Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 1er mars 2017, n° 14/20917

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 - ch. 2, 1er mars 2017, n° 14/20917
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 14/20917
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 25 septembre 2014, N° 13/02056
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS Pôle 4 – Chambre 2 ARRET DU 1er MARS 2017 (n° , 10 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 14/20917

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Septembre 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 13/02056

APPELANT

Monsieur H A

Né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté par Me Frédéric LALLEMENT de la SCP BOLLING – DURAND – LALLEMENT, avocat postulant au barreau de PARIS, toque : P0480

Assisté à l’audience de Me Isabelle HUGUES, avocat plaidant au barreau de PARIS, toque : D0872

INTIMES

Monsieur C X

Né le XXX à XXX

XXX

XXX

Madame J K épouse X

Née le XXX à XXX

XXX

XXX

Représentés et assistés à l’audience de Me Averèle KOUDOYOR, avocat au barreau de PARIS, toque : D1635

Monsieur E Y Né le XXX à XXX

XXX

XXX

Madame L M épouse Y

Née le XXX à XXX

XXX

XXX

Représentés et assistés à l’audience de Me François PILLET, avocat au barreau de PARIS, toque : C1996

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 3 Janvier 2017, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Laure COMTE, Vice-présidente placée, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Loup CARRIERE, Président de chambre,

Monsieur Frédéric ARBELLOT, Conseiller,

Madame Laure COMTE, Vice-présidente placée,

Greffier, lors des débats : Mme Stéphanie JACQUET

Un rapport a été présenté à l’audience par Mme Laure COMTE, vice-présidente placée, dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Monsieur Jean-Loup CARRIERE, président et par Madame Stéphanie JACQUET, greffier présent lors du prononcé.

***

FAITS & PROCÉDURE

M. et Mme X sont copropriétaires occupants d’un appartement situé au 3e étage d’un immeuble régit par le statut de la copropriété situé XXX.

M. A est copropriétaire non occupant d’un appartement situé au 4e étage de l’immeuble juste au-dessus de l’appartement de M. et Mme X. L’appartement est donné à bail à M. et Mme Y, qui ont emménagé en février 2011.

M. et Mme X se sont plaints de nuisances sonores provenant de l’appartement appartenant à M A et occupé par M et Mme Y.

M. et Mme X ont saisi leur assurance la MAIF qui a mandaté le cabinet Blanquet pour mener une expertise amiable. Des mesures acoustiques ont été réalisées.

Par actes des 23 et 24 janvier 2013, M. et Mme X ont assigné, devant le tribunal de grande instance de Paris, M A d’une part, et M et Mme Y d’autre part, en réparation de leurs préjudices.

Par jugement du 26 septembre 2014, le tribunal de grande instance de Paris a :

— déclaré M. et Mme Y et M A responsables des dommages causés à M. et Mme X,

— condamné M. A à déposer le parquet revêtant le sol de son appartement et à poser une moquette ayant les mêmes caractéristiques acoustiques que celle d’origine dans un délai de deux mois à compter de la signification du jugement,

— assorti cette condamnation d’une astreinte provisoire de 150 € par jour de retard jusqu’à l’exécution complète de ces travaux dont M. A devra justifier de la bonne fin auprès de M. et Mme X,

— dit que cette astreinte, prononcée pour une durée maximale d’un an, commencera à courir à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la signification de la décision, à défaut de complète exécution des travaux durant ce délai;

— dit que, le cas échéant, une nouvelle astreinte succédant à la présente, pourra être sollicitée du juge de l’exécution,

— condamné in solidum M. et Mme Y, et M. A à payer à M et Mme X, une indemnité de 37.000 € en réparation de leur préjudice de jouissance,

— réputé non écrite la clause du règlement de copropriété de l’immeuble du XXX stipulant que le revêtement de sol des parties privatives ne pourra être changé « qu’après autorisation du syndic »,

— débouté M. A de sa demande visant à voir réputer non écrite la clause du règlement de copropriété de l’immeuble du XXX à Paris précisant que « le revêtement du sol des parties privatives ne pourra être changé que sous réserve que le matériau à utiliser présente des caractéristiques d’isolation phonique au moins égales à celles du matériau d’origine »,

— condamné M. A à garantir M. et Mme Y de l’ensemble des condamnations prononcées à leur encontre par la présente décision, en ce compris les condamnations prononcées au titre des dépens et des frais irrépétibles non compris dans les dépens,

— débouté M. A de son appel en garantie formé à l’encontre de M. et M Y,

— déclaré irrecevable la demande de M A visant à obtenir la condamnation de M. et Mme X à déposer le parquet revêtant le sol de leur propre appartement et à le remplacer par de la moquette ;

— débouté M. A de sa demande de condamnation de M. et Mme Y, à laisser l’accès à leur appartement pour l’exécution des travaux de dépose du parquet et de pose du nouveau revêtement de sol,

— débouté M. A de ses demandes, fins et conclusions,

— débouté M. et Mme Y de leurs demandes, fins et conclusions ;

— condamné in solidum M. et Mme Y, et M. A aux dépens, qui ne comprendront pas les frais de l’expertise Blanquet,

— condamné in solidum M. et Mme Y, et M. A à payer à M. et Mme X, une indemnité totale de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire.

M A a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 17 octobre 2014.

La procédure devant la cour a été clôturée le 23 novembre 2016.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions du 22 novembre 2016 par lesquelles H A, appelant, invite la cour, au visa des articles 8 de la loi du 10 juillet 1965, 544 et 1382 du code civil, à :

— infirmer le jugement dans sa totalité, sauf en ce qu’il a déclaré réputée non écrite la clause du règlement de copropriété page 28 n° 9 énonçant que le revêtement des parties privatives ne pourra être changé qu’après autorisation du syndic,

— débouter M. et Mme Y et M. et Mme X de leurs appels incidents,

— débouter M. et Mme Y et M. et Mme X de toutes leurs demandes complémentaires,

— condamner M. et Mme X à lui payer la somme de 15.000 € au titre du préjudice subi par l’exécution forcée du jugement,

subsidiairement,

— réduire les dommages et intérêts de M. et Mme X à la somme d’un euro par mois, et les condamner solidairement M. et Mme X à restituer les sommes versées en vertu de l’exécution provisoire,

— condamner M. et Mme à remettre la moquette dans tout leur appartement sous astreinte de 150 € par jour de retard dans le mois de la signification de l’arrêt,

— condamner M. et Mme X en toute hypothèse à lui payer la somme de 5.000 € d’article 700 du code de procédure civile, au stade de l’appel,

— condamner solidairement M et Mme Y à le garantir de toute condamnation éventuelle à payer des dommages et intérêts au profit de M. et Mme X,

— débouter M et Mme Y de toute demande à son encontre,

— condamner M et Mme X solidairement en tous les dépens d’appel ; Il explique que :

— en réalisant dans leur propre appartement de travaux de changement de revêtement, générant une isolation acoustique analogue à celle de M A, différente de celle d’origine, M. et Mme X ont nécessairement admis, à l’instar de nombreux copropriétaires de l’immeuble, que le revêtement d’origine n’était pas adapté et pouvait donc être modifié dans le respect des normes acoustiques des arrêtés de 1969 applicables à l’immeuble,

— M. et Mme X ne sauraient avoir plus de droits que leur vendeur s’ils ont acquis leur appartement en l’état,

— la clause du règlement de copropriété page 28 n°9 énonçant que le revêtement des parties privatives ne pourra être changé qu’après autorisation du syndic et sous réserve que le matériau à utiliser présente des caractéristiques d’isolation phonique au moins égales à celles du matériau d’origine, est abusive et doit être réputée non écrite,

— en vertu de l’égalité entre copropriétaires, cette clause ne peut pas être invoquée à son l’encontre par M. et Mme X qui ne la respectent pas eux-mêmes,

— M. et Mme X n’établissent aucun trouble anormal de jouissance lié à ce revêtement, le respect desdits arrêtés étant établi par leur propre expert, ceux-ci se contentant d’affirmer subir un trouble anormal du voisinage en raison de la seule modification du revêtement de sol de l’appartement situé au-dessus du leur,

— un rapport d’expertise amiable ne peut revêtir la valeur de preuve et d’impartialité de celui d’un expert judiciaire notamment en ce qui concerne le chiffrage aléatoire et infondée d’un préjudice de jouissance totalement contesté,

— leur chiffrage de 1.000 € de dommages et intérêts par mois est totalement infondé en l’absence de preuve de la nature et de l’anormalité d’un trouble de voisinage,

— l’action de M. et Mme X est constitutive d’un abus de droit ;

Vu les conclusions du 13 mars 2015 par lesquelles C et J X, intimés ayant formé appel incident, demandent à la cour, au visa des articles 564 du code de procédure civile, 544, 1382 du code civil, et sur le fondement de la théorie du trouble anormal du voisinage, de :

— débouter M. A et M. et Mme Y en leurs demandes, fins et conclusions,

— confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a déclaré réputée non écrite la clause prévoyant d’obtenir l’autorisation du syndic de copropriété pour modifier le revêtement du sol, puisque cette clause est conforme à la destination de l’immeuble,

Statuant à nouveau, y ajouter,

— dire qu’il n’y a lieu de réputer non écrite la clause prévoyant d’obtenir l’autorisation du syndic de copropriété pour modifier le revêtement du sol,

— confirmer les condamnations au titre de l’article 700 du code de procédure civile en première instance, et condamner in solidum M. A, M. et Mme Y à leur payer la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

— condamner in solidum M. A, M. et Mme Y aux dépens ; Ils font valoir que :

— le cabinet Blanquet a conclu que la pose du parquet avait dégradé l’isolation phonique dans les deux appartements dont il est question,

— M. A a réalisé les travaux et remplacé son parquet litigieux par de la moquette le 19 novembre 2014, soit postérieurement au jugement du 26 septembre 2014,

— M. et Mme Y comme M. D n’ont pas contesté les constatations et les conclusions de l’expertise amiable contradictoire, et n’ont pas sollicité de contre-expertise,

— la qualité acoustique de leur appartement a été fortement dégradée suite à la modification du revêtement du plancher de l’appartement A, puisque la différence de niveau de bruit de choc est supérieure à 5 dB,

— des nuisances sonores constituent un trouble anormal de voisinage, tel que le bruit provenant d’un appartement, entrainant la responsabilité de plein droit du propriétaire du bien immobilier dont provient le bruit,

— la clause du règlement de la copropriété prévoyant d’obtenir l’autorisation du syndic de copropriété pour modifier le revêtement du sol doit être déclarée conforme à la destination de l’immeuble,

— M. A et M. et Mme Y ont commis une faute en posant du parquet qui ne répond pas aux caractéristiques techniques de la moquette, dégradant ainsi l’isolation acoustique d’origine,

— depuis le mois de février 2011, ils n’ont plus la jouissance paisible de leur appartement ;

Vu les conclusions du 23 avril 2015 par lesquelles E et L Y, intimés ayant formé appel incident, demandent à la cour, au visa des articles 544 et 1382 et 1991 du code civil, 8 de la loi du 10 juillet 1965, de :

— débouter M et Mme X en toutes leurs demandes fins et conclusions,

— débouter M. A en toutes ses demandes, fins et conclusions à leur encontre,

— infirmer le jugement en ce que le premier juge les a condamné in solidum avec M. A, tout en ne retenant aucun grief à leur encontre,

— condamner M. et Mme X à leur régler la somme de 10.000 € au titre du préjudice subi par eux par l’exécution forcée du jugement à leur encontre,

— condamner M. et Mme X à leur régler la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

En tous les cas,

— confirmer le jugement sur le débouté de M. A de sa demande de garantie à leur encontre,

— confirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. A à les garantir de l’ensemble des condamnations prononcées à leur encontre,

— condamner M. et Mme X à leur régler la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, – condamner M. et Mme X solidairement aux dépens d’appel ;

Ils soulignent que :

— M. A a fait poser le parquet dans son appartement lors de leur emménagement comme locataires,

— leur comportement n’est pas responsable des nuisances sonores,

— le rapport de l’assureur des demandeurs indique que les normes sont respectées,

— en dessous du seuil de 70 dB (A), il s’agit d’un inconvénient normal de voisinage que tout un chacun doit supporter, comme cela a été constaté par l’expert,

— le propriétaire troublé doit agir contre le bailleur,

— ce n’est qu’en cas d’abus manifeste de jouissance d’un locataire qu’il peut agir directement contre le locataire responsable, notamment en cas de bruit exagéré et intempestif, ce qui n’est pas le cas en l’espèce,

— les consorts X ne qualifient ni même ne définissent les prétendues « nuisances sonores » qu’ils invoquent sur le fondement de l’article 544,

— le quantum des dommages et intérêts doit être réduit ;

SUR CE,

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;

En application de l’article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;

Sur les troubles subis par M. et Mme X

M. et Mme X indiquent subir « d’importantes nuisances sonores » ; ils expliquent que « tous les bruits de la vie courante tels que pas, chaises, chocs, déplacement et autres, provenant de l’appartement de M. A, ont été grandement amplifiés » depuis que la moquette sur le sol de l’appartement appartenant à M. A a été remplacée par du parquet au cours du 4e trimestre de l’année 2010 ;

Ils précisent que leurs troubles sont dus à la dégradation de l’isolation acoustique ;

Pour étayer leurs affirmations, M. et Mme X produisent le rapport d’expertise amiable établi par le cabinet Blanquet, mandaté par leur assureur ;

L’expert a utilisé une machine à chocs pour établir les mesures ; il relève entre les appartements A (émetteur) et X (récepteur) des niveaux de bruit d’impacts de 66 et 67 dB(A) ; un des tests a été réalisé dans un placard de l’appartement de M. et Mme X afin de déterminer l’isolation phonique avec le revêtement d’origine, seul le placard comprenait encore de la moquette comme revêtement de sol ; la localisation de la machine à choc dans le placard de l’appartement « du haut » est sans incidence sur la qualité des tests, les mesures étant réalisées dans la pièce située à l’aplomb et aucune réserve technique n’est émise par le cabinet Blanquet quant à la méthode ou par tout autre expert à la demande des parties ; il n’y a donc pas lieu de remettre en question les conclusions de l’expertise amiable et la validité des tests réalisés.

L’expert indique que les arrêtés du 14 juin 1969, relatifs aux caractéristiques acoustiques des bâtiments d’habitation et aux modalités d’application de la réglementations, fixent comme valeur limite du niveau de pression acoustique à 73 dB(A) ; il précise que la pose du parquet dans l’appartement appartenant à M. A a dégradé l’isolation acoustique aux bruits de chocs par rapport au revêtement de sol d’origine dans les chambres et le salon de 32 dB(A), alors que l’avis du CNEJAC du mois d’octobre 2001 mentionne que dans le cas d’une modification de revêtement de sol, la qualité acoustique d’un logement voisin est notablement dégradée dès lors que le niveau de bruit de choc standardisé a augmenté de 5 dB ou plus ;

Il n’y a pas lieu d’ordonner une expertise judiciaire, en ce que les conclusions de l’expert amiable sont cohérentes, claires et étayées, et que cette demande apparaît comme tardive, au stade de l’appel ;

Sur la responsabilité de M. A

M. et Mme X fondent leurs demandes à son encontre sur le fondement du trouble anormal du voisinage et celui de l’article 1382 devenu l’article 1240 du code civil ;

Sur le trouble anormal de voisinage

Il est de principe que l’exercice même légitime du droit de propriété devient générateur de responsabilité lorsque le trouble qui en résulte à autrui dépasse la mesure des obligations ordinaires du voisinage ;

La responsabilité du propriétaire, qui a accompli des actes ayant causé des troubles aux voisins, est engagée même si les normes réglementaires sont respectées ;

La circonstance, que les plaignants aient eux aussi remplacés dans leur appartement le revêtement de sol d’origine par du parquet et que la dégradation quasi-identique de l’isolation acoustique avec l’appartement du dessous ait été constatée, est sans incidence sur la présente affaire ; en effet, il s’agit ici d’apprécier seulement le trouble invoqué par M. et Mme X dans leur appartement, provenant du lot appartenant à M A ;

Par ailleurs, même s’il apparaît que les normes des arrêtés du 14 juin 1969, relatifs aux caractéristiques acoustiques des bâtiments d’habitation et aux modalités d’application de la réglementation, fixent comme valeur limite du niveau de pression acoustique à 73 dB(A), et que le niveau de pression acoustique dans l’appartement M. et Mme X est de 66 et de 67 dB (A), selon les pièces de l’appartement, il n’en demeure pas moins que ce seul élément ne suffit pas à considérer que les bruits entendus par M. et Mme X dans leur appartement ne constituent pas des inconvénients normaux du voisinage ;

En effet, la dégradation de l’isolation acoustique aux bruits (de chocs ou de la vie courante) de 32 dB(A) dans l’appartement de M. et Mme X en provenance de celui appartenant M. A est très importante, pour se rapprocher de la limite maximum autorisée réglementairement ; cette circonstance constitue un trouble qui excède les inconvénients normaux du voisinage, en ce que les bruits de la vie courante sont très fortement amplifiés par rapport à la situation antérieure ;

La forte dégradation acoustique provient de l’appartement de M. F ; ainsi, en sa qualité de propriétaire du bien à l’origine du trouble anormal du voisinage subi par M. et Mme X, celui-ci est responsable de plein droit du préjudice subi par ceux-ci ;

Sur la faute de M A M. et Mme X reprochent à M. A d’avoir commis une faute en installant, dans l’appartement dont il est propriétaire, un parquet, qui ne répond pas aux caractéristiques techniques de la moquette, conformément aux dispositions du règlement de copropriété ;

• Sur les clauses du règlement de copropriété

Aux termes des dispositions de l’article 8-I al 2 de la loi du 10 juillet 1965, le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l’immeuble, telle qu’elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation ;

Ainsi, le règlement de copropriété peut contenir des clauses relatives à l’usage des parties privatives dans la mesure où ces clauses ont pour objet d’assurer le respect de la destination de l’immeuble ou d’assurer la défense des intérêts collectifs des copropriétaires ;

M. G conteste la validité de la clause de l’article 9 de la deuxième partie du règlement de copropriété (en sa page 28) qui indique que « le revêtement du sol des parties privatives ne pourra être changé qu’après autorisation du syndic et sous réserve que le matériau à utiliser présente des caractéristiques d’isolation phonique au moins égales à celles du matériau d’origine » ;

La libre jouissance par chaque copropriétaire des lots privatifs a pour limite la condition de ne pas porter atteinte aux droits des autres copropriétaires, en vertu de l’article 9 de la loi précitée ;

Ainsi, il apparaît que l’obligation de demander l’autorisation préalable au syndic afin de pouvoir réaliser les travaux constitue une restriction aux droits des copropriétaires n’est pas justifiée par la destination de l’immeuble ; le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a réputé non écrite cette partie de la clause ;

En revanche, s’agissant de l’obligation d’installation d’un revêtement de sol garantissant a minima les mêmes qualités acoustiques que celui d’origine est conforme à la destination de l’immeuble, cette restriction étant proportionnée entre la liberté du copropriétaire sur son lot et l’obligation de ce dernier de ne pas porter atteinte aux droits des autres copropriétaires, notamment par la perte de confort acoustique ; le jugement doit être confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de M. A de ce chef ;

Sur la violation de l’article 9 de la deuxième partie du règlement de copropriété (en sa page 28)

Il ressort des résultats de l’expertise menée par le cabinet Blanquet et des éléments développés ci-dessus, que le parquet installé au sol, en remplacement de la moquette d’origine, ne revêt pas les caractéristiques d’isolation phonique du matériau d’origine, l’isolation acoustique de l’appartement de M. A ayant été dégradée de 32 dB(A) suite à la réalisation des travaux ; ainsi, le revêtement qui aurait dû être installé dans l’appartement propriété de M. A devait assurer au minimum un niveau de bruit de choc de 34 dB (A) ; or, en l’espèce, le niveau de bruit de choc du nouveau revêtement dans l’appartement de M. et Mme X est de 66 dB (A) ;

Au regard de ces éléments, M. A a commis une faute engageant sa responsabilité à l’égard de M. et Mme X ;

Sur la responsabilité des époux Y

M. et Mme X reprochent à M. et Mme Y d’avoir commis une faute en installant, dans l’appartement, un parquet, qui ne répond pas aux caractéristiques techniques de la moquette, conformément aux dispositions du règlement de copropriété ; Il ressort des éléments du dossier que les travaux de remplacement de la moquette par du parquet ont été menés par M. et Mme Y, la facture 29 décembre 2010 émise par la société DECO PLUS au nom de M. et Mme Y le démontre ;

Or, il est de principe que le règlement de copropriété s’impose aux locataires ; dans ces conditions, M. et Mme Y, en menant les travaux de remplacement de la moquette, auraient dû s’assurer que les dispositions du règlement de copropriété étaient respectées par le choix du nouveau revêtement de sol ; dès lors, ils auraient dû vérifier que le nouveau revêtement de sol garantissait a minima les mêmes qualités acoustiques que la moquette remplacée ;

En conséquence, en installant un revêtement de sol dégradant les qualités acoustiques de l’appartement voisin appartenant à M. et Mme X, contrairement aux obligations imposées par le règlement de copropriété, M. et Mme Y ont commis une faute à l’égard de ceux-ci ; le jugement doit être confirmé sur ce point ;

Sur la réparation du préjudice de M. et Mme X

Il ressort des éléments du dossier que la dépose du revêtement de sol litigieux et l’installation d’une moquette ont été réalisés du 19 au 21 novembre 2014 ;

M. et Mme X ont subi un trouble de jouissance dans leur appartement pendant 37 mois, dans les pièces principales de leur appartement, à savoir les chambres et le salon ;

L’expert du cabinet Blanquet, dans un courrier du 25 septembre 2012, indique estimer le préjudice subi par M. et Mme X à 50% de la valeur locative de leur appartement soit 1.000 € par mois, correspondant aux troubles subis dans les chambres et le salon ;

Aucun élément contraire des parties ne vient contredire le montant de la valeur locative de l’appartement de M. et Mme X, ni le pourcentage retenu par l’expert, étant observé que les chambres et le salon constituent les pièces principales du logement dans lesquels les nuisances acoustiques sont les plus éprouvées par les occupants ;

Dans ces conditions, les troubles ayant duré 37 mois, le jugement doit être confirmé en ce qu’il a fixé le préjudice subi par M. et Mme X en raison de la dégradation de l’isolation phonique de l’appartement de M. A à la somme de 37.000 € ;

Sur les appels en garantie

Il n’est pas contesté que M. A a été informé avisé des travaux engagés par M. et Mme Y et a donné son accord ; ainsi, en sa qualité de propriétaire, il devait s’assurer que les travaux menés par ses locataires étaient conformes au règlement de copropriété ;

Par ailleurs, le trouble de jouissance subi par M. et Mme X n’est pas dû aux bruits proprement dits des locataires, M. et Mme Y, mais à la dégradation de l’isolation phonique de l’appartement ; M. A, propriétaire de l’appartement et donc du parquet installé au sol, ne peut donc reprocher à ses locataires d’être responsables des bruits subis par M. et Mme X ;

Dans conditions, le jugement doit être confirmé en ce qu’il condamné M. A à garantir M. et Mme Y de la condamnation prononcée à leur encontre, y compris s’agissant de la condamnation aux dépens et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et sera débouté de sa demande de garantie à leur égard ;

Sur l’enlèvement par M. et Mme X du parquet installé dans leur appartement M. A invoque comme unique motif le respect du règlement de copropriété par l’ensemble des copropriétaires, lui-même ayant été contraints de déposer le parquet de son appartement ;

Or, il ne subit aucun préjudice causé par la présence de ce parquet ; dès lors, en sa qualité de copropriétaire non occupant, M. A n’a pas qualité pour solliciter la dépose du parquet du sol de l’appartement de M. et Mme X ;

Le jugement est confirmé sur ce point ;

Sur les demandes de dommages et intérêts formulées par M. A et M. et Mme Y

M. A ainsi que M. et Mme Y reprochent à M. et Mme X les conditions dans lesquelles l’exécution forcée du jugement de première instance s’est déroulée à leur encontre.

M. et Mme X ont utilisé les voies de droit pour exécuter le jugement de première instance, étant rappelé qu’il est assorti de l’exécution provisoire ; ces circonstances ne sont donc pas fautives et ne peuvent donner lieu à l’octroi de dommages et intérêts ;

Il y a lieu de débouter M. A et M. et Mme Y de leurs demandes de ce chef ;

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formulée par M. et Mme Y ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l’application qui y a été équitablement faite des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

H A, E et L Y, parties perdantes, doivent être condamnés in solidum aux dépens d’appel, ainsi qu’à payer à C et J X la somme supplémentaire de 2.000 € par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Il n’y a pas lieu de condamner H A à garantir la condamnation de E et L Y au titre des dépens et des frais irrépétibles de M. et Mme X dans le cadre de la procédure d’appel, M. et Mm Y ayant formulée des demandes propres de dommages-intérêts qui ont été rejetées ;

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l’article 700 du code de procédure civile formulée par H A, E et L Y ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant, par décision rendue par mise à disposition, contradictoirement,

Confirme le jugement,

Y ajoutant,

Condamne in solidum H A, E et L Y, parties perdantes, aux dépens d’appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer à C et J X la somme supplémentaire de 2.000 € par application de l’article 700 du même code en cause d’appel ;

Rejette toute autre demandes.

Le Greffier, Le Président,

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Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 1er mars 2017, n° 14/20917