Tribunal judiciaire de Paris, 31 mars 2023, 20/02638

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

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Sur la décision

Référence :
TJ Paris, ct0087, 31 mars 2023, n° 20/02638
Numéro(s) : 20/02638
Importance : Inédit
Identifiant Légifrance : JURITEXT000047636325

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre
2ème section

No RG 20/02638
No Portalis 352J-W-B7E-CR3GR

No MINUTE :

Assignation du :
30 Décembre 2019

JUGEMENT
rendu le 31 Mars 2023
DEMANDEURS

Monsieur [Z] [H]
[Adresse 6]
[Localité 1] (ALLEMAGNE)

S.A.R.L. LEGI GmbH
[Adresse 4]
[Localité 3] (ALLEMAGNE)

représentés par Maître Dariusz SZLEPER de l’AARPI SZLEPER HENRY Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R0017

DÉFENDERESSE

S.A.S. SETP
[Adresse 5]
[Localité 2]

représentée par Maître Thi my hanh NGO-FOLLIOT, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #B0853

Copies délivrées le :

— Maître SZLEPER #R17 – exécutoire
- Maître NGO-FOLLIOT #B853 – certifié conformeet par Maître Vincent BERTHAT, avocat au barreau de Dijon, avocat plaidant, COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Irène BENAC, Vice-Présidente
Monsieur Arthur COURILLON-HAVY, Juge
Madame Linda BOUDOUR, Juge

assisté de Quentin CURABET, Greffier

DÉBATS

A l’audience du 21 Octobre 2022 présidée par Irène BENAC tenue en audience publique avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe, en dernier lieu, le 31 Mars 2023.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

1. M. [Z] [H] et la société de droit allemand Legi reprochent à la société SETP de fabriquer et commercialiser des gabions en contrefaçon de plusieurs revendications de la partie française du brevet européen EP 1 186 719 (le brevet en cause, ou le brevet), dont ils sont co-titulaires ; la société SETP invoque reconventionnellement la nullité de ces revendications et en conteste la mise en oeuvre par son produit, dénommé Stonebox.

2. Un gabion est un caisson (un panier ou une cage) empli de sable ou de cailloux, servant à construire des quais, des ouvrages de soutènement, notamment dans les ports ou le long des voies d’eau.

3. Le brevet EP 1 186 719, qui s’intitule Gabion, a été demandé le 7 septembre 2001, sous priorité d’un modèle d’utilité allemand du 8 septembre 2000 ; il a été délivré le 17 novembre 2004, et a expiré le 7 septembre 2021.

4. Il a fait l’objet d’une procédure d’opposition, mais a été maintenu. Il a également fait l’objet de plusieurs actions en nullité en France et en Allemagne. En France, une action en contrefaçon et une demande reconventionnelle en nullité devant le tribunal de grande instance de Lyon se sont résolues en 2012 par une transaction. En Allemagne, le brevet a été partiellement annulé par le tribunal fédéral des brevets (Bundespatentgericht) le 20 février 2011 (10 Ni 8/10) ; cette version modifiée du brevet a à nouveau été jugée valide dans une autre procédure par la cour fédérale de justice de ce pays (Bundesgerichtshof) le 11 aout 2015 (X ZR 83/13). Enfin, la partie française du brevet a été limitée en 2019 à la demande des titulaires.

5. La société SETP a été sous-licenciée du brevet de 2005 à 2009. M. [H] et la société Legi se sont ensuite plaints d’un nouveau système de gabion commercialisé par la société SETP, qui leur a finalement paru conforme. Ils lui reprochent désormais d’avoir ultérieurement modifié son produit Stonebox, d’une façon qui selon eux met en oeuvre l’invention.

6. Après une saisie-contrefaçon le 4 décembre 2019, ils ont assigné la société SETP devant ce tribunal le 30 décembre 2019. Ils ont parallèlement demandé au juge des référés une interdiction provisoire qui a été refusée, ce qu’a confirmé la cour d’appel. L’instruction a été close le 19 mai 2022.

7. Dans leurs dernières conclusions du 17 mai 2022, la société Legi et M. [H] résistent aux demandes reconventionnelles et, invoquant la contrefaçon des revendications 1, 5, 6, 7, 9, 10 et 14 du brevet, demandent avec bénéfice de l’exécution provisoire de condamner la défenderesse à leur payer une indemnité de 50 000 euros à chacun pour l’atteinte à la valeur du brevet, une provision de 723 957,79 euros pour le préjudice commercial, ainsi qu’une expertise pour apprécier ce préjudice, ou subsidiairement un droit d’information sous astreinte, la publication de la décision sous astreinte, outre 45 000 euros à chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens (à recouvrer par leur avocat).

8. Dans ses dernières conclusions du 11 mai 2022, la société SETP résiste aux demandes, soulevant également l’irrecevabilité de la demande de publication, et demande reconventionnellement la nullité des revendications qui lui sont opposées, 45 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens (à recouvrer par son avocat).

9. Contre la validité du brevet, la société SETP estime qu’il n’est pas nouveau ni inventif au regard de trois brevets antérieurs relatifs à des gabions immergés, invoque également l’absence d’application industrielle qu’elle associe à l’insuffisance de description, au motif que, selon elle, ce n’est pas la caractéristique essentielle de la revendication 1 qui résout le problème technique ; elle évoque encore en passant le fait que le brevet s’étendrait au-delà de la demande initialement déposée. En réponse, les brevetés contestent le défaut de nouveauté et d’activité inventive en faisant valoir que les antériorités ne divulguent notamment pas la caractéristique essentielle de la revendication 1, et ne concernent pas le même problème technique ; ils réfutent également explicitement l’absence d’application industrielle et l’extension indue.

10. Sur la contrefaçon, la société SETP conteste la reproduction de plusieurs caractéristiques des revendications du brevet, en se prévalant notamment de l’analyse menée par le juge des référés en première instance et en appel, au regard de la portée de ces revendications.

MOTIVATION

I . Demande reconventionnelle en nullité du brevet

1 . Cadre juridique et portée du brevet

a. Cadre juridique

11. L’article L. 614-12 du code de la propriété intellectuelle prévoit que la nullité d’un brevet européen est prononcée en ce qui concerne la France par décision de justice pour l’un quelconque des motifs visés à l’article 138, paragraphe 1, de la Convention de Munich sur le brevet européen (la Convention de Munich), lequel est ainsi rédigé :

« (1) Sous réserve de l’article 139, le brevet européen ne peut être déclaré nul, avec effet pour un État contractant, que si :

a) l’objet du brevet européen n’est pas brevetable en vertu des articles 52 à 57 ;

b) le brevet européen n’expose pas l’invention de façon suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter ;

c) l’objet du brevet européen s’étend au-delà du contenu de la demande telle qu’elle a été déposée ou, lorsque le brevet a été délivré sur la base d’une demande divisionnaire ou d’une nouvelle demande déposée en vertu de l’article 61, si l’objet du brevet s’étend au-delà du contenu de la demande antérieure telle qu’elle a été déposée ;

d) la protection conférée par le brevet européen a été étendue ;

(…). »

b. Présentation de l’invention

12. La description du brevet en cause enseigne que les gabions, ou « paniers à pierre », connus de l’art antérieur sont habituellement amenés au chantier pliés ou à plat, et remplis directement à leur futur emplacement, ce qui peut être pénible [0004] ; et qu’on connait déjà un moyen pour transporter et positionner un gabion pré-rempli, en le fixant à plusieurs cordes ou chaines, dont la fixation et la libération nécessite du temps et de la main-d’oeuvre [0005], ou encore en portant le gabion par les mailles situées aux coins du couvercle [0006].

13. L’invention se propose alors de faciliter et accélérer l’utilisation des gabions et de leur trouver de nouvelles utilisations, grâce à une anse de soulèvement reliée fermement au fond du gabion [0008] [0009], et plus généralement par un gabion qui conserve à l’état rempli sa forme lorsqu’il est soulevé, transporté sur le chantier et mis en place [0001]. La description précise enfin que les avantages de l’invention résident essentiellement dans le fait qu’elle permet de fournir au chantier des gabions prêts à être installés et de les mettre en place [0031].

14. Le brevet, tel que limité, comprend 14 revendications. La première, dont les 13 autres sont dépendantes, telle que limitée, est identique à la revendication 1 qui a été approuvée après nullité partielle par les juridictions allemandes. Elle est ainsi rédigée :

1. Gabion constitué d’un élément plan formant le fond, quatre éléments plans formant les faces latérales et un élément plan formant la surface supérieure, les éléments plans étant reliés les uns aux autres, lequel gabion conserve à l’état rempli sa forme lorsqu’il est soulevé, transporté sur le chantier et mis en place sur le chantier, caractérisé en ce qu’une anse de soulèvement est prévue pour soulever le gabion, cette anse étant reliée fermement au fond du gabion.

15. Les parties s’accordent à considérer l’anse de soulèvement fermement reliée au fond du gabion comme la caractéristique essentielle de cette revendication.

c. Définition de certaines notions

16. Les parties s’opposent (plus ou moins explicitement) sur le sens et la portée de deux caractéristiques de la revendication 1 : l’anse de levage, et le fait qu’elle soit « reliée fermement au fond ». Elles en tirent des conséquences divergentes tant pour la nullité que pour la contrefaçon, ce qui impose une définition uniforme et cohérente.

17. En application de l’article 69 de la Convention de Munich, l’étendue de la protection conférée par le brevet européen est déterminée par les revendications, que la description et les dessins servent à interpréter. L’article 1 de son protocole interprétatif précise que ce texte ne doit pas être lu comme signifiant que la description et les dessins servent uniquement à dissiper les ambigüités que pourraient receler les revendications, ni comme réservant à celles-ci le rôle de lignes directrices, mais doit conduire à une position intermédiaire qui assure à la fois une protection équitable au demandeur et un degré raisonnable de certitude aux tiers.

Anse de levage

18. L’anse de levage, selon la société SETP, doit être entendue strictement en référence aux figures du brevet, qui ne montrent qu’une tige cintrée en U ou en V inversé. C’est en ce sens également que l’a entendue l’ordonnance du juge des référés (p. 11), « à savoir un élément saillant recourbé en arc ou en U inversé », et qui a retenu que le levage par des tiges ou cordes saillantes munies de boucles (ce que les parties appellent élingue) n’utilisait pas une « anse » au sens du brevet.

19. Toutefois, rien n’indique, dans le brevet, qu’il faille donner au terme anse une définition plus restrictive que son sens commun ; la description n’apporte au contraire aucune définition spécifique de cette notion, et les détails de forme que peut prendre cette anse ne sont donnés que comme variantes de l’invention, comme l’indique le paragraphe [0015] que cite la société SETP elle-même (ses conclusions p. 24), et comme le confirment les revendications, qui, après la revendication 1 qui mentionne seulement une anse de levage, précisent aux revendications 2 à 4 la forme que peut, éventuellement, prendre cette anse ; quant aux illustrations, elles ne sauraient à elles seules limiter le sens des notions revendiquées. Or, comme le soulèvent la société Legi et M. [H], les dictionnaires Larousse et Robert définissent l’anse respectivement comme « une partie recourbée en arc, en anneau etc., par laquelle on prend certains récipients » et « la partie recourbée et saillante de certains ustensiles permettant de les saisir » ; il faut alors retenir de cette définition que l’anse de levage est un dispositif courbé, en arc ou en anneau, permettant à un engin de levage de soulever le gabion.

20. Ainsi, au sens du brevet en cause, une anse de levage est un dispositif courbé permettant à un engin de levage de soulever le gabion.

Reliée au fond du gabion

21. L’expression « reliée fermement au fond » est vague : elle n’indique pas par quel moyen s’opère le lien entre l’anse de levage et le fond, ni si ce lien est direct ou indirect. Le choix d’un terme vague (reliée) n’est pas neutre et il faut en tenir compte. Son sens est notamment plus général que celui des mots attaché ou fixé. Le lien exigé par cette expression n’est donc pas nécessairement une connexion physique directe, c’est-à-dire qu’il peut passer par plusieurs éléments matériels transmettant la force de levée de l’un à l’autre (comme dans une chaîne, par exemple).

22. Il faut toutefois tenir compte également du contexte dans lequel est employée cette expression, et en particulier des exemples antérieurs dont le brevet entend explicitement se départir : la description (rappelée ci-dessus au point 12) cite uniquement des méthodes de levage consistant à exercer la force sur la paroi supérieure ou les coins supérieurs, donc les parois supérieures et latérales. Il ressort ainsi de l’ensemble du brevet que l’invention réside dans la transmission de la force de levage à la paroi du fond sans l’intermédiaire d’une autre paroi.

23. Ainsi, au sens du brevet, l’expression reliée au fond veut dire que la force exercée sur l’anse de levage est transmise directement à la paroi du fond du gabion. Cette transmission peut passer par plusieurs éléments attachés les uns aux autres dès lors que c’est au fond, et non au contenu ou aux autres parois, que la force est transmise en premier lieu.

Reliée fermement

24. Enfin, l’adverbe fermement, qui n’est pas expliqué dans la description, exprime simplement une certaine solidité du lien lui-même, sans pour autant impliquer une résistance extrême. Il ne s’agit pas nécessairement d’un lien inamovible.

2 . Extension au-delà du contenu de la demande

Moyens des parties

25. La société SETP soutient que la demande de brevet ne précisait pas que l’anse était fixée « au fond » du gabion, et que cet ajout en cours de procédure d’examen constitue donc une extension de l’objet du brevet ou de la protection. La société Legi et M. [H] répondent que comme l’a jugé la cour fédérale allemande, cette caractéristique ressortait des illustrations.

Réponse du tribunal

26. Comme le soulèvent la société Legi et M. [H], le fait que ce soit « au fond » du gabion qu’est reliée l’anse de levage n’est certes pas écrit dans la description ou dans les revendications de la demande initiale, mais cela ressort clairement et sans ambigüité de sa figure 1 a (pièce Legi no38), représentée ci-dessous, où l’on voit que la paroi du gabion à laquelle est reliée l’anse est celle du fond.

27. Le moyen tiré de l’extension de l’objet du brevet ou de la protection est donc infondé.

3 . Application industrielle et suffisance de description

Moyens des parties

28. La société SETP, invoquant l’article 57 et l’article 138, a) de la Convention de Munich en ce qu’ils conditionnent la brevetabilité à la possibilité d’une application industrielle, soutient que ce qui permet au gabion selon le brevet en cause de conserver sa forme lorsqu’il est transporté n’est pas l’anse reliée au fond, mais la structure et la robustesse du gabion lui-même ; comme pour un sac, que l’on porte par en-dessous mais qui s’affaisse et se déforme s’il n’est pas robuste lui-même. Ce serait au demeurant ce qu’indiquerait la description du brevet. Elle intègre ces arguments dans une partie intitulée « Application industrielle et insuffisance de description ».

29. Les titulaires du brevet répondent qu’en application de l’article 57 de la Convention de Munich, il suffit que l’objet de l’invention puisse être fabriqué ou utilisé, ce qui est le cas ici selon eux ; qu’à supposer que l’anse reliée fermement au fond du gabion ne suffise pas à préserver sa forme lors du soulèvement, elle n’en produit pas moins un effet technique ; qu’au demeurant, ce que critique la demanderesse à la nullité n’est pas réellement une absence d’application industrielle, mais une supposée absence de résultat industriel, ou technique, c’est-à-dire, expliquent-ils, une absence d’intérêt pratique, ce qui n’est pas une condition de brevetabilité. Enfin, ils font valoir que si l’anse fermement reliée au fond n’était pas le moyen technique permettant d’atteindre le résultat revendiqué, la société SETP n’aurait pas eu besoin elle-même de le reproduire servilement.

Réponse du tribunal

30. Aux termes des articles 52 et 57 de la Convention de Munich, l’invention, pour être brevetable, doit être susceptible d’application industrielle, c’est-à-dire que son objet puisse être fabriqué ou utilisé dans tout genre d’industrie, y compris l’agriculture.

31. Par ailleurs, l’article 138, point c) de la convention, précité, prévoit qu’est déclaré nul le brevet européen qui n’expose pas l’invention de façon suffisamment claire et complète pour qu’un homme du métier puisse l’exécuter.

32. Contrairement à ce que soutient la demanderesse à la nullité, le fait que le résultat technique revendiqué ne soit pas atteint par le moyen technique revendiqué ne caractérise pas une impossibilité d’utiliser l’objet de l’invention dans l’industrie. Ce peut être en revanche un motif d’insuffisance de description si, en mettant en oeuvre les enseignements du brevet, l’homme du métier n’est pas en mesure de reproduire l’invention.

33. Cependant, le fait que d’autres moyens techniques contribuent au même effet technique, tel que la robustesse du gabion pour éviter sa déformation, n’est pas une preuve de ce que cet effet ne puisse être atteint en suivant les enseignements du brevet. Au demeurant, et comme le soulève la demanderesse à la nullité elle-même, la description du brevet enseigne plusieurs moyens pour éviter la déformation du gabion plein lorsqu’il est transporté (sa construction et le compactage du contenu, aux paragraphes [0011] et [0034]), moyens dont elle affirme que ce sont eux qui assurent l’effet tenant au maintien de la forme. Il n’est donc, en définitive, pas contesté que l’homme du métier, à la lecture du brevet, est en mesure de fabriquer un gabion qui conserve à l’état rempli sa forme lorsqu’il est soulevé, transporté sur le chantier et mis en place sur le chantier, et donc de mettre en oeuvre l’invention.

34. La nullité ne peut donc pas être prononcée de ces chefs.

4 . Nouveauté et activité inventive

35. Les documents de l’art intérieur invoqués par les parties sont les trois brevets ou demandes de brevets suivants ; elles les ont désignés non pas par le nom de leur inventeur, mais par le nom du déposant ; pour la clarté du raisonnement, la même désignation est adoptée ci-après. Il s’agit de :

— la demande de brevet européen EP 0 106 745 A2, intitulée Procédé et installation de pose d’un tapis de protection sur un fond immergé, publiée le 25 avril 1984 (pièce SETP no14), ci-après le document Citra ;

— le brevet des États-Unis US 4 477 206, intitulé Élément flexible en forme de matelas utilisable comme ballast pour immobiliser et protéger des pipelines sous-marins, délivré le 16 octobre 1984 (pièce SETP no9), ci-après le document Maccaferri ;

— le brevet européen EP 0 881 334 B1, intitulé Méthode de fabrication d’un objet flexible type matelas, pour la protection, le lestage et le support d’un conduit ou câble sous-marin, dont la demande a été publiée le 2 décembre 1998 (pièces SETP no13 et 13 bis), ci-après le document Sarti.

Moyens des parties

36. Les parties ont regroupé en un ensemble unique leurs développements relatifs à la nouveauté et l’activité inventive.

37. La société SETP soutient à titre liminaire que l’homme du métier, qu’elle définit à l’instar du juge des référés comme un ingénieur dans le domaine du génie civil, savait déjà transporter un gabion sans le déformer, comme le démontrerait l’issue du procès à Lyon contre la société Maccaferri, la transaction conclue avec celle-ci l’autorisant à exploiter le brevet et même à en concéder des sous-licences, jusqu’à son expiration, sans aucune des contreparties usuelles hormis un prix dont la mention est occultée dans le document communiqué ici par les titulaires du brevet.

38. Elle estime aussi, en substance, que le problème technique n’est pas d’empêcher la déformation du gabion mais de rendre plus commode sa manutention ; et que le mode de levage par le fond était connu (notamment par l’usage de porter un sac lourd par en-dessous).

39. Elle estime en particulier, sur le document Citra, que :
- il contient des « éléments d’ancrage » formant des anses, qui sont reliés fermement au fond en ce qu’ils contiennent une partie horizontale servant à les fixer au fond du gabion, d’abord provisoirement, puis les pierres qui remplissent le gabion assurent leur fixation définitive ; c’est d’ailleurs par ce même système où les pierres qui se bloquent entre elles et contre les parois assurent la fixation définitive du moyen de soulèvement que son propre produit Stonebox est conçu, précise-t-elle ;
- les gabions y sont transportés, d’abord au sec avant d’être immergés, et sans devoir se déformer, car ils doivent former ensemble un tapis pour recouvrir un ouvrage, ce qui serait impossible s’ils étaient déformés.

40. Elle expose ensuite, sur le document Maccaferri, que :
- il s’agit d’un matelas certes flexible, mais composé de gabions parallèlépipédiques rigides dont les faces sont en grillage métallique, et qui conservent leur forme quand l’ensemble doit épouser une courbe, grâce à la robustesse des parois ;
- le transport est facilité par des éléments de levage composés de câbles traversant le gabion et se finissant en haut par des boucles destinées à êtres prises par le crochet d’un engin de levage, et au fond par des boucles dans lesquelles sont engagés des tubes en acier bloqués sur le fond.

41. Sur le document Sarti, enfin, la société SETP fait valoir que :
- le gabion est soulevé par un élément de levage relié à son fond, et non à ses côtés ou son dessus, par l’intermédiaire d’une structure de renforcement parallèle au fond, qui équivaut selon elle à la paroi supérieure d’un fond à double paroi, comme dans le gabion objet du litige à Lyon, qui reproduisait le brevet selon la société Legi et M. [H] ;
- la revendication 8 en particulier divulgue un élément de levage (ancré dans une structure de renforcement parallèle au fond) consistant en un segment tubulaire « relié à une plaque de fixation » ;
- s’il s’agit comme pour le document Maccaferri de gabions flexibles, il ne faut pas confondre gabions flexibles et gabions déformables.

42. La société Legi et M. [H], qui rappellent que ces trois antériorités ont été examinées par l’OEB ou la cour fédérale allemande, estiment qu’aucune ne divulgue un gabion constitué d’un treillis métallique comportant une anse de soulèvement reliée fermement au fond ; que le problème technique objectif à résoudre est le transport d’un gabion sans le déformer ; que la distinction faite par la société SETP entre flexible et déformable est infondée ; que, pour déclarer le brevet dépourvu d’activité inventive, il faut éviter toute approche a posteriori, et prouver, ce qui incombe au demandeur à la nullité, que l’art antérieur impose la solution technique à l’homme du métier, qu’ils définissent comme un ingénieur habitué des matériaux de construction ; et que la simplicité d’un moyen technique aurait été reconnu par la jurisprudence de l’OEB comme un indice sérieux de l’activité inventive (mais ils n’indiquent pas de décision en ce sens).

43. En particulier, sur le document Citra, ils exposent que :
- il ne divulgue pas la caractéristique d’un élément plan formant la paroi supérieure, car les gabions y sont ouverts sur le dessus ;
- il concerne des gabions en matériaux souples, comme des sacs, et un tapis de protection formé d’un grand nombre de gabions posés côte à côte, non un gabion individuel ;
- les épingles n’y sont pas fixées au fond, mais passent à travers les parfois des gabions, et ne sont fixées que par les pierres lourdes se bloquant entre elles
- il ne se préoccupe pas du problème technique lié à la déformation du gabion, mais d’une pose facile à partir de la surface de l’eau (description, p. 2, lignes 22-25) ; la forme même des gabions, ouverts sur le haut, et leurs parois flexibles, font qu’ils se déformeront inévitablement ; le maintien de la forme ne peut donc pas être atteint.

44. Sur le document Maccaferri, ils exposent que :
- ce document, qui concerne des matelas flexibles à poser sur des canalisations sous-marines, n’a aucune similitude structurelle avec le brevet en cause, ne vise pas à répondre au même problème technique, mais à maintenir une certaine souplesse après la pose ;
- il ne permet pas de maintenir la forme du gabion soulevé plein ;
- ni ne divulgue d’anse de soulèvement ancrée fermement au fond, comme l’a retenu la cour allemande : les éléments de levage sont fixés sur des tubes qui ne sont pas fixés au fond du gabion, mais simplement posés au fond de l’élément flexible ; ils sont donc au-dessus du fond ; ils sont maintenus grâce au remplissage par un mélange thermoduscissable contenant du bitume ;
- il ne peut s’agir de l’art antérieur le plus proche, car celui-ci doit chercher à résoudre le même problème technique ; le document Citra ne porte même pas sur un gabion rigide, et n’est utilisé qu’en milieu sous-marin ;
- il ne relève pas du même domaine technique car il est déposé dans des catégories de brevet correspondant aux tuyaux et aux revêtements de berges, barrages, lits de cours d’eau ; l’homme du métier cherchant à résoudre un problème de déformation du gabion lors de son transport n’avait donc aucune raison de se pencher sur les moyens techniques d’un domaine éloigné du sien.

45. Et sur le document Sarti, ils exposent que
- il concerne un matelas flexible qui n’a rien à voir avec les gabions (rigides) du brevet en cause ;
- les moyens de soulèvement y sont placés au-dessus du fond, non reliés fermement à lui mais à une plaque de fixation noyée dans le matériau de remplissage au fond du gabion ;
- l’homme du métier n’a là encore aucune raison de chercher un moyen technique lui permettant de garder rigide et non déformable un gabion réalisé en treillis métalliques, dans un procédé de fabrication d’un matelas flexible constitué de ciment à base d’asphalte mélangé à de la roche et des renforts métalliques.

Réponse du tribunal

a. Nouveauté

46. L’article 52 de la Convention de Munich limite la brevetabilité aux inventions nouvelles et inventives. En vertu de l’article 54, une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique, lequel est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen.

47. Il résulte de ce texte que pour être comprise dans l’état de la technique et être privée de nouveauté, l’invention doit s’y retrouver tout entière, dans une seule antériorité au caractère certain avec les éléments qui la constituent dans la même forme, le même agencement, le même fonctionnement en vue du même résultat technique.

48. Le document Citra (Procédé et installation de pose d’un tapis de protection sur un fond immergé), concerne un tapis formé d’un grand nombre de gabions souples posés côte à côte. S’il divulgue des éléments d’ancrage dans les gabions permettant le levage de l’ensemble du tapis, il ne ressort pas de ce document que ces éléments d’ancrage soient fermement reliés au fond des gabions. En effet, d’une part, les épingles servant d’éléments de levage s’étendent verticalement au dessus du fond, ce qui ne permet donc pas de transmettre directement la force de levage à celui-ci ; d’autre part, le document Citra n’évoque une fixation de ces éléments d’ancrage que grâce au contenu du gabion, et non par une liaison au fond. La figure 1 de ce document, ci-dessous, invoquée par la société SETP, illustre ces caractéristiques.

49. Or, ainsi qu’il a été démontré aux points 22 et 23, le lien de l’anse au fond, au sens du brevet, implique que la force exercée sur l’anse soit transmise au fond sans l’intermédiaire d’une autre paroi ou du contenu. Certes, de par la cohérence de ce contenu et des parois reliées entre elles, la force exercée sur le contenu est transmise à la paroi supérieure et aux parois latérales, et de celles-ci à la paroi du fond, mais le principe de l’invention réside essentiellement dans le fait que la force de levée s’exerce en premier lieu sur le fond.

50. En divulguant seulement des éléments de levage ancrés dans le contenu ou les parois latérales, le document Citra ne divulgue donc pas la caractéristique de la revendication 1 tenant à ce que l’anse soit reliée fermement au fond.

51. Le document Maccaferri concerne comme son titre l’indique un élément flexible en forme de matelas utilisable comme ballast pour immobiliser et protéger des pipelines sous-marins, matelas qui est constitué de gabions. S’il évoque des moyens de levage, aucun de ces moyens n’est relié au fond du gabion, et moins encore relié fermement : tous sont dans des positions « adjacentes » ou « proches » du fond du gabion (« disposed at intervals in positions adjacent the bottom wall of the gabion », colonne 2, lignes 37-38 ; « close to the bottom of the gabion », colonne 2, lignes 61-62). Les figures ne divulguent pas davantage de lien ferme avec le fond, mais seulement des éléments posés sur le fond, qui transmettent donc la force de levée sur le contenu, et non sur la paroi inférieure.

52. Le document Sarti concerne lui aussi des matelas destinés à recouvrir des conduites sous-marines. Il cherche cependant à se distinguer des gabions connus de l’art antérieur, qui présentent selon lui plusieurs inconvénients. En substance, la robustesse de la structure divulguée dans ce document provient non pas de ses parois, qui sont, selon un mode de réalisation préféré, en tissu geotextile, mais d’une armature grillagée (5) (« a wire net reinforcement frame »). Cette armature est parallèle à la paroi du fond, et noyée dans le matériau de remplissage qui se répartit en deux couches, l’une au-dessus, l’autre en-dessous de l’armature. C’est sur celle-ci que s’exerce la force de levée lorsque le matelas est transporté : une sangle (12) (ou un anneau, 20) est retenu par une goupille de fixation (11, 18) elle-même retenue soit par l’armature, comme l’illustre la figure 1 ci-dessous, soit par des plaques verticales émergeant d’une plaque horizontale, dont la description et la revendication 8 indiquent qu’elles sont toutes trois « ancrées » ou « noyées » dans le matériau de remplissage, comme l’illustrent les figures 8 et 9 ci-dessous (qui représentent le même élément de levage de face et de côté).
53. L’armature (5) ne peut être assimilée, comme le fait la société SETP, à une première paroi d’un fond à double paroi : cette armature est noyée dans le contenu du gabion et ne saurait donc s’analyser en un élément du fond. Quant à la plaque de fixation horizontale (15) de laquelle émergent les deux plaques verticales (16, 17) qui fixent la goupille (18) retenant elle-même l’anse (20), si la figure la présente accolée au fond du gabion, rien, ni dans ces deux figures, ni dans les revendications, ni dans la description du document Sarti n’indique qu’elle est fixée d’une façon ou d’une autre à ce fond. Au contraire, la description et la revendication 8 évoquent cet élément de levage comme étant ancré ou noyé dans le matériau de remplissage (3, 4). C’est donc à ce matériau, et non au fond du gabion, que la force de levée est transmise directement, de sorte que le document Sarti ne divulgue pas la caractéristique de la revendication 1 du brevet en cause selon laquelle l’anse est fermement reliée au fond du gabion.

54. Les autres revendications, toutes dépendantes de la revendication 1 et ne faisant qu’y ajouter des caractéristiques supplémentaires, sont nécessairement nouvelles si celle-ci l’est.

b. Activité inventive

55. En application de l’article 56 de la Convention de Munich, une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique.

56. Pour apprécier l’activité inventive d’un brevet, il convient de déterminer d’une part l’état de la technique, d’autre part le problème technique objectif à résoudre, et enfin d’examiner si l’invention revendiquée aurait été évidente pour l’homme du métier. Les éléments de l’art antérieur ne sont destructeurs d’activité inventive que si, pris isolément ou associés entre eux selon une combinaison raisonnablement accessible à l’homme du métier, ils permettaient à l’évidence à ce dernier d’apporter au problème résolu par l’invention la même solution que celle-ci.

57. L’invention porte sur un gabion, de façon générale, ce qui correspond à des usages divers, aussi bien à terre que dans l’eau, le même terme de gabion étant employé dans l’ensemble des documents déjà examinés relatifs à ce dernier usage. L’objet essentiel reste le même à chaque fois, à savoir apporter un poids important pour soutenir un ouvrage. Au demeurant, l’une des catégories d’invention dans lesquelles est référencé le document Maccaferri, et dont se prévalent les défendeurs à la nullité pour affirmer que ce document relèverait d’un autre domaine technique que le brevet en cause, à savoir la catégorie E 02 B 3/12, concerne les revêtements de berges, barrages, lits de cours d’eau ou analogues, ce qui est précisément un usage attendu des gabions en général, y compris ceux du brevet en cause. Enfin, le fait que la revendication 1 ait été limitée à des gabions composés de 6 parois planes n’exclut en rien un usage sous-marin.

58. Le domaine technique peut donc être défini comme celui des gabions, en général, sans distinction selon leur usage, et les trois documents de l’art antérieur invoqués par les parties en relèvent.

59. Il s’en déduit également que l’homme du métier est, comme l’ont également retenu les juridictions allemandes et le juge des référés en France, un ingénieur des travaux publics ayant l’expérience de la conception et de l’usage des gabions.

60. Le problème technique est défini par les parties de façon légèrement divergente, les défendeurs à la nullité insistant sur le maintien de la forme lors du transport du gabion, tandis que la société SETP y voit plus généralement la simplification de la manutention du gabion rempli. Si le brevet mentionne clairement, jusque dans la revendication 1, l’objectif de maintenir la forme du gabion lorsqu’il est transporté, il ressort explicitement de sa description que l’invention cherche de façon plus générale à améliorer le transport du gabion rempli, sans se limiter au problème de la déformation, ce qui est résumé au paragraphe [0031], selon lequel « les avantages de l’invention résident essentiellement » dans la fourniture et la mise en place « au chantier de gabions prêts à être installés », ce qui n’était pas en soi nouveau mais méritait d’être amélioré, comme l’explique le paragraphe [0005] qui évoque une autre méthode de manutention, longue et couteuse.

61. L’homme du métier cherchant ainsi à améliorer la manutention de gabions remplis, les trois documents Citra, Maccaferri et Sarti, qui divulguent des procédés selon lesquels des gabions sont transportés remplis, étaient susceptibles de lui apporter des enseignement utiles.

62. Toutefois, si ces trois documents n’explicitent aucun problème lié à ce transport et le tiennent donc pour connu de l’homme du métier, il a été démontré (ci-dessus, points 48 à 53) qu’aucun ne divulgue, même indirectement, un moyen de soulever le gabion par une anse transmettant la force à la paroi du fond. Tous mentionnent ou illustrent une anse transmettant la force au contenu du gabion ou à ses parois latérales. Et aucune incitation ne résulte de ces documents à adopter une autre méthode, et spécifiquement la méthode du brevet en cause.

63. Cette méthode parait certes d’une très grande simplicité, et les défendeurs à la nullité ne peuvent évidemment être suivis lorsqu’ils affirment péremptoirement que la simplicité serait en soi un indice sérieux de l’activité inventive. Pour autant, la demanderesse à la nullité n’apporte aucune preuve d’une divulgation antérieure de ce moyen, qui n’est donc évident qu’au regard de celui qui le connait a posteriori, mais pas pour l’homme du métier confronté au problème de la manutention des gabions, qui ne l’avait jamais adopté avant le brevet en cause alors que le problème de la manutention des gabions remplis était déjà largement connu. Quant à l’analogie avec l’usage du port de sacs lourds par en-dessous, usage certes connu de tous, elle n’est pas fondée, l’invention consistant au contraire à porter le gabion par au-dessus. La revendication 1 est donc simple mais implique une activité inventive.

64. Il en va nécessairement de même des autres revendications, qui en dépendent et ne font qu’y ajouter des caractéristiques supplémentaires.

65. Aucun des moyens de nullité soulevés par la société SETP n’est donc fondé, et par conséquent sa demande en ce sens est rejetée.

II . Demandes en contrefaçon du brevet

1 . Atteinte au droit exclusif d’exploitation

66. La revendication 1 du brevet peut être décomposée ainsi selon ses caractéristiques :

a. gabion constitué d’un élément plan formant le fond, quatre éléments plans formant les faces latérales et un élément plan formant la surface supérieure,
b. les éléments plans étant reliés les uns aux autres,
c. lequel gabion conserve à l’état rempli sa forme lorsqu’il est soulevé, transporté sur le chantier et mis en place sur le chantier,
d. caractérisé en ce qu’une anse de soulèvement est prévue pour soulever le gabion,
e. cette anse étant reliée fermement au fond du gabion.

Moyens des parties

67. La société SETP, qui reproche aux demandeurs de se fonder sur l’imprécision de leur brevet, soutient que :
a. son gabion n’est pas constitué d’un élément plan formant le fond, quatre éléments plans formant les parois latérales, car le fond et deux parois latérales sont en fait constituées d’une (unique) bande de grillage pliée deux fois à angle droit (en U) ;
d. son gabion est soulevé par une « élingue », qu’elle définit comme une corde qui a un noeud coulant à chaque bout, et non par une anse ;
e. son élingue n’est pas reliée fermement au fond du gabion, mais constituée de deux extrémités se terminant par une boucle attachée à une barre métallique se trouvant sous le fond, qui ne fait donc pas partie de celui-ci, et n’y est reliée que provisoirement par des agrafes ne résistant chacune qu’à une force de 60 kg et se défaisant en partie lors de la manutention, de sorte que ce lien n’est pas solide ; qu’en outre la barre métallique peut s’enlever facilement, est de petite taille, et n’est liée qu’à l’une des doubles barres constituant le fond ;
et que la forme parallèlépipédique est banale et non protégeable ; que d’autres caractéristiques d’autres revendications étaient également connues ;

68. La société Legi et M. [H], se fondant sur un procès-verbal de saisie-contrefaçon du 4 décembre 2020, font valoir, notamment, que :
a. « il a été démontré » que le gabion Stonebox contient des éléments plans conformément à la revendication 1 ;
e. la barre métallique reliant l’anse au fond est bien fermement reliée à celui-ci, car lorsque le gabion est posé sur le côté, elle ne tombe pas, maintenue par les multiples agrafes, que même en tirant dessus, on ne peut les enlever et que la force des agrafes est suffisante pour déformer la barre du fond à laquelle elles sont accrochées.

69. Ils invoquent subsidiairement une contrefaçon par équivalence, en ce que l’élingue du gabion Stonebox reproduirait l’effet technique de l’anse du brevet en vue de parvenir au même résultat ;

Réponse du tribunal

70. En application des articles L. 614-9 et L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle, sont interdites, à défaut de consentement du propriétaire du brevet européen, la fabrication, l’offre, la mise dans le commerce, l’utilisation, l’importation, l’exportation, le transbordement, ou la détention aux fins précitées du produit objet du brevet. L’atteinte à ce droit exclusif est qualifié par l’article L. 615-1 de contrefaçon, engageant la responsabilité civile de son auteur.

71. Il est établi par le procès-verbal de saisie-contrefaçon du 4 décembre 2020 (pièce Legi no8), et au demeurant admis par les parties, que la société SETP fabrique et met dans le commerce des gabions, dénommés Stonebox, en grillage métallique, constitués d’un grand élément plié en U formant à la fois la paroi du fond et deux parois latérales, et d’éléments plans formant deux autres parois latérales ainsi qu’un élément plan formant la paroi supérieure ; que ces gabions peuvent être soulevés par la boucle, fermée par une bague, que forme, au-dessus du gabion, le milieu d’une tige ou corde métallique (« élingue ») dont les deux extrémités se trouvent sous le fond du gabion, extrémités se terminant chacune par une petite boucle, enfilée dans une barre métallique située sous le fond du gabion et accrochée à celui-ci par des agrafes. Une représentation issue de la notice de montage des gabions Stonebox (pièce Legi no20 et conclusions SETP, p. 29) est reproduite ci-dessous, où l’ont voit deux élingues avec leur boucle supérieure, leurs deux extrémités inférieures, et les barres sous le fond auxquelles celles-ci sont attachées. La petite boucle reliant chaque extrémité des élingues à la barre, et les agrafes reliant les barres au grillage du fond ne sont pas visibles sur la photographie en raison de leur petite taille mais il est constant qu’elles sont présentes.
72. (a) La société SETP estime que le grand élément plié en U ne s’analyse pas en trois éléments plans formant respectivement le fond et deux parois latérales, mais (implicitement), en un élément unique. Pourtant, chaque composant du gabion peut, lui-même, être divisé en composants plus petits (chaque paroi est une grille composée de tiges), et le gabion dans son ensemble peut réciproquement être désigné comme un « élément » d’ensemble : un élément peut faire partie d’un autre élément plus vaste, et être lui-même composé d’éléments plus petits. Ainsi, le fait que trois parois du gabion soient préformées en un élément global plié en U n’empêche pas de voir, composant cet élément, trois sous-éléments correspondant chacun à une paroi. Or les gabions Stonebox comprennent bien une paroi plane formant le fond, quatre parois planes formant les faces latérales, et une paroi plane formant la surface supérieure, chacune de ces parois étant en tant que telle un élément, faisant partie d’autres éléments plus vastes. Autrement formulé, le fait que parmi ces 6 éléments plans, 3 composent ensemble un élément plus vaste est indifférent. La seule différence relève en définitive de leur mode d’assemblage, qui n’est pas revendiqué et n’a donc pas à être pris en compte. Ainsi, l’argument de la société SETP revient à réduire artificiellement la portée du brevet par l’ajout implicite d’une caractéristique non revendiquée (le mode d’assemblage) ; et la caractéristique a. est reproduite par les gabions Stonebox.

73. (b) Il est constant, et manifeste, que les 6 parois, chacune formant un élément plan, sont reliées ensemble.

74. (c) Il n’est pas contesté que les gabions Stonebox conservent leur forme à l’état rempli.

75. (d) Il résulte de la portée de la notion d’anse de soulèvement au sens du brevet (cf ci-dessus, points 18 à 20) que la boucle supérieure formée par la tige, corde, ou élingue, des gabions stonebox est une anse de soulèvement.

76. (e) Selon la société SETP, les élingues se sont pas reliées fermement au fond car les barres métalliques auxquelles elles sont fixées sont « ajoutées, distinctes de la structure et fixées en dessous ». Toutefois, dès lors que ces barres, précisément situées sous le fond, permettent de transmettre en premier lieu à la paroi du fond, et non à une autre paroi ou au contenu du gabion, la force de levée exercée sur l’anse, celle-ci est bien reliée au fond au sens du brevet (cf ci-dessus points 21 à 23). La caractéristique e. est donc bien reproduite.

77. La barre métallique transmettant la force de levée de l’élingue à la paroi du fond est reliée à celle-ci par sa position (immédiatement en-dessous), et fixée à elle par des agrafes qui l’attachent à l’une des tiges du grillage constituant cette paroi du fond. Comme le soulèvent la société Legi et M. [H], il ressort du procès-verbal de saisie-contrefaçon que non seulement ces barres restent en place quand on pivote le gabion, mais qu’elles ne peuvent pas même être retirées en tirant sur elles à la main (procès-verbal, pièce Legi no8, p. 54). L’anse est donc fermement reliée au fond du gabion.

78. Les gabions Stonebox, reproduisant ainsi toutes les caractéristiques de la revendication 1 du brevet, il mettent en oeuvre celui-ci, de sorte que leur fabrication et leur mise dans le commerce, n’ayant pas été autorisées, sont interdites et constituent une contrefaçon engageant la responsabilité civile de leur auteur, sans qu’il soit besoin d’examiner les griefs relatifs aux autres revendications.

2 . Réparation

Moyens des parties

79. La société Legi et M. [H] demandent une indemnité forfaitaire, mais provisionnelle, de 723 957,79 euros, déterminée selon un taux de 8%, supérieur au taux de 6% qui aurait été justifié selon eux en cas de licence, appliqué au chiffre d’affaires de 9 049 472,46 euros dont la saisie-contrefaçon a révélé qu’il avait été réalisé entre le 4 décembre 2014 et le 4 décembre 2019 sur les gabions de format 200x100x100 et 100x100x100. Estimant que ce chiffre d’affaires n’est pas exhaustif car d’autres formats de gabions sont fabriqués (sur mesure et en trapèze), qu’il ne couvre que les ventes faites en France (et non les exportations), et que la contrefaçon a continué après la saisie-contrefaçon du 4 décembre 2019, ils réclament une mesure d’expertise ou à tout le moins la communication d’éléments comptables, certifiés par un expert comptable, au titre du droit d’information.

80. Ils estiment en outre que la défenderesse a fait croire aux milieux intéressés qu’il n’y avait pas de monopole résultant du brevet, portant ainsi atteinte à sa valeur, d’autant plus, précisent-ils, que le brevet a expiré le 7 septembre 2021, ce qui caractérise selon eux un préjudice de 50 000 euros à chacun d’eux.

81. Ils demandent enfin une mesure de publication pour « informer les tiers » de leurs droits de propriété intellectuelle, au regard de la gravité et de la durée de la contrefaçon, commise par une ancienne licenciée.

82. En réponse, la société SETP expose que le tribunal doit estimer une perte de chance que la redevance de 8%, non justifiée selon elle, ne permet pas d’établir ; que les fichiers informatiques communiqués en cours d’instance comme étant ceux obtenus lors de la saisie « semblent » en substance incomplets ; que si des dommages et intérêts étaient tout de même justifiés, une expertise s’imposerait. Elle conteste toute atteinte à la valeur du brevet, faisant valoir qu’une imitation peut au contraire s’imposer sur le marché et créer la réputation d’une technique ou d’une substance.

83. Elle estime la demande de publication irrecevable, en ce qu’elle serait indéterminée, et vexatoire, car le brevet a expiré, outre, précise-t-elle, que « il n’est pas démontré qu’une licence de brevet expiré ait été exploitée effectivement en France, ce qui rendrait la demande de publication mal fondée. »

Réponse du tribunal

a. Dommages et intérêts

84. En vertu de l’article L. 615-7 du code de la propriété intellectuelle, pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en compte distinctement les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée, le préjudice moral causé à cette dernière, et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.

85. Le second alinéa de cet article prévoit, à titre alternatif et à la demande de la partie lésée, la possibilité d’allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire, supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte ; et qui n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.

86. Les demandeurs affirment que les fichiers informatiques obtenus par l’huissier lors de la saisie-contrefaçon révèlent que les deux gabions Stonebox de dimensions 200x100x100 et 100x100x100, dont il est constant qu’ils contiennent l’élingue contrefaisante, ont été vendus pour un chiffre d’affaires total de 9 049 472,46 euros du 4 décembre 2014 au 4 décembre 2019. La défenderesse, qui semble douter de ces documents sans en tirer pour autant de conséquence, ne conteste pas expressément ce montant. Or elle est la plus à même d’apporter la contradiction à cette allégation, en affirmant elle-même le chiffre d’affaires réel qu’elle a réalisé, s’il devait être différent de celui que les demandeurs affirment issu de la saisie-contrefaçon, ce qu’elle ne fait pas. Les fichiers invoqués proviennent donc bien de la saisie-contrefaçon et ils établissement le chiffre d’affaires minimum des ventes de produits contrefaisants.

87. Comme c’est leur droit, les demandeurs réclament l’application du second alinéa de l’article L. 615-7. Ils invoquent un taux de licence de 8% par référence à un taux de 6% qui serait justifié dans le secteur. Ils n’apportent toutefois aucun élément pour le démontrer, et la défenderesse n’apporte aucun élément pour le contredire, sans qu’aucune partie n’estime utile de communiquer d’autres licences complètes portant sur ce brevet, et en particulier la sous-licence qui avait antérieurement été concédée à la société SETP.

88. Il peut toutefois être observé que la seule licence communiquée (pièce Legi no10), conclue avec le licencié exclusif pour la France, comporte seulement une redevance annuelle fixe, dont le montant pour l’ensemble de la France est de seulement 5 chiffres, au regard de la faible longueur de la partie noircie (caviardée), soit moins de 100 000 euros. Cette redevance doit être comparée à celle qu’invoquent les demandeurs contre la défenderesse : sur un chiffre d’affaires d’au moins 1 800 000 euros par an (9 millions divisés par 5), le taux usuel de 6% qu’ils invoquent correspondrait à une redevance de 108 000 euros, soit, de peu, dans un autre ordre de grandeur. En l’absence d’autres éléments, il faut donc retenir un taux usuel de licence légèrement plus faible que celui-ci allégué, donc 5%, et le majorer à 7% pour tenir compte du préjudice supérieur engendré par l’absence d’autorisation préalable, ce qui permet de retenir une provision, appliquée au chiffre d’affaires prouvé par la saisie-contrefaçon, de 633 000 euros.

89. En revanche, il ne s’infère pas en soi de l’exploitation d’un brevet une perte de valeur de celui-ci pour l’avenir. L’atteinte au monopole prive le titulaire de tout ou partie de la valeur économique qu’il aurait dû lui conférer, et c’est précisément ce qu’indemnise l’indemnité déterminée au point précédent ; mais pour le reste, un brevet, dont la valeur réside dans l’intérêt technique et non dans la rareté de sa présentation au public comme certaines oeuvres ou certains modèles, ne se dévalorise pas par son usage. La demande d’indemnisation en ce sens est donc rejetée.

b. Droit d’information

90. L’article L. 615-5-2 du code de la propriété intellectuelle, appliquant l’article 8 de la directive 2004/48 relative au respect des droits de propriété intellectuelle, prévoit au bénéfice du demandeur à l’action en contrefaçon un droit d’information en vertu duquel la juridiction peut ordonner, s’il n’existe pas d’empêchement légitime, au besoin sous astreinte, afin de déterminer l’origine et les réseaux de distribution des produits ou procédés argüés de contrefaçon qui portent atteinte aux droits du demandeur, la production de tous documents ou informations détenus par le défendeur ou par toute personne qui a été trouvée en possession de produits argüés de contrefaçon ou mettant en oeuvre des procédés argüés de contrefaçon ou qui fournit des services utilisés dans de prétendues activités de contrefaçon ou a été signalée comme intervenant dans la production, la fabrication ou la distribution de ces produits, la mise en oeuvre de ces procédés ou la fourniture de ces services.

91. La directive précitée, à son article 8, paragraphe 2, sous b) prévoit que les informations visées peuvent comprendre des renseignements sur les quantités ainsi que sur le prix obtenu pour les marchandises ou services en question. Il s’ensuit que les renseignements sur « l’origine et les réseaux de distribution » incluent ceux portant sur l’étendue du préjudice.

92. Plus généralement, en application de l’article 3 de la même directive, la mesure doit ainsi être limitée à ce qui est effectif, et proportionné au regard, notamment, de l’intérêt du défendeur à la protection du secret des affaires.

93. Il résulte du procès-verbal de saisie-contrefaçon que l’huissier a limité sa recherche des éléments comptables à la France ; les éventuelles ventes hors de France de gabions fabriqués en France et donc protégés par la partie française du brevet européen n’ont ainsi pas été prises en compte, ce qui doit être fait. Il n’est en outre pas contesté que la fabrication et la commercialisation de gabions Stonebox identiques à ceux découverts lors de la saisie-contrefaçon s’est poursuivie pendant l’instance. Le préjudice ne peut donc être entièrement déterminé sur la base du chiffre d’affaires obtenu lors de la saisie-contrefaçon, et un droit d’information est nécessaire.

94. Il doit porter sur l’ensemble des gabions Stonebox, mais seulement ceux-là : tous les gabions découverts lors de la saisie portaient ce nom, et tous étaient contrefaisants. Réciproquement, rien ne suggère que des produits vendus sous d’autres noms seraient également contrefaisants. Les documents peuvent se limiter à une attestation d’un expert comptable sur
(1) le nombre de produits vendus (où que ce soit) avant le 7 septembre 2021
(2) le nombre de produits fabriqués en France avant cette date, s’il est supérieur (seule la différence, évidemment, constitue un préjudice, dans la mesure où les produits fabriqués et vendus génèrent le même préjudice, tandis qu’un stock invendu constitué avant l’expiration du brevet donne un avantage indû au jour de l’expiration ;
(3) le chiffre d’affaires correspondant aux ventes.

95. Il n’est pas nécessaire ici de communiquer en outre les pièces comptables elles-mêmes. De même, cette opération n’a aucune technicité et ne justifie donc pas une mesure d’instruction technique, telle qu’une expertise, et la demande en ce sens doit être rejetée.

c. Publication

96. Le préjudice subi par les demandeurs est entièrement réparé par l’octroi d’une indemnité, sans que les circonstances de l’espèce ne justifient en outre une publication, et ce d’autant moins que, comme le soulève la société SETP, le brevet est expiré.

III . Dispositions finales

1 . Frais de procédure

97. Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. L’article 700 du même code permet au juge de condamner en outre la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre, pour les frais exposés mais non compris dans les dépens, une somme qu’il détermine, en tenant compte de l’équité et de la situation économique de cette partie.

98. La société SETP, qui perd le procès, est tenue aux dépens ; et doit indemniser les demandeurs de leurs frais dans une large mesure qui peut être fixée à 40 000 euros.

2 . Exécution provisoire

Moyens des parties

99. La société SETP fait valoir que l’exécution provisoire serait inopportune en ce que les rejets en référé ont montré l’existence de moyens de défense sérieux, qu’elle leur causerait un tort qui doit être comparé à l’urgence pour les demandeurs, d’autant que le brevet a expiré. Elle ajoute que les demandeurs n’ont pas exécuté les condamnations prononcées à leur encontre dans les deux instances en référé, et n’ont pas de biens en France ; elle en déduit la nécessité d’une garantie, idéalement une caution bancaire, en cas d’exécution provisoire.

100. Les demandeurs invoquent la gravité de la contrefaçon, sa durée, le fait qu’elle ait été commise par un ancien licencié qui connaissait parfaitement la validité du brevet.

Réponse du tribunal

101. En vertu de l’article 515 du code de procédure civile, dans sa rédaction en vigueur à la date d’introduction de l’instance, l’exécution provisoire peut être ordonnée, à la demande des parties ou d’office, chaque fois que le juge l’estime nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire, à condition qu’elle ne soit pas interdite par la loi.

102. Au cas présent, l’exécution provisoire n’est pas nécessaire, et la demande en ce sens est donc rejetée.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal :

Rejette la demande en nullité des revendications 1, 5, 6, 7, 9, 10 et 14 de la partie française du brevet EP 1 186 719 ;

Condamne la société SETP à payer à la société Legi et M. [H] une provision totale de 633 000 euros en réparation de leur préjudice ;

Rejette leur demande supplémentaire en dommages et intérêts pour « atteinte à la valeur » du brevet ;

Rejette leur demande d’expertise ;

Ordonne à la société SETP de remettre à la société Legi et à M. [H] une attestation de son expert comptable relative au nombre total de gabions Stonebox fabriqués en France du 30 décembre 2014 au 7 septembre 2021, de ceux vendus partout dans le monde dans cette période, et au chiffre d’affaires afférent ; et ce dans un délai de 45 jours à compter de la signification du jugement, puis sous astreinte de 500 euros par jour de retard qui courra pendant 90 jours ;

Rejette les demandes de publication ;

Condamne la société SETP aux dépens (qui pourront être recouvrés par Me Szleper pour ceux dont il aurait fait l’avance sans en recevoir provision, le cas échéant), ainsi qu’à payer à la société Legi et M. [H] 40 000 euros (au total) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette la demande en exécution provisoire de la décision.

Fait et jugé à Paris le 31 Mars 2023

Le Greffier La Présidente
Quentin CURABET Irène BENAC

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Tribunal judiciaire de Paris, 31 mars 2023, 20/02638