Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 10, 4 mars 2021, n° 19/06076

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 - ch. 10, 4 mars 2021, n° 19/06076
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/06076
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Fontainebleau, 5 février 2019, N° 17/00247
Dispositif : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Texte intégral

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 10

ARRET DU 04 MARS 2021

(n° 26 – 2021 , 10 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/06076 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7RYY

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Février 2019 -Tribunal de Grande Instance de FONTAINEBLEAU – RG n° 17/00247

APPELANTE

La Société IMMOPAC.TEM, SARL

Immatriculée au RCS de MELUN sous le numéro 752 263 459, dont le siège social est :

[…]

[…],

Exerçant sous la dénomination L’AGENCE B C AVON FONTAINEBLEAU

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège,

Représentée par Me Céline CONTREPOIDS-BERTIN de la SELARL BERTIN & BERTIN – AVOCATS ASSOCIÉS, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU,

INTIMÉES

SCI MVF

Immatriculée au RCS de MELUN sous le numéro 489 376 434, dont le siège social est :

[…]

[…]

Prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Flavie MARIS-BONLIEU de la SCP BOUAZIZ – SERRA – AYALA – BONLIEU, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU

SARL HAPPART IMMOBILIER GESTION

Immatriculée au RCS de MELUN sous le numéro 523 416 410, dont le siège social est :

[…]

[…]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège,

Représentée par Me Z NARDEUX de la SELARL SAULNIER NARDEUX MALAGUTTI ALFONSI, avocat au barreau de MELUN, toque M 10

Ayant pour avocat plaidant Me Cécile ALFONSI de la SELARL SAULNIER NARDEUX MALAGUTTI ALFONSI, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Décembre 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Laurence CHAINTRON, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente

Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère

Madame Laurence CHAINTRON, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M. Armand KAZA

ARRÊT :

— Contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente, et par Armand KAZA, Greffier présent lors du prononcé.

********

Par acte sous seing privé du 25 mars 2016, la SCI MVF a confié à la société Immopac.Tem, exerçant sous l’enseigne B C Immobilier Avon, un mandat concernant la location d’une maison à usage d’habitation, située […], lui appartenant.

Par acte sous seing privé du 23 juin 2016, la société Immopac.tem a conclu, au nom de sa mandante, avec M. Y X, sa mère, Mme Z X, et sa grand mère, Mme A X, un contrat de bail à usage d’habitation moyennant un loyer mensuel de 1 100 euros, pour une durée de trois ans, prenant effet le 23 juin 2016. Les loyers devaient être réglés entre les mains de la société Happart Immobilier Gestion avec laquelle la société Immopac.tem entretenait des relations commerciales.

Les locataires sont entrés dans les lieux, le 23 juin 2016, mais ni le dépôt de garantie ni aucun loyer n’ont été réglés.

Le 23 août 2016, un commandement de payer visant la clause résolutoire a été délivré aux locataires. Lors d’une tentative de saisie conservatoire diligentée à la même période, l’huissier instrumentaire a été informé qu’A X était décédée le 12 septembre 2015, soit avant la conclusion du bail, que le compte de Mme Z X avait été clôturé, et que celui de M. X était créditeur de 20 euros.

Par acte sous seing privé du 1er octobre 2016, la SCI MVF a confié à la SARL Happart Immobilier Gestion un mandat de gestion immobilière portant sur le bien immobilier pour une durée d’un an renouvelable par tacite reconduction d’année en année, la durée de reconduction étant limitée à 10 ans. Une assurance de garantie des loyers impayés a été souscrite auprès de la société Ascora qui a refusé, selon correspondance du 6 décembre 2016, de prendre en charge le sinistre compte tenu d’une période de carence de trois mois à compter de la date de mise en garantie.

La société Happart Immobilier Gestion a déposé plainte pour escroquerie le 25 novembre 2016 auprès du commissariat de police de Melun. Le 17 décembre 2016, la SCI MVF a également déposé plainte pour escroquerie entre les mains d’un agent de police judiciaire au bureau d’aide aux victimes de Fontainebleau.

Saisi par un acte extra-judiciaire du 3 mars 2017, le tribunal d’instance de Fontainebleau a, par jugement du 2 février 2018, constaté l’acquisition de la clause résolutoire à la date du 24 octobre 2016, ordonné l’expulsion des consorts X et les a solidairement condamnés à payer à la SCI MVF la somme de 5 793,33 euros, en deniers ou quittances valables, au titre des loyers, charges et indemnité d’occupation échus et impayés au 23 octobre 2016, échéance du mois de septembre 2016 incluse, et à payer à compter du 24 octobre 2016 une indemnité d’occupation égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus si le bail n’avait pas été résilié, la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, avec le bénéfice de l’exécution provisoire.

Un procès verbal de reprise des lieux a été dressé par huissier le 31 août 2018.

C’est dans ce contexte que, dans l’intervalle, par acte extra-judiciaire du 23 mars 2017, la SCI MVF a fait assigner la SARL Immopac.Tem, à l’enseigne B C, devant le tribunal de grande instance de Fontainebleau, au visa des articles 1191 et 1192 du code civil, aux fins de voir :

— constater la carence caractérisée de la société Immopac.Tem dans l’exécution du mandat qui lui a été donné ;

— condamner la société Immopac.Tem à lui verser la somme de 11 183 euros pour loyers impayés et dépôt de garantie à la date arrêtée du 30 mars 2017, outre la somme de 1 100 euros mensuelle à compter du 1er avril 2017 et jusqu’à parfaite libération des lieux et sous réserve des charges non acquittées, des dégradations locatives et de tous autres préjudices ;

— condamner la société Immopac.Tem au paiement de la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires ;

— condamner la société Immopac.Tem au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

Selon acte du 11 décembre 2017, la société Immopac.Tem a appelé en garantie la SARL Happart Immobilier Gestion. Les deux procédures ont été jointes par une ordonnance du juge de la mise en état du 18 janvier 2018.

Par jugement en date du 6 février 2019, le tribunal de grande instance de Fontainebleau

a :

— condamné la société Immopac.Tem à verser à la SCI MVF la somme de 30 182,69

euros ;

— condamné la société Immopac.Tem à restituer à la SCI MVF la somme de 1 408,44 euros,

— débouté la société Immopac.Tem de l’ensemble de ses demandes ;

— débouté la SARL Happart Immobilier Gestion de sa demande de dommages et intérêts ;

— condamné la société Immopac.Tem aux dépens de l’instance ;

— accordé à Maître David Bouaziz, avocat associé, SCPA Bouaziz Serra Ayala Bonlieu, avocat de la SCI MVF, le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

— condamné la société Immopac.Tem à verser à la SCI MVF la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné la société Immopac.Tem à verser à la SARL Happart Immobilier Gestion la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— rejeté tout autre chef de demande ;

— ordonné l’exécution provisoire du jugement.

Par déclaration en date du 19 mars 2019, la SARL Immopac.Tem a relevé appel de la décision.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 18 novembre 2019, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Immopac.Tem demande, au visa du décret n°2015-1437 du 5 novembre 2015 et de l’article 700 du code de procédure civile, à la cour de :

— confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Fontainebleau du 6 février 2019 en ce qu’il a débouté la SARL Happart Immobilier Gestion de sa demande de dommages et intérêts ;

— infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Fontainebleau du 6 février 2019 en ce que :

— il l’a condamnée à verser à la SCI MVF la somme de 30 182,69 euros ;

— il l’a condamnée à restituer à la SCI MVF la somme de 1 408,44 euros ;

— il l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes ;

— il l’a condamnée aux dépens de l’instance ;

— il a accordé au conseil de la SCI le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

— il l’a condamnée à verser à la SCI MVF la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— il l’a condamnée à verser à la SARL Happart Immobilier Gestion la somme de

3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— il a rejeté tout autre chef de demande ;

— il a ordonné l’exécution provisoire du jugement ;

Et, statuant à nouveau,

A titre principal,

— dire qu’elle n’a commis aucune faute dans l’exécution de son mandat de recherche de locataire,

— débouter de ce fait la société MVF de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

A titre subsidiaire,

— dire que le mandat de gestion de la société Happart Immobilier Gestion a débuté dès le mois de juin 2016,

— condamner la société Happart Immobilier Gestion à la garantir intégralement et à la relever indemne de l’ensemble des condamnations qui seraient prononcées contre elle au profit de la société MVF,

En tout état de cause,

— condamner tout succombant à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la première instance et la somme de 3 000 euros pour la présente instance,

— condamner tout succombant aux entiers dépens de l’instance.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 août 2019, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SCI MVF demande à la cour, au visa des articles 1991 et 1992 du code civil, de :

— la déclarer recevable et bien fondée en ses écritures,

— constater la carence caractérisée de la société Immopac.Tem dans l’exécution du mandat qu’elle lui a été donné,

— en conséquence, confirmer le jugement rendu le 6 février 2019 par le tribunal de grande instance de Fontainebleau en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

— condamner la société Immopac.Tem au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— la condamner aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCPA Bouaziz Serra Ayala Bonlieu, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 17 septembre 2019, auxquelles il convient de se référer pour l’exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SARL Happart Immobilier Gestion demande à la cour de :

— confirmer le jugement de première instance en ce que la société Immopac.Tem a été condamnée à réparer ses fautes à l’égard de la SCI MVF,

— confirmer le jugement de première instance en ce que la société Immopac.Tem a été déboutée de sa demande d’appel en garantie en intervention forcée à son égard pour qu’elle la garantisse de toute condamnation au profit de la SCI MVF,

— la recevoir en son appel incident,

— infirmer le jugement en ce qu’elle a été déboutée de sa demande de dommages-intérêts à l’égard de la société Immopac.Tem,

Statuant à nouveau,

— condamner la société Immopac.Tem à lui payer une somme de 5 000 euros, selon l’article 1240 du code civil, à titre de dommages et intérêts et assortir cette somme des intérêts légaux, à compter du 7 septembre 2017, au visa des dispositions de l’article 1231-7,

— confirmer le jugement de première instance en ce que pour la première instance, la société Immopac.Tem a été condamnée à lui payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Ajoutant au premier jugement,

— condamner en cause d’appel, pour ses frais irrépétibles relatifs à la procédure d’appel, la société Immopac.Tem à lui payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société Immopac.Tem aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Nardeux, avocat aux offres de droit.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 octobre 2020.

SUR CE, LA COUR

Sur la responsabilité du mandataire

La société Immopac.Tem poursuit l’infirmation du jugement en ce que la juridiction a retenu sa responsabilité à l’égard de la SCI MVF pour ne pas avoir vérifié sérieusement la solvabilité, le lieu de résidence des candidats à la location, et plus généralement, l’ensemble des éléments transmis. Elle soutient avoir parfaitement rempli la mission relevant de son mandat de location et s’être assurée de la solvabilité de chaque locataire dans le respect des limites d’exigence des justificatifs posées par le décret n° 2015-1437 du 5 novembre 2015, qu’elle énumère. Elle affirme qu’au vu des pièces justificatives fournies, les locataires disposaient de ressources mensuelles suffisantes pour régler le loyer. Elle critique le jugement en ce qu’il a retenu uniquement les revenus des candidats à la location de mai 2016 et pour M. X uniquement la somme de 612,97 euros. Elle souligne que l’assureur de garantie des loyers impayés, la société Ascora et l’agence en charge de la gestion, la société Happart Immobilier Gestion, ont validé, le 22 juin 2016, avant la conclusion du bail, le dossier de location qu’elle leur avait transmis. Enfin, elle discute chacun des griefs retenus par le tribunal et avance qu’il ne peut pas lui être reproché les délais d’une procédure dont elle n’était pas chargée. En dernier lieu, elle recherche la garantie de la société intimée, au motif que le mandat de gestion a commencé à s’exécuter avant sa formalisation.

La société MVF soutient la confirmation du jugement en ce qui concerne la responsabilité la société Immopac.Tem, laquelle a autorisé l’entrée immédiate des locataires dans les lieux, sans s’assurer de leur solvabilité. Elle relève les anomalies du pouvoir supposé émaner d’A X, qui était en réalité décédée depuis près d’un an, et affirme que les pièces demandées à M. Y X étaient insuffisantes. Elle observe que l’agent immobilier aurait dû s’inquiéter de l’émission de l’intégralité des chèques remis lors de l’entrée dans les lieux sur le compte de Mme Z X, alors que celle-ci ne bénéficiait d’aucune ressource. Elle ajoute que la société Immopac.Tem aurait dû s’assurer de l’existence d’une garantie loyers impayés et la conseiller à ce titre. Elle estime que l’agence n’a pas respecté les obligations souscrites aux termes de son mandat et excipe du caractère tardif des poursuites judiciaires engagées à l’encontre des locataires et de l’absence de procédure de saisie des rémunérations à l’encontre de M. Y X.

La société Happart Immobilier Gestion demande à la cour de confirmer la décision déférée sur la responsabilité du mandataire de la bailleresse. Elle conteste avoir été partie prenante dans l’analyse du dossier de location qui lui a été transmis uniquement pour qu’elle le soumette à l’assureur concernant la garantie des loyers impayés dans la perspective d’un mandat de gestion à venir. Elle

rappelle avoir déposé plainte auprès du commissariat de Melun à l’encontre des locataires le 25 novembre 2016 et avoir tenté de faire prendre en charge le sinistre par l’assureur. Elle précise que le courtier d’assurance a opposé la période de carence d’une durée de trois mois à compter de la date de mise en garantie.

Aux termes de l’article 1991 alinéa 1, du code civil, le mandataire est tenu d’accomplir le mandat tant qu’il en demeure chargé, et répond des dommages et intérêts qui pourraient résulter de son inexécution.

L’agent immobilier doit s’assurer que se trouvent réunies toutes les conditions nécessaires à l’efficacité juridique des actes auxquels il prête son concours et il a le devoir de vérifier, de manière sérieuse, la solvabilité des candidats à la location.

En l’espèce, la SCI MVF a confié à la société Immopac.Tem un mandat daté du 25 mars 2016 aux termes duquel elle devait rechercher un locataire en vue de la location de son bien immobilier situé […]). La société Immopac.Tem a rédigé et signé le contrat de bail pour le compte de son mandant. Les locataires ont été défaillants dans leurs obligations dès la conclusion du bail.

Le tribunal a procédé, pour les motifs que la cour adopte, à une juste appréciation des faits de la cause lorsqu’il a retenu que l’agence immobilière n’avait pas sérieusement analysé les documents remis par les candidats à la location. Il convient d’ajouter que l’appelante élude le contexte particulier d’une prise en location par trois membres d’une même famille, une mère née en 1934, sa fille née en 1959 et son petit-fils né en 1992, et d’une capacité à supporter la charge du loyer d’un montant de 1 100 euros qui reposait pour l’essentiel sur les pensions de retraite perçues par la première (1 585 euros par mois). En effet, sa fille ne disposait d’aucun revenu d’activité depuis plusieurs années et percevait le RSA (787,02 euros par mois). Cette prestation, ainsi que l’a retenu le tribunal, ne pouvait être affectée qu’à la satisfaction de ses besoins vitaux et à ceux de sa fille à charge et ne lui permettait pas de participer de manière significative au paiement du loyer. L’avis d’imposition sur les revenus de 2014 de M. X fait ressortir un revenu annuel de moins de 200 euros et, le jeune homme, récemment embauché moyennant un salaire mensuel de l’ordre 1300 euros, avait perçu au mois de mai 2016 la somme de 612, 97 euros, soit moins de la moitié de sa rémunération. Les revenus mensuels de M. X, y compris à hauteur de 1 300 euros, ajoutés aux retraites de sa grand-mère, ne permettaient pas aux locataires de satisfaire aux critères usuels de solvabilité et il y a lieu, en outre, d’observer que A X était décédée le 12 septembre 2015, ce que rappelle avec pertinence la société MVF dans ses écritures.

L’appelante a accepté des documents qui n’étaient pas signés, un pouvoir, prétendument signé par A X, entièrement dactylographié en contravention avec les usages, sans la moindre mention manuscrite, et de conclure sans avoir eu le moindre contact avec la seule candidate à la location qui disposait de revenus stables. Ces derniers éléments auraient du attiré l’attention de l’agence immobilière et l’inciter à faire preuve de prudence.

La société Immopac.Tem a ainsi manqué à son obligation de s’assurer de la solvabilité des candidats à la location à l’aide de vérifications sérieuses, comme de la pertinence et de la fiabilité des éléments transmis, ce qui suffit à engager sa responsabilité.

Il en ressort qu’elle a permis l’entrée dans les lieux de locataires qui ne se sont acquittés d’aucune de leurs obligations financières, y compris celle de régler un dépôt de garantie.

Un commandement de payer visant la clause résolutoire a été délivré le 23 août 2016 par la Selarl Haye-Tabart, huissiers de justice.

L’appelante met en exergue que le reste de la procédure et, notamment la procédure d’acquisition de la clause résolutoire et d’expulsion, a été gérée par la société Happart immobilier gestion selon les modalités et les délais qui ont été les siens, et en déduit, à juste titre, qu’elle n’a pas à répondre des délais de la procédure d’expulsion mise en oeuvre par une assignation du 3 mars 2017, étant précisé que des courriers ont été échangés entre la société Happart immobilier gestion et l’assureur au titre de la garantie des loyers impayés au mois de décembre 2016.

Il résulte des développements qui précèdent que le préjudice en lien direct avec la faute dont doit répondre la société Immopac.Tem correspond au montant des loyers dus au mois d’octobre 2016, soit 5 793,33 euros, date d’acquisition de la clause résolutoire.

Le jugement déféré sera reformé pour prendre en compte cette somme.

S’agissant de la demande de remboursement de la somme de 1 408,44 euros réglée par la SCI MVF au titre des honoraires de location, l’ouverture du droit à rémunération de l’agent immobilier ne fait pas obstacle au pouvoir que le juge tient de l’article 1999 du code civil, de réduire, voire supprimer cette rémunération, en considération des fautes que l’intermédiaire a commises dans l’exécution de sa mission.

En l’espèce, au regard des fautes retenues à l’encontre de la société Immopoac.Tem dans l’exécution de son mandat, c’est à juste titre et pour des motifs que la cour adopte que le tribunal a fait droit à cette demande de la bailleresse.

Sur l’appel en garantie

La société Immopac.Tem critique le jugement déféré en ce qu’il a considéré qu’aucune obligation ne pouvait incomber à la société Happart Immobilier Gestion avant le 1er octobre 2016, date du mandat de gestion confié par la SCI MVF. Elle soutient que la société Happart Immobilier Gestion avait pris en charge la gestion financière du dossier dès le début de la location. Elle fait valoir que comme l’agence Happart Immobilier Gestion, l’assureur des loyers impayés, la société Ascora, a donné un avis favorable.

La société Happart Immobilier Gestion rétorque que dans le cadre des relations commerciales qu’elle entretenait avec la société Immopac.Tem, cette dernière lui a transmis les éléments d’informations recueillis lors de la préparation du contrat de bail afinqu’elle les adresse à son tour pour accord au courtier d’assurance, Ascora. Elle affirme qu’aucune obligation de vérification du dossier ne lui incombait avant la signature du mandat de gestion régularisé avec la SCI MVF le 1er octobre 2016.

L’agence Happart Immobilier gestion ne dément pas l’existence d’un accord commercial avec la société société Immopac.Tem mais nie qu’il s’étendait au contrôle du dossier des candidats à la location.

Aucun pièce ne vient conforter l’allégation d’une relation contractuelle entre bailleresse et l’agence Happart Immobilier gestion avant la signature du mandat de gestion, dont il convient de relever qu’elle n’a eu lieu qu’au mois d’octobre 2016, et non immédiatement après la signature du bail.

Comme l’a relevé le tribunal, l’allégation de l’appelante selon laquelle l’agence Happart Immobilier gestion prenait le relais de la gestion après avoir validé le choix des locataires n’est étayée par aucun élément probant, en l’absence de production du courrier de réponse de la société Happart Immobilier Gestion au mail de l’appelante du 15 juin 2016 relatif à la transmission du dossier de candidature. En effet, s’il n’est pas contesté que la société Ascora a émis le 22 juin 2016 un avis favorable après examen du dossier des consorts X, cet avis n’a pas la portée qu’y voit l’appelante mais se limite au constat que le risque sera accepté par l’assureur, au regard des critères posés par ce dernier. Cet avis ne suffit pas à établir la teneur de l’accord entre les deux agences immobilières, tel que revendiqué par l’appelante.

En l’absence de faute dûment caractérisée commise par la société Happart Immobilier Gestion, il convient de confirmer le jugement sur le rejet de l’appel en garantie.

Sur les dommages et intérêts

La société Happart Immobilier Gestion sollicite l’infirmation du jugement déféré en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de la somme de 5 000 euros pour appel en cause et intervention forcée abusive et atteinte à sa réputation en application des dispositions de l’article 1240 du code civil.

Or, aucun élément ne vient conforter l’affirmation d’une dégradation de la réputation de la société Happart Immobilier gestion à l’égard d’une de ses clientes.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société Happart Immobilier Gestion de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice allégué.

Sur les autres demandes

L’équité justifie de confirmer le jugement sur les frais irrépétibles de première instance. La demande de la société MVF au titre de ses frais irrépétibles en cause d’appel sera rejetée. En revanche, il sera alloué au profit de la société Happart Immobilier Gestion la somme complémentaire de 1 000 euros au titre des frais exposés pour faire valoir sa défense devant la cour.

La société Immopac.Tem, partie perdante, supportera les dépens d’appel conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, dont distraction au profit des avocats qui en ont fait la demande.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition de la décision au greffe,

Infirme le jugement déféré en ses dispositions relatives au montant de la condamnation principale à hauteur de 30 182,69 euros mise à la charge de la société Immopac.Tem et le confirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau du chef et y ajoutant,

Condamne la société Immopac.Tem à payer à la SCI MVF la somme de 5 793,33 euros en réparation de son préjudice financier ;

Condamne la société Immopac.Tem à la société Happart Immobilier Gestion la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne la société Immopac.Tem aux dépens de première instance et d’appel lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

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