Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 28 novembre 2005

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 2e sect., 28 nov. 2005
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : GOLDORAK
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 1589742 ; 99780197
Classification internationale des marques : CL09; CL16; CL22; CL24; CL25; CL28; CL35; CL38; CL39; CL41
Référence INPI : M20050671
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Texte intégral

La société de droit japonais TOEI ANIMATION exploite depuis les années 1970 la série d’animation UFO ROBOT GRENDIZER RAIDS, oeuvre audiovisuelle issue de l’adaptation d’une bande dessinée japonaise, mettant en scène un robot ; Cette série a été exploitée en France à compter de 1978/1979 sous le titre GOLDORAK. La société TOEI est titulaire de la marque GOLDORAK déposée le 15 février 1989 et enregistrée sous le n° 1 589 742 pour les produits et services des classes 9, 16, 28, 35, 39 et 41 de la classification internationale. Elle est également titulaire de la marque GOLDORAK déposée le 11 mars 1999 et enregistrée sous le n° 99 780 197 pour les produits et services des classes 22, 24, 25 et 38. En août 2005, cette société a découvert que les sociétés MANGA DISTRIBUTION et DECLIC IMAGES annonçaient notamment sur internet la commercialisation imminente de DVD du dessin animé GOLDORAK alors même qu’elle ne leur avait concédé aucun droit d’exploitation. Elle faisait procéder les 23, 24 et 26 août 2005 à plusieurs constats d’huissier établissant que les DVD litigieux se trouvaient en vente tant sur le site internet de la société MANGA DISTRIBUTION que tant sa boutique parisienne sise […], mais étaient aussi diffusés par les réseaux de grandedistribution aussi bien spécialisés (FNAC, VIRGIN) que généralistes (AUCHAN, CASINO, LECLERC, CARREFOUR et autres). Le 29 août 2005, la société TOEI, dûment autorisée à cette fin par ordonnance en date du 26 août 2005, faisait diligenter une procédure de saisie-contrefaçon dans les locaux de la société MANGA DISTRIBUTION. Cette mesure mettait en évidence que les produits litigieux étaient édités par une société DECLIC IMAGES, la société MANGA DISTRIBUTION agissant en qualité de distributeur. Il apparaissait également qu’une société ROUGE CITRON Production avait perçu courant 2004 une somme de 500 000 euros de la société DECLIC IMAGES en contrepartie de son entremise dans la recherche de l’acquisition des droits d’exploitation de la série litigieuse. Se prévalant tant de ses droits d’auteur sur le titre et sur l’oeuvre audiovisuelle que de ses droits de marque la société TOEI ANIMATION a par acte en date 12 septembre 2005, assigné selon la procédure à jour fixe les sociétés DECLICS IMAGES, MANGA DISTRIBUTION et ROUGE CITRON PRODUCTION devant ce tribunal en contrefaçon et en concurrence déloyale. Dans le dernier état de ses écritures en date du 26 octobre 2005, elle demande, sur le fondement des articles 1382 du code civil, L. 111-1, L. 112-1, L. l13-1 et suivants du code de la Propriété Intellectuelle et L. 711-1 et suivants et L. 716-1 et suivants du même code :

- de dire que les sociétés défenderesses ont commis des actes de contrefaçon de ses marques et de ses droits d’auteur sur la dénomination, le titre, les dessins, la bande son générique et la série d’animation GOLDORAK en concédant des droits inexistants et en reproduisant et commercialisant des coffrets de DVD, et en conséquence :

- d’ordonner les mesures de publication et d’interdiction sous astreinte usuelles en pareille matière, d’ordonner le retrait de la vente de l’ensemble des produits contrefaisants se trouvant chez les revendeurs et la destruction de ces marchandises,
- de condamner solidairement et à défaut in solidum, les sociétés DECLIC IMAGES et

MANGA DISTRIBUTION à lui payer la somme de 2 000 000 euros en réparation des actes de contrefaçon et de condamner la société ROUGE CITRON à lui payer la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts,
- de dire que les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION se sont rendues coupables d’actes de concurrence déloyale, en conséquence,
- de les condamner au paiement de la somme de 15 000 000 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels et d’ordonner pour le surplus une mesure d’expertise destinée à établir l’ampleur de son préjudice définitif,
- de leur donner injonction sous astreinte de produire leurs listings de ventes, fichiers clients, chiffre d’affaires, bilans, résultats comportant le nombre de DVD vendus et le chiffre d’affaires réalisé, Et de les condamner au paiement sous la même solidarité de la somme de 20 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, le tout sous le bénéfice de l’exécution provisoire ainsi qu’aux dépens incluant les frais de saisie-contrefaçon, de sommations et de constats, dont distraction au profit de son conseil. La société ROUGE CITRON demande à titre principal sa mise hors de cause et à titre subsidiaire conclut au débouté. En tout état de cause, elle s’oppose à toute condamnation solidaire avec les co-défenderesses, notamment en ce qui concerne les mesures d’interdiction de reproduction et de commercialisation et les dépens. Elle sollicite la condamnation des sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de ses frais irrépétibles et leur condamnation solidaire ou in solidum aux dépens dont distraction au profit de son conseil. Elle fait valoir en substance qu’elle a été mandatée par la société DECLIC IMAGES aux fins d’acquérir les droits de reproduction de la série d’animation GOLDORAK auprès de leurs titulaires, à savoir la société TOEI et la société DYNAMIC PLANNING. Pour prix de ses services, elle a perçu une avance de 500 000 euros à valoir sur une rémunération totale de 3 000 000 d’euros, le solde devant lui être versé à la remise des bandes masters. Cependant, les négociations qu’elle a engagées n’ont pas abouti ce dont elle a informé sa mandante, laquelle a néanmoins lancé avec la société MANGA DISTRIBUTION la commercialisation des 53 premiers épisodes de la série sous forme de deux coffrets de DVD. Elle a pour sa part restitué l’avance perçue. La société de droit japonais DYNAMIC PLANNING est intervenue volontairement à l’instance par conclusions signifiées le 27 octobre 2005. Elle expose être titulaire des droits des auteurs de la bande dessinée d’origine qui a été adaptée par la société TOEI pour en faire une série d’animation dont cette dernière est le producteur et le réalisateur. Elle demande de dire que les défenderesses ont commis des actes de contrefaçon portant atteinte à ses droits d’auteur et des actes de concurrence déloyale et en conséquence, au bénéfice de l’exécution provisoire, de condamner la société ROUGE CITRON à lui payer la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts et les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION à lui payer une provision de 2 000 000 d’euros à valoir sur l’indemnisation de son préjudice définitif à déterminer à dire d’expert, d’ordonner la remise des matrices des DVD litigieux sous astreinte aux fins de destruction, de prononcer une mesure d’interdiction sous astreinte et d’ordonner sur simple présentation

de la minute du jugement, la remise et la destruction de l’ensemble des coffrets de DVD détenus par les trois sociétés en cause et par les revendeurs également sous astreinte aux fins de destruction sous contrôle d’huissier. Elle sollicite l’allocation de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et la condamnation des défenderesses aux entiers dépens. Les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION demandent d’écarter des débats les pièces non visées dans la requête aux fins d’assigner à jour fixe et de déclarer la société DYNAMIC PLANNING irrecevable en son intervention volontaire. Sur le fond, elles demandent de prononcer la déchéance des marques de la société TOEI pour l’ensemble des produits et services visés aux dépôts à compter respectivement du 16 février et du 16 avril 2004 et de déclarer la société TOEI entièrement irrecevable et mal fondée en ses demandes. Reconventionnellement, elles sollicitent condamnation de cette société à leur payer la somme de 3 000 000 d’euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice commercial, celle de 50 000 euros pour procédure abusive et celle de 10 000 euros au titre de ses frais irrépétibles, outre la condamnation de la société DYNAMIC PLANNING au paiement de la somme de 5 000 euros au même titre. Elles demandent enfin d’ordonner la publication du jugement sous forme d’extraits aux frais de la société TOEI, le tout au bénéfice de l’exécution provisoire. Elles exposent que la société TOEI ne justifie d’aucune exploitation personnelle ou par voie de licence des marques qu’elle oppose, les utilisations qu’elle revendique n’étant pas réalisées à titre de marque mais reproduisant le titre de l’oeuvre sur des cassettes vidéo, les figurines portant la mention GOLDORAK n’étant ni fabriquées ni mises dans le commerce par le titulaire des marques. Elles estiment par ailleurs que les pièces versées aux débats n’établissent ni la qualité d’auteur, ni la qualité de producteur de la société TOEI et permettent au contraire de se convaincre que tous les auteurs de l’oeuvre de collaboration ne sont pas en cause : auteur des dessins, de la musique, des paroles ainsi que réalisateur, toutes personnes physiques étrangères à cette demanderesse, laquelle ne produit aucun contrat de cession conforme aux dispositions de l’article L. 132-24 du code de la Propriété Intellectuelle l’autorisant à se prévaloir utilement de la présomption qu’il édicté. Elles ajoutent que la société DYNAMIC PLANNING ne justifie pas davantage de la cession de droits dont elle se prévaut et que la société TOEI n’a jamais exploité en France la série Goldorak. Au titre de sa demande reconventionnelle, elle souligne que les procédures engagées et les interventions de la société TOEI auprès de grandes surfaces aux fins d’obtenir le retrait de la vente ont empêché la commercialisation du million de DVD qu’elle a fait fabriquer.

I – Sur le retrait des pièces : Attendu qu’il est demandé d’écarter des débats « les pièces produites » qui n’étaient pas visées dans la requête aux fins d’être autorisé à assigner à jour fixe ; que cette demande vise une 32° pièce communiquée le 26 octobre 2005, soit deux jours avant l’audience de plaidoirie constituée par un rapport d’expertise diligente à la requête des autorités

judiciaires luxembourgeoises dans le cadre d’un litige dans lequel les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION ne sont pas parties ; Attendu que ce document, communiqué tardivement, sera retiré des débats. II – Sur la recevabilité de l’intervention volontaire de la société DYNAMIC PLANNING : Attendu que les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION opposent que la société DYNAMIC PLANNING ne dispose pas du droit d’agir en tant qu’intervenante volontaire à titre principal dans la mesure où elle n’a pas été personnellement autorisée à assigner à jour fixe ; Attendu cependant que le droit d’agir visé à l’article 329 du Nouveau Code de Procédure Civile, est, selon l’article 30 du même code, le droit pour l’auteur d’une prétention, d’être entendu sur le fond de celle-ci, afin que le juge la dise bien ou mal fondée ; Attendu qu’aucune disposition légale ne subordonne l’intervention volontaire dans le cadre de la procédure à jour fixe à l’autorisation préalable du Président du Tribunal ; Qu’en conséquence, l’exception sera rejetée. Attendu qu’il n’y a pas lieu à ce stade de mettre hors de cause la société ROUGE CITRON, la nature exacte de son implication dans les faits de la cause devant être examinée au fond. III – Sur la contrefaçon de droits d’auteur : 1) Sur les droits de la société TOEI et de la société DYNAMIC PLANNING : Attendu que cette société se prévaut de sa qualité d’auteur du titre de l’oeuvre, des dessins, de la bande son générique et de la série d’animation ; Attendu que l’oeuvre en cause est une oeuvre audiovisuelle réalisée à l’origine au Japon à partir d’une bande dessinée conçue par des auteurs japonais lesquels sont représentés à la présente instance par la société DYNAMIC PLANNING ; que cette dernière indique être constituée par les auteurs de cette bande dessinée qui lui ont cédé leurs droits d’exploitation ; Attendu qu’il suit de ces énonciations que les cessions de droits intervenues au Japon entre des personnes de nationalité japonaise et des sociétés de droit japonais sont régies par les lois de cet Etat et non par les dispositions du code de la propriété intellectuelle ; qu’aucune des parties et singulièrement pas les défenderesses qui invoquent un défaut de justification des cessions de droits ne verse aux débats de certificat de coutume établissant le contenu de la loi japonaise ; Attendu en revanche que les règles de procédure et les éléments constitutifs du délit de contrefaçon allégué sont régis par la loi française ; Attendu que l’article L. 113-7 du code de la Propriété Intellectuelle dispose que : " Ont la qualité d’auteur d’une oeuvre audiovisuelle la ou les personnes physiques qui réalisent la création intellectuelle de cette oeuvre. Sont présumés, sauf preuve contraire, coauteurs d’une oeuvre audiovisuelle réalisée en collaboration : 1° L’auteur du scénario ; 2° L’auteur de l’adaptation ; 3° L’auteur du texte parlé, 4° L’auteur des compositions musicales avec ou sans paroles spécialement réalisées pour

l’oeuvre ; 5° Le réalisateur. Lorsque l’oeuvre audiovisuelle est tirée d’une oeuvre ou d’un scénario préexistants encore protégés, les auteurs de l’oeuvre originaire sont assimilés aux auteurs de l’oeuvre nouvelle. » ; Attendu par ailleurs que l’article L. 113-5 du même code dispose que : « L’oeuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée. Cette personne est investie des droits de l’auteur » ; Attendu qu’il est constant que ce texte doit être interprété en ce sens qu’en l’absence de revendication de l’auteur, l’exploitation de l’oeuvre par une personne morale sous son nom fait présumer à l’égard des tiers recherchés pour contrefaçon que cette personne est titulaire sur l’oeuvre, qu’elle soit ou non collective, du droit incorporel de l’auteur ; Attendu qu’en l’espèce, il résulte des contrats versés aux débats que la série d’animation Goldorak est commercialisée en France depuis 1979 par les sociétés TOEI et DYNAMIC PLANNING ; Attendu qu’il est ainsi notamment justifié que la société TOEI a concédé le 8 janvier 1979 une licence d’exploitation de la série d’animation considérée à la société EOLE FINANCIERE, le contrat étant enregistré au Centre National de la Cinématographie ; que selon contrat en date du 31 mai 1984, cette société TOEI a concédé une licence à la société IDDH ; que ce contrat précise que « le preneur s’engage à diffuser la version française des films avec les mentions visées à l’annexe A » à savoir les noms des auteurs personnes physiques des dessins, de la musique et des paroles, du réalisateur et du producteur suivi de la mention de copyright « TOEI et DYNAMIC Pro 1975 » ; Attendu que le même engagement est repris dans le contrat de licence consenti le 3 août 1990 par la société TOEI ANIMATION à la société française MMP, contrat contresigné en qualité de témoin par Monsieur Go N, auteur desdessins d’origine ; Attendu qu’en application de ces dispositions conventionnelles, les cassettes diffusées par les sociétés licenciées portent la mention de copyright « TOEI Animation et DYNAMIC PLANNING » ainsi que le montrent celles qui ont été produites ; Attendu que la société TOEI ne se prévalant pas de la qualité de producteur, l’invocation par les défenderesses des dispositions de l’article L. 133-24 du code de la Propriété Intellectuelle est dépourvue de portée ; Attendu qu’il suit de là que les sociétés TOEI et DYNAMIC PLANNING sont recevables à agir en contrefaçon de la série d’animation GOLDORAK ; Attendu que selon les dispositions de l’article L. 112-4 du code de la Propriété Intellectuelle le titre de l’oeuvre est protégé comme l’oeuvre elle-même ; Attendu que les défenderesses ne formulent aucune contestation relative à l’originalité de cette oeuvre et de son titre. 2) Sur la contrefaçon de droits d’auteur : Attendu que selon l’article L. 335-3 du même code constitue un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion par quelque moyen que ce soit d’une oeuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur ; Attendu qu’il doit être relevé en l’espèce que les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION, respectivement éditeur et diffuseur, se bornent à contester la

recevabilité à agir des sociétés TOEI et DYNAMIC PLANNING sans aucunement indiquer de qui elles tiendraient les droits qu’elles ont entrepris d’exploiter ; Qu’il est constant que ni la société TOEI ni la société DYNAMIC PLANNING ne leur ont concédé aucune autorisation d’exploitation ; Qu’au contraire, la société ROUGE CITRON indique, sans être démentie en aucune manière par ses co-défenderesses, avoir été mandatée par la société DECLIC IMAGES pour acquérir les droits d’exploitation qu’elle n’a pu obtenir ; Que la société ROUGE CITRON justifie avoir informé sa mandante le 4 juillet 2005 de l’échec de sa mission en versant aux débats la copie de la lettre recommandée avec accusé de réception qu’elle lui a adressée à cette date ; qu’en dépit de cette information, la société DECLIC IMAGES a fait dupliquer les DVD litigieux en grand nombre et la société MANGA DISTRIBUTION les a diffusés ; Attendu enfin que les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION ne discutent pas le fait que les DVD litigieux présentent la reproduction à l’identique de l’oeuvre audiovisuelle d’origine ; Qu’en conséquence, l’action en contrefaçon de droits d’auteur sur la série d’animation GOLDORAK prise dans son ensemble incluant chacune de ses composantes, titre musique et adaptation, est bien fondée de la part de la société TOEI ; qu’elle est également bien fondée de la part de la société DYNAMIC PLANNING en ce qui concerne la reproduction des dessins d’origine. Attendu en revanche que les demanderesses seront déboutées de leur action dirigée contre la société ROUGE CITRON Production dont aucun des éléments du dossier ne vient démontrer qu’elle aurait pris part aux actes illicites. IV – Sur la concurrence déloyale et de parasitisme : Attendu que les sociétés demanderesses font grief aux sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION d’avoir volontairement organisé une confusion dans l’esprit du public sur la titularité des droits en particulier en s’abstenant de suspendre la vente dans l’attente de l’issue du litige, en affirmant à leurs partenaires commerciaux disposer d’une autorisation régulière de diffusion et surtout en profitant du débouté de l’action engagée en référé pour prétendre bénéficier d’une autorisation judiciaire de vendre ; Attendu en effet qu’il est versé aux débats des échanges de correspondances tant avec la société QOL à laquelle la société MANGA DISTRIBUTION avait commandé la duplication de 1 millions de DVD, qu’avec le Groupe CASINO qui, comme la plupart des acteurs de la grande distribution française a commandé les DVD en cause, que les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION, face aux interrogations de ces partenaires sur la licéité des produits, leur ont transmis divers documents destinés à anéantir la portée des lettres de mise en garde adressées par le conseil de la société TOEI ; Qu’ainsi, elles ont diffusé le contrat signé entre elles dans lequel la société DECLIC IMAGES souscrit l’affirmation qu’elle est bien propriétaire des droits cédés, une lettre de garantie de la société MANGA DISTRIBUTION laquelle s’engage à garantir son cocontractant contre toute réclamation portant notamment sur les droits de propriété intellectuelle et le reçu manuscrit signé par la société ROUGE CITRON de l’encaissement de la somme de 500 000 euros à valoir sur le paiement de la somme de 3 000 000 d’euros au titre de l’acquisition des droits de la série GOLDORAK, tous éléments

qui, au delà des actes de contrefaçon eux -mêmes ont eu pour effet de jeter le trouble sur le bien-fondé des protestations de la société TOEI ; Qu’il importe de relever que les extraits de groupes de discussion sur internet montrent que ces éléments sont de fait connus du grand public, certains internautes exprimant l’idée que ce différent sur la titularité des droits leur importe peu face à leur attrait pour la nouvelle diffusion de la série GOLDORAK ; Attendu par ailleurs qu’un courriel adressé par le groupe CARREFOUR à ses responsables des achats le 21 octobre 2005 indique « GOLDORAK – Suite à une décision de justice, MANGA DISTRIBUTION a obtenu l’autorisation de commercialiser les deux coffrets de la série… » ; que les défenderesses ne contestent pas avoir effectivement, à la suite de l’ordonnance de référé rendue le 5 octobre 2005, publiquement prétendu sur leurs sites internet qu’ elles étaient « judiciairement autorisées » à vendre les DVD litigieux alors même que cette décision se borne à débouter la société TOEI d’une demande d’interdiction provisoire, portée sur laquelle elles n’ont pu de bonne foi se méprendre ; que de cette manière, la commercialisation en grandes surfaces, qui avait été interrompue, à été reprise par plusieur enseignes à compter du 21 octobre dernier (FNAC, CARREFOUR, LECLERC notamment) ; Attendu que ces actes caractérisent des manoeuvres commerciales déloyales destinées à détourner la clientèle, qui sont distinctes des actes de contrefaçon dont elles aggravent considérablement le préjudice ; V – Sur les mesure réparatrices : Attendu qu’il est manifeste que la commercialisation des deux coffrets de DVD litigieux sur le seul territoire français a connu une très grande ampleur de correspondant l’engouement manifesté par le public pour ce produit distribué à l’approche des fêtes de fin d’année par tous les vecteurs de commercialisation ; Attendu que la vente sur internet s’est poursuivie sans réelle interruption depuis le 23 août 2005, notamment sur les sites E-Bay, mangadistribution, asia diffusion, discountmanga et zemanga, certains indiquant être en rupture de stock ; Attendu que certaines grandes surfaces ont maintenu les produits en rayon en dépit de l’avertissement diffusé par la société TOEI le 30 août 2005 ; qu’en effet à la date du 15 septembre 2005, six magasins à l’enseigne LECLERC offraient les marchandises contrefaisantes à la vente ; Attendu que les produits étaient également vendus dans plusieurs boutiques à Paris, à Tours et à Nice ; Attendu qu’il est constant que sur le million d’exemplaires qui lui avait été commandé en duplication, la société QOL en a livré la moitié avant d’être autorisée à rompre ses engagements contractuels ; Attendu qu’ainsi que déjà indiqué les ventes ont repris massivement dans la grande distribution depuis le 21 octobre dernier à la suite des fausses informations diffusées par les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION ; Attendu que l’ensemble des ventes réalisées par ces sociétés ont pour effet d’empêcher définitivement la société TOEI de lancer la commercialisation de la série Goldorak en version DVD avec le succès qu’elle pouvait en escompter ; Attendu en conséquence qu’il y a lieu d’allouer :

- à la société TOEI ANIMATION la somme de 2 000 000 euros à titre de dommages et

intérêts du chef de contrefaçon et celle de 4 000 000 d’euros du chef de concurrence déloyale,
- à la société DYNAMIC PLANNING la somme de 400 000 euros du chef de contrefaçon et celle de 800 000 euros du chef de concurrence déloyale, le tout à la charge in solidum des sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION ; Attendu qu’ il n’y a pas lieu d’ordonner une mesure d’expertise ; Attendu qu’il sera fait droit aux demandes d’interdiction, de publication, de retrait de la vente et de destruction selon les modalités précisées au dispositif ; VI – Sur la contrefaçon de marques :

- sur la demande en déchéance : Attendu que selon les dispositions de l’article L. 714-6 du code de la Propriété Intellectuelle « Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans… La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée… La preuve de l’exploitation incombe au propriétaire de la marque. Elle peut être apportée par tous moyens… » Attendu que la société TOEI à laquelle incombe la charge de la preuve de l’exploitation sérieuse des produits et services visés à l’enregistrement, verse aux débats, des cassettes vidéo de la série Goldorak, divers documents et publications établissant l’offre à la vente de ces cassettes et des figurines en plastique représentant deux personnages de la série dans des boîtes portant l’indication « UFO ROBOTGOLDORAK » ; Attendu que les défenderesses opposent qu’ il ne s’agit pas là d’usages à titre de marque ; Attendu que l’usage à titre de marque s’entend d’un usage du signe dans la vie des affaires permettant au consommateur d’identifier l’origine du produit ou du service ; Attendu que le dépôt d’une marque pour désigner des supports d’enregistrement n’a pas pour objet d’identifier les oeuvres enregistrées mais les films, disques ou cassettes audio ou vidéo eux mêmes en tant qu’il s’agit de produits ; que force est de constater qu’en l’espèce, la société TOEI ne justifie d’aucune commercialisation de produits de cette nature ; qu’elle a donné à un certain nombre de sociétés l’autorisation d’exploiter une oeuvre intitulée en France « GOLDORAK », laquelle est diffusée sur divers supports eux-mêmes fabriqués et commercialisés par des sociétés tierces et non pas l’autorisation de vendre des supports d’enregistrement ; qu’ainsi l’indication GOLDORAK portée sur les cassettes ou leur représentation publicitaire dans diverses publications ne constitue pas un usage à titre de marque mais la désignation d’une oeuvre audiovisuelle par son titre ; Attendu que la société TOEI ne démontre pas davantage l’utilisation du signe Goldorak pour désigner une gamme de jeux et jouets, une telle preuve ne résultant pas de la production de figurines représentant les personnages de la série d’animation, identifiés sous le titre de la série ; que si les objets en cause sont bien des jouets, la dénomination Goldorak n’identifie pas leur origine en tant que produits fabriqués ou commercialisés par une société déterminée, qui en l’occurrence n’est pas la société TOEI, mais son rapport au dessin animé qu’elle a réalisé ; Attendu que la société TOEI, qui ne produit aucune preuve d’usage des autres produits

visés aux dépôts de ses marques et qui n’a pas discuté la recevabilité de la demande en déchéance pour les produits non opposés par elle dans la présente instance au regard de l’intérêt à agir des défenderesse sera déchue de l’ensemble de ses droits ; que la présente décision sera inscrite au Registre National des Marques ; VII – Sur les autres demandes : Attendu que la nature de l’affaire commande d’ordonner l’exécution provisoire des mesures d’interdiction et de publication et des condamnations financières à hauteur de la moitié des sommes allouées. Que le retrait de la vente sera exécutoire au seul vu de la minute du jugement ; Attendu que les demandes étant dans une large mesure fondées, la demande reconventionnelle en indemnisation pour procédure abusive est dépourvue d’objet. VIII – Sur les frais et dépens : Attendu qu’il serait inéquitable que les demanderesses supportent la charge de leurs frais non compris dans les dépens ; qu’il sera alloué à la société TOIE la somme de 10 000 euros et à la société DYNAMIC PLANNING la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile à la charge in solidum des sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION ; Attendu que la société TOEI sera condamnée à payer à la société ROUGE CITRON la somme de 5 000 euros au même titre ; Attendu que les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION seront condamnées in solidum aux entiers dépens de l’instance, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile. Par ces motifs Le Tribunal, statuant en audience publique, par jugement contradictoire et en premier ressort, Ordonne le retrait des débats de la pièces n° 33 communiquée par la société TOEI ANIMATION (Rapport d’expertise), Rejette l’exception d’irrecevabilité de l’intervention volontaire de la société DYNAMIC PLANNING, Rejette l’exception d’irrecevabilité tirée du défaut de titularité des droits d’auteur des sociétés TOEI ANIMATION et DYNAMIC PLANNING, Dit qu’en reproduisant et en offrant à la vente des coffrets de DVD de la série d’animation GOLDORAK sans l’autorisation des sociétés TOEI ANIMATION et DYNAMIC PLANNING, les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION ont commis des actes de contrefaçon portant atteinte à leurs droits patrimoniaux sur cette oeuvre, Dit qu’en organisant une confusion dans l’esprit du public sur la titularité des droits et en diffusant l’information fausse selon laquelle elles seraient judiciairement autorisées à commercialiser la série en cause, les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION ont commis des actes de concurrence déloyale, En conséquence, Condamne in solidum les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION à payer :

- à la société TOEI ANIMATION la somme de 2 000 000 d’euros à titre de dommages et intérêts du chef de contrefaçon et celle de 4 000 000 d’euros du chef de concurrence

déloyale,
- à la société DYNAMIC PLANNING la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts du chef de contrefaçon et celle de 800 000 euros du chef de concurrence déloyale, Dit n’y avoir lieu à mesure d’expertise, Ordonne aux sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION de faire procéder au retrait de la vente de l’ensemble des DVD contrefaisants en quelque lieu qu’il se trouve et ce sous astreinte de 500 000 euros par jour de retard à compter du deuxième jour suivant la présentation de la minute de la présente décision et pour remise aux sociétés demanderesses aux fins de destruction sous contrôle d’huissier aux frais in solidum des Sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION. Fait interdiction aux société DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION de poursuivre la reproduction et la commercialisation de la série d’animation GOLDORAK sous quelque forme que ce soit sous astreinte de 2 000 euros par objet contrefaisant à compter de la signification de la présente décision, Autorise la publication de la présente décision dans trois journaux au choix des sociétés demanderesses et aux frais avancés des sociétés défenderesses in solidum dans la limite de 3 500 euros hors taxe par insertion, Déboute les sociétés TOEI ANIMATION et DYNAMIC PLANNING de leurs demandes dirigées contre la société ROUGE CITRON PRODUCTION, Prononce la déchéance des droits de la société TOEI ANIMATION sur les marques GOLDORAK n° 1 589 742 déposée le 15 février 1989 et n° 99 780 197 déposée le 11 mars 1999 pour l’ensemble des produits et services visés et ce à compter respectivement du 16 février 2004 et du 12 mars 2004, Dit que cette décision, une fois devenue définitive sera transmise à l’INPI pour inscription au Registre National des Marques par les soins du greffier saisi à la requête de la partie la plus diligente, Ordonne l’exécution provisoire de la décision en ce qui concerne les mesures d’interdiction et de publication et à hauteur de moitié en ce qui concerne les condamnations à dommages et intérêts, Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraire ; Condamne la société TOEI à payer à la société ROUGE CITRON Production la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Condamne in solidum les sociétés DECLIC IMAGES et MANGA DISTRIBUTION à payer à la société TOEI ANIMATION la somme de 10 000 euros et à la société DYNAMIC PLANNING la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, Les condamne in solidum aux entiers dépens de l’instance, incluant les frais de saisie- contrefaçon et de constats, dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.

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Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 28 novembre 2005