Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 16 septembre 2021, n° 20/07397

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Chronologie de l’affaire

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www.murielle-cahen.fr · 22 novembre 2021

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 9, 16 sept. 2021, n° 20/07397
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/07397
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 16 avril 2020, N° 2016045015
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 9

ARRET DU 16 SEPTEMBRE 2021

(n° , 20 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/07397 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CB3YK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Avril 2020 – Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2016045015

APPELANTE

SAS K L MANAGEMENT, tant en son nom propre qu’en qualité de société de gestion et au nom des Fonds Commun de Placement K MICRO ENTREPRISE et K MULTI CAPS

N° SIRET : 447 661 323

[…]

[…]

Représentée par Me François TEYTAUD de l’AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125, avocat postulant

Représentée par Me Dominique STUCKI et par Me Sylvain CLAVÉ, avocats au barreau de PARIS, toque : L0076, avocats plaidant

INTIMES

Monsieur C X

né le […] à […]

[…]

[…]

S.A. E F

N° SIRET : 402 098 917

[…]

[…]

Représentés par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant

Représentés par Me Philippe GINESTIE, avocat au barreau de PARIS, toque : R138, avocat plaidant

S.C.A. E

N° SIRET : 390 965 895

[…]

[…]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065, avocat postulant

Représentée par Me Frédéric PELTIER et par Me Clément WIERRE, avocats au barreau de PARIS, toque : L0099, avocats plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 27 mai 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Michèle PICARD, Présidente

Madame Isabelle ROHART-MESSAGER, Conseillère

Madame Déborah CORICON, Conseillère

qui en ont délibéré

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

— contradictoire

— rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Michèle PICARD, Présidente et par Madame FOULON, Greffière .

**********

E est une société de capital risque (private equity) en commandite par actions cotée à la bourse de Paris sur Euronext depuis 1995 qui investit aux côtés ou au travers de fonds du groupe Apax, un groupe d’investissement dans le non coté, créé et animé par monsieur C X.

Son associé commandité et gérant, est la société E F, dirigée et contrôlée directement ou indirectement, via notamment la société holding G Sas, à près de 100% par monsieur C X.

Deux autres sociétés dirigées par M. X, G Partners et G Snc sont associées commanditaires de E pour un peu plus du quart de son capital.

La société K L Management (ci après K) est une société de gestion, qui gère des fonds d’investissements pour une clientèle institutionnelle. Deux fonds communs de placement gérés par elle, K Micro Entreprise et K Multi Caps, sont, à l’époque des faits, actionnaires commanditaires de la société en commandite par actions E, à hauteur d’environ 9% de son capital.

Considérant que la décote du cours de bourse de la société E par rapport à son actif net par action résultait de la gestion et notamment des frais supportés par E au profit d’E F, la société K a assigné, dans le cadre d’une action ut singuli, les sociétés E et E F et M. X devant le tribunal de commerce de Paris par acte du 8 juillet 2016 aux fins de les voir condamnés à réparer le préjudice causé à la société E du fait de leurs fautes de gestion.

Le 12 septembre 2018, à la suite d’une OPA initiée par la société G Sas, commanditaire, Monsieur X détenait directement ou indirectement plus de 68% du capital et des droits de vote d’E, la participation des fonds K étant revenue à moins de 2% du capital.

Par jugement avant dire droit du 1er mars 2019, le tribunal de commerce de Paris a':

— Débouté les sociétés E et M. X':

.de leur exception de nullité fondée sur la nullité de l’assignation pour défaut de pouvoir de K L Management,

.de leur fin de non recevoir pour défaut de qualité à agir de K L Management,

.de leur fin de non recevoir de la demande de K L Management fondée sur la convention du 9 juillet 2013, au motif de la prescription,

.de leurs fins de non recevoir fondées sur l’abus de bien sociaux et des infraction au code Afep Medef au motif de l’incompétence du tribunal,

— Joint au fond la fin de non recevoir quant à la demande de K L Management, fondée sur la double facturation d’honoraires au motif de la prescription.

Par jugement du 17 avril 2020, le tribunal de commerce de Paris a :

— Dit K recevable en son intervention volontaire et en ses demandes relatives à une double facturation d’honoraires à compter du 8 juillet 2013,

— Débouté K de toutes ses demandes,

— Condamné K à payer les sommes de 100.000 euros de dommages-intérêts à E, 200.000 euros de dommages-intérêts à M. X, ainsi que les sommes de 30.000 euros à E, 15.000 euros à E F et 15.000 euros à M. X sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société K a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 15 juin 2020.

***

Dans ses dernières conclusions auxquelles il est expressément référé, notifiées par voie électronique le 25 mai 2021, la société K demande à la cour de :

Sur l’incident de procédure

— Révoquer l’ordonnance de clôture rendue le 6 mai 2021,

A titre principal

— Déclarer les présentes conclusions recevables eu égard au respect du principe du contradictoire,

Au besoin

— Ordonner la réouverture des débats et la fixation d’une nouvelle date de clôture et de plaidoiries et, partant, la révocation de la clôture des débats prononcée le 6 mai 2021,

A titre subsidiaire

— Rejeter des débats les conclusions de la société E signifiées du 4 mai 2021 et les pièces n°48 à 55 versées à l’appui desdites écritures le 5 mai 2021 ainsi que les 10 dernières pièces d’E F et Monsieur X comme étant tardives,

Il est ensuite demandé à la cour d’appel de Paris de :

— Confirmer le jugement avant dire droit du Tribunal de commerce de Paris du 1er mars 2019 en toutes ses dispositions ;

— Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 17 avril 2020 en toutes ses dispositions, sauf (i) en ce qu’il a dit K recevable en son intervention volontaire (ii) en ce qu’il a reconnu le droit de K de publier la note du 17 avril 2015 et de la faire apparaître sur son site internet et (iii) en ce qu’il a dit K recevable en ses demandes relatives à la violation du plafond de 2% fixé par l’article 17.1 des statuts d’E à compter du 8 juillet 2013 ;

Statuant à nouveau,

A titre principal,

La Convention d’assistance conclue entre E F et E, le 9 juillet 2013 ayant été soustraite aux dispositions légales et statutaires relative aux conventions réglementées, constituant ainsi une faute de gestion d’E F et Monsieur X H leur responsabilité (p. 54 des présentes conclusions) :

— Condamner la société E F à payer à la société E la somme de 4.347.100 euros HT à titre de dommages et intérêts correspondant aux redevances HT injustifiées perçues par elle et supportées par E en exécution de la Convention du 9 juillet 2013 au cours des exercices 2013 à 2018, cette somme étant à parfaire au regard des sommes effectivement facturées au titre de la période 2013 jusqu’au jour du jugement;

Et,

E F et Monsieur X ayant commis une faute de gestion, en faisant procéder au rachat par la société E de ses 12.164 actions B détenues par E F et son équipe de gestion, en violation du plafond d’auto-détention prescrit à l’article L225-210 du Code de commerce (p. 60 des présentes conclusions) :

— Condamner la société E F à payer à la société E la somme de 121.640 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au montant du rachat par la société E des actions

B détenues par E F et son équipe de gestion,

Et,

L’absence de déduction totale des honoraires de gestion prélevés sur les fonds dans lesquels investit E à hauteur des capitaux souscrits par E donnant lieu à un dépassement du plafond statutaire fixé par l’article 17 des statuts d’E, caractérisant une faute de gestion H la responsabilité d’E F et de Monsieur X;

Les rémunérations ainsi versées à E F et Monsieur X étant contraires à l’intérêt social (p.68 des présentes conclusions) :

— Condamner in solidum la société E F et Monsieur X à payer à la société E la somme de 23, 1 millions d’euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi ;

En tout état de cause,

— Débouter la société E, la société E F et Monsieur X de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

— Condamner la société E F et Monsieur X verser à la société K L Management la somme de 75.000 euros chacun au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

— Condamner in solidum la société E F et Monsiur X aux entiers dépens de l’instance.

***

Dans leurs dernières conclusions auxquelles il est expressément référé, notifiées par voie électronique le 3 mai 2021, la société E F et M. X demandent à la cour de':

— Infirmer le jugement avant dire droit du 1er mars 2019 en ce qu’il :

. les a débouté de leur exception de nullité de l’assignation pour défaut de pouvoir de la société K L Management ;

. les a débouté de leur fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir de la société K L Management ;

. les a débouté de leur fin de non-recevoir , fondée sur la convention du 9 juillet 2013 en raison de la prescription ;

— les a débouté de leur fin de non-recevoir les demandes de la société K L Management fondées sur l’abus de biens sociaux et des infractions au code AFEP MEDEF au motif de l’incompétence du Tribunal ;

Et statuant à nouveau :

— Déclarer nulle l’assignation du 8 juillet 2016 pour défaut de pouvoir de la société K L Management pour initier, en sa qualité de société de gestion, l’action ut singuli,

— Déclarer irrecevable la demande de la société K L Management formulée au titre de la violation des règles prescrites par le Code AFEP-MEDEF,

— Déclarer irrecevable l’action ut singuli introduite par la société K L Management qui, n’étant pas actionnaire de la société E, n’a pas de qualité à agir,

— Déclarer irrecevable comme prescrite la demande de la société K L Management relative à la convention d’assistance conclue entre les sociétés E et E F du 9 juillet 2013,

— Infirmer le jugement au fond rendu par le tribunal de commerce de Paris le 17 avril 2020, en ce qu’il a dit la société K L Management recevable en ses demandes relatives à une double facturation d’honoraires à compter du 8 juillet 2013,

Et statuant à nouveau :

— Déclarer irrecevable comme prescrite la demande de la société K L Management relative à la gestion de la trésorerie de la société E F donnant lieu à une double facturation de frais autrement formulé en appel comme une demande relative à l’absence de déduction totale des honoraires de gestion prélevés sur les fonds dans lesquels investit la société E à hauteur des capitaux souscrits par la société E donnant lieu à un dépassement du plafond statutaire fixé par l’article 17 des statuts de la société E, caractérisant une faute de gestion H leur responsabilité,

— Infirmer le jugement au fond rendu par le tribunal de commerce de Paris le 17 avril 2020, en ce qu’il a rejeté leurs autres demandes reconventionnelles, à savoir celles tendant à voir ordonner la cessation de la publication de la note de K AM du 17 avril 2015, ordonner la publication du dispositif du jugement à intervenir sur la page du site Internet de K AM et condamner K AM à réparer les préjudices moral et d’image de la société E F ainsi en ce qu’il a évalué les dommages-intérêts en réparation des préjudices moral et d’image de C X à la somme insuffisante de 200 000 ',

Et statuant à nouveau :

— Ordonner la cessation de la publication, par quelque moyen que ce soit et, en particulier, par voie de publication sur un site Internet, de la note de la société K L Management du 17 avril 2015 sur les frais de gestion et la performance de la société E dans les 2 jours calendaires du prononcé du jugement à intervenir, au besoin sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard ;

— Ordonner la publication du dispositif du jugement à intervenir sur la page d’accueil du site Internet de la société dont l’adresse URL est www.K.com pendant une durée d’un mois à compter de la signification du jugement ainsi que la publication dans deux quotidiens, Les Échos et l’Agefi, et un hebdomadaire, Investir ' Le Journal des Finances, aux frais de la société K L Management et dans la limite de 5 000 euros HT par insertion ;

— Condamner, au titre de la réparation de ce dénigrement par harcèlement, la société K L Management à payer à :

— la société E F les sommes de 500 000 euros à titre de réparation de son préjudice moral et de 1 000 000 euros à titre de réparation de son préjudice d’image;

— C X les sommes de 500 000 euros à titre de réparation de son préjudice moral et de 1 000 000 euros à titre de réparation de son préjudice d’image.

— Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 17 avril 2020 en ce qu’il a débouté la société K L Management de toutes ses demandes, fins et conclusions

— En tout état de cause, condamner la société K L Management à payer à chacun d’eux la

somme de 35 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

***

Dans ses dernières conclusions auxquelles il est expressément référé, notifiées par voie électronique le 4 mai 2021, la société E demande à la cour de :

In limine litis :

— Juger l’absence de qualité à agir de la société K L Management ;

— Juger le défaut de pouvoir de la société K L Management pour initier l’action ut singuli en sa qualité de société de gestion ;

En conséquence,

— Infirmer en toutes ses dispositions le jugement avant dire droit rendu par le tribunal de commerce de Paris le 1er mars 2019 ;

Et, statuant à nouveau :

— Déclarer irrecevable l’action exercée par K L Management dans la présente instance ;

— Déclarer l’assignation en date du 8 juillet 2016 nulle ;

Au surplus :

— Constater que les demandes relatives à la double facturation des honoraires et à la convention du 9 juillet 2013 sont prescrites de sorte que l’action les concernant ne saurait être régularisée par l’intervention volontaire de K L Management en sa qualité de société de gestion et pour le compte des Fonds Communs ;

En conséquence,

— Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 17 avril 2020 en ce qu’il a déclaré non prescrites les demandes de K L Management ;

Et, statuant à nouveau :

— Déclarer les demandes relatives à la double facturation des honoraires et à la convention du 9 juillet 2013 irrecevables ;

A titre principal :

— Juger que l’action sociale n’est pas recevable dès lors qu’elle critique l’application de dispositions statutaires sans prétendre à une violation de celles-ci ;

— Juger que les commissions perçues sur les FCP dans lesquels elle a souscrit des parts ne peuvent pas permettre de caractériser une faute de gestion fondée sur une double facturation au regard de la rémunération statutaire de la F ;

— Juger que K L Management n’apporte pas la preuve de l’irrégularité de la convention du 9 juillet 2013 telle qu’interprétée par le conseil de surveillance et les commissaires aux comptes au regard de l’intérêt social et des conditions normales qu’elle comporte pour la réalisation d’opérations

courantes, et qu’il ne peut, dans ces conditions, ni être prononcée l’annulation de ladite convention, ni être caractérisée de faute de gestion sur le fondement de ladite convention ;

— Juger que le rachat des actions B détenues par E F est conforme à l’intérêt social et qu’en tout état de cause il ne lui est pas préjudiciable et qu’elle n’encourt aucun risque de perte sur la détention desdites actions ;

En conséquence,

— Confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 17 avril 2020 en ce qu’il a débouté la société K L Management de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause, à titre reconventionnel :

— Confirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 17 avril 2020 en ce qu’il a retenu que la société K L Management excède manifestement ses droits et fait peser sur elle une pression dénigrante qui constitue une faute réparable ;

— Infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 17 avril 2020 en ce qu’il a estimé le préjudice financier qu’elle subit à 100.000 euros, la déboutant pour le surplus ;

— Infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 17 avril 2020 en ce qu’il a rejeté ses demandes reconventionnelles visant à la réparation de son préjudice d’image et au retrait de toute publication dénigrante la concernant du site internet de la société K L Management ;

En conséquence, statuant à nouveau :

— Condamner la société K L Management à lui payer la somme de 1.341.662,55 euros à titre de réparation de son préjudice financier ;

— Dire que la note publiée par K sur son site internet et maintenue malgré la critique sérieuse émise par l’expert désigné par le tribunal de commerce constitue une faute lui créant un préjudice certain ;

— Condamner la société K L Management à lui payer la somme de 1.000.000 euros à titre de réparation de son préjudice d’image résultant du caractère dénigrant de la note critiquée par l’expert désigné par le tribunal de commerce ;

— Ordonner le retrait de toute publication dénigrante la concernant du site internet de la société K L Management et notamment la note critiquée par l’expert nommé par le tribunal de commerce ;

En tout état de cause :

— Dire que l’action sociale initiée par K L Management est dépourvue de fondements sérieux et constitue un dévoiement des droits d’une actionnaire à prétendre défendre l’intérêt social ;

— Condamner K L Management à lui verser la somme de 100.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Sur la révocation de l’ordonnance de clôture

La société K a sollicité lors de l’audience de plaidoiries la révocation de l’ordonnance de clôture intervenue le 6 mai 2021 du fait de nouvelles conclusions notifiées par les intimés les 3 et 4 mai précédents.

La cour a fait droit à la demande lors de l’audience et la clôture a été fixée au jour de celle ci afin d’assurer le respect du contradictoire.

Sur les notes en délibéré

Après l’audience la société K a communiqué à la cour une note en délibéré qui n’avait pas été sollicitée ni autorisée.

Aux termes des dispositions de l’article 445 du Code de procédure civile 'Après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l’appui de leurs observations, si ce n’est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public, ou à la demande du président dans les cas prévus aux article 442 et 444.'

Cette note sera en conséquence écartée des débats.

Sur la qualité à agir de K

La société E Gestion et M. X exposent que l’action ut singuli de l’article L225-252 du code de commerce est attribuée aux seuls associés, ils en déduisent que l’action intentée par K L Management, qui n’est pas associée d’E est irrecevable sur le fondement des articles 32 et 122 du code de procédure civile.

Ils précisent que dans l’hypothèse où K serait considérée comme agissant en qualité de société de gestion au nom des fonds qu’elle gère, elle n’aurait pas plus qualité à agir, son pouvoir de représentation des fonds communs de placement qu’elle gère étant limité à la défense des droits et intérêts des porteurs de parts. Ils expliquent que l’action ut singuli qui présente la particularité que celui qui a qualité pour agir n’a pas intérêt pour agir ne peut donc entrer dans la définition de l’article L214-8-8 du code monétaire et financier.

La société E expose que l’assignation du 8 juillet 2016, introduite en nom propre par K qui se présente comme unique demanderesse et comme actionnaire d’E dans le dispositif est irrecevable faute de qualité à agir au sens de l’article 31 du code de procédure civile. Elle conteste toute omission ou erreur de plume dès lors que la régularisation dans les conclusions en réponse n’a pas été effectuée. Elle relève que K a estimé devoir intervenir volontairement à l’instance pour régulariser la procédure démontrant ainsi son irrégularité. Elle estime que faute de justifier d’une autorisation expresse des porteurs de parts pour les représenter K ne peut exercer l’action ut singuli et que les actes de procédure effectués en violation de l’article 117 du code de procédure civile sont atteints de nullité pour vice de fond et que le mandat légal de l’article L214-8-8 du code monétaire et financier ne peut s’étendre à l’exercice du droit des actionnaires et encore moins à l’action ut singuli exercée au nom et dans l’intérêt de la société. Elle rappelle que K n’est pas actionnaire d’E. Elle souligne que K, qui prétend agir à titre personnel et en qualité de société de gestion au nom des fonds communs de placement, démontre que l’acte introductif d’instance n’était pas précis sur sa qualité et ajoutent qu’elle ne peut agir, en dépit du bon sens, comme s’il s’agissait de deux parties distinctes ayant chacune des qualités à agir propres. Elle fait valoir que K aurait pu acheter une action E afin de bénéficier de l’action ut singuli et de justifier de sa qualité à agir et qu’elle ne fait que détourner la procédure de cette action afin d’obtenir réparation d’un intérêt propre- tout en assurant sa promotion auprès des investisseurs- et non de défendre l’intérêt de la société ou des porteurs de part. Elle estime que la portée générale prêtée à l’égalité entre actionnaires est discutable et que la doctrine s’interroge sur l’affectio societatis des sociétés de gestion et les pouvoirs qu’elles peuvent mettre en 'uvre. Elle précise que l’action prévue à

l’article R225-169 du code de commerce ne permet la représentation des actionnaires qu’en vertu d’un mandat exprès.

La société K réplique qu’elle a agi en qualité de représentant des fonds communs de placement K Micro Entreprises et K Multi Caps, actionnaires de E et remplissant les conditions de représentativité de l’article L225-252 et R225-169 al 2 du code de commerce. Elle fait valoir que le corps de l’assignation du 8 juillet 2016 le précisait expressément et que le défaut de cette mention n’est qu’une simple erreur de plume. Elle souligne que le droit qui lui est reconnu par l’article L214-8-8 du code monétaire et financier de défendre et faire valoir les droits ou intérêts des porteurs de parts s’étend nécessairement à l’action ut singuli sauf à rompre l’égalité entre les porteurs de parts. Elle souligne que l’article L533-22 du code monétaire et financier attribue l’ensemble des droits pécuniaires et politiques attachés aux actionnaires à la société de gestion et que «'l’intérêt'» visés par ces textes ne doit pas se confondre avec l’intérêt à agir en justice, notion strictement procédurale.

Elle ajoute que son intervention volontaire a régularisé la procédure conformément à l’article 126 du code de procédure civile.

Aux termes de l’article L225-252 du code de commerce dans sa version en vigueur lors de l’introduction de la demande ' Outre l’action en réparation du préjudice subi personnellement, les actionnaires peuvent, soit individuellement, soit par une association répondant aux conditions fixées à l’article L.225-120 soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d’Etat, intenter l’action sociale en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation de l’entier préjudice subi par la société, à laquelle, le cas échéant, les dommages- intérêts sont alloués.'

L’article L 214-8-8 du code monétaire et financier dispose que 'Le fonds commun de placement est représenté à l’égard des tiers par la société chargée de sa gestion. Cette société peut agir en justice pour défendre ou faire valoir les droits et intérêts des porteurs de parts.'

La cour rappelle en conséquence que l’action ut singuli est une action attitrée intentée contre les dirigeants d’une société par ses associés dans l’intérêt de la société, dotant ainsi les associés du droit d’agir pour le compte de la société.

En l’espèce l’action est intentée par la société K L Management à l’encontre de la société E F et de Monsieur X dans l’intérêt de la société E.

La société K L Management, qui n’est pas actionnaire de la société E n’a pas qualité à agir sur le fondement de l’action sociale. Elle ne le conteste pas mais dit agir sur le fondement de l’article L 214-8-8 précité, en qualité de gestionnaire des deux fonds communs de placement, les sociétés K Micro Entreprise et K Multi Caps qui sont, elles, associées commanditaires de la société E. Elle ajoute que cela ressort clairement du corps de l’assignation.

La cour relève que la première page de l’assignation du 8 juillet 2016, qui constitue l’acte introductif d’instance de la présente procédure, indique qu’elle est introduite à la requête de 'La société K L MANAGEMENT, société par actions simplifiée (…)'. Aucune mention ne précise que la société K agit en sa qualité de gestionnaire des fonds. De même, dans le 'Par ces motifs’ de l’assignation, reproduit dans leurs conclusions, il est indiqué 'Dire et juger recevable l’action ut singuli introduite par K L MANAGEMENT au nom d’E en sa qualité d’actionnaire de celle-ci’ sans aucune mention de sa qualité de représentante des fonds communs et alors qu’elle n’est pas actionnaire d’E.

Aux termes des dispositions de l’article 56 du Code de procédure civile alors en vigueur et de l’article 648 du Code de procédure civile l’assignation doit contenir l’identité du demandeur et selon l’article

122 du Code de procédure civile 'Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.'

En l’espèce le demandeur est la société K L Management qui n’a pas qualité à agir par une action ut singuli à l’encontre des dirigeants d’E. Le dispositif de l’assignation ne mentionne également que la société K sans précision relative à sa représentation des fonds.

Le corps de l’assignation qui, selon K, montrerait clairement qu’elle a agi en sa qualité de gestionnaire des fonds de placement puisqu’elle précise avoir cette qualité, est insuffisant à remédier aux mentions obligatoires de l’assignation quant à l’identité du requérant, le défendeur n’ayant pas à deviner à la lecture des motifs de l’assignation, qui a introduit l’action à son encontre.

La cour note au demeurant que la société K par des conclusions d’intervention volontaire devant le tribunal de commerce en date du 16 mars 2017 se présente agissant en son nom et également agissant en qualité de société de gestion et au nom des fonds admettant implicitement que son assignation avait été délivrée à son seul nom.

La société K ayant introduit son action en son nom propre n’a pas qualité pour agir à l’encontre de la société E F et de Monsieur X au nom de la société E dont elle n’est pas actionnaire. Son action est en conséquence irrecevable et le jugement avant dire droit du 1er mars 2019 sera infirmé sur ce point.

La société K est cependant intervenue volontairement à la procédure par des conclusions en date du 16 mars 2017 en sa qualité de société de gestion représentante des fonds. En cette qualité elle est recevable à agir en vertu des dispositions de l’article 126 du Code de procédure civile qui dispose que 'l’irrecevabilité est écartée lorsque la personne ayant qualité à agir devient partie à l’instance', ce qui peut être le cas en l’espèce si la prescription n’est pas acquise, du fait de l’intervention volontaire précitée.

Sur le défaut de pouvoir de la société K pour agir en vertu de l’article L214-8 8 du code monétaire et financier qui ne serait pas applicable aux actions sociales intentées par les sociétés de gestion, la cour relève avec le tribunal de commerce que l’action n’est ouverte que dans l’intérêt de la société et non dans l’intérêt direct des porteurs de parts et que la dernière phrase de l’article L214-8 8 ne vise qu’à prévenir les conflits d’intérêt entre les sociétés de gestion et les porteurs de parts. Les détenteurs de parts d’un fond de placement n’ont pas la qualité d’actionnaire et ainsi seule la société de gestion du fond peut exercer l’action ut singuli sauf à faire échapper à cette action en responsabilité les sociétés de gestion des fonds de placement.

La cour considère en conséquence que l’action de K ès qualités de société de gestion des fonds K Micro Entreprise et K Multi Caps est recevable sous réserve de la prescription éventuelle des demandes étudiées ci-dessous.

Sur la prescription de l’action

L’action de la société K est fondée sur trois fautes de gestion :

— la conclusion de la convention d’assistance du 9 juillet 2013 entre les sociétés E et E F en violation de la procédure des conventions réglementées,

— l’absence de déduction totale des honoraires de gestion supportés par E dès l’engagement d’investissement dans les fonds Apax France VIII et Apax VIII-LP qui font doublon avec les honoraires annuels de gestion et de conseil en investissement déjà perçus par E F et G Partners Sa en vertu de l’article 17 des statuts,

— le rachat des actions B par E dont il n’est pas prétendu qu’elle serait prescrite.

La société E Gestion et M. X exposent que l’intervention volontaire de K ne peut régulariser son défaut de pouvoir puisque l’action d’une partie n’ayant pas qualité à agir n’interrompt pas la prescription de trois ans à compter du fait dommageable ou de sa révélation, applicable aux faits de la cause. Ils relèvent que les faits relatifs à la convention d’assistance du 9 juillet 2013 et les faits relatifs aux frais indirects de gestion- les honoraires des fonds dans lesquels E investit- qui résultent de la stratégie d’investissement d’E depuis 2011 sont antérieurs de plus de 3 ans à l’intervention volontaire de K par conclusions du 16 mars 2017. Ils précisent que les faits n’ont pas été dissimulés, la convention d’assistance ayant été portée suffisamment à la connaissance des actionnaires dans le rapport de gestion établi pour l’assemblée générale annuelle appelée à approuver les comptes de l’exercice 2013 et que les frais de gestion indirects étaient mentionnés dans le rapport de F et le document de référence d’E, que K les avait interrogés en 2013 sur la question, qu’ils y avaient répondu lors de l’assemblée générale du 18 avril 2013 et que K, professionnel du secteur ne peut soutenir qu’elle n’en avait pas connaissance.

Ils contestent le report du point de départ du délai aux dates de paiement de la rémunération de la F exposant que l’article L225-254 du code de commerce édictant une cause de report spéciale limitée à la dissimulation volontaire par le dirigeant de l’acte de gestion doit primer sur le droit commun et soulignent qu’en matière de faute de gestion la seule cause de report de la prescription est la dissimulation.

La société E expose que le point de départ du fait dommageable -de double facturation- invoqué par K est la modification de l’article 17 des statuts par les assemblées générales du 29 avril 2009 et du 29 mars 2012 et que l’action introduite le 8 juillet 2016 est prescrite en application de l’article L225-254 du code de commerce. Elle rappelle que le vote de la modification ne peut avoir été dissimulée volontairement au sens de cet article. Elle fait valoir qu’aucun fractionnement de la prescription ne peut être retenu puisque la double facturation reproché ne résulte pas de la mise en oeuvre d’un contrat à exécution successive mais des modalités de calcul de la rémunération de la F fixées par les statuts antérieurement au 8 juillet 2013.

La société K réplique que, même à la date de la régularisation le 16 mars 2017, aucune de ses actions n’est prescrite, puisque

— la convention du 9 juillet 2013 n’a été portée à sa connaissance qu’à compter du 3 avril 2014 date de la diffusion du rapport de F et qu’elle n’en a découvert le contenu que le 21 janvier 2017 lors de sa communication à l’expert désigné par le président du tribunal de commerce de Paris.

— l’absence de déduction des frais indirects de la rémunération de la F ne lui est apparue qu’à compter de la publication du document de référence d’E le 10 avril 2015,

— ces deux faits concernent des contrats à exécution successive et que la prescription se divise comme la dette elle-même et ne court à l’égard de chacune des fraction qu’à compter de son échéance.

Aux termes des dispositions de l’article L 225-254 du code de commerce 'L’action en responsabilité contre les administrateurs ou le directeur général, tant sociale qu’individuelle, se prescrit par trois ans, à compter du fait dommageable ou s’il a été dissimulé, de sa révélation. (…)'.

La cour rappelle que l’intervention volontaire de la société K au nom des fonds, soit le 16 mars 2017, est seule de nature à interrompre la prescription, l’acte introductif d’instance affecté d’un défaut de qualité à agir n’étant pas susceptible d’interrompre la prescription.

Il est constant que la dissimulation de la faute doit être constatée pour que soit justifié le report du délai de trois ans et qu’elle implique la volonté de cacher.

La charge de la preuve incombe à celui qui s’en prévaut.

A- Sur la convention du 9 juillet 2013

La convention du 9 juillet 2013 est une convention de prestation de services signée entre E et E F. La date du 9 juillet 2013 constituerait ainsi le fait dommageable.

La cour relève, sans préjudice de la qualification de faute qui pourrait être donnée à l’absence d’information des actionnaires sur l’existence de cette convention, que la première mention de cette convention figure dans le rapport de gestion en vue de l’assemblée générale du 24 avril 2014 ainsi que dans le document de référence 2013 publié en vue de cette assemblée générale.

La société K soutient, sans être contredite, que ce document a été diffusé le 3 avril 2014 sur le site internet accessible à l’adresse 'www.E.fr’ et que le document de référence a été mis en ligne sur le même site le 8 avril 2014. L’intervention volontaire datant du 16 mars 2017, l’action relative à la convention du 9 juillet 2013 n’est pas prescrite.

B- Sur l’absence de déduction des frais indirects de la rémunération de F

Il s’agit ici des honoraires de gestion supportés par E dès l’engagement d’investissement dans les fonds Apax précités et qui auraient dû, selon K, faire l’objet d’une déduction totale en vertu de l’article 17 des statuts d’E, car faisant doublon avec les honoraires annuels de gestion et de conseil en investissement déjà perçus par E F et G Partners.

K soutient n’avoir eu connaissance de l’absence de déduction de ces frais qu’à la lecture du document de référence d’E pour l’exercice 2014 publié le 10 avril 2015. Ces informations ont été, selon elle, dissimulées alors que, s’il est exact que la clause statutaire relative à la rémunération de la F figure bien aux statuts depuis 2011, ce n’est pas son existence qu’elle conteste mais l’application qui en est faite.

La cour constate cependant que cette information apparaît dans plusieurs documents depuis 2011, date à laquelle une nouvelle stratégie d’investissement a été mise en oeuvre par E F et Monsieur X. Ainsi elle figure dans le rapport semestriel d’activité au 30 juin 2011, dans le document de référence d’E 2011, dans l’extrait du rapport semestriel d’activité d’E au 30 juin 2012 ou encore dans le document de référence d’E 2012 publié le 4 avril 2013.

Outre ces documents, la société K a posé des questions écrites à E F et à Monsieur X en vue de l’assemblée générale du 18 avril 2013, qui portaient justement sur les honoraires et frais de gestion. La F y répondait oralement et par un document écrit produit en annexe du procès-verbal de délibération.

Il résulte de ces éléments que la société K avait d’une part connaissance de cette faute alléguée de gestion depuis la modification des statuts en 2011 et au moins depuis le 18 avril 2013 et d’autre part que quand bien même elle n’aurait pas réalisé la faute à ce moment, elle n’apporte la preuve d’aucune dissimulation.

La société K, reprenant le raisonnement des premiers juges considère qu’en tout état de cause cette faute résulte d’un contrat à exécution successive de sorte que la prescription ne pourrait jouer que pour les faits antérieurs de plus de trois à son intervention volontaire.

La cour rappelle cependant que les fautes de gestion invoquées sont la modification de la clause statutaire et son application. La modification était connue dés 2011 et l’application qui en été faite a donné lieu en 2013 à des explications exhaustives en réponse aux questions posée par K de sorte que la prescription est acquise, le fait que les versement soient annuels ne pouvant donner à

qualification de contrat à exécution successive justifiant un report du délai de prescription.

La prescription de cette demande est donc acquise.

Sur l’irrecevabilité de la demande fondée sur l’application du code Afep-Medef

Cette demande n’est plus soutenue.

Sur les fautes de gestion non prescrites

1- La violation des règles relatives aux conventions réglementées

La société K soutient que la convention de prestation de service du 9 juillet 2013 relève du régime des conventions réglementées et qu’à ce titre elle doit faire l’objet d’une approbation par l’assemblée générale des actionnaires. Elle fait valoir qu’E avait sollicité cette autorisation pour les conventions d’assistance ayant le même objet signées en 2012, qu’après le refus de l’assemblée générale, elle a conclu la convention litigieuse en la mentionnant dans le rapport de F et dans le document de référence 2013 mais sans la soumettre au vote de l’assemblée générale au motif qu’elle serait une opération courante au sens de l’article L225-39 du code de commerce. Elle expose que la convention de 2013 délègue à E Gestion la tenue de la comptabilité, la gestion financière et la relation investisseurs qui entrent dans le périmètre de la rémunération statutaire prévue à l’article 17.4 des statuts, qu’elle est donc dépourvue de cause et qu’elle a un impact sur les frais administratifs de E qui ont quadruplés en 6 ans.

Elle estime que le jugement qui n’a pas vérifié le caractère courant de l’opération et notamment qui n’ a pas relevé qu’E n’avait jamais conclu de telles conventions ou lorsqu’elle avait tenté de le faire, l’avait soumis à la procédure des conventions réglementées, n’a pas motivé sa décision. Elle ajoute qu’en ne tirant pas les conséquences de l’absence de cause de la convention litigieuse, le jugement du tribunal de commerce encourt la réformation.

Elle sollicite la condamnation in solidum de E F et de M. X à rembourser à E les sommes perçues à ce titre soit 4.347.100 euros HT.

La société E F et M. X répliquent que K ne peut contradictoirement soutenir à la fois que la rémunération proportionnelle de l’article 17.1 des statuts ne serait pas causée car couvrant des prestations facturées en vertu de la convention d’assistance et que cette même convention serait dépourvue de cause car les prestations entreraient dans le champ de l’article 17.1, ils en déduisent l’irrecevabilité de la demande.

Subsidiairement, ils font valoir que la convention du 9 juillet 2013 porte sur des opérations courantes conclues à des conditions normales, qu’il importe peu qu’aucune convention de ce type n’ait été préalablement conclue dès lors que le rémunération n’est pas forfaitaire, puisque la rémunération est calculée sur le coût effectif des prestations et pour les prestations comptables sur le coût réel. Elle souligne que le coût supporté par E est devenu inférieur au coût effectif compte tenu de l’augmentation du portefeuille et de la complexité croissante des opérations. Elle ajoute que les sociétés cotées de Private Equity refacturent des prestations de même nature à des tarifs équivalents.

Ils précisent que E verse à E F d’une part la rémunération statutaire concernant la gestion des capitaux et d’autre part le remboursement des frais de comptabilité, de direction financière et de relations investisseurs, que ces opérations qui pourraient être effectuées directement par E, sont confiées à E F, moyennant rémunération et que celle-ci les sous-traite aux différentes entités d’G comme elle en a le droit. Ils soulignent que dans ces conditions les frais découlant de la convention d’assistance ne constituent pas une rémunération complémentaire et sont causés.

La société E rappelle que la convention du 9 juillet 2013 ne relève pas de la procédure des conventions réglementées, qu’elle a toujours externalisé les fonctions support par le biais de contrat conclu en 1996 avec Apax Parners devenue G Sas et transféré en 2009 à E F, sans modification. Elle précise que la convention litigieuse a été conclue sur la base d’une facturation au coût réel afin de respecter le vote négatif formulé sur la convention de 2012 conclue sur une base forfaitaire. Elle explique que cette facturation à l’euro-l’euro, portant sur des opérations courantes nécessairement conclue à des conditions normales, n’entre pas dans le champ des conventions réglementées. Elle précise que le remboursement de frais ne peut être considéré comme une rémunération supplémentaire soumise à approbation en application de l’article 17.4 des statuts. Elle conteste toute redondance avec la rémunération annuelle et explique l’augmentation de ces frais par l’augmentation de la taille de la société. Elle précise que le tribunal a détaillé l’analyse des frais et en a déduit à bon droit que ces frais étaient causés.

La cour relève que, lors de l’assemblée générale du 18 avril 2013, il avait été proposé d’approuver la conclusion de conventions qui prévoyaient des règlements forfaitaires avec effet au 1er janvier 2013. Cette proposition n’avait pas été approuvée et c’est ainsi qu’E a conclu le 9 juillet 2013 avec E F un contrat de prestation de services couvrant la tenue de la comptabilité, la gestion comptable du portefeuille, la direction financière et les relations actionnaires et investisseurs sur la base d’une facturation au coût réel. Le conseil de surveillance et le commissaire aux comptes ont estimé que cette convention ne ressortait pas du régime des conventions réglementés, car elle portait sur des opérations courantes conclues aux conditions normales du marché.

En effet, aux termes des dispositions de l’article L 225-39 du code de commerce dans sa version applicable à l’espèce : 'Les dispositions de l’article L. 225-38 ne sont pas applicables aux conventions portant sur des opérations courantes et conclues à des conditions normales.'

En l’espèce, et ainsi que l’ont justement constaté les premiers juges la convention litigieuse se borne à la facturation réelle des coûts effectifs de gestion administrative, comptable ou financière.

Ces prestations sont des prestations techniques qui sont distinctes du mandat social des dirigeants et qui ne relèvent pas de leurs missions. Ainsi, elle ne fait pas double emploi avec la rémunération du dirigeant .

La société K n’établit pas que les prestations figurant dans cette convention seraient facturées à des conditions anormales, ni qu’elles feraient double emploi avec les frais administratifs ou de bureaux nécessaires à la gestion, devant rester à la charge de la F. De même c’est à tort que la société K soutient qu’il s’agissait d’une rémunération complémentaire qui nécessitait l’approbation de l’assemblée générale selon l’article 17.4 des statuts.

La société E F et Monsieur X communiquent à titre d’exemples les rémunérations pour des prestations identiques payées par d’autres sociétés de private equity, rémunérations dont le montant est semblable à celui payé par E.

La cour considère en conséquence que la convention a été conclue à des conditions normales et donc que sa signature ne constitue pas une faute de gestion. Le jugement sera confirmé sur ce point.

2- La violation de la procédure légale et statutaire relative au rachat d’actions de carried interest en vue de leur annulation

La société K expose que les actions dites «'B'» de carried interest , qui sont détenues par la F et son équipe de gestion et dont la finalité est de les motiver à dégager des performances élevées en leur rétrocédant une partie de la sur-performance, ont été partiellement rachetées par E au prix nominal, sur ses fonds propres sans autorisation du conseil de surveillance, au seul profit du dirigeant pour des raisons fiscales et au détriment de la trésorerie d’E. Elle souligne

que les rachats des actions des dirigeants doivent respecter la procédure des conventions réglementées ce qui n’a pas été le cas en l’espèce. Ils contestent l’argument selon lequel l’opération a été réalisée afin d’aligner la détention des actions entre les différents gestionnaires et font valoir que M. X a reconnu la motivation fiscale de l’opération. Elle estime que l’application de l’article 10.3 des statuts pour le rachat des actions B ne dispensait pas E de respecter la procédure des conventions réglementées.

Elle ajoute que le rachat des actions de carried interest a conduit E à détenir plus de 10% de son propre capital en violation de l’article L225-210 du code de commerce et que le rejet par l’assemblée générale du projet de réduction de capital rend impossible l’annulation des actions en violation de l’article L225-214 du même code.

Elle relève que le jugement qui a rejeté sa demande au titre de cette faute au motif que la violation et le préjudice seraient négligeable a ajouté une condition à la loi et au droit de la responsabilité et qu’il encourt la réformation de ce chef.

Elle sollicite la condamnation solidaire de E F et de M. Y à indemniser E du coût de rachat litigieux soit la somme de 121.640 euros.

La société E Gestion et M. X répliquent que les actions B ne sont qu’un instrument juridique permettant aux managers de percevoir leur carried interest , que leurs détenteurs n’ont aucune liberté pour se les céder et aucune vocation à réaliser un profit quand ils les cèdent. Ils soulignent qu’une telle cession entraînerait des problèmes réglementaires et fiscaux ce qui explique les dispositions de l’article 10.3 al 2 des statuts qui prévoient le rachat des ces actions par la société pour leur valeur nominale. Ils font valoir que les cessions étaient motivées par l’alignement des intérêts de managers avec les investisseurs et soulignent que M. X a vu sa détention d’action B réduite quasiment de moitié au profit des autres gestionnaires.

Ils rappellent que l’impossibilité d’annulation des actions rachetées par E n’est pas de leur responsabilité mais uniquement la conséquence du vote de l’assemblée générale et que cette situation n’est que temporaire, les actions B ayant vocation à être réparties au sein de l’équipe d’investissement lorsque les investissements précédents auront été cédés. Ils précisent que la réduction du nombre d’actions B ne modifie pas la quote-part des bénéfices revenant aux actionnaires détenteurs d’actions ordinaires.

La société E rappelle que le rachat des actions B est intervenu conformément à l’intérêt social. Elle explique que la répartition des actions de carrried interest fluctue nécessairement dans le temps en fonction des départs et arrivées des membres de l’équipe d’investissement et fait valoir que la procédure de rachat avait pour unique objet d’aligner les intérêts des actionnaires et ceux de l’équipe d’investissement. Elle souligne qu’elle avait proposé l’annulation des actions rachetées et la réduction corrélative du capital social lors de l’assemblée générale du 15 avril 2016 qui a rejeté la résolution.

La cour rappelle que les actions de carried interest sont des actions distribuées aux managers selon leur performance afin de les motiver. Leur répartition varie selon la composition de l’équipe, le nombre de membres et la performance de chacun puisque le carried interst correspond à un pourcentage de la performance réalisée par le fonds.

L’article 10.3 des statuts stipule la société peut racheter à tout moment les actions B pour un prix égal à leur valeur nominale soit auprès du gérant soit auprès des détenteurs des actions.

En 2015 la société E F et Monsieur X ont décidé de faire racheter à leur valeur nominale par E un certain nombre d’actions B auprès de leurs porteurs, Monsieur X et d’autres managers, afin de répartir le carried interest payé par E sur les mêmes répartitions que celles des fonds Apax France VI et France VII du fait des investissements faits en parallèle et ainsi

d’aligner les intérêts des managers porteurs de parts B avec ceux des investisseurs porteurs de parts A.

Pour ce faire la procédure de l’article 10.3 des statuts a été mise en oeuvre. Le président du conseil de surveillance a approuvé l’opération et cette affirmation n’est pas utilement contredite par K ainsi que l’a observé le tribunal de commerce .

Conformément aux statuts, les rapports de la F et du commissaire aux comptes ont été publiés sur le site d’E avec la description des conditions de rachat.

Il ressort de ces éléments que le rachat des actions B par E n’a pas été effectué pour des raisons purement fiscales, contrairement à ce que soutient K, quand bien même les implications fiscales n’étaient pas neutres comme l’a admis Monsieur X lors de l’assemblée générale du 15 avril 2016.

Cette opération était donc, in fine, dans l’intérêt de la société et de ses porteurs de parts A dont la quote-part des bénéfices n’a pas été modifiée et alors que le prix de rachat au nominal par E, nettement inférieur à la valeur de ces actions, n’a eu que peu d’impact sur la trésorerie de la société.

Il était par la suite prévu d’annuler les actions B et ainsi de réduire le capital en application de l’article L 225-210 du code de commerce qui dispose qu’une société ne peut détenir plus de 10% de ses propres actions. Cependant la résolution proposée n’a pas été votée de sorte que ces actions n’ont pas été annulées et que la société détient plus de 10% de ses actions mais pendant un temps limité.

La société K ne précise ni n’établit que l’absence d’annulation des actions B auto-détenues serait contraire à l’intérêt de la société elle-même.

La société K sera en conséquence déboutée de sa demande sur ce point et le jugement sera confirmé.

Sur la demande reconventionnelle

La société E Gestion et M. X soutiennent que les propos tenus par K dans le courrier du 14 février 2014 adressé au président du conseil de surveillance d’E et au président de l’AMF et dans la note du 17 avril 2015 qui ont été largement diffusés constituent un dénigrement d’E F et de M. X aggravé par la multiplication des agressions par K. Ils ajoutent que le courrier du 14 février 2014 n’a pas été uniquement adressé au président du conseil de surveillance mais également à tous ses membres, au président de l’AMF et à M. X et insistent sur son caractère agressif loin de la tentative de dialogue constructif revendiquée par K. Ils précisent que le dénigrement est caractérisé quand bien même il serait le fait d’une entreprise qui n’est pas concurrente.

Ils exposent que les informations diffusées sont trompeuses, reposant sur des comparaisons méthodologiquement erronées ainsi que le révèlent les performances de K et que l’a relevé l’expert judiciaire et soulignent que la note selon laquelle E F serait 30% plus chère et 32% moins performante que la concurrence est fausse et que sa diffusion constitue une circonstance aggravante.

Ils font valoir que le droit de critique ne doit pas se transformer en droit de nuire, qu’il ne peut justifier la multiplication des agressions via des actions en justices contre M. X et un activisme avant et pendant les assemblées d’actionnaires dans le but de jeter un doute sur le probité des solutions et des résolutions proposées.

Ils soulignent que ces dénigrements ont fait l’objet d’une vaste diffusion notamment sur le site

internet de K et par la publication d’un encart dans le journal «'Les Echos'». Ils relèvent qu’un communiqué publié sur le site présente de façon mensongère le jugement du 17 avril 2020.

Ils relèvent que K multiplie les dénigrements en intentant une action irrecevable en abus de biens sociaux, en confondant volontairement les rémunérations d’E F et de M. X ou ces mêmes rémunérations et celles des sociétés de gestion.

Ils soutiennent que la prescription de l’action en diffamation est irrecevable car nouvelle en cause d’appel.

Ils rappellent que le dénigrement relève de la concurrence déloyale et peut être caractérisé comme un trouble commercial et exposent que le ternissement de l’image d’E la prive de la possibilité de faire appel au marché pour financer sa croissance. La société E F estime son préjudice moral à la somme de 500.000 euros et son préjudice d’image à la somme de 1.000.000 d’euros, M. X dont la probité a été mise en cause estime son préjudice moral à 500.000 euros et son préjudice d’image à 1.000.000 d’euros.

Ils rappellent que le rapport d’expertise ne concernait que le préjudice lié à la dégradation du cours de bourse d’E et que ses conclusions n’excluent donc pas l’indemnisation de leurs préjudices.

La société E expose que le droit de critique dont dispose la société K ne peut dépasser les limites de la bonne foi et reposer sur une intention de nuire sous peine d’engager la responsabilité civile de son auteur sur le fondement de l’article 1240 du code civil. Elle fait valoir que K a publié des propos malveillants la visant directement et mettant en cause son conseil de surveillance dans un article de l’AGEFI du 22 avril 2014 et dans un courrier aux actionnaires diffusé sur sa page internet.

Elle ajoute que l’analyse sur ses frais de gestion publiée dans une note du 17 avril 2015 sur son site internet est tendancieuse, entachée d’incohérences méthodologiques et non conforme aux règles de l’art. Elle estime que ces affirmations erronées diffusées par un professionnel averti révèlent l’intention de nuire de leur auteur. Elle fait valoir que les trois composantes du dénigrement à savoir un message contenant des propos malveillants, identifiant la victime et diffusé dans le public sont réunis en l’espèce.

Elle estime son préjudice financier au temps consacré par ses équipes pour répondre aux différentes attaques, aux frais de conseil et de communication et aux frais d’expertise engagés qu’elle estime à la somme de 1.341.662,55 euros.

Elle impute la décote de son action à son préjudice d’image et à l’atteinte à sa réputation engendrés par la campagne de K, fait valoir qu’elle doit désormais s’expliquer en permanence sur les difficultés avec K et les accusations portées contre elle et estime son préjudice à la somme de 1.000.000 d’euros.

La société K réplique que les demandes formulées à son encontre portent atteinte à sa liberté d’expression et ont pour unique but d’étouffer tout questionnement de la gestion d’E par les actionnaires minoritaires. Elle rappelle que les déclarations faites en assemblée générale se bornant à dénoncer des anomalies de gestion n’excèdent pas le droit de libre critique d’une actionnaire minoritaire et qu’elle a contribué à l’amélioration des pratiques de gouvernance au sein d’E en qualité d’actionnaire de long terme au bénéfice des porteurs de parts. Elle insiste sur son parfait exercice de son rôle en qualité de société de gestion de portefeuille en faveur d’une bonne gouvernance des sociétés tels que recommandée par l’AFG.

Elle précise que le dénigrement suppose la volonté, par une société concurrente, de détourner la clientèle de la société dénigrée et rappelle qu’elle a des intérêts alignés avec E dans lesquels les

fonds qu’elle gère ont investi à long terme et bénéficieraient de l’appréciation du cours en bourse. Elle fait valoir qu’elle s’est contentée de se conformer à son devoir d’actionnaire responsable.

Elle estime la motivation du jugement déféré contradictoire sur la caractérisation de la faute dès lors qu’il entre en voie de condamnation à son égard tout en relevant que ses actions ne pouvaient avoir d’impact pour la société qui ne recourt pas à la dette pour investir. Elle conteste toute agressivité des lettres du 22 février 2013 et 14 février 2014, fait valoir qu’elles proposaient une collaboration, qu’elles étaient adressées au président du conseil de surveillance auquel elle reprochait une forme de complaisance envers la F et qui, seul, pourrait en demander réparation. Elle fait valoir que bien que n’ayant pas déposé de plainte pénale, elle a caractérisé un abus de bien sociaux et qu’il ne peut donc lui être reproché d’avoir ainsi qualifié les fautes de gestion.

Elle rappelle que la présente action en justice a été initiée par E F.

Elle soutient que le jugement confond dénigrement et diffamation, que les conditions de cette dernière ne sont pas réunies en l’espèce et qu’une demande sur ce fondement serait prescrite.

Elle fait valoir enfin que le préjudice invoqué n’est pas établi et que la condamnation prononcée a été évaluée de manière purement forfaitaire en violation du principe de réparation intégrale.

Elle rappelle que l’ordonnance de référé du 16 mars 2016 a rejeté la demande de suppression de la note sur son site.

Elle fait valoir que le droit d’ester en justice des actionnaire minoritaires est un droit fondamental qui ne peut justifier, à lui seul, une condamnation à des dommages-intérêts et que le sérieux de son action est corroboré par le rapport d’expertise de M. Z qui exclut par ailleurs tout lien de causalité entre le préjudice subi par les intimé et les faits qui lui sont reprochés.

La cour rappelle que la liberté d’expression n’est pas absolue et peut être limitée dans le respect du principe de proportionnalité notamment lorsqu’elle porte atteinte à autrui.

La société K a régulièrement publié sur son site internet et dans des journaux spécialisés par des encarts payants, des communiqués critiquant E en ce qu’elle est gérée de manière non transparente dans l’intérêt de Monsieur X, sous entendant ainsi que l’intérêt des actionnaires n’est pas prioritaire. Un espace est dédié à E sur son site internet où elle rassemble les critiques et les articles de presse défavorables à E et à ses gérants. Elle y publie des informations parcellaires, notamment mais pas uniquement, le fait que E aurait été déboutée de sa demande en référé visant à faire retirer une note du dénonçant la hausse du prix de gestion alors que le tribunal s’était contenté de désigner un expert, dénaturant ainsi la décision prise.

Par ailleurs la société K a adressé un courrier le 14 février 2014 à la société E G commentant avec désapprobation sa réponse à un courrier précédent et portant la référence 'Suite courrier du 15 avril 2013. Une histoire qui fait honte à notre place financière.' Le courrier se conclut par un paragraphe réitérant ces propos en les soulignant en caractères gras. Ce courrier a été envoyé en copie à plusieurs personnes dont Madame A de l’ADAM et Monsieur B, président de l’AMF.

Ainsi que l’a souligné le tribunal de commerce les communiqués répétés, les propos inexacts et les expressions employées dépassent la simple critique que peut faire un actionnaire de la gestion d’une société par leur caractère outrancier et leur large diffusion.

K a également publié sur son site le 17 avril 2015, quelques jours avant l’assemblée générale d’E, une note accompagnée de tableaux critiquant les frais de gestion d’E et concluant que ces frais sont plus élevés que dans les sociétés comparables. Estimant que cette note avait

contribué à une baisse significative de son cours de bourse et après deux expertises contradictoires diligentées par les parties, la société E a obtenu du juge des référés du tribunal de commerce de Paris la désignation d’un expert, Monsieur Z, afin de donner son avis sur les causes de la baisse du cours de bourse d’E. Selon le rapport rendu le 9 février 2018, qui sera le seul examiné par la cour, les autres n’étant pas contradictoires, les affirmations de K quant aux frais de gestion d’E ne sont pas justifiées, les exemples donnés sont insuffisants, la comparaison des frais directs et indirects d’E par rapport à d’autres sociétés sont entachées d’approximation.

Il ressort de ce rapport que les informations publiées et largement diffusées par K sont trompeuses. Sous couvert du droit de critique légitime des actionnaires le fait que cette note soit restée sur le site de K bien après le rapport de l’expert montre que celle ci entendait clairement dénigrer la société E F et Monsieur X.

Il ressort de ces éléments que la société K, au-delà de sa qualité d’actionnaire minoritaire du fait des deux fonds qu’elle gère, a fait preuve d’un acharnement dans sa critique à l’encontre des gérants d’E et a laissé planer un doute sur la transparence et la fiabilité de la gestion de cette dernière portant ainsi atteinte à sa moralité.

Ces multiples actions, leur ton agressif et outrancier et leur répétition sont constitutives d’un harcèlement alors que les fonds de K ne détiennent plus désormais qu’une faible participation dans E,. Cet harcèlement a causé aux sociétés E, E F et à Monsieur X un préjudice d’image qu’il convient de réparer en allouant à E F la somme de 70.000 euros, à Monsieur X la somme de 200.000 euros et à la société E la somme de 130.000 euros.

Dans son rapport l’expert conclut également que l’impact de la note de 2015 n’a pas été significatif et n’a pas porté préjudice aux actionnaires d’E. Selon l’expert, si la performance d’E est d’un bon niveau par rapport aux sociétés du secteur, la décote d’E est liée en partie à des causes endogènes et notamment une décote de la valeur de son titre par rapport à celle de son actif réévalué.

Les demandes relatives au préjudice financier seront en conséquence rejetées, les sociétés E, E F et Monsieur X n’établissant pas la réalité d’un tel préjudice.

La cour rejettera la demande relative à la publication du dispositif de l’arrêt sur la page d’accueil de K, cette demande étant disproportionnée avec le pourcentage d’actions détenues par l’intermédiaire des fonds de K et étant, en tout état de cause, relatif à des informations devenues obsolètes eu égard à leur ancienneté.

K soulève la prescription de l’action en diffamation alors que les intimés n’ont pas soutenu de demande sur ce fondement.

Cette demande est donc sans objet.

Sur la demande de retrait de la note

Les sociétés E et Monsieur X ne développent pas cette demande dans leurs conclusions. En tout état de cause cette note est maintenant ancienne et ne peut plus avoir de conséquences sur les investisseurs potentiels d’E. La demande sera donc rejetée.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

La société K sollicite la condamnation solidaire de E F et de M. X à lui payer, chacun, la somme de 75.000 euros.

La société E F et M. X sollicitent chacun la somme de 35.000 euros.

La société E sollicite la somme de 100.000 euros.

La société K ayant succombé dans son appel, il serait inéquitable de laisser à la charge des intimés les frais qu’ils ont exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens. Il sera alloué à la société E F et à Monsieur X la somme de 35.000 euros chacun et à la société E la somme de 55.000 euros.

PAR CES MOTIFS,

Révoque l’ordonnance de clôture du 6 mai 2021,

Fixe la clôture au 27 mai 2021,

Rejette les notes en délibéré communiquées par les parties après le 27 mai 2021,

Infirme le jugement en ce qu’il a déclaré recevable la société K L Management,

Statuant à nouveau,

Dit irrecevable pour défaut de qualité à agir la société K L Management,

Dit recevable l’intervention volontaire de la société K L Management agissant en qualité de société de gestion des fonds communs de placement K Micro Entreprise et K Multicaps,

Dit prescrite et donc irrecevable la demande de K L Management, es qualités, pour ce qui concerne la facturation des frais de gestion d’E,

Dit recevable la demande de K L Management, ès qualités, pour ce qui concerne la faute alléguée afférente à la signature de la convention du 9 juillet 2013,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Paris en ce qu’il a débouté la société K L Management, ès qualités, de sa demande fondée sur la convention du 9 juillet 2013,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Paris en ce qu’il a débouté la société K L Management, ès qualités, de sa demande fondée sur le rachat par E des actions B,

Déboute la société E F, Monsieur X et la société E de leurs demandes de publication du dispositif de l’arrêt,

Déboute la société E F, Monsieur X et la société E de leurs demandes de retrait de la note de 2015 du site internet de K,

Condamne la société K L Management, ès qualités, à payer à la société E F la somme de 70.000 euros en réparation de son préjudice d’image,

Condamne la société K L Management, ès qualités, à payer à Monsieur X la somme de 200.000 eurosen réparation de son préjudice d’image,

Condamne la société K L Management, ès qualités, à payer à la société E la somme de 130.000 euros en réparation de son préjudice d’image,

Condamne la société K L Management, ès qualités, à payer à la société E F la

somme de 35.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la société K L Management, ès qualités, à payer à la société E la somme de 55.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la société K L Management, ès qualités, à payer à Monsieur X la somme de 35.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Condamne la société K L Management, ès qualités aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

La greffière La présidente

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 16 septembre 2021, n° 20/07397