Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 22 novembre 2019, n° 17/04540

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 4-3, 22 nov. 2019, n° 17/04540
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 17/04540
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Marseille, 2 mars 2017, N° 16/00038
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-3

ARRÊT AU FOND

DU 22 NOVEMBRE 2019

N° 2019/ 310

RG 17/04540

N° Portalis DBVB-V-B7B-BAFDH

F X

C/

SARL G PRODUCTIONS

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

-Me Juliette GOLDMANN, avocat au barreau de MARSEILLE

- Me Luc BERGEROT, avocat au barreau de MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARSEILLE en date du 03 Mars 2017 enregistré au répertoire général sous le n° 16/00038.

APPELANT

Monsieur F X, demeurant […]

représenté par Me Juliette GOLDMANN de la SELARL SELARL GOLDMANN, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Cedric HEULIN, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE

SARL G PRODUCTIONS, demeurant […]

représentée par Me Luc BERGEROT, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Muriel DROUET, avocat au barreau de MARSEILLE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785 et 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 Septembre 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller, chargée du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame H DUBOIS, Président de Chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Erika BROCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Florence ALLEMANN-FAGNI.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 22 Novembre 2019.

ARRÊT

CONTRADICTOIRE,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 22 Novembre 2019

Signé par Madame H DUBOIS, Président de Chambre et Madame Florence ALLEMANN-FAGNI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCEDURE

Par contrat à durée indéterminé en date du 01 octobre 2011 F X a été engagé par la SARL G PRODUCTIONS en qualité de rédacteur stagiaire, à l’indice 125 du barème professionnel du Syndicat des Agences de Presse d’informations générales, moyennant une rémunération brute mensuelle de 2350€, comprenant une base de 1865,08€ correspondant au barème de la convention collective applicable, sur 13 mois et d’un complément personnel de 484,92€ .

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de travail des journalistes

La société employait habituellement moins de 11 salariés au moment du licenciement.

Le 20 octobre 2015 Mr X a adressé à l’employeur une demande en paiement d’astreintes, d’heures d’intervention et d’augmentation de salaire, qui a fait l’objet d’un refus, l’employeur estimant les demandes non fondées et poursuivant, lui a exposé des griefs.

Par exploit délivré le 15 décembre 2015 F X a été convoqué à un entretien préalable à licenciement prévu le 24 décembre 2015 et fait l’objet d’une mise à pied conservatoire.

Par lettre du 30 décembre 2015 la SARL G PRODUCTION lui a notifié son licenciement pour faute grave.

F X a saisi le11 janvier 2016 le conseil des Prud’hommes de Marseille d’une contestation de son licenciement et de diverses demandes indemnitaires.

Retenant notamment à l’encontre de F X deux griefs présentant un caractère réel et sérieux mais aucun constitutif d’une faute grave, le conseil de prud’hommes de Marseille, par jugement du 03 mars 2017, a :

— dit que le licenciement de Monsieur X ne repose pas sur une faute grave, mais sur une cause reelle et sérieuse,

— condamné la societe G PRODUCTION au paiement des sommes suivantes :

— Indemnite de préavis : 5 976,28 €,

— Congés payés afférents : 597,52 €,

— Indemnite conventionnelle de licenciement : 11 950,66 €,

— Rappel de salaire correspondant à la période de mise a pied : 1 629,62 €,

— Congés payés afférents : 162,96 €,

— Article 700 du CPC : 2 000 €,

— condamné le défendeur aux entiers dépens.

F X a interjeté appel partiel du jugement par acte du 09 mars 2017 excluant expressément de cet appel les dispositions condamnant la société G PRODUCTION au paiement des sommes suivantes :

— Indemnité de préavis : 5.976,28€

— Congés payés afférents : 597,52€

— Indemnité conventionelle de licenciement : 11.950,66€

— Rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied: 1.629,62€

— Congés payés afférents: 162,96€

— Article 700 du CPC : 2.000€ et en ce qu’il condamme le défendeur aux entiers dépens.

PRETENTIONS ET MOYENS

Dans ses dernières conclusions en date du 26 juillet 2019 Sébatien X demande de :

— confirmer le jugement du Conseil de Prud’hommes de Marseille en ce qu’il a jugé que le licenciement de Monsieur X ne reposait sur aucune faute grave

— confirmer les sommes allouées par le Conseil de Prud’hommes de Marseille

— infirmer le jugement du Conseil de Prud’hommes de Marseille de ses autres dispositions.

En conséquence :

— dire et juger que le licenciement de Monsieur X est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En conséquence :

— fixer la moyenne des salaires de Monsieur X à la somme de 2 987,64 €

— condamner la Société G PRODUCTIONS à payer à Monsieur X les sommes suivantes:

—  29 876,4 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle

et sérieuse.

—  10 079,05 € à titre de rappel d’heures d’intervention

—  5 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire.

—  5 000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect du repos hebdomadaire.

— condamner à titre principal, la Société G PRODUCTION à payer à Monsieur X la somme de 27 363,60 € à titre de rappel de prime d’astreinte

— condamner à titre subsidiaire, la Société G PRODUCTION à payer à Monsieur X la somme de 9 000 € à titre de rappel de prime d’astreinte

— condamner la Société G PRODUCTIONS à payer à Monsieur X

la somme de 2 500 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

— condamner la Société G PRODUCTIONS aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le la SARL G PRODUCIONS demande de :

— confirmer le jugement du Conseil de Prud’hommes de MARSEILLE en ce qu’il a :

— débouté Monsieur X de ses demandes de rappels de salaire au titre des astreintes et des heures d’intervention pendant les astreintes,

— débouté Monsieur X de sa demande indemnitaire relative au prétendu non respect du repos hebdomadaire

— débouté Monsieur X de sa demande indemnitaire relative au prétendu licenciement vexatoire

En conséquence,

— dire et juger qu’aucun rappel de salaire n’est dû à Monsieur X au titre des astreintes et des heures d’intervention pendant les astreintes,

— dire et juger que les dispositions relatives au repos hebdomadaire ont bien été respectées,

— dire et juger que le licenciement n’a pas été prononcé dans des conditions brutales et vexatoires,

— débouter Monsieur X de ses demandes de rappels de salaire au titre des astreintes et des heures d’intervention pendant les astreintes, de sa demande indemnitaire relative au prétendu non

respect du repos hebdomadaire et de sa demande indemnitaire relative au prétendu licenciement vexatoire

— réformer le jugement du Conseil de Prud’hommes de MARSEILLE en ce qu’il a :

— dit et jugé que le licenciement ne reposait pas sur une faute grave mais sur une cause réelle et sérieuse,

— condamné la société G PRODUCTIONS à payer à Monsieur X les indemnités suivantes alors que le licenciement reposait bien sur une faute grave :

— Indemnité de préavis : 5.976,28 €

— Congés payés afférents : 597,52 €

— Indemnité conventionnelle de licenciement : 11.950,66 €

— Rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied : 1.629,62 €

— Congés payés afférents : 162,96 €

— Condamné la société G PRODUCTIONS à payer à Monsieur X la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

En conséquence et statuant à nouveau,

— dire et et juger que le licenciement pour faute grave de Monsieur X est bien fondé et justifié

— débouter Monsieur X de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sa demande d’indemnité de préavis et des congés payés afférents, de sa demande d’indemnité conventionnelle de licenciement, de sa demande de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied et de congés payés afférents, ainsi que de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et relative aux dépens,

— condamner Monsieur X à payer à la société G PRODUCTIONS la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Sur le licenciement

Mr X soutient que l’employeur ne rapporte pas la preuve d’une faute grave qui lui serait imputable et rendant impossible son maintien dans l’entreprise. Il fait valoir que :

— le manquement relatif au fiches de travail est imprécis, non daté, relatif à des faits anciens prescrits (aucune précision sur les reportages concernés, le dernier mail de relance reçu concernant les fiches de travail TF1 date du 28 juillet 2014), les relances invoquées étaient adressées à tous les salariés, destinées à les sensibiliser sans constituer des injonctions ou avertissements et il n’est produit aucune pièce démontrant que la société ait été empêchée de facturer le client

— aucun manquement fondé sur l’absence de proposition et de prévision ne peut lui être imputé, le mail du 30 septembre 2015 demandant une réaction face à la baisse des commandes était destiné à l’ensemble des salariés et la production de quatre captures d’écran du document google drive (où les salariés pouvaient reporter leurs idées) vide pour les mois de juillet, août, septembre 2013, période de faits au demeurant prescrite, et septembre 2015 est insuffisante à rapporter la preuve d’une

carence

— l’attitude désinvolte et arrogante à l’égard de la hiérarchie qui lui est reprochée est un élément subjectif qui n’est pas vérifiable

— aucune consultation de sites ou réseaux sociaux ne peut être constitutive d’une faute, de telles consultations étant un procédé habituellement utilisé par les journalistes pour s’informer, nouer des contacts et aucune consultation de sites de rencontres n’apparaît sur l’historique produit

— il a bien supprimé ses fichiers personnels de l’ordinateur mais qu’aucune preuve n’est rapportée de l’effacement des données de l’ordinateur, que l’employeur a d’ailleurs pu consulter puisqu’il produit l’historique de ses consultations internet.

La SARL G PRODUCTIONS soutient au contraire qu’elle était fondée à licencier Mr X pour faute grave, pour plusieurs griefs dont l’accumulation justifiait la mesure. Elle fait ainsi valoir :

— que le salarié n’appliquait pas les directives de l’employeur sur la communication des fiches de travail dûment renseignées empêchant la société de transmettre ces fiches chaque lundi à TF1 conformément à leur engagement, occasionnant des retards de facturation et même un défaut de facturation (ommission d’un sujet) et de trésorerie. En outre il opposait inertie, désivolture dans ses réponses et réitération face aux relances orales et écrites de l’employeur (mails directement adressés à Mr X ou à l’ensemble des salariés, consignes et réclamations orales compte tenu de la petite taille de la société), la combinaison de ces deux attitudes constituant une insubordination persistante, sans qu’aucune prescription ne puisse être relevée s’agisssant de faits réitérés

— des manquements à ses obligations professionnelles par une carence de propositions de sujets et de prévisions contrairement à la nature de sa fonction de journaliste, aux instructions (dont la demande d’envoi en copie des prévisions à Mr Y, gérant de G Productions par mail du 30 septembre 2015) et relances en ce sens de l’employeur pour se conformer à l’engagement contractuel entre G PRODUCTIONS et son principal client TF1 et une attitude opposante en réponse de Mr X caractérisant une insubordination (mail indiquant qu’il ne 'cautionnait pas’ la demande de mise en copie de Mr Y, 'passait ses journées les pieds sur le bureau à surfer sur internet encore plus que d’habitude, il était attentiste, ne proposait plus de sujet’ en octobre-novembre 2015 selon témoignage de Mme Z)

— la consultation continue de sites internet tels que facebook ou autres sites sans rapport avec son travail tels que sites de paris sportifs, sa boîte mail personnelle, le site de l’Equipe, des sites de rencontres ou de série étant précisé qu’aucune obligation légale ou conventionelle n’impose à l’employeur d’établir une charte informatique et que les connexions internet du salarié durant le temps de travail étant présumées avoir un caractère professionnel, l’employeur pouvant librement les contrôler hors la présence du salarié et les produire en justice

— qu’il a effacé volontairement, consécutivement à sa mise à pied, l’ensemble des données de l’ordinateur portable et du téléphone portable (contacts noués personnellement et collectés depuis 12 ans puis mis à disposition des journalistes, messages, mails professionnels et historique des consultations internet) qui sont des outils de travail dans le but de nuire à la société .

Sur l’indemnité légale de licenciement sans cause réelle et sérieuse

Mr X demande une indemnité correspondant à 10 mois de salaire, soit 29 876,40€, en application de l’article L1235-2 du code du travail qui prévoit que cette indemnité ne soit pas inférieure à 6 mois de salaire, au regard d’une ancienneté de 4 ans, d’une inscription retardée à Pôle Emploi suite à un arrêt maladie consécutif à un accident et de l’absence d’emploi stable retrouvé.

En réplique La SARL G PRODUCTIONS fait valoir qu’elle n’est aucunement responsable de l’inscription différée de Mr X à Pôle Emploi, son arrêt de travail résultant d’un accident de ski, que la consultation du site Linkedin et de ses bulletins de paie montre qu’il est collaborateur de France Télévision depuis mars 2016 et qu’elle est étrangère à sa nouvelle inscription le 05 juillet 2018 à Pôle Emploi.

Sur l’indemnité conventionnelle de licenciement

F X demande de confirmer les sommes allouées par le conseil des Prud’hommes de Marseille et fait valoir que l’article L7112-4 du code du travail prévoit que l’indemnité due n’est examinée par une commission arbitrale que lorsque l’ancienneté du salarié excède 15 ans, ce qui n’est pas son cas.

Pour s’y opposer l’employeur soutient que les salariés travaillant pour le compte d’une agence de presse, ce qui est le cas de la SARL G PRODUCTIONS ne bénéficient pas des dispositions spécifiques de l’article L 7112-3 du code du travail et que le contentieux relatif à l’indemnité de licenciement des journalistes ne relève pas de la compétence de la juridiction prud’homale mais de celle de la commission arbitrale des journalistes .

Sur les dommages et intérêts pour licenciement vexatoire

Mr X fait valoir que les circonstances brutales, vexatoires et humiliantes du licenciement justifie l’octroi de dommages et intérêts : convocation à l’entretien préalable délivrée par huissier sur son lieu de travail, en présence de ses collègues pour un entretien fixé au 24 décembre, réception de sa lettre de licenciement le 31 décembre, information par l’employeur suivant mail adressé dès le 15 décembre à l’ensemble des salariés de son licenciement et annonce le 28 décembre de l’arrivée de son remplaçant. Il considère donc que l’intention de nuire de l’employeur est caractérisé.

La SARL G PRODUCTIONS conteste ces allégations et fait valoir que la remise d’une convocation à entretien préalable par voie d’huissier est autorisée par la loi, que le 24 décembre est un jour ouvrable, qu’il a seulement annoncé aux salariés le 16 décembre 2015 qu’une procédure de licenciement était en cours, ce qui est conforme aux usages de dialogue et de transparence dans une petite structure, que ce mail ne contenait aucun propos vexatoire ou humiliant.

Sur le rappel des primes d’astreintes

Mr X soutient que les 110 jours d’astreinte effectués par an, quantum non contesté par l’employeur, les nuits étant réparties entre les 3 journalistes de la société, n’ont pas été rémunérés et qu’elles doivent l’être au taux de 82,92€ correspondant à la prime de permanence prévue à la convention collective des journalistes et subsidiairement à la somme de 30€ correspondant à la prime d’astreinte en vigueur au sein de France 2. Il fait valoir que :

— les atreintes des journalistes sont judiciairement reconnues comme devant être rémunérées (Cour d’Appel Versailles 30 janvier 2014 n° 12/00529, Cass Soc 09 décembre 1998 n° 96-44.789, Cass 23 novembre 2011 n° 10-23.406)

— le juge départiteur du du conseil des Prud’hommes de Marseille par jugement du 25 septembre 2014 dans un contentieux opposant un salarié et la SARL G PRODUCTIONS, a jugé que la prime d’astreinte n’était pas rémunérée par le complément personnel, sans que la société ne fasse appel du jugement

— le complément personnel, prévu contractuellement, ne peut être considéré comme satisfactoire à rémunérer les astreintes dans la mesure où celles-ci doivent faire l’objet d’un décompte précis mensuel figurant de façon disctincte sur les bulletins de paie, ce qui n’est pas le cas en l’espèce et son

montant serait variable en fonction du nombre d’astreintes alors que le versement du complément est constant y compris durant les vacances.

La SARL G PRODUCTIONS s’y oppose en faisant valoir que :

— les astreintes, uniquement téléphoniques, sont rémunérées par une partie du complément personnel, que tant le principe de leur paiement par ce complément invariable versé chaque mois que le nombre annuel d’astreintes, devant être réparties entre les 3 journalistes, étaient convenus entre les parties

— l’espèce invoquée par Mr X diffère en ce que le juge départiteur a estimé que l’employeur n’apportait pas la preuve que le complément personnel permettait la rémunération des astreintes en l’absence d’écrit, ce qui diffère du contrat de travail de Mr X portant cette mention

— aucun des taux de prime invoqués par Mr X, rédacteur à temps complet, n’est applicable. Le taux de 82,92 € correspond à la pige applicable aux journalistes d’image au sein des agences de presse audio-visuelles (SATEV) et rémunère le temps de travail consacré à la réalisation d’une émission et le taux de 30€ appliqué par France 2 est celui qu’il perçoit en tant que pigiste et non de salarié à temps complet.

Sur le paiement des heures d’intervention

Mr X soutient que:

— en application de l’article L3121-1 et L3121-5 du code du travail il doit lui être payé les heures d’intervention selon le tableau qu’il produit recensant l’ensemble des interventions effectuées au cours de ses astreintes de février 2012 à octobre 2015

— la prescription triennale de l’article L3245-1 du code du travail issu de la loi du 14 juin 2013 ne lui est pas opposable pour les sommes nées antérieurement à la promulgation de cette loi, dans la mesure où, en application des dispositions transitoires, il a saisi le conseil des Prud’hommes avant le 17 juin 2016 et pouvait dès lors réclamer des rappels de salaires dans la limite de la prescription quinquénale antérieure

— l’employeur ne démontre pas que ces heures d’intervention ont donné lieu à repos compensateur, hormis un seul en janvier 2013 et la mention RH correspond à repos hebdomadaire compensant les permanence de week-end.

Pour s’y opposer la SARL G PRODUCTIONS fait valoir que :

— les règles de prescription empêchent Mr X de réclamer des rappels de salaire au delà de 3 ans avant la saisine du du conseil des Prud’hommes, soit avant le 3 janvier 2013 (art L3245-1 du code du travail)

— les interventions faisaient l’objet d’un repos compensateur spécifique et produit des plannings en ce sens

— les heures d’intervention réclamées correspondent pour l’essentiel à des jours de week-end, or les week-end travaillés étaient déjà payés et faisaient l’objet d’un repos compensateur en semaine

— Mr X s’approprie à tord des tournages réalisés par d’autres salariés comme celui OM/PSG du 07 octobre 2012 dont s’est chargé Valentine Patry de sorte que le tableau qu’il produit ne saurait prouver la réalité d’interventions.

Sur les dommages et intérêts pour non respect du repos hebdomadaire

Mr X soutient qu’il a travaillé plus de 6 jours consécutifs et jusqu’à 11 jours consécutifs au cours d’une même semaine selon les plannings produits.

En réplique la SARL G PRODUCTIONS fait valoir qu’en sa qualité de journaliste Mr X organisait seul son emploi du temps et qu’elle ne saurait être tenue pour responsable de l’organisation qu’il a lui-même choisi d’établir. Par ailleurs elle fait observer qu’il ne relève que 9 semaines durant lesquelles il aurait travaillé plus de 6 jours consécutifs, correspondant à des périodes anciennes et à un phénomène exceptionnel par rapport à la durée de la relation contractuelle.

SUR CE

Le rappel au titre des primes d’astreinte

En application de l’article L3121-7 du code du travail, dans sa version applicable aux faits de l’espèce, les astreintes sont mises en place par convention ou accord collectif étendu ou par accord d’entreprise ou d’établissement, à défaut par l’employeur, après information et consultation du comité d’entreprise ou en l’absence de comité d’entreprise, des délégués du personnel s’il en existe, et après information de l’inspection du travail, qui en fixe le mode d’organisation ainsi que la compensation financière ou sous forme de repos à laquelle elles donnent lieu.

Aux termes de l’article R3121-1 du code du travail dans sa version applicable, en fin de mois l’employeur remet à chaque salarié intéressé un document récapitulant le nombre d’heures d’astreinte accomplies par celui-ci au cours du mois écoulé ainsi que la compensation financière correspondante.

Même si les modalités de la contrepartie financière des astreintes sont prévues par voie conventionnelle, l’employeur peut prévoir une prime forfaitaire, sous réserve des consultations prévues, mais qui ne sont pas discutées en l’espèce et sous réserve que cette contrepartie soit stipulée de manière claire et précise au contrat de travail.

Il n’est pas contesté que bulletin de salaire ne mentionnait pas le paiement d’astreintes et qu’il n’était pas remis mensuellement au salarié de document récapitulatif du nombre d’heures d’astreinte avec la compensation financière correspondante.

Cependant en l’espèce l’article 4 du contrat de travail stipulait que 'les parties reconnaissaient par ailleurs conformément à l’article 29 de la convention collective que les nécessités inhérentes à la profession et dépendant de l’actualité nécessitent des astreintes. Ces astreintes, uniquement téléphoniques ne demandent pas de déplacement particulier, vous seront rémunérées forfaitairement conformément à l’article 5 ci-dessous, par une partie du complément personnel, que nous vous versons en sus du salaire conventionnel (barème SATEV'. Aux termes de l’article 5 du contrat de travail, au salaire de base mensuel brut de Mr X, s’ajoutait ainsi un complément personnel d’un montant mensuel brut de 484,92€, soit un salaire brut mensuel de 2350€, précision faite qu’il était expressément convenu entre les parties que ce salaire couvrait l’ensemble des droits de diffusion à l’antenne des clients de l’agence des sujets réalisés par le salarié sans que la spécificité du métier des agences de presse ne permette d’en préciser le nombre.

Au cas présent le volume d’astreintes était prévisible et non contesté, les 3 salariés se partageant les jours d’astreinte, soit 110 heures /an et le contrat de travail stipulait expressément leur rémunération par le versement d’une partie du complément personnel.

Cependant en stipulant justement que ces astreintes étaient rémunérées par 'une partie’ du complément forfaitaire et invariable, sans préciser la fraction correspondante ni l’objet du surplus du complément personnel, alors qu’en outre il était expressément prévu que le salaire couvrait l’ensemble des droits de diffusion à l’antenne, par définition variables, la compensation financière de

ces astreintes n’était pas prévue de manière suffisamment claire et précise au contrat de travail et ce faisant il n’est pas rapporté la preuve que Mr X a été pleinement rempli de ses droits.

Le salarié demande paiement de ses heures d’astreinte à titre principal sur la base de prime de permanence de 82, 92€ et produit un barème du 1er juin 2012 applicable aux journalistes dans la rubrique 'Journaux radio’ détaillant la rémunération des vacations avec présentation, des vacations sans représentation et des permanences selon le statut du salarié (stagiaire moins d’un an, stagiaire plus d’un an et titulaire). Cependant ce montant ne peut être retenu sur la base de ce seul document dont d’une part il ne peut être tiré qu’il s’applique bien au rédacteur d’agence de presse, ce qui est contesté par l’employeur, et d’autre part que la permanence rémunère la compensation des astreintes.

A titre subsidiaire il en demande paiement sur la base d’une prime d’astreinte de 30€, telle qu’appliquée au sein de France 2. Il s’appuie sur ses bulletins de paie France Télévisions rémunérant des astreintes niveau 2, statut pigiste, qui ne correspondait pas à son statut chez G Productions ou en CDD. Aucun élément ne permet de déterminer si ce montant était fixé par voie conventionnelle ou par l’employeur. Par ailleurs l’analyse ce ces bulletins de paie montre qu’il percevait des montants différents sans que la base de calcul ne soit renseignée, ce qui ne permet pas de déterminer de manière certaine le montant unitaire de la compensation.

S’il appartient au juge du fond d’apprécier le montant de la compensation, il revient aux parties de justifier du fondement de leur réclamation, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. En conséquence Mr X sera débouté de sa demande de ce chef et le jugement sera confirmé de ce chef.

Le rappel au titre des heures d’intervention

En application de l’article L3121-5 du code du travail, dans sa rédaction applicable aux faits de l’espèce, l’intervention est considérée comme un temps de travail effectif.

En application de l’article L.3171-4 du code du travail, dès lors que le litige vient à porter sur l’existence ou le nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié d’étayer sa demande par la production d’éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l’employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

— sur la prescription soulevée

L’employeur oppose la prescription triennale pour les rappels de salaire antérieurs à janvier 2013. Mais en application de l’article L3245-1 du code du travail, des dispositions transitoires prévues à l’article 21-V de la loi de sécurisation du 14 juin 2013 et de l’article 2222 alinéa 2 du code civil, la prescription des rappels de salaire réclamés à compter du 02 février 2012 était en cours à la date de promulgation de la loi le 17 juin 2013, de sorte que le salarié avait trois ans à compter de la date de la rupture du contrat de travail, le 15 décembre 2015, date de l’envoi de la convocation à l’entretien préalable, pour réclamer des rappels de salaire sans que la durée totale puisse excéder 5 ans. Ce faisant Mr X est recevable à réclamer des heures d’intervention à compter du 02 février 2012, moins de 5 ans s’étant écoulé à la date du 15 décembre 2015.

— au fond

Au soutien de sa demande en paiement d’heures d’intervention Mr X, produit un tableau récapitulatif des heures qu’il considère lui rester dues, selon décompte par date, avec mention des reportages traités, des horaires et émissions de diffusion (journaux de 13H et 20H, téléfoot).

Mais ces décomptes font apparaître des volumes d’heures par reportage quantifiés sous la rubrique 'week-end et jours fériés’ et 'heures de nuit’ sans précision du jour (samedi ou dimanche ou jour férié) ni des horaires de début et de fin d’intervention auxquels il prétend s’être soumis, ne mettant pas

l’employeur en mesure d’y répondre, en terme de paiement ou de récupération en jours de congés.

Par ailleurs les plannings prévisionnels qu’il produit pour la période février 2012 à novembre 2015 concernant les 3 journalistes répertorient les jours de travail, d’astreinte, de récupération, de RTT sans mention des interventions qui se sont ajoutées, de leur durée et horaires.

En conséquence faute pour le salarié appelant d’avoir étayé sa prétention, il doit en être débouté et le jugement sera confirmé de ce chef.

Les dommages et intérêts au titre du non respect du repos hebdomadaire

En application de l’article L3121-6 du code du travail, dans sa rédaction applicable, la période d’astreinte, exception faite de la durée d’intervention, est prise en compte pour le calcul de la durée minimale de repos quotidien prévue à l’article L3131-1 et des durées de repos hebdomadaire prévues à l’article L 3132-2 et L3164-2.

Au vu des périodes invoquées par le salarié, des plannings semaines/astreintes et du tableau récapitulatif des interventions qu’il fourni, seules les périodes du 11 avril au 17 avril 2012 ( comprenant un week-end d’astreinte durant lequel il invoque une intervention de 11 heures pour un reportage 'accident de bus’ en date du 15 avril 2012) et du 4 au 10 décembre 2013 (un week-end d’astreinte durant lequel il invoque une intervention de 5heures pour un reportage 'Berger Istres’ en date du 08 décembre) peuvent avoir interrompu la période de repos et donner lieu à des dommages et intérêts. L’employeur qui n’objecte que le caractère anciens des faits, ne rapporte pas la preuve qui lui incombe du respect de la durée maximale hebdomadaire.

Cependant le salarié n’invoque ni ne rapporte la preuve d’un trouble dans sa vie personnelle ou engendré des risques pour sa santé et sa sécurité, et en l’absence de caractérisation d’un préjudice, la demande du salarié à ce titre sera rejetée, le jugement étant confirmé de ce chef.

La rupture du contrat de travail

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis.

Il incombe à l’employeur d’en apporter la preuve dans les termes énoncés dans la lettre de licenciement au moyen d’éléments précis, objectifs, matériellement vérifiables et imputables au salarié.

— sur le 1er grief

'A plusieurs reprises, il vous a été demandé, tant par moi-même que par votre hiérarchie de remplir les fiches de travail à la base de nos relevés destinés à TF1 et indispensables pour établir notre facturation.

Bien que reconnaissant quelques oublis, vous considérez que ceux-ci ne peuvent nuire à l’entreprise, affirmant par ailleurs que vous répondez aux mails qui vous sont adressés, n’ayant fait l’objet à ce jour d’aucun reproche sur ce point.

Manifestement, à moins qu’i1 ne s’agisse encore d’un oubli de votre part, vous n’avez jamais tenu compte des nombreuses mises au point et relances que vous avez recues les 18 juin, ler juillet et 25 septembre 2013, 18 août , 1er septembre et 10 novembre 2014, 7 et 14 janvier, 4 mai, 30 septembre et 12 octobre 2015 et que j’ai évoquées lors de notre discussion du 13 octobre 2015.

J’ai également rappelé ces faits à 1'occasion de l’entretien, n’ayant pu obtenir de votre part un changement radical, votre attitude désinvolte et même arrogante vis a vis de votre hiérarchie et de moi-même, créant un climat de tension particulièrement difficile à supporter dans une petite structure, ce que précisait mon courrier RAR en date du 10 novembre 2015".

Au premier soutien de son grief sur le refus réitéré de suivre les instructions relatives aux fiches de travail entraînant des répercussions sur la facturation, l’employeur produit :

- un échange de mails entre J Z et Mr X du 13 juin 2013 dans lequel elle l’informe qu’il lui manque des informations sur 3 sujets traités pour établir son relevé, auquel il répond 'voici des bribes de réponse, selon mon souvenir … j’ai du faire la fiche dans les trucs LCI' et à titre de comparaison trois mails émanant d’un autre journaliste, H I, adressant à Mme Z ses relevés en 2014

— un mail du 18 juin 2013 adressé par E Y à M. X visant à lui exprimer leur désaccord sur certains de ses comportements, attitude vis à vis du client LCI et attitude auprès des autres salariés de G Productions et l’exortant à respecter le travail de chacun, 'ce qui passe par les tâches clairement exprimées par B et J'

— un mail du 1er juillet 2013 adressé par E Y à M. X faisant rappel des deux points que la direction souhaite voir améliorer : respect du travail de chacun, attitude vis à vis de LCI

— un mail du 28 juillet 2014 adressé par J Z à 4 destinataires dont Mr X rappelant les consignes consistant à 'remplir sérieusement les fiches de travail TF1 qui sont trop souvent incomplètes voire inexistantes', faute de quoi elle est obligée de recouper avec les sujets archivés dans l’ordinateur car de ces fiches dépend l’établissement du relevé hebdomadaire du début de semaine

- un mail du 19 août 2014 adressé spécifiquement à Mr X par J Z qui l’informe que 'une nouvelle fois, je suis bloquée pour le relevé que je dois envoyer à TF1 … comme tous les lundis. Je n’ai aucunes infos concernant les 3 derniers jours où tu étais de perm. J’ai fait un mail de rappel le 28/07 à ce sujet, en rappelant qu’il était nécessaire d’être rigoureux. Il est vraiment temps que tu prennes mes remarques au sérieux et que tu fasses enfin tes fiches correctement, ça fait partie de ton travail et des procédure de fonctionnement du bureau qu’il est de ton devoir de respecter'

— un mail du 1er septembre 2014 adressé par B C à E Y, J Z avec copie à F X rapportant l’entretien qu’elle a eu avec ce dernier le 25 août et notamment 'dans cette volonté d’organisation, je lui ai rappelé l’importance de remplir ses fiches de sujets avec rigueur! Cela est capital pour le fonctionnement. Et c’est aussi une marque de respect du travail d’J… Et des règles du bureau… Là aussi il a semblé réceptif.'

— un mail du 10 novembre 2014 adressé par B C à Mr X pour lui communiquer le document actualisé portant sur les règles de fonctionnement du bureau de Marseille comportant notamment les instructions sur la procédure à suivre pour remplir les fiches de travail et rappel de l’importance de les remplir car elle sont le support du relevé adressé à TF1 pour être payé

— des mails du 07 janvier et 14 janvier 2015 adressés par B C à Mr X K principalement le rappel et des reproches ayant trait au respect des règles de fonctionnement du bureau sur le fonctionnement des astreintes, la permanence actu du matin, la rédaction des prévisions anticipées et mentionnant 'J t’as d’ailleurs fait remarqué il y a quelques mois la même chose dans un mail où elle déplorait le fait que tu ne faisais pas tes fiches (malgré de nombreuses remarques et rappels!). Cela aussi ne lui faisait pas plaisir'

— l’attestation de Mme Z, directrice de production, déclarant s’être régulièrement accrochée avec Mr X qui ne jugeait pas utile de les remplir correctement voire de les faire tout simplement, précisant lui avoir rappelé régulièrement par écrit, par oral et ce, jusqu’à la veille de son départ de la société. Elle indique que sa réponse était toujours la même ' oh ça va, c’est pas grave, je ne le fais pas tout le temps, la gestion TF1 peut regarder le journal télévisé et elle verra par elle-même ce que l’on fait'

Les autres mails visés dans la lettre de licenciement ne se rapportent pas au manquement invoqué sur les fiches de travail.

Il s’évince de cette chronologie des mails que la rédaction des fiches de travail a bien suscité des reproches récurrents auprès de Mr X. Cependant il résulte également des éléments précités que l’établissement d’une telle consigne, opposable au salarié, n’est démontrée qu’à compter du 10 novembre 2014, et qu’après cette date, seule l’attestation de Mme Z vient affirmer la réitération des manquements allégués, sans qu’ils soient corroborés par des éléments précis et concrets, notamment par mails. Les échanges mails des 07 et 15 janvier 2015 ne font qu’évoquer des réclamations antérieures pour des faits qui ont été à l’évidence tolérés, ce qui leur ôte tout caractère de gravité et qui ont concerné plusieurs salariés.

Par ailleurs ces pièces n’établissent pas de faits datés, précis permettant d’en vérifier la matérialité comme la périodicité et donc de caractériser une mauvaise volonté délibérée ou un refus du pouvoir de direction de l’employeur, constitutifs d’indiscipline.

Au deuxième soutien de son grief tenant à son attitude désinvolte et arrogante vis à vis de la hiérarchie comme du gérant E Y, sa généralité ne peut être considérée comme constitutive d’une faute grave que s’il est démontré que ce comportement se traduit par des éléments précis et objectifs, permettant d’en vérifier la matérialité.

L’énoncé même ne rapporte aucun fait concret, ne précise pas s’il vise une négligence généralisée à l’égard du pouvoir de direction, des propos tenus, des manquements à ses obligations professionnelles de journaliste.

Dans son courrier du 10 novembre 2015, venant en réponse aux demandes salariales de Mr X, le gérant E Y répond qu’il ne peut accéder à sa demande pour plusieurs raisons : 'baisse très significative du nombre de sujets, attitude désinvolte et arrogante, pour exemple récent ma demande de recevoir chaque mardi les propositions de sujets et le dénigrement de la société auprès de tiers, dont France TV' . Il poursuit en indiquant 'lors des entretiens que nous avons eu, soit avec moi, soit avec B et/ou J, nous avons régulièrement évoqué des manquements aux obligations de la société. Ce que tu prends comme des attaques personnelles ne sont que des recadrages professionnels. Il nous a fallu rappeler encore et encore quelques principes simples et obligatoires : remplir les fiches de travail, faire les passages de permanence dans les règles, téléphoner le matin à la rédaction de Paris, lire la Provence, rédiger les prévisions en amont.'

L’employeur produit également une attestation de Mme Z aux termes de laquelle 'son arrogance et sa désinvolture étaient de plus en plus difficile à supporter. Il ne voulait pas comprendre les demandes simples et n’en faisait qu’à sa tête. La moindre remarque était prise pour une attaque personnelle, dans ces conditions il était vraiment très compliqué de communiquer. J’ai pourtant eu beaucoup de patience, j’estime avoir tenté beaucoup de choses pour lui faire entendre quelques règles de base à respecter dans le cadre de son travail.

Mais il avait atteint un tel degré d’entêtement que nous étions dans une impasse (…). Le dialogue était devenu impossible. Son insolence pesait sur la vie et l’ambiance du bureau. Il n’avait aucun respect vis à vis des co-gérants de la société non plus (…). Dans une petite équipe comme la nôtre, un élément perturbateur déséquilibrait notre organisation.'

L’ensemble des échanges mails produits et ces éléments traduisent certes une évolution vers une cristallisation des relations entre Mr Y, Mme C et Mme Z d’une part et Mr X d’autre part, dont il est à la fois rappelé la qualité du travail de journaliste et le manque de considération dans 'les règles de fonctionnement du bureau’comme de rigueur dans leur mise en oeuvre.

Cependant faute d’étayer le grief articulé, par nature subjectif, au moyen d’éléments suffisamment concrets, objectifs, précis, matériellement vérifiables, celui n’est pas justifié.

Il ne ressort par ailleurs pas des réponses apportées par le salarié aux mails précités de propos manifestement excessifs, inappropriés, désinvoltes ou arrogants. Aucun élément n’est produit pour attester d’une dégradation du travail de l’ensemble du personnel, d’une incidence sur la bonne marche de l’entreprise.

— sur le 2e grief

'Je vous reproche également un manque de propositions et de prévisions, notamment au regard des sujets demandés par TF1, malgré les mails réitérés adressés par B, entre autres, dernièrement les 13 octobre et 6 novembre 2015, auxquels vous avez refusé de répondre'.

Etant rappelé que l’insuffisance professionnelle ne peut constituer une faute et être retenue dans un licenciement disciplinaire, il appartient à l’employeur de démontrer que ce manque de propositions et de prévisions résulte d’une faute imputable au salarié.

L’employeur précise qu’il n’est nullement reproché au salarié une insuffisance professionnelle ou une insuffisance de résultat en l’absence d’objectifs définis mais une carence délibérée en ce qu’il n’exécutait pas ses obligations professionnelles par manque de travail, attitude attentiste, inexécution des directives de l’employeur.

Seul le mail du 06 novembre 2015 visé dans la lettre de licenciement est produit par l’employeur. Adressé à 5 destinaires dont Mr X et Mr D, auxquels B C s’adressait pour rendre compte de la réunion la veille avec la rédaction de TF1, elle faisait état de points positifs mais également négatifs notamment sur le manque de propositions, de rigueur et de régularité dans les appels téléphoniques du matin. Elle précisait qu’avait été pointée une différence entre les 3 rédacteurs du bureau quant au nombre de coups de fil, propositions en direct lors des journées de permanence (hors actu). La généralité du mail adressé à deux des rédacteurs et l’absence de précision quant à la différence observée entre les 3 rédacteurs du bureau ne permettent pas d’imputer de manière certaine le reproche à Mr X.

Par ailleurs l’employeur s’appuie sur les mails adressés à plusieurs salariés du 25 septembre 2013 (présentation informative du mode de fonctionnement des propositions et de leur traitements), du 04 mai 2015 (rappel des consignes sur l’envoi des prévisions le mardi à TF1, y compris l’envoi d’un mail explicatif des raisons pour lesquelles aucune prévision n’est envoyée), du 22 décembre 2014 adressé par B C à E et L Y, J Z pour évoquer des manquements de X le 12 décembre 2014 ainsi que 15 jours auparavant ('F n’avait pris ni les journaux, ni regardé la Provence, ni appelé la PQR pour proposer des sujets le matin alors qu’il avait été défini la veille que c’était lui qui devait effectuer cette tâche car il était d’actu… j’avoue que ce n’est pas la 1er fois que je lui fais cette remarque, 15 jours auparavant même configuration: il était d’actu et la Une de la Provence n’avait pas été lue ,ni proposé à la PQR' ). Ce seul élément, antérieur d’un an au licenciement, rapporte des faits qui ne sont pas matériellement vérifiables et qui ne sont pas corroborés par un élément concret.

Il s’appuie également sur un document 'google drive’ (accessible aux salariés pour y reporter les idées et sujets) dont il ne peut être tiré, contrairement à l’affirmation de l’employeur, que F

X s’y connectait rarement, l’historique étant illisible et donc inexploitable.

Enfin l’employeur produit l’attestation de Mme Z qui déclare que 'au quotidien les mois d’octobre et novembre 2015 ont été compliqués, par provocation il passait ses journées les pieds sur le bureau, à surfer sur internet encore plus que d’habitude. Il était attentiste, ne proposait plus de sujets. Nous étions dans une impasse'.

Cependant en dépit de ces assertions qui ne sont pas corroborées par des témoignages d’autres salariés, en particulier les autres rédacteurs sur lesquels devait alors nécessairement être reportée la charge de propositions, aucun élément probatoire précis et vérifiable n’est fourni quant à l’absence ou à la diminution des propositions et sujets, aucune quantification, aucun comparatif avec les périodes antérieures ou avec les autres rédacteurs ne sont produits. Par ailleurs en réplique le salarié produit des prévisions de sujets adressées collectivement par les trois rédacteurs à TF1 les 03 et 25 novembre 2015 qui ne sont pas contredites. Le grief n’est en conséquence pas fondé.

— sur le 3e grief

'Malgré ma demande d’être destinataire en copie de ces prévisions, (cf mails du 30 septembre), une nouvelle fois vous ne l’avez pas prise en compte et j’ai dû vous relancer et attendre votre réponse plus de 11 jours, ce que vous considérez là encore comme un simple oubli'.

Il résulte du mail de E Y, adressé aux 6 salariés le 30 septembre 2015 suite à la réunion de la veille, que dans un contexte de baisse des commandes de sujets, il demandait à chacun de réagir et rappelait sa demande d’être, ainsi que Jérémie Y, destinataires en copie chaque semaine des prévisions. Il ajoutait 'quelle ne fit pas ma surprise de voir qu’une heure après, les prévisions étaient envoyées par F sans que nous soyons en copie… Je ne l’accepterais plus, et prendrais les mesures qui s’imposent si cela devait se reproduire.'

Par ailleurs il résulte de l’échange de mails entre E Y et F X, que ce dernier invoque un oubli et une réaction disproportionnée du gérant, lequel réplique qu’il entend faire respecter les règles, qu’une simple excuse aurait suffit alors qu’il a dû attendre 12 jours pour avoir de ses nouvelles.

Il s’en déduit l’existence d’un non respect avéré mais isolé de la consigne de l’employeur et sans que son caractère intentionnel ne soit démontré.

— sur le 4e grief

'Enfin ces dernières semaines, malgré le manque de propositions de sujets (cf. encore mail du 30 septembre), vous avez décidé d’occuper votre temps de travail à des recherches sur facebook ou sur certains sites, ce qui constitue un autre manquement caractérisé a vos obligations'.

Les documents et fichiers détenus par un salarié sur l’ordinateur mis à sa disposition par l’employeur sont présumés professionnels et peuvent donc être ouverts et consultés par l’employeur en dehors de la présence de l’intéressé.

Par ailleurs les connexions établies par le salarié pendant son temps de travail sur des sites internet grâce à l’outil informatique mis à sa disposition par l’employeur pour l’exécution de son travail sont présumées avoir un caractère professionnel. Si l’utilisation personnelle et abusive d’internet à partir de l’ordinateur professionnel peut constituer une faute grave, il appartient à l’employeur d’en rapporter la preuve.

Pour ce faire l’employeur verse 73 pages de listings de connexions internet ne permettant pas d’identifier (pages illisibles, nature des sites ou connexion non identifiable…) ni de discriminer celles

qui sont de nature personnelle de celles qui sont de nature professionnelle, alors que le salarié fait justement observer que la nature de son activité de journaliste peut impliquer des contacts par les réseaux sociaux et la consultation de site permettant de s’informer. Ces listings résultant de captures d’écran portent un horaire de consultation mais pas de date permettant de déterminer la période concernée. Aucun élément ne permet de quantifier la durée journalière de connexion internet.

L’employeur s’appuie également sur l’attestation de Mme Z selon laquelle 'au quotidien les mois d’octobre et novembre 2015 ont été compliqués, par provocation il passait ses journées les pieds sur le bureau, à surfer sur internet encore plus que d’habitude'.

Faute de produire des éléments matériellement vérifiables, ces deux éléments ne suffisent pas à rapporter la preuve d’une utilisation personnelle et abusive d’internet pendant les horaires de travail, que le salarié était en outre libre d’organiser aux termes de son contrat de travail.

— sur le 5e grief

'Plus grave encore, lorsque votre mise à pied vous a éte notifiée vous avez décidé d’effacer l’ensemble des données de l’ordinateur et du téléphone portable mis a votre disposition et tout en reconnaissant la réalité de cette faute, vous estimez n’avoir rien à vous reprocher, offrant même de récupérer certains contacts, ce qui constitue une évidente provocation'.

A l’appui de ce grief l’employeur ne s’appuie que sur l’attestation de Mme Z qui affirme que 'le jour de sa mise à pied à titre conservatoire, il a immédiatement effacé le disque dur de son ordinateur de bureau, ainsi que tous les contacts professionnels dans le téléphone portable fourni par la société. La base de contact étant un outil essentiel pour les journalistes'. Cependant cette seule assertion, qui n’est pas corroborée par des éléments objectifs, ne caractérise pas la faute alléguée.

Au total, faute pour la société G Production d’avoir satisfait complètement à son obligation probatoire, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et le jugement sera infirmé en ce sens.

Les demandes subséquentes

- L’indemnité spécifique de licenciement

L’article L7112-3 du code du travail, applicable aux entreprises de journaux et périodiques, prévoit que si l’employeur est à l’initiative de la rupture, le salarié a droit à une indemnité qui ne saurait être inférieure à la somme représentant un mois, par année ou fraction d’année de collaboration, des derniers appointements. Le maximum des mensualités est fixé à 15.

Par ailleurs la commission arbitrale prévue à l’article L7112-4 du code du travail est prévue lorsque l’ancienneté du salarié excède 15 ans, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Cependant il résulte des articles L7112-2 et L7112-3 du code du travail que seules les personnnes mentionnées à l’article L7111-3 du code du travail et liées par un contrat de travail à une entreprise de journaux et périodiques peuvent prétendre à l’indemnité spécifique de congédiement instituée à l’article L7112-3, que tel n’est pas le cas du salarié travaillant pour une agence de presse.

Or aux termes du Kbis fourni, l’activité de la société G PRODUCTION est celle d’agence de presse, ce que son logo professionnel mentionne également expressément. Ce faisant F X, salarié de la société G PRODUCTION ne peut prétendre à la dite indemnité et le jugement sera infirmé en ce sens.

— Les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Par application de l’article L1235-5 du code du travail applicable pour une entreprise employant moins de onze salariés, le salarié peut prétendre, en cas de licenciement abusif à une indemnité correspondant au préjudice subi.

En l’espèce au vu des pièces produites, le salarié appelant justifie qu’à la suite de son licenciement le 31 décembre 2015, il a été admis au bénéfice de l’allocation de retour à l’emploi, dont le versement a été interrompu à la suite d’un accident au profit d’indemnités journalières jusqu’au 04 avril 2016, circonstance indépendante de la rupture du contrat de travail.

Du mois d’avril à décembre 2016 il a effectué des prestations de pigiste pour France Télévisions pour un niveau de rémunération variable (1860,81€ en avril, 1029,31 € en mai, 1204,74€ en juin, 2448,20€ en juillet, 814,47€ en août, 2678,05€ en septembre, 1707,56€ en octobre, 1275,72€ en novembre et 2698,70€ en décembre), le cas échéant cumulable avec l’ARE.

En janvier 2017 il a travaillé suivant plusieurs CDD de courte durée toujours pour France Télévision avant de reprendre des prestations de pigiste.

De mi-juillet à mi-août 2017 il a travaillé dans le cadre d’un CDD au sein de Maximal News Télévision moyennant une rémunération de 2800€ bruts.

Entre le 01 juillet 2018 et le 30 juin 2019 il a bénéficié de 211 jours indemnisés au titre de l’ARE à 66,20€ /jour, avec un solde de 374 jours restant indemnisables et des versements variables comme le montre l’attestation Pôle Emploi du 15 juillet 2019, ce qui laisse supposer des rémunérations professionnelles.

Il en résulte que Mr X n’a pas retrouvé d’emploi fixe et pérenne après son licenciement et que son niveau de rémunération a baissé dans des proportions néanmoins partiellement significatives.

En considération de son âge, de son ancienneté et des éléments qu’il produit sur l’étendue de son préjudice une exacte évaluation conduit la Cour à fixer à la somme de 16 000 € le montant des dommages et intérêts qui l’indemnisera intégralement du préjudice résultant du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera réformé en conséquence.

— Le préjudice distinct

En application de l’article 1240 du code civil, le salarié peut prétendre à l’indemnisation du préjudice distinct résultant du caractère vexatoire du licenciement, à la condition de caractériser une faute de l’employeur dans les circonstances ou la mise en oeuvre du licenciement ainsi qu’un préjudice.

En l’espèce, pris individuellement les éléments invoqués par le salarié ne relèvent pas d’un procédé brutal ou vexatoire. La remise de la lettre de convocation à l’entretien préalable par d’huissier est une voie légale, l’acte de signification contenant son adresse personnelle mentionne simplement qu’il a été trouvé sur son lieu de travail où l’acte lui a été délivré à personne. La date de l’entretien fixée au 24 décembre s’insère dans la chronologie de la cripstation des relations salarié- employeur et des délais nécessaires, la lettre de licenciement est du 30 décembre, sans qu’il puisse s’en déduire un choix délibérément symbolique. Le mail du mail du 15 décembre 2015 adressé aux salariés les informant de l’engagement d’une procédure de licenciement ne contient aucun propos inapproprié à la situation, dénigrant ou vexatoire pour le salarié et la délivrance de cette information, nécessairement connue et discutée au sein d’une petite équipe de travail, ne constitue pas une faute, la décision de mise à pied entraînant par ailleurs pour les salariés des répercutions en terme

d’organisation du travail dans la période de congés de fin d’année. Enfin le mail du 28 décembre, date à laquelle Mr X n’était plus en présence de ses collègues de travail, informe de l’engagement de M N, sans précision du poste et sans référence au licenciement et au remplacement de Mr X.

Si F X allègue une intention de nuire de la juxtaposition de ces éléments, aucun d’eux n’étant fautif, celle-ci n’est pas caractérisée. En outre il ne justifie d’aucun préjudice disctinct de celui qui l’a déjà indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

C’est donc par une juste appréciation que les premiers juges ont débouté F X de sa demande de dommages et intérêts de ce chef et le jugement sera confirmé.

— L’indemnité de préavis, les congés payés afférents, le rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire et les congés payés afférents

Le licenciement étant déclaré sans cause réelle et sérieuse, Mr X a droit à une indemnité de préavis avec congés payés afférents, à un rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire et les congés payés afférents aux montants que le conseil de prud’hommes a justement fixés et qui ne sont pas remises en cause par les parties, sauf pour la société G PRODUCTIONS à en contester le principe au soutien du licenciement pour faute grave.

Les dispositions accessoires

En application de l’article 700 du code de procédure civile, il est équitable que l’employeur contribue à hauteur de 2000€ aux frais irrépétibles exposés par le salarié en cause d’appel . Corrélativement la société G PRODUCTION sera déboutée de sa demande sur ce fondement.

En application de l’article 696 du même code, il échet de mettre les dépens à la charge de l’employeur qui succombe.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, en matière prud’homale,

Déclare recevables l’appel principal et incident ;

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a dit le licenciement de F X pourvu d’une cause réelle et sérieuse et condamné la société G PRODUCTION à lui payer la somme de 11 950€ à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

Statuant à nouveau dans cette limite,

Dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement de F X,

Condamne la société G PRODUCTIONS à verser à F X la somme de 16000€ à titre de dommages et intérêts en application de l’article L1235-5 du code du travail

Rejette la demande de F X au titre de l’indemnité spécifique de licenciement prévue à l’article L7112-3 du code du travail

Confirme le jugement entrepris pour le surplus

Déboute les parties de leurs autres prétentions

Y ajoutant,

Condamne la société G PRODUCTION à verser à F X la somme de 2.000€ à titre de nouvelle contribution aux frais irrépétibles'

Condamne la société G PRODUCTION à supporter les dépens d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT '

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 4-3, 22 novembre 2019, n° 17/04540