Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 14 décembre 2004, 01-13.062, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 14 déc. 2004, n° 01-13.062
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 01-13.062
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Douai, 4 avril 2001
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000007482560
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Sur les parties

Texte intégral

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt partiellement confirmatif attaqué, (Douai, 5 avril 2001), que la société Nancilux, présidée par M. X… a acquis en février 1990 un immeuble à usage de bureaux pour 17 000 000 francs au moyen d’un prêt de 16 700 000 francs d’une durée de deux ans, accordé par la banque Joire Pageot et Martin, dénommée ensuite banque des Flandres et, désormais, Flandres contentieux (le chef de file), garanti par un privilège de deniers et la caution solidaire de M. et Mme X… ; que le 26 juillet 1990, la Financière immobilière devenue SA LFI (le sous-participant) anciennement dénommée Bred Pallas financement immobilière a accepté de participer, à concurrence de 80 % en risque et trésorerie, dans le cadre d’un pool occulte, au prêt consenti à la société Nancilux et a versé les fonds correspondants au chef de file ; que la liquidation judiciaire du principal locataire, à la fin de 1991 a privé la société Nancilux d’une partie importance des recettes locatives ; que le prêt n’a pas été remboursé à son échéance ; qu’après échec en 1995 d’un projet de reprise de l’immeuble garanti par une société de portage, filiale du pool bancaire, le sous-participant a assigné le chef de file par acte du 15 avril 1996 en nullité de la convention de pool invoquant le dol que celui-ci aurait commis pour avoir caché la société de fait qui aurait été, selon lui, constituée entre la société Nancilux et le chef de file ; qu’à titre subsidiaire, le sous-participant a demandé des dommages-intérêts à raison des fautes contractuelles qu’aurait

commises le chef de file à son encontre ; que la société Bred banque Populaire (la Bred) société mère du sous-participant, a acquis en 1999 la participation de ce dernier dans le pool bancaire et est intervenue volontairement dans la procédure devant la cour d’appel ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le sous-participant et la Bred font grief à l’arrêt d’avoir rejeté leur demande de nullité de la convention de pool signée le 26 juillet 1990 alors, selon le moyen :

1 / que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leur prétention ; qu’en l’espèce, ainsi que l’avaient soutenu le sous-participant et la Bred, les conditions caractéristiques d’une société créée de fait étaient remplies, la banque JPM ayant effectué un apport en industrie en permettant le financement de l’opération de gestion locative de la tour « Marcel Brot » et un apport en capital en finançant cette opération à hauteur de 20 % tandis que pour sa part, la SA Nancilux apportait son savoir faire en matière de gestion de l’immeuble ; que de la même façon, le sous-participant et la Bred avaient souligné que la volonté des parties de partager les bénéfices et de contribuer aux pertes de l’opération était attestée par la mise à disposition de la SA Nancilux d’une somme de 13 227 662 francs dont la banque JPM avait renoncé à exiger le remboursement sauf retour à meilleure fortune, ce qui signifiait que la banque réalisait un apport en compte courant dont le remboursement dépendait uniquement des bénéfices réalisés ; qu’enfin, le sous-participant avait indiqué que l’affectio societatis était révélé par le comportement, inhabituel pour un banquier, de la banque JPM, qui n’avait jamais engagé la moindre procédure de recouvrement de la créance du pool à l’encontre de la société Nancilux et de ses cautions, ce qui traduisait la communauté d’intérêt existant entre elle et la SA Nancilux et leur intention de se comporter comme des associés partageant les mêmes risques ; que pour écarter l’existence d’une société créée de fait et rejeter la demande de nullité pour dol du contrat de pool bancaire, l’arrêt, après avoir retenu qu’il n’est présenté « aucune analyse permettant de pouvoir conclure à l’existence d’une société de fait entre la société Nancilux et le chef de file du pool à partir du simple constat que ce dernier a mis à la disposition de la SNC la Petite Lande une somme d’au moins 4 millions de francs » se borne à énoncer que « rien ne permet de juger que le chef de fils se soit engagé envers la société Nancilux autrement que pour une simple opération de crédit sans ainsi avoir eu la volonté d’assumer la gestion locative de la Tour Marcel Brot, de contribuer d’une manière ou d’une autre aux pertes et profit de cette gestion, ou de s’associer avec une véritable affectio societatis » qu’en se déterminant ainsi, sans examiner les éléments de preuve qui lui étaient proposés, la cour d’appel a violé l’article 1353 du Code civil, ensemble l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / que l’existence d’une société créée de fait est caractérisée par les apports respectifs de chaque associé, leur participation aux bénéfices et aux pertes et leur volonté de se comporter comme des associés, qu’en se déterminant par les motifs susvisés, sans justifier en fait son appréciation, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1116 et 1832 du Code civil ;

Mais attendu que l’arrêt qui retient, tant par motifs propres qu’adoptés, que le sous-participant et la Bred n’établissent pas les éléments constitutifs de la prétendue société de fait, les a nécessairement examinés et qu’aucun fait se rapportant à des manoeuvres dolosives qu’aurait commises le chef de file dès l’origine pour fausser de manière déterminante la volonté du sous participant de contracter ne peut être retenu, de tels faits ne pouvant éventuellement constituer, le cas échéant, que des fautes contractuelles postérieures à la conclusion de leur accord ; que par ces seuls motifs déduits de son appréciation souveraine du sens et de la portée des preuves qui lui étaient soumises, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de s’expliquer sur celles qu’elle ne retenait pas, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que le sous-participant et la Bred font grief à l’arrêt d’avoir ramené à 2 000 000 francs la somme due en définitive par le chef de file à la Bred, « pour perte fautive de loyer à compter du 15 mai 1997 jusqu’au présent arrêt », alors, selon le moyen :

1 / que dans leurs conclusions récapitulatives du 24 octobre 2000 le sous-participant et la Bred avaient souligné qu’entre autres manquements imputables au chef de file et susceptibles d’engager sa responsabilité contractuelle en sa qualité de chef de file du pool bancaire se trouvait le fait, pour cette dernière, de n’avoir pas tenu le sous-participant informé de l’évolution de la situation financière des cautions et encore moins de la liquidation judiciaire de M. X…, aucune information ne lui ayant été transmise par le chef de file du pool sur l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la caution, sur sa transformation en liquidation judiciaire, sur l’admission de la créance du pool au passif et sur l’évolution des opérations de liquidation, qu’en s’abstenant purement et simplement de répondre à ce moyen, qui tendait à faire constater les graves manquements du chef de file et le bien fondé de l’action en responsabilité contractuelle exercée de ce chef à son encontre, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / que le chef de file d’un pool bancaire est tenu à l’égard des membres de celui-ci des mêmes obligations qu’un mandataire à l’égard de son mandant, et notamment d’une obligation de rendre compte de sa gestion, qu’à ce titre, il lui appartient de délivrer spontanément toute information ayant pour objet un fait majeur survenu au cours de la gestion du pool, ce qui inclut, en particulier les difficultés financières de l’emprunteur et de sa caution, qu’en l’espèce, et ainsi que l’avaient exactement retenu les premiers juges, le chef de file du pool avait manqué à son obligation d’information des membres de celui-ci, en ne répondant pas aux nombreux courriers que lui avait adressés le sous-participant en vue de l’inciter à prendre tant à l’encontre du débiteur qu’à l’encontre de ses cautions les mesures nécessaires à la préservation des intérêts communs ; qu’en estimant dans ces conditions, que la seule faute contractuelle commise par le chef de file résultait de ce qu’aucune délégation de loyer n’avait été effectivement mise en place et en limitant ainsi les faits et abstentions dommageables qui pouvaient lui être reprochés, la cour d’appel a violé les articles 1134, alinéa 3, du Code civil ensemble les articles 1147, 1991 et 1993 du Code civil ;

3 / que dans leurs conclusions précitées du 20 octobre 2000, le sous-participant et la Bred faisaient valoir que « le chef de file aurait dû informer le sous-participant de la mise en redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire de M. X…, déclarer la créance du pool bancaire et suivre les opérations de liquidation de biens de M. X… pour le compte du pool bancaire » et que « le chef de file, en omettant de déclarer sa créance au passif de la liquidation de M. X… a privé le sous-participant (d’une chance) de recouvrer sa créance sur les actifs de ce dernier » ; que, dans le sillage de ces arguments, le sous-participant et la Bred ajoutaient que, de la même façon, le chef de file « aurait dû prendre des mesures conservatoires et d’exécution à l’encontre de Mme X…, conformément à ce qui lui avait été demandé » ; qu’en omettant purement et simplement de répondre à ce chef des écritures, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

4 / que, selon les principes du droit commun du mandat, applicables au pool bancaire, le chef de file est tenu, à l’égard des membres du pool, d’exécuter le mandat qu’il a reçu, et de gérer le pool dans le respect des instructions de son commettant avec diligence et loyauté ; qu’à ce titre, il lui incombe d’accomplir de bonne foi tous les actes nécessaires à la gestion du pool, ce qui inclut, notamment la réalisation des sûretés personnelles et, le cas échéant, la déclaration de la créance du pool au passif de la caution, l’absence de poursuite de cette dernière étant constitutive d’une faute de gestion engageant sa responsabilité contractuelle ; qu’en espèce, les premiers juges avaient retenu à juste titre que le chef de file, par son comportement, avait nuit aux intérêts du pool et qu’en s’abstenant de prendre les mesures conservatoires qui s’imposaient, dont la mise en oeuvre du cautionnement, il n’avait pas rempli le rôle qui lui était délégué par le contrat de pool du 26 juillet 1990 ;

qu’en jugeant, dans ces conditions, que la seule faute contractuelle commise par le chef de file résultait de ce qu’aucune délégation de loyer n’avait été mise en place, et en cantonnant ainsi à ce chef de responsabilité la créance d’indemnisation du sous-participant la cour d’appel avait derechef violé l’article 1147 du Code civil, ensemble, les articles 1991 et 1992 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que l’arrêt ne dit pas que l’absence de délégation de loyer est la seule faute contractuelle commise par le chef de file mais seulement la faute qui a occasionné un préjudice dont le chef de file devait réparation intégrale ;

Et attendu, en second lieu, que l’arrêt a estimé de pas devoir allouer de sommes supplémentaires pour la perte d’une chance pour le pool en raison de pertes de garanties due au retard délibéré de la part du chef de file à réagir ou en informer le sous-participant ou à raison de son manque de loyauté dans l’exécution de son contrat après avoir constaté que celui-ci n’avait versé aux débats aucune information précise pouvant permettre de considérer que les garanties invoquées avaient ou n’avaient pas réellement existé et que s’agissant du manque de loyauté, celui-ci ne saurait être indemnisé faute de préjudice spécifique sur ce point ; qu’il en résulte que la cour d’appel, qui a répondu aux conclusions prétendument délaissées invoquées dans les première et troisième branches, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen, qui manque en fait dans ses deuxième et quatrième branches, est non fondé pour le surplus ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que le sous-participant et la Bred font grief à l’arrêt d’avoir ordonné à celle-ci de verser au chef de file la somme de 1 360 000 francs à titre de restitution de son apport, avec intérêts au taux légal à compter du 2 février 1999, alors, selon le moyen :

1 / qu’en faisant droit à la demande du chef de file, sans répondre aux argument du sous-participant et de la Bred, tendant à faire constater que l’article 1376 du Code civil ne pouvait recevoir application dès lors que le sous-participant avait reçu la somme de 1 360 000 francs en contrepartie de sa sous-participation occulte en risque et trésorerie à hauteur de 80 % dans le pool bancaire, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / que l’action en répétition de l’indu objectif ouverte par l’article 1376 du Code civil est par principe suspendue à la preuve effective que les sommes réclamées par le solvens n’étaient pas dues par ce dernier à l’accipiens, parce que la dette n’existait pas, n’existait plus, ou qu’elle était moins étendue ; qu’en condamnant la Bred à verser au chef de file la somme de 1 360 000 francs là où il apparaissait que le paiement de cette somme trouvait sa cause dans l’obligation du chef de file de rembourser au sous-participant le montant de sa sous-participation, et sans même constater que le chef de file faisait la preuve qu’aucune dette entre les parties ne permettait de justifier le paiement dont elle sollicitait la répétition, la cour d’appel a violé par fausse application l’article 1376 du Code civil ;

Mais attendu que l’arrêt a retenu que le versement litigieux du chef de file au sous-participant était seulement constitutif d’une avance sur une opération de reprise de l’immeuble qui n’avait pas abouti, le contrat litigieux n’ayant pas été signé, faisant ainsi ressortir, ainsi que le soutenait le chef de file, qu’à défaut de consentement sur la dissolution du pool bancaire constitutif d’une société en participation, le sous-participant avait l’obligation de reconstituer son apport en le lui restituant ; que la cour d’appel, qui a répondu, en les écartant, aux conclusions prétendument délaissées évoquées par la première branche, a pu statuer comme elle a fait ; que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le quatrième moyen :

Attendu que le sous-participant et la Bred font grief à l’arrêt d’avoir condamné celle-ci à verser au chef de file la somme de 1 340 000 francs à titre de restitution de l’excédent versé à la suite de l’exécution de la condamnation en première instance avec intérêts et demandent la cassation de l’arrêt de ce chef par voie de conséquence de la cassation « qui interviendra sur les deuxième et troisième moyens » ;

Mais attendu que ces moyens ayant été rejetés, ce moyen doit l’être également ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société anonyme LFI et la Bred Banque populaire aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la Bred Banque populaire et la société LFI à payer à la société Flandres contentieux la somme globale de 1 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille quatre.

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