Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 19 mai 2021, n° 18/04706

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, ch. soc. a, 19 mai 2021, n° 18/04706
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 18/04706
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 20 juin 2018, N° 14/01839
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 18/04706 – N° Portalis DBVX-V-B7C-LZHP

Société EDAX TRANSPORT (ANCIENNEMENT DÉNOMMÉE SARL LSTE)

C/

Y

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de LYON

du 21 juin 2018

RG : 14/01839

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 19 MAI 2021

APPELANTE :

Société EDAX TRANSPORT (ANCIENNEMENT DÉNOMMÉE SARL LSTE)

9 avenue des Pays-Bas

[…]

[…]

représentée par Me Jean-marc HOURSE de la SELARL CABINET JEAN MARC HOURSE, avocat au barreau de LYON substituée par Me Nathalie HENRIQUES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :

E Y

né le […] à […]

[…]

69310 PIERRE-BENITE

représenté par Me Régis DURAND, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 17 Février 2021

Présidée par Natacha LAVILLE, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties

dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Christophe GARNAUD, Greffier placé.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

— Joëlle DOAT, présidente

— Natacha LAVILLE, conseiller

— Nathalie ROCCI, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 19 Mai 2021 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente et par Anne-Laure TUDELA-LOPEZ, Greffier placé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat à durée indéterminée, la société Lyon Service Transport Express, dont le gérant est M. X, a engagé M. Y (le salarié) en qualité de chauffeur poids lourds courte distance, groupe 5 coefficient 128M, à compter du 3 octobre 2011 moyennant une rémunération mensuelle brute de 2 118,03 euros en contrepartie de 208 heures de travail par mois.

La relation de travail a été soumise à la convention collective nationale des transports routiers et de ses activités auxiliaires du transport.

Le 3 août 2012, le salarié a été victime d’un accident du travail pour une lésion musculaire à l’épaule gauche. Il a aussitôt été placé en arrêt de travail le jour même.

Suivant avenant au contrat de travail du 4 mars 2013 à effet à cette date, le temps de travail du salarié a été réduit à 169 heures de travail par mois et sa rémunération a été fixée suivant un taux horaire de 10 euros.

En dernier lieu, le salarié a perçu une rémunération mensuelle brute de 1 736,81 euros.

Dans le cadre de la visite de reprise de son poste dans l’entreprise, le salarié a été examiné par le médecin du travail qui a rendu des avis d’aptitude avec restriction les 5 avril 2013, 9 avril 2013 et 9 juillet 2013.

Par lettre en date du 9 août 2013 remise en main propre, la société Lyon Service Transport Express a convoqué le salarié le 26 août 2013 en vue d’un entretien préalable à son licenciement et lui a notifié sa mise à pied conservatoire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 16 septembre 2013, la société Lyon Service Transport Express a notifié au salarié son licenciement pour faute grave dans les termes suivants:

'Monsieur,

Malgré votre absence à l’entretien du lundi 26 Août 2013, auquel nous vous avions convoqué en date du 9 Août 2013.

Nous sommes au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave sans indemnité ni préavis.

Entré chez LSTE, le 03/10/2011, vous occupez la fonction de chauffeur PL/SPLdepuis cette date.

Les faits invoqués à l’appui de cette décision sont les suivants.

En effet vous avez en date du 07/06/2013 effectué une transaction de palettes Europe appartenant à notre société, auprès de la Ste ACHARD, pendant vos heures de travail, en utilisant le véhicule d’entreprise comme moyen de transport.

Ces faits sont confortés par un bon de commande établi à votre nom, faisant état de vente de palettes.

Vous avez parfaitement reconnu les faits lors d’un entretien en date du 18/07/2013, en présence de M. X Eddy gérant .D’après vos propos, vos difficultés financières seraient à l’origine de cet acte, que nous qualifions de vol manifeste.

En outre les relevés numériques de votre carte conducteur laissent ressortir des saisies manuelles. Ces saisies ne représentent pas du temps de travail généré par notre activité. Elles interviennent hors planification.

Nous en déduisons que vous avez volontairement créé, des heures de travail, afin de récolter de la rémunération supplémentaire.

A aucun moment vous n’avez jugé utile d’en référer à votre hiérarchique, afin d’en obtenir la validation.

Cela démontre votre intention de dissimuler de telles pratiques.

Exemples :

Le 04/07/2013: 45 minutes

Le 05/07/2013 : 1H35 de saisie

Le 08/07/2013 : 1H24 de saisie

Le 10/07/2013 : 1H14 de saisie

Le 11/07/2013 : 1H15 de saisie

Le 18/07/2013 : 1H14 de saisie

Le 22/07/2013 : 1H17 de saisie

Le 24/07/2013 : 1H21 de saisie

Le 26/07/2013 : 1H24 de saisie

Le 01/08/2013: 1H19 de saisie

Le 06/08/2013: 1H11 de saisie

Le 07/08/2013 : 56 minutes de saisie

Par ailleurs ces mêmes relevés font ressortir, que vous exercez une deuxième activité professionnelle.

En effet nous constatons des heures de travail qui n’ont aucun lien, avec la Ste LSTE. Soit les dates suivantes

Le 13/07/2013 : 7H49 De temps de travail, comprenant 6H00 de travail de nuit.

Le 20/07/2013 : 7H52 De temps de travail, comprenant 6H00 de travail de nuit.

Le 27/07/2013 : 8H28 De temps de travail, comprenant 4H00 de travail de nuit.

Après vérification des relevés heures pour la période de juillet, afin d’établir les bulletins de salaire, M. B Alain responsable des ressources humaines a constaté cette double activité et s’est vu dans l’obligation d’organiser un entretien. Ce dernier s’est déroulé en date du 01/08/2013 en présence de M. X et M. B.

L’objet de cet entretien avait pour but de vous rappeler vos obligations contractuelles, ainsi que la réglementation routière et de recueillir vos explications.

En effet nous vous avons rappelés, lors de cet entretien, l’Art 13 de votre contrat de travail, faisant état de vos obligations en matière de prévenance, sur un éventuel cumul d’emploi auprès de votre employeur, ainsi que l’art 6 qui précise le respect impératif de la Réglementation routière et sociale.

Vous avez par ailleurs, reçu la formation FCO, au cours de laquelle vous avez abordé systématiquement ces points essentiels, à l’exécution de votre profession.

Malgré cet entretien vous n’avez pas pris en considération la nécessité de respecter l’ensemble des sujets évoqués lors de l’entretien précédemment citez.

Nous avons aboutis à cette conclusion, du fait que vous avez renouvelé votre cumul d’emploi en date du samedi 03/08/2013 qui présente une activité de 10h31 de temps de travail, qui comprends 6H00 de travail de nuit.

Toutes ces manipulations frauduleuses, ainsi que ces cumuls d’emploi ont forcément généré des infractions qui représentent un délit pénal.

Tous ces évènements viennent donc à l’appui de notre décision. Au vu des faits cités dans ce courrier, votre maintien dans l’entreprise est dès lors impossible. La rupture de nos relations prend effet ce jour.

(…)'.

Le 9 mai 2014, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon en lui demandant:

— de déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse;

— de condamner l’employeur à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, une indemnité de licenciement, un rappel de salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire et les congés

payés afférents, des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, une indemnité pour travail dissimulé, outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 21 juin 2018, le juge départiteur du conseil de prud’hommes:

— a condamné la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express au paiement des sommes suivantes:

• 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

• 10 399,92 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé,

• 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— a débouté le salarié de ses autres demandes,

— a débouté la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— a ordonné exécution provisoire,

— a condamné la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express aux dépens.

°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

La cour est saisie de l’appel formé le 28 juin 2018 par la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express.

Par ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 14 janvier 2019 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express demande à la cour d’infirmer partiellement le jugement entrepris, de débouter le salarié de l’intégralité de ses demandes, et de le condamner au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 1er décembre 2020 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile, le salarié demande à la cour:

— de confirmer le jugement entrepris sur les condamnations,

— de l’infirmer pour le surplus,

— de juger que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— de condamner la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express au paiement des sommes suivantes:

• 3 466,64 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

• 346 euros au titre des congés payés afférents,

• 1 455,06 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

• 17 333,20 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

• 1 750 euros à titre de rappel de salaire afférent à la période de mise à pied conservatoire

• 175 euros au titre des congés payés afférents,

• 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

L’ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 14 janvier 2021.

MOTIFS

1 – Sur l’exécution déloyale du contrat de travail

Tout contrat de travail comporte une obligation de loyauté qui impose à l’employeur d’exécuter le contrat de bonne foi.

Aux termes de l’article L 4121-1 du code du travail, l’employeur est tenu, pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, de prendre les mesures nécessaires qui comprennent des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail, des actions d’information et de formation et la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés. L’employeur est en outre tenu de veiller à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

Manque à son obligation de sécurité l’employeur qui s’abstient d’appliquer les préconisations du médecin du travail concernant un salarié.

La réparation d’un préjudice résultant d’un manquement de l’employeur suppose que le salarié qui s’en prétend victime produise en justice les éléments de nature à établir d’une part la réalité du manquement et d’autre part l’existence et l’étendue du préjudice en résultant.

En l’espèce, le salarié soutient à l’appui de sa demande à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité en s’abstenant de respecter les préconisations du médecin du travail, et donc de procéder à un aménagement ou une adaptation de son poste de travail, en ce que le salarié a:

— effectué chaque semaine des trajets de 1 000 kilomètres entre Corbas et Roissy;

— continué à charger et à décharger les camions et à manipuler les barres métalliques qu’il livrait aux clients.

Il ajoute que ces conditions de travail dégradées sont à l’origine de la détérioration de son état de santé.

L’employeur conteste tout manquement à l’obligation de sécurité et donc toute exécution déloyale du contrat de travail.

La cour constate que les avis d’aptitude établis par le médecin du travail dans le cadre de la visite de reprise par le salarié de son poste dans l’entreprise à la suite de l’accident du travail du 3 août 2012 sont rédigés somme suit:

— le 5 avril 2013: 'Apte jusqu’au mardi 09.04.2013 à 8h 1/4. Jusque là une adaptation de poste (pas de manipulation de barres métalliques) est nécessaire.';

— le 9 avril 2013: 'Apte 3 mois – à revoir dans 3 mois. Lorsque c’est possible éviter le port des longueurs métalliques et les manutentions lourdes.';

— le 9 juillet 2013: 'Apte 6 mois – à revoir dans 6 mois. Dans la mesure du possible, poursuivre l’aménagement du poste: privilégier boîte automatique; éviter la manutention de charges de plus de 15 kg.'.

S’agissant d’abord des faits reposant sur le parcours de longues distances, le salarié verse aux débats quatre fiches de liaison routières qui établissent qu’il a effectué des parcours entre Corbas et Roissy les 26 mai 2013, 7 juillet 2013, 14 juillet 2013 et 28 juillet 2013.

En retenant que les avis précités du médecin du travail ne concernent pas les distances parcourues par le salarié, la cour dit qu’aucune exécution déloyale du contrat de travail n’est caractérisée de ce chef.

En ce qui concerne ensuite l’aménagement et l’adaptation du poste de travail du salarié dans le cadre des préconisations du médecin du travail, la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express verse aux débats les attestations de M. Z (employé logistique) et de Mme A (affreteur) qui indiquent d’une part que le salarié n’a jamais effectué les opérations de chargement et déchargement, et d’autre part que ces opérations sont effectuées uniquement le soir par les employés du service logistique de la société.

Or, ces attestations n’indiquent pas si les faits rapportés se situent postérieurement aux restrictions d’aptitude énoncées par le médecin du travail.

Et la circonstance que le médecin du travail évoque dans son avis du 9 juillet 2013 une poursuite des aménagements ne permet de savoir si ceux-ci ont été effectivement réalisés par l’employeur, la formulation employée pouvant tout aussi bien indiquer que le médecin du travail réitère ses préconisations.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express n’a pas procédé à l’aménagement ni à l’adaptation du poste de travail du salarié dans les conditions préconisées par le médecin du travail dans ses avis d’aptitude rendus les 5 avril 2013, 9 avril 2013 et 9 juillet 2013.

Ces manquements constituent une exécution déloyale du contrat de travail.

Eu égard aux éléments de la cause, la cour dit que le préjudice subi par le salarié du fait de ce manquement a justement été apprécié par le conseil de prud’hommes de sorte que le jugement déféré est confirmé de ce chef.

2 – Sur la rupture du contrat de travail

Aux termes de l’article L.1232-1 du code du travail, le licenciement par l’employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte des dispositions combinées des articles L.1232-1, L.1232-6, L.1234-1 et L.1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d’un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l’employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d’une part d’établir l’exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d’autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise pendant la durée limitée du préavis.

En l’espèce, il ressort de la lettre de licenciement pour faute grave dont les termes ont été restitués ci-dessus que la société reproche au salarié divers griefs que le salarié conteste et qu’il convient d’examiner successivement.

2.1. Sur la vente de palette

Selon l’article L 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où

l’employeur en a eu connaissance.

Lorsque le déclenchement des poursuites disciplinaires a lieu plus de deux mois après les faits fautifs, il appartient à l’employeur de rapporter lui-même la preuve qu’il n’a eu connaissance de ceux-ci que dans les deux mois ayant précédé l’engagement de la procédure disciplinaire qui correspond à la date de convocation à l’entretien préalable.

En l’espèce, l’employeur reproche au salarié d’avoir vendu des palettes appartenant à la société.

Le salarié fait valoir au soutien de sa demande en licenciement sans cause réelle et sérieuse notamment que ce grief est prescrit.

La cour relève que les faits litigieux ont été commis le 7 juin 2013 et que le licenciement a été mis en oeuvre le 9 août 2013, date de la remise en main propre de la lettre de convocation à l’entretien préalable.

Or, la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express ne verse aux débats aucun élément de nature à établir qu’elle n’a eu connaissance des faits que dans les deux mois ayant précédé le 9 août 2013.

Il s’ensuit que le grief est prescrit et ne peut donc pas fonder le licenciement.

2.2. Sur les saisies manuelles de la carte conducteur

L’employeur reproche au salarié d’avoir à plusieurs reprises manuellement ajouté des heures sur sa carte conducteur et d’avoir ainsi créé des heures de travail donnant lieu à rémunération d’heures supplémentaires.

Le salarié conteste le grief en faisant valoir qu’il avait une pratique consistant à ajouter manuellement des heures de travail qu’il avait véritablement accomplies. Il se prévaut d’une tolérance de l’employeur en ce que lors d’un entretien qui a eu lieu le 1er août 2013 avec M. B (responsable des ressources humaines) et avec M. X il a fait état de sa pratique, et que l’employeur n’a alors pris aucune sanction à son encontre.

La cour dit que le salarié est mal fondé en son moyen dès lors qu’il est constant que l’employeur lui a remis le 9 août 2013 un courrier de convocation préalable à licenciement.

Les faits sont donc établis.

2.3. Sur le cumul d’emploi

La société Lyon Service Transport Express reproche au salarié d’avoir exercé un autre emploi pour le compte d’un autre employeur au mois de juillet 2013, et d’avoir maintenu ce cumul d’emploi à compter du 3 août 2013, alors qu’il lui avait été rappelé à l’occasion d’un entretien le 1er août 2013 que l’article 13 du contrat de travail lui interdisait d’exercer une activité professionnelle complémentaire sans autorisation expresse de l’entreprise.

Le salarié soutient que l’employeur a été informé du cumul d’emploi, qu’il n’a adressé aucune mise en demeure au salarié et qu’il lui a régulièrement imposé des déplacements le dimanche.

La cour dit que les faits sont établis dès lors que le salarié, qui ne conteste pas la matérialité du cumul en litige, ne verse aux débats aucun élément de nature à justifier de la réalité de l’autorisation de l’employeur à un cumul d’emplois conformément aux stipulations du contrat de travail, desquelles il ne résulte d’ailleurs à aucun moment que l’employeur serait tenu de délivrer au salarié une mise en

demeure d’avoir à cesser le cumul d’emploi.

Et là encore, est inopérante la circonstance que la société Lyon Service Transport Express n’a pris aucune sanction à l’encontre du salarié lorsqu’elle a eu connaissance du cumul à l’occasion d’un entretien qui a eu lieu le 1er août 2013 avec M. B et M. X, responsable des ressources humaines, dès lors que l’employeur a remis au salarié le 9 août 2013 un courrier de convocation préalable à licenciement

Les faits sont donc établis.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express rapporte la preuve de faits qui constituent une violation par le salarié des obligations découlant de son contrat de travail et qui rendent impossible le maintien de ce salarié dans l’entreprise pendant la durée limitée du préavis.

En conséquence, la cour confirme le jugement déféré en ce qu’il a jugé que le licenciement pour faute grave est donc justifié et en ce qu’il a débouté le salarié de ses demandes au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2 - Sur le rappel de salaires

Il résulte des dispositions de l’article L 1332-3 du code du travail que seule une faute grave peut justifier le non-paiement du salaire pendant une mise à pied conservatoire.

En l’espèce, le licenciement reposant sur une faute grave, la cour dit que le salarié est mal fondé en ses demandes à titre de rappel de salaire afférent à la mise à pied conservatoire, de sorte que le jugement déféré est confirmé en ce qu’il les a rejetées.

3 – Sur le travail dissimulé

Il résulte de l’article L.8221-1 du code du travail qu’est prohibé le travail totalement ou partiellement dissimulé par dissimulation d’emploi salarié; aux termes des dispositions de l’article L 8221-5 du code du travail dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur notamment de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Il résulte de l’article L. 8223-1 du code du travail qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l’employeur a recours en commettant les faits prévus à l’article L.8221-5 du code du travail a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient

l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

En l’espèce, le salarié fait valoir à l’appui de sa demande en indemnité pour travail dissimulé qu’il a effectué des heures de travail non déclarées et non rémunérées les dimanches au moyen de véhicules qui n’étaient pas équipés de matériel chronotachygraphe permettant l’enregistrement des heures travaillées.

La cour relève d’abord que le salarié ne présente aucune demande à titre de rappel de salaire pour des heures supplémentaires en expliquant qu’il n’a pas conservé la totalité des feuilles de route et qu’il n’a pas tenu de décompte précis des heures supplémentaires qu’il serait en droit de réclamer.

S’agissant des pièces produites par le salarié à l’appui de sa demande au titre d’un travail dissimulé, la cour relève:

— que les feuilles de route ne concernent que quatre journées de la relation de travail, à savoir les 26 mai 2013, 7 juillet 2013, 14 juillet 2013 et 28 juillet 2013;

— que les attestations de M. C et de M. D se bornent à indiquer qu’ils ont effectué, à l’instar du salarié, des heures supplémentaires qui ne leur ont pas été rémunérées malgré leurs demandes, ces attestations étant dépourvues de faits précis et datés;

— qu’un chèque a été établi le 19 juillet 2013 par M. X à l’ordre de l’épouse du salarié pour un montant de 1 370 euros; toutefois, aucun élément du dossier ne permet de rattacher ce chèque à une rémunération d’heures supplémentaires accomplies par le salarié.

Il s’ensuit que le salarié ne produit pas d’éléments suffisamment précis quant aux heures supplémentaires qu’il prétend avoir réalisées, étant précisé qu’il ne donne aucune indication sur le volume de ces heures dont seul le principe est allégué.

En conséquence, la réalité des heures supplémentaires invoquées n’est pas établie de sorte que le salarié est mal fondé à réclamer une indemnité pour travail dissimulé.

En conséquence, en infirmant le jugement déféré, la cour rejette la demande à titre d’indemnité pour travail dissimulé.

4 – sur les demandes accessoires

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a mis à la charge de la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express les dépens de première instance et en ce qu’il a alloué au salarié une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express est condamnée aux dépens d’appel.

L’équité et la situation économique respective des parties justifient qu’il ne soit pas fait application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement,

INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a condamné la société Edax Transport anciennement

dénommée la société Lyon Service Transport Express à payer à M. E Y la somme de 10 399.92 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé,

STATUANT sur le chef infirmé,

REJETTE la demande à titre d’indemnité pour travail dissimulé,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses autres dispositions,

Y AJOUTANT,

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d’appel,

CONDAMNE la société Edax Transport anciennement dénommée la société Lyon Service Transport Express aux dépens d’appel.

LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE

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