Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 8 avril 2021, n° 18/12043

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 7, 8 avr. 2021, n° 18/12043
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/12043
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Paris, 20 septembre 2018, N° F15/08168
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le

 : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 7

ARRET DU 08 AVRIL 2021

(n° , 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/12043 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6UMK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Septembre 2018 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F15/08168

APPELANT

Monsieur G X

[…]

[…]

Représenté par Me Christine GERGAUD LERBOURG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0264

INTIMEES

Me A Stéphane (SCP B.T.S.G.) ès qualités de Mandataire liquidateur de la Société POLYMONT IT SERVICES

[…]

[…]

Représenté par Me Carole VILLATA DUPRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0063

Me Z Frédérique (SELAFA MJA) ès qualités de Mandataire liquidateur de la Société POLYMONT IT SERVICES

102, Rue du Faubourg Saint-Denis

[…]

Représenté par Me Carole VILLATA DUPRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0063

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST représentée par son Directeur, Monsieur I J

[…]

[…]

Représentée par Me Sabine SAINT SANS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0426

Me Y Philippe (SELARL AJRS) ès qualité de Commissaire à l’exécution du plan de la Société POLYMONT IT SERVICES

[…]

[…]

N’ayant constitué ni avocat ni défenseur syndical

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Mars 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat, entendu en son rapport, a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre,

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de Chambre,

Madame Hélène FILLIOL, Présidente de Chambre.

Greffière, lors des débats : Madame Lucile MOEGLIN

ARRET :

—  R''PUT'' CONTRADICTOIRE,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre et par Madame Lucile MOEGLIN, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Novia Systems, dénommée depuis juillet 2015 Polymont IT Services, a pour activité l’étude, la conception, la réalisation et la commercialisation de programmes de traitement de l’informatique (logiciels), de nouvelles technologies et systèmes d’information ainsi que de tous matériels informatiques associés. Au regard de son activité, les relations entre la société et ses salariés sont soumises à la Convention collective nationale des Bureaux d’études techniques Cabinets d’ingénieurs conseils, sociétés de conseils (SYNTEC).

Par contrat à durée indéterminée du 7 août 2007, M. X a été engagé par un sous-traitant de la société T-Systems France, puis à compter du 1er janvier 2009 par société T-Systems France elle-même en qualité d’ingénieur développement. Le 6 juin 2013, son contrat de travail a été transféré au profit de la société Novia Systems.

Par courrier recommandé du 25 juillet 2014, M. X a été licencié pour faute grave.

En dernier lieu, il percevait un salaire brut moyen de 3 514,85 €.

La société Polymont IT Services a été placée en redressement judiciaire selon jugement du tribunal de commerce de Paris du 30 juillet 2015. Par jugement du 13 septembre 2016, un plan de redressement par voie de continuation a été arrêté et Maître Y a été désigné en qualité de commissaire à l’exécution du plan, la SCP BTSG, en la personne de Maître A, ayant été maintenue comme mandataire judiciaire.

Contestant le bien-fondé de son licenciement, M. X a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 2 juillet 2015 pour obtenir paiement de diverses sommes.

Par jugement en date du 21 septembre 2018, le conseil de prud’hommes a :

— fixé la créance de M. X au passif de la société Polymont IT Services en plan de continuation dont Maître Y était le commissaire à 1'exécution du plan, la SCP BTSG étant le mandataire judiciaire, aux sommes suivantes :

* 10 544,55 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 1 054,45 € à titre de congés payés afférents,

* 6 834,35 € à titre d’indemnité de licenciement,

* 22 000 € à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné le remboursernent des indemnités chomages percues par le salarié à Pôle emploi à concurrence de la somme de 3 514,83 € ;

— prononcé la garantie de1'AGS CGEA IDF OUEST à titre subsidiaire ;

— débouté M. X du surplus de ses demandes.

Pour statuer ainsi, le conseil a jugé que les retards reprochés au salarié étaient contestés par ce dernier et n’étaient pas démontrés et que la société n’avait pas justifié d’un préjudice lié à l’absence d’information relative à l’état de grossesse de son épouse

Le 25 octobre 2018, M. X a interjeté appel de ce jugement.

Par jugement du 9 janvier 2020, le Tribunal de Commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de la société Polymont IT Services.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Selon ses conclusions notifiées le 12 janvier 2021 par voie électronique, M. X conclut à la confirmation du jugement en ce qu’il a jugé son licenciement sans cause réelle et sérieuse et lui a alloué la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, mais à l’infirmation quant au montant des dommages et intérêts alloués et au rejet de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect de l’engagement de la société du 31 mai 2013 (application des mesures issues de l’accord de méthode du 19 décembre 2012) et d’astreinte s’agissant de la remise des documents de fin de contrat.

M. X sollicite en conséquence la fixation de ses créances au passif de la société Polymont IT Services de la manière suivante :

—  45 000 € nets à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

—  30 000 € nets pour privation injustifiée de l’indemnité complémentaire plancher de licenciement

—  13 707,92 € nets pour perte de bénéfice du congé de reclassement,

—  10 000 € nets pour perte de l’aide à la formation,

—  2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il demande également à la cour d’ordonner à la SCP BTSG en la personne de Maître A et la SELAFA MJA, en la personne de Maître Z, ès-qualité de liquidateurs de la société Polymont IT Services de lui remettre sous astreinte des bulletins de paie, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi dûment rectifiés et conformes à l’arrêt à intervenir, et de déclarer l’arrêt opposable à l’AGS CGEA Ile de France.

M. X fait valoir que son préjudice a été sous-évalué, étant demeuré sans emploi pendant deux ans et ayant subi une perte de salaire.

Il invoque l’engagement de la société Polymont IT Services figurant dans une note du 31 mai 2013, d’appliquer les conditions de l’accord de méthode signé le 19 décembre 2012 entre les organisations syndicales et la société T-Systems France aux personnes transférées, pour une durée de 18 mois à compter de leur date de transfert effectif, pour tous les licenciements économiques, et ceux liés à l’insuffisance professionnelle et ou à la mobilité. Il précise que cet accord prévoit, à son article 2-2 des indemnités complémentaires de licenciement (s’ajoutant à l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement) particulièrement substantielles. Il soutient que pour échapper à l’application de cet accord, la société Polymont IT Services a mis en oeuvre de nombreux licenciements pour faute grave.

Il réclame également des dommages et intérêts pour perte de bénéfice du congé de reclassement, l’engagement du 31 mai 2013 précisant que seraient appliquées aux salariés licenciés les conditions de l’accord de méthode du 19 décembre 2012, lesquelles incluent le bénéfice d’un congé de reclassement visé à l’article 2.3 de l’accord de méthode. Il ajoute que pour les salariés âgés de moins 45 ans, la durée du congé de reclassement était fixée à 9 mois.

Il prétend enfin à des dommages et intérêts pour perte du bénéfice de l’allocation de formation, ayant été illégitimement privé, du fait des man’uvres de la société, de l’aide à la formation prévue par le plan qui prévoyait une aide maximum de 10 000 €.

Selon ses conclusions notifiées le11 février 2021 par voie électronique, la SELAFA MJA, représentée par Maître Z, en qualité de liquidateur, et la SCP BTSG représentée par Maître A, en qualité de liquidateur de la société Polymont IT Services demandent à la cour de :

— mettre hors de cause Maître Y en qualité de commissaire à l’exécution du plan,

— infirmer le jugement sauf en ce qu’il a débouté M. X du surplus de ses demandes,

Et statuant à nouveau,

— juger que le licenciement repose sur une faute grave,

— débouter en conséquence M. X de l’ensemble de ses demandes,

— à titre subsidiaire, dans le cas où la Cour retiendrait que le licenciement ne reposerait pas sur une faute grave, juger que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse et à titre encore plus subsidiaire pour le cas où par extraordinaire la cour retiendrait que le licenciement ne reposerait pas sur une cause réelle et sérieuse, limiter le montant des dommages et intérêts à six mois de rémunération,

— limiter le remboursement des indemnités à Pôle emploi à une journée d’indemnisation.

— dire que toute fixation au passif de la liquidation de toute somme devra être déclarée opposable à l’AGS CGEA Ile de France, qui devra procéder à l’avance des fonds,

— condamner M. X à verser à Maîtres Z et A, en leur qualité de liquidateurs la société Polymont IT Services la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle invoque l’absence par M. X du respect des horaires de travail sur son site d’affectation, la société Alcatel, même si elle n’a pas pratiqué de retenue de salaire. Elle précise que la société cliente a demandé l’arrêt de la mission pour ce motif. Elle ajoute que le salarié ne l’a pas informée de l’accouchement imminent de son épouse, ce qui ne lui a pas permis d’anticiper la prise de jours de naissance, ayant été mise devant le fait accompli. Elle dénonce le manque d’investissement et d’intérêt du salarié pour cette mission.

Sur le préjudice invoqué, elle constate l’absence de pièces relatives à des recherches d’emploi.

Elle soutient que le licenciement de M. X n’est aucunement lié à un motif économique, ni à une clause de mobilité, ni à une insuffisance professionnelle et elle en déduit que l’accord de méthode n’a pas vocation à s’appliquer.

Elle estime également que toute somme qui sera fixée au passif devra être déclarée opposable à l’AGS CGEA qui devra procéder à l’avance des fonds, étant précisé

que cette avance sera remboursée en fonction de l’actif réalisé et conformément aux dispositions de l’article L643-11 du code de commerce.

Selon conclusions notifiées le 16 février 2021 par voie électronique, l’UNEDIC délégation AGS CGEA Ile-de-France demande à la cour de :

— lui donner acte de ce qu’elle s’associe aux explications de la société et de ses mandataires judiciaires concernant les conditions de la rupture du contrat de travail,

— infirmer le jugement quant à la fixation de la créance de M. X aux sommes allouées,

— confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. X du surplus de ses demandes,

— débouter M. X de l’ensemble de ses demandes,

— subsidiairement, rejeter la demande formée par M. X en vertu de l’accord du 19 décembre 2012 et l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

— juger que M. X ne justifie pas de son préjudice,

— juger que les montants sollicités en vertu de l’accord du 19 décembre 2012 viennent en compensation des sommes sollicitées au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— réduire les montants alloués au titre de la rupture du contrat de travail à de plus justes proportions,

— en tout état de cause, sur sa garantie, juger que s’il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale, et que conformément aux dispositions de l’article L.3253-20 du code du travail, sa garantie n’est due qu’à défaut de fonds disponibles permettant le règlement des créances par l’employeur et sous réserve qu’un relevé de créances soit transmis par le mandataire judiciaire, juger qu’en tout état de cause sa garantie ne pourra excéder, toutes créances avancées pour le compte du salarié, le plafond des cotisations maximum au régime d’assurance chômage, en vertu des dispositions des articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du Code du travail ; juger qu’en tout état de cause, la garantie prévue aux dispositions de l’article L.3253-6 du Code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution ou pour cause de rupture du contrat de travail au sens dudit article L. 3253-8 du Code du travail, les astreintes, dommages et intérêts mettant en 'uvre la responsabilité de droit commun de l’employeur ou de l’article 700 du Code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie ;

— statuer ce que de droit quant aux frais d’instance sans qu’ils puissent être mis à la charge de l’UNÉDIC AGS ;

— condamner M. X à lui verser la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’AGS reprend les moyens de droit et de fait invoqués par les mandataires liquidateurs.

Maître Y, en qualité de commissaire à l’exécution du plan, assigné par exploit d’huissier délivré à personne, n’a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions notifiées par RPVA.

L’instruction a été déclarée close le 17 février 2021.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement pour faute grave

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, doit être suffisamment motivée et viser des faits et griefs matériellement vérifiables, sous peine de rendre le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse.

La faute grave qui seule peut justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. Il appartient à l’employeur qui l’invoque, de rapporter la preuve de l’existence d’une faute grave.

La lettre de licenciement fait état d’une mission d’architecte sur le projet Aida attribuée à M. X à compter du 17 février 2014 au sein de la société Alcatel située à 8 kilomètres du domicile de l’intéressé. La société précise que la présence du salarié était obligatoire lors des planning meeting, soit une fois tous les deux mois, et lors des réunions quotidiennes, soit tous les matins de 10 heures à 10 heures 30, son manager ayant insisté sur sa participation à ces dernières pour le bon déroulement de la mission. Elle fait valoir que dès la fin du mois de mars 2014, le comportement du salarié s’est dégradé, qu’il n’a pas respecté les horaires de travail puisqu’il n’assistait pas aux réunions quotidiennes, ce qui a généré une désorganisation importante et ne permettait pas d’avoir une visibilité sur l’avancement de son travail.

La société Polymont IT Services précise que M. X a volontairement dissimulé l’état d’avancement de son travail alors qu’il savait devoir rendre compte de celui-ci, des avancées et des difficultés rencontrées, ce qui a provoqué le mécontentement du client.

Elle lui reproche également d’avoir caché l’accouchement imminent de son épouse, ce qui ne lui a pas permis d’anticiper son absente subite du 2 au 12 mai, celle-ci ayant été mal comprise par les membres de l’équipe.

Elle ajoute avoir été contrainte d’arrêter prématurément la prestation au profit de la société Alcatel, soit le 16 mai 2014. Elle relève que contrairement à ce qui lui a été demandé, M. X ne s’est pas présenté le 19 mai sur le site de la cliente pour dévérouiller son ordinateur mais s’est rendu uniquement l’après-midi sur le site de son employeur à Saint-Denis, ce qui l’amène à considérer qu’il était absent de manière injustifié le matin.

Elle relève enfin que durant plusieurs jours, soit du 30 juin au 4 juillet 2014, il est arrivé entre 11 heures 30 et 12 heures sur son lieu de travail sans aucun justificatif d’absence.

Aux termes de la lettre de licenciement, les griefs reprochés à M. X sont les suivants : l’absence de respect des horaires de travail, la dissimuation de l’activité et des absences prévisibles.

Concernant le respect des horaires, la société Polymont IT Services soutient que M. X devait respecter les horaires collectifs affichés sur le site d’affectation et que lorsqu’il était en inter contrat, il devait respecter des horaires comportant une plage fixe (de 9 heures 30 à 12 heures et de 14 heures à 16 heures 30) et une plage variable (de 8 heures à 9 heures 30, de 12 à 14 heures avec une pause obligatoire de 45 minutes, de 16 heures 30 à 20 heures).

M. X précise qu’il a accepté d’être affecté sur le projet Aida, bien que n’étant pas architecte, qu’il s’est fortement investi dans sa mission, travaillant tard le soir et le week-end à son domicile, que son étude présentée le 24 mars 2014 a été validée et que n’étant pas destinataire de certains échanges essentiels, il a constaté que la société Alcatel ne voulait plus travailler avec la société Polymont IT

Services. Il ajoute que postérieurement, son employeur ne lui a plus confié de mission et que préalablement, soit en janvier 2014, il lui a proposé une rupture conventionnelle qu’il a refusée.

Le contrat de travail précise que M. X fait partie de la catégorie des salariés concernés par les modalités 'standard’ et que les horaires de travail sont affichés sur son lieu d’affectation.

La société Polymont IT Services produit également une pièce intitulée 'horaires applicables dans l’entreprise’ reprenant les plages horaires obligatoires et les plages variables évoquées dans ses écritures.

S’agissant du respect des horaires des réunions au sein de la société Alcatel, Mme B précise d’ailleurs que lors d’un point effectué avec le salarié le 28 mars 2014 à la suite d’un échange avec le client, il n’a pas été question de retards ou d’absences du salarié aux réunions quotidiennes mais de la nécessité de comprendre son manque de réactivité et de participation lors des différentes réunions avec le client. Elle précise que les retards et l’absence de participation aux réunions quotidiennes de M. X se sont produits le dernier mois de la mission, soit en mai 2014 et que son attitude a fait l’objet de rappels oraux (courriel du 15 juillet 2014). L’absence de respect des horaires des réunions est donc établie, l’attention du salarié ayant été attirée sur ce point.

S’agissant du déroulement de la mission, M. C, salarié de la société Alcatel, précise dans un courriel du 7 avril 2014 qu’il n’a toujours pas reçu d’analyse de la part de M. X qui n’a pas démontré sa capacité à assumer le rôle d’architecte sur le projet Aida et qu’il demande à ajouter à l’ordre du jour du prochain comité de pilotage la 'sortie de l’architecte'. Ce courriel n’établit pas que le salarié a volontairement dissimulé l’état d’avancement de son travail, le responsable de la société cliente évoquant uniquement l’absence d’analyse sans évoquer une quelconque attitude volontaire de la part du salarié.

M. X produit le courriel qui lui a été adressé le 16 mai 2014 lui notifiant la fin de la mission au sein de la société Alcatel et lui demandant de passer chez le client le lundi matin suivant pour déverrouiller son ordinateur portable et restituer son badge, puis de se présenter à 14 heures à Saint-Denis. La société Polymont IT Services produit le courriel de M. D, salarié de la société Alcatel, précisant que M. X ne s’est pas présenté le matin du 19 mai 2014 sur le site de la société cliente pour effectuer la tâche convenue. Ce dernier a répondu par courrier du même jour qu’il était présent à Saint-Denis depuis 15 heures. Ainsi, il est démontré que le salarié ne s’est pas présenté à l’horaire convenu dans les locaux de la société cliente.

Postérieurement à la fin de sa mission au sein de la société Alcatel, M. X devait se rendre à Saint-Denis, au siège de la société qui l’employait.

Mme E précise que M. X n’est pas venu à l’entreprise les 21 mai et 17 juin 2014. Concernant la période du 30 juin au 4 juillet 2014, période durant laquelle le salarié étant en inter contrat, Mme F, assistante de direction, atteste que M. X n’était pas présent à son poste de travail avant 11 heures 30 et qu’il n’a fourni aucune explication. Il ressort par ailleurs d’un échange de courriels entre deux salariés que le 4 juillet 2014 à 11 heures 10, M. X n’est pas présent dans l’entreprise.

Les griefs évoqués dans la lettre de licenciement sont donc fondés à l’exception de ceux relatifs à l’absence d’information de son employeur au sujet de l’état de grossesse de son épouse, aucune obligation légale n’étant imposée en la matière, et à la volonté de dissimuler l’état d’avancement de son travail.

Si les griefs sont matériellement établis, ils ne sont pas constitutifs d’une faute grave mais justifient néanmoins un licenciement pour cause réelle et sérieuse en raison des manquements avérés du salarié lors de la mission au sein de la société Alcatel et postérieurement à celle-ci. Dès lors, le

jugement est infirmé en ce qu’il a jugé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et en ce qu’il a alloué à M. X une somme de 22 000 € au titre du préjudice résultant de la rupture. En revanche, le licenciement étant fondé sur une cause réelle et sérieuse, les sommes allouées au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents à celle-ci et de l’indemnité de licenciement sont confirmées.

Sur les mesures financières et d’accompagnement prévues par l’accord de méthode signé le 19 décembre 2012 au sein de la société T-Systems France

Pour prétendre au versement d’une indemnité complémentaire de licenciement et à une somme représentant neuf mois de salaire au titre du congé de reclassement prévu à l’article 2.3 de cet accord, M. X fait valoir que dans le cadre de la cession de l’activité de la société Novia Systems au profit de la société Polymont IT Services, celle-ci a pris l’engagement d’appliquer l’accord de méthode aux salariés transférés et licenciés pour raisons économiques, pour insuffisance professionnelle et pour les licenciements liés à la mobilité, cet accord prévoyant des indemnités complémentaires de licenciement s’ajoutant à l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement. Il soutient que pour échapper au paiement de ces indemnités, la société Polymont IT Services a mis en oeuvre en 2013 et 2014 une politique massive de licenciement en multipliant les licenciements pour faute dénoncés par le syndicat CGT évoquant un plan social déguisé. Il en déduit que la véritable cause de son licenciement est économique.

La société Polymont IT Services fait valoir que l’accord est très clair quant aux bénéficiaires de cet accord et que dans le cas de M. X, il n’a pas vocation à s’appliquer.

Les pièces produites par M. X sont essentiellement des tracts ou courriers des syndicats concernant la procédure collective de la société Polymont IT Services. Celle-ci a en effet été placée en redressement judiciaire le 30 juillet 2015, soit plus d’un an après le licenciement de M. X et un plan de continuation a été arrêté le 13 septembre 2016. Mais surtout, la cour a jugé qu’au regard des griefs et pièces produites par la société Polymont IT Services, le licenciement de M. X reposait sur une cause réelle et sérieuse et était donc justifié par des éléments étrangers à tout motif économique. En conséquence, n’ayant pas fait l’objet d’un licenciement pour motif économique, pour insuffisance professionnelle ou ayant un lien avec la mobilité, M. X ne peut pas prétendre à l’application de cet accord. Sa demande d’indemnisation complémentaire et de versement du congé de reclassement est donc rejetée.

Sur le préjudice résultant de la perte de l’aide à la formation

M. X invoque la privation illégitime de l’aide prévue par le plan et vise la pièce n°23 qui n’est autre que l’accord de méthode du 19 décembre 2012. Il précise également que durant cinq ans, son employeur n’a financé aucune formation et qu’il a dû s’inscrire à une formation informatique dont il a supporté le coût, soit environ 10 000 €.

La société Polymont IT Services, ayant conclu au rejet de cette demande dans le dispositif de ses écritures, ne présente aucun moyen de fait ou de droit.

Aucune somme ne peut être allouée à M. X sur le fondement de l’accord de méthode dont il a été jugé ci-dessus qu’il ne pouvait être appliqué au regard du licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse.

En vertu de l’article L.6321-1 du code du travail, l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail, il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations, et peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu’à la lutte contre l’illettrisme, notamment des actions d’évaluation et de formation permettant l’accès au socle de

connaissances et de compétences défini par décret.

En l’espèce, la société Polymont IT Services ne verse aux débats aucune pièce justifiant de ce qu’elle a proposé à M. X une formation durant la relation contractuelle, celle-ci ayant duré sept années, ou même financé une formation alors même que le salarié travaillait dans le domaine très évolutif de l’informatique. Elle n’a donc pas assuré l’adaptation du salarié à son poste de travail. Or, celui-ci démontre qu’il a été amené, postérieurement à son licenciement, à engager des frais pour effectuer un mastère génie ferroviaire au sein de l’institut catholique d’arts et métiers de Lille en 2014 et en 2015. En attestent la convention de formation professionnelle signé entre les parties ainsi que les abonnements SNCF souscrits par l’intéressé pour se rendre sur le lieu de la formation. En conséquence, il y a lieu de lui allouer une somme de 5 000 € au titre du préjudice résultant de l’absence de respect par la société Polymont IT Services de son obligation de formation.

Sur la garantie de l’AGS

L’AGS demande à la cour de juger que, conformément aux dispositions de l’article L. 3253-20 du code du travail, sa garantie n’est due qu’à défaut de fonds disponibles permettant le règlement des créances par l’employeur et sous réserve qu’un relevé de créances soit transmis par le mandataire judiciaire.

Le mandataire liquidateur dénonce l’absence de texte et d’argumentation de la part de l’AGS et soutient que le principe d’intervention à titre subsidiaire de l’AGS, énoncé par l’article L. 3253-20 du code du travail, n’est subordonné à la transmission de document justifiant l’insuffisance de fonds disponibles qu’en cas de procédure de liquidation judiciaire. Il en déduit qu’en sa qualité de mandataire liquidateur, il a seul qualité pour juger de la disponibilité des fonds qui doit l’amener à présenter un relevé à l’AGS déclanchant son obligation de verser les sommes litigieuses.

L’article L. 3253-20 du code du travail dispose que si les créances ne peuvent être payées en tout ou partie sur les fonds disponibles avant l’expiration des délais prévus par l’article L. 3253-19, le mandataire judiciaire demande, sur présentation des relevés, l’avance des fonds nécessaires aux institutions de garantie mentionnées à l’article L. 3253-14.

L’expression employée par l’AGS, à savoir la transmission d’un relevé de créances par le mandataire liquidateur, est similaire à celle contenue dans l’article L. 3253-20 qui évoque la présentation des relevés. Au surplus, l’AGS n’a fait que reprendre la première phase de cet article énonçant le principe de subsidiarité de sa garantie ne pouvant être mise en oeuvre qu’en cas d’impossibilité de payer les créances en tout ou partie sur les fonds disponibles. En conséquence, l’AGS n’a pas ajouté au texte de loi.

En revanche, il y a lieu de rappeler qu’en application de l’article L.3253-6 du Code du travail, la garantie de l’AGS ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution ou pour cause de rupture du contrat de travail au sens de l’ article L. 3253-8 du Code du travail, ce dont il se déduit que les astreintes, les dommages et intérêts mettant en 'uvre la responsabilité de droit commun de l’employeur ou les sommes allouées au titre de l’article 700 du Code de procédure civile sont exclus de sa garantie.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire et rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

MET hors de cause Maître Y désigné en qualité de commissaire à l’exécution du plan ;

INFIRME le jugement en ce qu’il a :

— a jugé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse,

— alloué à M. X une somme de 22 000 € au titre du préjudice en résultant,

— rejeté l’indemnisation du préjudice résultant de la perte de l’aide à la formation,

CONFIRME le jugement pour le surplus ;

Et statuant à nouveau,

DIT que le licenciement pour faute grave de M. X s’analyse en un licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,

FIXE la créance de M. X au passif de la société Polymont IT Services, représentée par ses mandataires liquidateurs, la SELAFA MJA représentée par Maître Z et la SCP BTSG représentée par Maître A, à la somme de 5 000 € au titre du préjudice résultant de l’absence de respect de l’obligation de formation ;

DÉBOUTE M. X de sa demande de dommages et intérêts fondé sur l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement ;

DIT que chacune des parties garde à sa charge les frais qu’elle a engagés en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes,

DÉCLARE l’arrêt opposable à l’UNEDIC délégation AGS CGEA Ile-de-France dans les limites de la garantie légale conformément aux articles L.3253-20 du code du travail, L. 3253-17, D. 3253-5, L.3253-6 et L. 3253-8 du Code du travail ;

RAPPELLE que le jugement d’ouverture de la procédure collective emporte arrêt du cours des intérêts ;

CONDAMNE M. X au paiement des dépens d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 8 avril 2021, n° 18/12043