Tribunal Judiciaire de Paris, 18 décembre 2020, n° 20/10567

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  • Droits d'auteur·
  • Propriété intellectuelle

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www.uggc.com · 21 octobre 2021

Œuvres culturelles à l'ère numérique : projet de loi adopté contre le Piratage Maître Anne-Marie Pecoraro, avocate associée spécialisée en propriété intellectuelle, est intervenue à l'EFB, jeudi 21 octobre 2021, aux côtés des équipes de la HADOPI-ARCOM et de Caroline Guenneteau de beIN sport, dans le cadre d'un module de formation sur la lutte contre les services proposant illicitement des contenus culturels et des retransmissions de rencontres sportives sur internet – un sujet d'actualité, en témoigne, la fermeture récente d'Electro TV Sat, lequel diffusait illégalement depuis le Maroc …

 

www.uggc.com · 21 octobre 2021

Œuvres culturelles à l'ère numérique : projet de loi adopté contre le Piratage Maître Anne-Marie Pecoraro, avocate associée spécialisée en propriété intellectuelle, est intervenue à l'EFB, jeudi 21 octobre 2021, aux côtés des équipes de la HADOPI-ARCOM et de Caroline Guenneteau de beIN sport, dans le cadre d'un module de formation sur la lutte contre les services proposant illicitement des contenus culturels et des retransmissions de rencontres sportives sur internet – un sujet d'actualité, en témoigne, la fermeture récente d'Electro TV Sat, lequel diffusait illégalement depuis le Maroc …

 
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Sur la décision

Référence :
TJ Paris, 18 déc. 2020, n° 20/10567
Numéro(s) : 20/10567

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL

JUDICIAIRE

DE PARIS 1

3ème chambre 3ème section

N° RG 20/10567 N° Portalis 352J-W-B7E-CTCI3

N° MINUTE :

Assignation du : 20 octobre 2020

Expéditions exécutoires délivrées le :

JUGEMENT SELON LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE AU FOND rendu le 18 décembre 2020

DEMANDERESSES

société N MASSON S.A.S. représentée par Monsieur X Y en sa qualité de président […]

société N O représentée par Madame Z A en sa qualité de directrice 1209 Orange Street Wilmington Conté de New Castle […]

société N BV représentée par Monsieur B C en sa qualité de directeur Radarweg 29 1043 NX […]

société N LIMITED représentée par Monsieur D E en sa qualité de gérant […]

société Q NATURE LIMITED (anciennement dénommée MACMILLAN PUBLISHERS LIMITED ) représentée par Madame AB AC AD AE en sa qualité de gérante The Campus […]

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société Q NATURE SWITZERLAND (anciennement dénommée Q INTERNATIONAL PUBLISHING AG ) représentée par Monsieur T U V en sa qualité de président du conseil d’administration et Monsieur F G en sa qualité de délégué du conseil d’administration Gewerbestrasse 11 6330 CHAM (SUISSE)

société Q W AA GmbH représentée par Madame H I, Madame J K et Monsieur L M en leur qualité de gérant Abraham Lincoln strasse 46 65189 AA (ALLEMAGNE)

représentées par Maître Anne-Marie PECORARO de la SELARL TURQUOISE, avocats au barreau de PARIS vestiaire #A0152

DÉFENDERESSES

société ORANGE S.A. […]

représentée par Maître Christophe CARON de l’AARPI Cabinet Christophe CARON, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #C0500

SOCIETE FRANCAISE DU RADIOTELEPHONE SA – R […]

société R S S.A.S. […]

représentées par Maître Pierre-Olivier CHARTIER de l’AARPI CBR

& ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R0139

société FREE S.A.S. […]

représentée par Maître Yves COURSIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C2186

société BOUYGUES TELECOM S.A. […]

représentée par Maître François DUPUY de la SCP HADENGUE et Associés, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #B0873

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Carine GILLET, Vice-Président Laurence BASTERREIX, Vice-Président Elise MELLIER, Juge

assisté de Alice ARGENTINI, Greffier

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Décision du 18 Décembre 2020 3ème chambre 3ème section N° RG 20/10567 N° Portalis 352J-W-B7E-CTCI3

DEBATS

A l’audience du 18 décembre 2020 tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe Contradictoire en premier ressort

La maison d’édition de publications scientifiques N, fondée en 1880, regroupe de nombreuses sociétés qui mettent à disposition des professionnels de santé et des sciences des publications et analyses de données destinées à améliorer leurs connaissances. Elle publie et commercialise, via sa plateforme propriétaire et base de données S c i e n c e D i r e c t , a c c e s s i b l e à l ' a d r e s s e U R L

, 2 500 revues et 39 000 ouvrages numérisés représentant plus de 16 millions de publications, y compris de nombreuses publications mondialement connues comme le Gray’s Anatomy ou The Lancet. Au cours de la seule année 2019, elle a publié près de 500 000 articles.

Les sociétés N MASSON SAS, N B.V., N O., et N LIMITED (ci-après « les sociétés N ») sont des filiales du groupe N.

Les sociétés Q NATURE LIMITED, Q NATURE SWITZERLANG AG et Q W AA GmbH (ci-après « les sociétés Q NATURE ») appartiennent au groupe mondial Q NATURE, lequel résulte de la création en 1842 à Berlin de la société Q-VERLAG par P Q. Ses publications s’adressent aux chercheurs, étudiants, professeurs et professionnels. Chaque année, le groupe Q NATURE publie plus de 300 000 articles au sein de près de 3 000 revues ainsi que 13 000 ouvrages, notamment via les plateformes accessibles aux adresses URL et

.

Les sociétés ORANGE, R, R S, BOUYGUES TELECOM et FREE sont des opérateurs de communication électronique qui commercialisent notamment des offres de téléphonie fixe et mobile et d’accès à internet sur le territoire français, représentant 95 % du marché national.

Les éditeurs exposent que les plateformes Sci-Hub et LibGen, accessibles en France via différents noms de domaine, contournent l’accès légal et autorisé aux plateformes et bases de données des sociétés N et Q NATURE pour mettre à disposition des internautes leurs publications scientifiques en violation de leurs droits de propriété intellectuelle.

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Décision du 18 Décembre 2020 3ème chambre 3ème section N° RG 20/10567 N° Portalis 352J-W-B7E-CTCI3

Plus précisément, la plateforme Sci-Hub fonctionne en utilisant un script lui permettant d’extraire le contenu des plateformes propriétaires, notamment celles des sociétés N et Q NATURE, en téléchargeant les pages HTML et les fichiers PDF contenant les articles scientifiques des éditeurs. Pour contourner les portails d’accès par abonnement des éditeurs, la plateforme Sci-Hub utilise les identifiants de certains abonnés soit de leur plein gré notamment en les rémunérant, soit à leur insu par des techniques d’hameçonnage (“phishing”) consistant à faire croire à la victime qu’elle se trouve sur le site internet officiel où elle pensait se connecter pour récupérer ses codes personnels et usurper ensuite son identité pour accéder à des contenus. Le système de recherche sur la plateforme Sci-Hub est connecté à la base de données LibGen : ainsi lorsqu’un utilisateur souhaite accéder à une œuvre scientifique sur la plateforme Sci-Hub, celle-ci effectue une recherche dans la base de données LibGen. La plateforme Sci-Hub stockant systématiquement toutes les œuvres scientifiques qu’elle extrait depuis les plateformes des éditeurs dans la base de données LibGen, la plateforme LibGen dispose d’une base de données aussi large que celle de la plateforme Sci-Hub.

Les sociétés N et Q NATURE précisent que les plateformes Sci-Hub et LibGen ont déjà fait l’objet de plusieurs procédures judiciaires initiées par des éditeurs, notamment pour obtenir le blocage de l’accès aux sites et des noms de domaine, aux États-Unis, en Italie, en Allemagne, au Royaume-Uni, au Danemark et en Russie.

Par acte du 29 novembre 2018, les éditeurs ont fait assigner les fournisseurs d’accès à internet précités devant le tribunal de grande instance de Paris statuant en la forme des référés aux fins d’obtenir le blocage des sites qu’ils estimaient contrefaisants.

Par jugement en la forme des référés rendu le 7 mars 2019, le tribunal de grande instance de Paris a notamment :

– dit que les éditeurs démontrent suffisamment que les plateformes Sci- Hub et LibGen sont entièrement dédiées ou quasi entièrement dédiées à la représentation d’articles sans le consentement des auteurs, ce qui constitue une atteinte aux droits d’auteur telle que prévue à l’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle,

– ordonné aux sociétés ORANGE, R, R S, BOUYGUES TELECOM et FREE de mettre en œuvre et/ou faire mettre en œuvre, toutes mesures propres à empêcher l’accès aux plateformes Sci-Hub et LibGen, à partir du territoire français par leurs abonnés par le blocage de 57 noms de domaine au plus tard dans les quinze jours de la décision à intervenir et pendant une durée de 12 mois à compter de la mise en œuvre des mesures ordonnées,

– dit que les fournisseurs d’accès à internet devront informer les éditeurs de la réalisation de ces mesures en leur précisant éventuellement les difficultés qu’ils rencontreraient,

– dit que les éditeurs devront dans ce cadre indiquer aux fournisseurs d’accès à internet, les sites dont ils auraient appris la fermeture ou la disparition, afin d’éviter des coûts de blocage inutiles.

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Décision du 18 Décembre 2020 3ème chambre 3ème section N° RG 20/10567 N° Portalis 352J-W-B7E-CTCI3

A la demande des sociétés N et Q NATURE, les mesures de blocage ont été mises en œuvre en exécution de ce jugement puis prorogées jusqu’au 23 septembre 2020 en raison de la situation sanitaire en France.

Estimant que l’activité contrefaisante des plateformes Sci-Hub et LibGen se poursuivait, les sociétés N et Q NATURE ont, par acte du 20 octobre 2020, assigné la SA ORANGE, la SA R, la SAS R S, la SAS FREE et la SA BOUYGUES TELECOM devant ce tribunal en procédure accélérée au fond aux fins de mise en place de nouvelles mesures de blocage de contenus illicites.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 12 novembre 2020, les sociétés N et Q demandent au tribunal de :

Vu les articles 56 et 481-1 du code de procédure civile,

Vu l’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle, ainsi que les articles L. 122-1 à L. 122-4 du même code,

Vu la Directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur,et des droits voisins dans la société de l’information,

Vu la Directive 2004/48/CE du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle,

Vu la Directive 2000/31/CE du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur,

Vu le jugement en la forme des référés rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 7 mars 2019 (RG 18/14194),

Vu l’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période,

CONSTATER que les sites Sci-Hub et LibGen accessibles par les noms de domaine et sous-domaines listés ci-dessous :

1 sci-hub.tw

2 www.sci-hub.tw

3 sci-hub.se

4 www.sci-hub.se

5 sci-hub.shop

6 www.sci-hub.shop

7 sci-hub.ren

8 www.sci-hub.ren

9 sci-hub.wang

10 www.sci-hub.wang

11 sci-hub.si

12 sci-hub.zone

13 sci-hub.ltd

14 sci-hub.link

15 sci-hub.ee

16 www.sci-hub.ee

17 sci-hub.st

18 www.sci-hub.st

19 sci-hub.pl

20 www.sci-hub.pl

21 sci-hub.do

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22 www.sci-hub.do

23 sci-hub.tf

24 www.sci-hub.tf

25 scihub.unblockit.app

[…]

27 scihub.unblockproject.rest

[…]

[…]

30 scihub.mrunblock.best

[…]

[…]

[…]

34 scihub.wikicn.top

35 libgen.sci-hub.pm

36 mg.scihub.ltd

37 scihubtw.tw

[…]

39 sci-hub.scihubtw.tw

40 sci-hub.it.nf

41 sci-hub.es.ht

42 scihub.unblockit.top

[…]

[…]

45 scihub.unblockit.me

[…]

[…]

[…]

49 scihub.unblocked.vet

50 scihub.unblocked.pet

[…]

[…]

[…]

54 scihub.unblocked.app

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

70 scihub.unblockit.top

71 scihub.unblockit.lat

[…]

[…]

[…]

[…]

76 scihub.unblockproject.uno

[…]

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[…]

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[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

132 www.sci-hub.es.ht

133 www.sci-hub.it.nf

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134 sci-hub.zb-welding.com

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

157 b-ok.cc

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[…]

[…]

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[…]

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[…]

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[…]

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[…]

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[…]

[…]

[…]

[…]

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[…]

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[…]

[…]

[…]

[…]

273 www.b-ok.cc

[…]

[…]

[…]

[…]

[…]

sont entièrement dédiés ou quasi entièrement dédiés à l’accès, la reproduction et la représentation d’articles scientifiques sans le consentement des ayants droit ce qui constitue une atteinte aux droits d’auteur telle que prévue à l’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle

EN CONSEQUENCE

ORDONNER aux sociétés ORANGE, FREE, R, R S et BOUYGUES TELECOM de mettre en œuvre et/ou faire mettre en œuvre, sans délai et au plus tard dans les 15 jours calendaires à compter de la signification de la présente décision et pendant une durée de 18 mois à compter de la mise en place des mesures, toutes mesures propres à empêcher l’accès, à partir du territoire français, y compris dans les collectivités, départements et régions d’outre-mer, ainsi que dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, et/ou par leurs abonnés à raison d’un contrat souscrit sur ce territoire, par tout moyen efficace et notamment par le blocage de noms de domaine et de sous-domaines, aux sites accessibles via les noms de domaine et sous-domaines précités,

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DIRE que les sociétés ORANGE, FREE, R, R S et BOUYGUES TELECOM devront informer sans délai les sociétés N et Q NATURE de la réalisation de ces mesures en leur donnant toutes informations utiles permettant d’apprécier les mesures mises en œuvre et, le cas échéant, les difficultés qu’elles rencontreraient,

DIRE que les sociétés N et Q NATURE devront dans ce cadre indiquer aux fournisseurs d’accès à internet les noms de domaine dont ils auraient appris la fermeture ou la disparition, afin d’éviter des coûts de blocage inutiles,

DIRE qu’en cas de réactivation d’un nom de domaine pour lequel les fournisseurs d’accès à internet auraient levé les mesures de blocage à la suite d’une notification adressée par les sociétés N et Q NATURE concernant la fermeture ou la disparition du nom de domaine en question, les sociétés ORANGE, FREE, R, R S et BOUYGUES TELECOM devront rétablir les mesures propres à empêcher l’accès, à partir du territoire français, y compris dans les collectivités, départements et régions d’outre-mer, ainsi que dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, et/ou par leurs abonnés à raison d’un contrat souscrit sur ce territoire, au nom de domaine concerné, ce sans délai et au plus tard dans les 15 jours calendaires à compter de la réception d’une notification adressée par les sociétés N et Q NATURE, pour la durée restant à courir en application de la présente décision,

DIRE qu’en cas d’évolution du litige, notamment par la modification du nom de domaine ou des chemins d’accès, les sociétés N et Q NATURE pourront en référer à la présente juridiction, statuant selon la procédure accélérée au fond ou en saisissant le juge des référés en mettant en cause par voie d’assignation les parties présentes à cette instance ou certaines d’entre elles afin que l’actualisation des mesures soit ordonnée,

DIRE que chacune des sociétés défenderesses conservera à sa charge les coûts et frais générés par les mesures qu’elles auront mises en œuvre en application de la présente décision,

DIRE que chaque partie conservera la charge de ses frais et dépens,

RAPPELER le caractère exécutoire par provision de la décision à intervenir, et sans constitution de garantie

ECARTER toutes les demandes, fins et moyens contraires des conclusions des défenderesses.

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Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 16 novembre 2020, la SA ORANGE demande au tribunal, au visa de l’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle, de :

– DONNER ACTE que la société ORANGE ne s’oppose pas à la mesure de blocage sollicitée par les demandeurs dès lors qu’elle réunit les conditions cumulatives, exigées par le droit positif, que sont : la preuve de l’atteinte au droit d’auteur, le caractère judiciaire préalable et impératif de la mesure dans son principe, son étendue et ses modalités, y compris pour son actualisation ; la liberté de choix de la technique à utiliser pour réaliser le blocage ; la durée limitée de la mesure ;

– DIRE ET JUGER que, dans un délai de quinze jours à compter de la signification de la décision à intervenir, la société ORANGE ne peut être enjointe que de bloquer l’accès aux seuls noms de domaine précisément mentionnés dans le dispositif des conclusions des demandeurs et qui portent atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin,

– DIRE ET JUGER que la société ORANGE procédera au blocage des sous-domaines associés aux noms de domaine visés si un tel blocage lui est expressément ordonné dans la décision à venir,

– DIRE ET JUGER que dans l’hypothèse où le blocage des sous- domaines est ordonné, la société ORANGE pourra, en cas de difficultés notamment liées à des sur-blocages, en référer au Président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond ou au juge des référés afin d’être autorisée à lever la mesure de blocage,

– DIRE ET JUGER que les demandeurs doivent indiquer au conseil de la société ORANGE si les noms de domaine visés dans la décision ne sont plus actifs, en parallèle de la signification de la décision à venir et par lettre officielle, afin de préciser qu’il n’est plus nécessaire de procéder à leur blocage,

– DIRE ET JUGER que les demandeurs doivent indiquer au conseil de la société ORANGE, postérieurement à la décision, toute fermeture du site auquel renvoient les noms de domaine visés par la décision à venir, et dont ils auraient connaissance, afin que les mesures de blocage afférentes puissent être levées,

– DIRE que chaque partie conservera à sa charge ses frais et dépens.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 16 novembre 2020, les sociétés R et R S demandent au président du tribunal, au visa de l’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle, de :

– APPRECIER si N et Q NATURE et autres ont qualité à agir et si l’atteinte qu’ils invoquent est constituée ;

– APPRECIER s’il est proportionné et strictement nécessaire à la protection des droits en cause, au regard notamment (i) des risques d’atteinte au principe de la liberté d’expression et de communication (risques d’atteintes à des contenus licites et au bon fonctionnement des

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réseaux) (ii) de l’importance du dommage allégué, (iii) des risques d’atteinte à la liberté d’entreprendre des FAI, et (iv) du principe d’efficacité, d’ordonner aux FAI, dont R et R S, la mise en œuvre des mesures de blocage sollicitées ;

Si Monsieur le Président considère qu’il est proportionné et strictement nécessaire à la protection des droits en cause d’ordonner la mise en œuvre par les FAI, dont R et R S, de mesures de blocage des sites, il lui est demandé de :

– ENJOINDRE à R et R S de mettre en œuvre, dans un délai de quinze jours à compter de la signification de la présente décision et pendant une durée de dix-huit mois à compter de la décision à intervenir, des mesures propres à prévenir l’accès de leurs abonnés situés sur le territoire français, aux noms de domaine suivants :

1. sci-hub.tw

2. sci-hub.se

3. sci-hub.shop

4. sci-hub.ren

5. sci-hub.wang

6. sci-hub.si

7. sci-hub.zone

8. sci-hub.ltd

9. sci-hub.link

10. sci-hub.ee

11. sci-hub.st

12. sci-hub.pl

13. sci-hub.do

14. sci-hub.tf

15. scihub.unblockit.app

16. scihub.proxybit.casa

17. scihub.unblockproject.rest

18. scihub.unblocknow.uno

19. scihub.123unblock.surf

20. scihub.mrunblock.best

21. scihub.unbl4you.work

22. scihub.nocensor.cyou

23. scihub.unbl0ck.world

24. scihub.wikicn.top

25. libgen.sci-hub.pm

26. mg.scihub.ltd

[…]

28. sci-hub.scihubtw.tw

29. sci-hub.it.nf

30. sci-hub.es.ht

31. scihub.unblockit.top

32. scihub.unblockit.win

33. scihub.unblockit.pw

34. scihub.unblockit.me

35. scihub.unblockit.one

36. scihub.unblockit.pro

37. scihub.unblockit.red

38. scihub.unblocked.vet

39. scihub.unblocked.pet

40. scihub.unblocked.dk

41. scihub.unblocked.lc

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Décision du 18 Décembre 2020 3ème chambre 3ème section N° RG 20/10567 N° Portalis 352J-W-B7E-CTCI3

42. scihub.unblocked.krd

43. scihub.unblocked.app

44. scihub.unblocked.cam

45. scihub.unblocked.pro

46. scihub.unblocked.mx

47. scihub.unblocked.pl

48. scihub.unblocked.pub

49. scihub.unblocked.vc

50. scihub.unblocked.sh

51. scihub.unblocked.bid

52. scihub.unblocked.nz

53. scihub.unblocked.ltda

54. scihub.unblocked.earth

55. scihub.unblocked.llc

56. scihub.unblockit.ca

57. scihub.unblockit.biz

58. scihub.unblockit.id

59. scihub.unblockit.top

60. scihub.unblockit.lat

61. scihub.proxybit.cyou

62. scihub.proxybit.uno

63. scihub.proxybit.red

64. scihub.proxybit.surf

65. scihub.unblockproject.uno

66. scihub.unblockproject.space

67. scihub.unblockproject.kim

68. scihub.unblockproject.fun

69. scihub.unblockproject.icu

70. scihub.unblockproject.red

71. scihub.unblockproject.pro

72. scihub.unblockproject.pw

73. scihub.unblocknow.pw

74. scihub.unblocknow.pro

75. scihub.unblocknow.icu

[…]

77. scihub.unblockninja.blue

78. scihub.unblockninja.icu

79. scihub.unblockninja.info

80. scihub.unblockninja.fun

81. scihub.123unblock.cyou

82. scihub.123unblock.monster

83. scihub.123unblock.pink

84. scihub.123unblock.fun

85. scihub.123unblock.club

86. scihub.123unblock.space

87. scihub.mrunblock.cyou

88. scihub.mrunblock.pro

89. scihub.mrunblock.xyz

90. scihub.mrunblock.pw

91. scihub.mrunlock.club

92. scihub.mrunlock.space

93. scihub.mrunlock.kim

94. scihub.unbl4you.london

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Décision du 18 Décembre 2020 3ème chambre 3ème section N° RG 20/10567 N° Portalis 352J-W-B7E-CTCI3

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– DIRE ET JUGER que les mesures de blocage mises en œuvre par les FAI, dont R et R S, seront limitées à une durée de dix-huit mois à compter de la décision à intervenir ;

– DIRE ET JUGER que les parties pourront saisir la présente juridiction en cas de difficultés ou d’évolution du litige ;

– DIRE ET JUGER que les dépens seront laissés à la charge de N et Q NATURE.

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Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 17 novembre 2020, la SAS FREE demande au président du tribunal de :

– Juger si les mesures qui vous sont présentées respectent le principe de proportionnalité ;

– Juger que toutes éventuelles mesures de blocage ne pourront être prises que vis-à-vis des 278 noms de domaine visés dans l’assignation, et objets du débat judiciaire ;

– Juger que d’éventuelles mesures de blocage ne seront mises en œuvre que dans un délai d’au moins deux semaines après la signification de la décision, et selon les modalités que la société FREE estimera les plus adaptées à l’objectif à remplir en fonction, notamment, des contingences de son réseau ;

– Juger que pour éviter toute contestation ultérieure, ou erreur de retranscription, la société FREE pourra utiliser la liste contenue dans le fichier Excel communiqué officiellement pour les sociétés N et autres, par lettre officielle de leur avocat, en date du 16 novembre 2020 ;

– Juger que toutes éventuelles mesures de blocage ne pourront être prises que pour une durée déterminée qui ne saurait dépasser dix-huit mois ;

– Juger que les demanderesses devront avertir officiellement et immédiatement la société FREE dans l’hypothèse où les sites dont elles auraient obtenu le blocage s’avéreraient finalement inactifs à l’intérieur de cette période de blocage ;

– Statuer ce que de droit quant aux dépens.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 17 novembre 2020, la SA BOUYGUES TELECOM demande au président du tribunal judiciaire, au visa de l’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle et des pièces versées au débat, de :

– Apprécier si les sociétés N et Q NATURE ont qualité à agir,

– Apprécier l’atteinte aux droits d’auteur et aux droits voisins invoquée par les sociétés N et Q NATURE,

– Apprécier si les demandes des sociétés N et Q NATURE respectent le principe de proportionnalité,

En tout état de cause, dans l’hypothèse où la demande de blocage serait jugée fondée,

– Enjoindre à la société BOUYGUES TELECOM de mettre en œuvre les mesures propres à empêcher l’accès de ses abonnés, situés sur le territoire français, aux noms de domaines précisément visés dans le dispositif des dernières conclusions des demandeurs dans un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir, et pour une durée de 18 mois,

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– Dire et juger que la société BOUYGUES TELECOM aura la faculté de choisir le type de blocage à mettre en œuvre,

– Dire et juger que les sociétés N et Q NATURE devront indiquer aux Conseils des fournisseurs d’accès à internet, dont la société BOUYGUES TELECOM, si les noms de domaines visés dans leurs écritures ne sont plus actifs afin que les mesures de blocage ordonnées les concernant puissent être levées au moment de la notification de la décision et pendant toute sa durée d’exécution,

– Dire et juger qu’en cas de réactivation de noms de domaines dont le blocage avait été levé, la demande de rétablissement de la mesure de blocage devra intervenir par notification entre Conseils des parties ;

– Débouter les sociétés N et Q NATURE de leur demande tendant à ce que les FAI les informe sans délai « de toutes informations utiles permettant d’apprécier les mesures mises en œuvre » s’agissant des modalités techniques des mesures de blocage ;

– Laisser à la charge des sociétés N et Q NATURE le paiement des entiers dépens de l’instance.

L’affaire a été plaidée le 18 novembre 2020 devant le tribunal statuant selon la procédure accélérée au fond, conformément aux dispositions de l’article 481-1, 4° du code de procédure civile, ayant été renvoyé devant la formation collégiale le jour même.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux écritures précitées des parties, pour l’exposé de leurs prétentions respectives et les moyens qui y ont été développés.

MOTIFS DE LA DECISION

L’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle dispose que « En présence d’une atteinte à un droit d’auteur ou à un droit voisin occasionnée par le contenu d’un service de communication au public en ligne, le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond peut ordonner à la demande des titulaires de droits sur les œuvres et objets protégés, de leurs ayants droit, des organismes de gestion collective régis par le titre II du livre III ou des organismes de défense professionnelle visés à l’article L. 331-1, toutes mesures propres à prévenir ou à faire cesser une telle atteinte à un droit d’auteur ou un droit voisin, à l’encontre de toute personne susceptible de contribuer à y remédier. La demande peut également être effectuée par le Centre national du cinéma et de l’image animée ».

Sur la titularité des droits sur les œuvres

Les sociétés N et Q NATURE rappellent que lors de l’action ayant donné lieu au jugement en la forme des référés du 7 mars 2019, elles avaient fait procéder par la société INCOPRO à des constatations de la reproduction massive et de la communication au public d’œuvres protégées sur les plateformes Sci-Hub et LibGen, laquelle avait utilisé une centaine d’œuvres publiées par les sociétés N et une centaine d’œuvres publiées par les sociétés

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Q NATURE pour procéder aux recherches sur les sites sci- hub.tw et libgen.io. Pour les autres noms de domaine Sci-Hub et LibGen, un échantillon restreint d’œuvres publiées sous le nom des éditeurs avait été utilisé, comme en attestaient les mentions de

“copyright” sur les œuvres téléchargées et jointes aux constats d’huissier.

Elles indiquent que, dans le cadre de la présente action, un échantillon réduit a été utilisé aux fins de procéder aux constatations de la poursuite de la reproduction et de la communication au public d’œuvres protégées sur les plateformes Sci-Hub et LibGen. Elles précisent que certaines œuvres sont publiées sous le nom de MACMILLAN PUBLISHERS LIMITED, éditeur désormais dénommé Q NATURE LIMITED, et sous le nom de Q INTERNATIONAL PUBLISHING AG, devenu Q NATURE SWITZERLANG AG.

Sur ce, En application de l’article L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle, la qualité d’auteur appartient sauf preuve contraire à celui ou à ceux sous le nom de qui l’œuvre est divulguée, et en l’absence de revendication d’une personne physique qui s’en prétendrait l’auteur, l’exploitation non équivoque de l’œuvre par une personne morale sous son nom fait présumer à l’égard des tiers recherchés pour contrefaçon que celle-ci est titulaire des droits patrimoniaux invoqués.

Pour bénéficier de cette présomption, il appartient à la personne morale d’identifier avec précision l’œuvre qu’elle revendique, de justifier de sa première commercialisation et d’établir que les caractéristiques de l’œuvre revendiquée sont identiques à celle dont la preuve de la commercialisation sous son nom est rapportée.

Les sociétés N et Q NATURE ont communiqué, à l’appui de leur demande, un rapport établi par la société INCOPRO en date du 16 juin 2020 concernant la plateforme Sci-Hub (pièces 28-1 et 28-2), un rapport de la même société en date du mois de juillet 2020 concernant la plateforme Libgen (pièces 29-1 et 29-2) ainsi que trois constats d’huissier de justice établis les 20 juin, 4 août et 8 novembre 2020 (pièces 30-1 à 30-3). Les recherches effectuées sur la plateforme Sci-Hub, accessible à partir du nom de domaine , pour établir la poursuite des actes de contrefaçon depuis la fin des mesures de blocage ordonnées par le jugement du 7 mars 2019, ont été faites sur la base d’un échantillon de dix titres qui auraient été publiés par les sociétés N et dix titres qui l’auraient été par les sociétés Q NATURE. Les captures d’écran reproduites en annexe 5 attestent de ce que ces œuvres ont effectivement été publiées sous le nom des demanderesses (ou pour celles publiées par les sociétés Q NATURE, sous celui de « Macmillan Publishers Limited, part of Q Nature »), lequel figure au bas de chaque œuvre échantillon accompagné de la mention « copyright » et de leur date de publication initiale. Les recherches menées sur cette plateforme à partir d’autres noms de domaines (annexe 6) confirment la publication des œuvres arguées de contrefaçon sous le nom des sociétés N et Q NATURE.

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Les recherches effectuées sur la plateforme LibGen à partir du nom de domaine (annexe 5) ainsi que d’autres noms de domaine LibGen (annexe 6) établissent également que l’échantillon de dix œuvres sélectionné pour chacun des éditeurs a été publié sous leur nom, ou pour celles publiées par les sociétés Q NATURE, sous celui de « Q INTERNATIONAL PUBLISHING AG ». Enfin, la publication des œuvres sous le nom des demanderesses est également établie par les constats d’huissier auxquels ont été annexés les articles téléchargés et comportant la mention « copyright » accolé au nom des sociétés N et Q NATURE et leur date de publication initiale.

Par conséquent, les demanderesses justifient de l’exploitation non équivoque des œuvres arguées de contrefaçon et bénéficient de ce fait de la présomption de titularité de droits d’auteur sur celles-ci. Elles seront donc déclarées recevables à agir.

Sur les atteintes au droit d’auteur

Les sociétés N et Q NATURE font valoir que les plateformes Sci-Hub et LibGen ont une activité structurellement contrefaisante en ce qu’elles proposent la reproduction et la représentation d’œuvres protégées sans savoir obtenu l’autorisation des éditeurs concernés, ce qui constitue des actes de contrefaçon. Les éléments versés aux débats (en particulier les rapports INCOPRO et les constats d’huissier) établissent la poursuite de la contrefaçon massive mise en œuvre par ces plateformes Sci-Hub et LibGen, déjà constatée dans le cadre de l’action ayant donné lieu à la décision du 7 mars 2019, de nombreuses œuvres dont les demanderesses sont titulaires étant proposées en téléchargement via les 278 noms de domaine et adresses permettant d’accéder aux plateformes Sci-Hub et LibGen listés.

Sur ce, L’article L. 122-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que « Le droit d’exploitation appartenant à l’auteur comprend le droit de représentation et le droit de reproduction ». La représentation consiste, selon l’article L. 122-2, 2° du même code, dans la communication de l’œuvre au public par un procédé quelconque, et notamment par télédiffusion, à savoir la diffusion par tout procédé de télécommunication de sons, d’images, de documents, de données et de messages de toute nature. La reproduction est quant à elle définie par l’article L.122-3 du même code comme la fixation matérielle de l’œuvre par tous procédés qui permettent de la communiquer au public d’une manière indirecte. Enfin, conformément aux dispositions de l’article L. 122-4 de ce code, « Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite (…) ».

Les mesures de blocage, que seule l’autorité judiciaire peut prononcer, supposent que soit caractérisée, au préalable, une atteinte aux droits d’auteur, notamment aux droits de représentation et de reproduction.

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En l’espèce, il ressort des rapports établis par la société INCOPRO ainsi que des trois constats d’huissiers produits par les demanderesses qu’un échantillon des œuvres dont elles sont titulaires est disponible à la lecture et en téléchargement, sans leur autorisation, sur les plateformes Sci-Hub et LibGen, lesquelles revendiquent ouvertement leur statut de sites pirates, par le biais d’adresses et noms de domaines principaux ayant fait l’objet de mesures de blocage en application de la décision du 7 mars 2019 mais demeurant toujours actifs, de noms de domaine/sites miroirs identifiés postérieurement à la décision du 7 mars 2019 et de noms de domaine redirigeant vers l’un des principaux noms de domaine Sci-Hub ou LibGen via un « code 301 » qui, lorsqu’une page a été définitivement déplacée vers un autre emplacement, réoriente automatiquement les visiteurs vers la nouvelle localisation du contenu recherché sans qu’il ait besoin d’effectuer une nouvelle opération. Les sociétés N et Q NATURE ont synthétisé dans leur pièce 27-2 les constatations effectuées pour chacun des noms de domaine litigieux à l’égard desquels elles sollicitent la mise en œuvre d’une mesure de blocage.

Les demanderesses établissent ainsi que les sites litigieux permettent la représentation et la reproduction des œuvres litigieuses sans autorisation des titulaires de droits d’auteur, ce qui caractérise des actes de contrefaçon au regard des dispositions de l’article L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle.

Les noms de domaine en cause sont accessibles en France aux personnes disposant d’un abonnement auprès d’un fournisseur d’accès à internet, comme l’a constaté à trois reprises un huissier de justice, mais aussi, par l’utilisation d’un VPN, depuis une connexion localisée en France comme l’indiquent les rapports de la société INCOPRO.

Dès lors, les sociétés N et Q NATURE sont bien fondées à demander au tribunal d’ordonner des mesures propres à prévenir ou à faire cesser les atteintes à leurs droits d’auteur conformément aux dispositions de l’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle.

Sur les mesures de blocage

Les sociétés N et Q NATURE sollicitent qu’il soit ordonné aux fournisseurs d’accès internet en la cause de mettre en œuvre ou de faire mettre en œuvre, à leurs frais, dans le délai de 15 jours calendaires à compter de la signification de la présente décision et pendant une durée de 18 mois à compter de la mise en place des mesures, toutes mesures propres à empêcher l’accès, à partir du territoire français, y compris dans les collectivités, départements et régions d’outre-mer, ainsi que dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, et/ou par leurs abonnés à raison d’un contrat souscrit sur ce territoire, par tout moyen efficace et notamment par le blocage de noms de domaine et de sous-domaines, aux sites accessibles via 278 noms de domaine et sous-domaines qu’elles ont recensés dans un tableau communiqué aux défenderesses.

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La SA ORANGE fait valoir que la formulation des demandes de blocage doit permettre aux fournisseurs d’accès de choisir les modalités techniques de blocage et sollicite du tribunal qu’il enjoigne toutes mesures propres à empêcher l’accès aux noms de domaine litigieux visés dans les conclusions des demanderesses par tout moyen efficace et notamment par le blocage des noms de domaine et sous-domaines. De plus, elle indique ne pouvoir bloquer d’autres sites et noms de domaine que ceux mentionnés dans le dispositif des conclusions des demanderesses, ni surveiller activement le réseau internet afin de repérer l’apparition de toute nouvelle possibilité d’accéder aux différents sites litigieux en cause (par un nouveau site, par un site miroir, par un proxy, etc.), autrement que par le biais des noms de domaine précisément listés au sein du dispositif des conclusions des demandeurs. Une mesure de blocage imprécise violerait en effet le principe de proportionnalité, la conciliation des droits et des libertés fondamentaux et l’absence d’obligation de surveillance des fournisseurs d’accès à internet. Enfin, elle demande au tribunal de limiter à 18 mois la durée des mesures de blocage, lesquelles ne devront être mises en œuvre que dans un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement et sollicite d’être informée lorsque des noms de domaine sont devenus inactifs afin que la mesure de blocage afférente puisse être levée.

La SAS FREE indique que dans l’hypothèse où le tribunal ordonnerait le blocage des 278 noms de domaine litigieux, tels que recensés par les demanderesses dans le fichier qu’elles ont communiqué par lettre officielle du 16 novembre 2018, elle mettra en œuvre la mesure en utilisant la technique qui lui paraîtra la plus efficiente par rapport à la structure de son réseau et de ses équipements de communication, conformément à ce qu’a jugé la cour de justice de l’Union Européenne dans sa décision du 27 mars 2014, affaire C-314/12, point 52. Elle estime qu’un délai, qui ne saurait être inférieur à deux semaines, doit lui être laissé à compter de la signification de la décision à intervenir et ne s’oppose pas à ce que le blocage soit ordonné pour une durée de 18 mois, s’agissant d’atteintes récurrentes et massives. Elle demande qu’il soit fait obligation aux demandeurs de l’informer immédiatement dès qu’un nom de domaine, objet d’un blocage, ne serait plus opérationnel, pour mettre un terme à la mesure. Elle fait part de ses réserves et de son désaccord à ce que le coût des blocages soit imputé aux fournisseurs d’accès.

Les sociétés R et R S rappellent que dans les cas où il parait possible d’obtenir de l’éditeur, de l’hébergeur ou de prestataires tiers qu’ils mettent en place des mesures permettant de faire cesser l’illicéité alléguée, cette voie doit être privilégiée, les mesures de blocage ne pouvant être ordonnées à un fournisseur d’accès internet qu’en dernier recours. Elles soulignent que les sociétés N et Q NATURE ne justifient pas en l’état de toutes les démarches entreprises à l’égard de l’exploitant des sites concernés, de leurs hébergeurs ou de prestataires tiers. Elles font valoir que seul le blocage des noms de domaine, et non celui d’adresses URL, peut être ordonné, que les fournisseurs d’accès internet doivent conserver la liberté d’implémenter la mesure propre à prévenir l’atteinte qui présentera pour lui le moins d’inconvénients au regard de ses impératifs techniques et confirment que le délai de 15 jours pour mettre en œuvre toute mesure qui serait prononcée est approprié, en

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application du principe de proportionnalité. Elles disent ne pas être en mesure d’implémenter des mesures de blocage d’une durée différente et demandent par conséquent que le point de départ du calcul de la durée des mesures de blocage soit fixé à la date de la présente décision.

La SA BOUYGUES TELECOM expose que chacun des réseaux étant bâti différemment, chaque fournisseur d’accès à internet doit avoir le choix de la mesure de blocage à mettre en œuvre afin de protéger l’équilibre de son réseau et ne peut être tenu de communiquer une quelconque information relatives aux mesures de blocage mises en œuvre. Elle demande donc au tribunal de permettre aux fournisseurs d’accès internet de mettre en œuvre la mesure de blocage de leur choix et ne s’oppose pas à ce que cette mise en œuvre intervienne 15 jours après la signification du jugement à intervenir, la notification devant être effectuée entre conseils des parties, pour une durée de 18 mois et exclusivement pour les 278 noms de domaine listés dans le dispositif des écritures des demanderesses.

Sur ce, En ce qu’elles offrent à leurs abonnés un accès à internet, les défenderesses permettent, par la seule mise à disposition des moyens techniques d’un service de communication électronique au public en ligne, l’accès aux sites litigieux par leurs abonnés et ainsi aux opérateurs des sites en cause de proposer la lecture ou le téléchargement d’articles et d’ouvrages scientifiques sans l’autorisation des sociétés N et Q NATURE. Ces fournisseurs d’accès à internet, qui ont la qualité d’intermédiaires, au sens de l’article 8 § 3 de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001, sont ainsi susceptibles de contribuer à remédier aux atteintes susvisées, en ce qu’ils ont la possibilité d’empêcher l’accès par leurs abonnés aux contenus proposés par les sites en cause.

L’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle ne subordonne pas sa mise en œuvre à la justification d’une action préalable infructueuse des titulaires des droits d’auteur envers les éditeurs, les hébergeurs des sites litigieux et les bureaux d’enregistrement des noms de domaine. Dès lors, il ne peut être reproché aux sociétés N et Q NATURE de ne pas avoir entrepris de démarches auprès de ceux-ci, ce d’autant plus que les plateformes Sci-Hub et LibGen se revendiquent comme des sites pirates ne respectant délibérément pas les droits de propriété intellectuelle des éditeurs d’articles et d’ouvrages scientifiques et que leur fondatrice, précédemment condamnée, s’est targuée de poursuivre ses agissements.

Il incombe à la juridiction saisie d’une demande d’injonction, sur le fondement de l’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle, de ne prononcer que les mesures strictement nécessaires à la préservation des droits en cause (décision n° 2009-580 DC du 10 juin 2009 du Conseil constitutionnel, considérant 38) et d’assurer un juste équilibre entre les droits de propriété intellectuelle dont jouissent les titulaires de droits d’auteur et de droits voisins, protégés, notamment, par l’article 17, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et la liberté d’entreprise dont bénéficient les opérateurs économiques, tels que les fournisseurs d’accès et d’hébergement, consacrée, notamment, par l’article 16 de ladite Charte (arrêt de la CJUE du 24 novembre 2011, Scarlet Extended, C-70/10, point 46 ; arrêt de la CJUE du 27 mars 2014, UPC Telekabel Wien, C-314/12, point 47).

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En l’espèce, les mesures de blocage sollicitées sont de nature à remédier efficacement aux actes de contrefaçon invoqués par les demanderesses en ce qu’elles auront pour effet, pendant une durée de 18 mois qui apparaît adaptée au caractère massif et récurrent des atteintes portées aux droits d’auteur des sociétés N et Q NATURE, qui se poursuivent malgré le jugement du 7 mars 2019 ayant déjà ordonné des mesures similaires, d’empêcher ou à tout le moins de rendre plus difficile les consultations non autorisées des œuvres protégées et ainsi décourager les utilisateurs des services des fournisseurs d’accès à internet. Cette durée commencera à courir au plus tard dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement, conformément aux demandes des parties telles que présentées dans le dispositif de leurs conclusions.

La nature de ces mesures, qui s’appliquent exclusivement aux 278 noms de domaines et de sous-domaines listés dans les dernières écritures des demanderesses et repris ci-après dans le dispositif, sera laissée à l’appréciation des défenderesses, afin qu’elles puissent déterminer celles qui sont les plus adaptées aux réseaux qu’elles exploitent. Elles seront tenues d’informer les demanderesses de la réalisation de ces mesures, à l’exception des informations relatives aux modalités techniques des dites mesures.

Les demanderesses devront pour leur part indiquer aux fournisseurs d’accès à internet les noms de domaine dont elles auraient appris la fermeture ou la disparition, afin d’éviter des coûts de blocage inutiles. En cas de réactivation d’un nom de domaine pour lequel les fournisseurs d’accès à internet auraient levé les mesures de blocage à la suite d’une notification adressée par les sociétés N et Q NATURE, les sociétés ORANGE, FREE, R, R S et BOUYGUES TELECOM devront rétablir les mesures propres à empêcher l’accès, à partir du territoire français et/ou par leurs abonnés à raison d’un contrat souscrit sur ce territoire, au nom de domaine concerné, sans délai et au plus tard dans les 15 jours calendaires à compter de la réception d’une notification adressée par les sociétés demanderesses, pour la durée restant à courir en application de la présente décision.

En cas d’évolution du litige, notamment par la modification du nom de domaine ou des chemins d’accès et pour éviter les situations de surblocage, les parties pourront en référer à la présente juridiction, statuant selon la procédure accélérée au fond, aux fins d’actualisation des mesures ordonnées.

Enfin, les dispositions de la directive 2000/31/CE précitée, transposées par la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, ne s’opposent pas à ce que le coût des mesures strictement nécessaires à la préservation des droits d’auteur et des droits voisins, ordonnées sur le fondement de l’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle, soit supporté par les intermédiaires techniques, quand bien même ces mesures sont susceptibles de représenter pour eux un coût important. Dès lors, les défenderesses conserveront à leur charge le coût des mesures de blocage ordonnées par le tribunal.

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Décision du 18 Décembre 2020 3ème chambre 3ème section N° RG 20/10567 N° Portalis 352J-W-B7E-CTCI3

Sur les autres demandes

En application des dispositions de l’article 481-1, 6° du code de procédure civile, le présent jugement est exécutoire de droit à titre provisionnel. Il n’existe en l’espèce aucun motif justifiant d’écarter l’exécution provisoire.

Chacune des parties en demande ou en défense ne succombant pas totalement dans ses prétentions, il convient de laisser à leur charge les frais et dépens exposés.

PAR CES MOTIFS Le tribunal, statuant publiquement en procédure accélérée au fond, par jugement contradictoire et en premier ressort, mis à disposition au greffe,

– Dit que les sociétés N MASSON SAS, N B.V., N O., et N LIMITED et les sociétés Q NATURE LIMITED, Q NATURE SWITZERLANG AG et Q W AA GMBH démontrent suffisamment que les plateformes Sci-Hub et LibGen offrent la reproduction et la représentation d’articles et d’ouvrages scientifiques sans le consentement des titulaires de droits d’auteur ce qui constitue une atteinte telle que prévue à l’article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle,

– Ordonne à la SA ORANGE, la SA BOUYGUES TELECOM, la SAS FREE, la SA R et la SAS R S de mettre en œuvre et/ou de faire mettre en œuvre toutes mesures propres à empêcher l’accès, à partir du territoire français, y compris dans les collectivités, départements et régions d’outrer-mer, ainsi que dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, et/ou par leurs abonnés à raison d’un contrat souscrit sur ce territoire, par tout moyen efficace et notamment par le blocage de noms de domaine et de sous-domaines, aux sites accessibles via les 278 noms de domaine et sous-domaines figurant dans le tableau annexé au présent jugement etfaisant partie de la minute, au plus tard dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent jugement et pendant une durée de 18 mois à compter de la mise en œuvre des mesures ordonnées,

– Dit que la SA ORANGE, la SA BOUYGUES TÉLÉCOM, la SAS FREE, la SA R et la SAS R S devront informer les éditeurs de la réalisation de ces mesures, à l’exception des informations relatives à leurs modalités techniques,

– Dit que les sociétés N MASSON SAS, N B.V., N O., et N LIMITED et les sociétés Q NATURE LIMITED, Q NATURE SWITZERLANG AG et Q W AA GMBH devront indiquer à la SA ORANGE, la SA BOUYGUES TELECOM, la SAS FREE, la SA R et la SAS R S les noms de domaine dont elles auraient appris la fermeture ou la disparition, afin d’éviter des coûts de blocage inutiles,

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Décision du 18 Décembre 2020 3ème chambre 3ème section N° RG 20/10567 N° Portalis 352J-W-B7E-CTCI3

– Dit qu’en cas de réactivation d’un nom de domaine pour lequel les fournisseurs d’accès à internet auraient levé les mesures de blocage à la suite d’une notification adressée par les sociétés N MASSON SAS, N B.V., N O., et N LIMITED et les sociétés Q NATURE LIMITED, Q NATURE SWITZERLANG AG et Q W AA GMBH, la SA ORANGE, la SA BOUYGUES TELECOM, la SAS FREE, la SA R et la SAS R S devront rétablir les mesures propres à empêcher l’accès, à partir du territoire français et/ou par leurs abonnés à raison d’un contrat souscrit sur ce territoire, au nom de domaine concerné, sans délai et au plus tard dans les 15 jours calendaires à compter de la réception d’une notification adressée par les sociétés demanderesses, pour la durée restant à courir en application du présent jugement,

– Dit qu’en cas d’une évolution du litige et pour éviter les situations de sur-blocage, notamment par la suppression des contenus contrefaisants constatés ou la disparition des sites visés, ou par la modification des noms de domaines ou chemins d’accès, les sociétés N MASSON SAS, N B.V., N O., et N LIMITED et les sociétés Q NATURE LIMITED, Q NATURE SWITZERLANG AG et Q W AA GMBH pourront en référer à la présente juridiction statuant en procédure accélérée au fond, en mettant en cause par voie d’assignation les parties présentes à cette instance ou certaines d’entre elles, afin que l’actualisation des mesures soit ordonnée,

– Dit que le coût de la mise en œuvre des mesures ordonnées restera à la charge de la SA ORANGE, la SA BOUYGUES TELECOM, la SAS FREE, la SA R et la SAS R S,

– Rappelle que le présent jugement est exécutoire de droit par provision,

– Dit que chacune des parties conservera à sa charge les frais et dépens qu’elle a exposés.

Fait et jugé à Paris le 18 décembre 2020

Le Greffier Le Président

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Tribunal Judiciaire de Paris, 18 décembre 2020, n° 20/10567