Cour de cassation, Chambre civile 1, 28 novembre 2018, 17-14.356, Publié au bulletin

  • Responsabilité du fait des produits defectueux·
  • Responsabilité du fait des produits défectueux·
  • Obligation non sérieusement contestable·
  • Responsabilité de plein droit·
  • Fait d'un tiers référé·
  • Applications diverses·
  • Cause d'exonération·
  • Fait d'un tiers·
  • Responsabilité·
  • Attribution

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Il résulte de l’article 1386-1, devenu 1245 du code civil, que le producteur est responsable de plein droit du dommage causé par un défaut de son produit. Aux termes de l’article 1386-14, devenu 1245-13 du même code, la responsabilité du producteur envers la victime n’est pas réduite par le fait d’un tiers ayant concouru à la réalisation du dommage.

En conséquence, viole ces dispositions, ainsi que l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile, la cour d’appel, qui, statuant en référé, décide que l’obligation du producteur d’un avion et celle du producteur d’un élément de cet avion d’indemniser les proches de victimes de l’accident est sérieusement contestable, après avoir constaté l’existence d’un défaut affectant cet élément, aux motifs que la maintenance de l’appareil par la compagnie aérienne avait été défaillante, que la réaction de l’équipage s’était révélée inadaptée et qu’il n’était pas démontré que le producteur de l’avion avait connaissance d’une absence de fiabilité de l’élément défectueux

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Commentaires10

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Julie Traullé · Gazette du Palais · 16 avril 2019

Olivia Sabard · L'ESSENTIEL Droit des contrats · 4 février 2019
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Sur la décision

Référence :
Cass. 1re civ., 28 nov. 2018, n° 17-14.356, Publié au bulletin
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-14356
Importance : Publié au bulletin
Décision précédente : Cour d'appel d'Angers, 9 janvier 2017
Précédents jurisprudentiels : A rapprocher :
1re Civ., 21 juin 2005, pourvoi n° 02-18.815, Bull. 2005, I, n° 275 (cassation)
1re Civ., 21 juin 2005, pourvoi n° 02-18.815, Bull. 2005, I, n° 275 (cassation)
Textes appliqués :
articles 1386-1 et 1386-14, devenus 1245 et 1245-13 du code civil ; article 809, alinéa 2, du code de procédure civile
Dispositif : Déchéance et cassation partielle
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000037787053
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2018:C101117
Lire la décision sur le site de la juridiction

Texte intégral

CIV. 1

FB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 28 novembre 2018

Déchéance et cassation partielles

Mme BATUT, président

Arrêt n° 1117 FS-P+B

Pourvoi n° F 17-14.356

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ M. AK… X…,

2°/ Mme VV…,

domiciliés […],

3°/ Mme WW… X…, domiciliée […] (Indonésie),

4°/ Mme Susan X…, domiciliée […] (Indonésie),

5°/ M. Al… X…, domicilié […],

6°/ M. Eddy Y…,

7°/ Mme Lina Y…,

domiciliés tous deux […](Indonésie),

8°/ Mme Z… A…, domiciliée […],

9°/ Mme B… A…, domiciliée […] (Indonésie),

10°/ M. Tony A…, domicilié […] (Indonésie),

11°/ Mme C… D… E… F…,

12°/ Mme YYY… F…,

13°/ Mme Lydia ZZZ… F…,

domiciliées toutes trois […] (Indonésie),

14°/ Mme – Prof. Dr. G…,

15°/ M. AB… H…,

domiciliés […],

16°/ M. I… J… K…,

17°/ Mme AAA… L…,

18°/ M. M… K…,

domiciliés […] (Indonésie),

19°/ M. BBB… O…,

20°/ Mme N… O…,

domiciliés tous deux […] (Indonésie),

21°/ Mme Ely P…, domiciliée […] ),

22°/ Mme Lina P…, domiciliée […],

23°/ Mme CCC…, domiciliée […] (Indonésie),

24°/ Mme AM… R…, domiciliée […],

25°/ Mme K… DDD…, domiciliée […],

26°/ M. S… T… DDD…, domicilié […],

27°/ M. AN… DDD…, domicilié […],

28°/ M. Juan DDD…, domicilié […],

29°/ Mme U… DDD…, domiciliée […],

30°/ M. V… DDD…, domicilié […],

31°/ Mme W… DDD…, domiciliée […],

32°/ M. EEE… XX…, agissant tant en son nom personnel qu’en qualité de représentant légal de ses enfants AD… XX… et AE… XX…,

33°/ M. AD… XX…,

34°/ Mme AE… XX…,

domiciliés […],

35°/ Mme AF… FFF…, domiciliée […] (Malaisie),

36°/ M. AG… YY…, domicilié […] (Malaisie),

37°/ Mme ZZ… AA…, domiciliée […] (Malaisie),

38°/ Mme AH… AA…, domiciliée […],

39°/ M. GGG…,

40°/ Mme ZZ… AC…,

domiciliés […], […] (Malaisie),

41°/ Mme Annie HHH…, domiciliée […] – (Malaisie),

42°/ Mme Stéphanie III…,

43°/ Mme Samantha III…,

44°/ M. Samuel III… DD…,

domiciliés […], (Malaisie),

45°/ M. JJJ… FF…,

46°/ Mme EE… AI…,

47°/ Mme EE… FF…,

domiciliés […],

48°/ M. EE… Y…, domicilié […],

49°/ Mme Stéphanie K…, agissant tant en son nom personnel qu’en qualité de représentante de M. Michael GG…,

50°/ M. Michael K… GG…,

domiciliés […],

51°/ Mme KKK… Y…, domiciliée […],

52°/ Mme LLL…, domiciliée […],

53°/ M. MMM… X…, domicilié […],

54°/ M. NNN…, domicilié […],

55°/ M. OOO…,

56°/ Mme Jane HH…,

57°/ Mme Katherine II…,

58°/ M. BA… JJ… II…,

domiciliés […],

59°/ Mme KK… LL… MM…, domiciliée […],

60°/ Mme Natalia MM…, domiciliée […],

61°/ Mme PPP… MM…, domiciliée […],

62°/ M. QQQ… MM…, domicilié […],

63°/ M. AJ… RRR… Y…,

64°/ Mme NN… OO…,

65°/ M. PP… SSS… Y…,

66°/ M. QQ… SSS… Y…,

67°/ M. RR… SSS… Y…,

domiciliés tous cinq […] (Indonésie),

contre l’arrêt rendu le 10 janvier 2017 par la cour d’appel d’Angers (chambre A – civile), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Airbus, société par actions simplifiée, dont le siège est […],

2°/ à la société Artus, société par actions simplifiée, dont le siège est […],

3°/ au procureur général près de la cour d’appel d’Angers, domicilié […],

défendeurs à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 23 octobre 2018, où étaient présents : Mme Batut, président, M. SS…, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, M. Girardet, Mmes Duval-Arnould, Teiller, MM. Avel, Mornet, conseillers, Mme Canas, M. Vitse, Mmes Barel, Le Gall, conseillers référendaires, M. TT…, avocat général, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. SS…, conseiller, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. X… et des soixante-six autres demandeurs, de la SCP Didier et Pinet, avocat de la société Airbus, de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Artus, l’avis de M. TT…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que, le 28 décembre 2014, un aéronef de type Airbus A 320, construit en 2008 et transportant, pour le compte de la compagnie aérienne Indonesia Air Asia, cent-cinquante-cinq passagers et sept membres d’équipage, s’est abîmé en mer, provoquant la mort de l’ensemble des personnes présentes à son bord ; que M. X… et soixante-six autres personnes, proches des victimes (les demandeurs), ont assigné en référé, sur le fondement de l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile, la société Airbus, fabricant de l’aéronef, et la société Artus, fabricant du module électronique RTLU équipant l’aéronef accidenté, en paiement d’indemnités provisionnelles ;

Sur la déchéance du pourvoi, en ce qu’il est formé contre le procureur général près la cour d’appel d’Angers :

Vu l’article 978, alinéa 1, du code de procédure civile ;

Attendu que les demandeurs se sont pourvus en cassation contre l’arrêt du 10 janvier 2017, mais n’ont pas remis au greffe de la Cour de cassation un mémoire contenant les moyens de droit invoqués à l’égard du procureur général près la cour d’appel d’Angers, contre lequel le pourvoi était également dirigé ; qu’il y a lieu de constater la déchéance partielle du pourvoi à l’égard de celui-ci ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que ce moyen n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen :

Vu les articles 1386-1 et 1386-14, devenus 1245 et 1245-13 du code civil, ensemble l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ;

Attendu qu’il résulte du premier de ces textes que le producteur est responsable de plein droit du dommage causé par un défaut de son produit ; qu’aux termes du deuxième, la responsabilité du producteur envers la victime n’est pas réduite par le fait d’un tiers ayant concouru à la réalisation du dommage ;

Attendu que, pour dire que l’obligation des sociétés Airbus et Artus à indemniser les demandeurs est sérieusement contestable, après avoir relevé que la simple implication d’un composant dans la réalisation du dommage est insuffisante, dès lors que doivent être également appréciées la rigueur et la qualité des opérations de maintenance de l’appareil, lesquelles incombent aux compagnies aériennes et non aux fabricants, l’arrêt retient qu’il résulte du rapport d’enquête que le module électronique « RTLU » présentait des fêlures sur les soudures à la surface des deux canaux et qu’il est établi que ce sont des dégradations qui ont pu générer des pertes de continuité électrique menant à la panne de cet élément ; qu’il ajoute qu’il est également acquis que le dysfonctionnement du module RTLU est le premier facteur dans le temps ayant pu contribuer à l’accident et que, lors du vol, ce même défaut a été signalé à quatre reprises à l’équipage ; que l’arrêt considère que l’action de l’équipage ayant suivi le quatrième message signalant ce dysfonctionnement s’était révélée inadaptée et non conforme à la procédure prescrite en pareil cas, provoquant le désengagement du pilote automatique, puis un enchaînement de faits à l’origine du décrochage de l’appareil et de l’accident ; qu’il constate que l’appareil avait connu à vingt-trois reprises, au cours de l’année 2014, des dysfonctionnements de modules du même type que les quatre survenus lors du vol, sans que la maintenance observe la procédure à suivre en cas de pannes réitérées ; que, selon l’arrêt, le rapport technique relève que, dans cette hypothèse, le module RTLU doit être remplacé, ce qui n’a pas été le cas pour l’avion litigieux ; qu’il constate enfin que le simple fait que la société Airbus ait amélioré le module RTLU depuis 1993 et à deux reprises avant la construction de l’avion, lequel était équipé du module ainsi modifié, ne permet pas de considérer que cette société avait connaissance d’une absence de fiabilité de cet élément ;

Qu’en statuant ainsi, par des motifs fondés sur le fait de tiers ayant concouru à la réalisation d’un dommage et sur le défaut de connaissance, par les producteurs de l’avion et du module litigieux, de l’absence de fiabilité de ce dernier, comme tels impropres à caractériser l’absence d’une obligation non sérieusement contestable à la charge de ces producteurs, alors qu’elle avait constaté un défaut du module, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CONSTATE LA DECHEANCE PARTIELLE du pourvoi en ce qu’il est dirigé contre le procureur général près la cour d’appel d’Angers ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il dit que l’obligation de la société Airbus et de la société Artus à indemniser les proches des victimes de la catastrophe aérienne du vol Surabaya-Singapour du 28 décembre 2014 est sérieusement contestable, l’arrêt rendu, le 10 janvier 2017, entre les parties, par la cour d’appel d’Angers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Angers, autrement composée ;

Condamne la société Airbus et la société Artus aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette leurs demandes et les condamne à payer aux demandeurs la somme globale de 5 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-huit et signé par lui et par Mme Pecquenard, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l’arrêt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour

M. X… et soixante-six autres demandeurs.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit n’y avoir lieu à prononcer l’irrecevabilité de l’avis du Parquet Général ;

AUX MOTIFS QUE Maître UU…, avocat de monsieur X… et consorts a sollicité à l’audience que soit déclarée irrecevable d’office l’intervention du parquet général, l’affaire concernant des intérêts privés ne relevant pas de ses missions de garant de l’ordre public ; que le ministère public est intervenu, après communication du dossier de la procédure le 12 octobre 2016 à l’initiative du président de chambre conformément aux dispositions de l’article 427 du code de procédure civile ; que contrairement à ce que soutiennent les intimés, le ministère public peut donner un avis après communication du dossier à l’initiative du juge ou de son propre chef ; que cet avis n’est pas strictement réservé aux dossiers civils intéressant l’ordre public ou mettant en jeu l’intérêt général ; que de manière générale, le ministère public peut faire connaître son avis sur l’application de la loi ; qu’en conséquence, c’est de manière infondée qu’il est sollicité le prononcé de l’irrecevabilité des conclusions du parquet général lesquelles ont par ailleurs été régulièrement communiquées aux parties et soutenues oralement à l’audience ; qu’il apparaît en outre que les intimés qui avaient eu connaissance des écritures du ministère public le jour du prononcé de l’ordonnance de clôture, n’ont pas sollicité le rabat de la clôture avec le cas échéant demande de report de l’audience s’ils voulaient expressément y répondre ; qu’ils contestent la légalité au fond pour erreur sur l’application du droit de l’Union et ils exposent leurs critiques dans une note en délibéré transmise le 21 novembre 2016, après l’audience et à ce titre irrecevable ; qu’il n’y a pas lieu à statuer dans ces conditions sur le contenu des objections figurant dans cette note en délibéré dont le dépôt n’a été ni sollicité, ni autorisé et qui s’avère de ce fait irrecevable ;

ALORS QU’après la clôture, les parties peuvent déposer une note en délibéré pour répondre aux conclusions du ministère public ; qu’en l’espèce, le Parquet Général ayant communiqué ses conclusions le jour même de la clôture, les parties ne pouvaient y répondre que par le moyen d’une note en délibéré, laquelle était donc, dans ce cas précis, recevable ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé l’article 445 du code de procédure civile, ensemble l’article 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentale et l’article 16 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d’AVOIR débouté les demandeurs de toutes leurs demandes, fins et le faire prétentions et d’AVOIR dit que l’obligation de la SAS Airbus et de la SAS Artus à indemniser les proches de la catastrophe aérienne du vol Surabaya-Singapour du 28 décembre 2014 est sérieusement contestable ;

AUX MOTIFS QU’au terme des dispositions de l’article 809 du code de procédure civile et dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président peut accorder une provision au créancier ; que la société Airbus et la société Artus soutiennent que la possibilité pour les proches des victimes d’obtenir une provision à valoir sur leurs préjudices se heurte à plusieurs contestations sérieuses tenant :- à la législation applicable ;- à l’appréciation des responsabilités ; – à la preuve du lien de parenté entre certains des réclamants avec des passagers décédés ; – à la perception de provisions antérieures ; que Monsieur X… et consorts soutiennent au contraire qu’ils n’existent pas en l’espèce de contestation sérieuse : – que la directive européenne 85/374 sur la responsabilité des constructeurs du fait de leurs produits est d’évidence applicable ; – que le défaut du module défectueux est cité parmi les facteurs contributifs sans lesquels l’accident ne serait pas survenu ; – que les liens de parenté sont tous démontrés ; – que les sommes reçues de la compagnie aérienne ne sont que des avances à titre d’aide et non de réelles provisions et toutes reprises dans le tableau récapitulant les demandes des familles des victimes ; que pour apprécier l’existence de l’obligation non sérieusement contestable à charge de la société Airbus et de la société Artus, il convient de s’assurer avant tout, de la preuve du défaut imputable à l’un des éléments de l’avion construit par la société Airbus et fabriqué par la société Artus et de l’implication de cette pièce défaillante dans la genèse de l’accident ; qu’il faut avoir de surcroît les éléments suffisants permettant d’affirmer que ce défaut existait déjà ou était en germe lorsque le produit a été mis en circulation ; que la simple implication d’un composant dans la réalisation du dommage est insuffisante, dès lors que doivent être également appréciées la rigueur et la qualité des opérations de maintenance de l’appareil lesquelles incombent aux compagnies aériennes et non aux fabricants ; qu’en outre, il doit être établi que le dysfonctionnement de la pièce en défaut était de nature à mettre en danger la sécurité du vol ; qu’en l’espèce, il résulte du rapport d’enquête que le module électronique « RTLU » fabriqué par la société Artus équipant l’avion, retrouvé sur le site de l’accident présentait des fêlures sur les soudures à la surface des deux canaux et il est établi que ce sont des dégradations qui ont pu générer des pertes de continuité électrique menant à la panne du RTLU ; que les cycles de températures associés aux conditions d’activation et désactivation et aux conditions rencontrées en vol et sur terre génèrent un phénomène de fatigue des soudures et peuvent entraîner leur dégradation ; que ceci n’est pas contesté ; qu’il est également acquis que le dysfonctionnement du module RTLU est le premier facteur dans le temps ayant pu contribuer à l’accident ; que lors du vol, ce même défaut a été signalé à quatre reprises à l’équipage ; que l’équipage a réagi aux trois premiers signalements adressés par l’intermédiaire des ordinateurs dits « ECAM » en respectant la procédure à mettre en oeuvre ; que la réaction au quatrième message s’est révélée inadaptée et non conforme aux procédures : l’alimentation du calculateur FAC a été interrompue ce qui a provoqué le désengagement du pilote automatique et le passage de la commande du vol de la 'loi normale’ à la 'loi alternative', la gouverne de symétrie déviant de 2º à gauche et provoquant un angle d’inclinaison en roulis de l’appareil ; que les actions ultérieures de l’équipage n’ont pas permis de contrôler l’appareil qui a « décroché » et s’est abîmé en mer ; qu’il résulte du rapport technique que cet appareil avait connu à vingt-trois reprises au cours de l’année 2014 des dysfonctionnements du RTLU de même type que les quatre survenus lors du vol et notamment lors d’un vol le 25 décembre 2014, sans que la maintenance n’observe la procédure à suivre en cas de pannes réitérées ; que le rapport relève qu’en cette hypothèse, le module RTLU doit être remplacé ce qui n’a pas été le cas pour cet avion ; qu’il apparaît des données non contestées des enquêteurs techniques, qu’il y a eu également une action non conforme de l’équipage lors de la gestion du quatrième message de défaut ce qui a abouti au désengagement du pilote automatique puis à l’enchaînement de faits successifs entraînant un décrochage de l’appareil et l’accident ; que le premier juge a estimé malgré l’ensemble de ces éléments, qu’il pouvait « constater » l’existence d’une obligation solidaire non contestable de la SAS Artus et de la SAS Airbus en relevant que les sociétés Airbus et Artus avaient conscience du manque de fiabilité de ce module comme le démontrent les deux procédures d’amélioration engagées depuis 1993 et après cet accident ; que cette affirmation est inexacte si l’on se réfère au contenu du rapport technique ; qu’il y est certes énoncé qu’il y a eu depuis 1993 trois procédures de maintenance concernant les problèmes des RTLU ; qu’une première procédure en rapport avec une rupture de soudure de fatigue ouvert en 1993 a été close en 1996 ; qu’il a donné lieu à une amélioration et à la fabrication d’un nouveau module électronique ; qu’une seconde procédure a été ouverte en 2000 toujours pour le même type de problème et a été close en 2014 avec l’amélioration du tableau électronique disponible à partir de 2002 ; que la troisième procédure a été ouverte en janvier 2015 après l’accident : Airbus a indiqué à cette occasion que le RTLU installé sur l’avion PK-AXC en litige avait fait l’objet des deux procédures d’amélioration ; que le simple fait qu’Airbus ait amélioré le module RTLU depuis 1993 et à deux reprises avant la construction de l’avion en litige, lequel disposait du RTLU ainsi modifié ne permet pas de retenir, à l’appui de l’obligation non contestable mise à la charge du constructeur et du fabricant, une connaissance d’une absence de fiabilité de cet élément déjà amélioré depuis les procédures de 1993 et 2000 ; qu’il ne résulte pas du rapport technique qu’il ait été décidé par Airbus ou préconisé par les autorités de contrôle une nouvelle amélioration de ce module ; qu’il convient pour ce seul motif tenant à l’existence d’une contestation sérieuse sur l’implication des sociétés Airbus et Artus dans la genèse de cette catastrophe aérienne et sans qu’il ne soit besoin d’apprécier les autres chefs de contestation tenant à la détermination de la loi applicable, à la preuve de l’existence des liens familiaux et à la perception préalable d’indemnités par les familles des victimes, de rejeter les demandes présentées par monsieur X… et consorts, les conditions de mise en oeuvre de l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile n’étant pas réunies ;

1°) ALORS QU’il résulte des propres constatations de l’arrêt que le module électronique « RTLU » présentait des fêlures sur les soudures et que ce facteur était la cause première – dans le temps – de l’accident ; que la cour d’appel a ainsi constaté l’existence d’un défaut imputable à l’un des éléments de l’avion construit par la société Airbus et fabriqué par la société Artus ainsi que le lien de causalité entre cette défectuosité et la réalisation de l’accident, ces constatations suffisant à établir l’existence d’une obligation non sérieusement contestable à la charge des sociétés Airbus et Artus au regard des règles sur la responsabilité des produits défectueux ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé les articles 1386-1 et suivants (anciens) du code civil, ainsi que les considérants et dispositions de la Directive 85/374 CEE, dont ils sont l’émanation obligatoire et spécialement ses considérants 4, 6, 7 et 8, et articles 1 et 7, ensemble l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE la responsabilité de plein droit du producteur envers la victime n’est pas réduite par le fait d’un tiers ayant concouru à la réalisation du dommage, en l’occurrence un défaut de maintenance ; qu’en retenant, pour écarter l’existence d’une obligation non sérieusement contestable, le non-respect par la maintenance de la procédure à suivre en cas de pannes réitérées, la cour d’appel a violé les articles 1386-1 et 1386-14 (anciens) du code civil, ainsi que les articles 1, 5 et 8 de la Directive susvisée, ensemble l’article 809 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE la responsabilité de plein droit du producteur envers la victime n’est pas réduite par le fait d’un tiers ayant concouru à la réalisation du dommage, en l’occurrence une éventuelle réaction inappropriée de l’équipage ; qu’en retenant, pour écarter l’existence d’une obligation non sérieusement contestable, une « action non conforme de l’équipage », la cour d’appel a violé les articles 1386-1 et 1386-14 du code civil (anciens), et la Directive susvisée, ensemble l’article 809 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE la circonstance selon laquelle une nouvelle amélioration du module litigieux n’aurait pas été décidée par Airbus ou préconisé par les autorités de contrôle n’inférait pas en elle-même la fiabilité du module ni que la société Airbus ignorait l’absence de fiabilité de ce module ; qu’en énonçant dès lors « qu’il ne résulte pas du rapport technique qu’il ait été décidé par Airbus ou préconisé par les autorités de contrôle une nouvelle amélioration de ce module », la cour d’appel a statué par un motif inopérant et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles 1386-1et suivants du code civil en leur version applicable à l’espèce.

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