Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 octobre 2019, 18-15.904, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 23 oct. 2019, n° 18-15.904
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 18-15.904
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Montpellier, 27 février 2018
Textes appliqués :
Article 16 du code de procédure civile.
Dispositif : Cassation partielle
Date de dernière mise à jour : 14 décembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000039307314
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:CO00795
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Sur les parties

Texte intégral

COMM.

CF

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 23 octobre 2019

Cassation partielle

M. RÉMERY, conseiller doyen faisant fonction de président

Arrêt n° 795 F-D

Pourvoi n° J 18-15.904

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ M. L… Y…,

2°/ Mme E… Y…,

domiciliés tous deux […],

3°/ la société Brigbern et Cie, société civile immobilière, dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 28 février 2018 par la cour d’appel de Montpellier (1re chambre B), dans le litige les opposant à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, dont le siège est […] ,

défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 10 septembre 2019, où étaient présents : M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Blanc, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, M. Graveline, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Blanc, conseiller référendaire, les observations de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de M. et Mme Y… et de la société Brigbern et Cie, de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. Y… s’est rendu caution du remboursement d’un prêt consenti le 20 septembre 2007 par la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc (la banque) à la SCI Brigbern et Cie (la SCI) ; qu’ayant été mis en demeure par la banque de payer des échéances restées impayées, M. Y… et la SCI l’ont assignée en responsabilité pour avoir manqué à ses obligations d’information et de conseil ; que la banque ayant demandé, à titre reconventionnel, la condamnation de M. Y… à exécuter son engagement de caution, ce dernier lui a opposé la déchéance de son droit aux intérêts pour n’avoir pas satisfait à son obligation d’information annuelle ;

Sur les premier, deuxième et troisième moyens :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le quatrième moyen, pris en sa première branche :

Vu l’article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande de M. Y… de déchéance de la banque de son droit aux intérêts et le condamner à payer à celle-ci la somme de 583 917,60 euros, l’arrêt retient que des stipulations de l’engagement de caution relatives à l’information annuelle de celle-ci mettent à la charge de la banque l’envoi d’une lettre simple avant le 8 mars de chaque année, la preuve de l’information étant acquise à défaut pour la caution d’aviser la banque au plus tard le 15 mars dans le cas où elle ne l’aurait pas reçue ;

Qu’en statuant ainsi sur le fondement de stipulations autres que celles que les parties invoquaient au soutien de leurs prétentions, sans inviter préalablement celles-ci à présenter leurs observations, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il rejette la demande de M. et Mme Y… et de la SCI Brigbern et Cie de déchéance de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc de son droit aux intérêts envers M. Y… et en ce qu’il condamne M. Y… à payer à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc la somme de 583 917,60 euros, l’arrêt rendu le 28 février 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Nîmes ;

Condamne la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Languedoc aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. Y… la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille dix-neuf et signé par lui et Mme Labat, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l’arrêt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y… et la société Brigbern et Cie

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir débouté M. et Mme Y… et la SCI Brigbern et Cie de leur demande indemnitaire pour manquement de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc à son obligation de mise en garde ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE

«Sur l’appel principal

En premier lieu, si les appelants reprochent à la banque d’avoir commis une fraude destinée à contourner la réglementation protectrice du consommateur, en leur suggérant de créer une société civile empruntant en leur lieu et place la somme litigieuse, ce que leur situation de fortune leur aurait interdit de faire, cette preuve n’est aucunement apportée par la simple production d’une simulation de crédit datée du 5 juillet 2007 au nom d’une SCI dénommée Y… and Co à un moment où la SCI Brigbern et Cie n’était pas constituée, et la concomitance de cette constitution avec la conclusion du prêt litigieux ;

Les époux Y… n’établissent pas tout d’abord le refus de la banque de leur prêter cette somme à titre personnel, alors que dès le premier contact était arrêté le principe d’un prêt souscrit par une SCI ainsi qu’en atteste la simulation du 5 juillet 2007 établie sur un document portant la mention pré-imprimée « Nom de la SCI » et dont seule la dénomination n’était pas encore acquise, mais qui le sera très rapidement, le 12 juillet suivant, ainsi que le mentionne l’attestation d’accord de prêt au nom de la SCI Brigbern délivrée à cette date à la demande de L… Y… ;

Et il ressort de leurs propres explications qu’ils étaient alors conseillés par un Club Aida dont la carte de visite (pièce 20) enseigne qu’il a pour activité « le rachat de crédit, désendettement, crédit immobilier » et son siège à […], sans que le lien avec la banque ne soit mieux établi que par cette proximité géographique, ni davantage le besoin ou l’intérêt pour cette dernière de suggérer un tel montage financier dont l’initiative revient plus sûrement audit club, largement rémunéré pour son intervention et ce conseil dont L… Y… ne peut sérieusement soutenir qu’il était incapable d’en « comprendre les enjeux qui le dépassaient totalement », alors que dans le même temps il était chargé par son employeur, en sa qualité de chef de projet informatique, du rapprochement des activités monétiques des banques Natexis et BNP Paribas, situation autorisant à retenir, sinon qu’il possédait la faculté de comprendre la différence entre un prêt personnel et un prêt professionnel, du moins qu’il disposait là de l’expertise fournie par cet environnement lui offrant l’opportunité de vérifier le cas échéant la pertinence des informations dispensées par le cabinet de conseil qu’il s’était lui-même adjoint, comme il pouvait encore s’adresser au notaire chargé d’établir l’acte de cession ;

En tout état de cause, s’il pèse sur le banquier prêteur de deniers un devoir d’information lui imposant de fournir à son client les éléments permettant à celui-ci de faire son choix et de s’engager en toute connaissance de cause, ce à quoi tendaient en l’occurrence les simulations faite le 5 juillet puis le 4 septembre 2007, il n’est pas débiteur d’un devoir de conseil quant à l’opportunité du prêt dont la souscription est envisagée alors qu’il est dans le même temps tenu à une obligation de non-immixtion dans les affaires de son client ;

Dès lors la preuve n’est pas rapportée d’une faute commise par la banque ;

En second lieu, si les parties s’opposent sur le point de savoir si la SCI Brigbern, peut ou non bénéficier des dispositions protectrices du code de la consommation relatives aux emprunts immobiliers, il résulte de l’article L. 312-3, 2°, du code de la consommation, issu de la loi du 27 juillet 1993 et donc applicable en l’espèce, que sont exclus du champ d’application de ces dispositions spécifiques les prêts destinés, sous quelque forme que ce soit, à financer une activité professionnelle, notamment celle des personnes physiques ou morales qui, à titre habituel, même accessoire à une autre activité, ou en vertu de leur objet social, procurent, sous quelque forme que ce soit, des immeubles ou des fractions d’immeubles, bâtis ou non, achevés ou non, collectifs ou individuels, en propriété ou en jouissance ;

En l’occurrence, la SCI Brigbern a pour objet social l’achat et tout ce qui se rattache à l’acquisition de tout bien immobilier, leur location et leur revente, l’acquisition, l’administration, l’exploitation sous toutes formes d’immeubles ou de biens immobiliers et toutes opérations financières, mobilières ou immobilières se rattachant directement ou indirectement à cet objet et susceptibles d’en favoriser la réalisation, à condition toutefois d’en respecter le caractère civil ;

Le critère de l’activité professionnelle réside dans le rattachement à l’objet social de la société et aucunement dans le caractère habituel des achats, le caractère spéculatif de l’opération ou le nombre d’immeubles concernés ;

Et le financement d’une activité professionnelle au sens de la loi est caractérisé dès lors que l’achat d’un immeuble et la conclusion d’un contrat de prêt immobilier destiné au financement de cette acquisition entrent comme en l’occurrence dans l’objet social de la SCI, excluant en conséquence les dispositions protectrices de l’emprunteur édictées par le code de la consommation, comme l’obligation de mise en garde du banquier contre les conséquences potentiellement excessives de l’endettement ;

C’est dès lors de manière superfétatoire qu’il doit être relevé d’abord que les appelants, sans d’ailleurs faire la moindre distinction selon leur qualité, réclament en réparation de leur préjudice matériel une somme correspondant au montant du prêt alors que la sanction prévue à l’article L. 312-33 du même code se limiterait à la déchéance du droit aux intérêts et celle du manquement du banquier à son devoir de mise en garde à l’indemnisation de la perte d’une chance de ne pas contacter, ensuite de manière surabondante mais pour la moralité des débats que la SCI a normalement honoré son engagement durant près de cinq ans alors qu’à l’issue de l’opération les époux Y… ont personnellement et avantageusement pour eux bénéficié de la majeure partie du prix de la vente de l’immeuble, ce qui ruinerait la thèse de l’existence même du préjudice d’ordre moral dont ils réclament la réparation» ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE

«II – Sur les manquements reprochés à la banque

Les demandeurs ne rapportent pas la preuve que la constitution d’une SCI leur a été imposée ou même seulement suggérée par la banque ;

Le moyen selon lequel le Crédit Agricole aurait trompé les époux Y… « en leur faisant souscrire un prêt par une société » afin d’écarter les dispositions protectrices du code de la consommation relatives au prêt immobilier doit donc être écarté ;

Le grief tenant à l’octroi de crédit abusif ayant favorisé le surendettement des époux Y… n’est pas davantage fondé car il résulte des explications des demandeurs eux-mêmes que « leurs relevés bancaires de l’époque montrent qu’ils avaient souscrit de multiples autres prêts et étaient très endettés » (page 3 des conclusions des demandeurs) et que c’est précisément « pour faire face à un endettement de plus en plus important que courant 2007, M. et Mme Y… ont souhaité bénéficier d’une restructuration de leur prêt immobilier » (page 2 des conclusions des demandeurs) ;

Au surplus, il ressort d’un jugement rendu le 13 mai 2013 par le tribunal d’instance de Longjumeau statuant en matière de surendettement que les époux Y… sont débiteurs de divers organismes financiers au titre de crédits postérieurs au prêt litigieux : le juge statuait sur recours des consorts Y… contre la décision de la Commission de surendettement en date du 27 mars 2012 les ayant déclarés irrecevables pour absence de bonne foi au motif qu’ « en souscrivant des crédits sur une période récente, Monsieur ne pouvait pas en ignorer les conséquences sur sa capacité à les honorer » ;

Il ressort de ces seuls éléments que le lien de causalité entre le « préjudice très important » résultant de la « situation totalement intenable » dans laquelle les demandeurs se trouvent aujourd’hui et les prétendus manquements de la banque n’est pas établi ;

Les demandes indemnitaires seront en conséquence rejetées ;

Surabondamment, M. Y…, ingénieur informaticien, donc doté d’un minimum de logique, ayant occupé des postes d’encadrement, donc capable d’anticiper et de prévoir, ne peut sérieusement soutenir qu’il avait besoin que la banque lui rappelle son prochain départ en retraite et son incidence sur ses capacités financières» ;

1°) ALORS QUE le banquier dispensateur de crédit est tenu d’un devoir de mise en garde vis-à-vis de l’emprunteur non averti sur le risque d’endettement né de l’octroi du prêt eu égard aux capacités financières de celui-ci ; qu’en se bornant à affirmer, pour exclure toute obligation de mise en garde de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc à l’égard de la SCI Brigbern et Cie contre le risque d’endettement né de l’octroi du prêt, que le prêt était destiné à financer l’activité professionnelle de celle-ci, sans rechercher si la SCI Brigbern et Cie avait la qualité d’emprunteur averti, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU’est seul un emprunteur averti, l’emprunteur qui dispose des compétences nécessaires pour apprécier le risque de l’endettement né de l’octroi du prêt, compte tenu de ses qualités subjectives et de la complexité de l’opération ; qu’en se bornant à relever que M. Y… possédait la faculté de comprendre la différence entre un prêt personnel et un prêt professionnel, pour avoir été chargé par son employeur, en sa qualité de chef de projet informatique, du rapprochement des activités monétiques des banques Natexis et BNP Paribas, la cour d’appel, qui a statué par des motifs impropres à établir que M. Y… était averti, a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

3°) ET ALORS QUE le banquier dispensateur de crédit est tenu d’un devoir de mise en garde vis-à-vis de l’emprunteur non averti sur le risque d’endettement né de l’octroi du prêt eu égard aux capacités financières de celui-ci ; que l’intervention d’un tiers averti dans l’opération de prêt, aux côtés de l’emprunteur, n’est pas de nature à le dispenser de cette obligation ; qu’en retenant néanmoins que M. Y… disposait, de par ses fonctions de chef de projet informatique chargé du rapprochement des activités monétiques des banques Natexis et BNP Paribas, de l’expertise fournie par cet environnement pour vérifier le cas échéant la pertinence des informations dispensées par le cabinet de conseil qu’il s’était lui-même adjoint, et qu’il pouvait encore s’adresser au notaire chargé d’établir l’acte de cession, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir débouté M. et Mme Y… et la SCI Brigbern et Cie de leur demande en nullité de la clause d’intérêt conventionnel du prêt ;

AUX MOTIFS QUE

«L’action en nullité de la stipulation d’intérêt fondée sur l’erreur affectant le taux effectif global formée au visa de l’article L. 313-1 du code de la consommation qui ne peut constituer une demande nouvelle pour entrer dans le cadre des dispositions de l’article 566 du code de procédure civile est en conséquence recevable ;

Toutefois le point de départ du délai d’exercice de cette action est le jour où l’emprunteur a connu ou aurait dû connaître cette erreur, c’est-à-dire la date de la convention, lorsque l’examen de sa teneur permet de constater l’erreur, ou lorsque tel n’est pas le cas, la date de la révélation de celle-ci à l’emprunteur ;

En l’occurrence tant le contrat de prêt du 7 septembre 2007 que l’acte notarié du 20 septembre 2007 détaillent pour fixer le TEG de 5,019 % le montant des intérêts, les frais de dossier et le montant des parts sociales pour aboutir à un total de 367682 euros, tous éléments à la disposition de l’emprunteur dès la signature de l’acte offrant à celui-ci la possibilité de vérifier par lui-même, ou en s’en remettant à un tiers ainsi qu’il l’a fait postérieurement, l’exactitude du taux effectif global comme le cas échéant de relever que le taux de période n’était pas précisé autrement que par référence au mode de calcul des intérêts nominaux sur la base de mois de 30 jours et d’une année de 360 jours ;

La demande formée pour la première fois par voie de conclusions le 22 avril 2014 est en conséquence prescrite» ;

ALORS QUE l’action d’un emprunteur en nullité de la stipulation de l’intérêt conventionnel, fondée sur l’erreur affectant le taux effectif global, se prescrit par cinq ans à compter du jour où celui-ci a connu ou aurait dû connaître cette erreur ; qu’en retenant que la demande de la SCI Brigbern et Cie et de M. et Y… en annulation de la stipulation d’intérêt conventionnel du prêt fondée sur l’erreur affectant le taux effectif global était prescrite, pour avoir été formée la première fois par voie de conclusions le 22 avril 2014, soit plus de cinq ans après la date du contrat de prêt du 7 septembre 2007 et de l’acte notarié de vente du 20 septembre 2007, cependant que cette action avait été engagée dès l’assignation devant le tribunal de grande instance de Montpellier du 22 juin 2012, et réitérée dans les dernières conclusions de première instance déposées le 28 juin 2013, de sorte qu’elle était parfaitement recevable, la cour d’appel a violé les articles 1304 du code civil, pris dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1907 du même code, et l’ancien article L. 313-2 du code de la consommation.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir condamné M. Y… à payer à la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc la somme de 583917, 60 euros ;

AUX MOTIFS QUE

«Sur l’appel incident

En premier lieu la demande formée contre la caution n’encourt pas la sanction prévue par l’article 564 du code de procédure civile pour constituer une demande reconventionnelle recevable en appel ;

M. L… Y… ne fait valoir d’autre moyen que celui tiré de la prescription de la demande outre le manquement de la banque à l’obligation annuelle d’information de la caution ;

Toutefois la prescription qui a commencé à courir le 14 juin 2012 s’est trouvée interrompue le 24 janvier 2017 par la délivrance à l’emprunteur d’un commandement de payer afin de saisie-vente puis le 3 avril 2017 lors de la signification d’un commandement valant saisie immobilière, interruptifs de la prescription contre la caution en vertu des dispositions de l’article 2246 du code civil, alors de surcroît que M. L… Y… en déclarant la créance de la banque dans le cadre de sa demande d’ouverture d’une procédure de traitement de la situation de surendettement du couple le 13 mai 2013 a reconnu cette dette, arrêtée pour les besoins de la procédure à la somme de 501241,53 euros par jugement du 9 décembre 2013 du tribunal d’instance de Longjumeau, cette somme étant confirmée par un second jugement du 7 mars 2014 statuant sur requête déposée par les époux Y… reconnaissant de nouveau devoir cette somme, cette reconnaissance étant ensuite renouvelée lors de l’audience devant ce même tribunal le 13 janvier 2017 ;

La demande formée pour la première fois par voie de conclusions le 21 juin 2017 n’est donc pas prescrite ;

Le contrat de prêt qui rappelle que toutes les obligations en résultant engagent solidairement la caution prévoit que sont exigibles par suite de la déchéance du terme le capital, les intérêts, frais et accessoires outre une indemnité de 10 % du capital restant dû ;

L’engagement de caution solidaire prévoit qu’il s’applique au paiement ou au remboursement de toutes sommes que le cautionné peut à ce jour ou pourra devoir à l’avenir en principal plus intérêts, commissions, frais et accessoires au titre de l’engament garanti, ce que la caution déclare accepter expressément ; Les dispositions relatives à l’information annuelle de la caution mettent à la charge de la banque l’envoi d’une lettre simple avant le 8 mars de chaque année, la preuve de l’information étant acquise à défaut par la caution d’aviser la banque au plus tard le 15 mars dans le cas où elle ne l’aurait pas reçue ;

Au résultat de ces dispositions M. L… Y… ne peut valablement invoquer la conséquence d’un défaut d’information ;

Et il ressort du premier des deux décomptes produits par la banque, comme de la mise en demeure adressée à l’emprunteur et à la caution le 14 juin 2012, qu’était due à la déchéance du terme la somme de 476564,75 euros (capital échu : 461636,55 euros, intérêts : 14928,21 euros) outre l’indemnité contractuelle forfaitaire de 32314,56 euros que les intérêts courus au taux du prêt soit 5 % représentent entre le 14 juin 2012 et le 4 janvier 2017 date du second décompte produit par la banque la somme de 105291,08 euros pour une dette de l’emprunteur qui correspond effectivement à la somme actuellement réclamée de 614170,39 euros, outre les intérêts courus depuis lors ;

Mais l’engagement souscrit par M. L… Y… l’est dans la limite de la somme de 583917,60 euros « couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard » ;

Et si le tribunal d’instance a fixé la créance de la banque à la somme de 501241,53 euros, il a pris le soin de rappeler que sa décision rendue dans le cadre d’une contestation de créance ne s’impose pas au juge du fond, de telle sorte que ne s’y attache aucune autorité de chose jugée au principal ;

Il s’ensuit du tout que la condamnation de la caution ne peut excéder la somme de 583917,60 euros» ;

ALORS QUE les demandes reconventionnelles nouvelles en cause d’appel ne sont recevables qu’à la condition de se rattacher aux prétentions originaires par un lien suffisant ; qu’en se bornant à affirmer que la demande en paiement de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc contre M. Y… au titre de son engagement de caution, présentée pour la première fois en cause d’appel, était recevable pour constituer une demande reconventionnelle, sans rechercher si cette demande se rattachait par un lien suffisant aux prétentions originaires de M. et Mme Y… et de la SCI Brigbern et Cie, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 70 et 567 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué d’avoir débouté M. et Mme Y… et la SCI Brigbern et Cie de leur demande tendant au prononcé de la déchéance du droit de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc aux intérêts du prêt en raison de l’absence d’information annuelle de la caution ;

AUX MOTIFS QUE

«Les dispositions relatives à l’information annuelle de la caution mettent à la charge de la banque l’envoi d’une lettre simple avant le 8 mars de chaque année, la preuve de l’information étant acquise à défaut par la caution d’aviser la banque au plus tard le 15 mars dans le cas où elle ne l’aurait pas reçue ;

Au résultat de ces dispositions L… Y… ne peut valablement invoquer la conséquence d’un défaut d’information» ;(arrêt p.9 in medio)

1°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’en relevant d’office le moyen tiré de ce que le contrat de cautionnement comportait une clause emportant renversement de la charge de la preuve de l’exécution par la banque de son obligation d’information annuelle de la caution, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU’est nulle et de nul effet, comme contraire aux dispositions d’ordre public du code de la consommation relative à l’obligation d’information annuelle de la caution, la clause d’un contrat de cautionnement par laquelle la caution s’engage à faire connaître à la banque l’absence de réception de l’information avant une certaine date, dispensant ainsi cette dernière d’avoir à justifier de l’envoi effectif de l’information ; qu’en décidant néanmoins que M. Y… ne justifiait pas avoir avisé la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc, conformément aux dispositions du contrat de cautionnement, de l’absence de réception de l’information, pour en déduire que la preuve de l’exécution par la banque de son obligation était acquise, la cour d’appel a violé l’article 6 du code civil et l’ancien article L. 341-6 du code de la consommation.

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