Tribunal Judiciaire de Bobigny, Chambre 6 section 4, 18 décembre 2023, n° 22/12535

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Sur la décision

Référence :
TJ Bobigny, ch. 6 sect. 4, 18 déc. 2023, n° 22/12535
Numéro(s) : 22/12535
Importance : Inédit
Dispositif : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur
Date de dernière mise à jour : 26 décembre 2023
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Texte intégral

TRIBUNAL JUDICIAIRE

de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 18 DECEMBRE 2023

Chambre 6/Section 4

AFFAIRE: N° RG 22/12535 – N° Portalis DB3S-W-B7G-XC4O

N° de MINUTE : 23/00775

Madame [U], [C], [N] [X]

[Adresse 4]

[Localité 10]

représentée par Me Thibaut EXPERTON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1445

Madame [J], [R], [V] [X] épouse [D]

[Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par Me Thibaut EXPERTON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1445

Madame [G], [J], [S] [X] épouse [T]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]

représentée par Me Thibaut EXPERTON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1445

DEMANDEURS

C/

S.A.S. AGENCE ORPI LES 2 PIC (ORPI LA COURNEUVE) prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 7]

[Localité 9]

représentée par Maître Noellia AUNON de l’ASSOCIATION L & P ASSOCIATION D’AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : R 241

Madame [K] [Y] [M]

[Adresse 1]

[Localité 8]

représentée par Me Olivier FARGETON, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire: PB 213

DEFENDEURS

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, Vice-Président, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l article 812 du code de procédure civile, assisté aux débats de Madame Maud THOBOR, greffier.

DÉBATS

Audience publique du 20 novembre 2023, l’affaire a été mise en délibéré au 18 décembre 2023.

JUGEMENT

Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort, par Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, Vice-Président, assisté de Madame Maud THOBOR, greffier.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous signature privée des 27 et 28 novembre 2021, conclu avec l’intermédiaire de la SAS Agence Les 2 Pics (Orpi [Localité 11]), madame [U] [X], madame [J] [X] épouse [D] et madame [G] [X] épouse [T], ont consenti à madame [K] [Y] [M], une promesse synallagmatique de vente portant sur une maison dépendant d’un ensemble immobilier en copropriété sis [Adresse 4] à [Localité 10], moyennant le prix de 230.000 euros, dont 10.000 euros versés à titre d’acompte et séquestrés entre les mains de l’agence immobilière.

Une condition suspensive d’obtention de son prêt de 208.000 euros était stipulée au profit de l’acheteuse ; et la réitération de la vente était prévue pour intervenir le 4 mars 2022, date prorogée au 15 mai 2022 par avenant du 14 mars 2022.

Par lettre recommandée du 3 juin 2022, reçue le 8 juin 2022, les consorts [X] ont mis madame [Y] [M] en demeure de réitérer la vente, sous peine de lui réclamer le paiement de l’indemnité de 23.000 euros prévue par la clause pénale.

Le 10 octobre 2022, les parties au compromis ont conclu un protocole d’accord au terme duquel l’acheteuse s’est engagée à verser la somme de 10.000 euros, correspondant au dépôt de garantie, aux consorts [X], « à titre de compensation de la non réalisation des conditions suspensives fixées dans le cadre du compromis de vente ».

C’est dans ce contexte que, par actes d’huissier enrôlés le 20 décembre 2022, madame [U] [X], madame [J] [X] et madame [G] [X] ont fait assigner madame [K] [Y] [M] et la SAS Agence Les 2 Pic (Orpi [Localité 11]) devant le tribunal judiciaire de Bobigny.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 23 mai 2023, les consorts [X] sollicitent, outre le rejet des prétentions et moyens adverses :

la condamnation de l’Agence Les 2 Pics Orpi à :

leur restituer le dépôt de garantie de 10.000 euros ; à leur payer la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ; à leur payer la somme de 3.000 euros au titre de l’avenant de prorogation de la promesse ; la condamnation de madame [Y] [M] à leur payer la somme de 23.000 euros – à défaut une somme réduite à de plus justes proportions – au titre de l’indemnité forfaitaire et clause pénale ou de dommages et intérêts ;la condamnation in solidum des défenderesses aux dépens, avec application de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à leur payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du même code.

A l’appui de leurs prétentions, elles soutiennent que le compromis est caduque à défaut de réalisation de la vente dans le délai imparti, même après prorogation, et à défaut de réponse à leur courrier du 3 juin 2022 ; que la caducité est acquise depuis le 16 juin 2022 ; que l’agence immobilière a commis une faute délictuelle en refusant de leur verser le dépôt de garantie malgré l’accord intervenu avec l’acheteuse ; que la négligence de cette dernière justifie en toute hypothèse sa condamnation à verser ledit dépôt de garantie ; que l’agence immobilière a commis une faute contractuelle en omettant d’obtenir le complément de 3.000 euros sur le dépôt de garantie alors qu’elles avaient conditionné leur accord à l’avenant de prorogation de la promesse au versement de ce complément ; que l’agence avait du reste reconnu son erreur et s’était engagée à prendre en charge la somme ; que l’acheteuse doit encore verser l’indemnité prévue par la clause pénale, pour avoir empêché la réalisation de la vente ; que cette dernière sera subsidiairement condamnée à payer cette même somme sur le fondement délictuel.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 8 juin 2023, madame [K] [Y] [M] demande au tribunal de rejeter les prétentions adverses au-delà de la somme de 10.000 euros réclamée, qui devra être payée sur le dépôt de garantie conservé par l’agence Les 2 Pics Orpi.

A l’appui de ses prétentions, elle soutient que, conformément aux termes du compromis, la non-réalisation de la condition suspensive relative à l’obtention de son prêt entraîne la caducité de la vente, sans indemnité ; que cette caducité sans indemnité est du reste d’ordre public, comme le rappelle l’article L312-16 du code de la consommation, de sorte que les engagements contraires contenus dans le protocole du 10 octobre 2022 sont dénués de portée ; que la promesse est devenue caduque le 16 juin 2022, huit jours après la réception de la mise en demeure que lui ont faite mesdames [X] ; que les demanderesses et l’agence immobilière devront ainsi lui restituer le dépôt de garantie de 10.000 euros, ainsi que le complément de 3.000 euros versé à l’occasion du protocole précité ; qu’elle accepte de verser 10.000 euros au titre de la clause pénale, mais pas au-delà, le juge ayant le pouvoir de modérer le montant ; qu’elle reconnaît qu’elle a tardé à saisir une banque et qu’elle n’a sollicité qu’une banque sur les deux requises par la promesse.

Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties, il sera renvoyé à la lecture des conclusions précitées, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

La SAS Agence Les 2 Pics (Orpi La Courneuve) a constitué avocat mais n’a pas conclu.

La clôture de la mise en état a été fixée au 14 juin 2023 par ordonnance du même jour.

A l’audience du 20 novembre 2023, l’affaire a été mise en délibéré au 18 décembre 2023, date du présent jugement.

MOTIFS

Sur les demandes principales

Sur les demandes présentées contre madame [Y] [M]

L’article 1103 du code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

A défaut d’exécution du contrat, la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut notamment, selon l’article 1217 du même code, agir en exécution forcée et/ou réclamer des dommages et intérêts.

Toutefois, l’article 1231-6 du même code précise que les dommages et intérêts dus en raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent ne consistent que dans l’intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure, et l’éventuel préjudice indépendant de ce retard, qui ne serait pas réparé par les seuls intérêts moratoires, ne peut être indemnisé qu’en cas de mauvaise foi du débiteur.

Il résulte enfin de l’article 2052 du même code que la transaction fait obstacle à l’introduction ou à la poursuite entre les parties d’une action en justice ayant le même objet.

En l’espèce, il est constant et justifié que les consorts [X] et madame [Y] [M] ont conclu, le 10 octobre 2022, une transaction au terme de laquelle la seconde s’est engagée à verser aux premières la somme de 10.000 euros, correspondant au dépôt de garantie, « à titre de compensation de la non réalisation des conditions suspensives fixées dans le cadre du compromis de vente ».

La défenderesse ne saurait soutenir qu’une telle transaction heurterait les dispositions d’ordre public de l’article L312-16 du code de la consommation, dans la mesure où ces dispositions n’excluent pas le versement d’une indemnité lorsque la condition suspensive d’obtention d’un prêt est, nonobstant sa défaillance, réputée réalisée au motif que le bénéficiaire en a empêché l’accomplissement au sens de l’article 1304-3 du code civil, comme tel est le cas ici, l’acheteuse reconnaissant ne pas avoir déposé deux demandes de prêt contrairement à ce qu’imposait la promesse.

La transaction étant valable, elle ouvre droit à son exécution forcée au profit des consorts [X], qui sont ainsi en droit d’obtenir le versement de l’indemnité de 10.000 euros qui y est stipulée contre madame [Y] [M], avec intérêts au taux légal à compter de la première mise en demeure de payer ladite somme, soit l’assignation délivrée le 15 décembre 2022, déduction faite des 10.000 euros séquestrés entre les mains de l’agence Les 2 Pic, qui devront être libérés au profit des demanderesses.

La mauvaise foi de madame [Y] [M] dans le cadre de l’inexécution de cette transaction n’étant pas démontrée (puisque l’indemnité devait être payée sur l’acompte séquestré), pas plus que le préjudice indépendant du retard de paiement, aucuns dommages et intérêts complémentaires ne sauraient être accordés dans ce cadre, conformément à l’article 1231-6 précité du code civil.

La transaction, qui met fin au différend relatif à l’inexécution de la promesse, rend par ailleurs irrecevable toute demande indemnitaire complémentaire portant sur le même objet, notamment aux fins de paiement de la clause pénale prévue par ladite promesse ou sur le fondement délictuel, comme le rappelle l’article 2052 précité du code civil.

Sur les demandes présentées contre l’agence Les 2 Pic

Conformément à l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

A ce titre, l’article 1359 du code civil dispose que la preuve d’un acte juridique portant sur une somme supérieure à 1.500 euros doit être rapportée par écrit sous signature privée ou authentique.

En l’espèce, les consorts [X] ne produisent aucun élément établissant qu’elles auraient conditionné leur accord à l’avenant de prorogation du 14 mars 2022 au versement par madame [Y] [M] d’un complément de 3.000 euros sur le dépôt de garantie ; force est de relever que ledit avenant n’y fait absolument pas référence.

Dans ces conditions, elles ne sauraient reprocher à l’agence Les 2 Pic un quelconque manquement tiré de l’absence de versement dudit complément.

Et les seuls courriels communiqués ne permettent pas, eu égard au montant en jeu, de passer outre l’absence d’écrit sous signature privée ou authentique au terme duquel l’agence immobilière se serait contractuellement engagée à verser la somme de 3.000 euros aux consorts [X] à titre de dédommagement.

La demande de paiement de la somme de 3.000 euros sera ainsi rejetée.

La demande de paiement de la somme de 10.000 euros de dommages et intérêts, fondée sur le retard dans la libération du séquestre, sera également rejetée, faute de preuve du préjudice résultant de ce retard (les demanderesses restent totalement silencieuses sur ce point dans leurs conclusions), qui ne serait de surcroît pas réparé par les intérêts moratoires.

Sur les demandes accessoires

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En application de l’article 700 du même code, le tribunal condamne la partie tenue aux dépens ou la partie perdante à payer à l’autre la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par principe, le tribunal alloue à ce titre une somme correspondant aux frais réellement engagés, à partir des justificatifs produits par les parties, ou, en l’absence de justificatif, à partir des données objectives du litige (nombre de parties, durée de la procédure, nombre d’écritures échangées, complexité de l’affaire, incidents de mise en état, mesure d’instruction, etc.). Par exception et de manière discrétionnaire, le tribunal peut, considération prise de l’équité ou de la situation économique des parties, allouer une somme moindre, voire dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

En conséquence, madame [Y] [M], partie perdante, sera condamnée aux dépens, avec bénéfice du droit prévu par l’article 699 du même code, ainsi qu’à payer aux consorts [X] une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens fixée, en équité et en l’absence de justificatif, à 2.500 euros.

Enfin, il y a lieu de constater l’exécution provisoire, qui est de droit, conformément à l’article 514 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable au litige.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et rendu en premier ressort,

Condamne madame [K] [Y] [M] à payer à madame [U] [X], madame [J] [X] et madame [G] [X], la somme de 10.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2022 en exécution de la transaction du 10 octobre 2022, déduction faite de la somme séquestrée (10.000 euros en principal, outre éventuels intérêts) entre les mains de la SAS Agence Les 2 Pics (Orpi La Courneuve), qui devra être libérée au profit de madame [U] [X], madame [J] [X] et madame [G] [X] ;

Déclare irrecevable et en tout cas rejette le surplus des demandes indemnitaires présentées par madame [U] [X], madame [J] [X] et madame [G] [X], contre madame [K] [Y] [M] ;

Déboute madame [U] [X], madame [J] [X] et madame [G] [X], de leurs demandes présentées contre la SAS Agence Les 2 Pics (Orpi La Courneuve) ;

Condamne madame [K] [Y] [M] aux dépens, avec bénéfice du droit prévu par les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

Condamne madame [K] [Y] [M] à payer à madame [U] [X], madame [J] [X] et madame [G] [X], la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle que le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire de droit ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La minute est signée par Monsieur Gilles CASSOU DE SAINT-MATHURIN, Vice-Président, assisté de Madame Maud THOBOR, greffier.

Le greffier,Le president,

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