Cour d'appel de Paris, Pôle 5 chambre 5, 8 décembre 2022, n° 21/09415

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 ch. 5, 8 déc. 2022, n° 21/09415
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 21/09415
Importance : Inédit
Sur renvoi de : Cour de cassation, 1er décembre 2020, N° N18-20.231;735F@-@P
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 13 décembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRET DU 08 DÉCEMBRE 2022

(n° 238 , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/09415 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDV7B

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 2 Décembre 2020 – Cour de Cassation – Pourvoi n° N18-20.231- Arrêt n° 735 F-P

Jugement du 26 Aôut 2015 – Tribunal de grande instance de SENS – 12/00029

Arrêt du 3 Mai 2018 – cour d’appel de PARIS – RG N°15/19214

Arrêt du 2 Décembre 2020 – Cour de Cassation – Pourvoi n° N18-20.231- Arrêt n° 735 F-P

DEMANDEUR A LA SAISINE

Monsieur [G] [P]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C2477, avocat postulant

Assisté de Me Jean-François MORLON, avocat au Barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

DEFENDERESSE A LASAISINE

S.A.S. EDITIONS ATLAS agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, domicilié en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 693 650 137

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée et assistée par Me Bruno LANDON, avocat au barreau de PARIS, toque C0595

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Annick PRIGENT, Présidente de chambre chargée du rapport et Madame Nathalie RENARD, Présidente de chambre

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Marie-Annick PRIGENT, Présidente de la chambre 5.5

Madame Nathalie RENARD, Présidente de chambre

Madame Christine SOUDRY, Conseillère

Greffière, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL

ARRET :

— Contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Marie-Annick PRIGENT, Présidente de chambre et par Claudia CHRISTOPHE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*******

FAITS ET PROCÉDURE

La société Editions Atlas est spécialisée dans l’édition et la commercialisation de produits de loisirs.

Le 20 décembre 2006, la société Editions Atlas a signé avec M. [P] une convention lui confiant, pour une durée indéterminée, la prospection de ses clients sur un secteur géographique au sein de l’arrondissement de [Localité 6].

Le 1er juillet 2011, M. [P] a cessé d’exécuter son contrat.

Le 04 juillet 2011, M. [P] a conclu avec la société Anavéo, une société tierce, un contrat, à durée indéterminée, dénommé « contrat de travail d’attaché commercial exclusif non VRP ».

Par acte du 16 décembre 2011, M. [P] a fait assigner la société Editions Atlas devant le tribunal de grande instance de Sens aux fins notamment de voir prononcer la résiliation du contrat d’agent commercial le liant à la société Edition Atlas aux torts de cette dernière et qu’elle soit condamnée à lui payer diverses sommes au titre de cette résiliation fautive.

Par jugement du 26 août 2015, le tribunal de grande instance de Sens a :

Déclaré irrecevables les conclusions de Monsieur [P] [G] signifiées le 03 décembre 2014 à 09h10 par RPVA ;

Dit que la convention du 20 décembre 2006 est un contrat d’agent commercial ;

Prononcé la résiliation judiciaire de la convention du 20 décembre 2006 aux torts exclusifs de Monsieur [P] [G] ;

Reçu l’exception d’incompétence matérielle soulevée par Editions Atlas SAS s’agissant de la liquidation des astreintes ;

S’est dessaisi au profit du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Sens sur cette demande ;

Condamné Monsieur [P] [G] à payer la somme de 5.000 euros au profit d’Editions Atlas SAS sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

Condamné Monsieur [P] [G] aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de Maître Nathalie Daude, membre de la Selarl Nathalie Daude, avocat au barreau de Sens ;

Débouté les parties de leurs autres demandes ;

Ordonné l’exécution provisoire de la présente décision.

M. [G] [P] a interjeté appel du jugement rendu le 26 août 2015 par le tribunal de grande instance de Sens.

Par arrêt du 3 mai 2018, la cour d’appel de Paris :

Confirmé le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a dit que la convention du 20 décembre 2006 est un contrat d’agent commercial, en ce qu’il a débouté Monsieur [G] [P] de sa demande de restitution de dé-commissionnements, sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés ;

Dit que Monsieur [G] [P] n’a pas le statut d’agent commercial ;

Condamné la SAS Éditions Atlas à payer à Monsieur [G] [P] de la somme de 28.240 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 2011 ;

Condamné la SAS Éditions Atlas à payer à Monsieur [G] [P] la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la SAS Éditions Atlas aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

M. [G] [P] a formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris du 3 mai 2018.

Par arrêt du 02 décembre 2020, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a cassé et annulé, mais seulement en ce qu’il a dit que M. [P] n’a pas le statut d’agent commercial, l’a débouté de ses demandes indemnitaires au titre de la rupture du contrat conclu avec la société Editions Atlas et a statué sur les dépens et sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile, l’arrêt rendu le 03 mai 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Paris.

Par déclaration du 12 mai 2021, Mr [G] [P] a saisi la cour d’appel de Paris.

La saisine tend à la réformation du jugement du tribunal de grande instance de Sens du 26 août 2015 en ce qu’il a :

Prononcé la résiliation judiciaire de la convention du 20 décembre 2006 aux torts exclusifs de Monsieur [P] [G],

Condamné Monsieur [P] [G] à payer la somme de 5.000 euros au profit d’Editions Atlas sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

Condamné Monsieur [P] [G] aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de Madame Nathalie Daude, membre de la Selarl Nathalie Daude, avocat au Barreau de Sens,

Débouté les parties de leurs autres demandes, mais uniquement lorsqu’il déboute Monsieur [G] [P] de ses demandes.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 3 mai 2022, Mr [G] [P] demande à la cour de :

Vu les articles L 134.1 et suivants du code du commerce,

Vu le contrat liant les parties,

Vu les articles 1217 et suivants du code civil, 1231-7 du code civil, 1240 dudit code ;

Vu l’arrêt de cassation partielle, rendu le 2 décembre 2020, par la chambre commerciale financière et économique de la Cour de cassation ;

Statuant dans les limites de celles-ci ;

Déclarer Monsieur [G] [P] recevable et bien fondé en son appel ;

Y faisant droit :

Confirmer le jugement rendu le 26 août 2015, par le tribunal de grande instance de Sens, en ce qu’il a dit que la convention du 20 décembre 2006 est un contrat d’agent commercial ;

Réformer ledit jugement en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire de ladite convention du 20 décembre 2006 aux torts exclusifs de Monsieur [G] [P] et débouté celui-ci de sa demande en paiement de l’indemnité de cessation de son contrat d’agent commercial, de sa demande en paiement de l’indemnité de préavis, et de celle au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau :

Prononcer, pour les motifs sus-énoncés, la résiliation de la convention du 20 décembre 2006, liant les parties, aux torts exclusifs de la société Editions Atlas ;

En conséquence, condamner la SAS Editions Atlas à payer à Monsieur [P]

à titre d’indemnité de cessation de contrat, la somme de 155.232 euros non soumise à TVA ;

à titre d’indemnité de préavis, la somme de 23.207 euros TTC ;

Lesdites sommes avec intérêts à compter du 16 décembre 2011, date de délivrance de l’assignation in introductive d’instance ;

Débouter la société Editions Atlas de toutes demandes contraires ;

Condamner la SAS Editions Atlas à payer à Monsieur [P] la somme de 7.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Débouter ladite société de sa demande pour frais irrépétibles, lesquels resteront à sa charge, en tout état de cause ;

La condamner aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 06 septembre 2021, la société Editions Atlas demande à la cour de :

Vu les articles 1134, 1992 et 2004 du code civil,

Vu le contrat de travail de Monsieur [P],

Confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Sens du 25 aout 2015 en ce qu’il a prononcé la résiliation du contrat du 20 décembre 2006 aux torts exclusifs de Monsieur [P].

Débouter Monsieur [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Subsidiairement, dans l’hypothèse où la Cour prononcerait la révocation du mandat de Monsieur [P] aux torts de la société Editions Atlas, fixer le montant de l’indemnité de rupture à 76.239,46 euros et débouter Monsieur [P] de sa demande de préavis.

Condamner Monsieur [P] au paiement de la somme de 7.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamner Monsieur [P] en tous les dépens dont distraction au profit de Maître Bruno Landon, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de

procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 23 juin 2022.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

L’arrêt de la cour d’appel de Paris a fait l’objet d’une cassation sur la question du statut d’agent commercial qui n’est plus discutée dans le cadre de la présente instance. Le jugement du 26 août 2015 du tribunal de grande instance de Sens avait retenu que la convention du 20 décembre 2006 était un contrat d’agent commercial. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Dans ces conditions, il y a lieu d’examiner les demandes de M. [G] [P] sur le fondement des articles L. 134-11 et 12 du code de commerce, la qualification du contrat d’agent commercial emportant obligatoirement application de ces dispositions, lors de la cessation du contrat.

Sur la résiliation du contrat

M. [G] [P] soutient que :

Lorsque la résiliation procède de l’initiative de l’agent ou lorsqu’elle est sollicitée en justice, l’agent doit bénéficier de l’indemnisation prévue par la loi s’il démontre que la cessation du contrat est justifiée par des «circonstances imputables » à sa mandante.

La société Editions Atlas a modifié le volume de produits confiés à M. [P] ainsi que l’attractivité commerciale des produits en question, ce qui a bouleversé l’activité de M. [P].

La société Editions Atlas a réduit le volume de coupons-réponses mis à disposition de M. [P], modifiant ainsi les conditions d’exécution de son mandat d’agent commercial.

La société Editions Atlas a interdit brutalement à M. [P] de vendre sur des salons thématiques.

La société Editions Atlas a violé ses obligations d’information et de loyauté en fermant son département « fascicules », sans concertation ni information préalable.

La société Editions Atlas répond que :

L’exécution du contrat de M. [P] conclu avec la société Anaveo a débuté le 04 juillet 2011, soit cinq mois avant que M. [P] n’assigne la société Editions Atlas en résiliation de son mandat.

M. [P] s’est donc placé de son plein gré dans une situation qui lui interdit de poursuivre l’exécution du contrat de mandat.

La société Editions Atlas n’a manqué à aucune de ses obligations contractuelles.

M. [P] est mal fondé à reprocher l’inexécution d’une obligation contractuelle qu’elle n’a pas souscrite.

L’article L134-4 du code de commerce dispose que les contrats intervenus entre les agents commerciaux et leurs mandants sont conclus dans l’intérêt commun des parties (alinéa 1), que les rapports entre l’agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de loyauté et un devoir réciproque d’information (alinéa 2), que l’agent commercial doit exécuter son mandat en bon professionnel, et que le mandant doit mettre l’agent commercial en mesure d’exécuter son mandat (alinéa 3).

L’article L 134-12 du même code, dont les dispositions sont d’ordre public, indique qu’en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi, qu’il perd toutefois le droit à réparation s’il n’a pas notifié au mandant, dans un délai d’un an à compter de la cessation du contrat, qu’il entend faire valoir ses droits, et que ses ayants droit bénéficient également du droit à réparation lorsque la cessation du contrat est due au décès de l’agent.

Par ailleurs, l’article L 134-16 prévoit qu’est réputée non écrite toute clause ou convention dérogeant, au détriment de l’agent commercial, aux dispositions de l’article précité.

L’article L134-13 précise toutefois que la réparation prévue à l’article L. 134-12 n’est pas due dans les cas suivants :

1° La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l’agent commercial ;

2° La cessation du contrat résulte de l’initiative de l’agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ou dues à l’âge, l’infirmité ou la maladie de l’agent commercial, par suite desquels la poursuite de son activité ne peut plus être raisonnablement exigée ;

3° Selon un accord avec le mandant, l’agent commercial cède à un tiers les droits et obligations qu’il détient en vertu du contrat d’agence.

Il est admis que la faute grave, privative d’indemnité de rupture, se définit comme celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat et rend impossible le maintien du lien contractuel ; elle se distingue du simple manquement aux obligations contractuelles justifiant la rupture du contrat.

M. [P] a cessé d’exécuter son contrat de sa propre initiative le 1er juillet 2011 et a signé un contrat de travail le 4 juillet 2011.

Il a adressé deux courriers à la société Editions Atlas le 17 mai 2011 et le 30 juin 2011pour dénoncer les conditions d’exercice de son mandat et aux termes desquels il invoque :

— la diminution du nombre de coupons de prospection

— la fermeture du réseau « fascicules »

— l’arrêt de la participation au salon du livre de [Localité 5]

La société Editions Atlas a confié à M. [P] dès le début de son mandat, un fichier clients (article 4 du contrat) existant dans le secteur déterminé au contrat ainsi qu’un état du suivi des comptes clients. Pour aider ses mandataires dans leur activité de démarchage en complément du fichier clients, des coupons publicitaires leur étaient adressés par les clients potentiels intéressés par l’un ou l’autre des produits de la société Editions Atlas.

M. [P] explique que les coupons étaient mis en circulation par la société Atlas dans le cadre de vastes campagnes de publicité dans les médias ce qui assurait la notoriété rapide des produits et le retour des coupons.

M. [P] a versé une attestation de M.[V], ancien directeur commercial des Editions Atlas qui relate «  le changement radical de politique des actionnaires du Groupe qui ont délibérément décidé de stopper la publicité télévision déclencheur des coupons réponse, outil de travail de chaque agent".

La société Editions Atlas expose qu’elle a adressé à M.[P]

— en 2008, 2.238 coupons sur les 2.266 qu’elle avait reçus de ses clients

— en 2009, 2.205 coupons sur les 2.392 qu’elle avait reçus

— en 2010, 1.836 coupons sur les 1.881 qu’elle avait reçus

— en 2011, 1047 coupons sur un semestre

M. [P] allègue également la fermeture en décembre 2010 du département « fascicules » relatif notamment aux encyclopédies vendues sous forme de fascicules, dans le cadre de la vente à domicile, et qui généraient un nombre important de coupons.

La société Editions Atlas justifie que sur le premier semestre 2011, Monsieur [P] disposait d’un catalogue d’environ 30 produits permettant de constituer 70 offres différentes et que des nouveaux produits lui étaient proposés régulièrement.

M. [P] démontre que sur la période 2007 à 2010, il a subi une diminution de 70 % des nouveaux produits mis à sa disposition :

—  2007 : 14 nouveaux produits

—  2008 : 8 nouveaux produits

—  2009 : 3 nouveaux produits

—  2010 : 4 nouveaux produits

Il résulte du rapport de gestion des Editions Atlas de l’année 2011 que « l’activité « Fascicule- courtage » n’a pas réalisé de lancements en 2011 comme prévu contre 4 + 2 flow Packs en 2010. Le courtage poursuit son exploitation mais son activité s’est fortement dégradée en 2011. Le courtage a réalisé un chiffre d’affaires commandes en baisse de 84 % par rapport à 2010. Le réseau comprend environ 20 producteurs pour 105 un an plus tôt. En termes de résultats financiers, l’activité de courtage demeure négative. »

M. [P] verse plusieurs attestations concordantes dont celle de Mme [S], agent commercial des Editions Atlas pendant 19 ans qui témoigne : « la plus grande partie du chiffre d’affaires était réalisé avec les nouveaux produits lancés par les Editions Atlas (presse publicité télévision). La distribution des coupons « fascicules » maison de presse était essentielle à la continuité de nos agences. De nombreuses références, issues du catalogue destiné à la clientèle du fichier correspondaient à des collections anciennes ou recyclées ».

Il résulte de ces éléments que la diminution des nouveaux produits développés à titre exclusif a engendré la production de coupons-réponses portant sur des collections à plus faible rentabilité issus soit du réseau de vente par correspondance ou de partenaires extérieurs entraînant un taux de transformation négligeable.

M. [P] s’est plaint auprès des Editions Atlas de la suppression en 2011 de la participation de la société au salon du livre de [Localité 5] auquel il était présent depuis 2007 et qui générait des affaires.

La société Editions Atlas lui a répondu que le motif reposait sur la réduction de deux jours de l’événement dont il n’était pas acquis qu’il était pourvoyeur de chiffre d’affaires.

M. [P] reproche une absence d’information préalable des agents par les Editions Atlas lors de la fermeture définitive du département « fascicules » fin décembre 2010 alors que ce secteur d’activités représentait une part substantielle des produits que les agents étaient en charge de vendre alors que l’article R134-2 du code de commerce précise que le mandat avise l’agent commercial dans un délai raisonnable, notamment s’il prévoit que le volume des opérations sera sensiblement inférieur à celui auquel l’agent commercial aurait pu normalement s’attendre…

La société Editions Atlas oppose à M. [P] une augmentation de son chiffre d’affaires de 2007 et 2011.

L’évolution de la situation de M.[P] à compter de 2007 à 2011 est la suivante :

Chiffre d’affaires charges résultat/an par mois

2007 58.523 20.725 37.797 3.149 euros

2008 59.611 32.473 27.139 2.261 euros

2009 79.467 54.965 24.503 2.041 euros

2010 70.286 44.862 25.370 2.114 euros

2011 34.983 28.584 6.101 1016 euros

(6mois)

M. [P] produit ses déclarations de revenus démontrant que si le montant de ses commissions a augmenté, l’extension importante de sa zone d’intervention a alourdi ses charges ce qui a entraîné une dégradation de sa situation financière.

M. [P] verse une attestation de M.[Y], agent commercial, corroborant la dégradation des conditions d’exercice des agents commerciaux : « ' cette dégradation en quantité des nouveaux clients sur mon secteur géographique (d’origine) m’obligeait à me déplacer ' parfois à plus de 650 km de mon domicile et cela pendant plus de deux semaines par mois pendant les deux dernières années (2010-2011) afin de compenser d’éventuelles pertes sur ma production. Le coût et la gestion du portefeuille clients ' rendaient mon activité impossible. »

Dès lors, si la société Editions Atlas a connu un bouleversement économique nécessitant qu’elle se restructure commercialement et financièrement, M.[P] rapporte la preuve que cette évolution a engendré une dégradation notable des modalités d’exercice de son activité professionnelle et de ses revenus malgré un chiffre d’affaires en augmentation. Il est ainsi démontré que la société des éditions Atlas n’a pas mis M. [P] en mesure d’exécuter son mandat dans les conditions antérieures et ce sans l’aviser des différentes mesures prises ayant une incidence sur son activité.

Dans ces conditions, le fait pour M. [P], confronté à une impossibilité de maintenir une activité lui permettant de subvenir à ses charges, de s’être dirigé en juillet 2011 vers un emploi salarié n’est pas constitutif d’une faute grave privative du droit à indemnisation.

Au vu de ces éléments, la résiliation de la convention du 20 décembre 2006 sera prononcée aux torts exclusifs de la société des Editions Atlas.

Sur l’indemnisation de M. [P]

Sur l’indemnité de rupture

L’indemnité de rupture est destinée à réparer le préjudice subi par l’agent du fait de la perte pour l’avenir des revenus tirés de l’exploitation de la clientèle commune. Son quantum n’étant pas réglementé, il convient de fixer son montant en fonction des circonstances spécifiques de la cause, même s’il existe un usage reconnu qui consiste à accorder l’équivalent de deux années de commissions.

En l’espèce, compte tenu de la durée de la mission d’agent commercial et du maintien par M. [P] d’un chiffre d’affaires constant, il n’existe pas de raison de s’écarter de cet usage.

L’indemnité sera calculée sur la moyenne des commissions perçues lors des trois dernières années complètes d’exercice de l’activité.

M. [P] justifie avoir perçu de 2008 à 2010 un total de commissions, primes et bonus de 204.612,28 € HT. outre les décommissions retenues par la cour d’appel de Paris à l’encontre de la société des Editions Atlas pour un montant de 28.240,00 € ce qui fait un total de 232.852 € euros : 36 mois = 6.468 euros /mois.

La société des Editions Atlas devra verser à M. [P] la somme de 6.468 euros X 24 mois = 155 232 € au titre de l’indemnité de rupture.

Sur l’indemnité de préavis

En application de l’article L. 134-11, Monsieur [P] est fondé à réclamer un préavis égal à trois mois, le contrat ayant duré plus de trois ans.

M. [P] a mis fin à son activité d’agent commercial, sans respecter de délai. Cependant, dans la mesure où la société des éditions Atlas n’a pas mis M. [P] en mesure d’exécuter son mandat dans les conditions prévues contractuellement et qu’aucune faute grave ne peut être reproché à l’agent commercial, celui-ci a droit au versement de l’indemnité de préavis suivante :

6.468 € X 3 mois = 19.404 € HT soit 23.207€ TTC

Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 2011, date de l’assignation en justice.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions de première instance relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront infirmées.

La société des Editions Atlas qui succombe sera condamnée aux dépens de la procédure et devra verser à M. [G] [P] la somme de 7000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire de la convention du 20 décembre 2006 aux torts exclusifs de Monsieur [P] [G], rejeté les demandes d’indemnisation de M. [G] [P], sur les frais irrépétibles et les dépens,

Le confirme en ce qu’il a dit que la convention du 20 décembre 2006 est un contrat d’agent commercial,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Prononce la résiliation de la convention du 20 décembre 2006 aux torts exclusifs de la société des Editions Atlas,

Condamne la société des Editions Atlas à verser à M. [P] la somme de 155 232 € au titre de l’indemnité de rupture,

Condamne la société des Editions Atlas à verser à M. [P] la somme de 23.207€ TTC au titre de l’indemnité de préavis,

Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 2011, date de l’assignation en justice,

Condamne la société Editions Atlas à verser à M. [G] [P] la somme de 7000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,

Condamne la société Editions Atlas aux dépens de la procédure.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

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