Cour d'appel de Lyon, 10 juin 2016, n° 15/01025

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 10 juin 2016, n° 15/01025
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 15/01025
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 21 janvier 2015, N° F12/0533

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 15/01025

Société LES GENS ET VOUS

C/

T

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 22 Janvier 2015

RG : F 12/0533

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 10 JUIN 2016

APPELANTE :

Société LES GENS ET VOUS

Précédemment dénommée société ARC,

XXX

XXX

Représentée par Me I BIDAL de la SCP JOSEPH AGUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

S T

née le XXX à XXX

XXX

XXX

Non comparante, représentée par Me Patricia MORTIER, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 31 Mars 2016

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Michel SORNAY, Président

Didier JOLY, Conseiller

Natacha LAVILLE, Conseiller

Assistés pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 10 Juin 2016, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel SORNAY, Président, et par Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES:

La SAS DIGITAL ARC, devenue depuis la SAS ARC puis plus récemment la société LES GENS ET VOUS, exploite à Lyon une agence de publicité spécialisée en développement de marques.

Par contrat du 25 novembre 2010, S T a été embauchée par la SAS DIGITAL ARC en qualité d’infographiste’web designer avec un statut cadre, niveau 3.1 de la convention collective nationale étendue des entreprises de la publicité et assimilées, applicable à la relation de travail.

Elle faisait partie de l’équipe de création de l’agence, constituée de 3 infographistes-web designers et d’une directrice de la création.

Sa période d’essai initiale de 4 mois a été reconduite le 30 mars 2011pour une nouvelle période, au terme de laquelle son embauche a pu être confirmée le 27 juin 2011.

Par avenant à son contrat de travail du 19 août 2012, S T a été promue au poste de directrice artistique junior avec une augmentation de sa rémunération brute annuelle à 27'600 € pour 218 jours travaillés par an.

En août 2012, l’ancienne directrice de la création est remplacée par une nouvelle responsable, Rozen N.

Le 5 octobre 2012, M N a convoqué S T à un entretien informel, au cours duquel elle lui a adressé divers reproches.

La salariée a été ensuite convoquée le 30 octobre 2012 à un autre entretien informel avec le directeur général de l’agence, Q R, en présence de M N, au terme duquel elle a appris que la direction de l’agence ne souhaitait pas la garder dans ses effectifs.

S T a ensuite été placée en arrêt travail, à compter du 12 novembre 2012 et de manière ininterrompue jusqu’au 20 mars 2013.

Par courrier du 12 novembre 2012, S T s’est officiellement plainte à son employeur du harcèlement moral et des pressions tendant à lui faire quitter l’agence qu’elle avait subies de la part de M N.

Par courrier du 14 novembre 2012, Q R, directeur général, a contesté les termes de ce courrier, et annoncé son intention de procéder à des vérifications sur le harcèlement moral ici dénoncé.

Par courrier du 10 décembre 2012, l’employeur a informé S T de ce que l’enquête diligentée par ses soins avec le concours de la déléguée du personnel de l’entreprise aboutissait à la conclusion qu’il n’était pas possible de prêter à M N un comportement harcelant, même s’il était nécessaire d’améliorer les relations au sein du service création.

S T a bénéficié le 14 mars 2013 d’une visite de préreprise auprès du médecin du travail, suivie d’une visite de reprise le 21 mars 2013 au retour de la salariée dans l’entreprise, visite au terme de laquelle le médecin du travail a conclu :

« suite à la visite de préreprise du 14 mars, suite à l’étude de poste du 19 mars et suite à la visite de ce jour, est déclarée inapte à son poste de travail (un seul certificat selon l’article R 46 24'31 avec visite de préreprise suite à un arrêt de plus de 3 mois et visite de reprise dans le délai des 30 suivants). Serait apte à un poste équivalent dans un autre environnement ».

Le 28 mars 2013, la société ARC a adressé à S T une lettre recommandée lui faisant part de ce qu’elle lui recherchait un poste de reclassement.

Par courrier du 5 avril 2013, l’employeur a informé S T du résultat infructueux de cette recherche de reclassement tant au sein de l’entreprise que du groupe auquel elle appartient, et lui a annoncé son prochain licenciement pour inaptitude.

Par courrier du 8 avril 2013, la société ARC a convoqué S T à un entretien préalable à son licenciement, fixé au 17 avril 2013, entretien auquel la salariée a indiqué ne pouvoir se présenter en raison de son état de santé.

Par courrier recommandé du 20 avril 2013, la société ARC a notifié à S T son licenciement pour inaptitude professionnelle et impossibilité de reclassement dans l’entreprise et dans le groupe.

*

Entre-temps, S T avait, par acte du 28 décembre 2012, saisi le Conseil de prud’hommes de Lyon d’une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur pour harcèlement moral et exécution déloyale du contrat de travail, et de condamnation de l’employeur à lui payer diverses sommes dans ce cadre.

Lors de l’audience devant la formation de jugement du Conseil de prud’hommes, S T demandait à cette juridiction de :

à titre principal

'dire et juger que l’inaptitude de S T est consécutive au harcèlement moral subi par cette dernière, et aux situations pathologiques auxquelles elle était confrontée dans l’exécution de son contrat de travail,

'dire et juger que l’employeur n’a pris aucune mesure pour prévenir de tels faits et y mettre un terme,

'déclarer le licenciement pour inaptitude de S T nul car lié au harcèlement moral subi par celle-ci et imputable à l’attitude fautive de l’employeur,

'condamner la société ARC au paiement des sommes suivantes, le cas échéant, au vu des évolutions de la situation juridique de la société, fixer la créance de S T au passif de la société ARC aux sommes suivantes :

'6900 € à titre d’indemnité de préavis,

'690 € à titre de congés payés sur indemnités de préavis,

'856 € à titre de complément de salaire,

'85,60 euros à titre de congés payés sur complément de salaire,

'25'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du caractère illicite du licenciement,

'15'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral distinct subi du fait du harcèlement moral et de l’exécution déloyale du contrat de travail,

'5000 € à titre de dommages-intérêts distincts pour manquement de l’employeur à son obligation légale de prévenir les actes de harcèlement dans son entreprise et à son obligation de sécurité de résultat,

'2000 € à titre de dommages-intérêts pour remise tardive certificat travail, de l’attestation A B, du bulletin de salaire et du paiement du solde de tout compte ;

à titre subsidiaire,

'dire et juger que le licenciement est intervenu sans cause réelle et sérieuse du fait du manquement de la société ARC à son obligation de reclassement,

'en conséquence, condamner la société ARC au paiement des sommes précitées ou, le cas échéant, au vu de l’évolution de la situation juridique de la société, fixer aux montants desdites sommes la créance de S T au passif de la société ARC ;

'condamner enfin dans tous les cas la société ARC à payer à S T la somme de 3500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, le cas échéant, au vu de l’évolution de la situation juridique de la société, fixer à ce montant la créance de S T au passif de la société ARC ;

'ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir;

'condamner la société ARC aux entiers dépens d’instance.

Pour leur part, la SAS ARC, son administrateur judiciaire la SELARL K L, et son mandataire judiciaire Maître X, ont demandé au conseil de prud’hommes de débouter S T de l’intégralité de sa demande.

Par jugement du 22 janvier 2015, le conseil de prud’hommes de Lyon :

'a constaté qu’il résultait des pièces versées aux débats et notamment des comptes-rendus d’auditions de l’ensemble des salariés qu’il régnait au sein de l’entreprise en général, et du service création en particulier, une ambiance générale difficile et une incompatibilité de caractère entre M N et S T, sans que soient pour autant mis en évidence des éléments probants relatifs à un possible harcèlement dont M N se serait rendue coupable vis-à-vis de S T ;

'a estimé que l’employeur ne rapportait pas la preuve de démarches sérieuses en vue d’aménager le poste de travail de S T ou de lui trouver un poste de reclassement au sein de l’entreprise et de sa filiale ;

'a en conséquence jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la société ARC à payer à S T les sommes suivantes :

'6900 € bruts à titre d’indemnité de préavis, outre 690 € à titre de congés payés y afférents,

'14'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du caractère illicite du licenciement ;

'5000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral distinct subi du fait de l’exécution déloyale du contrat de travail,

'1500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

'les parties étant déboutées du surplus de leurs demandes et la société ARC étant condamnée aux dépens.

La société ARC a interjeté un appel général de cette décision le 3 février 2015.

*

Au terme de ses dernières conclusions, la société ARC, redevenue in bonis et nouvellement dénommée société 'LES GENS ET VOUS', demande la Cour d’appel d’infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a déclaré le licenciement de S T sans cause réelle et sérieuse, de débouter S T de l’intégralité de ses demandes, et de la condamner aux entiers dépens.

Pour sa part, S T demande par ses dernières écritures à la Cour d’appel de :

principalement,

'dire et juger que l’inaptitude de S T est consécutive au harcèlement moral qu’elle a subi ;

'dire et juger que l’employeur n’a pris aucune mesure pour prévenir de tels faits et y mettre un terme ;

'déclarer le licenciement pour inaptitude de S T nul car lié au harcèlement moral subi par celle-ci et imputable à l’attitude fautive de l’employeur ;

'condamner la société LES GENS ET VOUS, anciennement dénommée ARC, au paiement des sommes suivantes :

6900 € à titre d’indemnité de préavis, outre 690 € à titre d’indemnité de congés payés y afférents,

25'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du caractère illicite du licenciement,

15'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral distinct subi du fait du harcèlement moral et de l’exécution déloyale du contrat de travail,

5000 € à titre de dommages-intérêts distincts pour manquement de l’employeur à son obligation légale de prévenir les actes de harcèlement dans son entreprise et à son obligation de sécurité de résultat,

subsidiairement,

'dire et juger que le licenciement est intervenu sans cause réelle et sérieuse du fait du manquement de la société ARC à son obligation de reclassement,

en conséquence,

'condamner la société LES GENS ET VOUS anciennement dénommée ARC au paiement des sommes suivantes :

6900 € à titre d’indemnité de préavis, outre 690 € à titre d’indemnité de congés payés y afférents,

25'000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

dans tous les cas

'condamner enfin la société LES GENS ET VOUS, anciennement dénommée ARC, à payer à S T les sommes complémentaires ci-dessus :

856 € à titre de complément de salaire, outre 85,60 euros à titre d’indemnité de congés payées correspondantes,

10'000 € à titre de dommages-intérêts du fait de la nullité de la clause de cession des droits d’auteur forfaitaire,

2000 € à titre de dommages-intérêts du fait de la remise tardive des documents de fin de contrat,

379,50 euros à titre de complément d’indemnité de licenciement,

3000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

'condamner la société LES GENS ET VOUS, anciennement dénommée ARC, aux entiers dépens de l’instance.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées, qu’elles ont fait viser par le greffier lors de l’audience de plaidoiries et qu’elles ont à cette occasion expressément maintenues et soutenues oralement en indiquant n’avoir rien à y ajouter ou retrancher, sous la réserve suivante :

L’employeur a précisé, en réponse à la toute nouvelle demande d’annulation de la clause de cession forfaitaire des droits d’auteur, qu’il considérait cette clause comme valable et qu’en tout état de cause S T ne justifiait en l’état ni avoir réalisé des 'uvres dans un cadre qui ne soit pas le cadre collectif de l’équipe de création à laquelle appartenait, ni avoir subi un réel préjudice ouvrant droit à une telle indemnisation. Il conclut donc au rejet de la demande de dommages-intérêts présentée de ce chef.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1.- Sur le harcèlement moral :

Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l’article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

L’article L.1154-1 du même code prévoit qu’en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et il incombe alors à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l’espèce, S T affirme qu’il ressort des déclarations des salariés dans le cadre de l’enquête tant du service création que des autres services l’existence de faits qui, appréhendés dans leur ensemble, caractérisent existence d’un harcèlement moral imputable M N, telle que dénoncée par S T dans sa lettre du 12 novembre 2012, par laquelle il se plaignait des faits suivants :

« situation devenue invivable pour moi au studio de création depuis l’arrivée de M N.

(') impulsivité, agressivité, menace

(') pression subie pour quitter l’agence. »

La société ARC conteste cette présentation des faits, estimant que les témoignages recueillis mettaient tout au plus en évidence des maladresses de la part de M N, mais aucunement un harcèlement moral.

Il convient toutefois de relever que ces auditions ont été menées conjointement non seulement par O P, déléguée du personnel, mais aussi et manifestement surtout, par Q R, l’un des propriétaires de l’agence et directeur général de l’entreprise, et à ce titre directement mis en cause par les accusations portées par S T reprochant à la société ARC d’avoir laissé perdurer en connaissance de cause le harcèlement moral mené par M N à l’encontre de l’intimée.

Il est évident que dans un tel cadre, la parole des différents salariés ainsi interviewés ne pouvait être complètement libre, la présence dans le duo chargé des auditions de la déléguée du personnel 'elle-même également salariée de la société ARC’ ne pouvant suffire à garantir totalement la liberté de parole et l’impunité des salariés qui se seraient laissés aller à tenir un discours distinct de celui attendu par la direction.

C’est à la lumière de cet élément, et pas seulement du litige que l’employeur prétend avoir avec l’intéressé sans toutefois en justifier, que doit être apprécié le décalage entre l’attestation du 14 janvier 2014 de G H versée aux débats par S T (sa pièce n° 28) et l’audition de ce salarié le 20 novembre 2012 dans le cadre de 'l’enquête', communiqué par l’employeur (sa pièce n° 38).

Au regard des pièces versées aux débats, et notamment de ces auditions, il y a lieu de relever les points suivants :

'jusqu’à l’arrivée en août 2012 de M N à la direction de l’équipe création, S T donnait manifestement pleine satisfaction à son employeur, qui l’a d’ailleurs promue en juillet 2012 aux fonctions de directeur artistique junior.

'l’entreprise ARC était à l’automne 2012 en pleine évolution et restructuration, et plusieurs salariés de l’entreprise confirment que la spécialisation de S T en digital faisait qu’elle ne correspondait plus aux nouvelles orientations que la direction (c’est-à-dire essentiellement Q R et C D, directeur général opérationnel) souhaitait donner à l’entreprise, et que la direction n’attendait donc que son départ.(cf en particulier à ce sujet les auditions de Nolwenn CHETCUTI et M N).

'les témoignages sont concordants pour établir que l’ambiance de l’équipe création était assez moyenne mais vivable jusqu’en juillet 2012 et qu’à partir de l’arrivée de M N à la direction de ce service en août 2012, il est apparu qu’elle présentait des tendances cyclothymiques, pouvant alterner avec ses collègues des moments de gentillesse et des moments de particulière dureté injustifiée, et qu’elle ne supportait pas les bonnes relations qui existaient entre les 3 autres créateurs de son service. Cette situation a contribué activement à dégrader encore plus l’ambiance de travail au sein de l’équipe, ambiance désormais qualifiée de pourrie, insoutenable, etc.

'S T a fait part à plusieurs de ses collègues de son sentiment persistant d’être mise sur la touche depuis l’arrivée de M N et d’être dévalorisée par celle-ci notamment par des paroles blessantes et en se voyant d’une part retirer des travaux qu’elle aimait bien et dans lesquels elle était performante (Pantashop) et d’autre part confier des travaux qui n’étaient pas de son niveau (collages sur Cadapack).

' Plusieurs salariés attestent avoir personnellement constaté ces tensions entre M N et S T et la réalité de cette mise à l’écart de celle-ci et de cette attitude dévalorisante de la chef de service à son encontre (cf notamment à ces sujets les témoignages de Y Z, E F, G H).

'par ailleurs il n’est pas contestable que c’est du fait de cette mise sur la touche et de ce harcèlement approuvé par l’employeur qui souhaitait la voir partir, que les conditions de travail de S T se sont dégradées dans des proportions susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité et d’altérer sa santé, l’intéressée s’étant d’ailleurs alors retrouvée en arrêt maladie pour dépression à compter du 12 novembre 2012, date de la dénonciation des faits.

' Les réponses apportées à S T les 14 novembre 2012 et surtout le 10 décembre 2012 par Q R, représentant de l’employeur, à la suite de sa dénonciation des faits de harcèlement litigieux doivent, par leur présentation orientée des faits et la banalisation de ces derniers, être considérés comme constituant une participation active de l’employeur à ce harcèlement.

S T établit ainsi l’existence matérielle de faits précis, avérés et concordants, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l’existence à son encontre d’agissements répétés de harcèlement moral qui ont eu pour objet et/ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité et d’altérer sa santé physique ou mentale.

Dans ce contexte, il appartient à l’employeur de rapporter la preuve contraire en démontrant que les agissements tant de M N que d’Q R et de la société ARC elle-même étaient exclusifs de tout harcèlement moral.

En l’état, la Cour ne peut que constater que cette preuve n’est pas rapportée, les éléments du dossier laissant au contraire penser que l’employeur n’a pris aucune mesure pour mettre fin aux difficultés relationnelles de M N avec S T et de son comportement harcelant à son égard, qu’au contraire, ayant pleinement conscience de ces agissements, il les a encouragés et en a profité dans le but de pousser cette salariée hors de l’entreprise où elle n’avait plus, selon lui, sa place.

Le harcèlement moral dénoncé par S T est donc bien établi.

2.'Sur le licenciement pour inaptitude :

Par application de l’article L. 1232'1 du code du travail, tout licenciement individuel doit reposer sur une cause réelle et sérieuse.

Selon l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables, qu’il doit reprendre dans la lettre de licenciement prévue par l’article L1232-6 du code du travail, cette lettre fixant ainsi les limites du litige.

En l’espèce, le licenciement litigieux a été prononcé pour inaptitude de la salariée constatée par le médecin du travail en une seule visite de reprise le 21 mars 2013, en suite d’une visite de préreprise du 14 mars 2013.

S T demande la Cour de prononcer l’annulation de ce licenciement par application de l’article 1152'1 au motif que la dégradation de son état de santé ayant abouti au constat de son inaptitude était la conséquence directe du harcèlement moral dont elle a été victime dans l’entreprise.

Il apparaît toutefois que même si le début de l’arrêt de travail de S T au terme duquel son inaptitude professionnelle a été médicalement constatée correspond exactement avec sa dénonciation des faits de harcèlement moral, la cour ne peut que constater que l’intéressée ne produit strictement aucun document médical permettant d’établir avec certitude un lien de causalité entre ce harcèlement et la gravité de la dégradation de son état de santé ayant entraîné cette inaptitude.

Un tel lien de causalité ne pouvant se présumer, cette demande d’annulation sera rejetée.

À titre subsidiaire, S T demande la cour de constater que son licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse faute par l’employeur d’avoir recherché sérieusement pour elle une solution de reclassement.

L’article L1226-2 du code du travail dispose à ce sujet que:

Lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’B qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre B approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise.

L’B proposé est aussi comparable que possible à l’B précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.

Par ailleurs il est constant que seules les recherches de reclassement compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de la visite de reprise peuvent être prises en considération pour apprécier le respect par l’employeur de son obligation de rechercher à sa salariée un reclassement avant de la licencier éventuellement pour inaptitude.

Au soutien de sa demande, S T fait valoir d’une part que le délégué du personnel n’a pas été consulté sur la possibilité de son reclassement et d’autre part que la société ARC ne justifie pas avoir effectivement recherché pour elle une solution de reclassement au sein de sa filiale parisienne, la société J+R.

L’inaptitude litigieuse n’ayant toutefois pas pour origine un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, la consultation des délégués du personnel n’était pas requise par la loi, si bien que l’argument ici invoqué doit être écarté comme mal fondé.

En ce qui concerne le caractère sérieux de la recherche de reclassement à laquelle l’entreprise a procédé, l’employeur verse aux débats en pièce n° 12 un courrier du 2 avril 2013 par lequel I J indiquait à la société ARC que la société J+R ne disposait d’aucune possibilité de poste correspondant au profil de S T permettant son reclassement, ce que confirme d’ailleurs l’examen du registre du personnel de cette société qui a été versée aux débats par l’employeur en pièce n° 49.

Par ailleurs, il y a lieu de relever que, compte-tenu des termes clairs de l’avis d’inaptitude donné par le médecin du travail, qui pointait la nécessité de reclasser S T 'dans un autre environnement', force est de constater, au vu du registre des entrées sorties du personnel de la société ARC à l’époque qui ne fait apparaître aucune vacance de poste, que l’employeur n’avait effectivement pas de solution de reclassement de l’intéressée au sein de l’entreprise ou du groupe d’entreprises auquel elle appartient.

Le manquement allégué de l’employeur à son obligation de reclassement de S T n’est donc pas établi.

Par voie de conséquence, il y a lieu de constater que le licenciement litigieux, prononcé pour inaptitude professionnelle constatait médicalement et impossibilité de reclassement de la salariée, repose sur une cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point et S T sera dès lors déboutée de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d’indemnité compensatrice de préavis.

3.- sur les dommages-intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat:

Il résulte des dispositions combinées des articles 1153, dernier alinéa, du Code civil, L 1234'19, L 1234'20 et R 1234'9 du code du travail qu’un salarié qui n’a pas reçu à l’issue de la rupture de son contrat de travail le règlement de son solde de tout compte et les documents de fin de contrat, notamment l’attestation destinée à A B, le certificat de travail et un bulletin de salaire récapitulatif, peut solliciter d’indemnisation d’un préjudice né de ce retard.

S T fait valoir que si les documents de fin de contrat (attestation destinée à A B, solde de tout compte, certificat travail, bulletin de paye) sont bien datés du 20 avril 2013, date de la notification de son licenciement, ils ne lui ont pas pour autant été remis ce jour-là par l’employeur, qui ne les lui a transmis en réalité avec retard. Elle sollicite donc l’octroi d’une somme de 2000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né pour elle de ce retard.

En ce sens, elle produit en pièce n° 27 une copie de son relevé de compte bancaire faisant apparaître que son solde de tout compte a été viré sur son compte bancaire par l’employeur le 16 mai 2013, et l’employeur ne conteste pas dans ses écritures que ce n’est qu’à cette date que la salariée a pu être effectivement en possession du solde de son salaire et de ses documents de fin de contrat, en dépit de la date du 20 avril 2013 portée sur ces documents.

Dans le contexte très particulier du présent litige, il apparaît que ce retard de 3 semaines apporté par l’employeur dans l’exécution de ses obligations et notamment dans le paiement de la dernière paye due à S T est nécessairement volontaire et qu’il a causé à cette salariée un préjudice moral que la Cour dispose d’éléments suffisants pour évaluer à la somme de 500 €.

4.- Sur la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral et/ou exécution déloyale du contrat de travail :

Dans ces écritures, S T sollicite à ce titre la condamnation de la société ARC à lui payer d’une part une somme de '15'000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral distinct subi du fait du harcèlement moral et de l’exécution déloyale du contrat de travail’et d’autre part une somme de '5000 € à titre de dommages-intérêts distincts pour manquement de l’employeur à son obligation légale de prévenir les actes de harcèlement dans son entreprise et à son obligation de sécurité de résultat'. (sic)

En l’état des explications assez succinctes données par S T au soutien de cette double demande, la Cour n’est pas en mesure concrètement de distinguer en l’espèce ces deux chefs de préjudice et les fautes qui les auraient causés. Il y a donc lieu de considérer que S T présente ici une demande unique de dommages-intérêts à hauteur de 20'000 €.

Il résulte des motifs qui précèdent que non seulement l’employeur a effectivement omis de prendre les mesures qui s’imposaient pour protéger S T des faits de harcèlement moral que lui infligeait sa chef de service et dont il avait connaissance, mais encore qu’il a sciemment profité de cette situation et participé lui-même à ce harcèlement moral en minimisant à tort la gravité des faits subis par cette salariée, dans le but délibéré que celle-ci quitte d’une manière ou d’une autre l’entreprise où il considérait qu’elle n’avait plus sa place.

Ce faisant, l’employeur a commis des manquements graves à ses obligations contractuelles, notamment à son obligation d’exécuter loyalement le contrat de travail et à son obligation de veiller à la santé et à la sécurité de ses salariés. Ces manquements engagent sa responsabilité sur le fondement de l’article 1147 du code civil et la société ARC doit donc être déclarée civilement responsable des préjudices nés pour S T de ces manquements.

Même si S T n’est pas ici parvenue à démontrer le lien de causalité direct et certain entre ce harcèlement et la dégradation de son état de santé à l’origine de son licenciement pour inaptitude, il n’en reste pas moins que ce harcèlement moral, parfaitement caractérisé, et son contexte très particulier lui ont causé un préjudice moral considérable, que la Cour dispose d’éléments suffisants pour évaluer à la somme de 10'000 €.

La société ARC sera donc condamnée à lui payer cette somme à titre de dommages-intérêts de ce chef, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt conformément aux dispositions de l’article 1153'1 du code civil.

5.- Sur la demande d’annulation de la cession contractuelle de droit d’auteur figurant au contrat de travail :

Pour la première fois en cause d’appel et par des conclusions transmises à son contradicteur à 8 jours de l’audience de plaidoiries, S T a sollicité la condamnation de son employeur à lui payer la somme de 10'000 € à titre de dommages-intérêts « du fait de la nullité de la clause de cession des droits d’auteur forfaitaire ».

Le contrat de travail signé le 25 novembre 2010 entre les parties contient un article 8 ainsi rédigé :

« article 8'inventions

S T peut être amenée à concevoir, créer, produire en tout ou partie des Réalisations sur son lieu de travail ou ailleurs, que le matériel utilisé appartienne ou non à la société. Par Réalisations, on entend notamment toute 'uvre de l’esprit de quelque nature que ce soit, quel qu’en soit l’achèvement (qu’elle soit donc à l’état de projet ou finalisée) et plus généralement qu’elle soit susceptible ou non d’être protégée par un droit quelconque de la propriété intellectuelle.

S T est consciente que la société a pour activité la création d''uvres de l’esprit et que dès lors, l’ensemble des salariés de la société concourt à la conception, la création ou la production de Réalisations, lesquels constituent des 'uvres collectives appartenant à la société.

Si même, S T était amenée à travailler à une ou plusieurs Réalisations n’ayant pas la qualification d''uvres collectives, S T reconnaît et accepte que sa rémunération mensuelle telle que prévue à l’article 7 du présent contrat englobe la cession des droits de propriété et d’exploitation (reproduction, représentation, adaptation) afférents aux Réalisations effectuées.

En conséquence, la société ne sera redevable d’aucune rémunération complémentaire à l’égard de S T .

La présente cession est consentie pour l’ensemble des pays du monde, pour toutes les langues et pour la durée légale de protection des Réalisations et ce, pour tous usages, et à toutes fins, sous toute forme, sur tout support, par tous moyens et procédés.

Il est précisé que cette cession s’opère au profit de la société, ses cessionnaires et/ou ayants droits, au fur et à mesure des Réalisations effectuées, en contrepartie de la rémunération mensuelle précitée.

S T accepte que la société reste libre, d’une part, d’apporter toute modification aux Réalisations, de les intégrer dans d’autres Réalisations, et d’autre part, d’y faire figurer ou non les noms et qualité du salarié.

La rupture du contrat de travail, quels qu’en soient la cause et l’auteur, est sans effet sur la cession des droits patrimoniaux opérés ci-dessus. »

Cette clause est complétée par le 5e paragraphe de l’article 7 ("rémunération') du contrat de travail, ainsi rédigé :

« De convention expresse entre les parties, cette rémunération intégrera le montant de la cession des droits cédés par S T au titre de la propriété intellectuelle et artistique, pour un montant forfaitaire mensuel brut de 50 €. »

Au soutien de sa demande de dommages-intérêts , S T fait valoir que cette clause contractuelle enfreint des dispositions de l’article L 131'3, alinéa premier, du code de la propriété intellectuelle qui impose, dans le cadre d’une telle cession de droits de propriété intellectuelle, que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue, sa destination, et quant au lieu et à la durée.

En ce qui concerne la protection des oeuvres individuelles créées par la salariée et leur indemnisation au titre du droit d’auteur, il résulte des articles L112-1, L112-2 du code de la propriété intellectuelle que sont protégés 'les droits des auteurs sur toutes les oeuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination’ et dès lors qu’elles sont originales et empreintes de la personnalité de leur auteur.

Mais il résulte du 2e paragraphe de l’article 8 précité du contrat de travail une présomption de caractère collectif des réalisations effectuées par chacun des salariés de la société ARC, la cession de ses droits moyennant 50 € par mois prévue par ailleurs par cette stipulation contractuelle ne concernant expressément que les 'uvres que S T aura éventuellement réalisées seule.

Dans ce contexte, il appartient à S T de préciser les 'uvres qu’elle a ainsi réalisées seule dans le cadre de son activité professionnelle pour le compte de la société ARC et pour lesquels elle réclame aujourd’hui l’annulation de la cession forfaitaire de ses droits de propriété intellectuelle et l’indemnisation du préjudice né pour elle de cette cession irrégulière.

La cour ne peut que constater que si S T, qui a jugé utile d’attendre plus de 3 ans et demi de procédure prud’homale pour présenter cette demande en paiement de 10'000 € de dommages-intérêts, produit aujourd’hui, à moins d’une semaine de l’audience d’appel, en pièce n° 37 une vague liste de 9 sites Internet qu’elle dit avoir créés, elle ne fournit pour autant aucune explication quant au caractère individuel ou collectif de ces 'uvres, et encore moins sur le fait qu’elles soient ou non originales et empreintes de la personnalité de leur auteur, comme l’exigerait le succès de son action.

En l’état de la présomption posée par le contrat de travail, il y a lieu de considérer que toutes les créations de S T durant sa période d’B par la société ARC était, faute de preuve contraire, des 'uvres collectives n’ouvrant donc pas droit à des droits d’auteur pour les salariés les ayant créées.

La demande de cette salariée sera donc rejetée comme mal fondée, sans même qu’il soit ici besoin d’examiner ni la question de la validité de la cession litigieuse, ni celle de l’application en l’espèce des règles de compétence posée par l’article L.331-1 du code de la propriété intellectuelle dans sa rédaction issue de la loi du 17 mai 2011, seule applicable au litige.

5.'Sur la demande de rappel de salaire :

S T fait valoir qu’elle a été embauchée par la société ARC le 25 novembre 2010 au coefficient 3.1, qu’elle a perçu un salaire de base de 2000 € dont 50 € correspondent à un forfait pour la cession des droits de propriété intellectuelle et qu’elle n’a donc perçu en réalité qu’un salaire de base de 1950 €; qu’à compter du mois de novembre 2011, elle a été élevée au coefficient 3.2 dont le salaire minimum conventionnel était fixé à 2057 euros depuis le 1er juillet 2011, et que ce n’est en réalité qu’à compter du mois de juillet 2012 que son salaire de base a été porté à 2300 €, respectant ainsi désormais le salaire minimum conventionnel.

Elle considère donc que de novembre 2011 à juin 2012 inclus, soit durant 8 mois, elle a perçu un salaire de 1950 €inférieur au minimum conventionnel précité, d’où sa demande de rappel de salaire de 856 € outre 85,60 euros de congés payés y afférents.

Il résulte toutefois des articles 5 et 8 précités du contrat de travail de S T, dont les termes sont rappelés en détail ci-dessus, que cette somme de 50 € par mois était expressément un élément de la rémunération contractuelle devant donc être pris en compte dans l’appréciation du respect salaire minimum conventionnel.

Ainsi, il y a lieu de retenir que S T durant ces 8 mois litigieux a perçu un salaire brut mensuel de 2000 € et non de 1950 € comme elle le soutient.

Il en résulte que le salaire ainsi versé n’était inférieur au minimum conventionnel que de 57 € par mois, et que cette demande de rappel de salaire de ce chef, si elle s’avère fondée en son principe, ne l’est en son montant qu’à hauteur de la somme totale de 456 euros.

L’employeur sera donc condamné au paiement de cette somme de 456 € à titre de rappel de salaire de ce chef, majorée de la somme de 45,60 euros au titre des congés payés y afférents.

Par application de l’article 1153'1 du code civil, ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter du 9 janvier 2013, date de réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes.

6.'Sur les demandes accessoires :

Les dépens de première instance et d’appel, suivant le principal, seront supportés par la société ARC.

S T a dû pour la présente instance exposer tant en première instance qu’en appel des frais de procédure et honoraires non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser intégralement à sa charge.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné la société ARC à lui payer la somme de 1500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, et de condamner cet employeur à lui payer sur le même fondement une indemnité complémentaire de 1500 euros au titre des frais qu’elle a dû exposer en appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions SAUF en ce qu’il a condamné l’employeur aux dépens de première instance et à payer à S T une somme de 1500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais qu’elle a dû exposer en première instance ;

STATUANT à nouveau et y AJOUTANT :

CONSTATE que S T a été à l’automne 2012 victime au sein de l’entreprise ARC d’un harcèlement moral ;

CONSTATE que S T ne démontre pas l’existence d’un lien de causalité directe et certain entre ce harcèlement moral et d’inaptitude professionnelle qui a motivé son licenciement, et DÉBOUTE en conséquence l’intéressée de toutes ses demandes tirées d’une nullité de ce licenciement pour ce motif ;

DIT que ce licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, et DÉBOUTE en conséquence S T de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d’indemnité de préavis et de congés payés ;

CONDAMNE la société anonyme LES GENS ET VOUS, précédemment dénommée société ARC, à payer à S T les sommes suivantes :

' 456 euros à titre de rappel de salaire pour non-respect du minimum conventionnel pour la période de novembre 2011 à juin 2012 inclus, majorée de la somme de 45,60 euros au titre des congés payés y afférents, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 9 janvier 2013

'500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né de la remise tardive des documents de fin de contrat, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

'10'000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par S T du fait du harcèlement moral et de l’exécution déloyale par son employeur de son contrat de travail, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

DIT que les sommes ainsi allouées supporteront, s’il y a lieu, les cotisations et contributions prévues par le code de la sécurité sociale ;

DÉBOUTE S T de sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la clause de son contrat de travail portant cession forfaitaire à l’employeur de son droit de propriété intellectuelle sur les 'uvres créées par elle dans le cadre de l’exécution de ce contrat ;

CONDAMNE la société LES GENS ET VOUS, précédemment dénommée société ARC, aux entiers dépens de première instance et d’appel ;

CONDAMNE la société LES GENS ET VOUS, précédemment dénommée société ARC, à payer à S T la somme complémentaire de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles qu’elle a dû exposer en cause d’appel ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le Greffier Le Président

Gaétan PILLIE Michel SORNAY

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Cour d'appel de Lyon, 10 juin 2016, n° 15/01025