantie par la SA GENERALI IARD : 5%

— condamné in solidum la société EST METAL, garantie par la SA AXA FRANCE IARD, la SA AXA FRANCE IARD assureur de la société TRI VALOR et la société SECI, garantie par la SA AXA FRANCE IARD, à payer à la société MECALAC la somme de 121.193,40 €,

— dit que la contribution à cette dette s’effectuera dans les proportions suivantes :

*SARL EST METAL, garantie par la SA AXA France IARD : 60%

*SA AXA France IARD, assureur de la SARL TRI VALOR : 20%

*SA SECI, garantie par la SA AXA France IARD : 20%,

— confirmé pour le surplus la décision déférée,

— Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamné la SA AXA FRANCE IARD à proportion de 3/4 et la SA GENERALI IARD, à proportion de 1/4 à payer à :

*Monsieur X et Maître Y en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan, ensemble, la somme de 4.000 €,

*la SA AVIVA et la SCI LE PARMELAN, ensemble la somme de 4.000 €,

— Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamné la SA AXA FRANCE IARD à payer à la SA AIG EUROPE la somme de 3.000 €,

— condamné, dans les mêmes proportions, la SA AXA France IARD et la SA GENERALI IARD aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION

Sur pourvoi de Monsieur X et de Maître Y, agissant en qualité de commissaire à l’exécution du plan de Monsieur X, la 2e Chambre civile de la Cour de cassation a par arrêt rendu le 26 octobre 2017 :

« [Rejeté] les pourvois incidents ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne in solidum la société SECI et la société Axa France IARD, tant en qualité d’assureur de la société SECI qu’en qualité d’assureur de la société Tri’Valor, à payer à M. X et M. Y en qualité de commissaire à l’exécution du plan la seule somme de 160.514,95 € et [rejeté] les demandes formées au titre de la perte de la propriété commerciale et de la perte des aménagements intérieurs réalisés par le preneur, l’arrêt rendu le 12 février 2016, entre les parties, par la cour d’appeI de Paris ; [remis], en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a [renvoyées] devant la cour d’appeI de Paris, autrement composée … »

RENVOI APRES CASSATION

Le 12 novembre 2018, Monsieur X et Monsieur Y, pris en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de Monsieur X, ont saisi la cour d’appel de Paris, comme cour de renvoi désignée par la Cour de cassation, à l’encontre des intimées suivantes :

— la compagnie AXA FRANCE IARD prise en sa qualité d’assureur de la société SECI,

— la société S.E.C.I.

— la compagnie AXA FRANCE IARD, prise en sa qualité d’assureur de la société TRI-VALOR radiée d’office,

pour obtenir, « statuant dans les limites de la cassation, Vu l’article 455 alinéa 2 du code de procédure civile, l’appel tend à obtenir l’annulation ou l’infirmation du jugement ( RG. : 10/14874) rendu le 18 mars 2014 … en ce que cette décision n’a condamné in solidum SECI, TRI-VALOR et dans la limite des contrats et sous réserve de la franchise, AXA France IARD à verser à Monsieur X exerçant sous l’enseigne Etablissements X, la somme de 127.925,95 euros augmenté des intérêts au taux légal, somme portée à 160.514,95 euros par l’arrêt cassé qui ne portait pas sur l’intégralité du préjudice et rejetait la demande formée du chef de la perte de la propriété commerciale, de la perte de jouissance des aménagements réalisés dans les lieux loués. »

Monsieur X et Monsieur Y, es qualités, ont fait signifier des conclusions par RPVA les 10 et 18 janvier 2019, et par actes d’huissier, en même temps que la déclaration de saisine de la cour de céans et de l’avis de fixation délivré par le greffe :

— le 11 janvier 2019, à la SCI LE PARMELAN, avec une remise à domicile, vérifié, le gérant en étant absent,

— le 14 janvier 2019, à la société MECALAC, avec une remise à personne morale en la personne de d’une assistante de direction habilitée,

— le 15 janvier 2019, à la société EST METAL avec une remise à personne morale en la personne de son PDG,

— le 16 janvier 2019, à la société AXA FRANCE IARD, en qualité d’assureur des sociétés SECI, TRI-VALOR et EST METAL, avec une remise à personne morale à « une personne habilitée »,

— le 16 janvier 2019, à la société AIG Europe avec une remise à personne morale à « une personne habilitée »,

— le 16 janvier 2019, à la société AVIVA Assurances avec une remise à personne morale à « une personne habilitée »,

— le 16 janvier 2019, à la société GENERALI avec une remise à personne morale à « une personne habilitée ».

Par conclusions signifiées le 4 avril 2019, Monsieur X et Maître Y, mandataire judiciaire, demandent de :

— dire définitives et confirmer en tant que de besoin les dispositions du jugement du 18 MARS 2014 en ce qu’il a condamné in solidum la société SECI, ainsi qu’AXA FRANCE IARD, prise en sa qualité d’assureur des sociétés SECI et TRI-VALOR à verser à Monsieur X la somme de 127.925,95 € augmentée des intérêts au taux légal, somme portée à 160.514,95 euros par l’arrêt du 12 février 2016, dispositions non atteintes par la cassation ;

Recevant Monsieur X en son appel partiel, l’y déclarer bien fondé ;

Infirmant partiellement le jugement entrepris ;

— condamner in solidum la société SECI et la société AXA France IARD prise tant en sa qualité d’assureur de la société SECI que de la société TRI-VALOR, à payer à Monsieur X exerçant sous l’enseigne ENTREPRISE C X les sommes de :

*au titre de la perte de la propriété commerciale, la somme de 75.000 €,

*au titre de la perte de jouissance des aménagements effectués dans les locaux loués, la somme de 25.333 € outre intérêts au taux légal sur cette somme à compter de la date de notification de ses conclusions d’intervention devant le tribunal de grande instance de Paris du 26 mars 2012,

A TITRE SUBSIDIAIRE et pour le cas où la cour ne s’estimerait pas suffisamment éclairée par les pièces versées aux débats,

— ordonner une mesure d’expertise et désigner tel expert qu’il appartiendra avec pour mission de donner un avis sur la valeur de l’indemnité due au titre de la perte de la propriété commerciale de Monsieur X exerçant sous l’enseigne ENTREPRISE C X pour les exercices 2009-2010 et 2011 ;

— déclarer la société SECI irrecevable en ses prétentions contenues dans son appel incident contraires à l’arrêt du 12 février 2016 non atteintes par la cassation ;

Subsidiairement, l’y déclarer mal fondée ;

— pour le surplus la déclarer mal fondée ;

— Prononcer la mise hors de cause de Monsieur Y dont la mission de commissaire à l’exécution du plan a pris fin ;

— EN TOUT ETAT DE CAUSE, condamner solidairement les sociétés SECI et la compagnie AXA France IARD en sa double qualité d’assureur des sociétés SECI et TRI-VALOR à verser à Monsieur X la somme de 6.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner les mêmes solidairement aux dépens de première instance et d’appel, y compris les dépens de l’arrêt cassé, en ce compris les frais d’expertise, dont le recouvrement sera poursuivi par Maître F G-H conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 8 février 2019, la société SECI demande de :

Vu l’article 1315 du code civil,

Vu les articles 9 et 146 du code de procédure civile,

Vu les articles 1382 et 1383 du code civil,

Vu l’article 1384 alinéa 1 du code civil,

Vu les dispositions du Livre cinquième du code du travail, Titre 1er,

Vu les pièces versées aux débats,

Vu le rapport d’expertise de Monsieur B, déposé le 2 juin 2009,

— dire injustifiées les demandes de Monsieur X et de Monsieur Y ;

En conséquence, débouter Monsieur C X et Monsieur Y de l’intégralité de leurs demandes, à toutes fins qu’elles comportent ;

Réformant le jugement de première instance :

— d’une part, constater que la société SECI avait sur le chantier de la société MECALAC, la qualité d’entreprise générale, chargée d’une simple mission d’exécution de travaux ;

— constater que la société SECI n’avait ni la charge de la rédaction du plan de prévention, ni la charge de la rédaction du permis de feu ;

— constater que la société SECI n’était pas informée de l’intervention de la société EST METAL et d’un chalumiste sur le chantier ;

En conséquence :

— dire que la responsabilité de la société SECI ne peut être engagée relativement au sinistre incendie intervenu le 2 juillet 2008, en l’absence de toute preuve de faute, contractuelle ou délictuelle, qui lui serait imputable ;

— prononcer, la mise hors de cause de la société SECI ;

D’autre part, constater que la société MECALAC avait, en sa qualité d’entreprise utilisatrice, la charge de l’établissement du plan de prévention nécessaire à l’exécution des travaux et donc du permis de feu ;

— constater qu’au terme du plan de prévention établi par la société MECALAC, tout risque d’incendie était expressément exclu ;

— constater que seule la société TRI’VALOR avait connaissance de l’intervention de la société EST METAL et des modalités selon lesquelles elle devait procéder au découpage de la dalle béton ;

— constater que la société EST METAL était seule gardienne du chalumeau ayant projeté les billes de métal en fusion à l’origine exclusive de l’incendie ;

En conséquence :

— constater que les seules entreprises défaillantes dans le cadre de leurs obligations légales ou contractuelles au titre de l’exécution des travaux sont les sociétés MECALAC, TRI-VALOR et EST METAL ;

— dire, par conséquent, que seules les sociétés MECALAC, TRI-VALOR et EST METAL devront voir leur responsabilité retenue au titre des dommages résultant du sinistre incendie intervenu le 2 juillet 2008 ;

En tout état de cause et si par extraordinaire la Cour devait retenir la responsabilité de la société SECI :

— condamner la société AXA FRANCE IARD à relever et garantir la société SECI de l’ensemble des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ;

— condamner Monsieur C X, Maître E Y et la société MECALAC, ou

qui mieux le devra, à payer à la société SECI la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner les mêmes aux entiers dépens de l’instance, distraits au profit de Maître FORESTIER, sur son affirmation de droit.

Par acte d’huissier du 18 février 2019, la société SECI a fait signifier ses conclusions du même jour à la compagnie AXA FRANCE IARD, en qualité d’assureur des sociétés SECI et TRI-VALOR, avec une remise à personne morale à « une personne habilitée ».

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 26 novembre 2019.

La compagnie AXA FRANCE IARD, les sociétés TRI-VALOR, EST METAL, PARMELAN et METALAC n’ont pas constitué avocat.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux écritures des parties conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE

Par jugement du 12 février 2019, le tribunal de commerce d’Annecy a constaté que l’exécution du plan de redressement par continuation de la procédure de redressement ouverte au bénéfice de Monsieur X est achevée, et a mis à fin à la mission de la SELARL MJ ALPES ès qualité de commissaire à l’exécution du plan, représentée par Monsieur Y.

Ce dernier est dès lors est mis hors de cause, Monsieur X étant depuis ce jugement in bonis.

Les écritures de Monsieur X et de Monsieur Y, mandataire judiciaire, du 4 avril 2019 n’ont pas été signifiées par huissier aux sociétés non représentées par un avocat, c’est à dire les sociétés EST METAL, MECALAC, LE PARMELAN, AXA, assureur des sociétés TRI-VALOR, EST METAL et SECI, AIG Europe, AVIVA Assurances, GENERALI.

Certes de nouvelles phrases ont été ajoutées aux conclusions précédentes de Monsieur X et de Maître Y des 10 et 18 janvier 2019, pages 7, 9 à 11, et une nouvelle pièce a été produite, celle n° 30 concernant un jugement rendu le 12 février 2019 par le tribunal de commerce d’Annecy.

Mais dès lors que le dispositif des écritures du 4 avril 2019 est identique à celui des conclusions signifiées à toutes les parties intimées précitées les 10 et 18 janvier 2019, il convient de retenir ces dernières pour elles ainsi que la pièce n° 30 qui est une décision judiciaire rendue publiquement.

Sur l’étendue de la saisine de la présente cour d’appel

L’étendue de la saisine de la cour d’appel est strictement délimitée par la Cour de cassation dans les motifs et le dispositif de son arrêt.

La cour ne doit statuer que sur les demandes de Monsieur X formées au titre :

— de la perte de la propriété commerciale,

— et de la perte des aménagements intérieurs réalisés par le preneur, c’est à dire lui-même.

Ne peuvent donc pas être remis en cause :

— le principe de la condamnation in solidum de la SA SECI et de la SA AXA FRANCE IARD, tant en sa qualité d’assureur de la SA SECI qu’en sa qualité d’assureur de la société TRI-VALOR, à payer à Monsieur X et à Monsieur Y en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan une certaine somme au titre de la réparation de tous les dommages subis par Monsieur X ;

— le principe de la fixation à une certaine somme de la créance de Monsieur X à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société TRI VALOR,

— et qu’il a été dit :


que la SA GENERALI IARD, assureur de la société MECALAC est tenue in solidum avec son assurée au paiement des sommes allouées à la SA AVIVA et la SCI LE PARMELAN,

Y ajoutant et statuant sur les recours en garantie :


que les recours en garantie et la contribution à la dette s’effectueront dans les proportions suivantes :

*société EST METAL, garantie par la SA AXA France IARD : 60%

*société TRI-VALOR, garantie par la SA AXA France IARD : 20%

*société SECI, garantie par la SA AXA France IARD : 15%

*société MECALAC, garantie par la SA GENERALI IARD : 5%

— la condamnation in solidum de la société EST METAL, garantie par la SA AXA FRANCE IARD, la SA AXA FRANCE IARD assureur de la société TRI VALOR et la société SECI, garantie par la SA AXA FRANCE IARD, à payer à la société MECALAC la somme de 121.193,40 €,

— et qu’il a été dit que la contribution à cette dette s’effectuera dans les proportions suivantes :

*SARL EST METAL, garantie par la SA AXA France IARD : 60%

*SA AXA France IARD, assureur de la SARL TRI VALOR : 20%

*SA SECI, garantie par la SA AXA France IARD : 20%.

Ne peuvent pas être également remises en cause les condamnations aux dépens et prononcées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, tant par le tribunal de grande instance de Paris, que par la cour d’appel de Paris en 2016 et la Cour de cassation.

Ainsi, les prétentions de la société SECI formalisées dans ses conclusions d’appel incident tendant à remettre en cause les responsabilités du sinistre sont irrecevables, la cour de céans, dans les limites de la saisine opérée par la cassation partielle de son arrêt du 12 février 2016, n’étant pas saisie de cette partie du litige sur lequel l’arrêt du 12 février 2016 a statué définitivement du fait du rejet des pourvois incidents de ce chef.

Sur l’indemnisation de la perte de son droit au bail

La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la cour d’appel aux motifs suivants :

« Attendu que, pour condamner in solidum la société SECI et la société Axa France IARD, tant en qualité d’assureur de la société SECI qu’en qualité d’assureur de la société Tri-Valor, à payer a M. X et M. Y, ès qualités, la seule somme de 160.514,95 euros et confirmer le rejet de la demande formée du chef de la perte de la propriété commerciale, l’arrêt retient que M. X réclame la somme de 75.000 euros au titre de la perte de son droit au bail et qu’il s’appuie sur une évaluation de l’économie de loyers perdus sans démontrer l’existence d’une telle perte, l’instauration d’une mesure d’instruction ne pouvant suppléer sa carence totale dans l’administration de la preuve qui lui incombe ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il était constant que le bail dont bénéficiait M. X avait été résilié en raison de la destruction des locaux loués, ce dont se déduisait nécessairement l’existence d’une perte de propriété commerciale qu’il lui appartenait d’évaluer, la cour d’appel a violé le principe susvisé ».

Monsieur X soutient que du fait de l’incendie, son bail commercial a été résilié de plein droit comme l’a constaté le tribunal de grande instance d’Annecy dans son jugement du 17 février 2009, dans des conditions qui ne lui ont pas permis d’obtenir une indemnité d’éviction liée à la propriété commerciale, et que pour ce motif il demande le paiement d’une indemnité due au titre de la perte de la propriété commerciale en se fondant sur un avis argumenté du cabinet FIDUCIAL d’Annecy de 2014.

La société SECI répond que les méthodes d’évaluation utilisées ne sont pas intelligibles, que la plus-value perdue pour le pas de porte n’est pas due, aucun pas de porte n’ayant été payé par Monsieur X.

La perte de la propriété commerciale invoquée par Monsieur X, comme l’a jugé la Cour de cassation, constitue une perte « du droit au bail », qui fait généralement partie intégrante du fonds de commerce, et représente le montant d’un droit à occuper un local commercial, payé par le nouveau locataire à l’ancien locataire. En effet cette transaction se fait en cas de reprise d’un bail existant pour la durée restant à courir, et permet au nouveau locataire d’être assuré de ses droits au renouvellement du bail. Cette cession du droit au bail peut intervenir lors de la cession du fonds de commerce selon l’article L145-16 du code de commerce.

La possibilité d’une telle transaction doit figurer dans une clause du contrat de bail commercial, comme en l’espèce dans celui signé le 28 septembre 1998 par la SCI LES MARAIS DU BULLOZ, aux droits de laquelle vient la SCI LE PARMELAN, et Monsieur X. Il est en effet indiqué à son article 10 ' 2 (cf pièce 19 de Monsieur X) :

« Le Preneur (c’est à dire Monsieur X) ne pourra céder leur droit au présent bail si ce n’est à l’acquéreur du fonds de commerce exploité dans les lieux conformément aux dispositions légales en vigueur … »

Cependant, comme l’a jugé la Cour de cassation, le bail commercial dont bénéficiait Monsieur X ayant été résilié en raison de la destruction des locaux loués, il s’en déduit nécessairement l’existence d’une perte de propriété commerciale qu’il convient d’évaluer.

En effet, la SCI LE PARMELAN a signifié par lettre RAR du 16 janvier 2009 à Monsieur X la résiliation du bail commercial par application de l’article 15 dudit contrat qui prévoyait sa résiliation de plein droit en cas de destruction totale du bien loué (cf pièce 18).

Monsieur X a contesté cette décision en assignant le 17 février 2009 le bailleur devant le tribunal de grande instance d’Annecy qui, dans son jugement contradictoire du 12 mai 2010, a constaté la résiliation de plein droit du bail commercial du 28 septembre 1998 souscrit par Monsieur X et dit n’y avoir lieu à exécution provisoire (cf pièce 20). Ce jugement qui n’a fait l’objet d’aucun recours selon les parties, est définitif et exécutoire.

Cette perte de la propriété commerciale, ou du droit au bail, s’étend du jour de l’incendie du 2 juillet 2008 qui a détruit ses locaux commerciaux, jusqu’au 27 septembre 2016, fin du renouvellement du bail « 3-6-9 » effectué le 27 septembre 2007 (le bail commercial date du 28 septembre 1998 + 9 ans). Monsieur X n’a pas pu ainsi pendant plus de 8 ans céder son droit au bail, en raison de cette résiliation de plein droit du bail commercial.

Monsieur X produit (cf pièce 24) une « note technique valant attestation d’évaluation de la perte de son droit au bail par Monsieur X » rédigée par le cabinet FIDUCIAL d’Annecy et en date du 28 juillet 2014, à l’appui de sa demande en paiement de la perte de sa propriété commerciale.

Force est de constater :

— qu’aucun intimé, dont la société SECI qui a été la seule à conclure dans la présente instance, ne conteste avoir eu connaissance depuis mi 2014 (soit pratiquement 6 ans jusqu’à aujourd’hui) de cette note, c’est à dire avant le premier procès en appel ;

— qu’aucun intimé, dont la société SECI, ne produit un document contredisant la méthode appliquée par le cabinet FIDUCIAL pour évaluer la perte de propriété commerciale de Monsieur X ;

— et que cette note a été rédigée après que le cabinet FIDUCIAL a de la part de Monsieur X sept pièces qu’il lui avait réclamées dont notamment « le bail commercial ' un plan de masse sommaire du tènement foncier loué et de son voisinage … un extrait du grand livre comptable pour l’exercice clos au 30 juin 2008 ' un relevé de compte de l’agence immobilière à laquelle Monsieur X paie son loyer commercial ' un courriel de cette agence immobilière du 23 juillet 2014 sur l’état du marché immobilier des biens similaires à l’occasion des contractualisations récentes ' le bail commercial signé le 20 juin 2006 entre la SCI LE PARMELAN et la société MECALAC ».

Il apparaît au vu de ces éléments que cette note de six pages, solidement argumentée, n’est pas sérieusement contestée, sous réserve d’un point développé ci-après.

La méthode d’évaluation du préjudice économique de Monsieur X résultant de la perte de sa propriété commerciale, retenue par le cabinet FIDUCIAL est celle dite du « différentiel de loyer » qui consiste à examiner la valorisation capitalisée de l’économie du loyer perdue par le preneur (ici Monsieur X) sur la période restant à courir de son contrat de bail, en l’espèce du 2 juillet 2008 jusqu’au 26 septembre 2016, prolongée jusqu’au 30 septembre 2016.

Cette méthode qui est l’une des deux conseillées par la plupart des auteurs spécialistes en la matière, est donc présentement retenue.

Au vu des faits retenus par le cabinet FIDUCIAL à l’aide des différentes pièces précitées produites par Monsieur X, ledit cabinet a constaté et indiqué :

— qu’il n’existe plus d’offres locatives correspondantes à la typologie du local de Monsieur X, à savoir un local en RDC de 50 m² à usage d’entrepôt, et un local en mezzanine de 100 m² encore à usage d’entrepôt, tous deux aménagés par lui en 1998, et pour un loyer annuel de 30.000 francs ;

— que la moyenne des loyers des deux locaux les plus petits (soit 100 m²) des quatre transactions enregistrées par l’agence immobilière entre 2008 et 2010, dépasse de plus de 27% la moyenne des plus imposants, tendance qui est confirmée par l’agence ;

— que pour comparer efficacement au m² le bail de Monsieur X et celui de la société MECALAC, il a capitalisé le montant du bail de cette dernière à l’aide de l’indice INSEE de 2006 à 2008 sur la base du dernier indice connu à la date de sa signature et de la date d’anniversaire à deux ans du contrat ;

— qu’il a effectué des calculs comparatifs, retranscrits dans un tableau figurant page 4 de sa note, et dans lequel il a renseigné la surface en m², le loyer HT annuel en euros, le loyer HT annuel en m² et le loyer HT mensuel au m², pour chaque ligne suivante :

*le contrat de base de MECALAC (A),

*les données réévaluées du bail de MECALAC (B),

*les données capitalisées en 2008 de MECALAC (C),

*le loyer du 1 octobre 2007 au 30 septembre 2008 de Monsieur X (D),

*le calcul de l’économie de loyer égal à C ' D (E),

*la durée de jouissance du bail de Monsieur X restant à courir depuis la date du sinistre : 8 ans 25, soit 99 mois (F),

*surface du local de Monsieur X (G),

*l’économie du loyer perdu à fin juin 2008 égale à E x F x G = 58.084,29 €.

Le cabinet FIDUCIAL a ensuite augmenté cette somme du dernier indice INSEE de référence à la fin du bail du 27 septembre 2016 pour obtenir le montant de la perte de la propriété commerciale jusqu’à la fin du bail et qui s’élève à 70.749,60 € arrondis à 71.000 €.

La cour retient ce dernier chiffre qui sera alloué à Monsieur X en réparation de la perte de sa propriété commerciale pendant la période considérée, à raison de la destruction de ses locaux commerciaux.

Il convient en revanche de rejeter sa demande relative au paiement de la plus-value perdue sur le pas de porte qui est chiffrée par le cabinet FIDUCIAL à 12.000 € dès lors que suivant le bail commercial du 28 septembre 1998, il n’a pas payé de « pas de porte » qui est « un droit d’entrée » payé au propriétaire des murs (ici ce serait la SCI LE PARMELAN) lors de la conclusion du bail pour un local vacant. Monsieur X ne peut donc en conséquence demander le paiement d’une somme qu’il n’a pas versée.

Ainsi, et sans qu’il soit nécessaire d’ordonner une expertise comptable puisque la cour dispose d’informations suffisantes pour statuer sans y recourir, il convient, en infirmant le jugement déféré du 18 mars 2014 qui n’a donné aucune indemnité à Monsieur X en réparation de la perte de sa propriété commerciale, de condamner in solidum la société SECI et la SA AXA FRANCE IARD, tant en sa qualité d’assureur de la société SECI qu’en sa qualité d’assureur de la société TRI-VALOR, en liquidation judiciaire et définitivement radiée du RCS, à payer à Monsieur X la somme de 71.000 € en réparation de cette perte de sa propriété commerciale.

Les autres indemnités allouées à Monsieur X par la cour d’appel dans son premier arrêt lui sont définitivement acquises comme expliqué précédemment.

Sur l’indemnisation formée au titre de la perte de jouissance des aménagements réalisés dans les lieux loués

La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la cour d’appel aux motifs suivants :

« Attendu que, pour statuer comme il le fait sur l’indemnisation du préjudice subi par M. X, I’arrêt confirme en outre le rejet de la demande d’indemnisation formée au titre de la perte de jouissance des aménagements réalisés dans les lieux loués en retenant que le bail ne prévoyant pas le sort des aménagements et améliorations réalisés par le preneur à l’issue du bail, les dispositions de l’article 555 sont applicables ; qu’il ajoute que le bailleur, ayant entendu conserver les aménagements réalisés par le preneur, a été indemnisé à ce titre et que dès lors, M. X ne peut demander réparation qu’à son bailleur, ce qu’il ne fait pas, et ne peut pas former de demande à l’encontre des responsables du sinistre ;

Qu’en statuant ainsi, alors que le fait que le bailleur ait été indemnisé pour la perte des aménagements dont il avait la faculté de conserver la propriété à l’issue du bail, ne faisait pas obstacle à ce que le preneur obtienne des responsables de l’incendie l’indemnisation de la perte de jouissance des aménagements qu’il avait réalisés, provoquée par le sinistre ayant entraîné la résiliation du bail avant son terme, la cour d’appeI a violé le principe susvisé ; »

Monsieur X fait valoir :

— qu’il a réalisé en 1998 des travaux d’aménagements intérieurs ;

— que son bailleur, la SCI LE PARMELAN, a opté pour la conservation de la propriété des dits aménagements puisque la valeur de ceux-ci a été intégrée dans l’indemnisation de son préjudice pour un total de 25.333 € ;

— que jusqu’à l’incendie, il pouvait espérer jouir pendant 8 ans au moins des aménagements qu’il avait réalisés ;

— et que cette perte de jouissance, provoquée par la destruction des locaux résultant de l’incendie, mérite réparation à la hauteur qu’il réclame, fondée juridiquement au regard de la motivation de la Cour de cassation.

La société SECI réplique :

— que suivant le rapport d’expertise de Monsieur B, la somme réclamée par Monsieur X est comprise dans le préjudice intitulé « bâtiment » et ne peut être en conséquence accordée ;

— et qu’à supposer qu’une telle demande serait juridiquement fondée, en aucun cas la perte de jouissance des aménagements réalisés en 1998 ne peut être indemnisée par la valeur de ces aménagements alors qu’ils ont été effectués vingt ans avant la survenue du sinistre.

Comme l’a jugé la Cour de cassation, la demande d’indemnisation de Monsieur X porte, non pas sur le remboursement du prix des aménagements intérieurs des locaux commerciaux qu’il justifie avoir effectués par la production d’une attestation en ce sens de son bailleur, la SCI LES MARAIS DU BULLOZ, en date du 22 septembre 2018 (cf pièce 21), mais sur la perte de jouissance de ces aménagements, consistant principalement en travaux de cloisonnement, création de sanitaires, de chauffage, et de rayonnages, dont il aurait pu profiter jusqu’à l’issue de son bail le 30 septembre 2008, soit pendant plus de 8 années après l’incendie. Il ne peut plus en profiter non seulement au cause de cet incendie, mais également en raison de la résiliation du bail, tel que décrite précédemment.

La SCI LE PARMELAN, propriétaire des murs, a conservé par devers elle les aménagements des locaux effectués par Monsieur X, mais détruits, et a perçu fin 2008 de sa compagnie d’assurances une indemnité comprenant, dans le poste « bâtiment » évalué à neuf à 196.093 €, « la valeur des aménagements intérieurs du local occupé par Monsieur X à 25.333 € HT en valeur à neuf ». Un coefficient de vétusté de 15 % a été appliqué à ces sommes (cf pièce 5).

Contrairement à ce que prétend la société SECI, il n’est nullement établi au vu des pièces produites que Monsieur X a déjà été indemnisé de la perte de jouissance des aménagements intérieurs précités.

L’expert judiciaire a fixé à 130.437 € HT (valeur à neuf) l’indemnisation du « contenu » pour Monsieur X à laquelle s’ajoute l’indemnisation du « déblai du contenu » et « les pertes d’exploitation » (cf pièce 1 le rapport d’expertise), sans plus de précision. Le jugement et l’arrêt du 12 février 2016 se sont fondés sur ces conclusions expertales pour fixer le montant de l’indemnisation de Monsieur X.

Le rapport d’expertise n° 4 intitulé « dommages » établi par la société ACTE IARD, assureur de Monsieur X, dressé le 5 février 2009, permet de comprendre ce qui constitue « le contenu » indiqué dans le rapport de Monsieur B qui s’est fondé sur ce rapport d’ACTE IARD pour chiffrer l’indemnisation de Monsieur X (cf pièce 28).

Il en ressort que « A – le contenu : matériel et marchandises » a été estimé à 130.437 €, séparément des « B ' Aménagements commerciaux » évalués en valeur neuf à 25.333 € et qui correspondent (cf page 8 de ce rapport)

« aux aménagements que Monsieur X a antérieurement réalisés ».

Ces éléments démontrent sans contestation sérieuse de la part de la société SECI que Monsieur X n’a pas été indemnisé par le versement de la somme de 130.437 €, retenue tant par le tribunal de grande instance de Paris que par la cour d’appel de Paris dans son premier arrêt, ni du remplacement des aménagements intérieurs, ni de sa perte de jouissance de ces aménagements intérieurs qu’il avait réalisés.

Dès lors Monsieur X sera justement indemnisé de cette perte de jouissance en lui allouant la somme de 12.000 € qui permet de prendre en compte la durée de cette perte de jouissance de plus de 8 ans, en fonction des aménagements chiffrés à neuf à plus de 25.333 € comme indiqué précédemment. Il ne saurait en effet prétendre recevoir une indemnisation égale à ce montant puisque seule une perte de jouissance est indemnisée.

Ainsi, et sans qu’il soit nécessaire d’ordonner une expertise comptable puisque la cour dispose d’informations suffisantes pour statuer sans y recourir, il convient, en infirmant le jugement déféré du 18 mars 2014, de condamner in solidum la société SECI et la SA AXA FRANCE IARD, tant en sa qualité d’assureur de la société SECI qu’en sa qualité d’assureur de la société TRI-VALOR, en liquidation judiciaire et définitivement radiée du RCS, à payer à Monsieur X la somme de 12.000 € en réparation de la perte de jouissance des aménagements intérieurs.

Ces deux sommes qui seront payées par les intimées au titre de dommages et intérêts porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et jusqu’à parfait paiement conformément à l’article 1231-7 nouveau du code civil.

Enfin, conformément à l’arrêt de la cour d’appel de céans du 12 février 2016, dont toutes les décisions sont applicables après l’arrêt rendu par la Cour de cassation, sauf celles modifiées par le présent arrêt, il convient de fixer à la somme totale de 83.000 € la créance de Monsieur X à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la société TRI-VALOR au titre de son indemnisation de la perte de sa propriété commerciale et de sa perte de jouissance des aménagements intérieurs des locaux commerciaux.

Sur les autres demandes

Conformément à l’arrêt du 12 février 2016 qui ne peut être modifié sur ce point, la SA AXA France IARD, à proportion de ¾, et la SA GENERALI IARD à proportion de ¼, sont condamnées aux dépens.

La demande de Monsieur X de les condamner au paiement « des dépens de première instance et d’appel, y compris des dépens de l’arrêt cassé » est rejetée dès lors que chaque juridiction a statué à chaque fois sur ses propres dépens, et que les décisions rendues par les juridictions de fond sont définitives et exécutoires sur les dépens, comme expliqué ci-dessus.

Enfin, il paraît inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X les frais irrépétibles exposés dans la présente instance. Conformément à l’arrêt du 12 février 2016 qui ne peut être modifié sur ce point, la SA AXA France IARD, à proportion de ¾, et la SA GENERALI IARD à proportion de ¼, sont condamnées à lui payer la somme de 3.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile.

En revanche, il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de la société SECI les frais irrépétibles qu’elle a exposés dans la présente instance. Elle est donc déboutée de ce chef.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt Réputé contradictoire, en dernier ressort, après débats publics,

MET HORS DE CAUSE la SELARL MJ ALPES es qualité de commissaire à l’exécution du plan de Monsieur C X, représentée par Monsieur Y,

Vu l’arrêt rendu le 26 octobre 2017 par la 2e chambre civile de la Cour de cassation qui a :

« [Rejeté] les pourvois incidents ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il condamne in solidum la société SECI et la société Axa France IARD, tant en qualité d’assureur de la société SECI qu’en qualité d’assureur de la société Tri’Valor, à payer à M. X et M. Y en qualité de commissaire à l’exécution du plan la seule somme de 160.514,95 € et [rejeté] les demandes formées au titre de la perte de la propriété commerciale et de la perte des aménagements intérieurs réalisés par le preneur, l’arrêt rendu le 12 février 2016, entre les parties, par la cour d’appeI de Paris ; [remis], en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les a [renvoyées] devant la cour d’appeI de Paris, autrement composée … »

INFIRMANT le jugement rendu le 18 mars 2014 par le tribunal de grande instance de Paris sur les demandes d’indemnisation de Monsieur X de la perte de sa propriété commerciale et de la perte de jouissance de ses aménagements intérieurs,

CONDAMNE in solidum la société SECI et la SA AXA FRANCE IARD, tant en sa qualité d’assureur de la société SECI qu’en sa qualité d’assureur de la société TRI-VALOR à payer à Monsieur C X :

— la somme de 71.000 € en réparation de la perte de sa propriété commerciale,

— et la somme de 12.000 € en réparation de la perte de jouissance des aménagements qu’il avait réalisés, provoquée par le sinistre ayant entraîné la résiliation du bail avant son terme,

le tout avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

DIT que toutes les autres décisions (hormis les deux condamnations prononcées ci-dessus) prises par la cour d’appel de céans dans son arrêt du 12 février 2016 s’appliquent comme étant exécutoires et définitives,

CONDAMNE la SA AXA France IARD, à proportion de ¾, et la SA GENERALI IARD à proportion de ¼, aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile par les avocats qui en ont fait la demande,

CONDAMNE la SA AXA France IARD, à proportion de ¾, et la SA GENERALI IARD à proportion de ¼, à payer à Monsieur C X la somme de 3.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de toutes leurs autres demandes.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 4 mars 2020, n° 18/23996