Cour d'appel de Versailles, 10 mai 2016, n° 14/03345

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Chronologie de l’affaire

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Maître Joan Dray · LegaVox · 16 septembre 2016
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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 10 mai 2016, n° 14/03345
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 14/03345
Décision précédente : Tribunal d'instance de Sannois, 12 mars 2014, N° 1113001134

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53B

1re chambre 2e section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 10 MAI 2016

R.G. N° 14/03345

AFFAIRE :

Y X

C/

Société SOGEFINANCEMENT

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Mars 2014 par le Tribunal d’Instance de SANNOIS

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 1113001134

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Bertrand ROL de l’AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS

Me Eric AZOULAY de la SCP FINKELSTEIN/DAREL/AZOULAY/ROLLAND/CISSE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX MAI DEUX MILLE SEIZE,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Mademoiselle Y X

XXX

XXX

représentée par Me Bertrand ROL de l’AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617

APPELANTE

****************

Société SOGEFINANCEMENT

prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège

N° SIRET : B 3 94 352 272

XXX

XXX

représentée par Me Eric AZOULAY de la SCP FINKELSTEIN/DAREL/AZOULAY/ROLLAND/CISSE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 10 – N° du dossier 2130477

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 24 Novembre 2015 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant M. Serge PORTELLI, Président, et Mme Claire MORICE, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Serge PORTELLI, Président,

Mme Claire MORICE, Conseiller,

Mme Véronique CATRY, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Pierre QUINCY,

FAITS ET PROCEDURE,

Y X a souscrit auprès de la SA SOGEFINANCEMENT un contrat de crédit de 29.098 € le 29 juin 2011, remboursable en 84 mensualités de 428,09 €. Un réaménagement de ce crédit a été régularisé le 19 avril 2012 sur le solde restant dû de 28.957,38 €, payable en 133 échéances de 300,96 €.

La SA SOGEFINANCEMENT a mis en demeure Y X le 14 janvier 2013, suite à l’absence de règlements, puis l’a fait assigner en paiement de la somme de 32.292,92 €, selon décompte du 24 mai 2013 avec intérêts au taux contractuel de 5,38 % à compter du 14 janvier 2013, date de la mise en demeure.

Par jugement contradictoire du 13 mars 2014, le tribunal d’instance de Sannois a :

— condamné Y X à payer à la SA SOGEFINANCEMENT la somme de 29.786,81 € avec intérêts au taux conventionnel de 5,25 % l’an à compter du 14 janvier 2013,

— débouté la SA SOGEFINANCEMENT de ses autres demandes,

— dit n’y a avoir lieu à exécution provisoire,

— condamné Y X aux dépens.

Cette dernière a interjeté appel de cette décision le 30 avril 2014 et demande à la Cour , par conclusions du 23 juillet 2014, de :

— infirmer le jugement, sauf en ce qu’il a supprimé l’indemnité de résiliation,

Et statuant à nouveau:

— prononcer la déchéance des intérêts conventionnels en application de l’article L.311-48 du code de la consommation,

— condamner SOGEFINANCEMENT à lui payer la somme de 29.000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à son devoir de conseil,

— ordonner la compensation entre les créances respectives des parties,

— lui octroyer les plus larges délais, conformément à l’article 1244-1 du code civil,

— condamner la société SOGEFINANCEMENT à lui payer la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société SOGEFINANCEMENT aux entiers dépens d’appel dont distraction au profit de Me Emmanuel JULLIEN, avocat, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 16 septembre 2014, la SA SOGEFINANCEMENT demande à la Cour de :

— confirmer le jugement entrepris, en déboutant Y X de toutes ses demandes,

— dire qu’elle n’a pas manqué à son devoir de conseil,

— condamner Y X à lui payer la somme principale de 29.786,81 € augmentée des intérêts au taux contractuel de 5,25 % à compter du 14 janvier 2013, date de la mise en demeure outre le paiement de la somme de 2.316,59 € au titre de la clause pénale,

— condamner Y X à lui payer la somme de 1.500 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner Y X en tous les dépens (article 699 du code de procédure civile).

L’ordonnance de clôture est intervenue le 22 octobre 2015.

MOTIFS

Y X conteste le jugement par lequel le tribunal l’a déboutée de sa demande de déchéance des intérêts conventionnels. Elle expose :

— qu’elle élève seule son fils et que pendant de nombreuses années il a été hospitalisé à plusieurs reprises, étant gravement malade,

— que, dans ces conditions, elle n’a pu travailler et a accumulé un certain nombre de dettes financées par des crédits à la consommation,

— qu’elle a pris un emploi en intérim Chez Business Orange pour un salaire mensuel virant entre 1.800 et 1900 €, jusqu’à ce qu’elle trouve un emploi à durée indéterminée, qu’elle a trouvé à la Société Générale, où elle a travaillé de janvier 2008 à mai

2013 moyennant un salaire de 1300 €, ce qui lui a permis de pouvoir contracter un bail,

— elle a bénéficié pendant de nombreux mois d’un découvert tacite de 800 à 1500 euros par mois lui permettant de faire face à ses problèmes de trésorerie récurrents, sur le compte qu’elle y avait ouvert,

— il a été mis fin à cette facilité en janvier 2011, et elle a fait l’objet d’une inscription sur le fichier de la Banque de France, 6 mai 2011,

— sur les conseils de son employeur et banquier, la SOCIETE GENERALE, s’est rapprochée de la SOGEFINANCEMENT, qui lui a octroyé un crédit de 29.098 €

Elle fait valoir que l’établissement de crédit n’aurait jamais dû lui octroyer de crédit, puisqu’il n’a pas vérifié sa solvabilité, ni consulté le FICP avant la signature du prêt et qu’il doit être déchu de tout intérêt conventionnel. Elle demande, à titre de dommages-intérêts, une somme de 20000€, estimant que la SA SOGEFINANCEMENT n’a fait que soutenir abusivement son crédit.

Sur la déchéance des intérêts

L’article L311-9 du code de la consommation stipule que «Avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations par ce dernier à la demande du préteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l’article L333-5, sauf dans le cas d’une opération mentionnée au 1 de l’article L511-6 du code monétaire et financier».

Aux termes de l’article L311-48 du même code, le prêteur qui n’a pas respecté les dispositions précitées est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

Depuis le 1er mai 2011, les établissements de crédits doivent impérativement consulter le fichier national recensant les incidents de paiement caractérisés liés aux crédits aux particuliers (FICP) avant d’accorder un crédit à la consommation et avant de reconduire un crédit renouvelable, pour vérifier la solvabilité de son client et vérifier qu’il ne se trouve pas dans une situation de surendettement.

L’arrêté du 26 octobre 2010 prévoit en son article 13 que ces établissements

conservent des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat, sur un support durable et qu’ils doivent être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du fichier et de conservation du résultat des consultations garantissent l’intégrité des informations ainsi collectées.

L’arrêté susvisé ne donne aucune précision sur le moyen de preuve de la consultation de l’établissement de crédit. Dans la pratique, il s’agit d’une impression d’écran, mais encore faut-il que ce document émane de la Banque de France, qui seule gère le fichier national et centralise toutes les informations, à titre exclusif comme le précise la loi du 1er juillet 2010. De plus, cette impression doit contenir toutes les informations tant sur le prêteur que sur l’emprunteur et préciser la date de consultation du fichier.

En l’espèce, la SA SOGEFINANCEMENT produit un document informatique intitulé 'Résultats interrogation Fichage FICP’ sans référence à la Banque de France, qui précise le nom de l’emprunteuse, sa date et lieu de naissance et le résultat et la date de l’interrogation le 8 juillet 2011. Il est indiqué une date d’édition du 28 juin 2011 avec un numéro 'utilisateur’ et 'agence', sans que leurs noms ne soient mentionnés.

En l’absence des mentions requises, la déchéance des intérêts est encourue. Le jugement par lequel Y X a été déboutée de sa demande de déchéance des intérêts est donc infirmé sur ce point.

Sur le manquement de l’organisme prêteur à son devoir de conseil

L’appelante, qui reproche à l’organisme prêteur d’avoir manqué à son devoir de conseil et de lui avoir accordé un soutien de crédit abusif, avait contracté un certain nombre de crédits à la consommation pour faire face à plusieurs dettes avant sa prise de fonction à la Société Générale en 2008 et le crédit litigieux était destiné à restructurer des dettes.

Il apparaît que l’octroi de ce crédit a entraîné une diminution de ses charges et non leur augmentation, comme elle le soutient. L’appelante ne démontre pas le manquement qu’aurait commis la SA SOGEFINANCEMENT à son égard.

En sa qualité de conseillère clientèle à la Société Générale, Y X était à même de connaître l’étendue de ses obligations et peut être considérée comme une emprunteuse avertie. Dans ces conditions, elle doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

Sur le montant de l’indemnité au titre de la clause pénale

Y X sollicite la confirmation du jugement entrepris, en ce que le tribunal a supprimé la clause pénale. La SA SOGEFINANCEMENT sollicite l’infirmation du jugement sur ce point et réclame cette indemnité, en rappelant qu’elle est applicable, selon le contrat, en cas de défaillance de l’emprunteuse, laquelle était donc parfaitement informée de ce qu’une résiliation du contrat causée par sa défaillance l’exposait au paiement de cette indemnité et qu’elle était en droit de la solliciter, en sa qualité de prêteur.

Il est prévu au contrat une indemnité pouvant aller jusqu’à 8% du capital restant dû. Elle s’élève, selon le décompte du 16 janvier 2013, à 2316, 59 €.

Ce montant apparaît manifestement excessif, au regard de la situation financière difficile de l’appelante, situation qui était connue du prêteur, avec la particularité qu’il était une filiale de son employeur, la Société Générale. Il convient donc, de la ramener à un euro symbolique, en application de l’article 1152 du code civil. La suppression de l’indemnité prononcée par le premier juge est infirmé sur ce point.

Sur le montant de la créance

La SA SOGEFINANCEMENT est recevable en sa demande en paiement qui fait suite à la mise en demeure du 14 janvier 20113 adressée à Y X.

Au vu du décompte produit, il convient de fixer la créance de la SA SOGEFINANCEMENT envers Y X, qui n’en conteste pas le montant, à la somme de 29.786,81 €, comprenant le capital à hauteur de 27 981, 05 € et les échéances impayées à hauteur de 1805, 76 € et de condamner Y X à payer ladite somme, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 14 janvier 2013 à la SA SOGEFINANCEMENT, compte tenu de la déchéance des intérêts. Le jugement est confirmé sur le montant de la créance, mais infirmé sur les intérêts conventionnels.

Sur la demande de délai

Y X sollicite les plus larges délais pour s’acquitter de sa dette et verse aux débats pour toute pièce un arrêt du 29 novembre 2012. Sa situation économique et financière actuelle n’est pas connue. Les éléments la concernant produits par le prêteur ne peuvent non plus justifier l’octroi de délai, puisqu’ils datent des années 2009 et 2011. Il convient donc de la débouter de cette demande.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la SA SOGEFINANCEMENT et à Y X la charge des frais irrépétibles qu’ils ont exposés dans la présente procédure.

Y X, succombant principalement à son action, est condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne la déchéance des intérêts et intérêts au taux contractuel de 5,25 % et le montant de l’indemnité de résiliation,

Statuant à nouveau,

Prononce la déchéance du droit aux intérêts,

Fixe l’indemnité de résiliation à un euro,

Déboute Y X de sa demande de dommages-intérêts,

Dit que seuls les intérêts au taux légal courent à compter de la mise en demeure du 14 janvier 2013 sur la somme principale de 29.786,81 €,

Déboute Y X de sa demande de délai,

Dit que chacune des parties supportera la charge de ses frais irrépétibles exposés en cause d’appel, en vertu de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Y X aux dépens d’appel (article 699 du code de procédure civile).

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Serge PORTELLI, Président et par Madame QUINCY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

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Cour d'appel de Versailles, 10 mai 2016, n° 14/03345